M. le président. La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports. Monsieur le sénateur Dossus, à écouter votre intervention, je me dis que nous pourrions tomber d’accord si nous étions dans un pays plus consensuel : nous partageons, en effet, les mêmes objectifs. Vous l’avez dit : vous êtes pour que les élèves aillent à l’école. Vous avez dit aussi que vous étiez pour des protocoles sanitaires stricts. Un jour, des historiens feront le bilan de tout ce qui a été dit, dans les hémicycles des deux chambres, sur ces sujets ; nous verrons, alors, où est la cohérence… (Oh ! sur des travées des groupes GEST, SER, CRCE et Les Républicains.)
Mme Pascale Gruny. Quelle agressivité !
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. Pour ce qui est du protocole sanitaire, il a été élaboré au mois de juillet. Il est public depuis lors. Sa logique est celle d’un curseur ; autrement dit, nous sommes capables d’en accentuer certains éléments ou, au contraire, de revenir en arrière en fonction de la situation épidémique. C’est ainsi qu’un « protocole sanitaire 1 » a été mis en œuvre en septembre et octobre. Ce protocole – je l’affirme – a été un succès. Il fait de nous l’un des rares pays qui ont réussi à faire revenir en classe tous leurs professeurs et tous leurs élèves. Regardez les courbes épidémiques récentes, y compris celles de Santé publique France : c’est pendant les périodes de vacances que la contamination est la plus forte. Et c’est justement en septembre et octobre que nous avons pu obtenir le succès dont je viens de parler, grâce au travail de tous – il ne s’agit pas de la personne du ministre : ce sont les un million de personnels de l’éducation nationale qui ont fait respecter le protocole sanitaire et ont permis ces résultats.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Tout va bien !
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. Avec l’accélération de la circulation du virus, nous prenons, à la rentrée, des mesures plus strictes encore. Dès la rentrée, j’ai dit que des assouplissements seraient possibles ; nous avons d’ailleurs mis en œuvre de tels assouplissements la semaine dernière.
Évidemment, ce genre de situations présente des inconvénients, qu’il est assez facile, pour une opposition, de souligner. Néanmoins, sur le terrain, nous avons réussi à ce que la plupart des écoles, des collèges et des lycées puissent continuer à fonctionner de façon aussi normale que possible.
Vous dites qu’il y a une contestation ? Il y a eu 8,38 % de grévistes la semaine dernière. Je sais bien que vous pensez que, en période de crise sanitaire, il faut créer davantage de conflictualité politique ;… (Protestations sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. Christian Cambon. Ces propos sont de trop !
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. … j’aimerais, moi, qu’il y en ait moins et que vous regardiez les performances de la France, qui sont, au contraire de ce que vous dites, bien meilleures que celles de la plupart des pays comparables. (Protestations sur des travées des groupes GEST, SER et Les Républicains. – Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Thomas Dossus, pour la réplique.
M. Thomas Dossus. Monsieur le ministre, les chiffres de Santé publique France sont bien supérieurs aux chiffres de votre ministère. Donnez-vous enfin les moyens budgétaires de faire appliquer les protocoles et d’assurer l’indispensable service public de l’éducation, « quoi qu’il en coûte » ! (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
nouvelles mesures sanitaires envisagées dans les lycées
M. le président. La parole est à Mme Colette Mélot, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
Mme Colette Mélot. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
Monsieur le ministre, la deuxième vague est là, et les Français sont inquiets. Des mesures fortes ont été prises ; les établissements scolaires, lycées, collèges, écoles, restent ouverts pour assurer la continuité des enseignements et permettre aux élèves de préparer leur avenir malgré l’épidémie. Nous considérons que cette continuité éducative est essentielle, pour la raison évidente que je viens d’évoquer, mais aussi pour permettre aux parents de continuer à travailler, que ce soit à distance ou, dans les situations qui l’exigent, en présentiel.
Pour autant, le risque sanitaire ne peut être éludé. Les établissements scolaires restent parmi les principaux lieux de diffusion du virus, en particulier lors des temps de restauration, durant lesquels les élèves de différentes classes sont en contact rapproché sans masques.
Pour résoudre cette difficile équation et faire en sorte d’avoir tous les bénéfices de la scolarité sans les risques de transmission du virus aux familles, le directeur général de l’Assistance publique – Hôpitaux de Paris (AP-HP) annonce être prêt à contribuer au dépistage des lycéens via des tests rapides. En effet, les études scientifiques sont formelles : si les adolescents sont moins menacés par la covid-19, ils sont susceptibles de transmettre le virus tout autant que les adultes, mais seraient asymptomatiques dans 50 % des cas. Ces informations nous conduisent à envisager des campagnes de dépistage massif parmi les lycéens et collégiens.
Monsieur le ministre, vous avez annoncé le déploiement de un million de tests destinés aux enseignants. Pour que cette deuxième vague s’estompe rapidement, pour que les commerces de proximité et la vie sociale retrouvent leurs droits, pour que les effets du confinement ne soient pas neutralisés par la diffusion du virus dans les établissements scolaires et, par ce biais, dans les familles, nous pensons qu’il faut aller plus loin. La présidente de la région Île-de-France a d’ores et déjà annoncé la mise à disposition prochaine de 100 000 tests rapides dans les lycées afin de tester les personnels, ainsi que les élèves disposant d’une autorisation parentale.
Le Gouvernement est-il prêt, monsieur le ministre, à envisager une campagne de dépistage généralisé auprès des lycéens et des collégiens, en partenariat avec les hôpitaux et les collectivités locales volontaires ? (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports. Madame la sénatrice Mélot, la politique de tests est bel et bien l’un des points importants de notre stratégie sanitaire pour les écoles, les collèges et les lycées. Nous ne partons pas de zéro : il y a déjà une politique de tests qui permet de tracer et d’alerter les membres d’une chaîne de contamination. C’est cette politique que nous avons mise en œuvre en septembre et en octobre, je le rappelle ; c’est sur ce fondement que nous avons fermé régulièrement des écoles, des collèges et des lycées.
Dans le nouveau contexte, nous voulons approfondir cette politique de tests. Avec le ministre de la santé et des solidarités, nous avons annoncé – vous l’avez rappelé – le déploiement prioritaire de un million de tests dans le milieu scolaire, de façon que, avec toute une série d’outils complémentaires, ceux de l’administration de la santé, mais aussi de l’éducation nationale, voire des collectivités locales, nous puissions ensemble, donc, aller plus loin. Ces outils sont en train d’être déployé en ce moment même. Dès à présent, vous allez voir le nombre de tests augmenter.
Il est important que nous continuions à travailler avec les collectivités locales ; il est important aussi que chacun, dans son champ de compétences, fasse ce qu’il a à faire en matière de sécurité sanitaire. Rappelons que tout ce qui a trait au nettoyage, à l’hygiène, au brassage d’air, relève des collectivités locales, en étroite collaboration avec l’éducation nationale. J’appelle surtout les régions et les départements à être très actifs sur ces enjeux, y compris sur l’équipement informatique, domaine dans lequel nous avons fait de très belles avancées ces derniers mois et ces dernières semaines grâce à cette coopération.
Concernant les tests, tout doit être fait, évidemment, en lien avec les agences régionales de santé. Les bonnes volontés sont bienvenues, mais nous avons les moyens de développer les tests nécessaires tout au long des prochaines semaines. Je suis confiant dans cet aspect des choses, et je rappellerai – cela a souvent été dit – qu’il n’y a pas une seule réponse à la crise, mais une série d’éléments de réponse. Les tests en font partie – c’est un point important –, de même que les mesures barrières, que nous avons renforcées dans le « protocole sanitaire 2 » ou le dédoublement, quand il est nécessaire. Rappelons par ailleurs que chaque établissement est un cas particulier ; d’où les souplesses locales que nous avons prévues. (Applaudissements sur des travées du groupe RDPI.)
situation des producteurs de fleurs coupées
M. le président. La parole est à M. Jean Pierre Vogel, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean Pierre Vogel. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’économie, des finances et de la relance.
Monsieur le ministre, le secteur de l’horticulture représente 3 300 entreprises et 20 000 emplois. Il pèse 1,64 milliard d’euros de chiffres d’affaires, mais l’horticulture française est aujourd’hui en danger de mort.
En effet, le gouvernement français est le seul en Europe à avoir interdit la vente de fleurs coupées, tous créneaux de distribution confondus.
Non contents d’avoir fermé nos fleuristes et commerces de proximité, vous interdisez aux grandes surfaces de vendre des fleurs, bien que celles-ci soient des produits agricoles.
Dans mon département, l’entreprise Bigot, premier producteur de fleurs coupées en France, se bat au quotidien pour sa survie et celle de ses 200 emplois. Le recours au chômage partiel est faible, car il faut continuer à entretenir les cultures. Déjà fragilisée par le premier confinement, l’entreprise est très préoccupée par la gravité de la situation.
Entendez-vous, monsieur le ministre, le cri de détresse de ces chefs d’entreprise et de leurs salariés ?
Sans débouchés, l’entreprise Bigot détruit un million de tiges de fleurs par semaine. Pensez-vous que cela soit tenable, économiquement et humainement ? Le ministre de l’agriculture annonçait, en juin, un dispositif d’aide exceptionnelle de 25 millions d’euros pour le maintien de la filière. Aujourd’hui, pas un euro n’a été versé aux entreprises concernées, et ce dispositif ciblé n’est pas reconduit à l’occasion du second confinement, qui va causer des pertes abyssales. Sans intervention rapide, c’est la mort assurée pour les entreprises de ce secteur !
Monsieur le ministre, envisagez-vous de lever sans délai cette interdiction afin de sauver cette filière agricole ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des petites et moyennes entreprises.
M. Alain Griset, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargé des petites et moyennes entreprises. Monsieur le sénateur Vogel, comme vous l’avez dit, les producteurs de fleurs coupées représentent environ 3 000 entreprises et plus de 20 000 salariés. Bien que leur activité n’ait jamais cessé pendant le confinement, ils se retrouvent aujourd’hui dans une situation très difficile – nous le savons –, car ils continuent à produire et n’ont presque plus de débouchés de vente.
Face à cette situation, les producteurs sont obligés de détruire une partie des fleurs – vous l’avez dit, monsieur le sénateur –, ce qui est effectivement regrettable en tous points. Nous suivons leur situation de manière très régulière. Ce matin même, sans savoir que j’aurais l’occasion de vous répondre, mes équipes se sont entretenues avec l’entreprise Bigot, leader en France des fleurs coupées, installée dans votre département. Je tiens à rappeler que les producteurs bénéficient des mesures exceptionnelles mises en place par l’État : activité partielle, prêt garanti par l’État, exonérations de cotisations sociales et, pour les entreprises dont l’effectif est inférieur ou égal à 50 salariés – Bigot n’est pas dans ce cas –, fonds de solidarité.
Notre objectif est de trouver des solutions pour que les producteurs puissent reprendre une activité de vente. Je me suis d’ailleurs entretenu à ce sujet mardi dernier avec Christiane Lambert, la présidente de la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA). Mon collègue Julien Denormandie est à l’écoute de la filière pour lui apporter un accompagnement et une aide spécifiques, à l’exemple de ce qui a été fait avec les producteurs de pommes de terre, les producteurs de cidre et les brasseurs. Des échanges sont prévus dans les prochains jours. Je me suis entretenu également avec la branche des fleuristes afin que, dès la reprise, priorité soit donnée à la filière française.
M. le président. La parole est à M. Jean Pierre Vogel, pour la réplique.
M. Jean Pierre Vogel. J’entends bien, monsieur le ministre, mais la fleur-tige est le seul produit agricole périssable qui aujourd’hui n’est pas autorisé à la vente. Ce qui n’est pas vendu va à la poubelle !
La fleur coupée doit rapidement réintégrer les circuits de distribution, à sa place habituelle, chez les fleuristes et au milieu des rayons de fruits et légumes, faute de quoi nous allons tout droit vers un désastre économique pour tous ces producteurs qui œuvrent au cœur de nos territoires et qui perpétuent une filière d’excellence. En campant sur vos positions, vous aurez la lourde responsabilité d’envoyer les salariés à l’abattoir et les entreprises à l’équarrissage ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
respect du parlement et exemple de la couronne malgache
M. le président. La parole est à Mme Annick Billon, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
Mme Annick Billon. Ma question s’adresse à M. le Premier ministre.
Le 8 juillet dernier, le président de notre groupe, Hervé Marseille, vous interrogeait sur votre volonté de rendre au Parlement sa place centrale au sein de nos institutions. Vous vous étiez voulu rassurant. Depuis, peu de changements. Le recours aux ordonnances bat des records – c’est l’évitement permanent. Pour ce qui concerne l’état d’urgence sanitaire, le Sénat avait demandé que le Parlement puisse au moins approuver le recours au confinement – nouvelle fin de non-recevoir.
Le transfert discret à Madagascar d’une couronne jusqu’à présent conservée au musée de l’Armée illustre une nouvelle fois ce mépris. En effet, le principe d’inaliénabilité des biens publics impose l’intervention du législateur pour tout transfert de ce type. Or nous avons appris le retour de cette couronne le lendemain de l’adoption par le Sénat du projet de loi entérinant le retour de certains biens culturels au Bénin et au Sénégal. Le prince dispose, le Parlement entérine !
Comment voulez-vous que le Parlement ne s’inquiète pas ? Des décisions cruciales ont été prises ce matin en conseil de défense, nouvelle instance qui court-circuite désormais le conseil des ministres. Vous êtes devant nous cet après-midi, mais nous ne prendrons connaissance de ces décisions que ce soir, en regardant la télévision.
Monsieur le Premier ministre, tout cela nous conduit malheureusement à devoir de nouveau vous poser la question que nous vous posions à votre entrée en fonctions : dans votre pratique institutionnelle, quand allez-vous permettre aux assemblées de jouer leur rôle ? Quand allez-vous vous appuyer sur les élus, qui sont les représentants des citoyens ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de la culture.
Mme Roselyne Bachelot, ministre de la culture. Madame la sénatrice, je vous répondrai sur la question de la restitution de l’ornement du dais de la reine Ranavalona III de Madagascar. Comme ancienne parlementaire, élue et réélue cinq fois (Murmures sur les travées du groupe Les Républicains.), je crois avoir à cœur autant que vous le respect des droits du Parlement, et je me suis toujours employée à les respecter. Le travail que nous avons fait ensemble sur la restitution de biens culturels au Sénégal et au Bénin a été particulièrement fructueux ; je vous remercie d’ailleurs pour le vote unanime qui a été exprimé dans les deux chambres, grâce à un travail de concertation extrêmement fourni et approfondi.
Pour ce qui concerne cet ornement de dais, un petit mot d’histoire, peut-être, pour dire qu’il ne s’agit pas d’une couronne de valeur précieuse : il n’y a aucun joyau sur cette couronne.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Répondez à la question !
Mme Roselyne Bachelot, ministre. C’est l’ornement en zinc d’un auvent sous lequel la reine Ranavalona III a appelé les Malgaches à la révolte contre les colonisateurs français puis a reconnu sa défaite.
Cet objet a donc surtout une valeur symbolique pour le peuple malagasy. Il ne s’agit en aucun cas d’une restitution, mais d’une convention de dépôt (Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains.), selon un processus dont je me suis longuement expliquée. Rien n’a été caché au Parlement ; rien n’a été caché au Sénat. J’ai d’ailleurs écrit à nouveau au président de votre commission de la culture, Laurent Lafon. Et je m’en suis une nouvelle fois expliquée en défendant le projet de loi de finances.
Bien entendu, le principe d’inaliénabilité sera respecté. Si nous devions décider d’une restitution au gouvernement de Madagascar, cette question reviendrait devant vous, car seule une loi peut contrevenir à ce principe. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à Mme Annick Billon, pour la réplique.
Mme Annick Billon. Merci, madame la ministre, pour votre réponse.
Il n’était bien sûr pas question pour moi de remettre en cause votre travail ni celui de notre rapporteure, Catherine Morin-Desailly, sur ce sujet. Et je dois dire que la qualité des œuvres et des biens culturels ne se mesure évidemment pas, à mes yeux, au poids d’or ou à la quantité de diamants qu’ils contiennent.
Mme Annick Billon. Je voudrais quand même rappeler que la liste des dysfonctionnements qui émaillent les relations entre le Parlement et l’exécutif est extrêmement longue. Je ne nie pas la gravité de la situation économique, financière et sociale ; néanmoins, monsieur le Premier ministre, pour qu’une décision soit acceptée et appliquée, elle doit être cohérente, débattue, partagée et conforme aux procédures. Cela est valable pour le retour de biens culturels comme pour tous les sujets dont nous débattons dans cet hémicycle. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)
perspectives de vaccination contre la covid-19
M. le président. La parole est à M. Gérard Lahellec, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste. (M. Pierre Laurent applaudit.)
M. Gérard Lahellec. Ma question s’adresse à M. le ministre des solidarités et de la santé.
Comme cela a été dit il y a un instant, la découverte d’un vaccin contre la covid-19 fait naître une lueur d’espoir dans le climat pesant que nous continuons de traverser.
Il est sûrement trop tôt pour confirmer tous les effets bénéfiques qui en sont attendus, mais la course est lancée ; il faut qu’à l’arrivée il y ait assez de doses pour tout le monde, avec une méthode et une approche permettant d’établir un climat de confiance ne laissant personne sur le bord de la route.
Quelle que soit la manière dont s’organisera la diffusion du vaccin, il faut anticiper en tirant tous les enseignements des erreurs du passé.
La Haute Autorité de santé a formulé, en juillet, ses recommandations pour la mise en place d’une stratégie vaccinale. Il faut donc maintenant se préparer. Et quand on voit les errements qui ont caractérisé la gestion du vaccin contre la grippe, je dois dire que nous ne sommes pas complètement rassurés…
Ma question est simple : puisqu’il faut anticiper l’arrivée sur le marché d’un vaccin contre la covid-19, que pensez-vous de notre proposition visant à mettre en place un pôle public de distribution du vaccin ? Et, en tout cas, quelles sont les dispositions que vous envisagez pour garantir la sécurité, la transparence, l’absence de spéculation des marchés financiers et, surtout, la prise en charge à 100 % par la sécurité sociale du coût des doses de ce vaccin ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE et sur des travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État chargé de l’enfance et des familles.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l’enfance et des familles. Monsieur le sénateur, vous l’avez rappelé, la Haute Autorité de santé a émis, ces derniers mois, des recommandations pour l’élaboration d’une stratégie quant à la diffusion de ce vaccin. Elle aura de nouveau l’occasion de se prononcer et de formuler des recommandations qui nous permettront de définir la politique publique en la matière en tenant compte notamment de la disponibilité des vaccins. Si aujourd’hui, en effet, nous parlons du vaccin développé par un laboratoire en particulier, vous n’êtes pas sans savoir que d’autres laboratoires en sont à une phase avancée, autrement dit à la phase 3, du développement d’un vaccin – je pense à AstraZeneca, avec lequel la Commission européenne avait passé dès l’été un contrat de précommande de doses, ou à Johnson & Johnson.
La Haute Autorité de santé devra donc, dans son avis, tenir compte de la disponibilité de chacun de ces vaccins, mais également de leur profil spécifique – deux doses pour Pfizer, une seule dose pour un certain nombre d’autres vaccins.
Vous voyez qu’il y a encore un certain nombre de paramètres que nous ne connaissons pas, que nous ne maîtrisons pas, et sur lesquels la Haute Autorité de santé aura à se prononcer afin d’élaborer cette stratégie que, comme nous, vous appelez de vos vœux. Le Gouvernement – je vous l’ai déjà dit – anticipe, concernant notamment tous les aspects opérationnels et techniques. J’évoquais la précommande de matériel permettant de maintenir à moins 80 degrés ce vaccin développé par Pfizer – les autres vaccins ne seront d’ailleurs peut-être pas sujets à de telles conditions de conservation ; nous attendons les résultats des recherches.
Permettez-moi enfin, monsieur le sénateur, d’ouvrir un petit peu le champ de votre question à l’international. La question de la disponibilité et de l’universalité de ce vaccin au niveau mondial est aussi une préoccupation que le Président de la République a exprimée dès le 24 avril dernier en parlant de « bien public mondial ». Telle est la voie que nous nous évertuerons à suivre et à promouvoir au niveau international.
M. le président. La parole est à M. Gérard Lahellec, pour la réplique.
M. Gérard Lahellec. Un mot pour dire qu’il est temps de se préparer ! Nous attendons des dispositions très précises. Évitons – je vous en supplie – d’avoir de nouveau un train de retard. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)
chavirage de canots de clandestins au large de cayenne
M. le président. La parole est à Mme Marie-Laure Phinera-Horth, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
Mme Marie-Laure Phinera-Horth. Ma question s’adresse au ministre de l’intérieur et porte sur l’immigration clandestine en Guyane.
La semaine dernière, une embarcation de fortune transportant une vingtaine de passagers clandestins a chaviré au large de Cayenne. Si certains d’entre eux ont pu regagner le rivage par leurs propres moyens avant de disparaître dans la nature, il a fallu l’intervention de l’armée, de la Marine nationale et des pompiers pour porter secours aux autres occupants de l’embarcation, parfois très jeunes. Je tiens d’abord à saluer l’intervention rapide des militaires et des pompiers, qui ont permis d’éviter un véritable drame ; mais pour combien de temps encore ?
Personne ne peut ignorer que la Guyane est victime d’une forte immigration, en raison de ses 378 kilomètres de littoral et de ses frontières fluviales avec le Suriname et le Brésil. À l’instar de ceux qui tentent de traverser la Méditerranée, beaucoup de clandestins entrent en Guyane au péril de leur vie. Nous avons déjà connu des drames.
Bien qu’attachés à notre tradition d’accueil, nous ne pouvons plus absorber cet afflux massif. En effet, les structures d’accueil, comme les écoles, déjà en nombre insuffisant pour nos compatriotes, ne peuvent plus faire face. Les squats et bidonvilles, dans lesquels cohabitent l’insalubrité, la violence et souvent la mort, ne peuvent être le quotidien de nos compatriotes exaspérés.
Monsieur le ministre, nous avons bien compris que les différentes mesures prises jusqu’à présent pour juguler l’immigration en Guyane n’ont pu pleinement porter leurs fruits et que les moyens mis en œuvre pour garantir l’éloignement des personnes expulsées sont d’une portée limitée face à l’étendue de ces flux. C’est pourquoi je souhaiterais savoir, monsieur le ministre, comment le Gouvernement entend réaffirmer les pouvoirs régaliens de l’État en Guyane et ainsi mieux y contrôler l’immigration clandestine. Je vous remercie.
M. le président. La parole est à M. le ministre des outre-mer.
M. Sébastien Lecornu, ministre des outre-mer. Madame la sénatrice, vous avez rappelé les faits terribles du 3 novembre dernier. À mon tour, au nom du Gouvernement, de rendre hommage aux forces armées, aux forces de sécurité intérieure, aux pompiers et aux services de secours qui se sont déployés avec beaucoup d’efficacité. J’informe également le Sénat que le procureur de la République de Cayenne a ouvert une information judiciaire et qu’une personne a été placée en garde à vue, puis en détention provisoire. Je l’affirme ici, au Sénat : la réponse de l’État de droit, c’est aussi que justice sera faite contre ces passeurs, qui, malheureusement et encore trop souvent – vous l’avez rappelé –, monnayent leurs services.
Ces éléments m’amènent à évoquer, de manière plus générale, la réponse de l’État en matière de lutte contre l’immigration en Guyane. Un enjeu, que vous connaissez mieux que quiconque, madame la sénatrice, est celui de l’échelle du territoire : avec pratiquement 1 300 kilomètres de frontières, ce département français est aussi grand que le Portugal. Pour autant, la maîtrise de la frontière est inédite ces derniers mois, et pour cause ! Nous avons fermé la frontière de manière totale, à la suite de la crise du covid-19. Jamais un gouvernement n’avait déployé autant de forces sur ses frontières, expliquant les 2 500 refus d’entrée sur le territoire français au seul premier semestre de cette année, contre 111 en 2018 – retenez ce chiffre ! L’effort est constant et il produit ses effets.
Néanmoins, nous devons, à l’avenir, aller plus loin. Premièrement, il nous faut reprendre l’opération Harpie à haute intensité. L’orpaillage constitue l’un des motifs de l’immigration irrégulière. Depuis maintenant plusieurs semaines, le programme Harpie est de nouveau opérationnel.
Deuxièmement, nous devons améliorer la réponse sur l’action de l’État en mer, puisque lorsque nous tenons bien les frontières terrestres, nous constatons, malheureusement, des tentatives de contournement par le grand large, comme ce fut le cas le 3 novembre dernier. Voilà qui pose aussi la question de la lutte contre la pêche illégale. Sur ce point aussi, les forces armées sont déployées avec des instructions claires, qui ont été données pour organiser des opérations spécifiques, notamment sur les embouchures de l’Oyapock.
La coopération diplomatique avec les États de la zone compte tout autant. J’ai demandé au préfet de Guyane de réunir les maires de votre territoire pour informer l’ensemble des élus municipaux, notamment les nouveaux maires, des actions qui seront entreprises en la matière.
protocole sanitaire dans les écoles