Mme la présidente. La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion de la motion tendant à opposer la question préalable.
Question préalable
Mme la présidente. Je suis saisie, par M. de Montgolfier, au nom de la commission, d’une motion n° I-9.
Cette motion est ainsi rédigée :
En application de l’article 44, alinéa 3, du règlement du Sénat ;
Considérant que, si l’Assemblée nationale a confirmé le gel de la hausse des tarifs de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) à compter de 2019, qui a été adopté par le Sénat en séance publique dès le 26 novembre dernier et avait déjà été voté par lui l’an dernier dans le cadre de l’examen de la loi de finances initiale pour 2018, et conservé en nouvelle lecture plusieurs mesures de fond issues des travaux du Sénat, de nombreuses divergences demeurent entre les deux assemblées ;
Considérant, en particulier, que la baisse des prélèvements obligatoires n’est possible qu’accompagnée de celle des dépenses publiques, alors que la stabilisation de ces dernières tarde à se concrétiser et que l’essentiel des efforts annoncés par le Gouvernement restent à faire en termes de réformes structurelles ;
Considérant, en outre, que le redressement des comptes publics n’est pas assuré, tandis que la France se trouve désormais très isolée dans la zone euro en termes de niveau de déficit ;
Considérant que l’Assemblée nationale a modifié l’article liminaire en nouvelle lecture, pour tenir compte uniquement des mesures nouvelles que contient le projet de loi de finances, telles que la suppression de la hausse des tarifs de la TICPE, l’augmentation des crédits consacrés à la prime d’activité, ou encore la renonciation aux nouvelles dispositions prévues au titre de l’exonération partielle des plus-values de cessions intragroupes de titres de participations éligibles au régime de long terme, mais en aucun cas des dispositions prévues dans le projet de loi présenté en conseil des ministres ce mercredi 19 décembre pour concrétiser les autres mesures annoncées par le Président de la République lundi 10 décembre dernier et qui auront pourtant un impact direct sur le solde des administrations publiques ;
Considérant que cet article liminaire prévoit ainsi un déficit public de 3,2 % du produit intérieur brut (PIB) pour 2019, sans que, par ailleurs, aucune mesure concrète de recette supplémentaire ou de moindre dépense ne soit confirmée, rendant ainsi cette prévision incertaine, au même titre d’ailleurs que les montants indiqués à l’article 38 du projet de loi de finances, qui fixe pourtant l’équilibre général du budget de l’État ;
Considérant que le Sénat soutient évidemment les mesures adoptées en faveur du pouvoir d’achat des ménages ainsi que le versement d’une prime exceptionnelle de 300 euros aux policiers et militaires ayant participé aux récentes opérations de sécurité et de maintien de l’ordre, conduisant à majorer la mission « Sécurités » de 33 millions d’euros en nouvelle lecture, tout en rappelant toutefois la nécessité de maintenir un équilibre budgétaire permettant d’assurer la soutenabilité de nos finances publiques, ce à quoi le Gouvernement semble avoir renoncé ;
Considérant que l’Assemblée nationale a rétabli en nouvelle lecture certaines mesures auxquelles le Sénat s’était fermement opposé, telles que la suppression de l’exonération de taxe spéciale sur les conventions d’assurance sur les garanties décès des contrats d’assurance emprunteurs ou la définition des locaux industriels pour la détermination de leur valeur locative ;
Considérant que l’Assemblée nationale a, en nouvelle lecture, rétabli sa rédaction, sous réserve d’une précision et d’un aménagement adoptés par le Sénat, concernant le renforcement de la composante de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) relative aux déchets, sans qu’il soit tenu compte des déchets qui peuvent réellement être recyclés et en alourdissant le poids des taxes reposant sur les collectivités territoriales pour l’avenir, au risque de créer une nouvelle pression à la hausse de la fiscalité locale ;
Considérant que, dans sa nouvelle lecture du projet de loi de finances pour 2019, l’Assemblée nationale a supprimé la proposition du Sénat de relever le plafond du quotient familial, alors même qu’il s’agit d’une mesure en faveur du pouvoir d’achat des familles et de justice fiscale après plusieurs années de hausses d’imposition lors du précédent quinquennat ;
Considérant qu’elle n’a pas non plus retenu plusieurs dispositions du Sénat qui avaient pourtant été adoptées à l’unanimité ou à la quasi-unanimité, à l’instar du maintien du prêt à taux zéro pour l’acquisition de logements neufs sur l’ensemble du territoire, de l’exonération de fiscalité des sommes misées dans le cadre du loto du patrimoine ou encore de la publication, en annexe de chaque projet de loi de finances, du code source informatique correspondant aux dispositions fiscales proposées ;
Considérant que le Sénat a adopté six amendements identiques instituant un mécanisme complet de lutte contre les opérations d’ « arbitrage de dividendes » mises en lumière par la presse, en s’inspirant de dispositifs existants aux États-Unis et en Allemagne qui ont fait leurs preuves et représentant un surcroît important de recettes potentielles ;
Considérant que, si ce dispositif a été en partie repris par l’Assemblée nationale, il a en réalité été vidé de l’essentiel de sa portée, avec la suppression de son volet relatif aux instruments financiers et de son volet « externe », qui concerne les cessions temporaires d’actions, au moment du versement du dividende, à un résident d’un pays lié à la France par une convention fiscale prévoyant une retenue à la source de 0 % ;
Considérant enfin que l’Assemblée nationale n’a pas modifié les crédits des six missions rejetées par le Sénat de façon à faire évoluer la position de ce dernier, à savoir les missions « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales », « Cohésion des territoires », « Écologie, développement et mobilité durables », « Immigration, asile et intégration », « Sécurités » et « Sport, jeunesse et vie associative », ni n’a donné suite à ses propositions d’économies en dépenses, notamment par l’augmentation du temps de travail dans la fonction publique ;
Considérant que l’examen en nouvelle lecture de l’ensemble des articles restant en discussion du projet de loi de finances pour 2019 ne conduirait vraisemblablement ni l’Assemblée nationale ni le Gouvernement à revenir sur leurs positions ;
Le Sénat décide qu’il n’y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi de finances pour 2019, adopté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture (n° 218, 2018-2019).
Je rappelle que, en application de l’article 44, alinéa 8, du règlement du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l’auteur de l’initiative ou son représentant, pour dix minutes, un orateur d’opinion contraire, pour dix minutes également, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.
En outre, la parole peut être accordée pour explication de vote, pour une durée n’excédant pas deux minutes et demie, à un représentant de chaque groupe.
La parole est à M. le rapporteur général, pour la motion.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je vais évidemment vous faire grâce de la lecture de cette motion, qui est un peu longue : s’y expriment, notamment, des désaccords de fond.
Je voudrais tout d’abord revenir sur ce que vient de dire M. le secrétaire d’État. Il a apporté des précisions sur l’un des considérants de cette motion, qui concerne les crédits des missions. Je vous invite à bien le relire, monsieur le secrétaire d’État – la phrase doit être lue dans son intégralité – : « Considérant que l’Assemblée nationale n’a pas modifié les crédits des six missions rejetées par le Sénat de façon à faire évoluer la position de ce dernier. » En clair, nous ne disons pas que l’Assemblée nationale n’a pas modifié ces crédits ; nous considérons que les modifications apportées sont insuffisantes pour nous faire changer d’avis sur ces missions.
Nous sommes d’accord : des modifications de crédits sont bien intervenues, mais elles sont strictement techniques. En tout cas, elles ne sont pas de nature à nous faire changer d’avis.
Je ne reviens pas sur les considérations de fond. Les orateurs de différents groupes politiques l’ont dit, d’une manière ou d’une autre, à commencer par Roger Karoutchi, pour le groupe auquel j’appartiens, et, toujours pour la majorité sénatoriale, par l’orateur du groupe Union Centriste : des raisons de fond, s’agissant à la fois du déficit, des crédits, d’un certain nombre d’amendements dont les dispositions n’ont pas été reprises par l’Assemblée nationale, nous conduisent à des désaccords fondamentaux.
Se pose, de manière aggravée cette année, un vrai problème de calendrier. Monsieur le secrétaire d’État, vous venez d’émettre, au nom du Gouvernement, un avis défavorable sur la motion. Je pense que vous seriez les premiers à être bien embêtés si nous décidions d’une nouvelle lecture complète…
M. Philippe Dallier. Oui !
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Je ne sais, en effet, où nous la caserions.
Je vous rappelle, mes chers collègues, que le délai auquel nous sommes tenus par la Constitution est de soixante-dix jours. Si je ne m’abuse, ce délai expire samedi. Vous seriez donc le premier embêté, monsieur le secrétaire d’État, pour caser à la fois, entre aujourd’hui et samedi, une nouvelle lecture de ce projet de loi de finances au Sénat, son retour devant l’Assemblée nationale, et l’examen du texte qui a été adopté ce matin en conseil des ministres et qui sera discuté demain par l’Assemblée, puis vendredi par le Sénat. Tout cela, en termes de calendrier, est totalement incompatible.
Ne serait-ce que sur un plan matériel, donc, le Gouvernement aurait dû, s’il avait voulu faire preuve d’un peu de sérieux et de sagesse, procéder autrement. Bien sûr, certains groupes ont dit, par la voix notamment de notre collègue Capus, qu’ils sont par principe opposés à l’adoption de motions tendant à opposer la question préalable. Cependant, quelle que soit l’attitude la plus responsable sur le fond, il faut admettre que, cette année, sachant que le calendrier pose un vrai problème, une nouvelle lecture complète eût été matériellement impossible, surtout si l’on ajoute au tableau – je l’ai dit – le télescopage de ce projet de loi de finances avec le texte qui nous est parvenu ce matin, et qui est une sorte de PLFR ou de PLFSS rectifié.
Dans cette espèce d’imbroglio de calendrier, il est impossible, si l’on est sérieux, de caser à la fois une nouvelle lecture du PLF et l’examen du texte dont nous discuterons vendredi.
C’est la raison pour laquelle, en dehors même des motifs de fond qui en ont justifié le dépôt, je vous propose de voter cette motion tendant à opposer la question préalable.
Malgré tout, monsieur le secrétaire d’État, vous cherchez des recettes ; je vous en suggère une, fût-elle anecdotique : je pense qu’on pourrait créer une taxe sur les tweets des ministres ! (Sourires.) Je citerai un tweet du ministre de la transition écologique, qui, une fois encore, vaut son pesant d’or : « L’Assemblée nationale a voté l’élargissement du crédit d’impôt transition énergétique au changement de fenêtres : un exemple concret d’aide pour améliorer l’efficacité énergétique » !
M. Vincent Éblé, président de la commission des finances. Quelle honte ! Quel cynisme ! C’est scandaleux !
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. C’est le type même d’amendement sur lequel vous-même, monsieur le secrétaire d’État, il y a quelques jours, avez émis un avis défavorable, en nous expliquant qu’il ne fallait plus toucher au CITE.
Au lieu de reprendre purement et simplement l’amendement du Sénat, dont les dispositions sont d’ailleurs très raisonnables – il s’agissait d’un amendement de notre collègue Gremillet sous-amendé par la commission des finances –, le ministère le bidouille un petit peu et le présente comme la position du Gouvernement, alors que celui-ci s’y est opposé quelques jours auparavant. (M. Claude Kern applaudit.)
M. Antoine Lefèvre. C’est un problème d’intelligence !
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. J’appelle le Gouvernement à un minimum de décence ! Interdisez aux ministres de tweeter, ou bien instaurez une taxe sur les tweets malheureux, …
MM. Roger Karoutchi et Pascal Savoldelli. Ça rapporterait !
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. … car cette communication tous azimuts commence à faire beaucoup de dégâts dans l’opinion ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe Union Centriste, du groupe Les Indépendants – République et Territoires et du groupe socialiste et républicain.
M. Antoine Lefèvre. Très bien !
Mme la présidente. Personne ne demande la parole contre la motion ?…
Mes chers collègues, je vous rappelle que le Gouvernement s’est prononcé sur cette motion tendant à opposer la question préalable et qu’il y est défavorable.
La parole est à M. Vincent Delahaye, pour explication de vote.
M. Vincent Delahaye. Il est vrai que les problèmes tant de calendrier que de fond rendent un peu surréaliste la perspective d’une nouvelle lecture. Sur le fond, on sait très bien, depuis les annonces du Président de la République et compte tenu, aussi, de la révision par l’INSEE de ses prévisions de croissance, que ce projet de loi de finances que l’on nous demande d’approuver ne correspond plus du tout à la réalité, les prévisions budgétaires qui y figurent ayant été rendues caduques.
Nous sommes donc dans une situation un peu rocambolesque, et le Gouvernement émet un nouvel avis défavorable – ce n’est pas le premier ; le rapporteur général l’a très bien dit. Le Gouvernement a donné l’impression d’être fermé à toutes les propositions du Sénat ; et c’est bien malheureux, s’agissant notamment de la taxe sur les carburants : si le Gouvernement avait suivi le Sénat un peu plus rapidement, on se serait épargné une partie des problèmes que l’on rencontre aujourd’hui.
Cette remarque pourrait s’appliquer à un grand nombre de propositions du Sénat, sur lesquelles la position du Gouvernement nous surprend beaucoup : sur la TGAP – mon collègue Kern m’en parlait –, nous avons fait beaucoup de propositions, qui ont été accueillies par un refus systématique ; sur la fraude fiscale, mais aussi sur la fraude sociale, sur lesquelles nous sommes très engagés, ici, au Sénat – je pense notamment aux interventions de notre collègue Nathalie Goulet, qui avait demandé un rapport sur le sujet –, nous ne comprenons pas la position du Gouvernement et de l’Assemblée nationale.
Nous étions prêts à siéger pendant la semaine de Noël, et y compris le jour de Noël – ou, du moins, certains d’entre nous y étaient prêts.
M. Julien Bargeton. Je l’étais !
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Constitutionnellement, c’était impossible : le délai de soixante-dix jours expire samedi !
M. Vincent Delahaye. Nous aurions aimé le faire, à la limite, si nous avions senti une ouverture de la part du Gouvernement. Or, aujourd’hui, nous ne sentons aucune ouverture. À quoi bon rediscuter d’un texte qui n’est plus d’actualité et qui paraît verrouillé ?
Pour ces raisons, une grande majorité du groupe Union Centriste votera la motion tendant à opposer la question préalable présentée par la commission des finances – certains d’entre nous s’abstiendront. Quoi qu’il en soit, je pense que nous aurons à reparler de ces questions budgétaires, sans doute à l’occasion du PLFR ou « PLFSSR » de fin de semaine, mais aussi, sans doute, en début d’année, s’agissant d’autres dispositions, étant entendu qu’une réforme fiscale et une baisse des dépenses sont nécessaires. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.
M. Pascal Savoldelli. Quelques mots pour justifier le vote du CRCE – nous allons nous abstenir sur cette motion tendant à opposer la question préalable.
Les choses ont été bien explicitées, par Roger Karoutchi notamment : la volonté d’opposer la question préalable au projet de loi de finances initiale pour 2019 relève davantage de la stratégie politique – celle-ci a d’ailleurs, ici, toute sa place – que d’une approche purement financière.
Cela dit, les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste sont surpris : si, dès le début de l’examen de ce texte, vous aviez voté la motion que nous avions déposée alors, nous aurions eu droit à une vraie nouvelle lecture ; et cette nouvelle lecture aurait été possible, dans le respect de la diversité des points de vue des uns et des autres. Le diagnostic que nous avions fait en première lecture s’est révélé exact.
Par ailleurs, le Gouvernement nous dit que rien n’est possible, que notre situation est très contraignante. Mais, le cas échéant, comment se fait-il que des solutions soient expérimentées ailleurs, pas si loin de la France ? Comment se fait-il que des gouvernements d’union et de progrès, en Espagne et au Portugal, décident, eux, comme ils viennent de le faire, d’améliorer la condition des salariés et des retraités – et pas par des mesurettes, des gadgets, des artifices technocratiques ? Quand ils disent qu’ils augmentent le SMIC, ils augmentent le SMIC ! Ils ne trouvent pas une combine via une prime d’activité : ils assument. Ils savent ce que c’est qu’une rémunération ; ils savent ce que c’est qu’un salaire. Et ils ont décidé de l’augmenter de 22 %.
M. Julien Bargeton. Alors, mettons nos salaires et nos pensions au niveau espagnol !
M. Pascal Savoldelli. Ils ont fait pareil en matière de hausse des pensions.
Il y va de débats politiques qui ont lieu ici même, mais aussi dans la société. Il faut améliorer nos capacités d’écoute ! La France a quand même des moyens comparables à ceux de l’Espagne et du Portugal !
Mme Buzyn, lors de son audition au Palais-Bourbon dans le cadre de l’examen du projet de loi dit « portant mesures d’urgence économiques et sociales », qui comporte quatre articles et que nous examinerons vendredi, vient de confirmer que, selon M. Moscovici, commissaire européen chargé des questions budgétaires – lui, évidemment, veille au respect des règles du pacte budgétaire européen –, nous n’étions encore qu’à 2,3 % de déficit public au sens européen ! Soit on met en cause le diagnostic du commissaire européen, mais alors mieux vaut s’armer d’arguments solides ; soit l’importance de notre problème de déficit public…
Mme la présidente. Veuillez conclure, mon cher collègue.
Mme la présidente. Votre temps de parole est écoulé.
La parole est à Mme Catherine Conconne, pour explication de vote.
Mme Catherine Conconne. Avant de vous donner la position de notre groupe, je tiens à intervenir sur un point qui me tient très à cœur.
Le Gouvernement a pris une décision que je trouve parfaitement illégitime et scélérate en supprimant un abattement sur l’impôt sur le revenu, abattement fiscal de 30 %, plafonné à un peu plus de 5 000 euros, qui datait des années 1960. Tous les indicateurs montrent pourtant que les populations concernées n’ont rien à voir avec celle de la France hexagonale, en termes tant de revenu par habitant que d’investissement de l’État par habitant,…
Mme Catherine Conconne. … de taux de chômage et de taux de pauvreté.
Cette décision a été prise ; monsieur le secrétaire d’État, vous devrez en assumer la responsabilité. Et je vous le dis, aujourd’hui, 19 décembre – prenez-le comme une prophétie – : l’État devra la payer très cher !
Ce n’est pas une menace ! Vous verrez dans les comptes de l’État ce que coûtera cette décision ; celle-ci, en effet, impacte les classes moyennes de ladite « outre-mer », qui sont des pourvoyeuses de pouvoir d’achat. Vous aviez commencé par les taxer de « riches », pour finalement vous rétracter : vous vous êtes rendu compte qu’il était ridicule de parler de « riches » à propos d’un couple dont chaque membre gagne un peu plus de 3 000 euros, dans des pays où le coût de la vie est supérieur de 40 % à celui de la métropole. Tout y coûte plus cher : agios bancaires, services bancaires, taux d’intérêt, etc. – je ne parle même pas de l’alimentation, qui relève du minimum quotidien obligatoire.
Vous verrez les conséquences : le chômage et la pauvreté croîtront ; des centaines de petits jobs, de petits emplois, disparaîtront, parce qu’il y aura moins de gens pour consommer dans les restaurants ou dans les lieux culturels. Vous verrez ! Nous ferons un bilan, dans les trois ans ; en tout cas, sachez que ces 70 millions d’euros que vous prenez à nos populations vont se répercuter sur les dépenses d’aide sociale, qui ne vont pas arrêter de croître !
Je donne maintenant le verdict : notre groupe va s’abstenir sur cette motion tendant à opposer la question préalable. Nous sommes bien d’accord que, dans un tel désordre, fait de revirements quotidiens quant au budget de la France, il n’y a pas de place confortable pour un avis déterminé. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – M. Fabien Gay applaudit également.)
M. Jérôme Bascher. Vous n’avez qu’à voter la motion !
Mme la présidente. Personne ne demande plus la parole ?…
Je mets aux voix la motion n° I-9, tendant à opposer la question préalable.
Je rappelle que l’adoption de cette motion entraînerait le rejet du projet de loi de finances.
Je rappelle également que le Gouvernement a émis un avis défavorable.
En application de l’article 59 du règlement, le scrutin public ordinaire est de droit.
Il va y être procédé dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 41 :
Nombre de votants | 342 |
Nombre de suffrages exprimés | 210 |
Pour l’adoption | 187 |
Contre | 23 |
Le Sénat a adopté.
En conséquence, le projet de loi de finances pour 2019 est rejeté.