M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 78, présenté par Mmes Lubin et de La Gontrie, MM. Durain, Kanner et Bourgi, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie et Sueur, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 7
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de deux mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport concernant les dispositions qu’il a prises pour protéger les personnes sans domicile fixe de l’épidémie de la covid-19 et veiller au respect de leurs besoins essentiels dans le respect de leurs droits fondamentaux.
La parole est à Mme Monique Lubin.
Mme Monique Lubin. Il s’agit de rappeler la situation des personnes sans domicile fixe, qui ont bien évidemment les plus grandes difficultés à respecter les consignes sanitaires. C’est aussi une façon d’appeler l’attention du Gouvernement sur la situation de ces personnes et de lui demander de faire en sorte que tout soit mis en œuvre pour les protéger au maximum.
M. le président. L’amendement n° 46 rectifié, présenté par Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 7
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet un rapport au Parlement, avant le 16 décembre 2020, sur les solutions concrètes mises en œuvre pour protéger les personnes sans domicile fixe de l’épidémie de covid-19, en particulier depuis l’instauration du couvre-feu le 17 octobre 2020.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Mme Éliane Assassi. Nous connaissons le destin de ces amendements, mais je pense qu’il est important d’insister sur la situation des personnes très vulnérables que sont les sans domicile fixe dans le contexte, bien évidemment, de l’état d’urgence, notamment depuis l’instauration du couvre-feu. Il serait effectivement intéressant que le Gouvernement puisse nous dire quelles solutions il préconise pour répondre à la situation catastrophique de ces personnes au regard de la situation sanitaire dans notre pays.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Bas, rapporteur. Sans surprise, l’avis de la commission est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Sur le fond, nous souscrivons bien évidemment à l’ensemble des propos qui viennent d’être tenus.
Dès le cours de l’année 2020, nous avons prolongé la trêve hivernale jusqu’en juillet.
En outre, comme le Premier ministre l’a annoncé la semaine dernière, nous avons maintenu la campagne hivernale, et nous l’avons avancée au 18 octobre. Les places d’hébergement qui sont prévues pour l’hiver sont donc d’ores et déjà en cours d’ouverture.
Par ailleurs, le Gouvernement a procédé, cet été, à l’expédition par La Poste de 53 millions de masques lavables pour les foyers modestes. Cette opération est en cours de renouvellement. Ce seront à nouveau plus de 50 millions de masques qui vont arriver dans les boîtes aux lettres d’ici à la mi-novembre, une troisième opération étant d’ores et déjà prévue.
Pour les personnes sans abri, près de 52 millions de masques jetables ont été expédiés dans les préfectures à la fin du mois d’août, pour une distribution via les CCAS et les associations. Cet envoi va être reproduit, dans les mêmes volumes, avec de premières livraisons prévues au 16 novembre, puis autant de fois que nécessaire.
Mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, j’ai déjà évoqué les consignes qui ont été passées aux forces de l’ordre. Les dérogations figurant dans le décret prévoient évidemment que l’ensemble des travailleurs sociaux qui interviennent auprès de ces personnes vulnérables ne puissent être empêchés dans le soutien qu’ils apportent aux sans-abri.
Cela dit, le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces deux amendements.
M. le président. L’amendement n° 79, présenté par Mmes Lubin et de La Gontrie, MM. Durain, Kanner et Bourgi, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie et Sueur, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 7
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de deux mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport concernant les mesures qu’il a prises afin de contrôler et de prévenir l’enfermement abusif des patients en psychiatrie sous prétexte d’endiguement de l’épidémie de la covid-19.
La parole est à Mme Monique Lubin.
Mme Monique Lubin. Lors de la mise en œuvre du premier confinement a été déplorée, dans certains établissements psychiatriques, une « confusion absolue entre les notions de “confinement sanitaire” et d’“isolement psychiatrique” », aboutissant à des privations de liberté injustifiées et illégales selon le Contrôleur général des lieux de privation de liberté.
La prorogation de l’état d’urgence sanitaire ne doit pas être l’occasion d’un retour à de telles dérives. C’est la raison pour laquelle nous demandons au Gouvernement de nous apporter des éclairages sur les mesures qu’il compte mettre en œuvre pour les éviter.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Bas, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. C’est un sujet important que vous soulevez, madame la sénatrice. L’objectif global du respect absolu des droits des patients pris en charge dans les établissements psychiatriques est évidemment un objectif auquel le Gouvernement souscrit pleinement.
Nous regrettons les confusions entre le confinement sanitaire et l’isolement psychiatrique qui auraient pu être faites par quelques-uns à l’occasion de la crise de la covid-19, justement dénoncées par le Contrôleur général des lieux de privation de liberté. Le Gouvernement assure, depuis le début de la crise, un suivi rapproché des mesures mises en place par ces établissements de santé dans le cadre d’une cellule de crise nationale, qui rassemble les différents acteurs.
Consécutif à une décision du Conseil constitutionnel du 19 juin dernier, l’article 42 du projet de loi de financement de la sécurité sociale, dont l’examen va bientôt débuter au sein de cette assemblée, précise les dispositions du code de la santé permettant de mieux encadrer juridiquement le recours aux pratiques d’isolement et de contention en psychiatrie. Elles entreront en vigueur à compter du 1er janvier prochain.
Les dispositions proposées par le Gouvernement répondent aux exigences posées par le Conseil constitutionnel, en posant justement des durées maximales et en définissant les modalités d’encadrement et de contrôle des mesures d’isolement et de contention prises dans le cas des soins sans consentement. Elles visent également à accroître les garanties en matière de droits des patients, en renforçant la motivation des décisions médicales, mais également leur traçabilité tant au sein du dossier médical du patient qu’au sein du registre de suivi de ces mesures.
En réalité, par ces nouvelles dispositions, la France se met en conformité avec les conventions internationales, en développant un meilleur contrôle et en renforçant la politique active de réduction de ces pratiques déjà engagée, sans méconnaître pour autant la réalité de la situation difficile à laquelle sont confrontés les professionnels et les nécessités cliniques qu’impose la prise en charge des patients.
Le Gouvernement est défavorable à votre demande de rapport. Nous aurons l’occasion de rediscuter du sujet à l’occasion de l’examen de l’article 42 du PLFSS.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 79.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 8 (nouveau)
Jusqu’à l’expiration d’un délai d’un mois à compter de la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire déclaré par le décret n° 2020-1257 du 14 octobre 2020 déclarant l’état d’urgence sanitaire et prorogé dans les conditions prévues à l’article L. 3131-14 du code de la santé publique, le notaire instrumentaire peut établir un acte notarié sur support électronique lorsqu’une ou toutes les parties ou toute autre personne concourant à l’acte ne sont ni présentes ni représentées, y compris lorsqu’elles résident à l’étranger.
L’échange des informations nécessaires à l’établissement de l’acte et le recueil, par le notaire instrumentaire, du consentement ou de la déclaration de chaque partie ou personne concourant à l’acte s’effectuent au moyen d’un système de communication et de transmission de l’information garantissant l’identification des parties, l’intégrité et la confidentialité du contenu et agréé par le Conseil supérieur du notariat.
Le notaire instrumentaire recueille, simultanément avec le consentement ou la déclaration mentionnés au deuxième alinéa du présent article, la signature électronique de chaque partie ou personne concourant à l’acte au moyen d’un procédé de signature électronique qualifié répondant aux exigences de l’article 1367 du code civil. L’acte est parfait lorsque le notaire instrumentaire y appose sa signature électronique sécurisée.
Un décret en Conseil d’État précise, en tant que de besoin, les modalités d’application de la présente loi. – (Adopté.)
Article 9 (nouveau)
Les durées maximales d’activité dans les réserves militaire, de sécurité civile, sanitaire ou de la police nationale prévues à l’article L. 4251-6 du code de la défense, au 11° de l’article 34 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État, au 12° de l’article 57 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et au 12° de l’article 41 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière sont prolongées de la durée de l’état d’urgence sanitaire déclaré par le décret n° 2020-1257 du 14 octobre 2020 déclarant l’état d’urgence sanitaire et prorogé dans les conditions prévues à l’article L. 3131-14 du code de la santé publique.
M. le président. L’amendement n° 3 rectifié, présenté par Mme de Cidrac, M. Karoutchi, Mme Bourrat, MM. Brisson et Daubresse, Mme Noël, M. Regnard, Mme Gruny, M. C. Vial, Mmes Deromedi, Joseph et L. Darcos, MM. D. Laurent et Rapin, Mme Thomas, M. Le Gleut, Mmes Imbert et Berthet, MM. Mandelli, Bascher, Charon, Gremillet, Calvet et Savary, Mme Deroche, MM. Bonne et Vogel, Mmes Lassarade et Puissat, MM. Chaize, Husson, B. Fournier, Bouloux, Sautarel et Saury, Mme Di Folco, MM. Mouiller, Piednoir, Bazin et J.M. Boyer, Mmes Dumas et Lopez et M. Lefèvre, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. - Le I du présent article est applicable aux agents contractuels de la fonction publique.
La parole est à M. Max Brisson.
M. Max Brisson. La commission des lois a adopté un amendement de notre collègue Roger Karoutchi visant à « instituer le même déplafonnement des durées d’activité des réservistes fonctionnaires, pendant la durée d’application de l’état d’urgence sanitaire, afin de pouvoir assurer leur disponibilité pour des missions de réserve sanitaire, militaire, de police ou de sécurité civile, dans un contexte de forte tension opérationnelle pour l’ensemble de ces services ». Le présent amendement a pour objet d’étendre ce dispositif aux agents contractuels de la fonction publique.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Bas, rapporteur. La commission a regretté de ne pas y avoir pensé toute seule… C’est dire si elle se réjouit de cet amendement, sur lequel elle a émis un avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Sophie Primas. Bien !
M. le président. Je mets aux voix l’article 9, modifié.
(L’article 9 est adopté.)
Article 10 (nouveau)
I. – Compte tenu des risques sanitaires liés à l’épidémie de covid-19, le présent article s’applique au prochain renouvellement général des conseillers départementaux, des conseillers régionaux, des conseillers à l’Assemblée de Corse, des conseillers à l’Assemblée de Guyane et des conseillers à l’Assemblée de Martinique.
II. – Chaque mandataire peut disposer de deux procurations, y compris lorsqu’elles sont établies en France.
Si cette limite n’est pas respectée, les procurations qui ont été dressées les premières sont les seules valables. La ou les autres procurations sont nulles de plein droit.
III. – À leur demande, les personnes qui, pour un motif sanitaire, ne peuvent pas comparaître devant les officiers et agents de police judiciaire habilités à établir les procurations ou leurs délégués disposent du droit à ce que les autorités compétentes se déplacent pour établir ou retirer leur procuration.
Ces personnes peuvent saisir les autorités compétentes par voie postale, par téléphone ou par voie électronique. Elles indiquent la raison de leur impossibilité de se déplacer, sans qu’il leur soit nécessaire de fournir un justificatif.
IV– Le mandataire peut être inscrit sur la liste électorale d’une autre commune que le mandant, sous réserve de respecter le II du présent article et sous le contrôle du répertoire électoral unique mentionné à l’article L. 16 du code électoral.
V. – Un décret en Conseil d’État détermine les conditions dans lesquelles le préfet peut augmenter le nombre de bureaux de vote dans les communes du département afin d’assurer la sécurité sanitaire du scrutin.
VI. – Outre le vote à l’urne, les électeurs peuvent voter par correspondance dans les conditions fixées au présent VI.
Le matériel de vote par correspondance est adressé aux électeurs au plus tard le deuxième lundi qui précède le scrutin. En l’absence de réception dans le délai imparti, l’électeur peut saisir le ministère de l’intérieur, le cas échéant par voie électronique.
Ce matériel comporte trois enveloppes : une enveloppe d’expédition, une enveloppe d’identification et une enveloppe électorale.
Afin de permettre le contrôle de son identité, l’électeur signe l’enveloppe d’identification. Il y insère une copie d’une pièce d’identité ainsi qu’un justificatif de domicile.
Son pli est transmis au tribunal judiciaire par voie postale ou par les autorités compétentes pour établir les procurations.
Dans l’attente du scrutin, les plis sont conservés dans un lieu sécurisé du tribunal judiciaire. Le greffier en chef tient un registre du vote par correspondance, un numéro d’ordre étant apposé sur chaque pli. Tout électeur et tout candidat, ou son représentant, peut consulter le registre et y consigner leurs observations relatives aux opérations du vote par correspondance.
Le jour du scrutin, les plis sont acheminés jusqu’au bureau de vote par les autorités compétentes pour établir les procurations.
À la clôture du bureau de vote, son président et ses assesseurs indiquent le numéro du pli sur la liste d’émargement et introduisent l’enveloppe contenant le bulletin de vote dans l’urne, après s’être assurés que l’électeur concerné n’a pas déjà voté.
À l’issue du scrutin, les enveloppes d’identification et leur contenu ainsi que les plis parvenus après la fermeture du bureau de vote sont conservés jusqu’à l’expiration du délai de recours contentieux.
VII. – Toute manœuvre frauduleuse ayant pour but d’enfreindre les dispositions du II ou du VI du présent article est punie d’un emprisonnement de deux ans et d’une amende de 15 000 €. – (Adopté.)
Article additionnel après l’article 10
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 22 rectifié quater, présenté par MM. Mouiller et Karoutchi, Mme Guidez, M. Milon, Mme Lassarade, M. Favreau, Mmes Thomas, Deromedi et Joseph, MM. Rietmann, Perrin, Bazin, Calvet, D. Laurent, Cambon, Belin, Bonhomme, de Nicolaÿ, Bonne, Sautarel et Piednoir, Mme Deseyne, M. Le Gleut, Mme Chauvin, MM. Laménie et Babary, Mmes Bonfanti-Dossat et F. Gerbaud, MM. Bouchet et Gueret, Mmes Imbert, M. Mercier et Procaccia, MM. Daubresse, Husson, Vogel et Pointereau, Mme Berthet, M. Lefèvre et Mmes Deroche, Di Folco et de Cidrac, est ainsi libellé :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les dispositions du second alinéa de l’article L. 52-1 du code électoral sont suspendues le temps de l’état d’urgence sanitaire.
La parole est à Mme Jocelyne Guidez.
Mme Jocelyne Guidez. La date des élections départementales et régionales est, en théorie, fixée aux 14 et 21 mars 2021, mais le Gouvernement souhaite les reporter pour des motifs sanitaires. Dans ces conditions, et en l’absence de nouvelle date, les départements et les régions se trouvent privés d’outils de communication par l’article L. 52-1 du code électoral, qui dispose que, dans les six mois précédant un scrutin, aucune communication institutionnelle inédite ne peut être faite.
Cette situation est préjudiciable à l’intérêt général. Par exemple, les entreprises en difficulté, les commerçants, les TPE et indépendants ne peuvent pas avoir accès à l’information sur les dispositifs d’aide d’urgence. De même, les demandeurs d’emploi ne peuvent être informés, par une campagne de communication ad hoc, des nouveaux dispositifs d’aide et de formation mis en place à leur intention. Cette situation peut avoir des conséquences économiques et sociales dramatiques pour les intéressés.
M. le président. L’amendement n° 23 rectifié quater, présenté par MM. Mouiller et Karoutchi, Mme Guidez, M. Milon, Mme Lassarade, M. Favreau, Mmes Thomas, Deromedi et Joseph, MM. Rietmann, Perrin, Bazin, Calvet, D. Laurent, Cambon, Belin, Bonhomme, de Nicolaÿ, Bonne, Sautarel et Piednoir, Mme Deseyne, MM. Le Gleut et Bouloux, Mme Chauvin, MM. Laménie et Babary, Mmes Bonfanti-Dossat et F. Gerbaud, MM. Bouchet et Gueret, Mmes Imbert, M. Mercier et Procaccia, MM. Daubresse, Husson, Vogel et Pointereau, Mme Berthet, M. Lefèvre et Mmes Deroche, Di Folco et de Cidrac, est ainsi libellé :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Pour les nécessités de la lutte contre la pandémie de la covid-19 et contre la crise économique et sociale qu’elle entraîne, départements et régions peuvent utiliser des supports de communication afin de faire connaître leurs aides, actions et subventions jusqu’à la fin de l’état d’urgence en dérogation aux dispositions de l’article L. 52-1 du code électoral.
La parole est à Mme Jocelyne Guidez.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Bas, rapporteur. Nous avons examiné avec soin ces deux amendements. Ceux-ci nous ont paru s’exclure mutuellement.
J’ai le plaisir d’annoncer à ses auteurs que nous avons émis un avis favorable sur l’amendement n° 23 rectifié quater. En revanche, nous sommes défavorables à l’amendement n° 22 rectifié quater, qui serait de toute façon satisfait par l’adoption du précédent.
Il s’agit de permettre, en cette période préélectorale, non pas de réaliser un bilan de l’action conduite durant la mandature qui s’achève, ce qui tomberait sous le coup de la réglementation en matière de dépenses électorales, mais d’informer le plus large public sur les nouveaux dispositifs mis en place, souvent, d’ailleurs, avec le concours de l’État, pour faciliter l’accès à ces derniers.
Cette demande de bon sens paraît d’autant plus légitime que c’est une condition de l’efficacité de ces dispositifs : on ne peut pas se permettre de laisser en déshérence tant d’entreprises en difficulté économique et sociale sans les informer de ce que les aides leur permettent d’obtenir. Elle doit donc être satisfaite.
C’est la raison pour laquelle la commission émet un avis défavorable sur l’amendement n° 22 rectifié quater et un avis favorable sur l’amendement n° 23 rectifié quater.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces deux amendements.
D’abord, sauf si j’ai loupé un épisode, il me semble que le Gouvernement ne souhaite pas reporter les élections pour des raisons sanitaires.
Mme Sophie Primas. Pas pour ces raisons-là !
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Il a demandé à l’ancien président du Conseil constitutionnel M. Jean-Louis Debré de mener une réflexion en coordination avec l’ensemble des institutions concernées pour l’éclairer avant qu’il ne prenne une décision. Il est important de le rappeler.
Par ailleurs, l’article L. 52-1 du code électoral, dont la suspension est demandée à l’amendement n° 22 rectifié quater, ne prive nullement les conseils départementaux et les conseils régionaux d’outils de communication dans les six mois qui précèdent leur renouvellement. Il précise seulement que ces collectivités ne peuvent pas mener de « campagne de promotion publicitaire » de leurs réalisations ou de leur gestion. Il s’agit là d’une mesure essentielle – vous me rejoindrez sur ce point, madame la sénatrice – pour assurer l’égalité entre les candidats et ne pas privilégier les sortants en leur offrant les moyens de la collectivité pour leur campagne. (M. le rapporteur fait un signe de dénégation.)
M. le rapporteur ne semble pas en accord avec l’interprétation du Gouvernement. Pourtant, cet article n’empêche pas les collectivités d’informer les entreprises ou les particuliers sur les dispositifs ouverts, à condition que cette information ne donne pas lieu à une autopromotion, et ce sous le contrôle du juge de l’élection.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour explication de vote.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. L’adoption de ces amendements entraînerait un retour en arrière assez important de toute la législation qui vise à mettre en situation équitable les candidats à une élection. Le président d’un exécutif local dispose d’une capacité de communication qui est aussi une capacité financière et qui peut le placer dans une situation plus favorable lorsqu’une élection se profile.
L’article L. 52–1 permet justement, dans une période qui a été fixée à six mois, de limiter la communication autorisée par les collectivités locales pour qu’elle ne vire pas à la propagande électorale.
Il ne faut pas confondre l’information, qui est tout à fait légitime jusqu’au dernier jour du mandat, et la propagande électorale, qui serait, pour le dire en termes clairs, l’utilisation quelque peu excessive des moyens de la collectivité.
Ces amendements ont pour objet de faire en sorte que ce ne soit plus le cas et que les présidents sortants des exécutifs locaux puissent utiliser plus ou moins les moyens de leur collectivité pour mener des opérations de communication électorale. Ce n’est pas possible !
J’appelle donc votre attention sur ce point. Encore une fois, cet article du code électoral vise la propagande électorale et non la communication. Et, même aujourd’hui, dans les six mois qui précèdent un scrutin, les collectivités peuvent évidemment faire de la communication, et c’est normal ! Le code électoral et la législation sur le financement des campagnes ont vocation non à empêcher les élus d’exercer leur mandat jusqu’à leur terme, mais à mettre les candidats en situation équitable.
Je comprends que le rapporteur soit quelque peu influencé par la qualité des signataires – et ils sont nombreux, même s’ils ne sont pas tous présents ! – de ces amendements, mais, connaissant son exigence juridique, il ne peut, je pense, que partager mon point de vue.
Il serait plus sain – j’utilise ce terme à dessein – de retirer ces amendements pour qu’il n’y ait pas de malentendu.
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.
M. Marc Laménie. Je fais partie des cosignataires de l’amendement n° 22 rectifié quater, mais, à la lumière des interventions précédentes, je reconnais que l’on peut s’interroger. Tous les codes sont complexes et pointilleux et le code électoral n’échappe pas à la règle. Sur le plan juridique, ce n’est pas simple, d’autant plus que, dans le cadre de la gestion de la crise sanitaire, l’État, comme l’ensemble des collectivités territoriales, s’implique fortement aux côtés de tous les partenaires.
Cependant, face à des échéances électorales comme les élections départementales et régionales, on se trouve vite contraints et limités en termes de communication et, surtout, de bonne communication. Cet amendement a d’une certaine manière pour but de protéger et de faciliter la bonne communication.
M. Philippe Bas, rapporteur. Oui !
M. Marc Laménie. On croit bien communiquer dans notre société, mais, en réalité, il y a plein de vides ! Dans le cas présent, les régions, comme les départements, s’impliquent aussi beaucoup dans la gestion de la crise : elles sont aussi des partenaires, à l’instar de l’ensemble de services de l’État – agences régionales de santé, rectorats, structures économiques, etc. Pour autant, afin de gérer cette bonne communication, il faut avoir toutes les garanties, ne pas prendre de risque et faire en sorte que tout soit bien encadré. On sait que, pour être réellement dans les règles, il faut aussi des seuils de tolérance.
Pour ma part, je fais confiance au rapporteur et aux membres de la commission des lois, qui ont dû travailler sur ce texte important dans un laps de temps très court. C’est pourquoi, même si je suis cosignataire de cet amendement, je me rallie à l’avis de la commission.
M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour explication de vote.
Mme Céline Brulin. Si ces amendements ne sont pas complètement satisfaisants, ils posent la question de manière objective. Il est probable – c’est dans le débat public – que les élections départementales et régionales seront reportées pour des raisons véritablement sanitaires – c’est ce que j’espère en tout cas.
Cela emporte des conséquences de tous ordres. Nous nous penchons là sur le problème des actions des départements et des régions, mais nous pourrions évoquer les questions que les sénateurs que nous sommes entendent régulièrement des maires et des exécutifs locaux : comment présenter nos vœux à la population, alors que nous ne pourrons très probablement pas rassembler les habitants comme nous le faisons habituellement en pareilles circonstances ?
Pour autant, et pas seulement pour promouvoir l’action municipale, mais aussi parce qu’il faut du lien social, ces mêmes maires cherchent des moyens d’entrer en contact et d’avoir des moments d’échanges avec les habitants. S’ils se retrouvent candidats aux élections départementales ou aux élections régionales, on pourra alors leur reprocher – en tout cas, mettre à leur compte de campagne – le fait d’avoir organisé des manifestations tout à fait différentes de celles qu’ils proposent habituellement, donc préjuger ou supposer que cela aurait une influence électorale.
Ces amendements ne me paraissent pas répondre à ces questions de manière satisfaisante. En revanche, il reviendra à la mission qui, sous la présidence de Jean-Louis Debré, auditionnera un certain nombre d’acteurs dans les prochains jours, de s’interroger sur ces questions terre-à-terre. Il faut en effet tenir compte à la fois du caractère exceptionnel de la situation et assurer l’égalité due à chacun des candidats, qui constitue l’un des fondements de notre démocratie.