M. le président. Les autres dispositions de la proposition de loi ne font pas l’objet de la deuxième lecture.
Personne ne demande la parole ?…
Je mets aux voix, dans le texte de la commission, l’ensemble de la proposition de loi visant à clarifier diverses dispositions du droit électoral.
(La proposition de loi est adoptée définitivement.)
M. le président. Nous passons à l’examen de la proposition de loi organique.
proposition de loi organique visant à clarifier diverses dispositions du droit électoral
Article 1er
(Non modifié)
L’article L.O. 136-1 du code électoral est ainsi modifié :
1° Les trois premiers alinéas sont remplacés par quatre alinéas ainsi rédigés :
« En cas de volonté de fraude ou de manquement d’une particulière gravité aux règles de financement des campagnes électorales, le Conseil constitutionnel, saisi d’une contestation formée contre l’élection ou en application du troisième alinéa de l’article L. 52-15, peut déclarer inéligible :
« 1° Le candidat qui n’a pas déposé son compte de campagne dans les conditions et le délai prescrits à l’article L. 52-12 ;
« 2° Le candidat dont le compte de campagne, le cas échéant après réformation, fait apparaître un dépassement du plafond des dépenses électorales ;
« 3° Le candidat dont le compte de campagne a été rejeté à bon droit. » ;
2° Le quatrième alinéa est ainsi modifié :
a) À la première phrase, les mots : « des trois premiers alinéas » sont supprimés ;
b) (Supprimé)
3° (Supprimé) –
M. le président. Je mets aux voix l’article 1er.
(L’article 1er est adopté.)
Article 2
(Suppression maintenue)
Article 2 bis
(Non modifié)
Le IV de l’article L.O. 136-4 du code électoral est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« L’inéligibilité déclarée sur le fondement du présent article n’a pas d’effet sur les autres mandats acquis antérieurement à la date de la décision du Conseil constitutionnel. » – (Adopté.)
Article 2 ter
(Non modifié)
L’article L.O. 132 du code électoral est ainsi modifié :
1° Après le I, il est inséré un I bis ainsi rédigé :
« I bis. – Les sous-préfets, les secrétaires généraux de préfecture et les directeurs de cabinet de préfet sont inéligibles en France dans toute circonscription comprise en tout ou partie dans le ressort dans lequel ils exercent ou ont exercé leurs fonctions depuis moins de deux ans à la date du scrutin. » ;
2° Au début du 1° du II, les mots : « Les sous-préfets, les secrétaires généraux de préfecture, les directeurs de cabinet de préfet et » sont supprimés. – (Adopté.)
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Article 4
(Non modifié)
I. – L’article 1er de la présente loi organique s’applique à tout député ou sénateur à compter du prochain renouvellement de l’assemblée à laquelle il appartient ainsi qu’aux candidats aux élections afférentes.
II. – (Non modifié) – (Adopté.)
Vote sur l’ensemble
M. le président. Les autres dispositions de la proposition de loi organique ne font pas l’objet de la deuxième lecture.
Personne ne demande la parole ?…
Je mets aux voix, dans le texte de la commission, l’ensemble de la proposition de loi organique visant à clarifier diverses dispositions du droit électoral.
En application de l’article 59 du règlement, le scrutin public ordinaire est de droit.
Il va y être procédé dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Je vous invite, mes chers collègues, à vérifier que votre carte de vote est bien insérée dans votre terminal.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater les résultats du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent les résultats du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 15 :
Nombre de votants | 340 |
Nombre de suffrages exprimés | 340 |
Pour l’adoption | 340 |
Le Sénat a adopté définitivement. (Applaudissements.)
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à quinze heures trente-cinq, est reprise à quinze heures quarante.)
6
Statut de citoyen sauveteur
Adoption d’une proposition de loi dans le texte de la commission modifié
M. le président. L’ordre du jour appelle, à la demande du groupe La République En Marche, la discussion de la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale, visant à créer le statut de citoyen sauveteur (proposition n° 331 [2018-2019], texte de la commission n° 73, rapport n° 72).
Dans la discussion générale, la parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Laurent Nunez, secrétaire d’État auprès du ministre de l’intérieur. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, la question des arrêts cardiaques nous concerne tous.
Chaque année, 40 000 personnes meurent en France d’un arrêt cardiaque inopiné ; notre taux de survie en cas d’attaque est de 3 % à 4 %. Ce taux est faible ; il l’est plus encore lorsqu’on le compare avec celui des pays anglo-saxons et scandinaves, où 20 % à 40 % des victimes survivent, soit dix fois plus.
Ces chiffres démontrent deux choses : une urgence à agir et une urgence à former. C’est l’objet même de la proposition de loi déposée par Jean-Charles Colas-Roy à l’Assemblée nationale. Ce texte n’appelle pas aux débats partisans, mais à la responsabilité de toutes et tous. C’est d’ailleurs cet esprit qui avait prévalu à l’Assemblée nationale, où le texte avait été adopté à l’unanimité.
J’aimerais revenir sur les fondements et les objectifs de ce texte. Dès son élection, le Président de la République avait fixé un objectif aussi nécessaire qu’ambitieux : former 80 % de la population aux gestes qui sauvent d’ici à dix ans.
C’est d’autant plus essentiel que 70 % des attaques cardiaques se déroulent devant des témoins et que chaque minute compte. Je veux vous en donner une idée précise : sans massage cardiaque, les chances de survie s’amenuisent de 10 % par minute. Au-delà de trois minutes sans massage, les lésions provoquées sont généralement irréversibles. Au-delà de dix minutes, les chances de survie sont pratiquement nulles.
En moyenne, les secours mettent treize minutes à intervenir – c’est à peine trois minutes de plus que le laps de temps très court, dix minutes, qui condamne une victime.
Aussi, augmenter le nombre de personnes formées et capables d’intervenir vite en cas de détresse permettra de sauver des vies. À nouveau, des chiffres seront plus parlants : si nous atteignons l’objectif fixé par le Président de la République, nous augmenterons le taux de survie de 3 % à 10 % et sauverons 3 000 vies chaque année. Bien sûr, ces chiffres sont théoriques, ils n’en demeurent pas moins parlants.
Cette proposition de loi nous permet d’aller dans le bon sens.
Dans le texte issu des travaux de la commission des lois du Sénat, la première mesure consiste à créer la qualité de sauveteur occasionnel. Je n’anticiperai pas sur les débats qui viendront à l’occasion de l’examen des amendements à l’article 1er. Il s’agit d’une mesure importante, car aujourd’hui une personne qui pratique un massage cardiaque sur une victime n’est pas protégée par le droit et peut être exposée à des poursuites. Le sauveteur occasionnel, c’est-à-dire la personne qui pratique un geste de premiers secours, doit bénéficier d’une protection et de reconnaissance pour son geste.
Par ailleurs, nous devons responsabiliser les Français par tout moyen ; c’est pourquoi l’article 11 de la proposition de loi renforce les peines en cas de vol ou de détérioration d’un défibrillateur.
Le Sénat a beaucoup transformé le texte issu de l’Assemblée nationale. Si je comprends parfaitement sa volonté de législateur d’opérer une séparation rigoureuse des mesures législatives et réglementaires, je crains qu’il ne soit allé un peu trop loin, en supprimant quelques-uns des effets utiles du texte.
Je ne prendrai qu’un exemple : son changement de titre. Avoir remplacé les « gestes qui sauvent » par « les premiers secours » implique un changement et une réduction assez importante du champ d’application du texte. En effet, les « gestes qui sauvent » sont un ensemble de pratiques qui sont rigoureusement définies dans un arrêté du 30 juin 2017 et qui correspondent à une formation précise. Il me paraissait donc utile de maintenir leur mention dans le nom de la proposition de loi afin de continuer à y faire référence.
Il importe par ailleurs que la notion de collaborateur occasionnel du service public, consacrée par la jurisprudence administrative, puisse trouver à s’appliquer non seulement au sauveteur occasionnel, mais aussi à d’autres acteurs du secours.
En ce sens, j’émettrai un avis favorable sur l’amendement déposé par le groupe La République En Marche, qui vient consolider la rédaction de l’article 1er de cette proposition de loi. Mme la rapporteure a également déposé un amendement à ce sujet et nous aurons l’occasion de débattre tout à l’heure. Il s’agit de la mesure phare de ce texte. C’est elle qui permet les plus grandes avancées pour notre prévention et contre les risques d’accident cardiaque. Encore une fois, nous aurons l’occasion de débattre de cette articulation entre le statut de sauveteur occasionnel et celui, jurisprudentiel, de collaborateur bénévole qui assure également une protection à ces personnes.
M. le président. La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Catherine Troendlé, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des lois, mes chers collègues, l’arrêt cardiaque subit demeure une des causes de mortalité les plus importantes et méconnues du grand public. En France, entre 40 000 et 50 000 personnes décèdent d’un arrêt cardiaque chaque année, soit quinze fois plus que le nombre de morts sur les routes.
Or, en matière d’arrêt cardiaque, le pire est de ne rien faire, comme vous l’avez dit, monsieur le secrétaire d’État, puisque le délai d’intervention a un impact très significatif sur les chances de survie de la victime. Sans prise en charge immédiate, plus de 92 % des arrêts cardiaques sont fatals. Sept fois sur dix, ces arrêts surviennent devant témoins, mais seulement 40 % de ceux-ci font les gestes de premiers secours. La conséquence triste, mais logique, est qu’en France le taux de survie à un arrêt cardiaque ne dépasse pas les 8 %, ce taux étant quatre à cinq fois plus élevé dans les pays où les lieux publics sont équipés en défibrillateurs automatisés externes et où la population est formée aux gestes qui sauvent.
Face à ce constat, plusieurs mesures ont d’ores et déjà été prises. Je fais ici référence à la loi du 13 août 2004 rendant obligatoire l’apprentissage des gestes qui sauvent à l’école. Je fais également référence à la loi du 17 mars 2015 visant à introduire une formation pratique aux gestes de premiers secours dans la préparation du permis de conduire, qui est issue d’une proposition de loi de notre collègue Jean-Pierre Leleux. Je fais enfin référence à la loi du 28 juin 2018 relative au défibrillateur cardiaque, issue quant à elle d’une proposition de notre collègue Jean-Pierre Decool.
C’est dans cette perspective que se situe la proposition de loi déposée par notre collègue député Jean-Charles Colas-Roy et adoptée en première lecture par l’Assemblée nationale. Son objectif est à la fois clair et louable : porter l’attention sur ce sujet majeur et favoriser les interventions, d’une part, en formant la population aux gestes qui sauvent et, d’autre part, en modelant un régime de responsabilité favorable à l’intervention.
Partageant pleinement ces objectifs, la commission des lois a examiné le texte de l’Assemblée nationale au travers d’un crible rigoureux afin d’en garantir l’efficacité. Elle n’a donc pas hésité à écarter des dispositions qui ne relèvent pas du domaine que la Constitution confie à la loi, qu’elles fussent soit de nature réglementaire, soit dépourvues de portée normative.
Je me félicite d’ores et déjà que la méthode proposée ait reçu l’assentiment de notre assemblée, puisque les amendements déposés ne portent que sur des points techniques précis et ne tendent pas à ce que le texte retrouve son champ initial.
La commission des lois a tout particulièrement porté son attention sur l’article 1er de la proposition de loi qui tend à créer un statut de « citoyen sauveteur » afin de mieux protéger les personnes venant en aide de manière volontaire et bénévole aux victimes d’une urgence vitale.
Nous avons souhaité réécrire cette disposition afin de redéfinir les conditions d’intervention des sauveteurs dans des termes plus juridiques. Ainsi, la commission des lois a remplacé l’expression de « citoyen sauveteur » par celle de « sauveteur occasionnel et bénévole » qui est plus appropriée au concours apporté à l’exercice d’un service public.
La commission des lois a souhaité conserver du texte transmis la référence au régime jurisprudentiel de collaborateur occasionnel du service public, les atténuations de responsabilité pénale et le régime spécial de responsabilité civile applicable aux sauveteurs. Toutefois, elle a souhaité apporter une correction de nature à l’exonérer pour tous les préjudices qu’il pourrait causer lors de son intervention, sauf faute lourde ou intentionnelle, et pas seulement pour ceux causés à la personne secourue elle-même.
De plus, j’ai souhaité tenir compte d’une partie des remarques soulevées par l’amendement déposé par le groupe La République En Marche.
En ce sens, l’amendement que je vais vous présenter réintroduit les obligations d’appeler les secours et de prendre les premières dispositions pour toute personne, et non pas pour les seuls sauveteurs occasionnels. En revanche, il ne semble pas opportun d’élargir le champ de la proposition de loi à tous les acteurs de la sécurité civile, comme le prévoit l’amendement du groupe La République En Marche, puisque l’objectif est bien de consacrer un régime spécial pour les sauveteurs occasionnels et eux seuls.
Par ailleurs, la commission des lois a approuvé les dispositions de l’article 7 de la proposition de loi qui tendent à consolider la liste des personnes autorisées à accomplir les actes de sensibilisation au secourisme. Elle a seulement souhaité y inclure certains services des établissements de santé. En effet, beaucoup d’entre eux détiennent les compétences nécessaires pour assurer une formation au secourisme.
Enfin, la commission des lois s’est également montrée favorable aux dispositions de l’article 11 tendant à renforcer les sanctions pénales en cas de vol ou de dégradation de défibrillateurs. Les modifications qu’elle a apportées ont pour seul objet d’assurer la clarté et la précision de la loi pénale.
Vous le voyez, mes chers collègues, la commission des lois a souhaité ne garder dans ce texte que des dispositions efficaces et effectives. Par l’amendement que je vais vous présenter, elle a également souhaité faire un pas vers le consensus, monsieur le secrétaire d’État, dans l’espoir de voir cette proposition de loi adoptée rapidement.
Si des dispositions bien faites sont indispensables, elles ne sont toutefois pas suffisantes pour lutter contre les arrêts cardiaques. Je pense sincèrement que la nécessité de se former aux premiers secours découle d’une obligation morale et civique pour toute personne, notamment celles qui ont la charge d’en encadrer d’autres, dans quelque contexte que ce soit. Il devrait s’agir là d’un réflexe que nous devrions tous avoir. (M. Édouard Courtial ainsi que Mmes Nathalie Goulet et Françoise Laborde applaudissent.)
M. le président. La parole est à M. Emmanuel Capus.
M. Emmanuel Capus. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des lois, madame le rapporteur, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui une proposition de loi visant à créer le statut de citoyen sauveteur, à lutter contre l’arrêt cardiaque et à sensibiliser aux gestes qui sauvent.
Cette discussion survient quelques mois après que trois sauveteurs de la Société nationale de sauvetage en mer ont péri lors d’un sauvetage en mer au large des Sables-d’Olonne. Quelques mois aussi après que deux soldats de nos forces spéciales ont donné leur vie au Burkina Faso pour sauver des otages. Et tous les jours, des pompiers, souvent volontaires, des policiers, des urgentistes, prennent des risques pour veiller sur leur prochain et porter secours à celui ou celle qui se trouve en danger. Nous ne devons pas banaliser l’engagement quotidien de ces héros. Leur courage fait entrer l’exceptionnel dans l’ordinaire.
Au contraire, nous devons plutôt nous interroger, nous autres citoyens qui ne prenons pas de tels risques au quotidien. Nous devons nous interroger pour savoir si, à notre échelle, nous serions en mesure de suppléer ces héros, dans le cas où nous serions seuls à pouvoir intervenir.
C’est tout l’intérêt que revêt, à mes yeux, cette proposition de loi. Elle vise à faciliter et à sécuriser la capacité de tout un chacun à faire le bon geste au bon moment. Évidemment, à l’impossible, nul n’est tenu, mais qui pense que nous ne devrions pas, collectivement, relever encore un peu notre niveau d’exigence pour prévenir au mieux ces risques, auxquels chacun d’entre nous est exposé ?
L’ambition de cette proposition de loi est noble ; cela ne fait aucun doute.
M. Philippe Bas, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale. Absolument !
M. Emmanuel Capus. Mais je partage l’avis de la commission : la version initiale contenait d’importants risques juridiques.
C’est notamment le cas pour l’article 1er. La nouvelle mouture du texte permettra de mieux sécuriser les citoyens qui portent assistance, de façon occasionnelle et bénévole, à un autre citoyen, tout en garantissant leur protection juridique. Ce serait le comble que de susciter doutes et appréhensions, alors que nous souhaitons encourager la prise d’initiative !
Je me réjouis également que les sanctions portant sur les vols de défibrillateurs cardiaques soient renforcées. J’y vois le complément utile de la loi issue de la proposition de notre collègue Jean-Pierre Decool qui a permis de développer l’accès aux défibrillateurs automatisés externes, en rendant leur présence obligatoire dans certains lieux. Il s’agit d’équipements dont nous devrions être systématiquement entourés et les vols de tels matériels constituent, dans cette optique, une atteinte grave à la solidarité et à la cohésion nationales. Comment croire en la bienveillance collective si l’on découvre, trop tard, que l’équipement indispensable à la survie d’un citoyen a été subtilisé pour de petits profits ? L’État doit se montrer particulièrement ferme sur ce sujet.
Fermeté de la puissance publique, engagement bienveillant des citoyens au service de leurs proches : l’État ne peut pas tout et chacun doit se mobiliser sans attendre des solutions qui viennent d’en haut. Je partage cette vision de la société, sans verser pour autant dans l’angélisme. Je mesure ce qu’elle implique d’exigence collective, mais je crois qu’elle nous permettra de nous élever tous ensemble.
Chacun le sait, l’enfer est pavé de bonnes intentions. Ne nous laissons pas abuser par des ambitions qui flattent notre courage, mais nous contraindraient de façon excessive. Se mettre au service de tous n’implique pas de devenir l’obligé de chacun.
Je pense que le Sénat a sagement amendé ce texte, qui se trouve désormais réduit à ses propositions les plus essentielles. Il conserve à mes yeux sa pertinence et atteint mieux encore son objectif initial.
Le groupe Les Indépendants votera donc en faveur du texte, tel qu’il a été retravaillé par la commission des lois.
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet.
Mme Nathalie Goulet. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, Emmanuel Capus a élevé le débat de façon très sérieuse et le sujet l’est assurément. Nous devons évidemment tout faire pour éviter les morts par arrêt cardiaque. Le groupe Union Centriste votera donc ce texte dans la version issue des travaux de la commission des lois.
Monsieur le secrétaire d’État, je voudrais vous remercier d’être au banc cet après-midi ; nous connaissons votre charge de travail.
Sur le fond, le rapport de la commission des lois ne fait que constater « l’absence de vide juridique, s’agissant de la protection des sauveteurs occasionnels ». C’est exact, la commission des lois l’a démontré : ce sujet est déjà traité par ailleurs. C’est la raison pour laquelle la commission a sensiblement revu la rédaction du texte.
J’ajouterai qu’il n’y a pas que les arrêts cardiaques – nous pourrions aussi évoquer les accidents vasculaires cérébraux ou bien d’autres sujets. Ainsi, notre collègue Emmanuel Capus l’a dit, le Sénat vient de rendre un rapport sur le sauvetage en mer et nous aurions pu rendre la présente proposition de loi plus ambitieuse, en y intégrant des recommandations de la mission d’information du Sénat.
Je ne voudrais pas vous retenir plus longtemps dans cet hémicycle, monsieur le secrétaire d’État – je connais votre charge de travail –, mais je voudrais simplement vous poser une question qui est liée à l’ordre du jour du Sénat de la semaine prochaine. Selon le texte dont nous débattons, les sauveteurs seront des collaborateurs du service public…
Mme Catherine Troendlé, rapporteur. Occasionnels !
Mme Nathalie Goulet. Nous parlons de collaborateurs au masculin, mais nous pouvons espérer que certains seront des femmes… et qu’elles ne seront pas voilées, sans quoi elles ne pourraient pas porter secours aux gens avant d’enlever leur voile ? (Sourires sur plusieurs travées.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Fichet.
M. Jean-Luc Fichet. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je ne vais pas non plus faire durer les choses plus que nécessaire. Les chiffres ont été donnés, je ne les rappellerai pas.
Cette proposition de loi nous convient et le groupe socialiste et républicain la votera, car elle assure une protection juridique aux personnes qui se portent au secours de gens en situation de détresse – on ne peut qu’approuver ce point très important.
Nous aurions aimé que la JDC – journée défense et citoyenneté – inclue une formation aux premiers secours. Les jeunes qui sont scolarisés reçoivent cette formation durant leur cursus, mais il faut aussi penser à ceux qui ne le sont pas – eux aussi doivent bénéficier d’une telle formation. Cette formation est valorisante et la faire suivre aux jeunes en difficulté leur donnerait un atout supplémentaire. S’il leur arrive de porter secours et de sauver des vies, cela ne peut être que très bénéfique pour leur parcours personnel.
Par ailleurs, le terme « collaborateur » nous apparaît comme étant technique et il nous semble important d’inclure la notion de citoyenneté dans le dispositif au travers de l’expression « citoyen sauveteur ». Cette notion est plus forte, plus dynamique, et il serait dommage de ne pas la retenir. Tel sera l’objet des deux amendements que j’ai déposés sur ce texte.
En tout cas, je le redis, le groupe socialiste et républicain votera cette proposition de loi ! (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR.)
M. le président. La parole est à Mme Françoise Laborde.
Mme Françoise Laborde. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, 8 %, c’est le taux de survie en France d’une personne victime d’un arrêt cardiaque inopiné. Dans un pays comme le nôtre qui se distingue par une large accessibilité aux soins et une médecine de qualité, ce chiffre ne peut que nous scandaliser, surtout quand on le compare à celui des pays anglo-saxons et scandinaves, où il est trois à quatre fois plus élevé.
Dans ce contexte, nous pouvons dire que les dispositions de la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui sont des mesures de santé publique. Elles visent à inciter nos concitoyens à se former et surtout à ne plus hésiter à agir, lorsqu’ils sont témoins d’un tel accident.
Mme Catherine Troendlé, rapporteur. Exactement !
Mme Françoise Laborde. Je ne reprendrai pas les chiffres déjà cités, mais il faut savoir que, lors d’un arrêt cardiaque inopiné, pour chaque minute qui s’écoule sans pratique d’un massage cardiaque, ce sont 10 % de chances de survie en moins pour la victime. Quand on sait qu’en France les secours mettent en moyenne treize minutes pour arriver, on comprend que les premiers soins prodigués par un témoin, notamment le massage cardiaque, peuvent sauver une vie.
Cette proposition de loi veut donc donner, ce qui est bienvenu, un véritable statut à ces héros du quotidien.
L’article 1er permet de graver dans le marbre de la loi le statut de ces sauveteurs occasionnels et bénévoles, le terme de citoyen ayant été jugé à juste titre inapproprié par notre commission des lois. Ce statut permettra d’inscrire dans la loi une jurisprudence existante et de protéger ainsi juridiquement « quiconque porte assistance de manière spontanée et volontaire à une personne en situation de péril grave et imminent ». Avec cette formulation, le texte issu des travaux de la commission des lois a vocation à englober toute sorte d’accidents graves, et pas seulement l’arrêt cardiaque, renforçant ainsi la protection conférée.
L’atténuation de la responsabilité pénale en cas de délit non intentionnel lors de l’intervention du sauveteur bénévole et l’exonération de tous les préjudices qu’il pourrait causer, sauf bien évidemment en cas de faute lourde ou intentionnelle, sont à la fois de justes contreparties au service rendu et des incitations pour lutter contre une inaction mortifère.
S’agissant des mesures de sensibilisation aux gestes qui sauvent prévues dans le texte initial, la commission des lois a supprimé une grande partie d’entre elles, car elles existent déjà ou relèvent du domaine du règlement. Je partage cette volonté de ne pas faire de l’affichage, mais de prendre des mesures concrètes.
Néanmoins, si la sensibilisation et la formation des écoliers et des salariés existent déjà, elles mériteraient certainement une meilleure visibilité et même une plus grande publicité afin que tous les citoyens, quel que soit leur âge ou leur profession, soient conscients de l’importance de se former régulièrement, et surtout de l’importance d’agir.
Constitue également une véritable avancée l’obligation, pour les fédérations sportives agréées, d’intégrer dans la formation des arbitres et juges une sensibilisation au secourisme. Près de huit cents cas de mort subite interviennent lors d’une pratique sportive. Cette formation favorisera la prise en charge rapide d’un sportif en situation de malaise cardiaque.
Enfin, le renforcement des sanctions pénales en cas de vol ou de dégradation des défibrillateurs cardiaques aura, je l’espère, une vertu comminatoire et permettra d’affirmer la fermeté de l’État contre ces délits odieux qui mettent en danger la vie de nos concitoyens.
Mes chers collègues, vous l’aurez compris, ce texte ne peut que faire l’objet d’un compromis, tant le sujet qu’il traite est grave. Néanmoins, j’attire l’attention du Gouvernement sur l’importance de la sensibilisation et de la formation continue aux gestes de premiers secours. La peur de mal faire et l’incompétence favorisent l’inertie. « De l’audace, toujours de l’audace », disait le révolutionnaire Georges Danton. Il faut espérer que ce texte, qui sera voté par le groupe du RDSE, en donnera un maximum à nos concitoyens ! (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE, Les Indépendants et LaREM.)