M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Élisabeth Borne, ministre. Je tiens à souligner que la France est très active au sein de l’OMI afin de donner une traduction concrète à l’engagement pris à l’échelon international concernant la réduction des émissions de gaz à effet de serre d’au moins 50 % à l’horizon 2050 et de 40 % à l’horizon 2030.
À ce stade, et dans l’attente d’un outil tel qu’un marché du carbone, qui enverrait des signaux économiques, nous plaidons en effet pour une réduction des vitesses, ce levier étant le plus rapide pour réduire les émissions de gaz à effet de serre.
Je rappelle par ailleurs que nous mettons également en place des mécanismes de suramortissement pour les navires dans les eaux intérieures. Nous encourageons notamment les motorisations à hydrogène ou fonctionnant au GNL.
Pour ma part, je pense qu’on peut tout à fait se rallier aux amendements identiques nos 55 rectifié septies, 771 rectifié bis et 729 rectifié quater. Je suggère en revanche le retrait de l’amendement n° 885 rectifié bis, les trois amendements identiques mettant mieux en évidence les différents niveaux d’action, à la fois au sein de l’OMI et dans le cadre de la concertation que nous menons à l’échelon national.
M. le président. La parole est à M. Michel Vaspart, pour explication de vote.
M. Michel Vaspart. J’évoquerai, à l’intention de mon collègue Dantec, ce qui se passe réellement sur le terrain aujourd’hui.
La France, vous le savez, compte de très grands armateurs, qu’il s’agisse de CMA CGM, de MSC ou d’autres. CMA CGM a commandé 30 bateaux fonctionnant au GNL. Les plus gros armateurs ont été sensibilisés à cette question, sont engagés dans le processus et ont réduit leurs vitesses. Par ailleurs, Mme la ministre vient d’insister sur les mesures fiscales qui ont été mises en place très récemment. Il est évident que toutes ces mesures vont produire leurs effets, la prise de conscience étant générale.
Je suis prêt à voter le texte qui nous est proposé, parce que l’engagement qu’il tend à prévoir n’est pas contraignant, mais, je le répète, dans le secteur maritime, c’est parti, le processus est engagé.
M. le président. La parole est à Mme Angèle Préville, pour explication de vote.
Mme Angèle Préville. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous nous devons d’inscrire dans le projet de loi nos ambitions en matière de décarbonation du transport maritime, secteur ô combien responsable de pollutions et d’émissions de gaz à effet de serre, comme cela a déjà été dit.
Nous sommes attendus par la société. À l’heure où le politique est interpellé par les jeunes et les associations sur ces questions des plus urgentes, il est impératif de faire figurer de tels objectifs dans le texte, j’y insiste.
Le politique, c’est sa noblesse, doit rester crédible. Une telle inscription ne serait pas uniquement symbolique, mais elle le serait aussi. Par les temps qui courent, notre boussole est, et doit rester, l’urgence absolue qu’il y a à lutter contre le dérèglement climatique et la pollution, qui ont des effets sur notre santé et, au-delà, sur toute la vie sur Terre, en portant atteinte à la biodiversité.
M. le président. Monsieur Gold, acceptez-vous de retirer l’amendement n° 885 rectifié bis au profit des trois amendements identiques ?
M. Éric Gold. Oui, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 885 rectifié bis est retiré.
Je mets aux voix les amendements identiques nos 55 rectifié septies, 711 rectifié bis et 729 rectifié quater.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 37.
Article 37 bis (nouveau)
Le chapitre Ier du titre Ier du livre III de la quatrième partie du code des transports est complété par un article L. 4311-1-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 4311-1-1 (nouveau). – Voies navigables de France conclut avec l’État un contrat d’une durée de dix ans, actualisé tous les trois ans pour une durée de dix ans. Le projet de contrat et les projets d’actualisation sont transmis au Parlement.
« Voies navigables de France rend compte chaque année, dans son rapport d’activité, de la mise en œuvre du contrat mentionné au premier alinéa. Le rapport d’activité est adressé au Parlement.
« Le contrat mentionné au même premier alinéa met en œuvre la politique de gestion du réseau et du domaine public fluviaux confiés à Voies navigables de France et dont l’État définit les orientations. Il s’applique à l’intégralité de ce réseau et du domaine public confiés à Voies navigables de France. Il traite du développement de la logistique fluviale par le report modal et du transport de marchandises par voie d’eau, de la contribution à l’aménagement des territoires par la valorisation de la voie d’eau et de ses abords ainsi que de la gestion hydraulique dans ses dimensions environnementales, énergétiques, de prévention des risques, d’alimentation en eau des acteurs économiques et des collectivités territoriales et de leurs groupements.
« Il détermine notamment :
« 1° Les objectifs de performance, de qualité et de sécurité du réseau fluvial fixés à Voies navigables de France ainsi que les indicateurs correspondants ;
« 2° La trajectoire financière de l’établissement public et l’évolution du modèle économique de la voie d’eau, en faisant apparaître les recettes propres de l’établissement, les concours financiers versés par l’État et les recettes correspondant aux contributions des autres financeurs ;
« 3° Les dépenses d’investissements sur le réseau fluvial, en faisant apparaître la part relative à la régénération des infrastructures, celle consacrée à la modernisation des méthodes d’exploitation et celle portant sur le développement du réseau ;
« 4° Les dépenses de gestion de l’infrastructure. »
M. le président. L’amendement n° 839 rectifié quinquies, présenté par MM. Bignon, Capus, Chasseing, Decool, Guerriau, Lagourgue et A. Marc, Mme Mélot, MM. Wattebled et Cuypers, Mme Lherbier, MM. Henno, Daubresse, Fouché et Malhuret, Mme Létard et M. Bascher, est ainsi libellé :
Alinéa 4
1° Dernière phrase
Supprimer les mots :
des acteurs économiques et des collectivités territoriales et de leurs groupements
2° Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
L’ensemble de ces actions est conduit au niveau régional, interrégional, national et européen en lien étroit avec les acteurs économiques, les collectivités territoriales et leurs groupements et en coordination avec les autres acteurs du transport multimodal.
La parole est à M. Jérôme Bignon.
M. Jérôme Bignon. Cet amendement tend à compléter le quatrième alinéa de l’article 37 bis. Il vise le contrat, instauré à l’article 37 bis, entre l’État et Voies navigables de France, VNF. Ce contrat devra formellement prévoir que VNF favorise et développe la concertation sur ses actions d’aménagement du territoire, avec l’État évidemment, mais aussi avec les acteurs économiques, au niveau régional, interrégional, national, voire européen.
La concertation est la condition de l’efficacité économique de la voie d’eau. Cet amendement vaut pour le réseau national actuel. L’élu des Hauts-de-France que je suis anticipe en disant qu’il vaudra, rapidement je l’espère, pour l’aménagement du territoire le long du canal Seine-Nord Europe. À cet égard, j’en profite, madame la ministre, pour rappeler une nouvelle fois que nous attendons tous, avec impatience, le financement de l’État.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Didier Mandelli, rapporteur. Cette précision est superflue et satisfaite. La rédaction du 1° de votre amendement ferait par ailleurs perdre son sens à la troisième phrase de l’alinéa 4 de l’article 37 bis. Qui plus est, dans le cadre du canal Seine-Nord Europe, VNF ira bien entendu à la rencontre des acteurs. J’ai eu l’occasion de rencontrer le directeur général de l’établissement et un certain nombre de responsables, qui me l’ont assuré. Mme la ministre nous le confirmera également.
Je demande donc le retrait de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Élisabeth Borne, ministre. Monsieur le sénateur, je vous confirme que les textes régissant VNF prévoient déjà une large concertation dans le cadre de son conseil d’administration, qui comprend des élus nationaux et locaux, ainsi que des personnalités qualifiées dans les domaines de la navigation intérieure, des transports, de l’énergie hydraulique, de la protection des milieux aquatiques et de l’aménagement du territoire. Il s’agit des articles L. 4312-1 et R. 4312-1 du code des transports.
La concertation peut aussi se dérouler dans le cadre de ses commissions territoriales en régions, lesquelles comprennent des élus locaux et des acteurs publics et privés concernés par le domaine fluvial. Ce sont les articles D. 4312-19 et D. 4312-22 du code précité.
De plus, les deux élus membres du conseil d’administration sont choisis parmi les élus locaux présidant des commissions territoriales des voies navigables.
Au-delà du conseil d’administration, l’action de VNF se déploie naturellement sur le terrain, en accompagnement des territoires et des acteurs économiques. VNF a également des échanges réguliers avec les différents partenaires européens.
Je comprends vos préoccupations, mais elles sont satisfaites. Je suggère donc le retrait de cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Hervé Marseille, pour explication de vote.
M. Hervé Marseille. L’examen de l’amendement de notre collègue Bignon me donne l’occasion de dire que, certes, les textes prévoient un tas de choses, mais que, dans la pratique, VNF fait ce qu’il veut. Il s’occupe de nombreux problèmes, mais pas des élus locaux. Pour avoir été maire pendant des années, je peux vous dire qu’on ne travaille pas avec VNF, on le subit !
Ainsi, il n’y a aucune transparence en matière d’attribution de places de bateaux en région parisienne. Quant à l’organisation de nos rives, elle dépend totalement des choix faits par VNF, voire par le port de Paris.
Certes, il y a un conseil d’administration, au sein duquel siègent des élus, il y a des commissions territoriales : formellement, il existe toutes sortes d’instances, mais, dans la réalité, VNF se comporte comme un État dans l’État, fait exclusivement ce qu’il veut et ne s’occupe pas des élus.
Au-delà des textes, il faudrait que, dans la pratique, VNF apprenne à travailler avec l’ensemble des élus, qu’il s’agisse des maires, des conseillers municipaux ou des conseils départementaux.
J’appuie donc totalement l’amendement de notre collègue Bignon, dont j’adhère à l’esprit. Au risque de me répéter, au-delà des textes formels, il faut que VNF travaille avec les élus. Si quelqu’un ici connaît la liste des candidats à l’attribution d’une place de bateau en région parisienne, qu’il vienne me le dire ! Personne ne l’a jamais vue, les attributions se font dans l’opacité la plus totale. Les conditions de fonctionnement de VNF dans nos régions sont elles aussi totalement opaques.
M. le président. La parole est à M. Michel Dagbert, pour explication de vote.
M. Michel Dagbert. J’entends bien le témoignage de notre collègue concernant plus particulièrement la liste de l’attribution des anneaux pour les bateaux à Paris. Pour ma part, je livrerai un témoignage allant à l’encontre du sien.
C’est non pas le sénateur qui s’exprime, mais l’ancien président d’un département. Mon collègue Bignon a évoqué les chemins de halage dans son département. Dans le mien, nous avons réussi à instaurer un véritable partenariat avec VNF. J’ai donc bien peur que la situation que vous décrivez, monsieur Marseille, ne soit qu’une question de personnes. Le directeur territorial peut parfois aplanir bien des difficultés, je peux en porter témoignage. Nous avons en effet réalisé un certain nombre de chantiers qui ont été considérés comme exemplaires. Ainsi, l’aménagement de l’EuroVélo 5 dans le Pas-de-Calais a été assez exceptionnel, car il a été réalisé par la voie d’eau, avec l’accord du directeur territorial. Nous le constatons régulièrement et, sur un certain nombre de sujets, je peux témoigner du fait que VNF est plutôt facilitateur que bloquant.
M. le président. La parole est à M. Christian Manable, pour explication de vote.
M. Christian Manable. À mon tour, je tempérerai quelque peu les propos de notre collègue Marseille, en toute amitié, picarde notamment.
Ayant été président du département de la Somme durant sept ans, j’ai eu affaire à VNF dans le cadre du grand projet structurant qu’est le canal Seine-Nord Europe. Je dois dire que nous avons travaillé en bonne intelligence, en bonne complémentarité. Le département avait mis à disposition de VNF ses agents chargés notamment d’un remembrement portant sur 63 communes, soit la plus grande opération foncière de France à l’époque. Nous avons réellement très bien travaillé ensemble. Je pense donc qu’il ne faut pas porter un jugement général. Le problème que vous soulevez est peut-être, comme dans d’autres circonstances, une question de personnes.
M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote.
M. Olivier Jacquin. La région Grand Est comptant près de la moitié du réseau fluvial français, je suis particulièrement sensible à ce sujet. Les politiques peuvent être localement un peu différentes en fonction des stratégies de management et de l’histoire de ce très grand établissement qu’est Voies navigables de France.
Pour ma part, je ferai deux remarques.
En premier lieu, il faudrait que cet établissement ait une plus grande visibilité financière. Alors que son programme d’investissement devait dépasser les 100 millions d’euros cette année, il a été réduit à 80 millions d’euros juste avant Noël, lors de l’examen du projet de loi de finances : c’est à ce point catastrophique que, pour la première fois, et je l’ai appris par la suite, VNF a envisagé de mettre en œuvre dès 2019 un programme de dénavigation. Il ne s’agit pas d’une fermeture totale de canaux, on joue sur les mots. VNF propose aux collectivités, si elles veulent maintenir une activité fluviale réduite sur un petit capillaire ou un tout petit gabarit n’ayant plus qu’une vocation touristique, de « travailler » avec elles, le sous-entendu étant : « Comment nous accompagnez-vous financièrement ? » VNF, je le répète, a besoin d’une réelle visibilité financière. À cet égard, nous avons fait des propositions à l’article 1er, me semble-t-il. Une règle d’or doit être instituée, un financement minimum doit être accordé à cet établissement.
En second lieu, je crains que la culture de VNF ne change très vite en raison de ses contraintes financières et qu’elle ne systématise cette nouvelle relation avec les collectivités, espérant ainsi compléter son budget. C’est un peu triste et tout à fait inquiétant.
M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.
M. Pascal Savoldelli. J’ai une proximité géographique avec le président Marseille. Il est vrai que nos deux départements ont souvent été, à travers les voies navigables, des territoires servants de la capitale, ce qui a posé un certain nombre de difficultés.
Cela étant dit, je ne vais pas apaiser mon collègue Marseille, même si je vais me montrer extrêmement respectueux. On passe de Mme la ministre, avec le yacht et la pizza, à Hervé Marseille, qui essaie de nous mener en barque ! (Exclamations amusées.)
Ce que ne dit pas Hervé Marseille, c’est que, indéniablement, il défend un point de vue politique, comme d’habitude. (M. Roger Karoutchi s’exclame.)
Certes, le constat qu’il fait est juste : il existe des décalages entre les besoins et les aspirations des collectivités territoriales et leur reconnaissance par Voies navigables de France, et donc des dysfonctionnements. C’est vrai tant dans les Hauts-de-Seine que dans le Val-de-Marne. Je connais particulièrement la situation d’Ivry-sur-Seine, où les discussions sont parfois extrêmement ardues.
De son diagnostic, notre collègue tire la conclusion qu’il faut voter l’amendement. Or, cher collègue, cet amendement ne tend pas à prévoir que les collectivités territoriales doivent être mieux reconnues lors de leurs discussions avec Voies navigables de France, il vise à prévoir une concertation étroite avec les acteurs économiques, et d’abord avec eux. Or nous avons un point de vue différent sur cette question – rien de grave : il y a ceux qui pensent qu’on va réguler l’action publique en faisant intervenir le privé, en l’occurrence dans la gouvernance de Voies navigables de France, et ceux qui poussent à accroître l’efficience de l’action publique. Ce sont là deux projets différents.
M. le président. La parole est à M. Jérôme Bignon, pour explication de vote.
M. Jérôme Bignon. Je ne pensais pas, monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, que cet amendement susciterait autant de débats ! (Sourires.) Mais je me réjouis d’avoir posé une question ayant permis d’enrichir notre réflexion.
J’imagine que Voies navigables de France ne manquera pas de lire le compte rendu de nos débats et que Mme la ministre ne manquera pas de leur en faire part. J’ai entendu des réactions positives, des points de vue différents. En l’état, il me semble que la sagesse est de retirer cet amendement, compte tenu des assurances qu’a données Mme la ministre et des textes qu’elle a évoqués, lesquels prévoient déjà une concertation.
Peut-être notre débat permettra-t-il à VNF de prendre conscience qu’une coopération avec les acteurs territoriaux et, éventuellement, avec les acteurs économiques serait utile et efficace, à moins que cela ennuie beaucoup nos collègues communistes…
Mme Éliane Assassi. Ce n’est pas que cela le problème !
M. Jérôme Bignon. Somme toute, il n’est pas très intéressant de créer des plateformes sans acteurs économiques.
Mme Éliane Assassi. Le problème, c’est d’introduire le loup dans la bergerie !
M. Jérôme Bignon. Je retire cet amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 839 rectifié quinquies est retiré.
Je mets aux voix l’article 37 bis.
(L’article 37 bis est adopté.)
Chapitre III
Outils de financement, de régulation et de modernisation
Article 38
I. – À la fin de l’article L. 2142-1 du code des transports, les mots : « est confiée, dans les conditions prévues aux articles L. 1241-1 à L. 1241-7 » sont remplacés par les mots : « a été confiée dans la région Île-de-France avant le 3 décembre 2009, jusqu’aux échéances fixées à l’article L. 1241-6 ».
II. – L’article L. 2142-2 du code des transports est ainsi rédigé :
« Art. L. 2142-2. – Dans la région Île-de-France, la Régie autonome des transports parisiens peut, le cas échéant par l’intermédiaire de filiales, construire ou aménager d’autres réseaux ou exploiter d’autres lignes que ceux mentionnés à l’article L. 2142-1, fournir d’autres services de transport ainsi qu’exercer toute activité qui se rattache directement ou indirectement à ses différentes missions, notamment toute opération d’aménagement et de développement liée ou connexe aux infrastructures de transport ou aux besoins de mobilité, dans le respect des règles de concurrence. »
III. – L’article L. 2142-5 du code des transports est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, les mots : « construire, aménager et exploiter des réseaux et des lignes de transport public de personnes » sont remplacés par les mots : « exercer les mêmes missions que celles mentionnés à l’article L. 2142-2 » ;
2° Le second alinéa est supprimé.
IV. – L’article L. 2142-7 du code des transports est ainsi modifié :
1° Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :
« Les filiales qui opèrent des services de transport dans les conditions posées par le règlement (CE) n° 1370/2007 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2007 relatif aux services publics de transport de voyageurs par chemin de fer et par route, et abrogeant les règlements (CEE) n° 1191/69 et (CEE) n° 1107/70 du Conseil peuvent bénéficier d’une compensation de service public dans le respect des dispositions de l’article 6 du même règlement. » ;
2° Le dernier alinéa est supprimé.
M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi, sur l’article.
Mme Éliane Assassi. L’horizon fixé par l’Union européenne dans le domaine des transports est, depuis des décennies, toujours le même : l’ouverture à la concurrence, toujours la concurrence, encore la concurrence…
Bien évidemment, vous le savez, nous n’adhérons pas à une telle vision pour un secteur clé dans la lutte contre le changement climatique et pour la transition écologique. Ce secteur nécessite une maîtrise publique forte, car il est garant de l’exercice d’un droit, celui de se déplacer.
À quelques semaines des élections européennes, nous faisons face à de très importantes questions. Notre pays peut-il accepter cette mise à mal de l’intérêt public et des opérateurs historiques, comme la RATP, leur démantèlement et le partage du gâteau avec d’autres, sans que, en contrepartie, soient posées des exigences en termes de satisfaction des besoins ?
L’avenir, pour les transports urbains, est-ce, d’un côté, une multitude d’opérateurs dans les secteurs où la rentabilité est assurée, et, de l’autre, des secteurs désertés, personne ne répondant aux appels d’offres ?
Pour notre part, nous considérons que l’intérêt public doit être remis au cœur de la réponse politique. Comment répondre aux besoins croissants de mobilité, y compris dans des zones très denses ? Selon nous, il convient qu’une offre de transport soit définie par une entreprise intégrée, faisant l’objet d’un contrôle public puissant, dont les capitaux serviraient non pas à générer un retour sur investissement, mais simplement à répondre aux besoins des usagers. Il s’agit là d’un véritable enjeu. Pour y faire face, il faut plutôt des financements nouveaux qu’une multiplication des opérateurs, cette option étant porteuse de risques lourds en termes de cohérence de l’offre et de sécurité.
Pour toutes ces raisons, nous attendons du Gouvernement qu’il porte une autre voix auprès des instances européennes et qu’il fasse valoir l’exception française, pour les services publics et l’intérêt général. Nous souhaitons que ces secteurs soient soustraits au tout-marché et à l’exigence de rentabilité, incompatibles avec toute idée d’aménagement du territoire et, surtout, de solidarité.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, sur l’article.
Mme Laurence Cohen. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous abordons avec cet article 38 l’un des points durs selon nous de ce texte, comme vient de le souligner ma collègue Éliane Assassi.
Vous le savez, nous sommes opposés à l’ouverture à la concurrence imposée par le règlement relatif aux services publics de transport de voyageurs par chemin de fer, dit « règlement OSP », pour obligations de service public, car nous sommes convaincus qu’elle va entraîner une dégradation de la qualité du service. Très souvent, ce sont en effet les entreprises moins-disantes qui remportent les appels d’offres.
Certes, la concurrence des lignes de métro, de bus et de RER a été actée en Île-de-France, à différentes échéances, que je ne rappellerai pas ici. L’article 38 vise à permettre à la RATP de s’insérer parfaitement dans ce champ concurrentiel. Pour cela, vous modifiez les articles L. 2142-1 et L. 2142-2 du code des transports, qui définissaient jusqu’à présent les missions de la RATP. Il s’agit de lui permettre de créer des filiales en Île-de-France pour pouvoir exploiter de futures lignes et fournir d’autres services de transport – covoiturage, autopartage, vélos ou scooters en libre-service, billetterie, retrait de colis, etc. Bref, on élargit son périmètre pour une rentabilité tous azimuts, si j’ose m’exprimer ainsi.
Pour l’heure, l’article L. 2142-5 ne rend possible la constitution de filiales qu’en province et à l’international, ce qui permet à RATP Dev, filiale de la RATP, d’être présente dans 14 pays et plusieurs villes de France.
Lorsque j’étais administratrice du STIF, ex-Syndicat des transports d’Île-de-France, devenu depuis Île-de-France Mobilités, notre groupe défendait l’idée que ces investissements à l’étranger ne devaient pas se faire au détriment des missions premières, à savoir le réseau francilien, dont on connaît les dysfonctionnements actuels, faute d’investissements de l’État pendant des années.
Pour nous, cette filialisation de la RATP, au détriment d’une entreprise unifiée, est une véritable attaque contre le service public. Les salariés de la RATP, avec qui nous discutons, savent très bien que l’ouverture à la concurrence n’est qu’un prétexte pour imposer une productivité accrue, laquelle se traduirait par des centaines de suppressions d’emplois, la remise en cause des conditions de travail, un recul des droits, et ce au nom de la compétitivité.
Nous aurons l’occasion d’en reparler lors de l’examen de l’article 39. Pour l’heure, vous l’avez bien compris, nous sommes fondamentalement contre cet article.
M. le président. L’amendement n° 185, présenté par Mme Assassi, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Pascal Savoldelli.
M. Pascal Savoldelli. Par cohérence et dans le droit fil des interventions de mes collègues, cet amendement vise à supprimer l’article 38.
Nous abordons ici la question de l’avenir de la RATP dans le cadre de l’ouverture à la concurrence. Pour faire face à ce changement d’organisation des transports urbains en Île-de-France, chantier dans lequel l’Europe s’est encore une fois invitée, puisqu’il s’agit de se conformer au règlement OSP, le Gouvernement organise, comme l’ont dit Éliane Assassi et Laurence Cohen, le démantèlement progressif de la RATP.
Ainsi, l’ensemble de l’offre va faire l’objet d’une stratégie d’allotissement par Île-de-France Mobilités, ce qui mettra brutalement fin au monopole de la RATP pour l’exploitation des lignes de bus. De l’aveu même des représentants de cette entreprise, ce changement sera extrêmement brutal. Nous y reviendrons lors de l’examen d’autres articles.
Sur le fond, nous estimons que le morcellement de l’entreprise historique, qui sera in fine obligée de recourir à la filialisation de ses activités du fait de la politique des autorités organisatrices et de recourir à des sociétés dédiées, est le signe d’une privatisation rampante. Pour notre part, nous considérons qu’une société intégrée est un gage de performance. L’éclatement de la RATP en une myriade de filiales, parfois – pour ne pas dire souvent ! – concurrentes entre elles, n’a pas de sens à nos yeux. Le risque est de mettre à mal la cohérence globale de l’offre et la mise en œuvre d’une véritable chaîne du transport répondant aux besoins croissants d’intermodalité entre modes lourds – RER et métro –, sujets dont nous avons précédemment débattu. C’est là une question de nature politique entre nous : quelle chaîne du transport voulons-nous ?
Nous nous inscrivons en faux contre ce processus de dévitalisation de l’EPIC RATP. Que va-t-il se passer en effet ? On va le cantonner aux missions de service public pas ou peu rentables, quand la filialisation des activités rentables sera, elle, donnée à des entreprises privées, bien évidemment.
À ceux de nos collègues qui connaissent le sujet, notamment les élus d’Île-de-France, Laurence Cohen et Roger Karoutchi, qui ont longtemps siégé au STIF, je dis que l’EPIC RATP va devenir le gestionnaire des infrastructures, le GDI, du réseau ferré, soit 1 800 agents. De manière rampante, du fait de la filialisation, on va se retrouver avec des contrats de travail au rabais signés par des entreprises privées.