M. le président. L’amendement n° 717 n’est pas soutenu.
La parole est à M. Claude Kern, pour présenter l’amendement n° 761 rectifié bis.
M. Claude Kern. Cet amendement a pour objet d’aligner la terminologie des dispositions de l’article 40 relatives au délit d’habitude avec celle de l’article L. 121-2 du code de la route, qui fixe les principes de la responsabilité pénale en cas d’infraction à la réglementation sur l’acquittement des péages.
La responsabilité pécuniaire de l’infraction incombe au titulaire du certificat d’immatriculation du véhicule, qui n’est pas nécessairement le conducteur. La clarification proposée est indispensable pour que le délit d’habitude s’applique à tous les cas de figure.
M. le président. Les deux amendements suivants sont également identiques.
L’amendement n° 723 rectifié est présenté par MM. Chaize, Savary, Magras et Daubresse, Mme Duranton, MM. Bizet, Paccaud et Le Gleut, Mmes Bruguière et Lassarade, M. Priou, Mmes de Cidrac et Deromedi, MM. Bonhomme, Milon, Vogel et Laménie, Mme Lanfranchi Dorgal et MM. Revet et Poniatowski.
L’amendement n° 856 rectifié quinquies est présenté par MM. de Nicolaÿ et de Legge, Mme Morhet-Richaud, MM. Charon, Lefèvre et Sido, Mme Lamure, MM. Duplomb et Husson et Mme Garriaud-Maylam.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 15
Rétablir le 3° dans la rédaction suivante :
3° Le dernier alinéa du III est complété par une phrase ainsi rédigée : « Si le contrevenant n’a pas payé le montant de cette amende dans un délai de quatre mois à compter de l’envoi à son domicile du titre exécutoire, le Trésor public fait opposition auprès de l’autorité administrative compétente au transfert du certificat d’immatriculation du véhicule utilisé pour franchir le péage en cas de cession à titre gratuit ou à titre onéreux. »
La parole est à M. Patrick Chaize, pour présenter l’amendement n° 723 rectifié.
M. Patrick Chaize. Dans le prolongement de l’amendement n° 721 rectifié, celui-ci a pour objet d’empêcher la cession du véhicule en cas de non-paiement de péages par son propriétaire.
M. le président. L’amendement n° 856 rectifié quinquies n’est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Didier Mandelli, rapporteur. Ces questions ont déjà été largement débattues en commission.
Mme le rapporteur pour avis, Françoise Gatel, et moi-même avons considéré que le dispositif répressif initialement envisagé n’était pas proportionné à la gravité de l’infraction. L’alignement sur le régime de la fraude habituelle dans les transports en commun ne nous a pas semblé pertinent.
L’esprit général du texte est toutefois préservé : il y a toujours une incitation à éteindre rapidement la procédure par la minoration de l’indemnité forfaitaire, et l’échelle des sanctions est durcie, avec la création d’une amende de 7 500 euros, la peine de prison ayant été écartée.
Dans la mesure où l’amendement n° 942 du Gouvernement tend à revenir sur la position de la commission, l’avis est défavorable.
En ce qui concerne les amendements identiques nos 541 rectifié quater et 763 rectifié quater, la mesure proposée s’appliquerait à toutes les amendes forfaitaires majorées, ce qui nous paraît excessif. Cela enlèverait toute marge de manœuvre au comptable public, alors que le dispositif actuel constitue une incitation pour les conducteurs non vertueux. Par ailleurs, le caractère systématique de la mesure rendrait celle-ci difficile à appliquer pour les agents, en l’absence de système automatisé de traitement. L’avis est donc défavorable.
L’amendement n° 721 rectifié vise à revenir sur des dispositions adoptées en commission. Si nos collègues estiment que l’opposition obligatoire au transfert du certificat d’immatriculation pour les seules infractions liées au passage en flux libre est nécessaire pour accompagner indirectement la lutte contre la fraude, j’émettrai un avis de sagesse, mais je suis plutôt tenté de leur demander le retrait de l’amendement. J’ai la même position, par cohérence, sur l’amendement n° 723 rectifié.
La commission a souhaité maintenir la création d’un délit de fraude habituelle au péage, mais en le redimensionnant. Elle est donc défavorable à l’amendement n° 864 rectifié, qui vise une suppression totale.
Enfin, la rédaction retenue vise à ne pas introduire de différence avec les autres articles du code de la route inclus dans la section modifiée par l’article 40 du projet de loi. Les amendements identiques nos 539 rectifié ter et 761 rectifié bis sont donc pleinement satisfaits. La rédaction proposée pour les articles L. 121-1 et L. 121-2 du code de la route est parfaitement claire et adaptée à la mise en œuvre du péage en flux libre. Je demande donc le retrait des amendements ; s’ils sont maintenus, j’y serai défavorable.
M. le président. Monsieur le rapporteur, pouvez-vous confirmer votre avis sur l’amendement n° 723 rectifié ?
M. Didier Mandelli, rapporteur. C’est le même que sur l’amendement n° 721 rectifié : retrait, sinon sagesse.
Mme Élisabeth Borne, ministre. Les amendements identiques nos 541 rectifié quater et 763 rectifié quater visent à rendre systématique l’opposition du Trésor public au transfert du certificat d’immatriculation en cas de non-règlement d’une amende forfaitaire majorée. Ce dispositif reprend les dispositions insérées par le Gouvernement dans le texte initial, mais il va peut-être un peu loin. Je demande le retrait de ces amendements.
L’amendement n° 721 rectifié tend à rétablir ce que proposait le Gouvernement en cas de non-paiement des péages. Avis favorable.
S’agissant de l’amendement n° 864 rectifié, je suis un peu surprise, madame Préville, de la façon dont vous avez présenté les choses. Il s’agit de sanctionner un automobiliste qui, à plus de cinq reprises, décide de ne pas payer et qui ne profite pas des deux mois dont il dispose pour régulariser sa situation. Peut-être estimez-vous qu’il est normal de systématiquement ne pas payer son péage, mais vous comprendrez que ce ne soit pas mon point de vue.
M. Laurent Lafon. Très bien !
Mme Élisabeth Borne, ministre. L’avis est donc défavorable.
Les dispositions des amendements nos 539 rectifié ter et 761 rectifié bis seraient impossibles à appliquer : on ne peut pas faire porter la responsabilité pénale sur quelqu’un d’autre que le conducteur. Avis défavorable.
Quant à l’amendement n° 723 rectifié, il reprend une disposition initialement proposée par le Gouvernement : avis favorable.
M. le président. La parole est à Mme le rapporteur pour avis.
Mme Françoise Gatel, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale. Madame la ministre, vous êtes une femme de raison, mais, en l’occurrence, vous péchez franchement par excès…
Sur cette série d’amendements, je voudrais apporter quelques précisions au nom de la commission des lois.
Nous ne sommes naturellement pas opposés à la création d’un délit de fraude habituelle au péage. Le principe en a été approuvé en commission, mais, comme l’a expliqué le rapporteur, on ne peut pas approuver la peine d’emprisonnement de six mois proposée par le Gouvernement.
Par comparaison, on a récemment décidé d’instaurer une peine de six mois d’emprisonnement pour sanctionner la participation à des rodéos motorisés, qui mettent en danger les usagers de la route. Je ne pense pas que les deux infractions présentent le même caractère de gravité. En outre, nous manquons de places dans nos prisons…
On ne peut pas non plus comparer le délit de fraude habituelle au péage, même s’il est grave, avec celui de fraude dans les transports publics : dans ceux-ci, le contrôle est aléatoire ; au péage, il sera automatique, donc systématique.
S’agissant de l’opposition obligatoire à la cession du véhicule en cas de non-paiement de péages, il faut être attentif au fait que pour d’autres infractions, extrêmement graves, comme la conduite sans assurance, cette opposition n’est que facultative. En termes de cohérence et de proportionnalité, je souhaiterais qu’on en reste là.
Madame la ministre – je le dis sans faire allusion à des dispositions dont nous avons débattu hier –, il faut que nous soyons pragmatiques. L’introduction du péage à flux libre est une bonne chose, mais elle sera sans doute contraignante. Veillons à ne pas introduire la menace de sanctions excessives, qui ne faciliterait pas l’acceptation du dispositif.
En définitive, je voterai contre l’ensemble des amendements faisant l’objet de la discussion commune, en raison de leur caractère excessif.
M. le président. Monsieur Bascher, l’amendement n° 541 rectifié quater est-il maintenu ?
M. Jérôme Bascher. Il est retiré, monsieur le président.
M. Claude Kern. L’amendement n° 763 rectifié quater aussi !
M. le président. Les amendements nos 541 rectifié quater et 763 rectifié quater sont retirés.
Monsieur Chaize, l’amendement n° 721 rectifié est-il maintenu ?
M. Patrick Chaize. Compte tenu de l’avis favorable du Gouvernement, je n’aurai pas la sagesse de le retirer…
M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote sur l’amendement n° 864 rectifié.
M. Olivier Jacquin. Je suis tout à fait d’accord avec le plaidoyer de Mme la rapporteure pour avis de la commission des lois : les sanctions proposées sont excessives. Les positions de la commission sont nettement plus raisonnables, comme celle de Mme Préville visant à réduire le montant de l’amende.
L’instauration du péage en flux libre est une bonne chose. À la page 397 de l’excellent rapport de la commission, on lit que « les sociétés concessionnaires d’autoroutes évaluent la perte potentielle liée à la mise en place du flux libre à environ 5 % du montant total des recettes actuelles. […] Elles estiment ainsi que le déploiement de ce système pourrait représenter un manque à gagner de l’ordre de 500 millions d’euros par an à l’échelle nationale sur les 10 milliards de revenus des péages autoroutiers. » Il est ajouté que l’État devrait compenser ce manque à gagner aux sociétés concessionnaires d’autoroutes. Madame la ministre, pourriez-vous nous éclairer sur ce point ?
M. le président. La parole est à Mme Angèle Préville, pour explication de vote.
Mme Angèle Préville. Le montant de l’amende, 7 500 euros, a pour moi un caractère d’injustice terrible. Être si répressif, par les temps qui courent, est propre à attiser une colère qui n’est pas encore retombée. Où sont nos valeurs ? L’autoritarisme est contre-productif : les punitions trop sévères, infondées surtout, sont génératrices de phénomènes de fond extrêmement graves, notamment le non-consentement aux redevances et aux taxes. Ce qui est accepté, c’est ce qui est juste !
Monsieur le président, j’ignore si c’est encore possible, mais je voudrais rectifier mon amendement afin de proposer, au lieu de la suppression des alinéas 6 à 11, la réduction du montant de l’amende à 1 000 euros.
M. le président. Ma chère collègue, il est malheureusement trop tard pour rectifier votre amendement.
Je mets aux voix l’amendement n° 864 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Monsieur Bascher, l’amendement n° 539 rectifié ter est-il maintenu ?
M. Jérôme Bascher. Non, il est retiré, monsieur le président.
M. Claude Kern. Je retire aussi l’amendement n° 761 rectifié bis !
M. le président. Les amendements nos 539 rectifié ter et 761 rectifié bis sont retirés.
Monsieur Chaize, l’amendement n° 723 rectifié est-il maintenu ?
M. Patrick Chaize. Par cohérence, je le retire.
M. le président. L’amendement n° 723 rectifié est retiré.
L’amendement n° 333 rectifié, présenté par MM. Pellevat et Gremillet, n’est pas soutenu.
Je suis saisi de cinq amendements identiques.
L’amendement n° 540 rectifié quater est présenté par MM. Bazin et Husson, Mme Lamure, MM. Bascher, Mouiller, Longuet, Daubresse et Segouin et Mmes de Cidrac, Deromedi, Garriaud-Maylam, Lavarde et Eustache-Brinio.
L’amendement n° 708 rectifié bis est présenté par MM. Chaize, Savary et Magras, Mme Duranton, MM. Bizet, Paccaud et Le Gleut, Mme Bruguière, M. de Nicolaÿ, Mme Lassarade, MM. Priou, Bonhomme, Milon, Vogel et Laménie, Mme Lanfranchi Dorgal et M. Revet.
L’amendement n° 718 rectifié est présenté par M. Pellevat.
L’amendement n° 762 rectifié ter est présenté par M. Kern, Mmes Goy-Chavent et Vullien, MM. Bonnecarrère, Laugier, Henno, Bockel, Laurey et Détraigne et Mmes Billon, Sollogoub et C. Fournier.
L’amendement n° 852 rectifié sexies est présenté par MM. de Legge, Charon, Lefèvre, Poniatowski, Sido, Duplomb et B. Fournier.
Ces cinq amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 13
1° Remplacer le mot :
facturation
par les mots :
perception du montant du péage
2° Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Le versement à l’exploitant de la somme due au titre du péage avant l’envoi de l’avis de paiement au domicile de l’intéressé a les mêmes effets que la transaction.
La parole est à M. Jérôme Bascher, pour présenter l’amendement n° 540 rectifié quater.
M. Jérôme Bascher. L’article 40 du projet de loi prévoit la possibilité, pour les usagers, de s’acquitter du péage après leur passage : c’est le post-paiement. Or, en l’état actuel des choses, cette pratique constituerait une infraction pénale. Nos tribunaux étant déjà très engorgés, cet amendement vise à éviter une telle pénalisation.
M. le président. La parole est à M. Patrick Chaize, pour présenter l’amendement n° 708 rectifié bis.
M. Patrick Chaize. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 718 rectifié n’est pas soutenu.
La parole est à M. Claude Kern, pour présenter l’amendement n° 762 rectifié ter.
M. Claude Kern. Cet amendement a été très bien défendu.
M. le président. La parole est à M. Dominique de Legge, pour présenter l’amendement n° 852 rectifié sexies.
M. Dominique de Legge. Il est défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Didier Mandelli, rapporteur. Ces amendements identiques visent à opérer des clarifications rédactionnelles pour une meilleure sécurité juridique. Ils ont été rectifiés à la demande de la commission pour en retirer les éléments sur lesquels j’avais émis un avis défavorable. Dans ces conditions, la commission est favorable à ces amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Élisabeth Borne, ministre. Sous réserve que j’aie sous les yeux la dernière version rectifiée des amendements, il me semble que la première partie du dispositif est erronée, car le dispositif de péage en free flow permet avant tout la facturation, et non la perception du péage. Pour la seconde partie, dans la mesure où l’usager ne respecte pas le délai de post-paiement, il sera formellement considéré comme ayant commis une infraction au regard de l’article R. 421-9 du code de la route, et une contravention sera dressée. Il ne paraît pas possible de superposer cette procédure à la transaction du concessionnaire. Je demande donc le retrait des amendements ; à défaut, l’avis sera défavorable.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 540 rectifié quater, 708 rectifié bis, 762 rectifié ter et 852 rectifié sexies.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l’article 40, modifié.
(L’article 40 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 40
M. le président. L’amendement n° 124 rectifié, présenté par Mme Assassi, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 40
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 122-4-1 du code de la voirie routière, il est inséré un article L. 122-4-1-…. ainsi rédigé :
« Art. L. 122-4-1-…. - Après la promulgation de la loi n° … du … d’orientation des mobilités, le recours aux concessions pour les nouvelles infrastructures autoroutières est interdit. »
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Mme Éliane Assassi. Voilà quelques jours, nous avons débattu de notre proposition de loi visant à la renationalisation des autoroutes. Malgré le constat largement partagé de l’erreur que fut leur privatisation, la majorité du Sénat a voté l’amendement de suppression déposé par M. Grand. Nous déplorons l’absence de volonté politique que masque l’argument récurrent selon lequel cela coûterait trop cher. Comme si la puissance publique ne pouvait faire le choix de défendre ses intérêts stratégiques…
Bref, un consensus s’est dégagé pour attendre la fin des concessions ; peut-être, à ce moment-là, pourrons-nous examiner la possibilité d’une reprise. Nous déplorons bien évidemment cette position, conforme à la manie des pouvoirs publics de reporter encore et toujours la fin de ces concessions, en sorte que, aujourd’hui, il nous faut attendre jusqu’à 2030 au minimum pour, éventuellement, reprendre la main.
Mes chers collègues, je vous propose de sécuriser l’avenir en inscrivant dans la loi que, dorénavant, aucune concession ne pourra être consentie pour l’exploitation d’une autoroute. Il serait cohérent de refuser de replonger dans les imbroglios administratifs liés à des contrats figés dans le temps, qui ne souffrent aucune évolution. S’il y a évolution ou renégociation, ce sera pour un motif d’intérêt général. Ainsi, mes chers collègues, nous assurerons, pour l’avenir, une pleine et entière maîtrise publique.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Didier Mandelli, rapporteur. Ma chère collègue, nous pouvons partager votre préoccupation quant aux modalités de contractualisation. Toutefois, interdire globalement le recours à la concession n’est pas souhaitable : c’est un mode de réalisation de travaux d’exploitation qui permet à la personne publique de ne pas supporter des risques économiques et financiers, tout en s’appuyant sur l’expérience d’entreprises solidement établies. Avec une bonne négociation, la concession peut être un choix rationnel et adapté à tout type de projets. L’avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Élisabeth Borne, ministre. Le débat que nous avons eu au sujet de votre proposition de loi, madame la sénatrice, consistait plutôt à savoir si la privatisation s’était faite, à l’époque, dans de bonnes conditions, et s’il n’aurait pas été préférable d’ajuster les contrats avant cette privatisation, ce que je pense à titre personnel.
Pour autant, il ne faut pas condamner les montages concessifs, qui ont permis de développer un réseau de près de 10 000 kilomètres, très utile y compris en termes d’aménagement et de développement de notre territoire. Ces procédures nécessitent une concertation et une enquête publique préalables, qui garantissent l’information du public et des usagers pour une prise de décision en toute connaissance de cause.
L’avis est donc défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote.
M. Olivier Jacquin. Nous avions fait une proposition qui nous semblait intéressante, mais notre amendement a été déclaré irrecevable, parce que l’on ne donne pas d’injonction au Gouvernement. J’aurais pu le reformuler, mais on m’a opposé que, de toute manière, s’agissant d’un contrat entre l’État et un concessionnaire, je n’avais rien à dire… Eh bien, je vais tout de même dire quelque chose !
Nous proposions que l’on reprenne la main en 2032 et que si, d’ici là, il devait y avoir de nouveaux contrats ou de nouveaux adossements, on y intègre un certain nombre de clauses rendant les concessions plus vertueuses : ces clauses auraient pu prévoir, par exemple, une tarification différenciée selon le niveau d’émission de polluants atmosphériques des véhicules et selon les horaires de circulation, l’installation de bornes de recharge électrique, la création de voies dédiées aux transports en commun et au covoiturage. Sur ce point, je relève qu’un concessionnaire autoroutier ayant financièrement intérêt à ce que le flux de véhicules soit maximal, la création de voies réservées ne l’intéresse guère. Ne nous étonnons donc pas si, en France, nous avons si peu de voies réservées !
Madame la ministre, j’aimerais connaître votre opinion sur cette idée d’envoyer tout de suite un signal aux futurs concessionnaires, leur signifiant que le Parlement leur demandera de respecter des modes d’exploitation nettement plus conformes à l’esprit de ce projet de loi.
Par ailleurs, je serais intéressé d’entendre votre réponse à la question que je vous ai posée il y a quelques instants.
M. le président. La parole est à Mme Laure Darcos, pour explication de vote.
Mme Laure Darcos. Cela paraîtra peut-être incongru au regard de ma position dans l’hémicycle, mais je voterai symboliquement cet amendement, quoique j’aie voté contre la renationalisation des autoroutes.
Au nom de mes quatre collègues sénateurs de l’Essonne, madame la ministre, je veux de nouveau attirer votre attention sur une situation que vous connaissez très bien : il n’est pas normal que l’A 10 et l’A 11 soient encore payantes à vingt-trois kilomètres de Paris, du côté de Dourdan, alors que la plupart des autres tronçons à péage se trouvent à une cinquantaine de kilomètres au moins de la capitale. Tous les jours, des milliers de personnes empruntent cette autoroute, parce qu’elles n’ont pas d’autre possibilité.
Nous avions déposé des amendements pour remédier à cette situation, qui ont été déclarés irrecevables. Je sais que l’on ne peut pas obliger des concessionnaires d’autoroutes à faire autre chose que ce qu’ils veulent, mais, pour les usagers, la situation actuelle est inadmissible !
M. le président. L’amendement n° 316 rectifié, présenté par MM. Chaize, Savary, Magras et Daubresse, Mme Duranton, MM. Bizet, Paccaud et Le Gleut, Mme Bruguière, M. de Nicolaÿ, Mme Lassarade, M. Priou, Mmes de Cidrac et Deromedi, MM. Bonhomme, Milon, Vogel et Laménie, Mme Lanfranchi Dorgal et M. Revet, est ainsi libellé :
Après l’article 40
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le code de la voirie routière est ainsi modifié :
1° Dans l’intitulé de la section 4 du chapitre II du titre II, les mots : « , fournitures et services » sont supprimés ;
2° Au premier alinéa des articles L. 122-12, L. 122-13 et L. 122-20, à la première phrase de l’article L. 122-16 et à la deuxième phrase du dernier alinéa de l’article L. 122-17, les mots : « , fournitures ou services » sont supprimés ;
3° À la première phrase du deuxième alinéa de l’article L. 122-17 et au second alinéa de l’article L. 122-31, les mots : « , fournitures et services » sont supprimés.
II. – Le I du présent article s’applique aux marchés conclus après la promulgation de la présente loi.
La parole est à M. Patrick Chaize.
M. Patrick Chaize. La directive 2014/23/UE sur l’attribution de contrats de concession a levé tout encadrement des marchés passés par les titulaires de contrats de concession dans le cadre de l’exécution de ces contrats.
En France, la question de la concurrence sur le marché aval des travaux s’est posée, en raison de l’appartenance de certaines sociétés d’autoroutes à des groupes de travaux publics. Le Parlement a donc souhaité encadrer spécifiquement ces marchés, mais le texte de loi n’a pas limité le domaine d’application de cet encadrement.
Conformément à la directive, le périmètre d’application de l’encadrement des marchés devrait spécifiquement être adapté à l’enjeu particulier l’ayant motivé. Les autres contrats passés par les sociétés d’autoroutes ne présentant aucune particularité par rapport à ceux passés par d’autres délégataires, la situation actuelle est constitutive d’une rupture d’égalité devant la loi.
Dans le cas concret des sociétés d’autoroutes, lors de l’analyse de leurs achats et des secteurs où interviennent les entreprises qui leur sont liées, le constat, évident, est que le seul type d’achats qui puisse éventuellement poser problème est celui des travaux commandés à des entreprises liées.
D’une part, les sociétés d’autoroutes ne sont pas des acheteurs importants de fournitures et services, certainement pas au point de peser sur les marchés sur lesquels elles achètent des fournitures et services. Les entreprises qui leur sont liées ne sont d’ailleurs pas présentes sur ces marchés et n’y disposent à coup sûr pas d’une position importante.
Il convient donc d’exclure de tout encadrement spécifique les achats de fournitures et services des sociétés d’autoroutes.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Didier Mandelli, rapporteur. Les obligations de publicité et de mise en concurrence applicables aux marchés passés par les sociétés concessionnaires d’autoroutes sont récentes, puisqu’elles datent de la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques.
Nous manquons donc de retour d’expérience. Ainsi, l’Arafer n’a pas encore eu le temps de publier le rapport quinquennal sur l’économie générale des concessions qu’elle doit remettre en application de l’article L. 122-9 du code de la voirie routière.
Cette loi de 2015 conduit à renforcer la régulation du marché de l’autoroute concédée et visait à traduire un certain nombre de propositions issues notamment du travail réalisé en 2014 par notre collègue Louis-Jean de Nicolaÿ et notre ancien collègue Jean-Jacques Filleul.
Pour des raisons de transparence du fonctionnement de ce marché et de bonne régulation de ces sociétés, il ne me paraît pas souhaitable de revenir sur ces dispositions. Je demande donc le retrait de cet amendement ; s’il est maintenu, j’y serai défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Élisabeth Borne, ministre. L’amendement va trop loin. Un certain nombre de marchés doivent rester contrôlés par l’Arafer ; je pense, par exemple, aux marchés de maîtrise d’œuvre. Je comprends bien votre souci de simplification, monsieur Chaize. Nous pourrons réfléchir, dans la suite de la navette parlementaire, à un amendement prévoyant la prise, après avis de l’Autorité de la concurrence et de l’Arafer, d’un décret excluant un certain nombre de marchés de fournitures. En l’état, je le répète, l’amendement va trop loin. En conséquence, j’en demande le retrait ; à défaut, l’avis sera défavorable.
Monsieur Jacquin, on ne peut pas prendre des dispositions aussi générales que ce que vous proposez. Le code de la voirie routière prévoit d’ores et déjà des modulations horaires et environnementales, les modulations environnementales étant obligatoires pour les poids lourds.
S’agissant des voies réservées pour le covoiturage ou les transports en commun, elles sont étudiées et contractualisées au cas par cas. Cette démarche n’est pas appropriée pour un certain nombre de sections : concernant la partie concédée de la route Centre-Europe Atlantique, par exemple, je ne vois pas pourquoi on mettrait en place des voies réservées au covoiturage au milieu d’une section interurbaine.
Par ailleurs, l’installation de bornes de recharge électrique est déjà prévue par l’arrêté du 2 janvier 2019 relatif aux sous-concessions.
Concernant les barrières de péage, madame Darcos, leur proximité des agglomérations est liée à l’extension de celles-ci. De façon générale, près d’un million de nos concitoyens empruntent fréquemment les autoroutes. Consciente des difficultés qu’ils rencontrent, j’ai obtenu, après discussion avec les sociétés d’autoroutes, une réduction de 30 % de l’abonnement pour tous les automobilistes faisant plus de dix aller-retour par mois sur un même trajet.