M. le président. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour répondre à Mme la ministre.
M. Pierre Ouzoulias. J’ai entendu des engagements forts sur la pérennité des DRAC. J’ai lu le rapport dont vous faites mention : celui-ci relève bien que, avec le passage aux grandes régions et la fusion de plusieurs régions, les services sont aujourd’hui fragilisés. Quand vous êtes à Toulouse, il est d’une grande complexité de traiter les questions des Pyrénées aux Cévennes. (Mme la ministre opine.)
Je ne mets pas en doute vos engagements, madame la ministre. En revanche, nous connaissons le budget, et nous savons qu’il y aura 160 équivalents temps plein en moins dans votre budget 2019. Dès lors, comment satisfaire vos engagements en essayant de restaurer auprès des élus la crédibilité de leur DRAC ? Vous avez là un véritable souci.
Par ailleurs, en ce qui concerne le Centre des monuments nationaux, lors de la discussion du budget, M. Bélaval avait indiqué que le Mont-Saint-Michel était, à ses yeux, un élément essentiel de l’équilibre de son établissement public, parce que celui-ci lui permettait de financer d’autres monuments largement déficitaires, mais dont vous soutenez, par votre politique, l’ouverture. Or j’apprends – c’est sans doute votre décision, et il est dommage que vous ne puissiez me le confirmer ; nous en reparlerons ultérieurement – que le Mont-Saint-Michel va être transformé en EPIC. (Mme la ministre fait un geste de dénégation.) Vous me dites non. Soit ! J’ai deux réponses à mes deux questions… (Sourires.)
M. Pierre Ouzoulias. C’est un point absolument essentiel. (Mme la ministre opine.) Cette péréquation est nécessaire, car elle permet de faire vivre le patrimoine dans son entièreté. Mais j’arrêterai là mon propos. Sachez que je reste à votre disposition pour discuter de tous ces sujets. (Mme Anne-Catherine Loisier applaudit.)
M. le président. Nous en avons terminé avec les réponses à des questions orales.
Mes chers collègues, l’ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures vingt, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de Mme Catherine Troendlé.)
PRÉSIDENCE DE Mme Catherine Troendlé
vice-présidente
Mme la présidente. La séance est reprise.
3
Modification de l’ordre du jour
Mme la présidente. Mes chers collègues, par lettre en date de ce jour, le Gouvernement demande que la suite du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique soit inscrite à l’ordre du jour du mercredi 25 juillet, à partir de quatorze heures trente.
En conséquence, le début de l’examen du projet de loi ratifiant l’ordonnance n° 2017–1252 du 9 août 2017 portant transposition de la directive 2015/2366 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 concernant les services de paiement dans le marché intérieur est reporté au mercredi 25 juillet à la suite de l’examen du projet de loi portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique.
Acte est donné de cette demande.
4
Évolution du logement, de l’aménagement et du numérique
Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (projet n° 567, texte de la commission n° 631, rapport n° 630, tomes I et II, avis nos 604, 606 et 608).
Dans la discussion du texte de la commission, nous en sommes parvenus, au sein du chapitre III du titre III, à l’amendement portant article additionnel après l’article 53 quater C.
TITRE III (SUITE)
RÉPONDRE AUX BESOINS DE CHACUN ET FAVORISER LA MIXITÉ SOCIALE
Chapitre III (suite)
Améliorer les relations locataires bailleurs et favoriser la production de logements intermédiaires
Article additionnel après l’article 53 quater C
Mme la présidente. L’amendement n° 323 rectifié ter, présenté par Mme Imbert, MM. Pellevat, de Nicolaÿ et Vaspart, Mme Di Folco, MM. Mouiller, Morisset, Lefèvre, H. Leroy et Cornu, Mmes Morhet-Richaud et L. Darcos, MM. D. Laurent, Savary, Pierre et Milon, Mmes Deseyne, Bonfanti-Dossat, Garriaud-Maylam, Deroche et M. Mercier, M. Charon, Mme Lamure et MM. Longuet, Laménie et Genest, est ainsi libellé :
Après l’article 53 quater C
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 est ainsi modifiée :
1° Au c de l’article 4, les mots : « l’ordre de prélèvement automatique sur le compte du locataire ou » sont supprimés ;
2° Le neuvième alinéa de l’article 45 est supprimé.
La parole est à M. Antoine Lefèvre.
M. Antoine Lefèvre. Ma collègue Corinne Imbert, qui est retenue par la mission commune d’information sur le développement de l’herboristerie, m’a demandé de défendre cet amendement.
La principale hantise du propriétaire immobilier demeure le loyer impayé. En effet, on note une augmentation exponentielle de ce phénomène ces dernières années. Dans certains cas, la procédure d’expulsion qui en découle peut n’aboutir que trois ans plus tard.
Pendant ce temps, le propriétaire ne perçoit plus de loyer, mais doit continuer à régler ses mensualités de crédit, les charges du logement et les frais liés à la procédure.
Ces logements représentent bien souvent un complément de revenu indispensable pour les propriétaires. C’est pourquoi il est urgent d’encourager la location de logements en améliorant les garanties de paiement des loyers. À ce titre, le présent amendement vise à instaurer un prélèvement à la source des loyers par un organisme bancaire. Cette procédure serait mise en œuvre sur l’initiative du propriétaire et permettrait aux deux parties de sécuriser le paiement du loyer. En effet, le locataire serait immédiatement prélevé de son loyer après la perception de ses revenus. Ainsi, il ne s’exposerait plus au risque de ne pouvoir honorer son loyer.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur de la commission des affaires économiques. La commission vous demande de bien vouloir retirer votre amendement, monsieur Lefèvre, faute de quoi elle y sera défavorable.
En effet, le bailleur ou son mandataire ne peut en aucune façon obliger le locataire à utiliser le prélèvement bancaire. Même s’il paraît effectivement souhaitable d’imposer ce mode de paiement ou, en tout cas, d’inciter un certain nombre de locataires à passer à un tel prélèvement, aucune obligation ne peut leur être imposée.
Le locataire doit conserver le libre choix de la manière dont il s’acquitte de son dû, sa seule obligation légale étant de payer le loyer et les charges aux termes convenus.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jacques Mézard, ministre de la cohésion des territoires. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement dont le dispositif, s’il entrait en vigueur, serait contraire au principe de liberté contractuelle.
Je rappelle en outre que nombre de locataires ou de locataires potentiels ne peuvent accéder à un compte bancaire ou postal. Il s’agirait donc d’une mesure totalement déséquilibrée et contraire à nos principes traditionnels.
M. Antoine Lefèvre. Je retire mon amendement, madame la présidente !
Mme la présidente. L’amendement n° 323 rectifié ter est retiré.
Article 53 quater D (nouveau)
Au p de l’article 4 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986, les mots : « frais de relance » sont remplacés par les mots : « frais de première relance ».
Mme la présidente. L’amendement n° 234, présenté par Mme Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Fabien Gay.
M. Fabien Gay. La commission a inséré dans le texte un article 53 quater D, qui vise à limiter la gratuité des frais de relance à la première relance pour loyers impayés.
Autrement dit, la première relance envoyée reste à la charge du bailleur, alors que la ou les relances suivantes seront désormais à la charge du locataire. Les membres de notre groupe sont absolument opposés à cette mesure qui vient déséquilibrer encore un peu plus les relations entre bailleurs et locataires.
Selon le rapport de la commission, le locataire de bonne foi n’est pas pénalisé et les débiteurs de mauvaise foi ne pourraient plus générer de frais de relance supportés par le bailleur. Mais un locataire dans l’incapacité de payer est-il forcément de mauvaise foi ? Nous ne le pensons pas !
Au contraire, en supprimant cet article, nous ferions cesser la stigmatisation et mettrions fin à une situation où on punit davantage celles et ceux qui ont le plus de difficultés à payer leur loyer et qui, hélas, reçoivent plus d’une relance pour loyers impayés.
Il apparaît pour le moins absurde et, de toute façon, inefficace de mettre des frais supplémentaires à la charge de personnes déjà en difficulté. L’impayé de loyer plonge aussi bien le locataire que le propriétaire dans une situation délicate, et aucun des deux n’a intérêt au pourrissement du problème. C’est pourquoi nous vous invitons à supprimer cet article.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. Sans surprise, la commission sera défavorable à l’amendement.
J’ai bien entendu l’argumentaire développé par notre collègue Fabien Gay, qui a d’ailleurs mentionné un passage du rapport de la commission.
Avec cet article, on a cherché, non pas à déséquilibrer les relations entre bailleurs et locataires, mais à rééquilibrer ces relations, après que la loi ALUR les a déstabilisées. C’est pourquoi on a considéré que le locataire débiteur ne devait pas supporter le coût de la première relance, mais acquitter son dû pour les relances ultérieures. Il faut en tout cas mettre en place un certain nombre de moyens de prévention qui lui permettent, au regard des difficultés économiques ou matérielles qu’il peut rencontrer, d’éviter de recevoir plusieurs relances et, donc, de tomber dans une certaine spirale.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jacques Mézard, ministre. Le Gouvernement sera favorable à cet amendement.
En effet, nous ne pensons pas qu’il soit opportun d’entrer dans un système qui déséquilibre la situation actuelle. Ce n’est pas le montant des frais de relance en tant que tel qui va pousser le locataire en difficulté à régler ses loyers. La situation actuelle me paraît équilibrée et il ne serait pas judicieux de la modifier.
Mme la présidente. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.
M. Fabien Gay. J’ai bien entendu les propos de Mme la rapporteur, mais de quoi parlons-nous ?
Nous parlons de gens qui ont des difficultés à payer leur loyer. Personnellement, je l’ai constaté autour de moi : quand on est dans cette spirale, que l’on commence à ne plus pouvoir payer une facture, puis deux factures, puis trois, et quand commencent à s’accumuler des frais de dossier, des relances avec pénalités pour frais d’avocat, on ne s’en sort plus ! On ne répond plus !
Les lettres s’empilent et, comme l’a dit hier M. le ministre, on ne va parfois même plus chercher le courrier recommandé à La Poste, parce que l’on connaît déjà les mauvaises nouvelles qui arrivent.
J’entends vos arguments, madame la rapporteur, mais votre article déséquilibre vraiment le rapport entre bailleurs et locataires. Une relance peut arriver vite, une deuxième très vite aussi. En l’espace de deux ou trois mois seulement, on peut déjà avoir la tête sous l’eau !
Alors que faire ? On ne peut pas laisser s’installer une telle situation, ni pour le locataire ni pour le propriétaire. Si on décide de voter l’article, tel qu’il est rédigé aujourd’hui, ces situations que nous connaissons tous dans nos territoires vont empirer et s’accumuler.
Il faut quand même le dire : la situation économique dans laquelle nous sommes à cause de la politique générale du Gouvernement ne va pas aller en s’améliorant pour un certain nombre de ménages français. Il faut l’avoir en tête, parce que ce dont nous débattons aujourd’hui n’est pas déconnecté du reste de la politique générale. Cet article ne va pas dans le bon sens et va continuer à aggraver les problèmes, alors que nous pourrions peut-être alerter les personnes concernées et suivre un autre chemin, comme aider ces personnes, par exemple, avant de leur mettre la tête sous l’eau.
Je demande que chacune et chacun d’entre nous prenne le temps de réfléchir à ce sujet – il semble que la présidente de la commission souhaite me répondre, je m’en réjouis (Sourires.) – et s’exprime librement parce que, contrairement à ce que vous pourriez laisser entendre, madame la rapporteur, cet article ne contribuera pas du tout à arranger les choses.
Mes chers collègues, le propriétaire ne récupérera pas son argent de toute façon ! Ne laissons pas penser que c’est envisageable !
Mme la présidente. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Mon cher collègue, je ne veux pas vous répondre d’une façon particulière et individuelle, mais je veux réagir à vos propos.
On parle évidemment de situations difficiles et complexes, que tous ceux qui sont sur ces travées et qui ont été élus locaux connaissent par cœur.
En fait, l’article que vous voulez supprimer est anecdotique par rapport à la problématique. Le problème que vous soulevez concerne le manque de prévention par rapport à des situations sociales qui se dégradent de plus en plus. Le signal qu’a voulu envoyer la commission des affaires économiques est tout petit : il est de l’ordre du symbolique.
Il consiste à dire que, quand il y a un bail, quand on est propriétaire, quand on est locataire, on a des responsabilités. Chacun a sa part d’obligations à respecter.
Il s’agit donc d’un signal, d’un petit rééquilibrage – pardon d’insister, monsieur le ministre –, d’un symbole. Chacun est responsable de sa part du contrat de location qu’est le bail.
Au-delà de cette question, il existe des problématiques en matière de prévention des impayés sur lesquelles, en revanche, on vous suivra, car un certain nombre de personnes sont dans un mauvais tourbillon.
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote.
M. Philippe Dallier. Ce que notre collègue Fabien Gay décrit correspond aux cas les plus difficiles et les plus dramatiques, mais il y a aussi les autres cas, ceux de personnes qui ne sont pas nécessairement de bonne foi !
Monsieur Gay, vous avez raison lorsqu’il s’agit des cas les plus compliqués : de toute façon, les sommes dues ne seront probablement pas recouvrées. J’ai presque envie de vous dire que, quelque part, vous vous inquiétez pour rien !
M. Fabien Gay. Bien sûr que non !
M. Philippe Dallier. Dans la seconde hypothèse, il faut faire comprendre à ceux qui ne sont pas tout à fait de bonne foi que les procédures peuvent s’enclencher.
En matière de prévention, vous le savez très bien, si les gens sont de bonne foi, il faut que le plus tôt possible, à la première difficulté pour payer le loyer, le dialogue s’instaure entre le bailleur et le locataire. C’est le résultat qu’il faudrait atteindre pour éviter que les gens ne finissent par s’enterrer !
Vous allez trop loin, mon cher collègue. Le petit signal qu’envoie la commission me semble en revanche bienvenu !
M. Fabien Gay. On peut l’envoyer sans lettre de relance !
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Personnellement, je suis très étonnée de ces petits signaux, qui vont peser très lourd pour tous ceux qui ont des très faibles ressources et qui sont en difficulté, mais qui auront un « effet zéro » sur les personnes dont les ressources sont correctes.
Comme on l’a vu quand on a discuté de la garantie universelle des loyers, la GUL, lorsque les locataires sont modestes, ils ont un mal fou à remettre les compteurs à zéro et à rembourser à partir du troisième mois d’impayés. À l’inverse, ceux qui sont de mauvaise foi parviennent toujours à rembourser, évidemment.
Franchement, je ne vois pas en quoi ce signal qui, encore une fois, sera très lourd à porter pour des gens modestes, qui se sentent impuissants à régler leurs problèmes, va régler quoi que ce soit.
Il pénalise surtout le faible, alors que l’on pourrait envoyer là, tout de suite, immédiatement, des signaux très intéressants, menaçant de sanction les propriétaires qui ne restituent pas les cautions ou qui traînent à les rembourser.
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Cela ne me gênerait pas !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Cela ne vous gêne pas, sauf que ce n’est pas la mesure que vous proposez ! Tant que vous n’aurez pas équilibré les sanctions de part et d’autre, je n’accepterai pas qu’on touche aux plus faibles ! (M. Michel Dagbert applaudit.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.
Mme Cécile Cukierman. À travers les arguments qui viennent d’être échangés, on retrouve un débat assez fréquemment abordé lorsqu’on discute de la loi.
Finalement, fait-on la loi parce que quelques-uns la contournent ? Malheureusement, et sans remettre en cause ce que sont les êtres humains, il y aura toujours des personnes qui chercheront à la contourner. En vertu de ce principe, on sanctionne et on pénalise le plus grand nombre.
Ou alors, fait-on la loi pour protéger et pour sécuriser le plus grand nombre ?
À mon avis, cela donne à réfléchir. Pour avoir rencontré des personnes qui n’étaient pas en mesure de payer leur loyer, je peux vous dire que pour la plupart, ce n’est pas une gloire ! Ils ne s’en vantent pas et aimeraient au contraire avoir les moyens et les ressources de s’acquitter de leur dette !
On le voit bien avec cet article : finalement, on applique une double sanction à ceux qui ne sont pas en mesure de payer leur loyer.
Les arguments nous ramènent – même si je n’ai pas l’intention de rouvrir le débat maintenant – à un débat que nous avons eu au début de l’examen du texte : il y a certes des propriétaires et des locataires, mais il y a avant tout un droit humain, le droit au logement !
Comme vient de le rappeler notre collègue Marie-Noëlle Lienemann, ne donnons pas le sentiment, à l’issue de ce travail législatif, que certains seraient plus avantagés que les autres et que la loi serait faite pour les propriétaires, au détriment de toutes celles et tous ceux, ces 12 millions de Français, qui ont des difficultés en rapport avec le logement.
Il faut parvenir à un équilibre. Nous pensons qu’à travers cet article on bascule de l’autre côté. J’entends les arguments qui nous sont opposés, mais faisons bien attention à ne bâtir ni une France de propriétaires ni uniquement une France de locataires, mais bel et bien une France où chacune et chacun a accès à un toit et où le droit au logement est garanti pour toutes et tous !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à M. Pascal Savoldelli.
M. Pascal Savoldelli. Je n’ai pas forcément suivi l’intégralité de nos travaux, mais j’y ai beaucoup participé. Alors, avec une pointe d’humour – les personnes visées se reconnaîtront –, je dirai qu’il n’y a qu’un ministre, ou plutôt deux, MM. Mézard et Denormandie, et qu’après il n’y a que des parlementaires. Alors, si on veut poursuivre nos débats, que certaines ou certains restent à leurs places !
Autrement, mes chers collègues, n’oubliez pas quand même que l’on a voté le droit à l’erreur ! (M. Laurent Duplomb s’exclame.) On en a débattu ici et considéré qu’il fallait un droit à l’erreur vis-à-vis de la CAF ou des impôts.
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Vous oubliez que l’article maintient la gratuité des frais de première relance !
M. Pascal Savoldelli. Pour les entreprises, on a évoqué un droit à l’erreur sur le minimum salarial ou le temps de travail.
Franchement, on voudrait que tous les locataires soient solvables, mais je rappellerais – puisque nous avons souvent ce genre de débats même si, pour ce projet de loi, on nous renvoie à l’examen de la loi de finances – que la dette publique dans notre pays représente à peu près 90 % du PIB, quand la dette privée atteint 143 % du PIB. Se pose donc un problème de solvabilité.
Ici, nous sommes face à un double enjeu : ce problème de solvabilité touche évidemment des locataires en extrême difficulté, mais peut aussi frapper les bailleurs. Il faut donc vraiment voter cet amendement !
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 53 quater D.
(L’article 53 quater D est adopté.)
Article 53 quater
I. – Après le a de l’article 14 de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 réglementant les conditions d’exercice des activités relatives à certaines opérations portant sur les immeubles et les fonds de commerce, il est inséré un a bis A ainsi rédigé :
« a bis A) Pour toute personne d’utiliser la dénomination “agent immobilier”, “syndic de copropriété” ou “administrateur de biens” sans être titulaire de la carte instituée par l’article 3 ; ».
II (nouveau). – Au dernier alinéa de l’article 4 de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 réglementant les conditions d’exercice des activités relatives à certaines opérations portant sur les immeubles et les fonds de commerce, les mots : « de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové » sont remplacés par les mots : « du décret en Conseil d’État mentionné au premier alinéa du présent article ». – (Adopté.)
Article 53 quinquies
(Supprimé)
TITRE IV
AMÉLIORER LE CADRE DE VIE
Chapitre Ier
Revitalisation des centres-villes
Article 54
I. – Le titre préliminaire du livre III du code de la construction et de l’habitation est ainsi modifié :
1° L’intitulé du chapitre III est complété par les mots : « et opérations de revitalisation de territoire » ;
2° Le même chapitre III est complété par un article L. 303-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 303-2. – I. – Les opérations de revitalisation de territoire ont pour objet la mise en œuvre d’un projet global de territoire destiné à adapter et moderniser le parc de logements et de locaux commerciaux et artisanaux ainsi que le tissu urbain de ce territoire pour améliorer son attractivité, lutter contre la vacance des logements et des locaux commerciaux et artisanaux ainsi que contre l’habitat indigne, réhabiliter l’immobilier de loisir, valoriser le patrimoine bâti et réhabiliter les friches urbaines, dans une perspective de mixité sociale, d’innovation et de développement durable.
« Ces opérations donnent lieu à une convention entre l’État, ses établissements publics intéressés, un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre et tout ou partie de ses communes membres, ainsi que, le cas échéant, le département, la région et toute personne publique ou tout acteur privé susceptible d’apporter un soutien ou de prendre part à la réalisation des opérations prévues par la convention.
« La possibilité pour une des entités mentionnées au deuxième alinéa d’être signataire de la convention est subordonnée à la condition que cette adhésion ne soit pas susceptible de la mettre ultérieurement en situation de conflit d’intérêts.
« I bis. – La convention définit le projet urbain, économique et social de revitalisation du territoire concerné, favorisant la mixité sociale, le développement durable, la valorisation du patrimoine et l’innovation. Elle délimite le périmètre des secteurs d’intervention, parmi lesquels figurent un ou plusieurs centres-villes des communes membres de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre signataire, caractérisés par au moins deux des éléments suivants :
« 1° (nouveau) Une forte densité commerciale, exprimée par tout indicateur pertinent intégré à la base de données mentionnée à l’article L. 751-9 du code de commerce, et d’entreprises de l’artisanat commercial ou de service, mesurée grâce aux informations détenues par l’Institut national de la statistique et des études économiques ou les réseaux consulaires ;
« 2° (nouveau) La présence d’un ou de plusieurs monuments remarquables ouverts au public illustrant une centralité par leur fonction administrative, économique ou culturelle ;
« 3° (nouveau) Une forte densité d’un habitat ancien antérieur au vingtième siècle ou, dans les départements et collectivités d’outre-mer, antérieur à 1980.
« La convention précise sa durée, le calendrier, le plan de financement des actions prévues et leur répartition dans les secteurs d’intervention délimités. Elle prévoit également les conditions dans lesquelles ces actions peuvent être déléguées à des opérateurs.
« Le cas échéant, une concertation publique est engagée à l’initiative de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre concerné préalablement à la signature de la convention mentionnée au deuxième alinéa du présent I.
« Le représentant de l’État dans le département informe régulièrement les députés et sénateurs élus dans le département, le président du conseil départemental et le président du conseil régional sur la préparation et la conduite des opérations de revitalisation de territoire menées dans le département, en présentant notamment les actions engagées dans le cadre de la convention et les résultats obtenus.
« II. – Une convention d’opération de revitalisation de territoire comprend tout ou partie des actions d’amélioration de l’habitat prévues à l’article L. 303-1. Lorsqu’elle comprend l’ensemble des dispositions mentionnées aux a à e du même article L. 303-1, elle tient lieu de convention d’opération programmée d’amélioration de l’habitat au sens dudit article L. 303-1.
« La convention d’opération de revitalisation de territoire prévoit également tout ou partie des actions suivantes :
« 1° Un dispositif d’intervention immobilière et foncière contribuant à la revalorisation des îlots d’habitat vacant ou dégradé et incluant notamment des actions d’acquisition, de travaux et de portage de lots de copropriété ;
« 2° Un plan de relogement et d’accompagnement social des occupants, avec pour objectif prioritaire leur maintien au sein du même quartier requalifié ;
« 3° L’utilisation des dispositifs coercitifs de lutte contre l’habitat indigne ;
« 4° Des actions en faveur de la transition énergétique du territoire, notamment de l’amélioration de la performance énergétique du parc immobilier et de la végétalisation urbaine et des bâtiments ;
« 5° Un projet social, comportant notamment des actions en faveur de la mixité sociale et d’adaptation de l’offre de logement, de services publics et de services de santé aux personnes en perte d’autonomie ;
« 6° Des actions ou opérations d’aménagement, au sens de l’article L. 300-1 du code de l’urbanisme, contribuant à l’aménagement des espaces et des équipements publics de proximité et prenant en compte les problèmes d’accessibilité, de desserte des commerces et des locaux artisanaux de centre-ville et de mobilité ainsi que l’objectif de localisation des commerces en centre-ville ;
« 6° bis Des dispositifs d’intervention immobilière et foncière visant la reconversion ou la réhabilitation des sites industriels et commerciaux vacants ainsi que des sites administratifs et militaires déclassés ;
« 7° Des actions destinées à moderniser ou à créer des activités ou des animations économiques, commerciales, artisanales, touristiques ou culturelles, sous la responsabilité d’un opérateur ;
« 8° Des actions ou opérations favorisant, en particulier en centre-ville, la création, l’extension, la transformation ou la reconversion de surfaces commerciales ou artisanales, au sens de l’article L. 325-1 du code de l’urbanisme ;
« 8° bis (nouveau) Des actions favorisant la diversité, le développement et la modernisation des activités mentionnées à l’article L. 214-2-1 du code de l’urbanisme ;
« 9° Un engagement de la ou des autorités compétentes en matière de plan local d’urbanisme de procéder aux modifications des documents d’urbanisme, approuvés ou en cours d’approbation, nécessaires à la mise en œuvre des plans, projets ou actions prévus par la convention. En cas de transfert de la compétence en matière de plan d’urbanisme à l’établissement public de coopération intercommunale, en application de l’avant-dernier alinéa de l’article L. 5211-17 du code général des collectivités territoriales, l’établissement public de coopération intercommunale se substitue à la ou aux communes concernées par cet engagement.
« L’opération de revitalisation de territoire peut donner lieu à l’instauration du droit de préemption urbain renforcé prévu à l’article L. 211-4 du code de l’urbanisme et à l’instauration du droit de préemption sur les fonds artisanaux, les fonds de commerce, les baux commerciaux et les terrains faisant l’objet de projets d’aménagement commercial prévu à l’article L. 214-1 du même code. Le droit de préemption prévu au même article L. 214-1 peut être délégué à l’opérateur chargé de la mise en œuvre des actions prévues aux 7° ou 8° du présent II.
« Les actions prévues dans une convention de revitalisation de territoire peuvent figurer parmi les actions inscrites dans les contrats de plan prévus à l’article 11 de la loi n° 82-653 du 29 juillet 1982 portant réforme de la planification. » ;
3° Le chapitre IV est abrogé.
I bis. – À la dernière phrase du premier alinéa de l’article L. 213-2 du code de l’urbanisme, la référence : « L. 304-1 » est remplacée par la référence : « L. 303-2 ».
II. – Après l’article L. 752-1 du code de commerce, sont insérés des articles L. 752-1-1 et L. 752-1-2 ainsi rédigés :
« Art. L. 752-1-1 (nouveau). – Par dérogation à l’article L. 752-1 du code de commerce, ne sont pas soumis à autorisation d’exploitation commerciale les projets mentionnés aux 1° à 6° du même article L. 752-1 dont la surface de vente ne dépasse pas 2 500 mètres carrés et dont l’implantation est prévue dans un centre-ville compris dans l’un des secteurs d’intervention d’une opération de revitalisation de territoire mentionnée à l’article L. 303-2 du code de la construction et de l’habitation. Lorsque ce centre-ville est situé dans une commune couverte par un document d’aménagement artisanal et commercial pris en application des articles L. 141-17 ou L. 151-6 du code de l’urbanisme, les projets mentionnés à la phrase précédente ne sont pas soumis à autorisation d’exploitation commerciale dès lors que leur surface de vente ne dépasse pas 5 000 mètres carrés.
« Toutefois, le maire d’une commune dont le centre-ville est compris dans l’un des secteurs d’intervention d’une opération de revitalisation de territoire ou le président de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre compétent en matière d’urbanisme dont cette commune est membre peut proposer au conseil municipal ou à l’organe délibérant de cet établissement de saisir, par délibération motivée, la commission départementale d’aménagement commercial afin qu’elle statue sur la conformité aux critères énoncés à l’article L. 752-6 du code de commerce des projets mentionnés au premier alinéa du présent article dont la surface de vente est supérieure aux seuils mentionnés à l’article L. 752-1 du même code.
« Art. L. 752-1-2 (nouveau). – Le représentant de l’État dans le département suspend par arrêté, à la demande motivée de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre ou des communes signataires d’une convention d’opération de revitalisation de territoire mentionnée à l’article L. 303-2 du code de la construction et de l’habitation, l’enregistrement et l’examen en commission départementale d’aménagement commercial des demandes d’autorisation d’exploitation commerciale relatives aux projets mentionnés aux 1° à 5° et au 7° de l’article L. 752-1 du présent code dont l’implantation est prévue sur le territoire d’une ou de plusieurs communes signataires de cette convention mais hors des secteurs d’intervention de l’opération, lorsque ces projets, compte tenu de leurs caractéristiques et de l’analyse des données existantes sur leurs zones de chalandise, sont de nature à compromettre les objectifs de l’opération, au regard notamment du niveau et de l’évolution des taux de logements vacants, de vacance commerciale et de chômage dans les centres-villes et les territoires concernés par la dite opération.
« Le représentant de l’État dans le département peut également suspendre par arrêté, après avis du ou des établissements publics de coopération intercommunale et des communes concernés, l’enregistrement et l’examen en commission départementale d’aménagement commercial des demandes d’autorisation relatives aux projets mentionnés aux mêmes 1° à 5° et 7° qui sont situés dans des communes qui n’ont pas signé la convention mais sont membres de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre signataire de la convention ou d’un établissement public de coopération intercommunale limitrophe de celui-ci, lorsque ces projets, compte tenu de leurs caractéristiques et de l’analyse des données existantes sur leurs zones de chalandise, sont de nature à compromettre gravement les objectifs de l’opération, au regard notamment du niveau et de l’évolution des taux de logements vacants, de vacance commerciale et de chômage dans les centres-villes et les territoires concernés par la dite opération. Lorsque les demandes d’autorisation concernent des implantations sur le territoire d’un établissement public de coopération intercommunale limitrophe situé dans un autre département, la mesure de suspension est prise par arrêté conjoint des représentants de l’État dans chacun des deux départements.
« La suspension de l’enregistrement et de l’examen des demandes prévue aux deux premiers alinéas du présent article est d’une durée maximale de trois ans. Le représentant de l’État dans le département peut, le cas échéant, après avis de l’établissement public de coopération intercommunale et des communes signataires de la convention mentionnée à l’article L. 303-2 du code de la construction et de l’habitation, la proroger d’un an.
« Un décret en Conseil d’État fixe les conditions et modalités d’application du présent article. »
III. – (Non modifié) Les conventions de mise en œuvre des opérations de requalification des quartiers anciens dégradés conclues sur le fondement de l’article L. 304-1 du code de la construction et de l’habitation, dans sa rédaction antérieure à la présente loi, demeurent en vigueur. Ces opérations peuvent être transformées en opérations de revitalisation de territoire dans le cadre d’un avenant à la convention initiale.
IV. – L’article L. 752-1-2 du code de commerce est applicable aux projets dont la procédure d’autorisation est régie par l’article 28 de la loi n° 96-987 du 14 novembre 1996 relative à la mise en œuvre du pacte de relance pour la ville.