M. Mathieu Darnaud, rapporteur. … exige l’autorisation du préfet. Or vous imaginez bien que le préfet qui a dessiné une carte intercommunale ne va pas s’empresser de la défaire !
Vous avez oublié un autre aspect, à savoir la clause de revoyure sexennale, qui va elle aussi conduire à des modifications.
Plutôt que d’attendre, je pense qu’il est intelligent de ménager des portes de sortie, pour les cas où l’on constate, en fonction de paramètres objectifs, qu’une intercommunalité gagnerait à voir son périmètre modifié, avec le consentement de la plupart des acteurs – ne vous leurrez pas : c’est ainsi que les choses se passeront.
Et même, si nous voulons aller au bout d’une lecture positive des choses, nous pouvons aussi songer aux rares cas de figure où, à l’issue de l’application de la loi NOTRe, des intercommunalités ont vu leur taille diminuer – c’est le cas dans mon département, avec la communauté de communes du Val d’Ay, à côté d’Annonay.
M. Loïc Hervé. Ah, l’Ardèche !
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Nous pourrions donc très légitimement imaginer des regroupements et faciliter toute procédure tendant vers l’édification d’une intercommunalité synonyme de mutualisation et de projets.
Plutôt que comme un témoignage de défiance, je vous invite à interpréter cet article comme un encouragement à construire une intercommunalité durable, comme une liberté – cela a été dit – donnée aux communes. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures cinquante.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt heures vingt, est reprise à vingt et une heures cinquante-cinq, sous la présidence de M. Jean-Marc Gabouty.)
PRÉSIDENCE DE M. Jean-Marc Gabouty
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
Nous reprenons la discussion de la proposition de loi relative à l’équilibre territorial et à la vitalité de la démocratie locale, présentée par MM. Philippe Bas, Bruno Retailleau et Mathieu Darnaud.
Dans la discussion du texte de la commission, nous en sommes parvenus à l’article 11.
Article 11
I (nouveau). – La première phrase du 3° du I de l’article L. 5211-18 et l’avant-dernier alinéa de l’article L. 5211-19 du code général des collectivités territoriales sont complétés par les mots : « , après avis de la commission départementale de la coopération intercommunale ».
II (nouveau). – La sous-section 2 de la section 8 du chapitre Ier du titre Ier du livre II de la cinquième partie du code général des collectivités territoriales est complétée par un article L. 5211-45-1 tel qu’il résulte du III du présent article.
III (nouveau). – L’article L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales devient L. 5211-45-1 et est ainsi modifié :
1° Les I, II et IV sont abrogés ;
2° Le premier alinéa du III est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« III. – Les propositions, observations et avis de la commission départementale de la coopération intercommunale tiennent compte des objectifs et orientations suivants :
« 1° A La couverture intégrale du territoire par des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre et la suppression des enclaves et discontinuités territoriales, sous réserve des exceptions prévues par la loi ; »
3° Au V, les mots : « les schémas départementaux de coopération intercommunale ne sont pas dans l’obligation de prévoir » sont remplacés par les mots : « il peut être dérogé au principe de ».
IV (nouveau). – Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
1° Au II de l’article L. 1111-10, au b du 1° du I de l’article L. 2336-3 et au premier alinéa du I de l’article L. 5210-1-2, la référence : « L. 5210-1-1 » est remplacée par la référence : « L. 5211-45-1 » ;
2° Le premier alinéa de l’article L. 5111-6 est ainsi modifié :
a) Les mots : « avec le schéma départemental de coopération intercommunale mentionné à l’article L. 5210-1-1 ou » sont supprimés ;
b) Les mots : « du même article L. 5210-1-1 » sont remplacés par les mots : « de l’article L. 5211-45-1 » ;
3° Au dernier alinéa du I de l’article L. 5211-41-3 et au dernier alinéa du I de l’article L. 5212-27, les mots : « prévus aux I et II de l’article L. 5210-1-1 et des orientations définies au III du même article » sont remplacés par les mots : « et orientations prévus au III de l’article L. 5211-45-1 » ;
4° À la sixième phrase du premier alinéa de l’article L. 5211-45, les mots : « qui diffère des propositions du schéma départemental de la coopération intercommunale prévu à l’article L. 5210-1-1 » sont supprimés.
V (nouveau). – À la dernière phrase du second alinéa du I de l’article L. 300-6-1 du code de l’urbanisme et au dernier alinéa du A du II de l’article 1465 A du code général des impôts, la référence : « L. 5210-1-1 » est remplacée par la référence : « L. 5211-45-1 ».
M. le président. L’amendement n° 14, présenté par M. Grand, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… . – L’article L. 5211-43 du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
1° Au 1°, le pourcentage : « 40 % » est remplacé par le pourcentage : « 60 % » ;
2° Au 2°, le pourcentage : « 40 % » par le pourcentage : « 20 % ».
La parole est à M. Jean-Pierre Grand.
M. Jean-Pierre Grand. La composition de la commission départementale de la coopération intercommunale a été modifiée par la loi du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales.
La représentation des communes est passée de 60 % à 40 % et celle des intercommunalités de 20 % à 45 %, 40 % pour les EPCI à fiscalité propre et 5 % pour les syndicats.
D’un schéma départemental de coopération intercommunale fondé par les communes, nous sommes passés à un schéma proposé par l’autorité préfectorale et modifié par les communes au sein d’une commission où leurs voix, en proportion du total, ont diminué.
L’article 11 de cette proposition de loi supprime certes le pouvoir de modification de ces schémas par les CDCI ; il est néanmoins proposé de revoir la composition de la CDCI, afin d’y assurer une plus grande représentation des maires et des élus municipaux.
Naturellement, madame la ministre, vous le comprenez, mon amendement est un amendement de sécurité visant à nous prémunir contre un avenir que nous redoutons, qui serait celui de l’élection des EPCI au suffrage universel, ce qui signerait la disparition des maires.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Je comprends tout à fait les motivations de Jean-Pierre Grand et l’anticipation sur laquelle elles reposent. Néanmoins, en l’état des choses, les élus intercommunaux étant encore des élus communaux, …
M. Jean-Pierre Grand. Pour combien de temps ?
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. … je ne vois pas la nécessité d’anticiper. Vous connaissez la position du Sénat sur les modes d’élection au sein des intercommunalités.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Avis défavorable également, monsieur le président.
L’adoption de cet amendement diminuerait le rôle des intercommunalités de façon trop importante.
S’agissant de la préoccupation que vous avez exprimée, monsieur Grand, une proposition de loi relative au mode de scrutin des conseillers métropolitains déposée ici même, au Sénat, si j’ai bonne mémoire, par le groupe du RDSE, …
Mme Jacqueline Gourault, ministre. … prévoit d’abroger un article de la loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles.
M. Pierre-Yves Collombat. L’article 54 !
Mme Jacqueline Gourault, ministre. J’avais clairement expliqué, à l’occasion des débats, que si, un jour, un scrutin direct devait être mis en œuvre, ce serait dans les métropoles à statut particulier, comme celle de Lyon, mais qu’il n’était pas question de revenir sur le mode de scrutin dans les intercommunalités, ou EPCI, classiques.
M. Pierre-Yves Collombat. Nous voici rassurés !
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Grand, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Grand. Madame la ministre, vous l’avez compris, cet amendement visait en fait à vous permettre de nous apporter les réponses que vous nous avez fournies ce soir. Nous sommes nombreux à vous avoir entendue. Étant désormais rassuré, je peux retirer mon amendement.
M. le président. L’amendement n° 14 est retiré.
L’amendement n° 30, présenté par M. Grand, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Après la première phrase du premier alinéa de l’article L. 5211-45 du code général des collectivités territoriales, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Elle se réunit au moins une fois par an. »
La parole est à M. Jean-Pierre Grand.
M. Jean-Pierre Grand. L’article 11 de la proposition de loi modifie en profondeur les pouvoirs de la commission départementale de la coopération intercommunale. Afin de conforter le rôle des communes, qui constituent la cellule de base de la démocratie locale, dans le fonctionnement de l’intercommunalité, nous proposons de prévoir que la CDCI se réunit au moins une fois par an. C’est un minimum et ce n’est pas le bout du monde !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Je tiens à rassurer mon collègue Jean-Pierre Grand. Au cours des dernières années, les CDCI se sont réunies plus d’une fois par an. Et, au regard du débat animé que nous avons eu tout à l’heure, il y a tout lieu de penser qu’elles continueront de le faire. Elles n’ont pas totalement achevé leurs travaux s’agissant de l’évolution des syndicats, et d’autres sujets demeurent aussi en suspens.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Je pense que la souplesse doit prévaloir. Le texte prévoit déjà que la CDCI se réunit autant que de besoin.
Le Gouvernement émet par conséquent un avis défavorable sur cet amendement.
M. Jean-Pierre Grand. Dans ces conditions, je retire mon amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 30 est retiré.
La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote sur l’article.
M. Daniel Chasseing. Je voterai cet article.
L’Agence nationale pour la cohésion des territoires doit disposer des moyens financiers pour aider certains territoires à créer des emplois. Je pense par exemple à des zones franches. Dans certaines communautés de communes, les dotations se sont effondrées ; globalement, c’était aussi le cas les autres années.
L’Agence doit avoir la possibilité de financer de l’immobilier pour les PME du tourisme. Le département et la région ne peuvent plus le faire. La couverture numérique et l’aide à l’artisanat et au commerce permettront à des communautés de communes rurales ou hyperrurales de continuer à vivre en créant de l’emploi, donc de retrouver de l’optimisme.
Je rejoins M. le président de la commission des lois. Certaines communautés de communes ne pourront pas rester dans la proximité pour exercer certaines compétences stratégiques, comme l’aide à la création d’entreprises. Il n’est pas souhaitable qu’elles attendent six ans avant d’intégrer une communauté de communes plus grande.
Les communautés de communes de proximité sont prisées des élus. Mais, dans certains territoires hyperruraux, en l’absence d’aides spécifiques, elles seront obligées d’intégrer d’autres communautés de communes.
M. le président. Je mets aux voix l’article 11.
(L’article 11 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 11
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 13 rectifié, présenté par M. Grand, est ainsi libellé :
Après l’article 11
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La sous-section 1 de la section 3 du chapitre Ier du titre Ier du livre II de la cinquième partie du code général des collectivités territoriales est complétée par un paragraphe ainsi rédigé :
« Paragraphe…
« La conférence des maires
« Art. L. 5211-10-… - La conférence des maires est une instance de coordination entre l’établissement public de coopération intercommunale et les communes membres, au sein de laquelle sont débattues les orientations politiques et les décisions essentielles de la communauté.
« Cette instance est présidée de droit par le président de l’établissement public de coopération intercommunale et comprend les maires et maires délégués des communes membres.
« Elle se réunit au moins une fois par trimestre, à l’initiative du président de l’établissement public de coopération intercommunale ou à la demande d’un tiers des maires.
« Toute convocation est faite par le président de l’établissement public de coopération intercommunale. Elle indique les questions portées à l’ordre du jour et s’accompagne d’une note explicative de synthèse sur ces questions.
« Elle est adressée par écrit, au domicile des maires et maires délégués des communes membres ou, s’ils en font la demande, envoyée à une autre adresse ou transmise de manière dématérialisée.
« Le délai de convocation est fixé à cinq jours francs. En cas d’urgence, le délai peut être abrégé par le président de l’établissement public de coopération intercommunale sans pouvoir être toutefois inférieur à un jour franc. Il est tenu de la convoquer dans un délai maximal de trente jours quand la demande a été formulée par au moins un tiers des maires. »
La parole est à M. Jean-Pierre Grand.
M. Jean-Pierre Grand. Je retire cet amendement au profit de l’amendement n° 4 rectifié, qui devrait recueillir un large consensus et sur lequel j’ai déposé deux sous-amendements.
M. le président. L’amendement n° 13 rectifié est retiré.
L’amendement n° 4 rectifié, présenté par MM. Maurey, Cigolotti, Moga, Longeot, Détraigne, Médevielle, Louault, Le Nay, Bonnecarrère et Kern, Mmes Létard et Billon, MM. Paccaud, Mouiller et Guerriau, Mme Deromedi, MM. Joyandet et Grosdidier, Mme Garriaud-Maylam, M. Morisset, Mme Berthet, M. Laugier, Mme N. Goulet, MM. Bonne, Pemezec et Luche, Mme Lanfranchi Dorgal, MM. Chasseing, Vaspart et Chaize, Mmes Lherbier et M. Mercier, MM. Paul, Perrin, Raison, Poniatowski et A. Marc, Mmes Morin-Desailly et Gruny, MM. Babary, Priou et Fouché, Mme Keller et MM. Revet et Mandelli, est ainsi libellé :
Après l’article 11
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La sous-section 1 de la section 3 du chapitre Ier du titre Ier du livre II de la cinquième partie du code général des collectivités territoriales est complétée par un paragraphe … ainsi rédigé :
« Paragraphe …
« La conférence des maires
« Art. L. 5211-10-… – Il est créé une conférence des maires dans les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre regroupant plus de vingt communes, à l’exception des métropoles mentionnées aux chapitres VII, VIII et IX du présent titre.
« La conférence des maires est une instance de concertation entre l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre et les communes qui en sont membres, au sein de laquelle il peut être débattu de toute question relevant des compétences de cet établissement.
« Cette instance est présidée de droit par le président de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, et comprend les maires des communes membres.
« Elle se réunit au moins deux fois par an, à l’initiative du président ou à la demande de la moitié des maires. »
La parole est à M. Yves Détraigne.
M. Yves Détraigne. Cet amendement vise à mettre en place une conférence des maires dans les EPCI de plus de vingt communes.
Cela existe déjà dans nombre de grandes communautés. C’est, me semble-t-il, une bonne chose, car ce n’est pas forcément le maire qui représente sa commune au conseil communautaire et a fortiori au bureau communautaire. Les maires ont parfois besoin de se rencontrer. Leur vision des aménagements et des projets est plus large que celle, inévitablement plus spécialisée, de l’adjoint ou du conseiller municipal délégué.
M. le président. Le sous-amendement n° 77, présenté par M. Grand, est ainsi libellé :
Amendement n° 4, alinéa 8
Après le mot :
maires
insérer les mots :
et les maires délégués
La parole est à M. Jean-Pierre Grand.
M. Jean-Pierre Grand. Ce sous-amendement et le suivant sont le fruit de notre expérience et des réalités du terrain. Vous le savez, les métropoles sont en fonction depuis 2015 seulement. La pratique des réunions de maires est assez inégale.
Ce sous-amendement vise la présence de maires délégués au sein de la conférence des maires.
Les préfets qui proposent à des communes de se regrouper expliquent que les futurs maires délégués auront toujours une écharpe tricolore à glands dorés et pourront être présents à toutes les réunions intercommunales sur les sujets les concernant. Il me paraît essentiel de prendre acte de la présence des maires délégués au sein de la conférence des maires, faute de quoi il risque de n’y avoir plus qu’un seul maire !
M. le président. Le sous-amendement n° 78, présenté par M. Grand, est ainsi libellé :
Amendement n° 4
Compléter cet amendement par un alinéa ainsi rédigé :
« Toute convocation est faite par le président de l’établissement public de coopération intercommunale. Elle indique les questions portées à l’ordre du jour et s’accompagne d’une note explicative de synthèse sur ces questions. »
La parole est à M. Jean-Pierre Grand.
M. Jean-Pierre Grand. Ce sous-amendement tend à fixer les modalités de convocation pour que les maires disposent d’éléments de travail sérieux avant la conférence. Il arrive trop souvent que, lors de la conférence des maires, ces derniers n’aient ni dossier étayé ni notes de synthèse. Il y a tout de même un minimum de respect à avoir envers les maires !
Je crois que l’expérience de la métropole de Montpellier peut nous inspirer. (M. le rapporteur sourit.) C’est le devoir du Parlement et du Gouvernement de corriger un certain nombre de dérives ; c’est ce que nous faisons !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. La commission n’a pas eu le temps d’examiner les deux sous-amendements. À titre personnel, je suis favorable au sous-amendement n° 78 et défavorable au sous-amendement n° 77, même si j’en comprends les motivations, inspirées par l’expérience de la métropole montpelliéraine. (Sourires.) Et je serai favorable à l’amendement n° 4 rectifié ainsi sous-amendé.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Je comprends bien les préoccupations inspirées par la métropole montpelliéraine. Mais l’article L. 5211-49-1 du code général des collectivités territoriales prévoit déjà la possibilité – ce n’est effectivement pas une obligation – de créer des conférences des maires.
Imposer à tous les EPCI de plus de vingt communes d’instituer une telle conférence constituerait, me semble-t-il, un durcissement de la législation. En plus, cela ne pourrait pas s’appliquer partout. Par exemple, l’EPCI de plus de vingt communes dans lequel je siège n’a pas besoin de conférence des maires, puisque ces derniers sont déjà tous dans l’organe délibérant.
Je crois qu’il vaut mieux laisser de la souplesse. Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur l’amendement n° 4 rectifié et les deux sous-amendements.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Grand, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Grand. Je comprends parfaitement que l’on n’oblige pas les EPCI à créer des réunions des maires. Mais, là où celles-ci existent, elles doivent se tenir dans les règles, faute de quoi elles seraient juste un prétexte. Les maires n’attendent pas qu’on les convoque simplement pour discuter du dernier match ; ce qu’ils veulent, c’est un travail sérieux.
Les conférences des maires ont un sens. Mais si on les crée, ce n’est pas pour se faire plaisir ; c’est pour leur assigner des missions. Et je souhaite que ces missions soient précisées.
Par ailleurs, le sujet des maires délégués est très important. Je me suis rendu dans deux secteurs de mon département où le préfet essaye actuellement de favoriser des regroupements. Des questions de principe, de légitimité et de reconnaissance se posent.
Il est essentiel que les maires délégués puissent être présents dans les intercommunalités. Je suis prêt à retirer le sous-amendement n° 77. Mais je demande au Gouvernement – je sais que, compte tenu de votre expérience, vous partagez cette préoccupation, madame la ministre – de penser aux maires qui doivent indiquer à leur population qu’ils seront bientôt non plus maires, mais maires délégués. Le maire délégué doit avoir un minimum de reconnaissance officielle. Le fait de pouvoir siéger au sein des bureaux des EPCI en est un signe.
M. le président. La parole est à M. Bruno Sido, pour explication de vote.
M. Bruno Sido. Il y a deux types de maires délégués : les maires délégués type « Marcellin » et les nouveaux maires délégués, type « commune nouvelle ». Pour ma part, je suis un spécialiste des maires délégués type Marcellin, la Haute-Marne étant le département champion – et de loin ! – de cette forme de fusion-association.
Je pense que M. Grand a parfaitement raison.
M. Jean-Pierre Grand. C’est gentil de le dire !
M. Bruno Sido. On nous explique depuis toujours que les communes déléguées existent encore, puisqu’elles ont leur monument aux morts, leur église, leur mairie… D’ailleurs, la population attend du maire délégué qu’il s’occupe de la commune déléguée, même avec moins de pouvoirs qu’un maire.
Il me semble – mais je peux me tromper – qu’il est quasi obligatoire que les maires siègent au sein de la conférence des maires. Si c’est « quasi » obligatoire, il faudrait que cela devienne obligatoire. Il n’est pas normal qu’un maire d’une commune se désintéresse de l’intercommunalité ; qu’on le veuille ou non, les intercommunalités sont là, et il faut que les maires y siègent.
Certes, je ne sais pas s’il est juridiquement possible de l’imposer. Mais, moralement, il devrait être obligatoire pour les maires et les maires délégués d’y siéger.
M. Jean-Pierre Grand. C’est de bon sens !
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. J’entends les arguments des différents orateurs sur les communes nouvelles. Il appartient aux préfets de bien expliquer ce qu’une commune nouvelle ; c’est une nouvelle commune, pour reprendre l’expression de Pierre-Yves Collombat. (Exclamations amusées.)
M. Pierre-Yves Collombat. Merci, madame la ministre !
M. Loïc Hervé. Ah, les grands auteurs ! (Sourires.)
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Il faut de la transparence : quand une commune nouvelle est créée, on entre dans le régime général des nouvelles communes.
M. Jean-Pierre Grand. Ce n’est pas vendu comme ça !
Mme Cécile Cukierman. Oui, il y a tromperie sur la marchandise !
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Il faut bien connaître les tenants et les aboutissants.
Il ne faut pas croire que les maires délégués garderont toutes les missions qu’ils avaient auparavant. Ayons l’honnêteté de le dire : un maire délégué, ce n’est pas le maire de la commune !
M. Bruno Sido. Ils ont tout de même un magistère moral !
M. le président. La parole est à Mme Françoise Gatel, pour explication de vote.
Mme Françoise Gatel. J’entends les questions qui se posent à propos des communes nouvelles.
Je le rappelle, un projet de commune nouvelle relève d’une possibilité offerte aux communes ; c’est donc une liberté. Il appartient à celles-ci de composer le projet de commune nouvelle qu’elles souhaitent. Il ne s’agit en aucun cas d’une colocation.
Pendant la période transitoire, il faut effectivement aider les maires. Mais on ne peut pas vouloir créer une commune nouvelle tout en espérant garder les attributions des anciennes communes.
Certes, le projet peut être compliqué. Mais, dans la plupart des cas, il réussit, car les élus se sont donné la peine de travailler en intelligence et de définir un vrai projet de territoire.
M. le président. Monsieur Grand, le sous-amendement n° 77 est-il maintenu ?
M. Jean-Pierre Grand. Oui, monsieur le président.
Ce que Mme la ministre a indiqué correspond peut-être à l’esprit de la loi, mais pas à la réalité constatée dans nos communes sollicitées par le préfet pour fusionner.
Sur ce dossier, le Gouvernement et nous sommes partenaires. Nous cherchons à ne pas tromper les maires, les conseils municipaux et les populations. Nous devons avoir un langage commun, qui soit parfaitement cadré.
On explique à la population que la mairie restera au même endroit, que le fait que le maire devienne maire délégué ne changera rien et que l’opération permettra de réaliser des économies d’échelle. Mais les gens seront choqués s’ils constatent que le maire délégué n’a plus la même écharpe et qu’il n’ira plus représenter sa commune au sein de l’intercommunalité.
Il faut, me semble-t-il, être très clair avec nos concitoyens. Pourquoi ne pas donner aux préfets une check-list avec tous les arguments et éléments de langage pour que personne ne se trompe ?
Dans deux ans, il y aura des élections municipales. Les maires qui, pour des raisons nobles, ont accepté la fusion de communes vont se faire massacrer, quelle que soit leur étiquette politique. Les gens auront le sentiment d’avoir été roulés dans la farine. Ce n’est jamais bon pour la démocratie !
Je sais que, compte tenu de votre expérience, vous êtes très sensible à ces problématiques, madame la ministre.