PRÉSIDENCE DE Mme Marie-Noëlle Lienemann

vice-présidente

Mme la présidente. La séance est reprise.

Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, pour une immigration maîtrisée, un droit d’asile effectif et une intégration réussie.

Dans la discussion du texte de la commission, nous en sommes parvenus aux amendements tendant à insérer un article additionnel après l’article 10 AA.

Article 10 AA (nouveau)
Dossier législatif : projet de loi pour une immigration maîtrisée, un droit d'asile effectif et une intégration réussie
Article additionnel après l'article 10 AA - Amendement n° 29 rectifié ter

Article additionnel après l’article 10 AA

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 78 rectifié, présenté par M. Karoutchi, Mmes L. Darcos et Canayer et M. Mouiller, est ainsi libellé :

Après l’article 10 AA

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 1113-1 du code des transports est complété par une phrase ainsi rédigée : « Le bénéfice de cette réduction tarifaire est subordonné à la régularité du séjour en France. »

La parole est à M. Roger Karoutchi.

M. Roger Karoutchi. Madame la présidente, monsieur le ministre d’État, cet amendement vise à répondre à la situation que connaît la région d’Île-de-France depuis quelques mois.

La présidente de région avait choisi de priver du bénéfice des réductions tarifaires les personnes en situation irrégulière et le conseil régional avait pris une décision en ce sens. Celle-ci a été appliquée durant un an, puis un recours a été formé, qui a conduit à son annulation.

Les tarifs en Île-de-France s’appliquent de manière classique à tout le monde, notamment le pass Navigo à tarif unique. Les salariés comme les fonctionnaires se voient rembourser la moitié de leurs frais de transport par leur entreprise ou par la fonction publique, mais beaucoup de gens modestes prennent également les transports publics et paient le tarif plein, sans réduction ni remboursement.

L’objet de cet amendement, par souci d’équité envers ceux qui paient le plein tarif, est de limiter le bénéfice de la réduction aux personnes en situation régulière. Je le dis tout de suite, les demandeurs d’asile ne sont pas concernés, car ils sont bien en situation régulière.

En revanche, on ne comprend pas pourquoi des gens qui sont en situation irrégulière depuis leur arrivée ou qui ont été déboutés du droit d’asile et se retrouvent en situation irrégulière à l’issue de la procédure auraient droit à une réduction tarifaire qui n’est pas généralisée et dont des habitants modestes d’Île-de-France ne bénéficient pas.

Nous entendons donc mettre tout le monde sur le même plan : si vous n’êtes pas en situation régulière, vous ne bénéficiez pas de la réduction.

Article additionnel après l'article 10 AA - aaendement n° 78 rectifié
Dossier législatif : projet de loi pour une immigration maîtrisée, un droit d'asile effectif et une intégration réussie
Article 10 A (Texte non modifié par la commission)

Mme la présidente. L’amendement n° 29 rectifié ter, présenté par Mme L. Darcos, MM. Karoutchi, Bazin et Dallier, Mme Primas, M. Hugonet, Mmes Dumas, Procaccia et Boulay-Espéronnier, M. Charon, Mme de Cidrac, MM. Schmitz, Cuypers, Leleux et Daubresse, Mme Lamure, MM. Panunzi, Brisson, Paccaud, H. Leroy, Bascher, Cardoux, Meurant, Reichardt, Chaize, Courtial et Mouiller, Mme Gruny, M. B. Fournier, Mme Bonfanti-Dossat, M. Kennel, Mme Lopez, MM. Revet, Frassa et Danesi, Mmes Lherbier et Bruguière, M. Sido, Mme Deseyne, M. Pierre, Mme Lanfranchi Dorgal, M. Bonhomme, Mmes Deroche, Thomas et Duranton, M. J.M. Boyer, Mme Canayer et M. Le Gleut, est ainsi libellé :

Après l’article 10 AA

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 1113-1 du code des transports est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le bénéfice de l’aide médicale d’urgence prévu pour les personnes mentionnées à l’article L. 251-1 du code de l’action sociale et des familles n’ouvre pas droit à la réduction tarifaire mentionnée au premier alinéa. »

La parole est à Mme Laure Darcos.

Mme Laure Darcos. Je ne vais pas répéter les propos de mon collègue Karoutchi, mais nous avons en effet tous été choqués par la décision du tribunal administratif de Paris. C’est une question de simple justice sociale au regard des situations comparées des personnes à revenus modestes et des étrangers en situation irrégulière.

Cet amendement diffère seulement du précédent en ce qu’il vise à ce que le bénéfice de l’aide médicale de l’État prévu pour les personnes mentionnées à l’article L. 251-1 du code de l’action sociale et des familles n’ouvre pas droit à la réduction tarifaire mentionnée au premier alinéa de l’article L. 1113-1 du code des transports.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. La commission émet un avis favorable sur l’amendement n° 78 rectifié, parce qu’il est fondé sur la régularité du séjour plutôt que sur l’éligibilité à l’aide médicale de l’État.

Elle demande donc à Mme Darcos de bien vouloir retirer l’amendement n° 29 rectifié ter au profit du précédent.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérard Collomb, ministre dÉtat. Ces problèmes seront traités dans le cadre du projet de loi d’orientation sur les mobilités qui sera soumis au Parlement. Je propose d’attendre qu’une décision valable pour toute la France soit prise et donc je suggère à leurs auteurs de retirer ces amendements ; à défaut, l’avis du Gouvernement serait défavorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Pierre de la Gontrie, pour explication de vote.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie. On peut reconnaître à Roger Karoutchi le bénéfice de la sincérité. Il n’avance pas masqué et ne prétend pas que son amendement tende à un autre but que celui de régulariser la situation désagréable dans laquelle se trouve la présidente de la région d’Île-de-France, Valérie Pécresse, depuis que deux des décisions qu’elle a fait adopter ont été annulées par le tribunal administratif. À ce sujet, je tiens à rassurer Laure Darcos, tout le monde a très bien supporté cette épreuve !

Mme Pécresse a fait appel et a convaincu son ami Roger Karoutchi de déposer cet amendement…

M. Roger Karoutchi. Son grand ami ! (Sourires.)

Mme Marie-Pierre de la Gontrie. Son ami récent, mais son grand ami, admettons ! (Nouveaux sourires.)

Cela démontre la foi que Mme Pécresse a dans la légalité de sa décision. Son recours est pendant devant la cour administrative d’appel, mais elle préfère diligenter un amendement au Sénat, de manière à être assurée du résultat. Toute convaincue donc qu’elle soit du bien-fondé juridique de sa décision, son attitude dénote tout de même un peu d’inquiétude !

Nous voterons contre celui de ces deux amendements qui sera finalement mis aux voix – peu importe lequel, ils ont le même objet – pour plusieurs raisons.

Tout d’abord, ils nous semblent irrecevables parce qu’ils constituent un cavalier législatif, au sens de l’article 48 du règlement du Sénat, comme l’indique, si j’avais besoin de vous en convaincre, le fait qu’ils tendent à modifier le code des transports.

Je rappelle, ensuite, que l’obligation de mettre en place un tarif au moins à moitié prix destiné aux personnes les plus démunies est issue de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains, ou loi SRU. De nombreuses villes l’ont fait, comme Strasbourg, Nantes ou Clermont-Ferrand, mais également Bordeaux, je le dis pour mes collègues de droite. Ces dispositions permettent d’instaurer un système de tarification plus favorable pour les personnes qui n’ont pas beaucoup de ressources.

Enfin, ces amendements nous paraissent présenter un défaut de constitutionnalité, parce qu’ils créent une situation de discrimination potentielle. MM. Karoutchi et Buffet sont familiers du principe d’égalité d’accès aux services publics. Dans le cas dont nous discutons, le Conseil d’État a estimé que les collectivités peuvent décider de moduler l’accès au service en cause seulement si les situations sont différentes ou si la mesure s’impose, car justifiée par une nécessité d’intérêt général en rapport avec les conditions d’exploitation du service.

Mme la présidente. Veuillez conclure, ma chère collègue !

Mme Marie-Pierre de la Gontrie. Telles sont les raisons pour lesquelles l’adoption de l’un de ces deux amendements amènerait le texte à ne pas être conforme à la Constitution et pour lesquelles, outre le mauvais fondement de l’amendement qui vise l’AME, nous sommes défavorables à ces propositions.

Mme la présidente. Il faut vraiment conclure !

Mme Marie-Pierre de la Gontrie. J’ai été un peu longue, mais j’évoquais deux amendements ! Je pourrais d’ailleurs reprendre la parole sur le second, s’il était maintenu… Cela étant, je vous remercie de votre bienveillance, madame la présidente.

Mme la présidente. Madame Darcos, l’amendement n° 29 rectifié ter est-il maintenu ?

Mme Laure Darcos. Non, je vais le retirer, madame la présidente.

Entre Mme de la Gontrie et moi-même, c’est une sorte de private joke. Et M. Karoutchi et moi-même n’avons pas besoin que Valérie Pécresse nous demande quoi que ce soit !

Deux propositions de loi ont été déposées en ce sens, l’une par moi-même au Sénat, l’autre par nos collègues Constance Le Grip et Robin Reda à l’Assemblée nationale.

Vous évoquez l’égalité de traitement dans l’accès aux transports, mais nous visons bien des personnes en situation irrégulière, absolument pas des individus en situation régulière, lesquels garderont le même accès aux transports. Des personnes âgées m’ont souvent interrogée sur cette tarification considérant que certains citoyens, comme les anciens combattants, devraient avoir droit à des réductions plus importantes. C’est véritablement une simple question de justice sociale.

Madame de la Gontrie, Dieu sait que je me sens parfois proche de vous quand vous évoquez l’asile, mais cette situation me semble poser un problème d’équité.

Cela dit, je retire mon amendement n° 29 rectifié ter au profit de l’amendement n° 78 rectifié.

Mme la présidente. L’amendement n° 29 rectifié ter est retiré. Ne serait-ce pas pour empêcher Mme de la Gontrie de reprendre la parole ?… (Sourires.)

La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote sur l’amendement n° 78 rectifié.

M. Roger Karoutchi. Madame de la Gontrie, je n’ai pas d’états d’âme. Chacun sait que cette question s’est posée en Île-de-France, une région qui représente entre 60 % et 70 % des déplacements en transports publics en France. Bien évidemment, ce qui s’y fait prend une importance que l’on ne retrouve pas dans d’autres agglomérations.

Vous parlez d’inconstitutionnalité. Pardonnez-moi, mais cela revient à dire que des citoyens français modestes n’auraient pas accès à la tarification sociale parce que ce n’est pas prévu ainsi…

Mme Marie-Pierre de la Gontrie. Ce n’est pas vrai !

M. Roger Karoutchi. … alors que des personnes en situation irrégulière, je dis bien « en situation irrégulière », donc qui ne sont pas demandeurs d’asile, ont accès aux tarifs réduits.

On affirme que nous ne pourrions pas créer d’inégalité envers ces gens en situation irrégulière, mais il y a bien une inégalité au détriment des gens modestes d’Île-de-France qui, eux, paient plein pot !

M. David Assouline. Pourquoi « au détriment » ?

M. Roger Karoutchi. Je suis désolé, mais je considère que cela n’est pas du tout égalitaire et je souhaite donc que cet amendement soit adopté.

Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.

Mme Laurence Cohen. Il est amusant d’entendre les arguments présentés par M. Karoutchi ce soir, parce que nous y avons déjà été confrontés sur les bancs du conseil régional d’Île-de-France.

M. Gérard Collomb, ministre dÉtat. Allons bon !

Mme Laurence Cohen. Les membres de sa famille politique ont en effet toujours refusé la tarification sociale quand les élus de la mienne, les communistes, se battaient pour la mettre en place. Mme Valérie Pécresse avait d’ailleurs combattu cette proposition. Et voilà que l’on fait revenir par la fenêtre ce que l’on avait chassé par la porte !

Comme le climat est à la méfiance – nous en avons eu la démonstration tout l’après-midi –, on tente d’opposer les étrangers en situation irrégulière et les pauvres qui, eux, sont en situation régulière et seraient maltraités. La question n’est pourtant pas là !

Pourquoi la politique de Mme Pécresse a-t-elle été retoquée ? Parce qu’il s’agit de modifier le règlement en vigueur, afin que les étrangers en situation irrégulière ne puissent pas profiter de la tarification sociale, alors que le bénéfice de celle-ci ne dépend que de l’éligibilité à l’AME, point barre !

Vous essayez maintenant de tordre le manche, si je puis dire, pour exclure toute une population et faire passer, en modifiant la loi, ce que le conseil régional d’Île-de-France a échoué à imposer.

Mme Laurence Cohen. C’est fort de café !

M. Roger Karoutchi. C’est votre appréciation.

Mme Laurence Cohen. Enfin, ne prétendez pas qu’il ne s’agit que de l’Île-de-France : vous tentez de changer la loi pour faire passer une mauvaise politique locale, mais la loi s’applique bien à l’ensemble du territoire national !

Mme la présidente. La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian, pour explication de vote.

Mme Sophie Taillé-Polian. On est en train d’essayer d’élargir à toute la France une mauvaise décision prise en Île-de-France, au mépris de la possibilité pour les étrangers, y compris en situation irrégulière, d’avoir accès à des soins, parce que c’est bien de cela dont il s’agit.

Cette décision a été l’une des premières que le conseil régional d’Île-de-France a adoptées après les dernières élections. Au sein du conseil, certains avaient alors souligné qu’elle était illégale. On tente maintenant de la sauver comme on peut, mais elle n’en reste pas moins illégitime.

Monsieur Karoutchi, vous affirmez qu’il n’y a pas de tarification sociale pour tous dans les transports en Île-de-France. C’est faux ! Il existe un certain nombre de réductions tarifaires.

M. Roger Karoutchi. Je n’ai jamais dit cela !

Mme Sophie Taillé-Polian. Vous venez de le dire ! Peut-être vous êtes vous mal exprimé, mais je ne suis pas la seule à avoir ainsi compris vos propos.

Vous prétendez qu’accorder le bénéfice de tarifications sociales aux étrangers en situation irrégulière empêcherait d’autres personnes d’en bénéficier également. Ce n’est pas le cas, rien n’interdit de prévoir d’autres tarifications sociales.

Ce système permet aux personnes qui souffrent de problèmes de santé d’avoir accès aux soins. C’est la raison pour laquelle il me semble que cette décision du conseil régional d’Île-de-France, utilement annulée par une décision de justice, ne doit pas être remise en vigueur et surtout pas être étendue à toute la France.

Mme la présidente. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.

M. David Assouline. Je ne veux pas m’acharner, mais, monsieur Karoutchi, pourquoi dites-vous « au détriment » ?

M. Roger Karoutchi. Je n’ai jamais dit cela !

M. David Assouline. L’ensemble de votre argumentation repose sur l’estimation que cette prestation serait offerte aux étrangers en situation irrégulière au détriment d’autres catégories.

M. Roger Karoutchi. Non, pas « au détriment » !

M. David Assouline. Ah si, pardonnez-moi, je l’ai noté et le compte rendu en attestera. C’est l’idée que vous avez défendue, mais cela vous a peut-être échappé.

M. David Assouline. Je vous prie de me laisser parler. À chaque fois que je prends la parole, vous vous manifestez ! Mon intervention commence, mais vous m’avez déjà privé de quarante-cinq secondes !

Vous avez donc dit cela, peut-être cela vous a-t-il échappé, mais c’est intéressant. On entend souvent l’argumentation, notamment dans la bouche des extrêmes, selon laquelle tout ce que l’on fait pour les étrangers en situation irrégulière, voire pour les étrangers en général, se fait au détriment des Français défavorisés, des gens qui souffrent et qui ne bénéficieraient pas des mêmes avantages.

M. Sébastien Meurant. C’est tout à fait le cas !

M. David Assouline. Pourtant, cette tarification sociale n’est pas proposée au détriment des Français qui y auraient droit et l’économie qui serait réalisée par la région si votre proposition était adoptée ne serait pas reversée à des catégories de population qui n’y auraient pas droit aujourd’hui. « Au détriment » n’est donc pas la juste expression.

Le transport, c’est vital, y compris pour quelqu’un qui est en situation irrégulière, d’abord pour aller à la préfecture remplir un dossier de régularisation, mais aussi pour se soigner ou pour faire soigner ses enfants.

Ce ne sont pas ceux qui n’ont pas de papiers qui vivent le mieux dans ce pays ! Il ne nous semble pas souhaitable de rendre toujours la vie plus difficile, même dans ses dimensions les plus quotidiennes, à ceux dont la situation est déjà exécrable.

Nous nous opposons donc à ce qu’une mesure retoquée par le tribunal administratif soit inscrite dans la loi uniquement pour valider une décision de Valérie Pécresse, décision qui, au demeurant, n’a été mise en place dans aucune autre région, en particulier pas dans celles que la droite dirige.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre d’État.

M. Gérard Collomb, ministre dÉtat. Ce débat est extrêmement intéressant, mais M. Buffet et moi sommes deux Lyonnais et nous n’occupons pas le temps du Sénat avec des débats propres à l’agglomération lyonnaise.

M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Cela n’a pas toujours été le cas, monsieur le ministre d’État !

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Ce sont pourtant des questions intéressantes !

M. Gérard Collomb, ministre dÉtat. En effet, et elles mériteraient d’être soumises à discussion. Peut-on essayer d’élargir le sujet ?

Nous avons adopté une disposition un peu spéciale pour Mayotte, je le comprends, monsieur le président de la commission, mais nous ne pouvons pas discuter de la situation de chaque région, autrement, nous n’en sortirons pas et nous ne mènerons pas à bien le débat sur ce texte, alors que nous avons à répondre à un certain nombre d’exigences importantes.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie. Dites-le à M. Karoutchi !

M. David Assouline. Je suis d’accord avec vous, monsieur le ministre d’État !

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.

M. Bernard Jomier. Je constate que, dans cette discussion, nous multiplions les débats sans lien direct avec le projet de loi. Nous avons évoqué de nouveau l’aide médicale de l’État, nous parlons maintenant des transports. Mme Pécresse savait très bien que sa décision n’était pas conforme au droit, mais elle a des amis bien placés, donc elle n’applique pas la décision du tribunal et tente de faire changer la loi, c’est plus simple ! Et ensuite, nous parlerons de l’alimentation, puis d’autre chose ? Il faut arrêter ! Que je sache, ce texte ne porte pas sur les étrangers en France.

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Un peu, tout de même !

M. Bernard Jomier. Le président de la commission des lois nous a demandé de cesser de multiplier les débats, mais qui ouvre sans arrêt de nouveaux champs ?

Nous pourrions évoquer la mobilité des étrangers et débattre des raisons pour lesquelles l’AME, en Île-de-France comme dans d’autres régions, ouvre droit à une réduction sur le prix les transports, mais il s’agit d’un sujet à part entière, qui me semble avoir sa place dans une discussion sur les transports et les mobilités plutôt que dans le débat sur ce texte, sauf à vouloir tout mélanger et à laisser entendre que ce projet de loi poursuit d’autres objectifs que ceux qu’il affiche.

Mon cher collègue, s’il vous plaît, retirez votre amendement ; nous discuterons de ces dispositions à une autre occasion.

Mme la présidente. Monsieur Karoutchi, l’amendement n° 78 rectifié est-il maintenu ?

M. Roger Karoutchi. Bien sûr, madame la présidente !

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 78 rectifié.

J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant de la commission des lois. (Protestations sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

MM. Bernard Jomier et Rachid Temal. C’est lamentable !

M. Xavier Iacovelli. Ce n’est pas sérieux !

Mme la présidente. Je rappelle que l’avis de la commission est favorable et que celui du Gouvernement est défavorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 157 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 329
Pour l’adoption 195
Contre 134

Le Sénat a adopté. (Mme Laurence Cohen proteste.)

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 10 AA.

Mme Catherine Troendlé. Très bien !

Chapitre Ier

Les procédures de non-admission

Article additionnel après l'article 10 AA - Amendement n° 29 rectifié ter
Dossier législatif : projet de loi pour une immigration maîtrisée, un droit d'asile effectif et une intégration réussie
Article 10 B (Texte non modifié par la commission)

Article 10 A

(Non modifié)

L’article L. 213-2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi modifié :

1° Le deuxième alinéa est ainsi modifié :

a) Après le mot : « choix », la fin de la première phrase est supprimée ;

b) Les deux dernières phrases sont supprimées ;

2° Après le même deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« L’étranger peut refuser d’être rapatrié avant l’expiration du délai d’un jour franc, ce dont il est fait mention sur la notification prévue au deuxième alinéa. L’étranger mineur non accompagné d’un représentant légal ne peut être rapatrié avant l’expiration du même délai. Le présent alinéa n’est pas applicable aux refus d’entrée notifiés à Mayotte ou à la frontière terrestre de la France. » ;

3° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Une attention particulière est accordée aux personnes vulnérables, notamment aux mineurs, accompagnés ou non d’un adulte. »

Mme la présidente. L’amendement n° 250 rectifié bis, présenté par M. Leconte, Mme de la Gontrie, MM. Marie, Sueur, Durain et Fichet, Mme Harribey, MM. Kanner, Kerrouche et Assouline, Mme Blondin, MM. Devinaz et Iacovelli, Mmes Lepage, S. Robert et Rossignol, MM. Temal et J. Bigot, Mmes G. Jourda, Taillé-Polian, Meunier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 6, dernière phrase

Supprimer cette phrase.

La parole est à M. Jean-Yves Leconte.

M. Jean-Yves Leconte. Cet amendement vise à nous conformer à une décision de la Commission nationale consultative des droits de l’homme, la CNCDH et à rétablir le bénéfice d’un jour franc pour l’étranger qui se voit notifier un refus d’entrée aux frontières terrestres de la France ou à Mayotte. Cela concerne en particulier la situation à la frontière franco-italienne.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérard Collomb, ministre dÉtat. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 250 rectifié bis.

(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, nadopte pas lamendement.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 10 A.

(Larticle 10 A est adopté.)

Article 10 A (Texte non modifié par la commission)
Dossier législatif : projet de loi pour une immigration maîtrisée, un droit d'asile effectif et une intégration réussie
Article 10 (Texte non modifié par la commission)

Article 10 B

(Non modifié)

Après l’article L. 213-3 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, il est inséré un article L. 213-3-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 213-3-1. – En cas de réintroduction temporaire du contrôle aux frontières intérieures prévue au chapitre II du titre III du règlement (UE) 2016/399 du Parlement européen et du Conseil du 9 mars 2016 concernant un code de l’Union relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes (code frontières Schengen), les décisions mentionnées à l’article L. 213-2 peuvent être prises à l’égard de l’étranger qui, en provenance directe du territoire d’un État partie à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990, a pénétré sur le territoire métropolitain en franchissant une frontière intérieure terrestre sans y être autorisé et a été contrôlé dans une zone comprise entre cette frontière et une ligne tracée à dix kilomètres en deçà. Les modalités de ces contrôles sont définies par décret en Conseil d’État. »

Mme la présidente. L’amendement n° 251 rectifié bis, présenté par MM. Assouline et Leconte, Mme de la Gontrie, MM. Marie, Sueur, Durain et Fichet, Mme Harribey, MM. Kanner et Kerrouche, Mme Blondin, MM. Devinaz et Iacovelli, Mmes Lepage, S. Robert et Rossignol, MM. Temal et J. Bigot, Mmes G. Jourda, Taillé-Polian, Meunier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. David Assouline.

M. David Assouline. Cet amendement vise à supprimer le présent article, qui fige dans la loi le périmètre dans lequel un étranger ayant franchi la frontière intérieure du territoire national pourra faire l’objet d’une décision de refus d’entrée et non pas d’une décision d’éloignement.

Aujourd’hui, si un étranger qui a franchi la frontière de manière irrégulière est arrêté, il ne peut faire l’objet que d’une décision d’éloignement. Cet article crée un périmètre de dix kilomètres dans lequel le régime de la reconduite à la frontière pourra être appliqué.

Ainsi, un étranger arrêté à Menton ne ferait pas l’objet d’une procédure d’éloignement, mais serait considéré comme ayant dépassé et franchi illégalement la frontière, et à ce titre, il y serait reconduit.

Nous avons là un exemple d’anicroche au droit – demain, ce périmètre pourra être porté à vingt, voire trente kilomètres. Nous ne pouvons que nous opposer à une telle disposition.