M. le président. Le Sénat va maintenant procéder au vote sur l’ensemble du projet de loi de finances pour 2019, modifié.
En application de l’article 59 du règlement, le scrutin public est de droit.
Conformément à l’article 60 bis du règlement, il va être procédé à un scrutin public à la tribune, dans les conditions fixées par l’article 56 bis du règlement.
J’invite Mme Jacky Deromedi et M. Joël Guerriau, secrétaires du Sénat, à superviser les opérations de vote.
Je vais tirer au sort la lettre par laquelle commencera l’appel nominal.
(Le sort désigne la lettre B.)
M. le président. Le scrutin sera clos après la fin de l’appel nominal.
Le scrutin est ouvert.
Huissiers, veuillez commencer l’appel nominal.
(L’appel nominal a lieu.)
M. le président. Le premier appel nominal est terminé. Il va être procédé à un nouvel appel nominal.
(Le nouvel appel nominal a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
Mme et M. les secrétaires vont procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Mes chers collègues, je remercie Mme et M. les secrétaires du Sénat, qui ont veillé au bon déroulement de ce scrutin. (Applaudissements sur plusieurs travées.)
Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote, le résultat du scrutin n° 37 :
Nombre de votants | 343 |
Nombre de suffrages exprimés | 298 |
Pour l’adoption | 200 |
Contre | 98 |
Le Sénat a adopté. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains, du groupe Union Centriste et du groupe Les Indépendants – République et Territoires.)
La parole est à M. le président de la commission.
M. Vincent Éblé, président de la commission des finances. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, à l’heure où nous achevons nos travaux sur le projet de loi de finances pour 2019, je voulais rappeler combien notre assemblée s’est mobilisée pour l’examen de ce texte.
Nous y avons consacré 120 heures de séance publique et 216 heures de réunion en commission des finances et en auditions préparatoires des rapporteurs spéciaux. Nous aurons examiné 2 029 amendements, contre seulement 1 363 amendements l’an passé.
Le calendrier budgétaire a pu être tenu, malgré les nombreuses vicissitudes qui ont marqué l’examen du texte : le report de certaines discussions de missions budgétaires le week-end en conséquence de votre malheureux tweet, monsieur le ministre de l’action et des comptes publics, l’insertion d’un débat – nécessaire – sur la fiscalité écologique et le pouvoir d’achat avec le Premier ministre au milieu de l’examen des missions budgétaires et, hier encore, les annonces du Président de la République, qui bouleversent une nouvelle fois les équilibres du budget. À cela viennent s’ajouter les effets de l’absence de collectif de fin d’année, qui expliquent en partie « l’inflation » de taille de ce projet de loi de finances.
Gageons cependant que nous aurons très prochainement à nous retrouver pour examiner un nouveau collectif budgétaire, tant l’examen du projet de loi de finances pour 2019 présenté par le Gouvernement aura mis en lumière ses nombreuses insuffisances.
À cette heure, je voudrais surtout remercier et féliciter toutes celles et tous ceux qui ont apporté leur concours à ce travail : d’abord, vous-même, monsieur le président du Sénat, et les vice-présidents de notre assemblée, qui ont été très sollicités, ainsi que les services de la séance. Je tiens également à saluer l’ensemble des sénateurs, plus particulièrement les 49 rapporteurs spéciaux de la commission des finances et les 76 rapporteurs pour avis, qui ont fait un travail remarquable. Je n’oublie pas l’ensemble de notre administration, les services de la commission des finances et des commissions saisies pour avis, ainsi que nos collaborateurs et les professionnels de nos groupes politiques.
Je finirai, bien entendu, par des remerciements adressés au Gouvernement, monsieur le ministre, notamment à Olivier Dussopt, qui a assuré pendant de longues heures la représentation du Gouvernement avec expertise et courtoise. (Applaudissements sur la plupart des travées.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Rassurez-vous, je ne prolongerai pas plus avant les débats – vous m’avez assez entendu ! –, d’autant que l’heure n’est pas aux propos politiques, même si je crains que nous ne nous retrouvions très prochainement sur ces sujets.
Pour la première fois, nous avons le sentiment d’un budget quelque peu inachevé. C’est à tout le moins une impression bizarre, compte tenu des nombreuses mesures annoncées. Un projet de loi de finances rectificative était d’ores et déjà programmé pour le printemps ; il devait porter sur les collectivités locales, mais les annonces récentes du Président de la République auront nécessairement d’autres impacts, y compris sur le solde budgétaire et le déficit public.
Philippe Dallier l’a rappelé, j’avais souligné au début de l’examen de ce texte qu’il s’agissait de l’introuvable budget du pouvoir d’achat. Malheureusement, ce point a été au cœur de nos discussions, en lien évidemment avec l’actualité. Il l’a été bien davantage que ce que nous avions pu imaginer au départ.
Nous sommes allés au bout de nos débats, en examinant, ce qui était une difficulté, l’intégralité du texte – je m’en félicite. Cela n’a pas été sans friction, je pense aux problèmes de calendrier, mais également aux chiffrages, à propos desquels nous nous sommes opposés au Gouvernement, ainsi qu’à l’article d’équilibre. Quoi qu’il en soit, nous avons toujours travaillé pour l’essentiel en bonne intelligence, en faisant preuve de courtoisie et d’écoute, même si mes collègues ont dû écourter certaines de leurs interventions pour respecter les temps de parole, et je les en remercie.
Nous avons adopté plusieurs amendements, parfois à une très large majorité, parfois à l’unanimité. Je pense, bien sûr, au gel de la TICPE. C’était déjà une disposition votée l’année dernière. Je pense également à l’amendement sur les dividendes, qui devrait recueillir toute l’attention de l’Assemblée nationale, si j’en crois les paroles du Président de la République hier soir sur la lutte contre la fraude.
Après le président de la commission des finances, je salue à mon tour, monsieur le président, les vice-présidents du Sénat qui se sont succédé au plateau. Je salue également M. le ministre et les différents membres du Gouvernement, notamment Olivier Dussopt. Je remercie enfin mes collègues qui ont été présents tout au long des débats, en particulier les rapporteurs spéciaux et les rapporteurs pour avis.
En conclusion, mes chers collègues, je crois malheureusement que cette soirée n’épuisera pas les débats sur l’avenir du budget de la France ! (Applaudissements sur la plupart des travées.)
M. le président. Je remercie également le président de la commission des finances et son rapporteur général, y compris pour la qualité des contacts que nous avons eus pendant cette période. Je salue à mon tour les vice-présidents du Sénat, qui se sont partagés, à eux seuls, 116 des 120 heures de débat. Je les en remercie personnellement et particulièrement.
La parole est à M. le ministre.
M. Gérald Darmanin, ministre. Qu’il me soit permis à mon tour, monsieur le président, de remercier la présidence du Sénat et les services de la séance. Je salue bien évidemment le président de la commission des finances et les commissaires aux finances avec qui nous avons travaillé dès en amont de la présentation du texte. Je remercie également M. le rapporteur général et l’ensemble des sénateurs pour les débats nombreux que nous avons eus. Je transmettrai vos remerciements aux membres du Gouvernement, particulièrement à Olivier Dussopt, dont vous avez eu raison de souligner la présence au banc du Gouvernement.
Je remercie les services de mon ministère, de mon cabinet et tous ceux qui ont contribué à élaborer les différents documents. M. le président de la commission des finances l’a souligné, le projet de loi de finances rectificative a été réduit à la portion congrue, mais j’ai compris que le Sénat envisageait d’améliorer encore le dispositif présenté par le Gouvernement. Même si nous n’avons pas présenté d’amendements fiscaux en raison des délais extrêmement contraints, il est utile d’améliorer encore le tout en vue de la discussion budgétaire que nous aurons l’année prochaine. Sans doute faudra-t-il conduire une réflexion sur les textes constitutionnels relatifs aux projets de loi de finances et aux projets de loi de financement de la sécurité sociale. Quoi qu’il en soit, cela demandera du temps au Sénat et je le remercie par avance du travail qu’il accomplira. Mesdames, messieurs les sénateurs, comme l’a précisé M. le rapporteur général, ce n’est qu’un au revoir ! (Sourires sur plusieurs travées et applaudissements sur quelques travées du groupe Union Centriste et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)
M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux. Nous les reprendrons à dix-huit heures quinze.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-huit heures, est reprise à dix-huit heures quinze, sous la présidence de Mme Hélène Conway-Mouret.)
PRÉSIDENCE DE Mme Hélène Conway-Mouret
vice-présidente
Mme la présidente. La séance est reprise.
3
Candidature à une commission
Mme la présidente. J’informe le Sénat qu’une candidature pour siéger au sein de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a été publiée.
Cette candidature sera ratifiée si la présidence n’a pas reçu d’opposition dans le délai d’une heure prévu par notre règlement.
4
Port du voile intégral dans l’espace public
Adoption d’une proposition de résolution
Mme la présidente. L’ordre du jour appelle l’examen de la proposition de résolution visant à préserver l’ordonnancement juridique relatif au port du voile intégral dans l’espace public présentée, en application de l’article 34-1 de la Constitution, par M. Bruno Retailleau et plusieurs de ses collègues (proposition n° 83).
Dans la discussion générale, la parole est à M. Bruno Retailleau, auteur de la proposition de résolution. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Bruno Retailleau, auteur de la proposition de résolution. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, l’actualité n’épuise pas tous les sujets. Si nous avons tenu à déposer cette proposition de résolution, c’est tout simplement parce que nous pensons que, parfois, il faut réagir. On ne peut pas se taire, on ne peut pas faire comme si on n’avait rien vu ni rien su. On ne peut pas se taire non plus comme si on devait seulement opposer le silence à ce qui est de l’ordre de l’inacceptable.
De quoi s’agit-il ?
Après la plainte de deux femmes verbalisées en France pour le port de la burqa sur la voie publique, le Comité des droits de l’homme des Nations unies, le 22 octobre dernier, a pris une décision stupéfiante puisqu’il a demandé à la France l’abrogation – l’abrogation, vous m’entendez bien ! – de la loi de 2010 interdisant la dissimulation du visage dans l’espace public. Il demande, par ailleurs, que la France indemnise les deux plaignantes.
M. Roger Karoutchi. Bah tiens !
M. Bruno Retailleau. Chère Françoise Laborde, les choses sont claires, nous demandons au Gouvernement d’opposer à cette décision un mur de refus. (Marques d’approbation sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.) Je tiens à le préciser pour le cas où le texte de la proposition de résolution ne l’explicitait pas suffisamment ! (Mme Françoise Laborde le confirme.)
Nous devons opposer à cette décision un mur de refus pour trois raisons : premièrement, cette décision légitime l’islam radical ; deuxièmement, elle atteint le cœur de notre modèle républicain ; troisièmement, elle nourrit la crise démocratique.
Tout d’abord, cette décision légitime l’islam radical. Je procéderai à quelques rappels pour bien montrer toute la signification de la burqa. J’insisterai notamment sur deux évidences.
Première évidence, la burqa, mes chers collègues, n’est pas une simple mode vestimentaire. Ce n’est pas non plus un simple voile. Ce grillage en tissu efface, retranche et diminue. Il efface parce qu’il fait disparaître l’identité et l’individualité des femmes. Il les efface de l’espace public. Il les retranche ensuite de l’espace public parce que le visage, l’expression, le regard sont des moyens de communication avec nos semblables. Ce qui est incroyable, c’est que ce grillage transforme finalement la femme en image incarnée du refus de la figure, alors même que l’islam refuse toute notion d’image ! Enfin, non seulement il efface, non seulement il retranche, mais surtout il diminue la femme en la plaçant à un rang inférieur et en signalant cette diminution à tous ostensiblement dans l’espace public, ce qui est inacceptable !
Qu’un comité des droits de l’homme puisse se servir de son statut pour diminuer les droits de la femme, les bras m’en tombent ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, du groupe Union Centriste, du groupe Les Indépendants – République et Territoires et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)
Deuxième évidence, non seulement la burqa n’est pas un simple voile, mais ce n’est pas non plus n’importe quel signe d’appartenance religieuse : c’est le signe d’une appartenance particulière à une mouvance, et pas à n’importe laquelle, à un islam qui se radicalise et considère la loi religieuse, la charia, comme supérieure à la loi républicaine, à la loi civile.
La burqa est le symbole d’un islam qui l’envisage comme un étendard, celui d’une contre-société.
L’objectif de ce radicalisme est bien de séparer nos compatriotes musulmans de tout le reste des Français, quelles que soient leurs origines ou leurs professions de foi, qu’ils croient au ciel ou qu’ils n’y croient pas.
Cela, nous ne pouvons l’accepter, et il est inadmissible qu’une instance internationale donne sa caution à ce type de radicalisme !
M. Philippe Pemezec. C’est scandaleux !
M. Bruno Retailleau. La première raison pour refuser cette décision est que nous devons lutter contre l’islam radical. Nous luttons sur deux fronts, monsieur le secrétaire d’État, sur un front de haute intensité qui est le terrorisme, mais aussi sur un front qui nourrit ce premier front dans un certain nombre de consciences, je veux parler du « fréro-salafisme ».
La deuxième raison pour refuser cette décision est qu’elle atteint le cœur de notre modèle républicain. Elle s’oppose à nos valeurs, à la valeur de l’égalité de l’homme et de la femme, c’est-à-dire la valeur de la dignité humaine. Elle s’oppose aussi à la valeur de l’universalité de la loi, cette valeur qui fait que nous avons, en France, une communauté civique, une amitié civique.
Dans notre pays, la fraternité n’est pas une fraternité d’ordre religieux, c’est une fraternité civique. Aucune de nos communautés, religieuses ou autres, ne saurait s’inscrire à l’intérieur d’un cercle de feu pour se retrancher et se séparer de l’ensemble de la communauté nationale !
Cette décision atteint évidemment le cœur du modèle républicain. J’en ferai une brève démonstration, car le temps est venu de dénoncer le cadre idéologique dans lequel s’enferment un certain nombre d’institutions internationales.
Ces institutions internationales, et c’est le cas du Comité des droits de l’homme des Nations unies, se servent de la rhétorique des droits de l’homme pour développer une conception radicale de l’individualisme et du multiculturalisme. Au nom, en réalité, d’une sorte d’exaltation libérale libertaire de la liberté, elles retournent la liberté contre l’individu, contre la personne et contre la collectivité. Contre la personne, on le voit pour la femme, qui est ravalée à un rang inférieur. Contre la collectivité, parce que la source du droit républicain est l’universalité.
Cette conception anglo-saxonne du droit est très différente de notre tradition républicaine. Elle atteint à la fois le concept de laïcité puisqu’elle place très haut les droits des individus, au-dessus de tout : plus on se singularise, y compris sur le plan religieux, et mieux c’est ! Elle s’oppose aussi à la conception que nous nous faisons de la citoyenneté. Notre citoyenneté à nous n’exige pas que tous les particularismes et toutes les singularités soient refoulés. Elle demande simplement que ceux-ci ne s’expriment que dans l’espace privé, et non dans l’espace public.
Voilà pourquoi il faut ouvrir les yeux et dénoncer les avancées insidieuses de ces pseudo-juridictions internationales ! (M. Philippe Pemezec applaudit.)
La troisième raison, non moins importante, pour laquelle nous devons refuser une telle décision est qu’elle nourrit la crise de nos démocraties. Elle la nourrit en France, car elle contrevient à la volonté du peuple français. Dois-je vous rappeler que, lors du vote de la loi de 2010, à l’Assemblée nationale et au Sénat, une très large majorité, une quasi-unanimité, un large consensus national, s’était fait jour pour ne plus tolérer la burqa sur la voie publique et dans l’espace public ?
M. Philippe Pemezec. Très bien !
M. Bruno Retailleau. À ceux qui, en boucle, répètent que la portée de cette décision d’octobre 2018 n’est absolument pas contraignante, je donne lecture de ce qu’a déclaré le 3 septembre dernier, au sujet de la jurisprudence Baby Loup du même comité Théodule de l’ONU, le premier président de la Cour de cassation lui-même. Je le cite fidèlement : « Même si cette constatation n’a pas, en droit, de force contraignante, l’autorité qui s’y attache de fait constitue un facteur nouveau de déstabilisation de la jurisprudence. » Il poursuit : « En réalité, ce phénomène d’internationalisation appelle la culture judiciaire et juridique française à entrer en synthèse avec la culture anglo-saxonne. »
M. Gérard Longuet. Il doit appliquer la loi française !
M. Bruno Retailleau. Ces propos du premier président de la Cour de cassation sont rigoureusement exacts et je mets quiconque au défi de les démentir. Monsieur le secrétaire d’État, vous voyez bien que cette force contraignante est insidieuse !
Par ailleurs, cette décision est aussi emblématique, voire paroxystique, des décisions prises par les juridictions internationales qui avancent insidieusement. C’est ce qu’on appelle la soft law – pardon pour cet anglicisme – ; c’est une zone grise, un droit jurisprudentiel, qui s’oppose, en réalité, à la démocratie nationale.
M. Philippe Pemezec. Très bien !
M. Bruno Retailleau. On le voit en France avec la crise des « gilets jaunes », mais aussi en Europe, au Brésil, aux États-Unis, en Angleterre avec le Brexit. Ces crises, ces insurrections électorales viennent souvent du fait que les classes moyennes en particulier et le peuple en général considèrent que les dirigeants gouvernent sans eux. Tous ont le sentiment, pour reprendre une expression de Jacques Julliard, que la démocratie désormais s’exerce « sans le peuple ».
Voilà typiquement le genre de décision, mes chers collègues, qui fait perdre confiance au peuple et qui le convainc que celles et ceux qui les dirigent ou les instances du haut sont totalement insensibles à la volonté et à l’expression populaires !
Permettez-moi également de relier malheureusement cette décision à la signature il y a quelques jours par la France du pacte de Marrakech. À mon sens, je le dis calmement et sereinement, ces décisions d’ordre international sont filles d’une même idéologie et la matrice d’une même crise démocratique.
Le moment est venu de faire respecter la souveraineté populaire, celle du droit, celle du peuple français. Lorsque celui-ci s’exprime, on n’a pas le droit de le bafouer ! C’est une question importante qui vise nos valeurs républicaines, celles aussi qui fondent le socle de notre civilisation ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, du groupe Union Centriste et du groupe Les Indépendants – République et Territoires.)
Mme la présidente. La parole est à M. Stéphane Ravier.
M. Stéphane Ravier. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, « le voile intégral rend libre » : parole de Rédoine Faïd ! La burqa a en effet permis à l’ennemi public n° 1 de faire ses courses au marché du coin, alors qu’il était recherché par toutes les polices de France et de Navarre.
Mme Martine Berthet. Eh oui !
M. Stéphane Ravier. La burqa, le voile intégral en France, ne pose pas un problème d’« ordonnancement juridique ». C’est la conséquence directe du véritable problème qu’est la folle politique d’immigration massive qui a fait entrer, et continue de faire entrer, dans notre pays, des millions d’individus,…
M. Philippe Pemezec. Eh oui !
M. Stéphane Ravier. … dont beaucoup s’opposent à nos traditions séculaires et combattent désormais, sur notre sol, nos valeurs et notre attachement aux libertés individuelles, notamment celles des femmes.
Ajoutons à cela quarante années de couardise et de compromissions de la classe politique avec les islamistes, et vous obtenez la France des terroirs, des clochers et de Marianne transformée en France terreau de la charia et du voile intégral !
Ce voile intégral n’est rien d’autre, mes chers collègues, qu’un acte politique posé par des extrémistes islamistes, qui utilisent nos libertés pour mieux les combattre. De la France fille aînée de l’Église à la France petite-fille de l’islamisme, il n’y a qu’un voile !
Pendant que vous palabrez, les barbus agissent. Pourtant, ils ne sont forts que de notre faiblesse.
Le port de la burqa est une violence insupportable faite aux femmes, une étape dans la volonté de conquête de l’âme et du corps de notre nation par des fanatiques qui s’engouffrent dans les failles de notre droit pour imposer leur droit, la loi islamique, aidés en cela par des officines internationales d’idéologues qui bafouent les libertés des femmes.
De ce constat accablant que chaque Française peut voir et même subir au quotidien, je crains que ce gouvernement n’ait tiré aucune leçon.
L’urgence absolue de stopper toute immigration n’est pas à l’ordre du jour, puisque le Président de la République a fait ratifier, en catimini, le pacte mondial sur les migrations de Marrakech, acte de haute trahison qui achèvera l’entreprise de submersion de notre pays par des millions de migrants, avec, en leur sein, des milliers de fanatiques qui ont la liberté des femmes en détestation.
Cessons tout masochisme et déni de la réalité !
Non, monsieur le ministre de l’intérieur, le fichu de nos grands-mères n’a rien à voir avec ce voile qui nie la femme jusqu’à l’enfermer dans un tissu carcéral !
Ici, ce n’est pas Kaboul, nous sommes en France, à Paris, capitale mondiale de la mode.
Ici, les femmes, nous les voulons et nous les aimons en pantalon, en robe, en jupe, en short, en maillot de bain. Nous aimons voir leurs cheveux, nous voulons voir leur visage, leur sourire. Nous les voulons mères au foyer, chefs d’entreprise, saintes héroïnes de la patrie, parlementaires. Je souhaite même que l’une d’elles devienne Présidente de la République ! (Rires ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.) Vous aurez deviné laquelle…
Mme Sophie Primas. Ce n’est vraiment pas du domaine des possibles !
M. Stéphane Ravier. Les femmes, ici, nous les voulons et nous les aimons libres !
En ce centième anniversaire de la grande victoire, n’oublions jamais, mes chers collègues, qu’à l’arrière, dans leur foyer mais aussi dans les champs, dans les usines, dans les hôpitaux, ce sont les femmes qui ont porté le pays à bout de bras !
Sans le dévouement des femmes, les hommes au front n’auraient jamais tenu ! Sans les femmes, la France ne serait plus française !
Alors, pour la France, fille aînée aussi de la liberté, ne tergiversons plus ! Ne reculons plus face à l’obscurantisme islamiste ! Redevenons maîtres chez nous : dévoilons une bonne fois pour toutes la République !
M. Christian Manable. Vive les femmes !
Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Goulet. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.)
Mme Nathalie Goulet. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je vais mettre immédiatement un terme au suspense en vous disant que le groupe Union Centriste votera évidemment cette proposition de résolution.
Le contexte est plein de symboles, au lendemain du soixante-dixième anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme du 10 décembre 1948, deux jours après le cent-treizième anniversaire de la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Églises et de l’État, et au lendemain de la signature de l’accord de Marrakech pour des migrations sûres, ordonnées et régulières, que j’évoquerai ultérieurement.
Le groupe Les Républicains nous invite à débattre de la dissimulation du visage dans l’espace public et de la réaffirmation des dispositifs votés en 2010.
Passée la mention d’autres voies et moyens de dissimuler le visage dans l’espace public – la cagoule, par exemple –, cette proposition de résolution vise en tout premier lieu l’interdiction du voile intégral islamique. Il se trouve que j’étais déjà intervenue au nom de l’Union Centriste sur le texte de 2010, que mon groupe avait voté.
La raison initiale évoquée dans la proposition de résolution est le vote – Bruno Retailleau l’a dit –, le 22 octobre 2018, d’une condamnation de la France par le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme, qu’il ne faut pas confondre avec le Comité consultatif du Conseil des droits de l’homme, lequel est présidé par l’Arabie saoudite.
Cette condamnation n’a aucune force contraignante dans l’immédiat, mais peut occasionner – je partage sur ce point la position du président Retailleau – des litiges et offrir un terreau favorable à toutes les dérives et victimisations qui peuvent en découler.
Répéter une fois de plus les principes républicains du vivre ensemble n’est jamais un rappel de trop.
Toutefois, lorsque l’on connaît la force exécutoire des résolutions de l’ONU, je ne crois pas qu’il y ait franchement de grands risques dans l’immédiat, que ce soit pour les constructions illégales dans des territoires occupés ou pour des occupations illégales de régions entières d’un pays voisin.
Si les résolutions de l’ONU, ou de ses démembrements, avaient une efficacité et une incidence sur la hiérarchie des normes, cela se saurait ! Mais j’approuve ce qui a été dit sur la soft diplomatie : cela brouille les pistes et peut aussi brouiller les esprits.
À propos du pacte de Marrakech, permettez-moi, monsieur le secrétaire d’État, d’ouvrir une parenthèse. En dehors du fait que neuf pays, et les États-Unis, s’en soient écartés, il faut rappeler l’absence de force contraignante de ce texte et la totale souveraineté des États. Ni vote ni signature n’étaient au programme de ce rendez-vous, qui a pris la forme d’une simple proclamation orale suivie d’un coup de marteau.
Ce texte, déjà approuvé en juillet, doit encore être ratifié mercredi 19 décembre, lors de l’Assemblée générale des Nations unies.
Je voudrais vous faire part, monsieur le secrétaire d’État, de deux observations.
Lors des débats budgétaires, notre excellent collègue Roger Karoutchi a plusieurs fois rappelé que la question de l’asile et de l’immigration devait faire l’objet d’un débat global et cohérent.