Sommaire
Présidence de Mme Hélène Conway-Mouret
Secrétaires :
M. Dominique de Legge, Mme Patricia Schillinger.
2. Candidature à une délégation sénatoriale
4. Pouvoir de dérogation aux normes attribué aux préfets. – Adoption d’une proposition de résolution
Discussion générale :
M. Jean-Marie Bockel, auteur de la proposition de résolution
M. Laurent Nunez, secrétaire d’État auprès du ministre de l’intérieur
Clôture de la discussion générale.
Texte de la proposition de résolution
Adoption de la proposition de résolution.
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE M. Philippe Dallier
5. Clarification de diverses dispositions du droit électoral. – Adoption définitive en deuxième lecture d’une proposition de loi et d’une proposition de loi organique dans les textes de la commission
Discussion générale commune :
M. Laurent Nunez, secrétaire d’État auprès du ministre de l’intérieur
M. Arnaud de Belenet, rapporteur de la commission des lois
Clôture de la discussion générale commune.
proposition de loi visant à clarifier diverses dispositions du droit électoral
Amendement n° 4 de M. Jean Louis Masson. – Non soutenu.
Adoption de l’article.
Amendements nos 5 et 6 de M. Jean Louis Masson. – Non soutenus.
Article 1er ter A (suppression maintenue)
Amendement n° 23 rectifié quater de M. Roger Karoutchi. – Retrait.
Amendement n° 1 de M. Jean Louis Masson. – Non soutenu.
L’article demeure supprimé.
Amendement n° 24 de M. Alain Richard. – Retrait.
M. Arnaud de Belenet, rapporteur
Adoption de l’article.
Article 3 (suppression maintenue)
Amendement n° 9 de M. Jean Louis Masson. – Non soutenu.
Adoption de l’article.
Amendements nos 10,11, 17, 12, 16, 13 et 14 de M. Jean Louis Masson. – Non soutenus.
Adoption de l’article.
Articles 5 bis A et 7 – Adoption.
Adoption définitive de la proposition de loi dans le texte de la commission.
proposition de loi organique visant à clarifier diverses dispositions du droit électoral
Article 2 (suppression maintenue)
Articles 2 bis, 2 ter et 4 – Adoption.
Adoption définitive, par scrutin public n° 15, de la proposition de loi organique dans le texte de la commission.
Suspension et reprise de la séance
6. Statut de citoyen sauveteur. – Adoption d’une proposition de loi dans le texte de la commission modifié
Discussion générale :
M. Laurent Nunez, secrétaire d’État auprès du ministre de l’intérieur
Mme Catherine Troendlé, rapporteur de la commission des lois
Clôture de la discussion générale.
Amendement n° 1 de M. Jean-Luc Fichet. – Retrait.
Amendement n° 4 de la commission. – Après une demande de priorité de la commission, adoption.
Amendement n° 2 de Mme Noëlle Rauscent. – Devenu sans objet.
Amendement n° 3 de M. Jean-Luc Fichet. – Retrait.
Adoption de l’article modifié.
Articles 2, 2 bis, 3 et 4 (supprimés)
Articles 5 bis et 6 (supprimés)
Article 8 (suppression maintenue)
Article 10 (suppression maintenue)
Article 12 (suppression maintenue)
Article 13 (suppression maintenue)
Adoption de la proposition de loi dans le texte de la commission, modifié.
Nomination d’un membre d’une délégation sénatoriale
compte rendu intégral
Présidence de Mme Hélène Conway-Mouret
vice-présidente
Secrétaires :
M. Dominique de Legge,
Mme Patricia Schillinger.
1
Procès-verbal
Mme la présidente. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Candidature à une délégation sénatoriale
Mme la présidente. J’informe le Sénat qu’une candidature pour siéger au sein de la délégation sénatoriale aux outre-mer a été publiée.
Cette candidature sera ratifiée si la présidence n’a pas reçu d’opposition dans le délai d’une heure prévu par notre règlement.
3
Organisation des travaux
Mme la présidente. Mes chers collègues, la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable demande que le délai limite de dépôt des amendements de séance sur le projet de loi d’orientation des mobilités examiné en nouvelle lecture soit reporté du mercredi 30 octobre au lundi 4 novembre à douze heures.
Y a-t-il des observations ?…
Il en est ainsi décidé.
4
Pouvoir de dérogation aux normes attribué aux préfets
Adoption d’une proposition de résolution
Mme la présidente. L’ordre du jour appelle, à la demande de la délégation aux collectivités territoriales, l’examen de la proposition de résolution, en application de l’article 34-1 de la Constitution, relative à la consolidation du pouvoir de dérogation aux normes attribué aux préfets, présentée par MM. Jean-Marie Bockel et Mathieu Darnaud (proposition n° 664 [2018-2019]).
Dans la discussion générale, la parole est à Jean-Marie Bockel, auteur de la proposition de résolution.
M. Jean-Marie Bockel, auteur de la proposition de résolution. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, depuis plusieurs années, les gouvernements successifs tentent de maîtriser l’inflation normative. Le Sénat, la délégation aux collectivités territoriales, en particulier, sous l’impulsion du président Gérard Larcher et conformément à notre mission de simplification des normes applicables aux collectivités, prend sa part de cet effort. Je citerai, à titre d’exemple, la proposition de loi relative à la simplification du droit de l’urbanisme, déposée par Marc Daunis et François Calvet, ici présents, sous la houlette de Rémy Pointereau, dont environ 70 % du contenu se trouve intégré à notre corpus juridique. À l’époque, nous avions fait le choix de nous attaquer à un sujet pour ne pas nous disperser et essayer d’être efficaces ; je crois que nous l’avons été.
Je mentionnerai aussi la proposition de loi portant Pacte national de revitalisation des centres-villes et centres-bourgs, présentée par Rémy Pointereau et Martial Bourquin, en lien avec la délégation aux entreprises, qui a abouti à l’injection de dispositions de simplification dans la loi portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, dite loi ÉLAN.
Je citerai enfin la proposition de résolution tendant à mieux maîtriser le poids de la réglementation applicable aux collectivités territoriales et à simplifier certaines normes réglementaires relatives à la pratique et aux équipements sportifs, présentée par Dominique de Legge, Christian Manable et Michel Savin.
Pour autant, les résultats ne sont pas à la hauteur des espérances. Il faut rappeler quelques chiffres qui illustrent la difficulté de réduire significativement le flux des nouvelles normes et le stock des anciennes. Pour le flux, chaque année, sont publiés environ 50 à 60 lois, hors conventions, entre 1 600 et 1 800 décrets, près de 8 000 arrêtés ministériels et entre 1 300 et 1 400 circulaires. Quant au stock, il s’établit à plus de 80 000 articles législatifs et plus de 240 000 articles réglementaires en vigueur.
Confrontés à cette difficulté, les pouvoirs publics se sont tournés vers une nouvelle méthode. Elle consiste à réduire le poids des normes en aval de leur production, d’une part, en sollicitant des services de l’État une interprétation « facilitatrice » de ces normes, d’autre part, en confiant à certains préfets, dans le cadre d’une expérimentation, le pouvoir de déroger à quelques-unes d’entre elles.
Si nombre de préfets font de l’interprétation facilitatrice des normes, comme M. Jourdain faisait de la prose, c’est-à-dire naturellement, il n’en reste pas moins que cette méthode est difficile à évaluer. Fondée sur de simples et lapidaires circulaires, elle ne dispose que d’une base juridique fragile et n’a fait l’objet d’aucun suivi par l’administration.
Le pouvoir de dérogation aux normes s’appuie, quant à lui, sur une base juridique autrement plus solide : un décret de décembre 2017. Expérimenté depuis le mois d’avril 2018 dans vingt départements et régions, il permet aux préfets, dans un nombre limité de domaines, de déroger aux seules décisions individuelles relevant de leur compétence et fondées sur des mesures réglementaires.
Nous avons pu évaluer ce dispositif, qui fait l’objet d’un véritable suivi par le ministère de l’intérieur. Et nous avons constaté qu’il joue d’ores et déjà un rôle utile dans les territoires où il est expérimenté. Il a permis, selon les cas, de réduire les délais d’obtention de décisions, voire de « sauver » des projets complexes ou affectés de défauts bénins, comme des dépassements de délai. Nous avons d’ailleurs auditionné deux des préfets concernés : ils ont souligné l’intérêt de cette démarche, mais aussi les points qui la freinent.
Ce mécanisme nous semble donc devoir être pérennisé, étendu à tout le territoire, avec un champ d’application élargi. C’est l’objet principal de cette proposition de résolution, déposée par Mathieu Darnaud, aujourd’hui excusé, mais partie prenante de la démarche, et moi-même, que d’encourager le Gouvernement à le faire rapidement.
Toutefois, je souhaite commencer par rappeler un point de méthode. Il est regrettable que, faute de suivi, l’incidence des instructions relatives à l’interprétation facilitatrice des normes soit impossible à mesurer. Pour l’avenir, il est impératif de systématiser, à l’échelon national et local, les mécanismes de suivi et d’évaluation des dispositifs de simplification.
Premier axe de notre proposition, nous recommandons que l’évaluation du pouvoir de dérogation par le ministère privilégie un dialogue direct avec les préfets expérimentateurs, chevilles ouvrières du dispositif. Elle pourrait par ailleurs associer des élus, des professionnels du droit, de même que le Conseil national d’évaluation des normes applicables aux collectivités territoriales et à leurs établissements publics, le CNEN, présidé par Alain Lambert, avec lequel la délégation travaille bien et avec lequel le président Larcher a signé une charte il y a quelque temps. Nous avons un bon dialogue avec cette instance – ce n’est pas Alain Richard, également partie prenante, qui dira le contraire ! Les échanges sont tout autant de qualité avec les délégations aux collectivités territoriales des deux assemblées.
Deuxième axe de notre proposition, nous soulignons la nécessité de créer les conditions d’un dialogue entre l’État et les collectivités territoriales à propos de la simplification des normes, via une conférence de dialogue départementale. Une instance similaire avait été proposée par Alain Lambert et le regretté Jean-Claude Boulard, de même que par les rapporteurs de notre délégation, François Calvet et Marc Daunis, pour remédier aux difficultés du dialogue entre collectivités et services de l’État, en particulier pour ce qui concerne les projets d’urbanisme.
Loin d’être une instance de plus, cette conférence départementale est une occasion « en moins » de blocage et d’incompréhension. Au-delà de ses compétences inscrites dans la loi – l’émission d’un avis sur des cas complexes d’interprétation des normes ou sur les dérogations sollicitées –, elle serait par ailleurs un aiguillon pour les préfets et pour les services de l’État.
J’ai bon espoir que cette instance finisse par voir le jour. J’ai en effet déposé un amendement à cet effet au projet de loi Engagement et proximité, que la commission des lois a bien voulu intégrer à son texte et que le Sénat a adopté, dans le cadre de la première lecture, en tout cas.
Troisième axe de notre proposition, nous voulons renforcer la formation des agents publics et l’information des élus et des bénéficiaires potentiels. La recherche de la souplesse dans l’application du droit et l’objectif de simplification normative doivent devenir des éléments de la culture professionnelle des agents publics, pour l’instant davantage fondée sur le strict respect de la règle. Cela ne sera possible qu’en transformant les cursus de formation. Il est indispensable d’inclure des modules de formation initiale et permanente contre l’inflation normative dans les programmes des écoles du service public, les instituts régionaux d’administration, les IRA, l’Institut national des études territoriales, l’INET, le Centre national de la fonction publique territoriale, le CNFPT, et l’École nationale d’administration, l’ENA.
Les témoignages des élus et des fonctionnaires territoriaux attestent, par ailleurs, de l’existence d’un déficit d’information sur les dispositifs de simplification qu’il est impératif de combler. À titre d’exemple, les sites internet des préfectures et du ministère de l’intérieur devraient comporter des rubriques aisément accessibles sur ces sujets.
Cela étant, l’expérience montre que mettre en œuvre la dérogation exige un surcroît d’instructions pour les services. Dans ces conditions, que l’administration centrale tienne compte de la dynamique facilitatrice des préfectures dans l’affectation de leurs moyens humains pourrait être non seulement une exigence de bonne administration, mais aussi un outil de motivation des personnels et des préfets.
Enfin, quatrième et dernier axe, nous proposons d’élargir le champ de la possibilité de déroger aux normes. Il s’agit, d’abord, de l’ouvrir à l’ensemble du territoire national.
Au-delà, une première faculté d’extension du champ d’application du décret consisterait à élargir la dérogation à des domaines nouveaux. Les préfets pourraient ainsi déroger en toutes matières relevant de leurs compétences, sous les réserves classiques du respect des engagements de la France et des intérêts de la défense ou de la sécurité.
Par ailleurs, les « circonstances locales » conditionnant la possibilité d’une dérogation préfectorale sont superfétatoires avec la condition de l’existence d’un motif d’intérêt général et ne semblent pas constituer une condition indispensable. S’agissant d’une dérogation à des normes, comment un acte motivé par l’intérêt général et pris par le préfet, autorité locale, dans le cadre des compétences qu’il exerce dans le département ne serait-il pas ipso facto adapté aux circonstances locales ?
Une deuxième possibilité d’élargissement, qui constituerait un puissant outil de déconcentration, consisterait à donner la faculté au préfet de département, selon des modalités à préciser, de déroger à des décisions relevant de la compétence des autorités supérieures, préfet de région ou ministre.
Une troisième avancée, plus audacieuse, serait d’attribuer, cette fois aux autorités décentralisées, un pouvoir de dérogation sur les actes individuels relevant de leurs compétences.
Une quatrième piste, plus ambitieuse encore, consisterait à autoriser des dérogations, sollicitées par les collectivités territoriales, à des normes législatives ou réglementaires. Envisagée dans le cadre du projet de révision constitutionnelle, elle est également évoquée dans les réflexions préalables au projet de décentralisation – j’ai encore eu l’occasion d’en discuter ce matin même avec Jacqueline Gourault.
Bien sûr, sa mise en œuvre ne doit altérer ni la cohésion nationale ni l’égalité entre les citoyens. N’oublions pas que pour les partenaires des collectivités et pour les citoyens, la différenciation territoriale peut être une source d’insécurité juridique et de complexité. Il lui faut donc un cadre d’exercice minutieusement construit, conjugué à des mécanismes politiques concrets permettant d’empêcher des abus.
Au sein du groupe Union Centriste, nous avons récemment organisé, avec Françoise Gatel, un colloque sur les enjeux de différenciations territoriales qui a eu un grand succès. Nous avons cette préoccupation d’assurer l’égalité des territoires, d’exercer une forme de solidarité et de laisser une nécessaire souplesse. Il faudra trouver la juste mesure, en respectant l’esprit français, car nous ne sommes pas un État fédéral. Ainsi, nous pourrons avancer.
Dans cet esprit, je vous invite, mes chers collègues, à adopter la proposition de résolution qui peut donner de réelles pistes pour davantage de simplification.
J’appelle le Gouvernement, monsieur le secrétaire d’État, à poursuivre, en la matière, cette coopération avec le Sénat, en général, avec notre délégation, en particulier, puisque nous sommes au service de cette volonté modernisatrice et simplificatrice. (Applaudissements sur les travées des groupes UC, Les Républicains, RDSE et LaREM.)
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.
M. Pierre-Yves Collombat. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, cette proposition de résolution part certainement d’une intention louable : pérenniser les dispositions du décret du 29 décembre 2017, qui met en place l’expérimentation, sur quelques territoires choisis, d’un droit de dérogation des préfets à adapter la réglementation aux situations locales.
Elle entend aussi, avant même de disposer d’un corpus suffisant de résultats de l’expérimentation en cours, élargir le domaine de cette expérimentation et populariser les exemples de dérogations réussies au titre de bonnes pratiques, ce qui nous paraît, cette fois, plus discutable.
Je résumerai simplement mon propos.
Premier point, le décret lançant l’expérimentation de ce droit préfectoral à déroger aux normes réglementaires est bienvenu et d’ailleurs étonnamment clair, je dois le dire. À l’heure actuelle, si mes informations sont bonnes, environ 140 arrêtés de dérogation auraient été pris, et un seul fait l’objet de contestation.
Il semble aussi – si je me trompe, M. le secrétaire d’État me le dira – que ces dérogations portent, dans l’ensemble, plus sur la procédure, comme la réduction de la durée d’une enquête publique, sous peine de faire échouer un projet localement important, ou la mise en application anticipée de dispositions d’un plan de prévention des risques d’inondation, un PPRI. Les choses ont plus été modifiées sur la forme, la procédure, que sur le fond, ce qui me paraît vraiment constituer la piste de recherche à privilégier.
Deuxième point, si la création, prévue par la proposition de résolution, d’une instance départementale autour du préfet et composée de représentants des collectivités territoriales est bienvenue dans la mesure où ces élus sont peut-être les mieux placés pour repérer les domaines dans lesquels une adaptation de la réglementation serait souhaitable, cette instance ne saurait être, selon nous, transformée en instance d’expertise et encore moins en instance de décision, ce qui n’est pas clairement indiqué dans les préconisations.
Dans le même ordre d’idée, on pourrait fragiliser le dispositif en élargissant les possibilités de dérogation à des questions sans lien avec des difficultés et des spécificités locales ou en accordant aux collectivités le pouvoir de déroger aux décisions législatives. Cette idée m’a quelque peu étonné, mais enfin, il faut être moderne !
En outre, contrairement à ce qu’on croit et à ce qu’on dit, les bonnes pratiques sont rarement généralisables et leur réussite suppose le plus souvent des conditions locales très particulières. En faire la publicité avant une expérimentation suffisamment large me semble donc un peu risqué.
Troisième point, je crains que tout l’appareil prévu par la proposition de résolution afin d’affermir juridiquement les décisions dérogatoires prises pour sécuriser les préfets et les inciter ainsi à se saisir de ce nouveau droit n’ait l’effet inverse : refroidir toutes leurs velléités d’innovation. Certes, celles-ci existent, certains préfets me les ont exprimées, mais tous n’en ont pas.
Restons simples, ne compliquons pas, commençons par élargir le champ de l’expérimentation, et peut-être alors, quand nous disposerons d’un corpus suffisant, serons-nous en mesure de préciser comment généraliser utilement les effets de cette expérimentation. Je recommanderais d’élargir l’expérimentation en cours, qui semble avoir donné des résultats tout à fait intéressants dans un nombre significatif de départements, pour pouvoir en tirer des conclusions réellement incitatives.
Nous mesurons l’intérêt de la question et l’opportunité de l’avoir soulevée, mais nous avons quelques différences d’appréciation sur les préconisations. Telles sont les raisons pour lesquelles le groupe CRCE s’abstiendra sur cette proposition de résolution. (M. Jean-Pierre Sueur applaudit.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Françoise Gatel. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
Mme Françoise Gatel. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la délégation aux collectivités territoriales du Sénat, présidée par Jean-Marie Bockel, nous soumet aujourd’hui une proposition de résolution qui est le fruit d’un long travail achevé avec la présentation, au mois de juin dernier, d’un excellent rapport sur la réduction du poids des normes en aval de leur production, sorte de cauchemar récurrent de l’ensemble des élus locaux.
La réduction du nombre de normes est évidemment une préoccupation extrêmement importante, régulièrement exprimée au Sénat. On le sait, un peu plus de 400 000 normes réglementaires s’imposent aux seules collectivités locales et les enferment très souvent dans un coûteux carcan juridique.
Cette « incontinence normative », pour reprendre les termes employés par MM. Lambert et Boulard dans leur rapport de 2013, est un obstacle considérable à l’initiative. Elle est surtout contreproductive à l’efficacité de l’action publique, qui nous est chère et dont nous n’avons cessé de parler pendant ces quinze derniers jours. Elle l’est a fortiori dans un contexte de crise économique et de baisse des ressources des collectivités.
Les normes sont souvent, nous n’arrêtons pas de le dire, un empêchement de faire !
Mais ce matin, nous débattons plus spécifiquement du pouvoir de dérogation aux normes attribué aux préfets, une sorte de rêve pour les élus locaux, qui constitue un aspect important de cette thématique.
Il convient en effet de s’intéresser aux outils qui permettent d’accompagner avec souplesse et pragmatisme les élus sur le terrain, à savoir l’« interprétation facilitatrice » et le pouvoir de dérogation des préfets.
Et ce que nous examinons ce jour est bien, mes chers collègues, une facette de la différenciation territoriale.
On ne cesse de parler de différenciation territoriale depuis plusieurs mois, à commencer par le Gouvernement. Ce fut en effet un axe très important du dernier discours de politique générale du Premier ministre, et Mme la ministre Jacqueline Gourault est en ce moment en pleine consultation afin de préparer le texte qu’il est maintenant convenu d’appeler le projet de loi 3D.
Les centristes du Sénat, par nature, par essence et par conviction décentralisateurs, ne sont pas en reste sur le sujet. En effet, nous avons organisé, au mois de septembre dernier, un colloque sur la différenciation territoriale qui a connu un certain succès, Jean-Marie Bockel l’a rappelé.
Des mesures de différenciation territoriale, nous en avons adopté un certain nombre au cours des deux semaines passées lors de l’examen du texte Engament et proximité, présenté par le ministre Sébastien Lecornu. Eh oui, comme M. Jourdain qui faisait de la prose sans le savoir, nous faisons de la différenciation sans le savoir ! Nous la souhaitons néanmoins.
Aujourd’hui, il est question d’une forme particulière de différenciation, qui concerne non pas l’organisation territoriale, mais l’adaptation des normes ou, plus précisément, l’adaptation des normes à la diversité et à la spécificité des territoires.
Rappelons-le très fortement, différenciation rime avec déconcentration. Il n’y aura pas de différenciation sans déconcentration !
Je ne reviendrai pas sur l’ensemble de cette proposition de résolution, mais je tiens à insister sur ses trois derniers points, qui me semblent stratégiques.
« Envisager la possibilité pour le représentant de l’État de déroger à des décisions relevant de la compétence des autorités supérieures » : il faut que les préfets aient cette possibilité de dérogation. C’est une nécessité pour commencer à s’extraire de l’inertie de la technostructure administrative à laquelle il arrive d’être un peu trop conceptuelle et normative. Dans la mise en œuvre de tel ou tel projet, les élus doivent savoir que leur préfet détient en propre une réelle faculté d’adaptation, laquelle les dispense d’en référer systématiquement à une autorité supérieure, à Paris.
« Étendre le droit de dérogation en l’ouvrant aux autorités décentralisées pour les actes individuels des collectivités territoriales relevant de leurs compétences » : cette deuxième proposition est liée à la précédente. Là encore, la finalité est que les élus aient face à eux une autorité pleinement déconcentrée et sécurisée, une autorité qui représente l’État, mais à laquelle on a conféré une autonomie de décision suffisante lui permettant d’accorder des dérogations.
« Envisager de permettre aux collectivités territoriales de déroger, sur leur demande, aux normes législatives ou réglementaires relatives à leurs compétences, sous réserve d’un mécanisme politique empêchant la survenance d’abus et garantissant l’égalité des citoyens devant la loi » : cette dernière proposition, probablement la plus ambitieuse, serait de facto une nouvelle étape fondamentale de la décentralisation. Une décentralisation qui ferait le choix de la différenciation, d’une adaptation aux réalités locales avec, comme priorité, l’amélioration de la qualité des politiques publiques au bénéfice de nos concitoyens.
Si nous appelons de nos vœux ces évolutions, je partage pour autant la réserve formulée par les auteurs de la proposition de résolution, qui insistent sur la nécessité de mettre en place « des mécanismes concrets permettant d’empêcher des abus locaux qui, une fois installés, seraient difficiles à corriger. »
Je tiens à saluer, une fois encore, la qualité du travail de nos deux collègues, Jean-Marie Bockel et Mathieu Darnaud. Nous espérons que leurs propositions seront entendues par le Gouvernement dans les mois à venir, notamment dans le cadre du projet de loi 3D.
Vous l’aurez compris, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le groupe Union Centriste, convaincu que la décentralisation arrivera un jour, partage l’intégralité des préconisations de cette proposition de résolution. Sans surprise, nous la voterons à l’unanimité. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Indépendants. – M. Antoine Lefèvre applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à M. François Calvet.
M. François Calvet. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je voudrais féliciter M. le président de la délégation aux collectivités territoriales, Jean-Marie Bockel, et Mathieu Darnaud pour la proposition de résolution que nous examinons ce matin.
Ce texte est une suite logique du rapport d’information qu’ils ont présenté sous l’intitulé Réduire le poids des normes en aval de leur production : interprétation facilitatrice et pouvoir de dérogation aux normes.
« Prolifération », « inflation », « surproduction », les dénominations sont nombreuses pour désigner un mal désormais bien identifié : l’accumulation des normes qui pèsent sur les collectivités territoriales.
On fait souvent remonter la prise de conscience de la prolifération des normes au rapport public du Conseil d’État de 1991, lequel établissait le constat suivant : « la surproduction normative, l’inflation des prescriptions et des règles ne sont pas des chimères mais une réalité ». De substantiels développements venaient étayer la démonstration de l’existence d’une véritable « logorrhée législative et réglementaire ».
Vingt-huit ans plus tard, le constat est le même et se révèle particulièrement préoccupant pour les collectivités territoriales.
À la demande du président Gérard Larcher et en emboitant le pas de Rémy Pointereau, mon collègue Marc Daunis et moi-même avons conduit une mission transpartisane qui a donné lieu à un rapport d’information intitulé Droit de l’urbanisme et de la construction : l’urgence de simplifier. De ce rapport est issue une proposition de loi adoptée à l’unanimité par l’ensemble des groupes du Sénat en 2016.
Nous avions, en effet, constaté les difficultés du dialogue entre collectivités territoriales et services de l’État, en particulier pour les projets d’urbanisme et d’aménagement.
Une application stricte du contrôle de légalité n’est-elle pas un facteur d’absence de possibilité de dérogation ou d’adaptation nécessaire à la réalisation d’un projet de développement économique et créateur d’emplois ?
Pour remédier à cette situation et simplifier l’action des élus, nous proposions dans notre rapport de créer une conférence d’accompagnement des projets locaux.
Malgré les avancées signalées par Jean-Marie Bockel, il est regrettable que cette idée d’une instance de conseil auprès du préfet n’ait, pour le moment, pas été suivie d’effet, alors même que constats de terrain et études montrent que les relations entre collectivités et services de l’État se sont dégradées depuis plusieurs années.
Le quatorzième point de la proposition de résolution reprend la nécessité d’instituer une instance départementale auprès du préfet.
Compte tenu de l’application de la règle du non-cumul des mandats, j’y ajouterai aujourd’hui que devraient siéger un député et un sénateur désignés, par département, choisis par le président de chacune des assemblées.
Je veux aussi évoquer deux points qui ne figurent pas dans la proposition de résolution. Le premier concerne plus particulièrement les zones frontalières où les transpositions de directives européennes ont ajouté des normes qui créent des distorsions de concurrence pour nos entreprises frontalières. Dans ce domaine, les préfets devraient avoir un pouvoir d’appréciation dans les départements frontaliers.
Le second point consiste en la création d’un service d’études d’impact autonome, qui permettrait non seulement de corriger l’application des normes, mais également d’anticiper leur incidence sur le terrain.
On ne peut plus se contenter des études d’impact du seul Gouvernement qui sont souvent insuffisantes, légères et, comme l’a souligné notre collègue Jean-Marie Bockel, orientées.
Enfin, il s’agit non de dérogation aux normes, mais de différenciation. Comme l’a évoqué Mathieu Darnaud, la différenciation prend en compte une certaine dynamique territoriale suffisamment spécifique, comme en zone de montagne. On doit permettre de sortir du champ national.
Ce texte pragmatique constitue un outil indispensable au service de la simplification du droit dans les collectivités territoriales.
Il prend toute sa place dans la démarche d’ensemble suivie aujourd’hui pour lutter contre la surproduction des normes.
Tel est le sens des travaux menés au Sénat. En effet, s’il est vrai que de nombreux rapports ont permis d’affiner le constat, il n’empêche que les normes se multiplient, créent la complexité et induisent des coûts au détriment de l’efficacité de l’action publique.
Mes chers collègues, il faut revenir à des valeurs sûres : le bon sens et la confiance envers le savoir-faire des élus et des préfets. Celui qui vous parle est un Girondin, mais un Girondin qui aime les préfets !
Nous voterons en faveur de la présente proposition de résolution. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur. (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR.)
M. Jean-Pierre Sueur. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, il suffit de fréquenter les associations d’élus et d’assister à des réunions de maires pour se rendre compte que le thème des normes est omniprésent : « trop de normes ». Il faut regarder cela avec une certaine philosophie, car les mêmes qui protestent l’après-midi contre l’abondance des normes sont susceptibles d’en demander davantage le matin, dans un juste souci de préservation de l’environnement, de sécurité ou de santé publique.
M. Jean-François Longeot. C’est vrai !
M. Jean-Pierre Sueur. Cela étant dit, il est vrai que la question se pose. Comment y répondre ? Cher Jean-Marie Bockel, cher Mathieu Darnaud, nous ne sommes pas persuadés que la solution passe par les préfets et leur pouvoir d’adaptation.
À nos yeux, ce qui est efficace, ce serait évidemment d’avoir des ouvertures peut-être plus grandes en matière d’expérimentation et d’adaptation dans la Constitution. Mais vous pensez bien que je ne vais pas entamer un tel débat aujourd’hui : il faudrait qu’il y eût une réforme de la Constitution, ce qui supposerait d’avancer encore sur quelques points, notamment le numérique.
Une autre solution réside évidemment dans la loi, et non dans le décret ; la loi peut prévoir un certain nombre d’adaptations ou d’expérimentations.
Une troisième solution a déjà été décidée par le Parlement. À la suite des états généraux des collectivités locales, qui avaient été organisés voilà quelques années par Jean-Pierre Bel, Jacqueline Gourault et moi-même avions été chargés d’élaborer deux propositions de loi.
La première portait sur les conditions d’exercice des mandats locaux. Elle a abouti à quelques mesures positives, qui doivent d’ailleurs être complétées ; nous l’avons vu ces derniers jours.
La seconde concernait les normes. Par ce texte, adopté, je crois, de manière unanime par le Sénat, nous avons institué le Conseil national d’évaluation des normes applicables aux collectivités territoriales et à leurs établissements publics, ou CNEN. L’idée était simple : tout projet de texte réglementaire ou législatif susceptible d’entraîner des normes complémentaires pour les collectivités territoriales serait étudié en amont par cette instance. Le CNEN, qui se compose essentiellement d’élus des communes, des départements et des régions, a la faculté de renvoyer la copie au Gouvernement en demandant une réécriture. Cela se révèle relativement efficace. Il serait bien de regarder comment cet organe, qui est présidé par Alain Lambert, travaille.
M. Jean-Marie Bockel. Nous l’avons fait !
M. Jean-Pierre Sueur. Je le sais, cher Jean-Marie Bockel. M. Lambert a dû vous dire que les conditions de travail n’étaient pas idéales. Bien souvent, les textes sont transmis très tardivement par le Gouvernement, et le CNEN éprouve des difficultés à formuler un avis dans les délais qui lui sont impartis. Il me semble qu’une des pistes serait de lui donner plus de moyens et de latitude pour remplir sa mission, qui est très utile.
Ainsi, dans le domaine sportif, quand l’excellente Fédération française de basket-ball – vous savez que nous n’avons rien contre le basket-ball – impose de changer les tableaux d’affichage faute de quoi le terrain ne serait pas homologué, la décision qu’elle prend entraîne des dépenses publiques dans plusieurs centaines de communes, alors que la question de savoir si c’est absolument nécessaire et si les collectivités territoriales n’ont pas d’autres priorités se pose légitimement. Par conséquent, il est bon que des élus et leurs représentants puissent dire en amont que ce n’est pas la bonne méthode et qu’il faut se centrer sur d’autres sujets.
Venons-en à nos préfets. J’ai une idée, peut-être simpliste – mais je ne crois pas –, de la fonction de préfet. Le rôle du préfet est non pas d’adapter les lois ou les décrets, mais de les appliquer ; si quelqu’un a ce rôle, c’est bien lui. Il représente l’État ; c’est une banalité de le rappeler. Que figurent dans la loi et dans d’autres textes des possibilités d’adaptation, très bien !
Permettez-moi de citer deux anciens Premiers ministres. En 2013, Jean-Marc Ayrault demandait aux préfets de veiller à ce que leurs services « utilisent toutes les marges de manœuvre autorisées par les textes » ; cela me semble très clair. En 2016, Manuel Valls s’adressait aux préfets en ces termes : « Il vous appartient d’utiliser toutes les marges de manœuvre, dans le respect des textes législatifs et réglementaires en vigueur » ; cela me paraît de bon sens.
Mon groupe pense donc qu’il faut faire preuve de prudence. Le préfet du Haut-Rhin, que M. le président de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation cite à juste titre dans son rapport, déclarait, à propos du décret de décembre 2017 : « Ce décret a soulevé un important paradoxe. Lors de sa parution, il a en effet suscité une grande inquiétude ». Il poursuivait en évoquant « la possibilité d’une incertitude juridique puisqu’une décision prise sur dérogation s’avère plus fragile juridiquement, ainsi qu’[un] risque de donner l’impression d’un État arbitraire prenant des décisions différentes en fonction des demandeurs et des collectivités territoriales concernées. » C’est ce que dit un préfet de la République !
Je fais également observer que M. le préfet de Vendée a utilisé cette possibilité d’expérimentation des dérogations dans une décision en faveur d’un parc éolien en évitant la réalisation d’une étude d’impact et d’une enquête publique. J’ignore ce que dirait une juridiction administrative si elle était saisie d’un tel sujet.
Nous sommes donc partisans d’une certaine prudence. Certes, c’est effectivement une bonne idée d’adapter les normes, d’expérimenter, de trouver la souplesse nécessaire et de s’adapter au terrain. Mais il faut que ce soit prévu par la loi et les autres textes et que le préfet fasse ce qu’il a à faire, c’est-à-dire représenter l’État, appliquer la loi et les instructions des ministres.
Nous voterons contre la présente proposition de résolution, parce que nous sommes attachés à la distinction des rôles et à la séparation des pouvoirs. La décentralisation n’est pas la négation de l’État ; elle est seulement la négation d’un État omnipotent qui voulait faire trop de choses au risque de ne pas bien les faire.
M. François Calvet. C’est incroyable !
M. Jean-Pierre Sueur. Nous sommes pour que l’État comme les collectivités territoriales et leurs élus jouent pleinement leur rôle. En d’autres termes, nous préférons la séparation des pouvoirs à la confusion des pouvoirs. (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR.)
Mme la présidente. La parole est à M. Éric Gold. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
M. Éric Gold. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, alors que la réforme constitutionnelle, qui doit consacrer le droit à la différenciation territoriale, peine à voir le jour, le Sénat est réuni ce matin pour affirmer sa position sur le pouvoir de dérogation aux normes attribué aux préfets.
Dans un pays historiquement centralisé tel que le nôtre, les normes ont toujours été conçues pour garantir une égalité de traitement entre les citoyens et les territoires, avec de surcroît des attentes très élevées envers les politiques publiques.
Le constat est connu, ancien et unanime : chacun déplore l’inflation normative, législative comme réglementaire. Nous aussi, législateurs, devons prendre notre part de blâme. Je me souviens ainsi du travail considérable effectué par la mission Bureau d’annulation des lois anciennes et inutiles, ou Balai. Celle-ci a conduit à l’adoption d’une proposition de loi de notre collègue Vincent Delahaye tendant à améliorer la lisibilité du droit par l’abrogation des lois obsolètes illisibles, que nous avons été très nombreux à cosigner. Le groupe RDSE y a pris sa part, avec le rapport de notre collègue Nathalie Delattre.
La présente proposition de résolution constitue une nouvelle pierre à cet édifice titanesque. Mon groupe valide bien entendu sans réserve le rapport sur lequel elle s’appuie. Par son attachement aux territoires et à leur diversité, comme vous tous, il souscrit pleinement à l’objectif d’allégement des démarches administratives et d’accélération des procédures.
Au-delà de la différenciation territoriale, le Gouvernement a reconnu que la réduction du stock des normes applicables aux collectivités figurait parmi les enseignements du grand débat. Ce n’est pas nouveau. Je pense aussi au travail important fourni par nos anciens collègues Alain Lambert et Jean-Claude Boulard dans leur rapport.
Les élus nous le disent tous les jours : le poids des normes et des obligations alourdit leur charge de travail et ralentit la progression des réformes. L’inflation normative – je parle ici des flux, et non du stock – est un obstacle aux initiatives locales. Elle paralyse l’action publique, là où nos concitoyens attendent beaucoup des collectivités. Et elle alimente encore la crise des vocations chez les élus locaux.
Bien entendu, les gouvernements successifs ont tenté ces dernières années de maîtriser cette inflation normative en réduisant non pas le flux de nouvelles normes ou le stock de normes anciennes, mais le poids des normes, grâce à une interprétation facilitatrice de la part de l’État et à une expérimentation offrant un pouvoir de dérogation aux préfets.
L’interprétation facilitatrice étant soumise à un engagement concret des préfets, les auteurs de la proposition de résolution lui préfèrent le pouvoir de dérogation aux normes, qui s’appuie sur une base juridique plus solide et plus objective.
Toutefois, cette expérimentation n’est pas exploitée à son maximum, puisqu’elle est mal connue et très encadrée. De plus, nous l’avons compris, elle arrive à son terme au mois de décembre prochain.
À travers cette proposition de résolution, le Gouvernement est ainsi invité à prendre des mesures pour étendre le dispositif, qui serait alors assorti de mécanismes d’information et de formation. La différenciation territoriale pouvant être source d’insécurité juridique et de complexité, elle doit en effet être encadrée, pour être mieux conciliée avec le principe d’égalité des territoires.
Toutefois, avant toute révision constitutionnelle, le groupe RDSE se joint à la délégation aux collectivités territoriales pour solliciter de l’État un indispensable desserrement des contraintes pesant sur les collectivités. Comment pourraient agir efficacement les petites collectivités face aux 1 600 décrets et 8 000 arrêtés ministériels produits chaque année alors que le contrôle de légalité des préfectures est de moins en moins protecteur ?
M. François Calvet. Eh oui !
M. Éric Gold. La délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation propose ainsi plusieurs mesures pour davantage de rapidité, de souplesse et de pragmatisme dans la mise en œuvre des politiques publiques : d’abord, en rendant pérenne et en élargissant le champ d’application du droit à la dérogation pour les préfets de région ; ensuite, en donnant la possibilité au préfet de département de déroger à certaines décisions du préfet de région et du ministre ; enfin, en étendant également ce pouvoir aux collectivités qui souhaiteraient déroger à certaines normes pour tenir compte de leurs spécificités locales.
Ces mesures seraient utilement complétées par une meilleure information des agents, élus et destinataires des normes, par un dialogue local renforcé entre l’État et les collectivités, ainsi que par une meilleure évaluation du dispositif. Une consultation du Sénat est même envisagée pour les dérogations sollicitées par les collectivités. Assorties de telles garanties, les mesures évoquées semblent répondre au besoin de simplification de nos territoires. C’est pourquoi le groupe RDSE votera majoritairement en faveur de cette proposition de résolution.
Toutefois, nous nous accordons pour dire qu’une démarche au cas par cas est limitée. C’est une approche globale dont nous avons besoin, pour ouvrir une nouvelle forme de décentralisation et de proximité. Cela passe par une profonde transformation des processus de fabrication des normes, au-delà de la seule révision constitutionnelle.
Enfin, je tiens à rappeler que la dérogation doit poursuivre un motif d’intérêt général et de non-régression. Ne tombons pas dans la caricature en allégeant tout et partout. Le niveau d’exigence doit absolument être maintenu, notamment en matière environnementale, où l’idée de bien commun doit toujours nous accompagner. (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE et UC. – M. François Calvet applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Richard.
M. Alain Richard. Ce débat est bienvenu, et il a l’avantage d’être toujours d’actualité, quelle que soit la période où on peut l’engager. Nous sommes là pour nous livrer à une analyse du résultat produit par deux circulaires et un décret qui s’étalent entre 2013 et 2017, les circulaires parlant de « marge d’interprétation » et le décret parlant, comme c’est logique, de « pouvoir de dérogation encadré ».
Je participe à la demande générale de restitution et d’évaluation de l’application de ces textes. Nous attendons de savoir ce que M. le secrétaire d’État en dira. Simplement, je nous prends collectivement à témoin que voilà encore un cas d’injonction contradictoire : nous avons accompagné et, pour beaucoup, voté la réduction des effectifs dans le plan Préfecture du XXIe siècle, mais, dans le même temps, nous demandons aux préfectures d’assumer des tâches supplémentaires. Il faut donc bien que nous soyons un peu pragmatiques.
Je souligne tout particulièrement le caractère productif et judicieux, du fait de la charge qui pèse sur les représentants de l’État et de la loi constitutionnelle dans les territoires, de la recommandation concrète contenue dans la proposition de résolution, à savoir la création d’un petit conseil local d’accompagnement du pouvoir de dérogation. L’expérience que nous avons tous – la mienne a quelques dizaines d’années dans le Val-d’Oise – montre que, dans les commissions consultatives placées auprès du préfet, de conseil et de conciliation, il y a une bonne expertise de travail local et, bien souvent d’ailleurs, une élévation du niveau de réflexion permettant d’avoir une jurisprudence rationnelle. Au fond, il est simplement suggéré de faire des petits CNEN locaux. À mon sens, cela ne coûterait rien, et ce serait un utile outil d’accompagnement du travail, si astreignant, des services préfectoraux.
Je ne m’étendrai pas sur les autres préconisations de la résolution. En revanche, je voudrais élargir le propos à la conception d’aujourd’hui, qui est en transformation et en débat, de la légalité de l’action publique. Nous sommes un État de droit, construit par une tradition multiséculaire, dans laquelle l’institution dont j’ai eu l’honneur d’être membre, le Conseil d’État, a évidemment joué un certain rôle. Le principe de légalité, qui traverse l’ensemble des missions et des strates de l’action locale, fait partie de notre culture de base.
Le rapport du Conseil d’État de 2013 sur le droit souple a été pour moi une vraie et heureuse surprise. Analysant l’existant et constatant ce qui est en train de se passer, celui-ci a commencé à développer une théorie que je résumerais un peu sommairement comme un retour de l’opportunité ; c’est le retour du droit de l’administration et des pouvoirs publics de procéder à des appréciations d’opportunité, donc de faire revenir dans l’application du droit une marge de pouvoir discrétionnaire.
Simplement, le pouvoir d’appréciation se heurte à une peur et à une méfiance, du fait d’une tradition ancienne et de l’évocation des anciens régimes autoritaires. Le débat a été très intense dans le premier tiers de la IIIe République, et le thème de la peur de l’exécutif a fait l’objet d’ouvrages historiques très intéressants. En France, notre usage est d’entourer le pouvoir d’appréciation de l’autorité publique par un cadre très exigeant de procédure, de droit de la défense, d’examens successifs, d’enquêtes et d’évaluations. C’est très ancré dans nos conceptions.
La rigidité de la loi ne vient pas de nulle part. Toute norme exigeante a été exigée. Dans le dialogue que nous avons avec la « société civile », selon le terme gramscien par lequel on a choisi de la baptiser, nous faisons en permanence face à des injonctions, à des demandes de règles fixes et transcendantes, à une démarche souvent très péremptoire ; et, disons-le, nous y cédons souvent. Accessoirement, c’est probablement encore plus le cas pour les institutions européennes. Parmi les facteurs, devenus très prégnants, très rigides, des lois que nous appliquons, la part de transpositions de textes de l’Union européenne est dominante.
De surcroît, et sans être déplaisant à l’égard de quiconque, il y a évidemment aussi beaucoup de professionnels du droit qui pensent pouvoir tirer avantage de la rigidité de la loi et de l’exigence des procédures. Si vous êtes un bon avocat en matière d’environnement, vous gagnez tous vos procès sur des questions de procédure, jamais sur une question de fond. D’ailleurs, pour trouver une norme de fond dans le code de l’environnement, que j’ai un peu fréquenté, il faut se promener longtemps ! (Sourires sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
Nous sommes donc face à un enjeu qui touche très profondément la culture juridique de ce pays. Si nous voulons aller plus loin dans la transformation de méthodes de l’action publique, nous devons effectuer un travail de formation permanente et de révision des concepts auprès de l’ensemble des services juridiques de nos services publics, ce qui est une vaste mission. Dans la vie de la plupart de nos institutions, on demande au service juridique de la sécurité. Sa préoccupation va donc être de multiplier les précautions dans le sens du respect toujours le plus prudent, le plus scrupuleux, des règles de procédure en vigueur. Il suffirait de laisser un téléphone ouvert dans un service de commandes publiques de collectivités territoriales, pour s’en apercevoir. Environ 80 %, et je suis modeste, du pouvoir d’appréciation des autorités de commandes publiques est effacé par la préoccupation de sécurité inspirée par le service, dont c’est pour l’instant la conception de sa mission.
Nous avons donc devant nous, me semble-t-il, un long temps de débat et d’analyse critique de ce que produit la loi et de ce qu’on en attend.
Mme la présidente. Il faut conclure, mon cher collègue.
M. Alain Richard. Je crois comprendre que nous avons tout le temps devant nous s’agissant de la future réforme constitutionnelle… Mais – je voudrais vous en rendre tous témoins – si celle-ci survenait, le volet « différenciation » serait particulièrement exigeant pour le Parlement. En effet, la différenciation passerait forcément par la loi ; nous aurions alors, nous ou nos successeurs, la mission rigoureuse de savoir jusqu’où nous différencions et où nous situons les normes essentielles, qui doivent rester applicables à tous.
Mon groupe votera en faveur de cette proposition de résolution, comme un moyen de poursuivre la réflexion. Mais il nous semble que la conclusion est encore loin de nous. (Applaudissements sur les travées des groupes LaREM et UC.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Di Folco. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Catherine Di Folco. Nous nous retrouvons aujourd’hui pour discuter de la proposition de résolution relative à la consolidation du pouvoir de dérogation aux normes attribué aux préfets, déposée par nos collègues Jean-Marie Bockel et Mathieu Darnaud, deux spécialistes de la vraie vie des territoires.
Ce texte s’inscrit dans la continuité des travaux menés depuis plusieurs années par notre institution, au service de la simplification du droit applicable aux collectivités. C’est dans le cadre de cet effort que nos deux collègues avaient déjà présenté au mois de juin dernier un rapport intitulé Réduire le poids des normes en aval de leur production : interprétation facilitatrice et pouvoir de dérogation aux normes. Ils y dressaient une nouvelle fois le constat de l’inflation normative, celui des difficultés qu’ont les gouvernements successifs à y faire face, alors qu’un « choc de simplification » avait pourtant été promis voilà plusieurs années, mais en vain.
Le résultat de cet état de fait est un environnement normatif encore trop souvent résistant à l’initiative locale, quand il ne lui est pas activement hostile. Face à cela, nos collègues invoquaient la nécessité d’un nouveau modèle, fondé sur le dialogue de l’administration centrale avec les échelons locaux. Je me joins à ce vœu, dont la réalisation s’impose plus que jamais, alors que, partout en France, de plus en plus d’élus locaux nous font connaître leur découragement.
C’est dans ce contexte qu’intervient la proposition de résolution dont nous discutons aujourd’hui. Elle traduit l’une des principales propositions du rapport : la possibilité pour les représentants de l’État de se faire les chevilles ouvrières d’une simplification flexible et locale par le recours renforcé à des pouvoirs de dérogation aux normes.
En réalité, des préfets remplissent déjà ce rôle. Depuis un décret du 29 décembre 2017, ils peuvent déroger à certaines normes. L’expérience a été concluante. Dans certains cas, elle a permis d’économiser beaucoup de temps ou d’argent, voire de « sauver » des dossiers de subventions apparemment condamnés à échouer.
Il est donc proposé, très justement, dans le présent texte d’étendre et de faciliter la mise en œuvre de ce dispositif. Il est aussi suggéré de développer les mécanismes de concertation entre services de l’État dans les territoires et les collectivités, et de mettre en place un meilleur suivi des résultats de ces mesures.
Je pense qu’affiner les retours en provenance du terrain ne peut être que positif, aussi bien pour les collectivités que pour leurs partenaires au sein des directions locales de l’État. J’espère que le Gouvernement entendra cet appel à la coopération locale.
Les autres mesures suggérées par les auteurs de la proposition de résolution relèvent du bon sens, et, même si elles paraissent simples, pourraient se révéler étonnamment utiles. En effet, simplifier et ouvrir des possibilités de dérogation ne sert à rien si personne n’est averti de l’existence de celles-ci. C’est pour cela que rassembler les bonnes pratiques au sein d’un guide diffusé aux préfectures et communiquer sur ces problématiques est indéniablement une bonne idée. En plus, la mise en œuvre en serait aisée et relativement peu onéreuse.
Le remède envisagé dans cette proposition de résolution n’est évidemment pas une panacée. Il permet néanmoins d’ajuster le curseur de certaines situations sur le terrain et donc de mettre un terme à des symptômes. Mais nous ne devons pas cesser de nous efforcer de combattre le mal, qui est l’inflation normative incontrôlée, dont la source n’est pas dans les territoires.
Vous le comprendrez, le groupe Les Républicains votera la présente proposition de résolution. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et LaREM.)
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Chasseing.
M. Daniel Chasseing. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, l’adoption par le Sénat à la quasi-unanimité du projet de loi relatif à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique, dont l’examen s’est achevé cette semaine, a été un signal fort quant aux souhaits d’évolution. La chambre des territoires est particulièrement attentive à la situation des collectivités locales, qui sont touchées par la multiplication des règles, l’inflation législative et la complexification des normes, comme l’ont montré les auditions que nous avons réalisées dans le cadre de la délégation présidée par Jean-Marie Bockel.
J’en veux pour preuves quelques exemples concrets qui remontent de nos territoires. Vous les connaissez tous.
Dans le secteur de l’urbanisme, la question de l’accessibilité peut, pour des questions financières, mettre en difficulté une petite commune. Elle a également des répercussions sur nos hôtels et restaurants de campagne pour lesquels il est complexe, au regard de la faible rentabilité, de se mettre en totale conformité avec l’ensemble de la réglementation.
Il en est de même de la question des logements sociaux prévus dans la loi pour un accès au logement et un urbanisme rénové, dite loi ALUR, qui mériterait d’être ajustée en fonction de la commune, de ses besoins et de ses capacités réelles.
Par ailleurs, la rigidité de l’avis conforme de la commission départementale de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers, la CDPENAF, pénalise les petites communes dans l’obtention d’un permis de construire.
On trouve d’autres exemples nombreux dans le secteur sportif, comme les toilettes accessibles aux personnes handicapées pour l’arbitre, ou encore dans le secteur agricole. Sans la mise en place de normes très contraignantes, des subventions peuvent être refusées aux collectivités.
L’expérimentation prévue par le décret du mois de décembre 2017 fut un exercice riche d’enseignements. Ce pouvoir utilisé environ une soixantaine de fois a montré que l’adaptation aux territoires était une nécessité rendant plus efficace l’application de la loi.
Le lien entre l’échelon local et l’échelon national doit continuer à se construire et cela passera par un lien plus fort entre les services de l’État et les collectivités territoriales. L’écoute des élus locaux est primordiale, notamment celle du maire, qui connaît son territoire et les besoins de ses administrés. Sur ce point, la création d’une instance départementale permettant d’interpréter la norme ou d’identifier les difficultés dans la mise en œuvre de la norme à l’échelle locale nous paraît essentielle.
La création d’un guide de bonnes pratiques et d’un processus d’information est tout aussi importante. Elle permettra une fluidification dans les échanges.
La mise en place d’un mécanisme de suivi et d’évaluation est également nécessaire. La pratique nous démontre que nous devons constamment veiller à ce que la réglementation reste adaptée aux spécificités locales.
La République est une et indivisible, mais ses territoires ne sont pas les mêmes. Cela constitue sans doute notre richesse, mais rend parfois contreproductive une administration trop centralisée, chaque territoire présentant des spécificités et des handicaps propres.
Il nous faut identifier le problème avec précision. Il me semble qu’il est double : inflation normative et inadaptation aux territoires. Partant de là, le pouvoir de dérogation des préfets, à l’écoute des maires et des acteurs du territoire, va dans le bon sens.
Mon groupe est convaincu qu’une plus grande décentralisation pourrait régler nombre de difficultés évoquées précédemment.
De plus, nous devrons mener des discussions sur les matières auxquelles ces dérogations pourront s’appliquer, ainsi que sur les objectifs et les conditions de celles-ci. Ce travail préalable est nécessaire et nous permettra d’offrir un cadre précis et une définition claire de la consolidation du pouvoir de dérogation.
En conclusion, mes chers collègues, oui à l’adaptation des normes aux territoires, oui à la simplification et à la souplesse normative, oui à la décision d’adapter la loi en fonction des territoires et des collectivités.
Le préfet nous paraît le bon niveau. Le groupe Les Indépendants est favorable à la consolidation de ce pouvoir de dérogation aux normes qui lui est attribué. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Indépendants, LaREM et Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Laurent Nunez, secrétaire d’État auprès du ministre de l’intérieur. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, depuis le début du mandat, le Gouvernement partage une conviction : il faut répondre aux questions des territoires en fonction des territoires.
Notre République est une et indivisible, et je suis naturellement profondément attaché à ce principe de notre Constitution. Toutefois, l’unité signifie que nous devons trouver les meilleures manières de faire appliquer nos lois, les meilleurs moyens de faire valoir les principes de la République.
Nous ne pouvons donc pas être aveugles face aux problématiques différentes des territoires et qui appellent, pour une même fin, des moyens parfois distincts.
C’est avec cette conviction qu’un décret du 29 décembre 2017 a permis l’expérimentation du droit de dérogation des préfets. Tous les orateurs ont rappelé ce texte qui permet une gestion au cas par cas plus efficace et pragmatique de certaines questions clés, comme l’aménagement du territoire, l’urbanisme, l’emploi et l’activité économique, ou encore la protection et la mise en valeur du patrimoine culturel.
Nous avons mis certaines contraintes et conditions à cette expérimentation. Ainsi, celle-ci doit être justifiée par un motif d’intérêt général et l’existence de circonstances locales – j’y reviendrai. Elle doit également avoir pour effet d’alléger les démarches administratives, de réduire les délais de procédure ou de favoriser l’accès aux aides publiques. Elle doit encore se limiter à la dérogation à des normes de niveau réglementaire, à l’occasion de décisions individuelles. Elle doit aussi être compatible avec les engagements européens et internationaux de la France. Enfin, elle ne doit pas porter atteinte aux intérêts de la défense ou à la sécurité des personnes et des biens, pas plus qu’une atteinte disproportionnée aux objectifs fixés par les dispositions auxquelles il est dérogé.
Cette expérimentation concerne un nombre limité de départements – dix-neuf – et court sur une période de deux ans. Cependant, dès maintenant, nous pouvons commencer à en saisir l’utilité et les bénéfices. De ce point de vue, je tiens à saluer le travail mené par la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation du Sénat, qui s’est penchée sur ce sujet et a produit au mois de juin dernier un rapport d’information particulièrement intéressant sur la réduction du poids des normes pour les collectivités.
Je crois que, sur ce thème, nous avons tout intérêt à avancer ensemble et je constate par le biais de cette proposition de résolution des sénateurs Jean-Marie Bockel et Mathieu Darnaud que nous regardons dans la même direction.
La première vertu de cette proposition de résolution est qu’elle constate tout l’intérêt du pouvoir de dérogation aux normes des préfets. Sur ce point, le Gouvernement est en plein accord.
Ensuite, ce texte comporte des avancées que je veux saluer. Je pense à la systématisation des mécanismes de suivi et d’évaluation. C’est une mesure saine, utile et profitable à tous.
Je pense également à l’idée d’édicter un guide de bonnes pratiques, qui est particulièrement pertinent et pourrait servir à tous les préfets et aux collectivités.
D’autres exemples me viennent à l’esprit, comme un effort de communication sur la simplification des normes. C’est une volonté que le Gouvernement partage, et je peux d’ores et déjà indiquer que plusieurs pistes sont étudiées, comme la création de contenus dédiés sur les sites gouvernementaux, des communications plus régulières auprès des membres du corps préfectoral, ou encore la création de modules de formation en la matière.
J’ajoute que certains des points soulevés dans la proposition de résolution sont déjà en partie mis en place. Je citerai à cet égard deux exemples.
D’une part, l’idée de consulter les préfets expérimentateurs, afin d’avoir un retour sur expérience, est évidemment judicieuse. Nous avons déjà engagé ce travail. Le texte propose également d’aller plus loin, notamment en associant les élus à cette évaluation. C’est une suggestion intéressante, qu’il faudra creuser.
D’autre part, donner aux préfets la capacité de consulter les administrations centrales pour des questions particulièrement complexes est une bonne chose, mais elle existe déjà. Les préfets ont même la possibilité de saisir les tribunaux administratifs ou les cours administratives d’appel pour avis, au-delà de la consultation de leurs administrations centrales.
En revanche, je ne vous cache pas une plus forte réserve sur l’idée de créer une instance départementale en matière de simplification. Comme je le disais à l’instant, il existe aujourd’hui d’ores et déjà des moyens faciles pour que les préfets bénéficient d’éclaircissements sur des points de droit précis ; il pourrait donc être redondant, voire un peu contradictoire, de créer cent commissions départementales sur la simplification administrative.
Enfin, le texte de la proposition de résolution identifie des pistes pour élargir la possibilité de déroger aux normes. Vous le savez, le Gouvernement n’est pas étranger à cette philosophie, mais il ne peut se retrouver totalement dans les propositions qui sont formulées.
D’abord, il paraît important d’attendre le retour sur expérience et l’évaluation du dispositif avant d’en élargir le champ. Pour autant, il est clair que, dans son principe et pour les domaines où elle est pratiquée, cette expérimentation a permis de réelles avancées. Elle doit donc être non seulement reconduite, mais étendue à tout le territoire national.
À cet égard, je rappelle que le droit de dérogation s’applique à des décisions individuelles. Il ne s’agit pas d’une différenciation territoriale qui consisterait à appliquer les normes différemment d’un territoire à l’autre. D’une manière générale, ces décisions sont prises en tenant compte des circonstances locales, lesquelles doivent justifier l’arrêté de dérogation. D’ailleurs, et c’est un élément important, cet arrêté doit être motivé.
M. le sénateur Sueur a évoqué à juste titre les risques de contentieux, mais, comme je l’ai rappelé, cet arrêté est pris en application d’un décret. À notre connaissance, à ce jour, hormis le recours contre l’arrêté visé précédemment, qui a d’ailleurs été rejeté, sur les 134 arrêtés qui ont été pris – M. Collombat a avancé le nombre de 140 –, aucun n’a fait l’objet d’un recours.
En Vendée, où un arrêté a permis de déroger à certaines procédures, pour reprendre l’exemple cité par M. Sueur, le préfet avait conduit des concertations informelles préalables, notamment avec des associations environnementales. Cet arrêté n’a pas été attaqué : c’est bien la démonstration de toute la pertinence de ce dispositif, qui fait appel à l’audace de nos préfets.
Monsieur le sénateur Collombat, pour avoir été moi-même préfet, je pense que l’ensemble des préfets français partagent ce sentiment ; et ils sont tous très audacieux. D’ailleurs, je remercie François Calvet de leur avoir adressé un satisfecit, très apprécié par le ministère de l’intérieur. On peut compter sur les préfets, je sais que vous le savez, pour appliquer cette mesure avec beaucoup de tact et de justesse et pour apprécier les situations.
M. Pierre-Yves Collombat. Le tact est là, c’est sûr ! (Sourires.)
M. Laurent Nunez, secrétaire d’État. C’est justement pour cette raison que je ne partage pas l’idée de supprimer la notion de « circonstances locales » des conditions nécessaires pour déroger à une règle de droit général. Il me semble que nous créerions un champ d’application peut-être trop large ; or l’important aujourd’hui est bel et bien de mener une politique adaptée à chaque territoire. La notion de différenciation, défendue par le Gouvernement, s’inscrit pleinement dans cette logique. Aussi, il me paraît essentiel d’en maintenir la mention.
Mesdames, messieurs les sénateurs, vous l’aurez compris, cette proposition de résolution va dans le bon sens et répond à un besoin bien réel. Nous souhaitons de l’adaptation envers les territoires. Nous souhaitons une approche pragmatique et efficace. C’est pourquoi le Gouvernement est favorable au présent texte. (Applaudissements sur les travées des groupes LaREM, UC et Les Républicains.)
M. Ladislas Poniatowski. Très bien !
Mme la présidente. La discussion générale est close.
Nous allons procéder au vote sur la proposition de résolution.
proposition de résolution relative à la consolidation du pouvoir de dérogation aux normes attribué aux préfets
Le Sénat,
Vu l’article 34-1 de la Constitution,
Vu le décret n° 2017-1845 du 29 décembre 2017 relatif à l’expérimentation territoriale d’un droit de dérogation reconnu au préfet,
Vu le rapport d’information de la délégation aux collectivités territoriales du 11 juin 2019 n° 560 (2018-2019) intitulé « Réduire le poids des normes en aval de leur production : interprétation facilitatrice et pouvoir de dérogation aux normes »,
Considérant la nécessité de simplifier l’édifice normatif applicable aux collectivités territoriales afin de desserrer les contraintes et alléger les coûts pesant sur elles,
Considérant que le Gouvernement a lancé une expérimentation territoriale d’un droit de dérogation reconnu au préfet par le décret n° 2017-1845 du 29 décembre 2017,
Considérant que les dispositifs de simplification ne doivent pas porter uniquement sur le flux et le stock de normes mais s’atteler à en réduire leurs effets négatifs,
Considérant que les liens entre les collectivités territoriales et les services déconcentrés de l’État doivent impérativement être renoués au niveau local pour mener une politique durable de simplification des normes,
Considérant que la formation des agents publics et le renforcement de la communication sur les dispositifs de simplification sont indispensables à la réussite de ces dispositifs,
Considérant que l’intérêt démontré par le pouvoir de dérogation aux normes confié aux préfets appelle sa pérennisation et son extension,
Invite le Gouvernement à :
– Systématiser pour l’avenir les mécanismes de suivi et d’évaluation, aux niveaux national et local, des dispositifs de simplification ;
– Évaluer le dispositif de dérogation aux normes dans le cadre d’un dialogue direct avec les préfets expérimentateurs, en y associant notamment des élus et des professionnels du droit, et identifier, à cette occasion, les normes qui posent problème et qui mériteraient d’être modifiées, voire abrogées ;
– Instituer une instance départementale auprès du préfet, composée de représentants des services de l’État et des collectivités territoriales et disposant d’un secrétariat stable, compétente pour donner un avis sur des cas complexes d’interprétation des normes, les dérogations sollicitées au titre du décret du 29 décembre 2017, pour identifier les difficultés locales en matière de mise en œuvre des normes, pour porter ses difficultés à la connaissance de l’administration centrale et pour faire des propositions de simplification des normes, des processus et des procédures ;
– Tirer de l’expérimentation un guide de bonnes pratiques qui serait diffusé aux préfectures et aux exécutifs locaux et mettre en place des modules de formations sur le dispositif de dérogation pour les personnels du réseau préfectoral et des services déconcentrés ;
– Communiquer davantage sur la simplification des normes, et en particulier sur le dispositif de dérogation en direction des agents publics, en mettant en place un processus d’information régulière des personnels de l’État sur les possibilités offertes par le dispositif de dérogation ainsi qu’en incluant des modules de formation sur la politique de lutte contre la prolifération des normes dans les écoles du service public et dans les catalogues de formation permanente des agents publics ;
– Communiquer davantage en direction des élus et des destinataires finaux, citoyens et porteurs de projet ainsi que du grand public en insérant sur les sites internet des préfectures et du ministère de l’Intérieur une rubrique aisément accessible sur la simplification des normes et, en particulier, sur le dispositif de dérogation ;
– Tenir compte de la dynamique facilitatrice des préfectures dans l’affectation de leurs moyens humains ;
– Supprimer la condition relative à l’existence de « circonstances locales » pour déroger et la liste limitative de domaines pour lesquelles la dérogation serait possible, sous la réserve du respect des engagements européens et internationaux de la France et des intérêts de la défense ou de la sécurité des personnes et des biens ;
– Envisager la possibilité pour le représentant de l’État de déroger à des décisions relevant de la compétence des autorités supérieures ;
– Étendre le droit de dérogation en l’ouvrant aux autorités décentralisées pour les actes individuels des collectivités territoriales relevant de leurs compétences ;
– Envisager de permettre aux collectivités territoriales de déroger, sur leur demande, aux normes législatives ou règlementaires relatives à leurs compétences, sous réserve d’un mécanisme politique empêchant la survenance d’abus et garantissant l’égalité des citoyens devant la loi.
Mme la présidente. La conférence des présidents a décidé que les interventions des orateurs valaient explications de vote.
Je mets aux voix la proposition de résolution.
(La proposition de résolution est adoptée.) – (Applaudissements sur les travées des groupes UC, LaREM et Les Républicains.)
Mme la présidente. Mes chers collègues, l’ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à onze heures quarante-cinq, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de M. Philippe Dallier.)
PRÉSIDENCE DE M. Philippe Dallier
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
5
Clarification de diverses dispositions du droit électoral
Adoption définitive en deuxième lecture d’une proposition de loi et d’une proposition de loi organique dans les textes de la commission
M. le président. L’ordre du jour appelle, à la demande du groupe La République En Marche, la discussion en deuxième lecture de la proposition de loi, modifiée par l’Assemblée nationale en première lecture, visant à clarifier diverses dispositions du droit électoral (proposition n° 735 [2018-2019], texte de la commission n° 66, rapport n° 65) et de la proposition de loi organique, modifiée par l’Assemblée nationale en première lecture, visant à clarifier diverses dispositions du droit électoral (proposition n° 736 [2018-2019], texte de la commission n° 67, rapport n° 65).
La conférence des présidents a décidé que ces textes feraient l’objet d’une discussion générale commune.
Dans la discussion générale commune, la parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Laurent Nunez, secrétaire d’État auprès du ministre de l’intérieur. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, nous entamons aujourd’hui l’examen en deuxième lecture des propositions de loi organique et ordinaire déposées par Alain Richard, après l’examen en première lecture au mois de mai dernier au Sénat et au mois de septembre à l’Assemblée nationale.
Avant toute chose, je tiens à saluer l’esprit de responsabilité avec lequel ces textes ont été étudiés tant dans cet hémicycle qu’au Palais-Bourbon. Nous parlons de droit électoral, l’une des matières les plus sensibles politiquement que nous ayons à traiter. Il aurait été facile de raisonner par postures et de refuser de construire ensemble : cela n’a pas été le cas.
Il est vrai que ces textes répondent à des impératifs. C’est en se saisissant des remarques réalisées par le Conseil constitutionnel après les élections législatives qu’Alain Richard a conçu ces propositions de loi, qui permettent de corriger quelques zones d’ombre de notre droit électoral et d’aller vers plus de clarté et d’homogénéité.
Ainsi, ces textes sont animés par la volonté de rendre notre droit électoral plus équitable et de combler les manquements et les failles que nous constatons à l’occasion des scrutins.
La première avancée réside dans l’homogénéisation des règles de campagne électorale.
Aujourd’hui, une divergence entre les parties législative et réglementaire du code électoral provoque une incohérence dans ces règles. Ainsi, si les tractages, collages ou publications sur les réseaux sociaux sont logiquement interdits à partir de la nuit entre le vendredi et le samedi du jour qui précède le vote, il n’en est pas de même pour les réunions publiques qui sont théoriquement autorisées le samedi qui précède le jour du scrutin.
Il y avait là quelque chose d’anormal et la proposition de loi permet de résoudre ce paradoxe. Ainsi, le code électoral sera désormais homogène et toutes les opérations électorales, sans exception, seront interdites à partir de la veille du scrutin à minuit, c’est-à-dire dans la nuit du vendredi à samedi précédent le dimanche de scrutin. Désormais, les candidats seront sur un pied d’égalité et ne pourront plus faire valoir cette ambiguïté du droit.
La deuxième grande avancée concerne les bulletins de vote. Avec les nouveaux usages, les candidats aux élections ont montré que leur imagination en termes de design des bulletins ne connaissait pas de limite. Ce fait a été notamment observé avec l’apparition de plus en plus fréquente de photos.
Si cet usage en soi ne pose pas de difficultés, il était curieux qu’il soit interdit de faire figurer sur les bulletins de vote le nom de quelqu’un qui n’est pas candidat, mais qu’il soit possible de faire apparaître la photo d’un non-candidat.
Grâce aux nouvelles dispositions prévues, il sera désormais impossible de faire figurer sur les bulletins des photos de tiers : seuls les candidats pourront être représentés.
De même, si le principe d’interdiction de faire figurer le nom de quelqu’un qui n’était pas candidat sur un bulletin de vote existe, il était l’objet d’une interprétation assez souple, voire divergente. Cela pouvait prêter à confusion et conduire à des abus. Aussi est désormais explicitement affirmée l’interdiction de faire paraître le nom d’un tiers sur un bulletin.
Je crois qu’il s’agit de principes sains et utiles. Nous ne devons pas courir le risque d’induire les électeurs en erreur : désormais, les bulletins viseront les seuls candidats, rien que les candidats.
Ensuite, les textes que nous examinons vont au-delà des recommandations du Conseil constitutionnel et permettent des avancées supplémentaires. Je pense en particulier aux obligations et aux délais de déclaration pour demander un remboursement des frais de campagne. Tout cela demeurait un peu flou, et les recommandations de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique sont reprises, afin de construire un régime clair et connu.
Avant de conclure, j’évoquerai un dernier point.
Ces textes présentent des avancées utiles au plus vite pour notre droit électoral. Si je suis conscient que d’autres points pourraient être étudiés, qui soulèvent des questions pertinentes dont nous comprenons la logique, il est essentiel que la navette parlementaire puisse s’achever avant les élections municipales, afin que les dispositions prévues puissent s’appliquer le plus rapidement possible, notamment au prochain scrutin.
D’autres travaux pourront être menés ensuite. Notre droit électoral peut encore évoluer, encore s’améliorer. Nous y sommes ouverts et je veux saluer le travail mené par Alain Richard, M. le rapporteur et les parlementaires sur ces sujets. Il me semble néanmoins important que les dispositions de ces propositions de loi soient assurément prêtes à être appliquées pour les prochaines élections municipales. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Arnaud de Belenet, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous débattons en seconde lecture des deux propositions de loi ordinaire et organique déposées par Alain Richard, qui clarifient diverses dispositions du code électoral. J’en rappelle les deux objectifs : clarifier les règles de financement des campagnes électorales, d’une part, mieux encadrer la propagande et les opérations électorales, d’autre part.
L’Assemblée nationale a adopté ces propositions de loi le 24 septembre dernier. S’efforçant de respecter l’équilibre trouvé par le Sénat, elle a voté conformes six articles de la proposition de loi et un article de la proposition de loi organique. Elle a également proposé des rédactions de compromis sur la plupart des sujets, à l’exception du point de départ des inéligibilités et du périmètre des menues dépenses, questions sur lesquelles nous reviendrons lors de l’examen de l’amendement de Roger Karoutchi.
Afin de faire prospérer cette initiative sénatoriale et de s’assurer que certaines de leurs dispositions importantes s’appliqueront dès les prochaines élections municipales, la commission des lois propose un vote conforme de ces deux textes.
Les propositions de loi ordinaire et organique apportent des simplifications concrètes à destination des électeurs et des candidats. Les mesures qu’elles contiennent ont fait l’objet d’un large accord entre le Sénat et l’Assemblée nationale.
Afin d’adapter notre droit électoral aux nouvelles pratiques politiques, la proposition de loi permet aux candidats et aux partis politiques d’utiliser des plateformes en ligne pour recueillir les dons des personnes physiques, la traçabilité des transactions financières étant renvoyée à un décret en Conseil d’État.
De même, le périmètre d’intervention des experts-comptables serait réduit, afin non seulement de simplifier les démarches administratives des candidats dont les dépenses électorales ne sont pas prises en charge par l’État, mais aussi de réduire les coûts.
Concernant la définition des menues dépenses que le candidat peut régler directement sans passer par son mandataire financier, nos collègues Roger Karoutchi et Françoise Laborde avaient souhaité fixer dans la loi le montant maximal de ces dépenses à 10 % du montant total du compte de campagne et à 3 % du plafond des dépenses électorales. Je les remercie très sincèrement de cette initiative, qui permet d’ouvrir un débat important pour l’ensemble des candidats et de clarifier l’intention du législateur.
Si l’intérêt de voter conforme limite l’effet de cette proposition,…
Mme Françoise Laborde. C’est une jolie formule ! (Sourires.)
M. Arnaud de Belenet, rapporteur. … l’accord et le consensus existent pour que cette mesure puisse prospérer par le biais d’autres véhicules législatifs.
L’Assemblée nationale n’a en effet pas repris cette disposition, préférant laisser à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, la CNCCFP, la compétence d’apprécier, au cas par cas, le périmètre des menues dépenses.
Elle a étendu l’obligation d’établir un compte de campagne à l’ensemble des candidats aux élections européennes, même lorsqu’ils ont réuni moins de 1 % des suffrages exprimés. En effet, avec le rétablissement d’une circonscription unique, une liste de candidats aurait pu mener campagne à l’échelon national et recueillir jusqu’à 226 000 voix sans déposer de comptes de campagne, ce qui paraît incompatible avec la nécessaire transparence du scrutin.
Les députés n’ont pas adopté de modification majeure quant au déroulement de la campagne électorale ou à la propagande. Ils ont notamment conservé l’interdiction, pour plus de sécurité juridique, d’organiser des réunions électorales la veille du scrutin.
Sur proposition de son rapporteur, l’Assemblée nationale a souhaité préciser le calendrier des campagnes électorales, principalement pour les élections législatives, en en réduisant le délai de vingt à quatorze jours.
Les députés ont également conservé la possibilité pour le maire ou, à défaut, le préfet de procéder à la dépose d’office des affiches apposées hors des emplacements réservés. Ce point nous a occupés lors de nos débats en première lecture. Il s’agit d’une avancée significative que nous devons notamment à la ténacité d’un certain nombre de nos collègues, en particulier à celle d’André Reichardt.
Sur la question du bulletin de vote, l’Assemblée nationale a adopté une position de compromis en autorisant la mention du nom d’un tiers pour les seules villes à secteurs et arrondissements – Paris, Lyon, Marseille –, ainsi que la photographie des candidats. Une telle perspective avait été évoquée dans cet hémicycle.
S’agissant des inéligibilités, les propositions de loi permettent de clarifier le droit en vigueur en rappelant qu’une simple erreur matérielle d’un candidat ne doit pas empêcher ce dernier de se présenter aux scrutins suivants. Nous donnons ainsi plus de sécurité juridique aux candidats, ce qui me semble essentiel.
Avec l’accord du Gouvernement, nous avons également adapté le régime d’inéligibilité des préfets et des sous-préfets, notamment pour éviter qu’ils ne puissent se présenter aux élections municipales dans les jours qui suivent leur admission à la retraite.
Le Conseil constitutionnel a regretté des situations inéquitables concernant le point de départ des inéligibilités. Nous y reviendrons sans doute lors de la discussion des articles, notamment à l’occasion de l’examen de l’amendement d’Alain Richard. L’inéligibilité s’appliquant à compter de la décision définitive du juge de l’élection, l’effet de la sanction varie d’un candidat à un autre, en fonction de la durée d’instruction de son dossier. En première lecture, le Sénat avait proposé d’autoriser le juge de l’élection à moduler la durée d’inéligibilité. L’objectif était de s’intéresser au « point d’arrivée » de l’inéligibilité pour que des candidats ayant commis des irrégularités comparables soient déclarés inéligibles pour les mêmes scrutins.
L’Assemblée nationale n’a pas retenu cette ingénieuse proposition (Mme Françoise Laborde sourit.), laissant donc perdurer le droit en vigueur. Il est vrai que, malgré son ingéniosité, cette mesure soulevait quelques difficultés en matière d’égalité entre les personnes concernées…
Je remercie chaleureusement Alain Richard d’avoir déposé un amendement non seulement pour poursuivre la réflexion sur ce sujet, mais surtout pour nous permettre de préciser l’intention du législateur à l’égard du juge des élections.
Afin que ces deux propositions de loi de clarification nécessaire du droit électoral puissent entrer en vigueur dans les meilleurs délais, la commission des lois les a adoptées sans modification. Je ne doute pas que la Haute Assemblée fasse preuve de la même sagesse en vue d’une adoption conforme, d’autant plus qu’elle est constituée de ceux qui sont particulièrement tenaces en ce jeudi après-midi. (Sourires et applaudissements sur les travées des groupes LaREM et RDSE. – M. Jean-Pierre Sueur applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.
M. Pierre-Yves Collombat. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, une fois n’est pas coutume, je paraîtrai sage en ce début d’après-midi. (Sourires.)
Étant convaincu par toutes les bonnes raisons de voter ces textes et par toutes les mauvaises raisons de ne pas les modifier, le groupe CRCE adoptera ces propositions de loi ordinaire et organique. (Applaudissements.)
M. Arnaud de Belenet, rapporteur. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Emmanuel Capus.
M. Emmanuel Capus. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je serai un peu plus long que mon prédécesseur ! (Sourires.)
Créé en 1956, le code électoral présente certains défauts. Il a fait l’objet d’un très grand nombre de réformes ayant donné lieu à un empilement juridique, puis à une harmonisation parfois incomplète, à l’origine de difficultés soit de pertinence, soit de cohérence interne du texte.
Sans revoir l’ensemble de ce code, les deux textes de notre collègue Alain Richard ont des objectifs sains. Ils s’inspirent directement des observations formulées par le Conseil constitutionnel sur les dernières élections législatives. Toutefois, ils concernent l’ensemble des élections, y compris les élections locales.
Je me réjouis tout particulièrement des efforts de clarification de ces textes, à la fois techniques et pragmatiques. Ces propositions de loi ont par la suite été enrichies en commission des lois et en séance au Sénat, en première lecture.
Au cours de leurs travaux, nos collègues députés se sont efforcés de respecter l’équilibre des propositions de loi adoptées par le Sénat et de les enrichir. Ils ont ainsi étendu l’obligation d’établir un compte de campagne à l’ensemble des candidats aux élections européennes – Arnaud de Belenet vient de le dire – et ont allongé le délai d’inéligibilité des sous-préfets, secrétaires généraux de préfecture et directeurs de cabinet de préfet.
Toutefois, je regrette que deux apports du Sénat n’aient pas été maintenus à l’Assemblée nationale.
Le premier concernait la délimitation du périmètre des menues dépenses, le second le point de départ des inéligibilités, lequel est aujourd’hui source d’un manque d’équité entre les candidats.
En première lecture, le Sénat a autorisé le juge de l’élection à moduler la durée des inéligibilités, l’objectif étant que des candidats ayant commis des irrégularités comparables soient déclarés inéligibles pour les mêmes scrutins. L’Assemblée nationale n’a pas retenu cette proposition. Le droit en vigueur sera donc maintenu, faute de consensus.
Toutefois, ces deux textes constituent un bon compromis entre nos deux assemblées. Ils permettent de rendre notre droit électoral plus solide et de nous assurer que les électeurs pourront faire leur choix dans des conditions pleinement équitables.
Monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, ces deux textes qui tendent à clarifier le code électoral, à mieux l’encadrer et à le sécuriser font œuvre utile. C’est la raison pour laquelle le groupe Les Indépendants les votera. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Mizzon.
M. Jean-Marie Mizzon. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le groupe Union Centriste a d’emblée accueilli favorablement les propositions de loi, ordinaire et organique, qui nous sont soumises aujourd’hui en deuxième lecture.
Ces textes corrigent, à la suite des observations formulées par le Conseil constitutionnel au lendemain des élections législatives de 2017, de nombreuses imperfections qui émaillent notre droit électoral, en particulier à l’échelon local. Ils clarifient opportunément le contrôle des dépenses électorales et des règles d’inéligibilité. Enfin, ils améliorent l’encadrement de la propagande électorale et des opérations de vote. On ne peut que s’en féliciter, tant la fiabilité des processus électoraux conditionne la bonne santé de la vie démocratique.
Plus généralement, ces deux propositions de loi participent de l’adaptation de notre législation aux défis de la modernité.
J’en veux pour preuve l’article 1er A, qui devrait permettre demain la perception de dons en ligne, subordonnés à des conditions, notamment de traçabilité, de nature à garantir aux électeurs l’intégrité du processus électif.
Nous saluons également la suppression de l’obligation, parfois onéreuse, de recourir à un expert-comptable pour les candidats ayant obtenu moins de 5 % des suffrages et dont les recettes et dépenses n’excèdent pas un certain montant. C’est là, pour les petits candidats, une simplification bienvenue de leurs démarches administratives.
Nous saluons encore l’harmonisation des délais relatifs à la tenue des réunions électorales. En prohibant de manière uniforme ces réunions à compter de la veille du scrutin, le texte prémunit les candidats contre le risque de contentieux, sécurisant ainsi le bon déroulement de leur campagne.
Nous nourrissons néanmoins quelques regrets…
Nous regrettons ainsi que l’Assemblée nationale ait écarté l’article 1er ter A, qui autorisait un candidat à régler directement des dépenses inférieures à des plafonds fixés par la loi. Combien de candidats connaissent, en effet, ce problème ? Il n’eût pas été inutile de préciser dans la loi le champ de ces « menues dépenses ».
Les difficultés rencontrées par les candidats pour contracter un emprunt auprès des banques ne sont pas davantage traitées dans ces textes. Or l’octroi de prêts bancaires aux candidats à une élection est de plus en plus étroitement encadré par la législation électorale. Le problème s’est, hélas !, de nouveau présenté lors des dernières élections européennes.
Nous déplorons également le maintien pur et simple du droit ordinaire et organique en vigueur concernant le point de départ de la peine d’inéligibilité pour manquement aux règles de financement des campagnes électorales ou pour fraude électorale.
Si nous pouvons comprendre les griefs de nos homologues députés, liés en particulier à la rétroactivité de la mesure sur les mandats en cours, nous aurions aimé qu’une autre solution soit proposée. Celle-ci aurait pu consister, par exemple, à ouvrir la faculté pour le juge de moduler la peine, de façon à prendre en considération le calendrier électoral à venir.
Toujours est-il que le compromis trouvé, tel qu’il résulte des travaux des deux assemblées, est globalement satisfaisant, comme en témoigne le fait que la commission des lois du Sénat n’ait procédé à aucune nouvelle modification mercredi dernier.
Nul doute que les règles électorales seront améliorées lorsque ces deux textes seront définitivement adoptés et promulgués. Je tiens d’ailleurs, à l’instar de ma collègue Françoise Gatel, à saluer la célérité avec laquelle ont prospéré ces propositions de loi. Celle-ci doit nous inspirer en vue des prochains textes que nous aurons à examiner.
Vous l’aurez compris, mes chers collègues, le groupe Union Centriste est favorable à ces propositions de loi, qui, tout en modernisant utilement notre droit électoral, en suppriment de nombreuses dispositions, devenues au fil du temps sources d’incohérences et de complexité. (Applaudissements sur les travées des groupes UC, RDSE et LaREM.)
M. le président. La parole est à Mme Catherine Di Folco. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Catherine Di Folco. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous sommes réunis cet après-midi pour l’examen en deuxième lecture des deux propositions de loi déposées par Alain Richard.
Ces textes sont pour l’essentiel consacrés aux conditions de financement des campagnes et au contrôle des opérations électorales.
Parmi les mesures de simplification intéressantes, je relèverai celles qui permettent d’utiliser des plateformes en ligne pour recueillir les dons des personnes physiques. Cette mesure constitue une dérogation au principe selon lequel toutes les opérations financières liées à la campagne doivent transiter directement par le compte du mandataire, mais, compte tenu des évolutions de notre époque et du rôle croissant joué par le numérique dans notre société et en politique, une telle dérogation me paraît judicieuse.
D’autres mesures utiles concernent l’harmonisation sur le point de départ des délais de contrôle de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, ou encore la simplification des démarches des candidats dans le cadre de la tenue du compte de campagne.
Enfin, je ne saurais omettre la codification, à l’article 6 de la proposition de loi ordinaire, de ce qui relevait jusqu’à présent de la seule tradition républicaine : le principe d’immutabilité du régime électoral et du périmètre des circonscriptions dans l’année précédant toute élection.
L’Assemblée nationale a donc respecté pour l’essentiel l’équilibre de ces mesures d’origine sénatoriale. Elle a d’ores et déjà adopté dans leur rédaction issue des travaux du Sénat six des onze articles de la proposition de loi ordinaire et un des cinq articles de la proposition de loi organique.
Cependant, des divergences demeurent entre notre position et celle des députés. Ceux-ci ont jugé préférable de supprimer l’article 1er ter de la proposition de loi ordinaire, introduit à la suite de l’adoption de l’amendement de notre collègue Roger Karoutchi. Cet article portait sur le régime juridique des « menues dépenses », ces dépenses que le candidat peut régler directement, sans passer par le mandataire financier. Le rapporteur de l’Assemblée nationale a jugé que l’existence de ces menues dépenses représentait une simple tolérance, qu’il ne fallait pas transformer en règle.
Cependant, en écartant cette disposition, l’Assemblée nationale laisse persister un certain flou juridique sur la notion de menues dépenses. Or ce flou est une source d’insécurité juridique pour les candidats.
De la même manière, les députés n’ont pas retenu une disposition importante du texte, qui sécurisait le point de départ des inéligibilités pour fraude électorale. Cette mesure aurait laissé au juge la possibilité de moduler le point de départ, afin de prendre en compte l’existence de délais de jugement variables.
Il est regrettable que ces dispositions n’aient pas été conservées.
Malgré ces deux ombres au tableau, et à l’approche des échéances électorales, le rapporteur et la commission ont choisi de recommander le vote conforme d’un texte qui comporte des avancées utiles. Je m’associe à cette position, mais non sans regrets, car la suppression de ces deux mesures par l’Assemblée nationale constitue à mes yeux un recul. C’est aussi le sentiment de plusieurs de mes collègues de la commission des lois, comme ils l’ont indiqué hier matin.
Même si je comprends la position du rapporteur, eu égard à l’intransigeance de l’Assemblée nationale et aux impératifs du calendrier, j’espère que ces sujets pourront faire l’objet de nouvelles discussions à l’avenir.
Le groupe Les Républicains votera en faveur de ces deux textes. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC, RDSE et LaREM.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, ces textes comprennent de nombreuses dispositions positives.
Nous avions lors de la lecture précédente, à l’occasion de l’examen d’un amendement de notre collègue Éric Kerrouche, fait part de notre crainte qu’il soit fait preuve de laxisme en matière d’inéligibilité.
Nous avons toutefois décidé de ne pas déposer d’amendements lors de cette ultime lecture, considérant d’abord qu’il était utile de rechercher l’union la plus large possible, ensuite que l’objectif, tout à fait compris par de nombreux élus, est d’éviter qu’une simple erreur matérielle sans volonté de fraude n’entraîne l’inéligibilité d’un candidat.
Or la jurisprudence est constante : aucune décision d’inéligibilité n’est prise en cas de simple erreur matérielle. Quand le juge prononce une peine d’inéligibilité, il le fait à chaque fois au regard d’un ensemble d’éléments, et cela continuera d’être le cas, le juge ayant le choix de la sanction en toutes circonstances.
Cela étant dit, nous tenons à souligner un certain nombre de points très positifs.
La proposition de loi confirme ainsi que les personnes morales autres que les partis et groupements politiques ont l’interdiction d’apporter leur garantie aux prêts contractés par les candidats. C’est là une clarification nécessaire.
Le texte harmonise utilement le point de départ du délai d’instruction par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, même si, nous le savons, d’autres délais restent à préciser. Nous en avons discuté hier en commission.
Le texte interdit par ailleurs la tenue de réunions publiques à partir de la veille du scrutin à minuit, la règle selon laquelle la campagne électorale s’achève le vendredi soir à minuit étant ainsi clairement consacrée.
La proposition de loi élève au niveau législatif les règles encadrant l’ouverture et la fin des campagnes électorales, comme l’a souhaité l’Assemblée nationale.
Elle interdit, et c’est un point positif, toute communication des résultats aux médias avant vingt heures, heure de Paris. Cette disposition a été adoptée, mais j’aimerais savoir, monsieur le secrétaire d’État, comment vous allez la faire appliquer et quelles sanctions seront prises le cas échéant. L’expérience montre en effet que de nombreux médias ne respectent pas cette règle.
Le texte prévoit également que le bulletin de vote ne pourra comporter d’autres noms que celui du ou des candidats ou de leurs suppléants. La même disposition s’appliquera aux photographies ou représentations de toute personne.
M. François Patriat. Pourquoi ?
M. Jean-Pierre Sueur. J’ai vu dans un bureau de vote que j’ai eu l’honneur de présider apparaître le visage avenant du Président de la République sur tel ou tel bulletin de vote. Ce n’était pas forcément souhaitable.
M. François Patriat. Pour l’actuel président, c’est très bien !
M. Jean-Pierre Sueur. Cette remarque vaut, quel que soit le Président de la République, monsieur Patriat ! (Sourires.) Je vous rassure sur ce point, au cas où vous seriez inquiet… Il est bon que sur le bulletin Patriat figure le nom Patriat, éventuellement d’ailleurs la photo de M. Patriat, comme le permet le texte.
Enfin, et je terminerai par ce point, il est bénéfique d’instaurer dans la loi l’interdiction de modifier les règles électorales ou le périmètre des circonscriptions l’année précédant le premier tour de scrutin. C’est très bien, mais, monsieur le secrétaire d’État, cela suppose une certaine anticipation de la part des pouvoirs publics.
À titre d’exemple, permettez-moi de revenir sur le débat qui nous a occupés ces deux dernières semaines. Vous savez que le Sénat a adopté un excellent amendement.
Mme Nathalie Goulet. C’est un pléonasme ! (Sourires.)
M. Jean-Pierre Sueur. Il arrive que nous nous trompions, ma chère collègue !
Cet excellent amendement visait à accroître la représentation des petites et moyennes communes au sein des intercommunalités, sujet auquel M. Alain Richard, Mme Gourault et moi-même nous étions déjà intéressés il y a quelque temps. Cette disposition avait d’ailleurs déjà été votée par le Sénat au mois de janvier dernier, mais le Gouvernement n’ayant pas pris d’initiative depuis, malgré la promesse qu’il avait alors faite, nous avons donc voté, à une très large majorité d’ailleurs, un nouvel amendement, comportant toutefois un codicille : la disposition ne pourra être mise en œuvre qu’en 2026.
C’est très bien de prévoir qu’aucun changement n’est possible l’année précédant une élection, mais cela impose d’être vigilant deux ans ou dix-huit mois avant si nous voulons que les dispositions que nous adoptons puissent s’appliquer le jour du vote.
Telles sont les quelques remarques que je tenais à faire sur ces deux propositions de loi, que mon groupe votera, le bilan étant très positif.
M. le président. La parole est à Mme Françoise Laborde.
Mme Françoise Laborde. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la seconde lecture d’un texte législatif est aujourd’hui devenue une rareté, presque un objet de curiosité parlementaire.
M. Jean-Pierre Sueur. C’est vrai, vous avez raison !
Mme Françoise Laborde. Les deux textes que nous examinons aujourd’hui entrent dans cette catégorie. Ils nous reviennent dans le cadre d’une véritable navette, c’est-à-dire à l’issue d’un dialogue constructif entre les deux assemblées.
Mon groupe salue bien sûr une nouvelle fois l’initiative prise par notre collègue Alain Richard, ainsi que le travail méticuleux de M. le rapporteur, Arnaud de Belenet.
Si le dialogue entre les deux chambres a été utile, mon groupe regrette néanmoins que l’Assemblée nationale n’ait pas retenu l’amendement de notre collègue Josiane Costes, que j’avais moi-même défendu, et celui, identique, de Roger Karoutchi, adoptés par le Sénat. Tous deux visaient à instaurer un plafond pour les menues dépenses de nature électorale. Comme nous l’avions déjà souligné, cette disposition aurait pourtant contribué à réduire les risques juridiques pour les candidats, tout en limitant les sources de contentieux et d’inéligibilité.
Les autres dispositions restant en discussion nous paraissent aller dans la bonne direction, comme je l’avais déjà relevé lors de la première lecture, qu’il s’agisse de la simplification des règles comptables, des règles de propagande électorale ou des règles de délai.
Le rapporteur l’a lui aussi souligné : les modifications apportées par les députés, hormis la suppression de notre amendement, sont finalement secondaires et confortent la philosophie générale du texte. L’allongement de la durée d’inéligibilité des membres du corps préfectoral en particulier emporte notre approbation, mon groupe défendant depuis longtemps le renforcement de l’équité entre candidats par l’établissement de règles d’inéligibilité plus strictes pour les personnes disposant d’un avantage du fait des fonctions qu’elles ont exercées.
Par ailleurs, l’obligation actuelle de déclaration d’inéligibilité d’un candidat « en cas de volonté de fraude ou de manquement d’une particulière gravité aux règles de financement des campagnes électorales » devient une possibilité. Il s’agit d’une évolution pragmatique et simplificatrice qui évitera des sanctions disproportionnées.
Toujours en matière de simplification des règles, nous ne pouvons que souscrire à l’allégement des obligations de dépôt de compte de campagne, ou encore à l’extension de la dérogation du recours à un expert-comptable.
Afin de parvenir à une plus grande équité entre candidats, nous soutenons évidemment la mise en cohérence des règles relatives à l’organisation des réunions électorales ou à la clarification des règles de délai et de forme des déclarations de situation patrimoniale.
Enfin, la codification de la règle voulant que l’on ne change pas le mode de scrutin ou le périmètre d’une circonscription durant l’année qui précède le scrutin, qui était jusque-là un usage républicain, est certainement la bienvenue, mais nous ne doutons pas qu’elle donnera lieu à de nombreuses dérogations que l’on ne manquera pas de justifier par un motif d’intérêt général bien circonstancié !
De façon plus générale, nous considérons que de nombreuses annulations de scrutins ont pour origine la grande complexité des règles applicables et non la moralité douteuse des candidats. Notre propension au pointillisme administratif crée souvent des barrières d’entrée qui découragent les vocations des candidats potentiels les moins bien informés. Nous devons donc progresser dans l’équilibre entre simplification des règles et renforcement de notre législation relative au financement de la vie démocratique.
Je dirai maintenant quelques mots sur un sujet cher à notre collègue Jean-Pierre Corbisez, à savoir les « candidats TGV », c’est-à-dire les candidats n’ayant pas de lien réel avec la circonscription. Il faudra véritablement se pencher un jour sur cette question, rendue problématique par la trop grande complexité des règles de domiciliation électorale. La règle de l’entonnoir et le calendrier législatif nous en empêchent aujourd’hui, mais j’aimerais, monsieur le secrétaire d’État, que vous réfléchissiez à cette question, qui est importante pour la vitalité démocratique de nos territoires.
Cela étant dit, le groupe RDSE considère que l’initiative de notre collègue Alain Richard aurait pu être l’occasion d’un toilettage plus ambitieux du code électoral, l’occasion surtout d’engager une réflexion plus approfondie sur la modernisation du financement de la vie politique, et plus largement, de notre démocratie.
Pour autant, nous n’avons pas déposé d’amendements, car nous considérons qu’il est préférable que ces deux textes soient rapidement adoptés, afin de permettre leur entrée en vigueur en vue des prochaines élections municipales. Vous l’aurez compris, nous les voterons. (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE et LaREM.)
M. le président. La parole est à M. Alain Richard.
M. Alain Richard. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, j’ai peu à ajouter à ce débat, qui a été à la fois fructueux et consensuel. Je relèverai simplement les quelques modifications qui ont été apportées à ces deux propositions de loi : la clarification de la date de fin de campagne, tous éléments confondus ; les améliorations concernant le contenu du bulletin, notamment la présence de noms de tiers – je me souviens que le débat en séance publique, en première lecture, avait montré que la proposition de loi de départ n’était pas tout à fait au point –, et des dispositions de détail, mais très utiles, concernant l’ensemble du dispositif des comptes de campagne.
L’examen de ces textes fut également l’occasion d’ajouter dans le code électoral des dispositions sur les dons en ligne et de clarifier les règles d’inéligibilité des membres du corps préfectoral après la cessation de leur activité. Ces points méritaient en effet d’y figurer.
Je prendrai la liberté de rectifier un point qui a été évoqué par certains collègues. La disposition que j’avais proposé d’inscrire dans le code électoral concernant la stabilité du droit électoral dans l’année précédant l’élection figurait bien dans la législation.
Mme Françoise Laborde. Elle était cachée ! (Sourires.)
M. Alain Richard. Elle avait été adoptée – j’en ai le souvenir assez net – un soir de 1990, lors d’un débat sur les modifications des dates d’élection, sur un amendement de Robert Pandraud, qui appartenait alors à la minorité. Exprimant une certaine sagesse, il avait dit : « Nous avons trop souvent fait des modifications électorales tard, les uns et les autres, il faut en finir ». Je me souviens que son amendement avait été adopté à l’unanimité. Il s’agissait d’une forme de repentance collective de la part de tous ceux qui avaient déjà trempé dans des opérations de modifications électorales.
Il est logique que cette disposition figure dans le code électoral plutôt que d’être le reliquat d’un texte modifiant le code, dont par ailleurs toutes les dispositions sont incluses dans le code.
Bien entendu, cette disposition ne contraint pleinement que le pouvoir réglementaire. Le Conseil constitutionnel a souligné, en écartant ce qui était allégué devant lui, que cette disposition, invoquée à propos d’un texte récent, n’avait pas la valeur d’un principe fondamental reconnu par les lois de la République. Le Conseil constitutionnel a clarifié le champ d’application du concept de loi supra-législative qu’il avait dégagé dans le passé : il ne porte que sur les textes appliqués depuis au moins le début de la IVe République.
Nous avons collectivement fait, je pense, un bon travail. Mes derniers mots seront pour remercier tous ceux qui ont contribué, dans les deux assemblées, au caractère mesuré, respectueux et constructif de ce débat législatif.
Je remercie également le Gouvernement de bien vouloir réfléchir à une recodification du code électoral – d’autres ministères ont récemment recodifié certains codes –, ses réticences étant dues au fait que la partie organique ne peut pas être recodifiée par voie d’ordonnances et qu’il faut en passer par le Parlement. Or l’esprit de mesure et de prudence dont vient de faire preuve ce dernier concernant les dispositions du code électoral dont nous discutons aujourd’hui pourrait, me semble-t-il, amener le Gouvernement à considérer que le législateur est assez mature pour procéder à une recodification par la voie du débat législatif, sans dénaturer le texte.
Il me semble que nous pouvons nous rassembler sur ces textes. Je ne m’attarde pas pour l’instant sur la date d’effet des inéligibilités, puisque nous aurons l’occasion d’en discuter brièvement lors de l’examen d’un amendement que j’ai déposé. (Applaudissements sur les travées des groupes LaREM et SOCR.)
M. le président. La discussion générale commune est close.
Nous passons à la discussion du texte de la commission sur la proposition de loi visant à clarifier diverses dispositions du droit électoral.
proposition de loi visant à clarifier diverses dispositions du droit électoral
Chapitre Ier
Encadrement du financement des campagnes électorales et règles d’inéligibilité
Article 1er A
(Non modifié)
I. – Le chapitre V bis du titre Ier du livre Ier du code électoral est ainsi modifié :
1° Après le deuxième alinéa de l’article L. 52-5, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Pour recueillir des fonds, l’association de financement électorale peut avoir recours à des prestataires de services de paiement définis à l’article L. 521-1 du code monétaire et financier. Un décret en Conseil d’État détermine les modalités de ces transferts financiers afin de garantir la traçabilité des opérations financières et le respect de l’article L. 52-8 du présent code. » ;
2° Après le deuxième alinéa de l’article L. 52-6, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Pour recueillir des fonds, le mandataire financier peut avoir recours à des prestataires de services de paiement définis à l’article L. 521-1 du code monétaire et financier. Un décret en Conseil d’État détermine les modalités de ces transferts financiers afin de garantir la traçabilité des opérations financières et le respect de l’article L. 52-8 du présent code. »
II. – La loi n° 88-227 du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique est ainsi modifiée :
1° L’article 11-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour recueillir des fonds, l’association de financement peut avoir recours à des prestataires de services de paiement définis à l’article L. 521-1 du code monétaire et financier. Un décret en Conseil d’État détermine les modalités de ces transferts financiers afin de garantir la traçabilité des opérations financières et le respect de l’article 11-4 de la présente loi. » ;
2° L’article 11-2 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour recueillir des fonds, le mandataire financier peut avoir recours à des prestataires de services de paiement définis à l’article L. 521-1 du code monétaire et financier. Un décret en Conseil d’État détermine les modalités de ces transferts financiers afin de garantir la traçabilité des opérations financières et le respect de l’article 11-4 de la présente loi. »
M. le président. L’amendement n° 4 n’est pas soutenu.
Je mets aux voix l’article 1er A.
(L’article 1er A est adopté.)
Article 1er
(Non modifié)
I. – L’article L. 52-12 du code électoral est ainsi modifié :
1° Au début, sont ajoutés deux alinéas ainsi rédigés :
« I. – Chaque candidat ou candidat tête de liste soumis au plafonnement des dépenses électorales prévu à l’article L. 52-11 est tenu d’établir un compte de campagne lorsqu’il a obtenu au moins 1 % des suffrages exprimés ou s’il a bénéficié de dons de personnes physiques conformément à l’article L. 52-8 et selon les modalités prévues à l’article 200 du code général des impôts.
« Pour la période mentionnée à l’article L. 52-4 du présent code, le compte de campagne retrace, selon leur origine, l’ensemble des recettes perçues et, selon leur nature, l’ensemble des dépenses engagées ou effectuées en vue de l’élection par le candidat ou le candidat tête de liste ou pour son compte, à l’exclusion des dépenses de la campagne officielle. » ;
2° Les deux premières phrases du premier alinéa sont supprimées ;
3° Après le même premier alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« Sous réserve du règlement de dépenses engagées avant le second tour de scrutin ou le premier tour de scrutin si le candidat n’est pas présent au second tour, le compte de campagne ne peut retracer de dépenses postérieures à la date du scrutin.
« La valeur vénale résiduelle des immobilisations éventuellement constituées au cours de la période mentionnée au même article L. 52-4 doit être déduite des charges retracées dans le compte de campagne. » ;
4° Le deuxième alinéa est ainsi modifié :
a) Au début, est ajoutée la mention : « II. – » ;
b) Les quatre dernières phrases sont supprimées ;
5° Après le même deuxième alinéa, il est inséré un III ainsi rédigé :
« III. – Le compte de campagne est présenté par un membre de l’ordre des experts-comptables. Ce dernier met le compte de campagne en état d’examen et s’assure de la présence des pièces justificatives requises.
« Cette présentation n’est pas obligatoire :
« 1° Lorsque le candidat ou le candidat tête de liste n’est pas tenu d’établir un compte de campagne, en application du I du présent article ;
« 2° Ou lorsque le candidat ou le candidat tête de liste a obtenu moins de 5 % des suffrages exprimés et que les recettes et les dépenses de son compte de campagne n’excèdent pas un montant fixé par décret. Dans ce cas, il transmet à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, à l’appui du compte de campagne, les relevés du compte bancaire ouvert en application de l’article L. 52-5 ou de l’article L. 52-6. » ;
6° Le troisième alinéa est supprimé ;
7° Le quatrième alinéa est ainsi modifié :
a) Au début, est ajoutée la mention : « IV. – » ;
b) À la première phrase, le mot : « commission » est remplacé par les mots : « Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques » ;
8° Au début du cinquième alinéa, est ajoutée la mention : « V. – » ;
9° L’avant dernier alinéa est ainsi modifié :
a) Les mots : « aux dispositions du deuxième alinéa » sont remplacés par les mots : « au II et à la seconde phrase du 2° du III du présent article » ;
b) Les mots : « peut également être déposé » sont remplacés par les mots : « et, le cas échéant, les relevés du compte bancaire ouvert en application de l’article L. 52-5 ou de l’article L. 52-6 peuvent également être déposés » ;
10° Au début du dernier alinéa, est ajoutée la mention : « VI. – ».
II. – L’article L. 415-1 du code électoral est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour l’application du 2° du III de l’article L. 52-12, les mots : “moins de 5 % des suffrages exprimés” sont remplacés par les mots : “moins de 3 % des suffrages exprimés”. »
III. – Le chapitre V de la loi n° 77-729 du 7 juillet 1977 relative à l’élection des représentants au Parlement européen est ainsi modifié :
1° L’article 19-1 est complété par un IV ainsi rédigé :
« IV. – Par dérogation au 2° du III de l’article L. 52-12 du code électoral, la présentation du compte de campagne par un membre de l’ordre des experts-comptables n’est pas obligatoire lorsque le candidat tête de liste a obtenu moins de 3 % des suffrages exprimés et que les recettes et les dépenses de son compte de campagne n’excèdent pas un montant fixé par décret. » ;
2° Au début de l’article 19-2, est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « L’obligation de dépôt du compte de campagne s’impose à toutes les listes de candidats. »
M. le président. Les amendements nos 5 et 6 ne sont pas soutenus.
Je mets aux voix l’article 1er.
(L’article 1er est adopté.)
Article 1er bis
(Non modifié)
Le chapitre V bis du titre Ier du livre Ier du code électoral est ainsi modifié :
1° Après le mot : « candidat », la fin de la seconde phrase du deuxième alinéa de l’article L. 52-8 est ainsi rédigée : « , ni lui apporter leur garantie pour l’obtention de prêts. » ;
2° À la fin de la première phrase du deuxième alinéa de l’article L. 52-15, les mots : « les six mois du dépôt des comptes » sont remplacés par les mots : « un délai de six mois à compter de l’expiration du délai fixé au II de l’article L. 52-12 ». – (Adopté.)
Article 1er ter A
(Suppression maintenue)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 23 rectifié quater, présenté par MM. Karoutchi et Pellevat, Mme Deromedi, M. Meurant, Mme Eustache-Brinio, M. Paul, Mme Puissat, MM. D. Laurent, Regnard et Daubresse, Mmes Imbert et Dumas, M. Panunzi, Mmes Procaccia, Sittler, Berthet et Micouleau, MM. Lefèvre et Reichardt, Mme L. Darcos, M. Segouin, Mme Noël, MM. Savary, Mandelli, Houpert, Genest, Nougein, Bouchet, Saury et Buffet, Mme Bruguière, MM. Piednoir, Charon, Longuet, Ginesta, Duplomb, Dallier, Magras et Rapin, Mme A.M. Bertrand, MM. Pierre et Cuypers, Mme Giudicelli, M. Laménie, Mme Delmont-Koropoulis et MM. Bonne, Danesi, Kennel, Bonhomme, Mayet et Gilles, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Après le troisième alinéa de l’article L. 52-4 du code électoral, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« À titre dérogatoire, le candidat peut régler directement des menues dépenses dans la limite d’un plafond fixé par voie réglementaire.
« Une menue dépense électorale est engagée à titre exceptionnel et pour des raisons pratiques, notamment si un paiement ne peut être ni anticipé ni différé. Un décret en Conseil d’État fixe son montant unitaire maximal. »
La parole est à M. Roger Karoutchi.
M. Roger Karoutchi. Cet amendement porte sur les fameuses « menues dépenses ».
J’ai bien suivi le débat sur cette question à l’Assemblée nationale ; il m’a laissé assez sceptique. Dire aux gens que cette pratique est une tolérance qu’il ne sert à rien d’inscrire dans la loi revient à les empêcher de savoir quelle sera la position du juge en cas de recours. Ce serait tellement plus simple de fixer un cadre, que tout le monde accepterait : on n’irait pas plus loin, ce serait comme cela, et pas différemment.
Ayant constaté que le seul fait de mentionner des taux – j’avais évoqué 3 % ou 10 % – faisait frémir, je les ai supprimés.
Du coup, c’est l’amendement le plus neutre de la terre ! Le montant serait fixé par décret en Conseil d’État, car je fais confiance au Conseil d’État, comme la Terre entière. (Sourires.)
Par conséquent, c’est l’amendement idéal. On place les gens à couvert, on définit enfin les choses, et on laisse à la sagesse du Conseil d’État le soin de préciser jusqu’à quel plafond le candidat peut régler de menues dépenses sans encourir un risque postélectoral en cas de recours.
Cet amendement serait naturellement adopté dans l’enthousiasme général des foules présentes. (Nouveaux sourires.) Mais j’ai bien entendu M. le rapporteur, selon qui, si cette proposition de loi devait repartir dans la navette parlementaire, elle risquerait de ne pas être applicable à temps pour les prochaines élections municipales, ce qui nous ferait perdre le bénéfice de tous les apports de cet excellent texte de M. Richard.
Alors, comme ma modestie va jusqu’à considérer que les apports de M. Richard sont supérieurs à ceux qui résulteraient de l’adoption de cet amendement, je retire celui-ci, pour faire plaisir à M. le rapporteur et à M. le président de la commission des lois, étant entendu que je considère que, dorénavant, j’ai une créance sur de futurs amendements ! (Rires et applaudissements.)
M. le président. L’amendement n° 23 rectifié quater est retiré.
L’amendement n° 1 n’est pas soutenu.
En conséquence, l’article 1er ter A demeure supprimé.
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Article 2
(Non modifié)
L’article L. 118-3 du code électoral est ainsi modifié :
1° Les trois premiers alinéas sont remplacés par quatre alinéas ainsi rédigés :
« Lorsqu’il relève une volonté de fraude ou un manquement d’une particulière gravité aux règles de financement des campagnes électorales, le juge de l’élection, saisi par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, peut déclarer inéligible :
« 1° Le candidat qui n’a pas déposé son compte de campagne dans les conditions et le délai prescrits à l’article L. 52-12 ;
« 2° Le candidat dont le compte de campagne, le cas échéant après réformation, fait apparaître un dépassement du plafond des dépenses électorales ;
« 3° Le candidat dont le compte de campagne a été rejeté à bon droit. » ;
2° L’avant-dernier alinéa est ainsi modifié :
a) À la première phrase, les mots : « prévue aux trois premiers alinéas du » sont remplacés par les mots : « mentionnée au » ;
b) (Supprimé)
3° Avant le dernier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« En cas de scrutin binominal, l’inéligibilité s’applique aux deux candidats du binôme. »
M. le président. L’amendement n° 24, présenté par M. Richard et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 10
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Pour un même scrutin, le juge de l’élection veille à ce que l’inéligibilité qu’il prononce assure un traitement équitable entre les candidats ayant commis des irrégularités comparables, en particulier au regard du calendrier des prochaines élections.
La parole est à M. Alain Richard.
M. Alain Richard. Mon intention, en déposant cet amendement, était de nous permettre, en présence du Gouvernement, de conclure le débat, somme toute inabouti, portant sur les conditions d’application des inéligibilités prononcées par le juge de l’élection.
Nous savons que des inéligibilités peuvent être également prononcées, à tout moment, par le juge pénal, en peine accessoire à la suite d’infractions qui n’ont pas de relation directe avec le comportement du condamné au cours d’une élection. Les inéligibilités qui nous intéressent ici sont plutôt celles que peut prononcer le juge de l’élection, c’est-à-dire, en dernier ressort, le Conseil d’État pour les élections locales et le Conseil constitutionnel pour les élections parlementaires, quand une élection est contestée devant lui, mais aussi – cas le plus préoccupant, que nous avons tous éprouvé à un moment ou à un autre – celles que prononce le Conseil constitutionnel après que la Commission nationale des comptes de campagne a déclaré irrégulier le compte de campagne d’un candidat, alors qu’aucune faute n’a été alléguée dans l’élection elle-même.
Le Conseil constitutionnel a communiqué au public la « revue » du droit électoral qu’il a effectuée après le déroulement des élections législatives de 2017 ; c’est à la suite de cette revue que, grâce à la bienveillance de M. le président de la commission des lois, nous nous sommes intéressés à cette proposition de loi, qui tire les conséquences des observations du Conseil. Dans ses observations, le Conseil relevait que la durée des procédures qui aboutissent aux déclarations d’inéligibilité était variable ; en conséquence, des manquements de même importance, donnant donc lieu à la même sanction – trois ans d’inéligibilité, pour la sanction maximale, par exemple –, entraînent des conséquences différentes en fonction de la date de la décision, point de départ de la peine. Ainsi, si l’on prend le cas de contentieux relatifs aux élections législatives de 2017, une personne A, condamnée à deux ans d’inéligibilité, pourrait être candidate aux élections municipales de 2020, alors qu’une personne B, condamnée à la même peine, mais un peu plus tard, ne le pourrait pas.
Nous avons examiné le problème sous tous les angles. En première lecture, nous avions eu l’idée de recommander au juge de l’élection lui-même de tenir compte de cette situation quand il détermine la durée de l’inéligibilité du condamné. Nos collègues députés ne nous ont pas suivis. Il faut reconnaître sur ce point que, comme le faisait remarquer Pierre-Yves Collombat en commission, pour supprimer une inégalité, nous en avions en quelque sorte instauré une autre.
Si je présente de nouveau aujourd’hui un amendement qui reprend l’état de nos réflexions lors de la première lecture, c’est pour que nous essayions ensemble de conclure ce débat ; après quoi, je le retirerai, pour permettre l’adoption conforme et définitive de ce texte.
La conclusion que je propose est la suivante : malheureusement, nous serons amenés à renvoyer au Conseil constitutionnel sa propre question. En réalité, lui dirons-nous, nous sommes confrontés à deux vagues de décisions d’inéligibilité.
Les premières découlent du contentieux électoral et sont rendues, généralement, six à huit mois après l’élection, au plus tard après un an ; dans ce cas de figure, le Conseil constitutionnel s’efforce déjà, de fait, de grouper les audiences pouvant déboucher sur des inéligibilités et de rendre ses décisions dans une période assez courte, afin qu’il n’y ait pas trop d’écarts entre les dates effectives d’application des peines.
Les secondes, qui font suite aux décisions de non-conformité de la Commission nationale des comptes de campagne, sont plus problématiques. En effet, celle-ci rend déjà ses décisions de façon étalée dans le temps. Malgré cela, nous suggérerons au Conseil constitutionnel d’essayer de grouper les décisions d’inéligibilité rendues dans ce cadre, de manière que les effets ne soient pas trop différents pour les différents condamnés.
Cette explication faite, je retire mon amendement. (Mme Françoise Laborde applaudit.)
M. le président. L’amendement n° 24 est retiré.
La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote sur l’article.
M. Pierre-Yves Collombat. Les deux amendements qui viennent d’être présentés m’amènent tout de même à faire une remarque sur ce que j’appellerais les joies de la moralisation. On en est à essayer telle ou telle invention, par exemple sur les menues dépenses. Que la commission en soit réduite à créer des problèmes pour cela ! On s’embête avec ce genre de trucs, alors qu’il n’y a strictement rien à faire ! C’est d’autant plus vrai qu’on peut tout de même citer quelques exemples de dépassements où il ne s’agissait pas de la manière dont on a payé trois francs six sous : c’était plutôt quelques millions qui se baladaient on ne sait trop où, et dont on ne parle plus !
S’agissant du problème que vient de décrire Alain Richard, qui est bien réel, quelque chose me tarabuste aussi : que se passera-t-il quand viendra le jour où, après l’élection présidentielle, on dira au président bien élu qu’il ne l’est pas, parce qu’il aurait dépensé 350 euros de trop ? C’est arrivé en 1995 : je n’aurai pas la cruauté d’évoquer cet épisode.
Enfin, il faudrait peut-être un jour poser les vrais problèmes, plutôt que de passer son temps à essayer de régler les petits problèmes.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Arnaud de Belenet, rapporteur. J’imagine que M. le président de séance apprécie que les auteurs d’amendements présentent à la fois leur amendement et la problématique qu’il pose, entendent l’avis de la commission et en tirent toutes les conséquences. C’est suffisamment singulier et rare pour être souligné ! (Sourires.)
Je veux simplement, non pas compléter les propos d’Alain Richard, mais mettre en exergue une fausse bonne idée qui revient encore et toujours, en dépit du discours qu’on a pu lui opposer en commission et ailleurs et que vient de relayer excellemment M. Richard : le juge de l’élection devrait prendre en compte la date de l’élection, plutôt que celle de sa décision, comme point de départ de l’inéligibilité.
Je veux le répéter avec force, d’autant que c’était une préconisation presque explicite du Conseil constitutionnel, cette solution ne peut prospérer, car elle pose d’évidents problèmes de rétroactivité : quid de la légalité des décisions prises entre temps ? Quid des indemnités ? Même si l’on utilisait la théorie du mandat apparent, nombre de problématiques juridiques se poseraient. On ne peut donc se satisfaire de cette solution, qui reviendrait en outre à neutraliser la décision du juge : si l’inéligibilité est rétroactive, à la date de la décision, la personne concernée peut de nouveau être éligible. Enfin, cela créerait à l’évidence une confusion entre l’annulation de l’élection elle-même et la peine d’inéligibilité.
Je tenais à le redire, afin de conforter la conviction de ceux qui ne voudraient pas revenir à cette fausse bonne idée, point de départ de nos travaux sur ce sujet.
M. le président. Je mets aux voix l’article 2.
(L’article 2 est adopté.)
Article 3
(Suppression maintenue)
Article 3 bis
(Non modifié)
Le livre Ier du code électoral est ainsi modifié :
1° Après le mot : « généraux », la fin du 1° de l’article L. 195 est ainsi rédigée : « et directeurs de cabinet de préfet dans le département où ils exercent ou ont exercé leurs fonctions depuis moins de deux ans ; les sous-préfets chargés de mission auprès d’un préfet et les secrétaires en chef de sous-préfecture dans le département où ils exercent ou ont exercé leurs fonctions depuis moins d’un an ; »
2° L’article L. 231 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, les mots : « d’un an les sous-préfets, les secrétaires généraux de préfecture, les directeurs de cabinet de préfet, » sont remplacés par les mots : « de deux ans les sous-préfets, les secrétaires généraux de préfecture et les directeurs de cabinet de préfet, depuis moins d’un an » ;
b) Au dernier alinéa, les mots : « alinéas ci-dessus » sont remplacés par les mots : « deuxième à onzième alinéas du présent article ».
M. le président. L’amendement n° 9 n’est pas soutenu.
Je mets aux voix l’article 3 bis.
(L’article 3 bis est adopté.)
Chapitre II
Propagande et opérations de vote
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Article 4 bis A
(Non modifié)
Le code électoral est ainsi modifié :
1° Au début du chapitre V du titre Ier du livre Ier, il est ajouté un article L. 46-2 ainsi rétabli :
« Art. L. 46-2. – La campagne électorale est ouverte à partir du deuxième lundi qui précède la date du scrutin et prend fin la veille du scrutin à zéro heure. En cas de second tour, la campagne électorale est ouverte le lendemain du premier tour et prend fin la veille du scrutin à zéro heure. » ;
2° L’article L. 164 est abrogé ;
3° Le premier alinéa de l’article L. 166 est ainsi rédigé :
« Il est institué pour chaque circonscription une commission chargée d’assurer l’envoi et la distribution de tous les documents de propagande électorale. » ;
4° À l’article L. 168, la référence : « L. 164 » est remplacée par la référence : « L. 165 » ;
5° Le dernier alinéa de l’article L. 330-6 est ainsi rédigé :
« La référence à l’article L. 51 figurant à l’article L. 165 s’entend de la référence au présent article. » – (Adopté.)
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Article 5
(Non modifié)
L’article L. 52-3 du code électoral est ainsi rédigé :
« Art. L. 52-3. – Les bulletins de vote ne peuvent pas comporter :
« 1° D’autres noms de personne que celui du ou des candidats ou de leurs remplaçants éventuels, à l’exception, pour la Ville de Paris et les communes de Marseille et de Lyon, du candidat désigné comme devant présider l’organe délibérant concerné par le scrutin ;
« 2° La photographie ou la représentation de toute personne, à l’exception de la photographie ou de la représentation du ou des candidats à l’élection concernée et, pour la Ville de Paris et les communes de Marseille et de Lyon, de la photographie ou de la représentation du candidat désigné comme devant présider l’organe délibérant concerné par le scrutin ;
« 3° La photographie ou la représentation d’un animal.
« Les bulletins de vote peuvent comporter un emblème. »
M. le président. Les amendements nos 10, 11, 17, 12, 16, 13 et 14 ne sont pas soutenus.
Je mets aux voix l’article 5.
(L’article 5 est adopté.)
Article 5 bis A
(Non modifié)
Le titre Ier du livre Ier du code électoral est ainsi modifié :
1° L’article L. 51 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« En cas d’affichage électoral apposé en dehors des emplacements prévus au présent article, le maire ou, à défaut, le préfet peut, après une mise en demeure du ou des candidats en cause, procéder à la dépose d’office des affiches. » ;
2° Au dernier alinéa de l’article L. 90, les mots : « du dernier » sont remplacés par les mots : « de l’avant-dernier ». – (Adopté.)
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Chapitre III
Diverses coordinations et modalités d’entrée en vigueur
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Article 7
(Non modifié)
I. – Le code électoral est ainsi modifié :
1° Après la référence : « articles L.O. 136-1 », la fin du 2° de l’article L. 45-1 est ainsi rédigée : « , L.O. 136-3 et L.O. 136-4. » ;
2° Au deuxième alinéa de l’article L. 52-11-1, au premier alinéa de l’article L. 118-2 et à l’article L. 330-9-1, la référence : « deuxième alinéa » est remplacée par la référence : « II » ;
3° Le début du premier alinéa du I de l’article L. 388 est ainsi rédigé : « I. – Les dispositions du titre Ier du livre Ier et du titre Ier du livre VIII du présent code, dans leur rédaction résultant de la loi n° … du … visant à clarifier diverses dispositions du droit électoral, à l’exception des articles… (le reste sans changement). » ;
4° Au 8° de l’article L. 392 ainsi qu’aux articles L. 454, L. 478, L. 505 et L. 532, les mots : « aux dispositions du deuxième alinéa » sont remplacés par les références : « au II et à la seconde phrase du 2° du III » et les mots : « peut également être déposé » sont remplacés par les mots : « et, le cas échéant, les relevés du compte bancaire ouvert en application des articles L. 52-5 ou L. 52-6 peuvent également être déposés » ;
5° Au premier alinéa des articles L. 428 et L. 437 dans leur rédaction résultant de la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 relative à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025 et portant diverses dispositions intéressant la défense, la référence : « loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 relative à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025 et portant diverses dispositions intéressant la défense » est remplacée par la référence : « loi n° … du … visant à clarifier diverses dispositions du droit électoral ».
II. – Au premier alinéa de l’article 26 de la loi n° 77-729 du 7 juillet 1977 relative à l’élection des représentants au Parlement européen, la référence : « loi n° 2018-509 du 25 juin 2018 relative à l’élection des représentants au Parlement européen » est remplacée par la référence : « loi n° … du … visant à clarifier diverses dispositions du droit électoral ».
III. – À la fin du premier alinéa de l’article 19 de la loi n° 88-227 du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique, la référence : « loi n° 2017-1339 du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique » est remplacée par la référence : « loi n° … du … visant à clarifier diverses dispositions du droit électoral ». – (Adopté.)
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Vote sur l’ensemble
M. le président. Les autres dispositions de la proposition de loi ne font pas l’objet de la deuxième lecture.
Personne ne demande la parole ?…
Je mets aux voix, dans le texte de la commission, l’ensemble de la proposition de loi visant à clarifier diverses dispositions du droit électoral.
(La proposition de loi est adoptée définitivement.)
M. le président. Nous passons à l’examen de la proposition de loi organique.
proposition de loi organique visant à clarifier diverses dispositions du droit électoral
Article 1er
(Non modifié)
L’article L.O. 136-1 du code électoral est ainsi modifié :
1° Les trois premiers alinéas sont remplacés par quatre alinéas ainsi rédigés :
« En cas de volonté de fraude ou de manquement d’une particulière gravité aux règles de financement des campagnes électorales, le Conseil constitutionnel, saisi d’une contestation formée contre l’élection ou en application du troisième alinéa de l’article L. 52-15, peut déclarer inéligible :
« 1° Le candidat qui n’a pas déposé son compte de campagne dans les conditions et le délai prescrits à l’article L. 52-12 ;
« 2° Le candidat dont le compte de campagne, le cas échéant après réformation, fait apparaître un dépassement du plafond des dépenses électorales ;
« 3° Le candidat dont le compte de campagne a été rejeté à bon droit. » ;
2° Le quatrième alinéa est ainsi modifié :
a) À la première phrase, les mots : « des trois premiers alinéas » sont supprimés ;
b) (Supprimé)
3° (Supprimé) –
M. le président. Je mets aux voix l’article 1er.
(L’article 1er est adopté.)
Article 2
(Suppression maintenue)
Article 2 bis
(Non modifié)
Le IV de l’article L.O. 136-4 du code électoral est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« L’inéligibilité déclarée sur le fondement du présent article n’a pas d’effet sur les autres mandats acquis antérieurement à la date de la décision du Conseil constitutionnel. » – (Adopté.)
Article 2 ter
(Non modifié)
L’article L.O. 132 du code électoral est ainsi modifié :
1° Après le I, il est inséré un I bis ainsi rédigé :
« I bis. – Les sous-préfets, les secrétaires généraux de préfecture et les directeurs de cabinet de préfet sont inéligibles en France dans toute circonscription comprise en tout ou partie dans le ressort dans lequel ils exercent ou ont exercé leurs fonctions depuis moins de deux ans à la date du scrutin. » ;
2° Au début du 1° du II, les mots : « Les sous-préfets, les secrétaires généraux de préfecture, les directeurs de cabinet de préfet et » sont supprimés. – (Adopté.)
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Article 4
(Non modifié)
I. – L’article 1er de la présente loi organique s’applique à tout député ou sénateur à compter du prochain renouvellement de l’assemblée à laquelle il appartient ainsi qu’aux candidats aux élections afférentes.
II. – (Non modifié) – (Adopté.)
Vote sur l’ensemble
M. le président. Les autres dispositions de la proposition de loi organique ne font pas l’objet de la deuxième lecture.
Personne ne demande la parole ?…
Je mets aux voix, dans le texte de la commission, l’ensemble de la proposition de loi organique visant à clarifier diverses dispositions du droit électoral.
En application de l’article 59 du règlement, le scrutin public ordinaire est de droit.
Il va y être procédé dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Je vous invite, mes chers collègues, à vérifier que votre carte de vote est bien insérée dans votre terminal.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater les résultats du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent les résultats du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 15 :
Nombre de votants | 340 |
Nombre de suffrages exprimés | 340 |
Pour l’adoption | 340 |
Le Sénat a adopté définitivement. (Applaudissements.)
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à quinze heures trente-cinq, est reprise à quinze heures quarante.)
6
Statut de citoyen sauveteur
Adoption d’une proposition de loi dans le texte de la commission modifié
M. le président. L’ordre du jour appelle, à la demande du groupe La République En Marche, la discussion de la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale, visant à créer le statut de citoyen sauveteur (proposition n° 331 [2018-2019], texte de la commission n° 73, rapport n° 72).
Dans la discussion générale, la parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Laurent Nunez, secrétaire d’État auprès du ministre de l’intérieur. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, la question des arrêts cardiaques nous concerne tous.
Chaque année, 40 000 personnes meurent en France d’un arrêt cardiaque inopiné ; notre taux de survie en cas d’attaque est de 3 % à 4 %. Ce taux est faible ; il l’est plus encore lorsqu’on le compare avec celui des pays anglo-saxons et scandinaves, où 20 % à 40 % des victimes survivent, soit dix fois plus.
Ces chiffres démontrent deux choses : une urgence à agir et une urgence à former. C’est l’objet même de la proposition de loi déposée par Jean-Charles Colas-Roy à l’Assemblée nationale. Ce texte n’appelle pas aux débats partisans, mais à la responsabilité de toutes et tous. C’est d’ailleurs cet esprit qui avait prévalu à l’Assemblée nationale, où le texte avait été adopté à l’unanimité.
J’aimerais revenir sur les fondements et les objectifs de ce texte. Dès son élection, le Président de la République avait fixé un objectif aussi nécessaire qu’ambitieux : former 80 % de la population aux gestes qui sauvent d’ici à dix ans.
C’est d’autant plus essentiel que 70 % des attaques cardiaques se déroulent devant des témoins et que chaque minute compte. Je veux vous en donner une idée précise : sans massage cardiaque, les chances de survie s’amenuisent de 10 % par minute. Au-delà de trois minutes sans massage, les lésions provoquées sont généralement irréversibles. Au-delà de dix minutes, les chances de survie sont pratiquement nulles.
En moyenne, les secours mettent treize minutes à intervenir – c’est à peine trois minutes de plus que le laps de temps très court, dix minutes, qui condamne une victime.
Aussi, augmenter le nombre de personnes formées et capables d’intervenir vite en cas de détresse permettra de sauver des vies. À nouveau, des chiffres seront plus parlants : si nous atteignons l’objectif fixé par le Président de la République, nous augmenterons le taux de survie de 3 % à 10 % et sauverons 3 000 vies chaque année. Bien sûr, ces chiffres sont théoriques, ils n’en demeurent pas moins parlants.
Cette proposition de loi nous permet d’aller dans le bon sens.
Dans le texte issu des travaux de la commission des lois du Sénat, la première mesure consiste à créer la qualité de sauveteur occasionnel. Je n’anticiperai pas sur les débats qui viendront à l’occasion de l’examen des amendements à l’article 1er. Il s’agit d’une mesure importante, car aujourd’hui une personne qui pratique un massage cardiaque sur une victime n’est pas protégée par le droit et peut être exposée à des poursuites. Le sauveteur occasionnel, c’est-à-dire la personne qui pratique un geste de premiers secours, doit bénéficier d’une protection et de reconnaissance pour son geste.
Par ailleurs, nous devons responsabiliser les Français par tout moyen ; c’est pourquoi l’article 11 de la proposition de loi renforce les peines en cas de vol ou de détérioration d’un défibrillateur.
Le Sénat a beaucoup transformé le texte issu de l’Assemblée nationale. Si je comprends parfaitement sa volonté de législateur d’opérer une séparation rigoureuse des mesures législatives et réglementaires, je crains qu’il ne soit allé un peu trop loin, en supprimant quelques-uns des effets utiles du texte.
Je ne prendrai qu’un exemple : son changement de titre. Avoir remplacé les « gestes qui sauvent » par « les premiers secours » implique un changement et une réduction assez importante du champ d’application du texte. En effet, les « gestes qui sauvent » sont un ensemble de pratiques qui sont rigoureusement définies dans un arrêté du 30 juin 2017 et qui correspondent à une formation précise. Il me paraissait donc utile de maintenir leur mention dans le nom de la proposition de loi afin de continuer à y faire référence.
Il importe par ailleurs que la notion de collaborateur occasionnel du service public, consacrée par la jurisprudence administrative, puisse trouver à s’appliquer non seulement au sauveteur occasionnel, mais aussi à d’autres acteurs du secours.
En ce sens, j’émettrai un avis favorable sur l’amendement déposé par le groupe La République En Marche, qui vient consolider la rédaction de l’article 1er de cette proposition de loi. Mme la rapporteure a également déposé un amendement à ce sujet et nous aurons l’occasion de débattre tout à l’heure. Il s’agit de la mesure phare de ce texte. C’est elle qui permet les plus grandes avancées pour notre prévention et contre les risques d’accident cardiaque. Encore une fois, nous aurons l’occasion de débattre de cette articulation entre le statut de sauveteur occasionnel et celui, jurisprudentiel, de collaborateur bénévole qui assure également une protection à ces personnes.
M. le président. La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Catherine Troendlé, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des lois, mes chers collègues, l’arrêt cardiaque subit demeure une des causes de mortalité les plus importantes et méconnues du grand public. En France, entre 40 000 et 50 000 personnes décèdent d’un arrêt cardiaque chaque année, soit quinze fois plus que le nombre de morts sur les routes.
Or, en matière d’arrêt cardiaque, le pire est de ne rien faire, comme vous l’avez dit, monsieur le secrétaire d’État, puisque le délai d’intervention a un impact très significatif sur les chances de survie de la victime. Sans prise en charge immédiate, plus de 92 % des arrêts cardiaques sont fatals. Sept fois sur dix, ces arrêts surviennent devant témoins, mais seulement 40 % de ceux-ci font les gestes de premiers secours. La conséquence triste, mais logique, est qu’en France le taux de survie à un arrêt cardiaque ne dépasse pas les 8 %, ce taux étant quatre à cinq fois plus élevé dans les pays où les lieux publics sont équipés en défibrillateurs automatisés externes et où la population est formée aux gestes qui sauvent.
Face à ce constat, plusieurs mesures ont d’ores et déjà été prises. Je fais ici référence à la loi du 13 août 2004 rendant obligatoire l’apprentissage des gestes qui sauvent à l’école. Je fais également référence à la loi du 17 mars 2015 visant à introduire une formation pratique aux gestes de premiers secours dans la préparation du permis de conduire, qui est issue d’une proposition de loi de notre collègue Jean-Pierre Leleux. Je fais enfin référence à la loi du 28 juin 2018 relative au défibrillateur cardiaque, issue quant à elle d’une proposition de notre collègue Jean-Pierre Decool.
C’est dans cette perspective que se situe la proposition de loi déposée par notre collègue député Jean-Charles Colas-Roy et adoptée en première lecture par l’Assemblée nationale. Son objectif est à la fois clair et louable : porter l’attention sur ce sujet majeur et favoriser les interventions, d’une part, en formant la population aux gestes qui sauvent et, d’autre part, en modelant un régime de responsabilité favorable à l’intervention.
Partageant pleinement ces objectifs, la commission des lois a examiné le texte de l’Assemblée nationale au travers d’un crible rigoureux afin d’en garantir l’efficacité. Elle n’a donc pas hésité à écarter des dispositions qui ne relèvent pas du domaine que la Constitution confie à la loi, qu’elles fussent soit de nature réglementaire, soit dépourvues de portée normative.
Je me félicite d’ores et déjà que la méthode proposée ait reçu l’assentiment de notre assemblée, puisque les amendements déposés ne portent que sur des points techniques précis et ne tendent pas à ce que le texte retrouve son champ initial.
La commission des lois a tout particulièrement porté son attention sur l’article 1er de la proposition de loi qui tend à créer un statut de « citoyen sauveteur » afin de mieux protéger les personnes venant en aide de manière volontaire et bénévole aux victimes d’une urgence vitale.
Nous avons souhaité réécrire cette disposition afin de redéfinir les conditions d’intervention des sauveteurs dans des termes plus juridiques. Ainsi, la commission des lois a remplacé l’expression de « citoyen sauveteur » par celle de « sauveteur occasionnel et bénévole » qui est plus appropriée au concours apporté à l’exercice d’un service public.
La commission des lois a souhaité conserver du texte transmis la référence au régime jurisprudentiel de collaborateur occasionnel du service public, les atténuations de responsabilité pénale et le régime spécial de responsabilité civile applicable aux sauveteurs. Toutefois, elle a souhaité apporter une correction de nature à l’exonérer pour tous les préjudices qu’il pourrait causer lors de son intervention, sauf faute lourde ou intentionnelle, et pas seulement pour ceux causés à la personne secourue elle-même.
De plus, j’ai souhaité tenir compte d’une partie des remarques soulevées par l’amendement déposé par le groupe La République En Marche.
En ce sens, l’amendement que je vais vous présenter réintroduit les obligations d’appeler les secours et de prendre les premières dispositions pour toute personne, et non pas pour les seuls sauveteurs occasionnels. En revanche, il ne semble pas opportun d’élargir le champ de la proposition de loi à tous les acteurs de la sécurité civile, comme le prévoit l’amendement du groupe La République En Marche, puisque l’objectif est bien de consacrer un régime spécial pour les sauveteurs occasionnels et eux seuls.
Par ailleurs, la commission des lois a approuvé les dispositions de l’article 7 de la proposition de loi qui tendent à consolider la liste des personnes autorisées à accomplir les actes de sensibilisation au secourisme. Elle a seulement souhaité y inclure certains services des établissements de santé. En effet, beaucoup d’entre eux détiennent les compétences nécessaires pour assurer une formation au secourisme.
Enfin, la commission des lois s’est également montrée favorable aux dispositions de l’article 11 tendant à renforcer les sanctions pénales en cas de vol ou de dégradation de défibrillateurs. Les modifications qu’elle a apportées ont pour seul objet d’assurer la clarté et la précision de la loi pénale.
Vous le voyez, mes chers collègues, la commission des lois a souhaité ne garder dans ce texte que des dispositions efficaces et effectives. Par l’amendement que je vais vous présenter, elle a également souhaité faire un pas vers le consensus, monsieur le secrétaire d’État, dans l’espoir de voir cette proposition de loi adoptée rapidement.
Si des dispositions bien faites sont indispensables, elles ne sont toutefois pas suffisantes pour lutter contre les arrêts cardiaques. Je pense sincèrement que la nécessité de se former aux premiers secours découle d’une obligation morale et civique pour toute personne, notamment celles qui ont la charge d’en encadrer d’autres, dans quelque contexte que ce soit. Il devrait s’agir là d’un réflexe que nous devrions tous avoir. (M. Édouard Courtial ainsi que Mmes Nathalie Goulet et Françoise Laborde applaudissent.)
M. le président. La parole est à M. Emmanuel Capus.
M. Emmanuel Capus. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des lois, madame le rapporteur, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui une proposition de loi visant à créer le statut de citoyen sauveteur, à lutter contre l’arrêt cardiaque et à sensibiliser aux gestes qui sauvent.
Cette discussion survient quelques mois après que trois sauveteurs de la Société nationale de sauvetage en mer ont péri lors d’un sauvetage en mer au large des Sables-d’Olonne. Quelques mois aussi après que deux soldats de nos forces spéciales ont donné leur vie au Burkina Faso pour sauver des otages. Et tous les jours, des pompiers, souvent volontaires, des policiers, des urgentistes, prennent des risques pour veiller sur leur prochain et porter secours à celui ou celle qui se trouve en danger. Nous ne devons pas banaliser l’engagement quotidien de ces héros. Leur courage fait entrer l’exceptionnel dans l’ordinaire.
Au contraire, nous devons plutôt nous interroger, nous autres citoyens qui ne prenons pas de tels risques au quotidien. Nous devons nous interroger pour savoir si, à notre échelle, nous serions en mesure de suppléer ces héros, dans le cas où nous serions seuls à pouvoir intervenir.
C’est tout l’intérêt que revêt, à mes yeux, cette proposition de loi. Elle vise à faciliter et à sécuriser la capacité de tout un chacun à faire le bon geste au bon moment. Évidemment, à l’impossible, nul n’est tenu, mais qui pense que nous ne devrions pas, collectivement, relever encore un peu notre niveau d’exigence pour prévenir au mieux ces risques, auxquels chacun d’entre nous est exposé ?
L’ambition de cette proposition de loi est noble ; cela ne fait aucun doute.
M. Philippe Bas, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale. Absolument !
M. Emmanuel Capus. Mais je partage l’avis de la commission : la version initiale contenait d’importants risques juridiques.
C’est notamment le cas pour l’article 1er. La nouvelle mouture du texte permettra de mieux sécuriser les citoyens qui portent assistance, de façon occasionnelle et bénévole, à un autre citoyen, tout en garantissant leur protection juridique. Ce serait le comble que de susciter doutes et appréhensions, alors que nous souhaitons encourager la prise d’initiative !
Je me réjouis également que les sanctions portant sur les vols de défibrillateurs cardiaques soient renforcées. J’y vois le complément utile de la loi issue de la proposition de notre collègue Jean-Pierre Decool qui a permis de développer l’accès aux défibrillateurs automatisés externes, en rendant leur présence obligatoire dans certains lieux. Il s’agit d’équipements dont nous devrions être systématiquement entourés et les vols de tels matériels constituent, dans cette optique, une atteinte grave à la solidarité et à la cohésion nationales. Comment croire en la bienveillance collective si l’on découvre, trop tard, que l’équipement indispensable à la survie d’un citoyen a été subtilisé pour de petits profits ? L’État doit se montrer particulièrement ferme sur ce sujet.
Fermeté de la puissance publique, engagement bienveillant des citoyens au service de leurs proches : l’État ne peut pas tout et chacun doit se mobiliser sans attendre des solutions qui viennent d’en haut. Je partage cette vision de la société, sans verser pour autant dans l’angélisme. Je mesure ce qu’elle implique d’exigence collective, mais je crois qu’elle nous permettra de nous élever tous ensemble.
Chacun le sait, l’enfer est pavé de bonnes intentions. Ne nous laissons pas abuser par des ambitions qui flattent notre courage, mais nous contraindraient de façon excessive. Se mettre au service de tous n’implique pas de devenir l’obligé de chacun.
Je pense que le Sénat a sagement amendé ce texte, qui se trouve désormais réduit à ses propositions les plus essentielles. Il conserve à mes yeux sa pertinence et atteint mieux encore son objectif initial.
Le groupe Les Indépendants votera donc en faveur du texte, tel qu’il a été retravaillé par la commission des lois.
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet.
Mme Nathalie Goulet. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, Emmanuel Capus a élevé le débat de façon très sérieuse et le sujet l’est assurément. Nous devons évidemment tout faire pour éviter les morts par arrêt cardiaque. Le groupe Union Centriste votera donc ce texte dans la version issue des travaux de la commission des lois.
Monsieur le secrétaire d’État, je voudrais vous remercier d’être au banc cet après-midi ; nous connaissons votre charge de travail.
Sur le fond, le rapport de la commission des lois ne fait que constater « l’absence de vide juridique, s’agissant de la protection des sauveteurs occasionnels ». C’est exact, la commission des lois l’a démontré : ce sujet est déjà traité par ailleurs. C’est la raison pour laquelle la commission a sensiblement revu la rédaction du texte.
J’ajouterai qu’il n’y a pas que les arrêts cardiaques – nous pourrions aussi évoquer les accidents vasculaires cérébraux ou bien d’autres sujets. Ainsi, notre collègue Emmanuel Capus l’a dit, le Sénat vient de rendre un rapport sur le sauvetage en mer et nous aurions pu rendre la présente proposition de loi plus ambitieuse, en y intégrant des recommandations de la mission d’information du Sénat.
Je ne voudrais pas vous retenir plus longtemps dans cet hémicycle, monsieur le secrétaire d’État – je connais votre charge de travail –, mais je voudrais simplement vous poser une question qui est liée à l’ordre du jour du Sénat de la semaine prochaine. Selon le texte dont nous débattons, les sauveteurs seront des collaborateurs du service public…
Mme Catherine Troendlé, rapporteur. Occasionnels !
Mme Nathalie Goulet. Nous parlons de collaborateurs au masculin, mais nous pouvons espérer que certains seront des femmes… et qu’elles ne seront pas voilées, sans quoi elles ne pourraient pas porter secours aux gens avant d’enlever leur voile ? (Sourires sur plusieurs travées.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Fichet.
M. Jean-Luc Fichet. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je ne vais pas non plus faire durer les choses plus que nécessaire. Les chiffres ont été donnés, je ne les rappellerai pas.
Cette proposition de loi nous convient et le groupe socialiste et républicain la votera, car elle assure une protection juridique aux personnes qui se portent au secours de gens en situation de détresse – on ne peut qu’approuver ce point très important.
Nous aurions aimé que la JDC – journée défense et citoyenneté – inclue une formation aux premiers secours. Les jeunes qui sont scolarisés reçoivent cette formation durant leur cursus, mais il faut aussi penser à ceux qui ne le sont pas – eux aussi doivent bénéficier d’une telle formation. Cette formation est valorisante et la faire suivre aux jeunes en difficulté leur donnerait un atout supplémentaire. S’il leur arrive de porter secours et de sauver des vies, cela ne peut être que très bénéfique pour leur parcours personnel.
Par ailleurs, le terme « collaborateur » nous apparaît comme étant technique et il nous semble important d’inclure la notion de citoyenneté dans le dispositif au travers de l’expression « citoyen sauveteur ». Cette notion est plus forte, plus dynamique, et il serait dommage de ne pas la retenir. Tel sera l’objet des deux amendements que j’ai déposés sur ce texte.
En tout cas, je le redis, le groupe socialiste et républicain votera cette proposition de loi ! (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR.)
M. le président. La parole est à Mme Françoise Laborde.
Mme Françoise Laborde. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, 8 %, c’est le taux de survie en France d’une personne victime d’un arrêt cardiaque inopiné. Dans un pays comme le nôtre qui se distingue par une large accessibilité aux soins et une médecine de qualité, ce chiffre ne peut que nous scandaliser, surtout quand on le compare à celui des pays anglo-saxons et scandinaves, où il est trois à quatre fois plus élevé.
Dans ce contexte, nous pouvons dire que les dispositions de la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui sont des mesures de santé publique. Elles visent à inciter nos concitoyens à se former et surtout à ne plus hésiter à agir, lorsqu’ils sont témoins d’un tel accident.
Mme Catherine Troendlé, rapporteur. Exactement !
Mme Françoise Laborde. Je ne reprendrai pas les chiffres déjà cités, mais il faut savoir que, lors d’un arrêt cardiaque inopiné, pour chaque minute qui s’écoule sans pratique d’un massage cardiaque, ce sont 10 % de chances de survie en moins pour la victime. Quand on sait qu’en France les secours mettent en moyenne treize minutes pour arriver, on comprend que les premiers soins prodigués par un témoin, notamment le massage cardiaque, peuvent sauver une vie.
Cette proposition de loi veut donc donner, ce qui est bienvenu, un véritable statut à ces héros du quotidien.
L’article 1er permet de graver dans le marbre de la loi le statut de ces sauveteurs occasionnels et bénévoles, le terme de citoyen ayant été jugé à juste titre inapproprié par notre commission des lois. Ce statut permettra d’inscrire dans la loi une jurisprudence existante et de protéger ainsi juridiquement « quiconque porte assistance de manière spontanée et volontaire à une personne en situation de péril grave et imminent ». Avec cette formulation, le texte issu des travaux de la commission des lois a vocation à englober toute sorte d’accidents graves, et pas seulement l’arrêt cardiaque, renforçant ainsi la protection conférée.
L’atténuation de la responsabilité pénale en cas de délit non intentionnel lors de l’intervention du sauveteur bénévole et l’exonération de tous les préjudices qu’il pourrait causer, sauf bien évidemment en cas de faute lourde ou intentionnelle, sont à la fois de justes contreparties au service rendu et des incitations pour lutter contre une inaction mortifère.
S’agissant des mesures de sensibilisation aux gestes qui sauvent prévues dans le texte initial, la commission des lois a supprimé une grande partie d’entre elles, car elles existent déjà ou relèvent du domaine du règlement. Je partage cette volonté de ne pas faire de l’affichage, mais de prendre des mesures concrètes.
Néanmoins, si la sensibilisation et la formation des écoliers et des salariés existent déjà, elles mériteraient certainement une meilleure visibilité et même une plus grande publicité afin que tous les citoyens, quel que soit leur âge ou leur profession, soient conscients de l’importance de se former régulièrement, et surtout de l’importance d’agir.
Constitue également une véritable avancée l’obligation, pour les fédérations sportives agréées, d’intégrer dans la formation des arbitres et juges une sensibilisation au secourisme. Près de huit cents cas de mort subite interviennent lors d’une pratique sportive. Cette formation favorisera la prise en charge rapide d’un sportif en situation de malaise cardiaque.
Enfin, le renforcement des sanctions pénales en cas de vol ou de dégradation des défibrillateurs cardiaques aura, je l’espère, une vertu comminatoire et permettra d’affirmer la fermeté de l’État contre ces délits odieux qui mettent en danger la vie de nos concitoyens.
Mes chers collègues, vous l’aurez compris, ce texte ne peut que faire l’objet d’un compromis, tant le sujet qu’il traite est grave. Néanmoins, j’attire l’attention du Gouvernement sur l’importance de la sensibilisation et de la formation continue aux gestes de premiers secours. La peur de mal faire et l’incompétence favorisent l’inertie. « De l’audace, toujours de l’audace », disait le révolutionnaire Georges Danton. Il faut espérer que ce texte, qui sera voté par le groupe du RDSE, en donnera un maximum à nos concitoyens ! (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE, Les Indépendants et LaREM.)
Mme Catherine Troendlé, rapporteur. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Noëlle Rauscent.
Mme Noëlle Rauscent. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je veux, dès l’abord, saluer l’initiative de notre collègue député Jean-Charles Colas-Roy ; sa proposition de loi comporte un caractère de nécessité à au moins deux égards.
Déjà, parce qu’elle met en lumière un fait essentiel : l’arrêt cardiaque inopiné n’a rien d’une fatalité et, en aucun cas, il ne doit être perçu comme tel. Loin d’être un facteur de résignation, le taux de survie extrêmement faible aux arrêts cardiaques inopinés en France, de l’ordre de 3 % à 4 %, met au jour les insuffisances de notre droit. Ce taux de survie résiduel doit, me semble-t-il, nous faire l’effet d’une injonction à agir. J’en veux pour preuve qu’un tiers des Français seulement est formé aux comportements qui sauvent. Proportion terriblement insuffisante au regard de l’objectif de 80 % fixé par le Président de la République.
En instituant un régime de responsabilité protecteur pour le citoyen portant assistance à une personne en situation de péril grave et imminent, mais aussi en renforçant les dispositifs de sensibilisation aux gestes qui sauvent, cette proposition de loi présente un double intérêt : elle s’attaque d’abord à un problème majeur de santé publique ; elle organise ensuite, sur un plan secondaire, mais non moins fondamental, un vecteur de solidarité entre les citoyens.
Face au risque d’arrêt cardiaque inopiné, personne n’est épargné. Face au risque d’arrêt cardiaque inopiné, tout le monde peut intervenir. Chaque citoyen constitue un maillon de la chaîne de survie. Et chaque citoyen peut être appelé en toutes circonstances à se draper dans les habits du sauveteur. Et cela, bien avant l’arrivée des secours médicalisés.
Favorisons donc ces démarches, que je ne me refuse pas à caractériser de providentielles, et renforçons le cadre juridique par lequel cette faculté d’assistance réciproque, au fondement de notre pacte social, pourra s’exercer !
Mes chers collègues, la nécessité de ce texte a été admise par un consentement unanime. D’abord, à l’Assemblée nationale ; ensuite, je crois pouvoir le dire, au Sénat. Offrons-lui donc l’assise juridique qui en garantira une bonne application !
Nous avons jugé la rédaction retenue par la commission plutôt satisfaisante. Elle crée notamment un régime protecteur pour les citoyens procédant bénévolement aux premiers secours sur autrui et elle renforce les peines prévues pour vol ou dégradation de défibrillateur.
Il nous apparaît cependant opportun d’aller plus loin. Nous vous proposerons, lors de l’examen des amendements, d’inscrire dans le marbre de la loi la théorie du collaborateur occasionnel du service public de la sécurité civile, applicable à toute personne concourant à la sécurité civile et pas seulement à celle qui porte assistance à une personne en situation apparente de péril grave et imminent. Il nous semble utile de mettre en conformité cette proposition de loi avec l’état actuel de la jurisprudence applicable aux collaborateurs occasionnels du service public.
Outre cette consolidation dont nous aurons l’occasion de débattre dans quelques instants, notre groupe votera naturellement en faveur de ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM.)
M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi.
Mme Éliane Assassi. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des lois, madame la rapporteure, je serai assez brève, parce que plusieurs éléments que je souhaitais évoquer l’ont déjà été par divers collègues.
Je voudrais tout de même saluer le travail de la commission des lois, particulièrement sur la disposition principale de ce texte, à savoir son article 1er. Cet article crée le statut de citoyen sauveteur suivant le modèle de la loi du bon Samaritain… La commission a réécrit et précisé la définition imaginée par l’Assemblée nationale dans les termes que vous avez rappelés, madame la rapporteure, notamment en matière de responsabilité pénale du citoyen sauveteur.
Il s’agit finalement de transposer aux bénévoles une disposition qui est déjà inscrite dans le code de la sécurité intérieure pour les professionnels des secours – sapeurs-pompiers professionnels et volontaires, personnels des services de l’État et militaires investis de missions de sécurité civile.
Apparemment, tous les professionnels de santé semblent s’accorder sur le bien-fondé du statut qui nous est proposé, mais on peut quand même s’interroger sur la notion de collaborateur occasionnel et bénévole du service public – c’est une petite musique que nous allons beaucoup entendre dans les prochains jours…
J’attire l’attention de tous sur la question de la paupérisation grandissante des agents du service public qui, eux, ne sont pas des bénévoles – à cet instant, j’ai une pensée particulière pour les pompiers. La question se pose dans la mesure où le dispositif prévu dans ce texte est presque gratuit, ce qui évite d’augmenter les crédits alloués aux agents de la sécurité civile qui réclament, à juste titre, une revalorisation de leurs conditions de travail depuis plusieurs années maintenant.
L’article 5 qui concerne le milieu sportif et vise à sensibiliser et former les arbitres aux signes d’alerte de la mort subite et aux gestes qui sauvent nous apparaît très positif.
Au contraire – cela n’étonnera personne ! –, l’article 11 qui renforce les peines contre les vols, destructions ou dégradations de défibrillateurs cardiaques pour les porter à cinq ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende s’inscrit, selon nous, dans la surenchère pénale désormais habituelle qui accompagne chaque réforme, aussi minime soit-elle. Il faudrait, à chaque problème, une solution pénale et un durcissement des sanctions, alors qu’il serait véritablement urgent de réfléchir très sérieusement à l’échelle des peines qui subit clairement une perte de valeur.
Un vote en faveur de cette proposition de loi semble de rigueur, s’agissant d’un sujet très consensuel. Néanmoins, pour les raisons que je viens d’avancer, auxquelles j’ajouterai nos craintes sur le fameux statut de collaborateur occasionnel et bénévole du service public, nous adopterons une position d’abstention bienveillante.
Mme Catherine Troendlé, rapporteur. Merci !
M. le président. La parole est à M. Édouard Courtial.
M. Édouard Courtial. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, les héros ordinaires ont le visage de ces femmes et de ces hommes qui ne se définissent jamais comme tels. En revanche, par courage ou par instinct, toujours avec une profonde humanité, ils portent secours et assistance à une personne qu’ils ne connaissent pas et dont ils ignorent souvent tout.
Les histoires de ces citoyens qui refusent de passer leur chemin et qui voient dans les difficultés de l’autre un peu d’eux-mêmes nous touchent et nous bouleversent, car elles révèlent ce que nous avons de meilleur en nous : un refus de l’individualisme pourtant si prégnant de nos jours et une forme d’abnégation qui force le respect.
Or, si chacun d’entre nous, sans considération de sexe ou d’âge, peut être victime d’un arrêt cardiaque inopiné, trop peu de Français, encore, peuvent être de ceux qui sauvent.
Je crois important de réciter les chiffres. Les précédents orateurs en ont cité certains, mais, en tant que dernier orateur, je me dois de rafraîchir les mémoires. (Sourires.)
M. Philippe Bas, président de la commission des lois. On risque de ne pas les retenir ! (Nouveaux sourires.)
M. Édouard Courtial. Chaque année, en France, 40 000 à 50 000 personnes décèdent de mort subite, que l’on appelle aussi arrêt cardiaque inopiné. Le nombre de ces décès est dix fois supérieur à celui des accidents de la route. Cela donne une idée assez précise de l’enjeu. Il nous appartient aujourd’hui de démontrer que ces décès ne sont pas une fatalité, mais que nous pouvons contribuer à mieux les combattre en permettant à chacun d’entre nous d’être des sauveteurs potentiels.
Le citoyen ou le témoin présent au côté de la victime qui s’effondre est le premier maillon indispensable, et souvent vital, de la chaîne de secours, car chaque minute compte. En effet, sur ces 40 000 à 50 000 décès annuels, 70 % se produisent en présence d’un témoin ; un tiers des victimes ont moins de 55 ans ; le taux de survie en France est actuellement de 5 % à 7 %. Certains pays nordiques, mieux formés aux premiers secours, affichent des taux de survie supérieurs à 20 %. En France, si nous parvenions à porter le taux de survie de 7 % à 12 %, voire à 15 %, nous pourrions sauver chaque année 3 000 vies. C’est l’objectif ambitieux fixé par le Président de la République et le Gouvernement d’ici à la fin du quinquennat. Nous ne pouvons qu’y souscrire, monsieur le secrétaire d’État.
À l’heure actuelle, seulement 30 % de la population française est sensibilisée aux gestes qui sauvent, ce qui est bien trop peu, même si l’on note une progression. Chaque année, près d’un million de nos compatriotes s’y initient, principalement par les formations « Prévention et secours civiques de niveau 1 » et « Gestes qui sauvent », mises respectivement en place en 2007 et 2017. Et je ne doute pas, monsieur le secrétaire d’État, que le service national universel prendra toute sa part dans la sensibilisation des jeunes. Des modules y seront en effet proposés, en complément des formations dispensées au collège.
En outre, l’utilisation des défibrillateurs s’est graduellement répandue. Leur utilisation par le public a été autorisée en 2007, et 180 000 appareils sont installés à ce jour sur le territoire. De plus, la loi du 28 juin 2018 a créé une obligation d’installation d’un défibrillateur automatique visible et d’accès aisé dans certains lieux recevant du public.
C’est un sujet qui avait été particulièrement porté par Jean-Pierre Decool, élu à l’Assemblée nationale en 2002, comme moi, et élu sénateur en 2017. Je le salue au passage.
M. Emmanuel Capus. Très bien !
M. Édouard Courtial. Je signale aussi les efforts de nombreuses collectivités pour mettre à disposition des défibrillateurs à proximité des lieux de vie.
En dépit de ces progrès, le cadre normatif de la lutte contre les décès par arrêt cardiaque soudain n’est pas encore abouti. La question du régime de responsabilité applicable aux citoyens intervenant pour réanimer les personnes concernées présente des failles et des incertitudes, qui sont de nature à dissuader la prise d’initiative.
Des innovations sont à signaler dans ce domaine ; elles s’appuient sur les nouvelles technologies et les nouveaux usages numériques. Je pense particulièrement à l’application « SAUV life », créée par le SAMU, qui alerte des volontaires quand une personne fait un malaise près de l’endroit où ils se trouvent.
S’il est donc souhaitable de faire évoluer la loi, il nous faut tout autant transformer notre culture du secourisme, lequel a trop longtemps été considéré comme un domaine d’expertise et un champ d’action complexe réservé aux bénévoles les plus aguerris et aux professionnels des services d’urgence.
La présente proposition de loi a donc pour objectif de porter à l’attention du public la problématique de l’arrêt cardiaque inopiné, et d’encourager les citoyens à se former et à pratiquer les gestes qui sauvent.
Bien sûr, ce texte va évoluer, et il est envisageable de penser qu’à l’occasion de la navette parlementaire nos collègues de l’Assemblée nationale n’entendent pas la rigueur juridique dont a fait preuve la commission des lois, et plus particulièrement notre rapporteur, dont je salue le travail.
Néanmoins, je suis convaincu qu’il y a des textes sur lesquels nous pouvons et nous devons dépasser les clivages partisans. C’est le cas de cette proposition de loi, issue de la majorité En Marche. C’est pourquoi le groupe Les Républicains votera en faveur de ce texte.
En conclusion, permettez-moi d’avoir une pensée pour l’ensemble de nos services de secours, qui, au quotidien, font un travail remarquable, qu’ils engagent sur le terrain des professionnels ou des bénévoles. Cela inclut, bien sûr, les services départementaux d’incendie et de secours, qui sont, dans nos campagnes, les premiers acteurs dispensant les gestes qui sauvent. Comme ancien président de département, j’ai pu mesurer à quel point nous pouvons compter sur leur engagement et leur courage.
À tous nos concitoyens qui sont en première ligne et agissent quotidiennement pour sauver des vies, je dis « merci ! », comme je vous dis « merci de votre attention ! » (Sourires sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
M. Ladislas Poniatowski. Excellent !
M. le président. La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte de la commission.
proposition de loi visant à encourager la participation des citoyens aux premiers secours
TITRE IER
Conditions d’intervention et responsabilité du sauveteur occasionnel et bénévole
M. le président. L’amendement n° 1, présenté par MM. Fichet, Kanner et Jacques Bigot, Mme de la Gontrie, M. Durain, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie, Sueur, Sutour et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après le mot :
du
insérer le mot :
citoyen
La parole est à M. Jean-Luc Fichet.
M. Jean-Luc Fichet. Il s’agit, par cet amendement, de déterminer qui est le sauveteur occasionnel et bénévole. Comme je l’ai dit tout à l’heure, pour nous, c’est un citoyen.
Le terme de citoyen permet de concourir à l’affirmation du sentiment d’appartenance à la communauté nationale. La citoyenneté permet à un individu d’être reconnu comme membre d’une société et de participer à la vie politique. Elle donne accès à l’ensemble des droits politiques, tout en créant des devoirs, leur conjonction permettant de participer à la vie civique d’un pays. Dans une société démocratique, la citoyenneté est également l’une des composantes du lien social.
Aussi, l’ajout du terme « citoyen » dans l’intitulé du titre Ier le mettrait en concordance avec l’intitulé de la proposition de loi. En renvoyant à toutes ces notions fondamentales, l’adoption de cet amendement permettrait au texte d’apporter la force et la valeur nécessaires pour répondre à l’ambition concrète de sensibiliser davantage la population aux gestes qui sauvent.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Troendlé, rapporteur. Comme vous l’aviez annoncé en discussion générale, votre amendement vise à réintroduire le terme « citoyen » dans l’intitulé du titre Ier.
Je comprends votre intention de faire référence à l’action civique d’un citoyen. Je partage pleinement cet objectif. Le titre de la proposition de loi choisi par la commission intègre d’ailleurs cette dimension symbolique de l’engagement citoyen.
S’agissant du fond, il me semble plus pertinent de faire référence à l’expression « sauveteur occasionnel et bénévole », qui se rapproche davantage des termes utilisés aujourd’hui par les juges, et qui m’apparaissent plus appropriés pour désigner le concours apporté à l’exercice d’un service public.
À ce sujet, j’ai beaucoup apprécié l’intervention de M. Alain Richard en commission. Il a expliqué que la notion de citoyen renvoyait à la cité, et, partant, à un principe de nationalité. Si nous nous en tenons à ce terme, le dispositif de la proposition de loi ne pourra pas s’appliquer à l’ensemble des personnes susceptibles de porter secours en France.
Je demande le retrait de cet amendement.
M. le président. Monsieur Fichet, l’amendement n° 1 est-il maintenu ?
M. Jean-Luc Fichet. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 1 est retiré.
Article 1er
I. – L’article L.721-1 du code de la sécurité intérieure est ainsi modifié :
1° Au début, est ajoutée la mention : « I. – » ;
2° La seconde phrase est supprimée ;
3° Il est ajouté un II ainsi rédigé :
« II. – Quiconque porte assistance de manière spontanée et volontaire à une personne en situation de péril grave et imminent est un sauveteur occasionnel et bénévole qui a la qualité de collaborateur occasionnel et bénévole du service public.
« En fonction de la situation à laquelle il est confronté et dans la mesure de ses possibilités, le sauveteur occasionnel et bénévole veille à prévenir les services de secours et à prendre les premières dispositions nécessaires.
« Les diligences normales mentionnées au troisième alinéa de l’article 121-3 du code pénal s’apprécient, pour le sauveteur occasionnel et bénévole, au regard notamment de l’urgence dans laquelle il intervient ainsi que des informations dont il dispose au moment de son intervention.
« Lorsqu’il résulte un préjudice du fait de son intervention, le sauveteur occasionnel et bénévole est exonéré de toute responsabilité civile, sauf faute lourde ou intentionnelle de sa part. »
II. – Le troisième alinéa de l’article L. 721-2 du code de la sécurité intérieure est ainsi modifié :
1° Les mots : « mentionnées à » sont remplacés par les mots : « mentionnées au troisième alinéa de » ;
2° Les mots : « sont appréciées » sont remplacés par les mots : « s’apprécient ».
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 2, présenté par Mme Rauscent, M. Patriat et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :
Alinéas 1 à 8
Remplacer ces alinéas par quatre alinéas ainsi rédigés :
I. - L’article L. 721-1 du code de la sécurité intérieure est complété par trois alinéas ainsi rédigés :
« Elle bénéficie, le cas échéant, de la qualité de collaborateur occasionnel du service public et des protections qui en découlent. Lorsqu’un dommage résulte de son intervention, sa responsabilité civile n’est engagée qu’en cas de faute personnelle.
« Les diligences normales mentionnées au troisième alinéa de l’article 121-3 du code pénal s’apprécient, pour elle, au regard notamment de l’urgence dans laquelle elle intervient ainsi que des informations dont elle dispose au moment de son intervention.
« La personne mentionnée au premier alinéa, qui porte assistance de manière bénévole, spontanée ou à la demande de l’autorité compétente, à une personne en situation apparente de péril grave et imminent est un sauveteur occasionnel auquel s’appliquent les dispositions du présent article. »
La parole est à Mme Noëlle Rauscent.
Mme Noëlle Rauscent. Nous proposons, par cet amendement, d’inscrire le dispositif que tend à créer cette proposition de loi dans un cadre d’application plus général, qui serait relatif à l’ensemble des personnes concourant, par leur comportement, à la sécurité civile, et non plus seulement à celles qui portent assistance à une personne en situation apparente de péril grave et imminent.
Au sein de l’armature de ce cadre général, le sauveteur occasionnel et bénévole pourra, en l’espèce, bénéficier du statut de collaborateur occasionnel du service public, et ce afin de ne pas créer d’effet contraire néfaste. En conséquence, toutes les personnes prétendant à ce statut seront traitées sur la base d’un dénominateur commun, en ce qui concerne aussi bien les éléments relatifs à la responsabilité civile et pénale que l’obligation de prévenir les services de secours et de prendre les premières dispositions.
Ainsi, la qualité de collaborateur occasionnel ouvrira indistinctement à ses bénéficiaires, quelles que soient les situations auxquelles ils sont confrontés, un certain nombre de protections. Lorsqu’un dommage résultera de leur intervention, leur responsabilité civile ne sera engagée qu’en cas de faute personnelle.
Ensuite, nous avons pris le soin d’isoler, dans l’article du code de la sécurité intérieure ainsi amendé, le statut de sauveteur occasionnel, sans lui octroyer pour autant de garanties sectorielles.
Enfin, nous avons souhaité préciser que le péril grave et imminent doit être apparent, et non pas forcément établi, afin de ne pas décourager les volontés et de s’aligner, en toute logique, sur l’état actuel de la jurisprudence.
M. le président. L’amendement n° 4, présenté par Mme Troendlé, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéas 3 et 6
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Catherine Troendlé, rapporteur. Cet amendement est en corrélation avec l’amendement n° 2. Il a pour objet d’assigner les obligations de prévenir les secours et de prendre les premières dispositions nécessaires à toute personne, et non pas seulement au sauveteur occasionnel.
M. le président. L’amendement n° 3, présenté par MM. Fichet, Kanner et Jacques Bigot, Mme de la Gontrie, M. Durain, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie, Sueur, Sutour et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéas 5, 6, 7 et 8
Remplacer le mot :
sauveteur
par les mots :
citoyen sauveteur
La parole est à M. Jean-Luc Fichet.
M. Jean-Luc Fichet. Par cohérence avec le retrait de l’amendement n° 1, je retire également cet amendement.
M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Monsieur le président, je demande la priorité de vote sur l’amendement n° 4 de la commission.
M. le président. Je suis donc saisi d’une demande de priorité de la commission sur l’amendement n° 4 afin qu’il soit mis aux voix en premier.
Selon l’article 44, alinéa 6, de notre règlement, la priorité est de droit quand elle est demandée par la commission saisie au fond, sauf opposition du Gouvernement.
Quel est l’avis du Gouvernement sur cette demande de priorité ?
M. le président. La priorité est donc ordonnée.
Quel est l’avis du Gouvernement sur les amendements nos 2 et 4 ?
M. Laurent Nunez, secrétaire d’État. Je note que l’amendement n° 4 vient en concurrence avec l’amendement n° 2, qui est important à nos yeux, en ce sens qu’il n’a pas pour objet de limiter au seul champ des sauveteurs occasionnels l’ensemble du dispositif prévu pour les collaborateurs occasionnels du service public. Il s’agit donc d’un élargissement, ce qui convient également au Gouvernement. Madame le rapporteur s’appuie sur ce texte pour permettre l’application d’un certain nombre de dispositifs. Il y a toujours un ciblage, avec le statut de sauveteur occasionnel, mais on retrouve bien le bénéfice de l’ensemble des protections applicables au collaborateur occasionnel pour tout type d’intervention lié à la protection civile. J’émets un avis de sagesse sur l’amendement n° 4, car je suis plus favorable à l’amendement n° 2.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 2 ?
Mme Catherine Troendlé, rapporteur. Pour toutes les raisons que j’ai évoquées précédemment, j’émets un avis défavorable.
M. le président. La parole est à Mme Françoise Laborde, pour explication de vote.
Mme Françoise Laborde. Il ne s’agit pas vraiment d’une explication de vote, mais plutôt d’un questionnement à haute voix. (Sourires.)
Je compte sur Mme la rapporteure pour m’éclairer.
J’ai toujours des difficultés avec la qualité de collaborateur occasionnel du service public, surtout par les temps qui courent. Nathalie Goulet a fait un trait d’humour que je n’aurais pas osé faire sur ce sujet – d’ailleurs, en était-ce un ?
Est-ce que cette notion a vraiment une incidence forte sur les règles en général ? Franchement, madame la rapporteure, vu les circonstances actuelles, je ne peux pas voter cet amendement, sauf si on me l’explique de façon plus claire.
M. le président. La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Catherine Troendlé, rapporteur. Je voudrais apporter quelques précisions concernant mon avis défavorable sur l’amendement n° 2, qui tend à rétablir le droit en vigueur, selon lequel les obligations d’appeler les secours et de prendre les premières dispositions sont applicables à toute personne, et non pas seulement au sauveteur occasionnel.
Madame la sénatrice, dans notre travail, nous avons tenu à respecter l’esprit qui a animé l’auteur de la proposition de loi à l’Assemblée nationale. L’objectif du député est d’adresser un message clair et fort à toute personne susceptible de porter secours à quelqu’un. Le périmètre est restreint : c’est le secours porté à une personne en difficulté.
Vous souhaitez élargir ce périmètre, ce que je peux comprendre, à toutes les actions de la sécurité civile, c’est-à-dire aux inondations, aux feux de forêt ou de poubelle, etc. Je le répète, j’ai envie de conserver le message hautement symbolique adressé à nos concitoyens : vous disposez d’un cadre juridique qui vous protège lorsque vous portez secours à un concitoyen en difficulté. Pardonnez-moi, l’expression, mais je n’ai pas envie de « polluer » ce texte avec un élargissement qui n’a rien à y faire. C’est la seule raison pour laquelle j’ai émis un avis défavorable sur votre amendement.
M. le président. La parole est à Mme Noëlle Rauscent, pour explication de vote.
Mme Noëlle Rauscent. Je suis un peu surprise d’entendre parler de « pollution » s’agissant d’un tel sujet. Je trouve que mon amendement est complémentaire et qu’il ne pollue pas.
Mme Catherine Troendlé, rapporteur. Je parlais d’une « pollution » juridique.
M. le président. Considérons qu’il y avait des guillemets !
Je mets aux voix l’amendement n° 4.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant de la commission des lois.
Je vous rappelle que le Gouvernement a émis un avis de sagesse.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Je vous invite, mes chers collègues, à vérifier que votre carte de vote est bien insérée dans votre terminal.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater les résultats de ce scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent les résultats du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 16 :
Nombre de votants | 340 |
Nombre de suffrages exprimés | 229 |
Pour l’adoption | 229 |
Le Sénat a adopté.
En conséquence, l’amendement n° 2 n’a plus d’objet.
Je mets aux voix l’article 1er, modifié.
(L’article 1er est adopté.)
TITRE II
MIEUX SENSIBILISER LES CITOYENS AUX GESTES QUI SAUVENT
Chapitre IER
MIEUX SENSIBILISER LES CITOYENS
(Division et intitulé supprimés)
Articles 2, 2 bis, 3 et 4
(Supprimés)
Article 5
L’article L. 211-3 du code du sport est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« La formation des arbitres et juges intègre une sensibilisation à la lutte contre l’arrêt cardiaque et aux gestes qui sauvent.
« Le contenu, le champ d’application et les modalités de mise en œuvre du présent article sont définis par décret. » – (Adopté.)
Article 5 bis
(Supprimé)
Chapitre II
CRÉATION D’UNE JOURNÉE NATIONALE DE LA LUTTE CONTRE L’ARRÊT CARDIAQUE
(Division et intitulé supprimés)
Article 6
(Supprimé)
TITRE III
CLARIFIER L’ORGANISATION DES SENSIBILISATIONS ET FORMATIONS AUX GESTES DE PREMIERS SECOURS
Article 7
I. – Le livre VII du code de la sécurité intérieure est ainsi modifié :
1° Le dernier alinéa de l’article L. 725-3 est supprimé ;
2° Après le titre II, il est inséré un titre II bis ainsi rédigé :
« TITRE II bis
« FORMATIONS AUX PREMIERS SECOURS
« CHAPITRE IER
« Autorisations de prestation de formation aux premiers secours
« Art. L. 726-1. – Les actions d’enseignement et de formation en matière de secourisme sont assurées par des organismes habilités parmi les services des établissements de santé dont la liste est fixée par décret et les services publics auxquels appartiennent les acteurs de la sécurité civile mentionnés aux premier et deuxième alinéas de l’article L. 721-2 ou par des associations de sécurité civile agréées au titre de l’article L. 725-1.
« CHAPITRE II
« Enseignement à la pratique des premiers secours
« Art. L. 726-2. – Les titulaires d’une formation initiale aux premiers secours qui participent aux opérations de secours organisées sous le contrôle des autorités publiques ou aux dispositifs prévisionnels de secours ou qui assurent une mission d’enseignement aux premiers secours bénéficient d’une formation continue en vue de maintenir ou parfaire leurs qualifications et leurs compétences. »
II. – Un décret en Conseil d’État précise les conditions d’application du I du présent article. – (Adopté.)
Article 8
(Suppression maintenue)
Article 9
Le titre VI du livre VII du code de la sécurité intérieure est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa des articles L. 765-1, L. 766-1 et L. 767-1, les mots : « dans leur rédaction résultant de la loi n° 2016-731 du 3 juin 2016 renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, et améliorant l’efficacité et les garanties de la procédure pénale » sont remplacés par les mots : « dans leur version en vigueur à la date de publication de la loi n° … du … visant à encourager la participation des citoyens aux premiers secours » ;
2° Après le 2° des articles L. 765-1 et L. 766-1, il est inséré un 2° bis ainsi rédigé :
« 2° bis Au titre II bis : les articles L. 726-1 et L. 726-2 ; »
3° Après le 1° de l’article L. 767-1, il est inséré un 1° bis ainsi rédigé :
« 1° bis Au titre II bis : les articles L. 726-1 et L. 726-2 ; ». – (Adopté.)
Article 10
(Suppression maintenue)
TITRE IV
RENFORCER LES PEINES EN CAS DE VOL OU DE DÉGRADATION D’UN DÉFIBRILLATEUR
Article 11
I. – Après le 11° de l’article 311-4 du code pénal, il est inséré un 12° ainsi rédigé :
« 12° Lorsqu’il porte sur du matériel destiné à prodiguer des soins de premiers secours. »
II. – Après le 8° de l’article 322-3 du code pénal, il est inséré un 9° ainsi rédigé :
« 9° Lorsqu’elle porte sur du matériel destiné à prodiguer des soins de premiers secours. » – (Adopté.)
Article 12
(Suppression maintenue)
TITRE V
ÉVALUER LA MISE EN ŒUVRE
(Division et intitulé supprimés)
Article 12 bis
(Supprimé)
Article 13
(Suppression maintenue)
Vote sur l’ensemble
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?…
Je mets aux voix, dans le texte de la commission, modifié, l’ensemble de la proposition de loi dont la commission a ainsi rédigé l’intitulé : « Proposition de loi visant à encourager la participation des citoyens aux premiers secours ».
(La proposition de loi est adoptée.)
7
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mardi 29 octobre 2019 :
À quatorze heures trente :
Proposition de loi tendant à assurer la neutralité religieuse des personnes concourant au service public de l’éducation, présentée par Mme Jacqueline Eustache-Brinio et plusieurs de ses collègues (texte de la commission n° 84, 2019-2020) ;
Débat sur le thème : « Assistons-nous au recul de l’État de droit en France ? » ;
Débat sur la politique sportive.
Le soir :
Débat sur les conclusions du rapport : « Catastrophes climatiques. Mieux prévenir, mieux reconstruire ».
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée à seize heures trente-cinq.)
nomination d’un membre d’une délégation sénatoriale
Le groupe Les Républicains a présenté une candidature pour la délégation sénatoriale aux outre-mer.
Aucune opposition ne s’étant manifestée dans le délai d’une heure prévu par l’article 8 du règlement, cette candidature est ratifiée : Mme Catherine Dumas est membre de la délégation sénatoriale aux outre-mer, en remplacement de M. Charles Revet.
Pour la Directrice des comptes rendus du Sénat,
ÉTIENNE BOULENGER
Chef de publication