M. le président. La parole est à M. Michel Canevet, pour explication de vote.
M. Michel Canevet. J’entends bien les explications de M. le ministre et de M. le rapporteur. Toutefois, je ne suis pas totalement convaincu, dans la mesure où un certain nombre d’informations sont d’ores et déjà demandées et transmises à l’administration fiscale, notamment le statut des acteurs, qui sont des professionnels ou des particuliers. Ainsi, pourquoi transmettre à l’administration fiscale un très grand nombre d’informations dont on n’a pas besoin ?
En outre, cela pose un problème au regard des libertés individuelles. En effet, retracer tout ce qui est acheté par les uns et les autres et « trimbaler » ces informations dans différents fichiers qui vont on ne sait où, cela nous interpelle ! Pourquoi veut-on savoir qui a effectué telle et telle transaction ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 4, modifié.
(L’article 4 est adopté.)
Article additionnel après l’article 4
M. le président. L’amendement n° 69, présenté par MM. Canevet et Delcros et Mme Saint-Pé, est ainsi libellé :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de commerce est ainsi modifié :
1° L’article L. 110-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« N’est pas considéré comme un acte de commerce la vente par un particulier de biens meubles personnels et usagés. » ;
2° Le dernier alinéa du I de l’article L. 310-2 est remplacé par trois alinéas ainsi rédigés :
« Les particuliers non-inscrits au registre du commerce et des sociétés sont autorisés :
« – À participer aux ventes au déballage en vue de vendre exclusivement des objets personnels et usagés deux fois par an au plus ;
« – À réaliser des ventes d’objets personnels et usagés depuis des plateformes en ligne. »
La parole est à M. Michel Canevet.
M. Michel Canevet. Cet amendement vise à préciser dans le code de commerce ce qu’est la vente par un particulier de biens meubles personnels et usagés.
Il s’agit également de dissocier la vente par des plateformes des ventes au déballage. Il faut que les choses soient plus claires dans le code de commerce à cet égard. Pour ce qui concerne la fiscalisation, l’amendement renvoie à l’article 150 UA du code général des impôts.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur. La définition de la vente de biens d’occasion n’est pas totalement claire. Sont exonérées les ventes de biens de meubles meublants et de véhicules d’occasion.
La définition actuelle repose notamment sur le fait que le bien n’a pas été acheté en vue d’être revendu et qu’il a fait l’objet d’un certain usage. Par ailleurs, sa valeur doit être inférieure à 5 000 euros, hormis dans le cas d’une exonération. Ainsi, une voiture dont le prix est supérieur à 5 000 euros est exonérée par principe. Idem pour les meubles meublants et les appareils ménagers.
Faut-il pour autant remettre en cause cette définition qui, certes, résulte de la combinaison de plusieurs articles ? Cela me paraît dangereux, notamment par rapport au critère objectif, sans doute en soi problématique, du seuil de 5 000 euros. J’ai peur que cela ne donne lieu à des fraudes.
C’est la raison pour laquelle je demande le retrait de cet amendement, ne voyant pas l’utilité de redéfinir aujourd’hui la vente d’occasion. Peut-être la définition actuelle n’est-elle pas totalement adaptée par rapport aux ventes au déballage, mais je ne suis pas certain que la définition proposée le soit plus.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, pour compléter ce que vient de dire M. le rapporteur, j’ajoute qu’il serait pour nous préjudiciable en termes de cohérence juridique d’introduire des exceptions non exhaustives au sein de l’article L. 110–1 du code de commerce qui définit l’acte de commerce.
Par ailleurs, l’exception introduite portant sur les ventes par un particulier de biens meubles personnels et usagers nous semble trop large, puisque les ventes au déballage sont considérées en l’état du droit comme des actes de commerce si elles sont d’un nombre supérieur à deux par an.
Ainsi, à l’instar de M. le rapporteur, je demande le retrait de cet amendement ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. Michel Canevet. Je retire cet amendement, monsieur le président !
M. le président. L’amendement n° 69 est retiré.
Article 4 bis (nouveau)
I. – Le VIII de la première sous-section de la section II du chapitre premier du titre premier de la première partie du livre premier du code général des impôts est complété par un 8 ainsi rédigé :
« 8 : Régime applicable aux revenus perçus par l’intermédiaire de plateformes en ligne
« Art. 155 C. – I. – Sont soumis au régime défini au présent article les redevables de l’impôt sur le revenu qui exercent, par l’intermédiaire d’un ou de plusieurs opérateurs de plateforme en ligne au sens du 2° du I de l’article L. 111-7 du code de la consommation, une activité dont les revenus relèvent de la catégorie des revenus fonciers, des bénéfices industriels et commerciaux ou des bénéfices des professions non commerciales.
« II. – 1. Pour les redevables qui relèvent de l’article 32, de l’article 50-0 ou de l’article 102 ter du présent code, le montant cumulé de la réfaction et des abattements mentionnés au 1 des mêmes articles 32, 50-0 ou 102 ter et appliqués au montant brut des recettes annuelles provenant des activités mentionnées au I du présent article ne peut pas être inférieur à 3 000 €.
« 2. Pour les redevables qui ne relèvent pas des dispositions desdits articles 32, 50-0 ou 102 ter, le montant brut des recettes annuelles provenant des activités mentionnées au I du présent article pris en compte pour la détermination du revenu imposable est diminué d’un abattement forfaitaire de 3 000 €, et seule la fraction des frais et charges supérieure à 3 000 € peut être déduite.
« III. – Le présent article est applicable aux seuls revenus mentionnés sur le document prévu au premier alinéa du 2° de l’article 242 bis, et à condition que celui-ci soit adressé au redevable et à l’administration dans les conditions prévues au 2° et 3° du même article. »
II. – Ne sont pas affiliées au régime d’assurance maladie et d’assurance maternité des travailleurs indépendants non agricoles, sauf option contraire de leur part, les personnes dont les recettes annuelles brutes provenant de l’exercice d’une ou de plusieurs activités par l’intermédiaire d’un ou de plusieurs opérateurs de plateforme en ligne au sens du 2° du I de l’article L. 111-7 du code de la consommation n’excèdent pas 3 000 €.
Dans le cas où ces personnes sont par ailleurs affiliées au régime d’assurance maladie et d’assurance maternité des travailleurs indépendants des professions non agricoles en application du code de la sécurité sociale, les revenus qu’elles tirent de l’exercice d’une activité ou de plusieurs activités par l’intermédiaire d’un ou de plusieurs opérateurs de plateforme en ligne sont présumés constituer des revenus à caractère professionnel seulement s’ils proviennent d’activités de même nature que leur autre ou que leurs autres activités professionnelles, ou qui s’y rattachent directement, ou qui sont exercées avec les mêmes moyens que celles-ci.
III. – La perte de recettes éventuelle résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
IV. – La perte de recettes éventuelle résultant pour les collectivités territoriales des I et II est compensée, à due concurrence, par une augmentation de la dotation globale de fonctionnement.
V. – La perte de recettes éventuelle résultant pour l’État du IV est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
VI. – La perte de recettes éventuelle résultant pour les organismes de sécurité sociale des I et II est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
M. le président. L’amendement n° 101, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. L’article 4 bis nouveau vise à rendre redevables de l’impôt sur le revenu les contribuables qui exercent, par l’intermédiaire d’un ou de plusieurs opérateurs de plateforme, une activité dont les revenus relèvent de la catégorie des revenus fonciers, des bénéfices industriels et commerciaux ou des bénéfices des professions non commerciales, après application d’un abattement de 3 000 euros.
La mesure proposée crée des différences de traitement non justifiées par des différences objectives de situation et encourt, à ce titre, un risque de censure par le Conseil constitutionnel. En effet, la seule circonstance que des revenus soient perçus au travers d’une plateforme, et non pas directement, ne saurait justifier une différence dans le régime d’imposition à l’impôt sur le revenu.
La mesure conditionne l’avantage fiscal, c’est-à-dire l’exonération à concurrence de 3 000 euros, à une déclaration par la plateforme. Or le recours à un tiers déclarant ne peut pas justifier à lui seul l’exonération du revenu déclaré.
En outre, le mécanisme créé par cet article ne concerne pas uniquement les petits revenus occasionnels et accessoires réalisés par des particuliers. En effet, l’abattement de 3 000 euros permet une exonération en faveur de toutes les entreprises, pourvu qu’elles exercent leur activité via une plateforme.
Toutes ces raisons ont conduit le Gouvernement à demander la suppression de cet article.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur. Le Gouvernement souhaite revenir sur le fameux abattement de 3 000 euros. Sa position est parfaitement bien connue de la commission des finances. Elle est adoptée chaque année en loi de finances, au nom d’arguments que nous connaissons et que nous nous apprêtons à combattre.
Tout d’abord, il faut le remarquer, ce n’est pas la France qui a eu cette idée. En effet, d’autres pays mettent en œuvre une telle exonération, comme le Royaume-Uni, où elle est de 2 000 livres, la Belgique, où une flat tax est appliquée au-delà de 6 000 euros, l’Italie ou le Danemark.
Quelle en est la raison ? Sans doute s’agit-il de distinguer entre ce qui est assimilable à un remboursement de frais et ce qui relève d’un revenu accessoire. Au-delà d’un certain montant, on considère qu’il s’agit d’une activité récurrente qui doit être taxée. En deçà de ce montant, on estime qu’il s’agit de remboursement de frais, ce qui justifie l’abattement.
J’ai bien entendu les arguments développés par M. le secrétaire d’État, relatifs à l’égalité entre les contribuables. Dans la mesure où il ne s’agit pas d’exonérer un revenu de par sa nature, mais en fonction des modalités de déclaration, permettez-moi de prendre l’exemple des organismes de gestion agréés.
Ainsi, quand on adhère à un organisme de gestion agréé, les bénéfices industriels et commerciaux ne sont pas majorés de 25 %. Pour le non-adhérent, c’est 25 % de plus ; pour l’adhérent, c’est 25 % de moins. L’imposition est donc bien liée à des modalités de déclaration ! Il n’y a là aucun principe d’égalité, puisqu’il s’agit des mêmes revenus. Selon les modalités de déclaration et selon le fait qu’on est adhérent ou non à un centre de gestion agréé, il y a 25 % de différence.
Il faudra m’expliquer comment cela tient constitutionnellement. Sans doute est-ce lié à l’objectif de valeur constitutionnelle de lutte contre la fraude et l’érosion fiscales.
C’est précisément l’objectif de cet abattement de 3 000 euros, sur lequel le Gouvernement veut revenir.
La commission émet donc un avis très défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Le principe des organismes de gestion agréés, que M. le rapporteur a évoqués, n’est pas de faire bénéficier les adhérents d’un abattement ; ce sont les autres qui subissent une majoration !
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur. Le résultat est le même !
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Fiscalement, ce n’est pas la même démarche ! C’est une raison supplémentaire de maintenir notre amendement de suppression de l’article 4 bis.
M. le président. La parole est à M. Bernard Lalande, pour explication de vote.
M. Bernard Lalande. La commission des finances a réalisé un travail considérable sur la fiscalité des plateformes collaboratives. Le dispositif retenu présente l’avantage exceptionnel d’ouvrir le e-commerce à tous les citoyens, sans taxation.
Mais voilà que l’on voudrait taxer les utilisateurs dès le premier euro ; c’est nouveau ! Autrement dit, on reprend les propositions que la commission des finances avait formulées, mais en retirant ce qui en faisait la substantifique moelle. Les débats avec les plateformes collaboratives ne seraient plus possibles.
Je soutiens la position de la commission des finances, qui s’est prononcée à l’unanimité contre cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l’article 4 bis.
(L’article 4 bis est adopté.)
Article 4 ter (nouveau)
I. – Après l’article 283 du code général des impôts, il est inséré un article 283 bis ainsi rédigé :
« Art. 283 bis – I. – Sont soumis aux dispositions du présent article, quel que soit leur lieu d’établissement, les opérateurs de plateforme en ligne au sens du 2° du I de l’article L. 111-7 du code de la consommation, dont l’activité dépasse le seuil de nombre de connexions défini au premier alinéa de l’article L. 111-7-1 du même code.
« II. – Lorsqu’il existe des présomptions qu’une personne résidant en France ou réalisant des livraisons de biens ou des prestations de service au sens des articles 258 à 259 D du présent code et qui exerce son activité par l’intermédiaire d’une plateforme en ligne se soustrait à ses obligations en matière de déclaration ou de paiement de la taxe sur la valeur ajoutée, l’administration peut signaler cette personne à l’opérateur de la plateforme en ligne, afin que celui-ci puisse prendre les mesures permettant à cette personne de régulariser sa situation.
« III. – Si les présomptions persistent après un délai d’un mois, l’administration peut mettre en demeure l’opérateur de plateforme en ligne de prendre les mesures mentionnées au II, ou à défaut, d’exclure la personne concernée de la plateforme en ligne.
« IV. – Si, en l’absence de mise en œuvre des mesures mentionnées au III après un délai d’un mois, les présomptions persistent, la taxe est solidairement due par l’opérateur de plateforme en ligne.
« V. – Les modalités d’application du présent article sont définies par arrêté du ministre chargé du budget.
II. – Après l’article 293 A bis du code général des impôts, il est inséré un article 293 A ter ainsi rédigé :
« Art. 293 A ter – I. – Sont soumis aux dispositions du présent article, quel que soit leur lieu d’établissement, les opérateurs de plateforme en ligne au sens du 2° du I de l’article L. 111-7 du code de la consommation, dont l’activité dépasse le seuil de nombre de connexions défini au premier alinéa de l’article L. 111-7-1 du même code.
« II. – Lorsqu’il existe des présomptions qu’une personne établie dans un État ou un territoire n’appartenant pas à l’Union européenne et qui exerce son activité par l’intermédiaire d’une plateforme en ligne se soustrait à ses obligations en matière de déclaration ou de paiement de la taxe sur la valeur ajoutée, l’administration peut signaler cette personne à l’opérateur de la plateforme en ligne, afin que celui-ci puisse prendre les mesures permettant à cette personne de régulariser sa situation.
« III. – Si les présomptions persistent après un délai d’un mois, l’administration peut mettre en demeure l’opérateur de plateforme en ligne de prendre les mesures mentionnées au II, ou à défaut, d’exclure la personne concernée de la plateforme en ligne.
« IV. – Si, en l’absence de mise en œuvre des mesures mentionnées au III après un délai d’un mois, les présomptions persistent, la taxe est solidairement due par l’opérateur de plateforme en ligne.
« V. – Les modalités d’application du présent article sont définies par arrêté du ministre chargé du budget. »
III. – Le présent article est applicable à compter du 1er janvier 2019. – (Adopté.)
Article 4 quater (nouveau)
I. – Après l’article 283 du code général des impôts, il est inséré un article 283 ter ainsi rédigé :
« Art. 283 ter – I. – Sont soumis aux dispositions du présent article, quel que soit leur lieu d’établissement, les opérateurs de plateforme en ligne au sens du 2° du I de l’article L. 111-7 du code de la consommation, dont l’activité dépasse le seuil de nombre de connexions prévu au premier alinéa de l’article L. 111-7-1 du même code.
« II. – Par dérogation aux dispositions de l’article 283, du troisième alinéa du 1 de l’article 293 A et de l’article 1695, l’opérateur d’une plateforme en ligne peut déclarer, collecter et acquitter la taxe sur la valeur ajoutée pour le compte des personnes effectuant des livraisons de biens ou des prestations de service au sens des articles 258 à 259 D et qui exercent leur activité par l’intermédiaire de cette plateforme, dès lors que l’acquéreur ou le preneur est établi ou a son domicile ou sa résidence habituelle en France.
« III. – Pour la mise en œuvre du II, l’opérateur de plateforme en ligne retient le montant de la taxe sur le montant brut payé par l’acquéreur ou le preneur, au moment de la transaction.
« Afin de calculer le montant de la retenue, le vendeur ou le prestataire communique à l’opérateur de plateforme en ligne les taux, ou le cas échéant les exonérations, applicables à l’opération. L’opérateur de plateforme en ligne s’assure que les informations communiquées par le vendeur ou le prestataire ne sont pas manifestement erronées.
« À défaut d’informations communiquées par le vendeur ou le prestataire, le montant de la retenue est égal au montant qui résulterait de l’application du taux prévu à l’article 278 au montant hors taxes de la transaction.
« IV. – Les opérateurs de plateforme en ligne qui mettent en œuvre les dispositions prévues au II ne peuvent être tenus pour solidairement responsables du paiement de la taxe sur la valeur ajoutée au sens du IV de l’article 283 bis et du IV de l’article 293 A ter.
« V. – Les modalités d’application du présent article ainsi que les modalités d’exigibilité et de liquidation de la taxe sont définies par décret du ministre chargé du budget. »
II. – Le I est applicable à compter du 1er janvier 2019, sous réserve de l’autorisation du Conseil de l’Union européenne prévue en application de l’article 395 de la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée. – (Adopté.)
Article 4 quinquies (nouveau)
I. – Le V de l’article 1754 du code général des impôts est complété par un 10 ainsi rédigé :
« 10. Les entreprises établies en France et liées, au sens du 12 de l’article 39, à l’entreprise à l’égard de laquelle l’administration exerce le droit de communication prévu au deuxième alinéa de l’article L. 81 du livre des procédures fiscales, sont solidairement responsables du paiement de l’amende prévue au premier alinéa de l’article 1734. » – (Adopté.)
Article 4 sexies (nouveau)
Le deuxième alinéa du II de l’article 45 de la loi n° 2017-1775 du 28 décembre 2017 de finances rectificative pour 2017 est ainsi rédigé :
« Art. L. 112-6-1 A. – Les opérateurs de plateforme en ligne au sens du 2° du I de l’article L. 111-7 du code de la consommation ne peuvent effectuer aucun paiement au profit de leurs utilisateurs par une valeur monétaire stockée sous forme électronique et utilisable au moyen d’un support physique au sens de l’article L. 315-9 du présent code, dès lors que ces utilisateurs résident en France ou qu’ils réalisent des ventes ou des prestations de services en France au sens des articles 258 à 259 D du code général des impôts. » – (Adopté.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Le Sénat vient d’adopter les articles 4 ter à 4 sexies, dont vous êtes à l’initiative, monsieur le rapporteur.
Au-delà du vote qui vient d’intervenir, le Gouvernement souhaite que les différentes étapes d’examen du texte soient l’occasion d’apporter un certain nombre de précisions.
Nous sommes réservés sur les articles qui viennent d’être adoptés, car les travaux en cours à l’échelon européen, notamment l’adoption du paquet e-commerce, nous paraissent de nature à répondre à beaucoup des préoccupations exprimées par le rapporteur, et ce dès 2021.
La lutte contre la fraude à la TVA en matière de ventes effectuées au profit de particuliers à travers la plateforme d’e-commerce vient de faire l’objet d’une directive, le 5 décembre dernier. Ce dispositif harmonisé nous paraît constituer la réponse pertinente pour s’attaquer au problème de la fraude à la TVA dans le domaine soit des importations de biens à destination de consommateurs finaux, soit des ventes à distance intracommunautaires. Les nouvelles règles garantissent le paiement de la TVA dans l’État membre du consommateur final. Cela permet de consolider la nouvelle approche en matière de perception de la TVA dans l’Union européenne déjà en place pour les prestations de services électroniques et de respecter un engagement central de la stratégie pour un marché unique numérique en Europe.
Par ailleurs, la directive prévoit que les plateformes de marché en ligne devront assumer la responsabilité de la perception de la TVA sur les ventes. J’ajoute que nous demandons aux plateformes de rendre publique et de communiquer sur l’identité des utilisateurs dès 2019 et d’assumer la responsabilité de perception sur les ventes réalisées sur leur plateforme par des sociétés établies dans des pays tiers auprès des consommateurs de l’Union européenne. Cela inclut notamment les ventes de biens déjà stockés par des entreprises de pays tiers dans des entrepôts au sein de l’Union, qui peuvent souvent être utilisés pour vendre frauduleusement des biens en franchise de TVA.
Les nouvelles règles s’imposeront donc aux États membres, et la directive sera impérativement transposée pour une entrée en vigueur le 1er janvier 2021. La Commission a proposé une révision du règlement relatif à la coopération administrative en matière de TVA, qui contient aussi un certain nombre d’avancées positives de nature à faciliter les échanges entre les États membres, et ce avec le soutien unanime du conseil lors de l’Ecofin du 22 juin 2018.
Dans ces conditions, l’instauration de dispositifs purement nationaux dans le domaine de perception de la TVA sur les opérations d’e-commerce ne nous semble pas souhaitable, ne serait-ce que parce que de tels dispositifs ne seraient pas en conformité avec la directive. Il nous paraît plus efficace de jouer collectif avec l’Union européenne.
En outre, le dispositif mis à la discussion nous paraît moins opportun et moins robuste que la solution retenue par la directive e-commerce. Celle-ci rend redevable de la taxe la plateforme qui facilite les ventes au sein de l’Union, qu’il s’agisse de ventes réalisées par des non établis en Europe ou, plus largement, de toute livraison de biens importés d’une valeur intrinsèque de moins de 150 euros.
Contrairement à la directive, le dispositif ne s’applique qu’à certaines plateformes, en l’occurrence celles qui ont plus de 5 millions de visiteurs par mois. Cela nous semble en réduire la portée.
Par ailleurs, vous proposez un dispositif qui repose sur l’existence de présomption du non-respect des obligations par un redevable de la TVA, qui peut être établi non seulement en France, mais aussi n’importe où dans le monde. Nous pensons que cette exigence peut rendre le dispositif potentiellement peu efficace, voire inefficace lorsque la plateforme et le vendeur sont hors Union européenne. Et nous craignons également qu’il ne soit peu lisible, la notion de présomption n’étant pas définie.
Sur le plan de la gestion fiscale, la mise en œuvre d’une telle procédure nous paraît extrêmement complexe au 1er janvier 2019, qu’il s’agisse de la détection des plateformes concernées par le dispositif ou de la détection des utilisateurs de ladite plateforme.
En conclusion, les travaux menés à l’échelon européen nous paraissent plus opportuns et plus efficaces que les dispositifs adoptés par la commission. Par conséquent, à ce stade du débat, nous tenions à exprimer les grandes réserves du Gouvernement sur ces articles et notre volonté de continuer à travailler sur le sujet dans le cadre de la navette.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur. Compte tenu de ce que je viens d’entendre, je reviens sur les articles 4 ter à 4 sexies, qui ont été adoptés à l’unanimité.
Monsieur le secrétaire d’État, je vous invite à visiter vos propres services et à écouter ce que disent les agents de la direction nationale d’enquêtes fiscales, la DNEF.
M. Michel Savin. Eh oui !
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur. Ils vous indiqueront que la fraude est massive, de l’ordre de plus de 1,2 milliard d’euros. C’est notamment le cas sur la plus grande plateforme.
Regardons nos téléphones : certains vendeurs n’ont même pas de numéro fiscal. Cela signifie que le risque de non-paiement de la TVA est tout de même très fort !
Plusieurs solutions s’offraient à nous. Nous pouvions effectivement attendre une action dans l’Europe. Mais, comme vous le savez, du fait de la règle de l’unanimité, nous avons parfois des déceptions à cet égard…
Nous pouvions aussi nous inspirer des exemples étrangers. Les Britanniques ont utilisé la technique de la responsabilité solidaire des plateformes à l’égard du paiement. Les résultats sont là. Je me suis rendu auprès du fisc britannique voilà deux ou trois ans. J’ai rappelé précédemment à M. Darmanin ce que j’y ai vu !
Comparons la situation de la France et celle du Royaume-Uni, en considérant le nombre de vendeurs enregistrés ; quand un vendeur n’a pas de numéro de TVA, c’est mauvais signe.
En France, le nombre de contrôles est assez limité. Avec 18 contrôles, on a recouvré 2, 018 millions d’euros, ce qui est assez faible. Et nous avons seulement 3 182 entreprises enregistrées ; certes, c’est mieux qu’en 2013, où il y en avait 569.
Au Royaume-Uni, à la suite de la mise en place du dispositif de responsabilité solidaire 27 550 entreprises ont demandé à être enregistrées, ce qui est considérable ! Elles n’étaient que 1 650 auparavant.