Mme la présidente. Monsieur Grand, l’amendement n° 14 rectifié est-il maintenu ?
M. Jean-Pierre Grand. Je reconnais tout à fait la faiblesse de mon raisonnement. J’aurais dû expliquer que, lorsqu’un candidat s’inscrit sur la liste, il peut préciser en même temps qu’il laisse tout pouvoir à la tête de liste. Nous y reviendrons à une autre occasion.
En attendant, je retire cet amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 14 rectifié est retiré.
L’amendement n° 15 rectifié, présenté par MM. Grand et Lefèvre, Mme Garriaud-Maylam, M. Raison, Mme Deromedi et MM. Revet et Le Gleut, est ainsi libellé :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article 14-1 de la loi n° 77-729 du 7 juillet 1977 relative à l’élection des représentants au Parlement européen est complété par un alinéa ainsi rédigé : « Sera puni des peines prévues à l’article L. 88-1 du code électoral tout candidat n’ayant pas la nationalité française qui se sera porté candidat sur une liste sur la base de déclarations frauduleuses fournies conformément au II de l’article 9. »
La parole est à M. Jean-Pierre Grand.
M. Jean-Pierre Grand. L’article L. 88-1 du code électoral punit d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende toute personne qui aura sciemment fait acte de candidature sous de faux noms ou de fausses qualités ou aura sciemment dissimulé une incapacité prévue par la loi.
Il est proposé d’appliquer une sanction similaire à tout ressortissant d’un État membre de l’Union européenne qui se serait porté candidat sur une liste sur la base de déclarations frauduleuses – fausse adresse, faux nom, candidature simultanée dans un autre État membre, inéligibilité dans son pays…
Il ne s’agit pas là de la sanction pour inscription pour fraude sur une liste électorale.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Richard, rapporteur. L’article 2-7 de la loi du 7 juillet 1977 relative à l’élection des représentants au Parlement européen prévoit déjà des sanctions pénales contre les ressortissants étrangers s’inscrivant indûment sur la liste électorale complémentaire pour les élections européennes.
Par conséquent, cet amendement est satisfait. Je profite d’ailleurs de son examen pour adresser un message au Gouvernement et pour faire un rappel historique, qui figure déjà dans mon rapport.
Ainsi que l’a souligné M. Masson à plusieurs reprises au cours de ce débat, la loi de 1977 a été adoptée dans un climat politique assez spécifique, où s’affrontaient des conceptions européennes très opposées au sein de la démocratie française. Il se trouve – les moins jeunes s’en souviennent – que cette divergence existait dans la majorité gouvernementale d’alors ; c’était l’époque du « parti de l’étranger »…
Par conséquent, toute une série de préventions a été inscrite dans la loi pour appeler l’attention sur le fait que les élus au Parlement européen n’étaient pas de véritables parlementaires.
C’est pour cela que l’expression « parlementaire européen » ne figure pas dans le droit français et que ces dispositions n’ont pas été insérées dans le code électoral. Alors même que l’élection du plus modeste conseiller municipal est prévue dans le code électoral, pour les parlementaires européens, quand bien même il s’agit des mêmes mécanismes, toutes les dispositions font l’objet d’un texte spécial !
Madame la ministre, je m’adresse à vous, ainsi qu’à vos valeureux collaborateurs : il me semble que, quarante ans après, ces passions-là sont surmontées et que l’élection européenne pourrait être inscrite dans le code électoral, à l’instar de toutes les autres élections.
Quoi qu’il en soit, la commission demande le retrait de cet amendement, faute de quoi elle émettrait un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Je n’ai rien à ajouter aux propos de M. le rapporteur.
Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Monsieur Grand, l’amendement n° 15 rectifié est-il maintenu ?
M. Jean-Pierre Grand. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 15 rectifié est retiré.
L’amendement n° 18 rectifié, présenté par MM. Grand et Lefèvre, Mme Garriaud-Maylam et MM. Raison, Revet, Magras et Le Gleut, est ainsi libellé :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article 24 de la loi n° 77-729 du 7 juillet 1977 précitée est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, après la première occurrence du mot : « candidat », sont insérés les mots : « de même sexe » ;
2° Au troisième alinéa, après le mot : « candidat », sont insérés les mots : « de même sexe » ;
3° L’avant-dernier alinéa est ainsi modifié :
a) À la troisième phrase, après le mot : « candidat », sont insérés les mots : « de même sexe » ;
b) À la dernière phrase, après le mot : « candidats », sont insérés les mots : « de même sexe ».
La parole est à M. Jean-Pierre Grand.
M. Jean-Pierre Grand. L’article 24 de la loi du 7 juillet 1977 fixe les modalités de remplacement des députés européens, dont le siège devient vacant pour quelque cause que ce soit.
Afin de respecter la parité, il est proposé de prévoir un remplacement par le candidat de même sexe figurant sur la même liste immédiatement après le dernier candidat élu, conformément à l’ordre de cette liste. Il s’agit là d’une disposition déjà applicable pour l’élection des conseillers communautaires.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Richard, rapporteur. Notre collègue a raison sur un point : cette disposition inhabituelle figure bien dans le texte relatif aux élections communautaires. Dans tous les autres scrutins de liste, lorsqu’un siège devient vacant, c’est le premier candidat non élu de la liste qui vient en succession, quel que soit son sexe.
Dans la loi de 2013 sur les élections communautaires, nos collègues de l’Assemblée nationale ont fait le choix de ne pas modifier la parité entre deux élus, parce que, dans de nombreuses communes, les conseillers communautaires sont en petit nombre. Si le deuxième élu dont le siège se trouve vacant est une femme, il sera donc remplacé non pas par le troisième qui est un homme, mais par le quatrième qui est une femme.
Dans le cas de listes bien plus complètes, cette priorité donnée à la succession par identité de sexe contredit l’équilibre général de la liste, dont nous avons parlé tout à l’heure.
Imaginons une liste que ses auteurs ont cherché à rendre cohérente en représentation géographique, éventuellement en tendance politique – cela arrive – ou en toute autre composante de la société. En prévoyant que ce serait non pas le premier remplaçant, mais le deuxième qui succéderait à celui qui s’est retiré de la liste, on les obligerait à ne pas tenir compte de l’ordre qu’ils ont délibérément choisi. En outre, le premier remplaçant pourrait devenir titulaire en cas de vacance d’un représentant de son sexe.
Pour les élections européennes, il nous semble de loin préférable d’utiliser le système classique de remplacement, qui est en outre plus visible par les électeurs : c’est le premier candidat non élu, quel que soit son sexe, qui remplacera le candidat défaillant.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Une telle disposition n’améliorerait en rien la parité, puisqu’elle figerait la situation obtenue au moment de l’élection, en exigeant le remplacement d’une femme par une femme, mais aussi, et surtout, celui d’un homme par un homme.
En effet, très souvent, c’est tout de même un homme qui est tête de liste !
M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Malheureusement !
M. Alain Richard, rapporteur. Nous n’y sommes pour rien !
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Souvent, la deuxième position est occupée par une femme. Par conséquent, il vaut mieux laisser le numéro deux prendre la place du numéro un.
M. André Gattolin. Très juste !
M. Michel Savin. Tout cela n’est pas très clair…
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Par conséquent, monsieur Grand, il serait bon que vous retiriez votre amendement.
M. André Gattolin. Ce serait une grande idée ! (Sourires.)
Mme la présidente. Monsieur Grand, l’amendement n° 18 rectifié est-il maintenu ?
M. Jean-Pierre Grand. Madame la ministre, faut-il rappeler qu’il y a eu une très grande tête de liste, qui s’appelait Simone Veil, et que l’on ne peut évidemment pas l’oublier ?
M. André Gattolin. Elle est irremplaçable !
M. Jean-Pierre Grand. Il va de soi que je vais retirer cet amendement, madame la présidente. Toutefois, j’ouvre ce débat, qui ne concerne pas uniquement les élections européennes. Il n’est pas interdit d’élargir la réflexion.
D’ailleurs, j’ai beaucoup d’idées sur le plan constitutionnel,…
M. Jean-Pierre Grand. … qui ne se résument pas à abaisser le nombre des parlementaires pour faire plaisir aux gens ! Apporter la tête des parlementaires au peuple n’a jamais fait avancer la démocratie.
M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Exactement !
M. Michel Savin. Très bien !
M. Jean-Pierre Grand. Je retire donc mon amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 18 rectifié est retiré.
Article 5
I. – (Non modifié) L’article 26 de la loi n° 77-729 du 7 juillet 1977 précitée est ainsi modifié :
1° Après le mot : « rédaction », la fin du premier alinéa est ainsi rédigée : « résultant de la loi n° … du … relative à l’élection des représentants au Parlement européen, est applicable : » ;
2° Le dernier alinéa est supprimé.
II. – Au 3° de l’article 12 de la loi n° 2016-1048 du 1er août 2016 rénovant les modalités d’inscription sur les listes électorales, le mot : « mentionnée » est remplacé par les mots : « d’entrée en vigueur prévue ».
Mme la présidente. L’amendement n° 78, présenté par M. Richard, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Remplacer cet alinéa par trois alinéas ainsi rédigés :
II. – Le 3° de l’article 12 de la loi n° 2016-1048 du 1er août 2016 rénovant les modalités d’inscription sur les listes électorales est ainsi rédigé :
« 3° Le premier alinéa de l’article 26 est ainsi rédigé :
« La présente loi, dans sa rédaction en vigueur à compter de la date d’entrée en vigueur prévue au I de l’article 16 de la loi n° 2016-1048 du 1er août 2016 rénovant les modalités d’inscription sur les listes électorales, est applicable : ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Richard, rapporteur. Il s’agit d’articuler, dans le délai qui convient, l’entrée en vigueur du texte que nous discutons avec celle de la loi du 1er août 2016 rénovant les modalités d’inscription sur les listes électorales. Nous préférons que celles-ci interviennent tout de suite, c’est-à-dire plusieurs mois avant les prochaines élections européennes, conformément à notre tradition.
L’amendement que j’ai soumis à la commission tend ainsi à prévoir que ce texte, une fois promulgué, entre en vigueur tout de suite et qu’un décret rend opérationnelle la réforme de l’inscription sur les listes électorales.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 5, modifié.
(L’article 5 est adopté.)
Article additionnel après l’article 5
Mme la présidente. L’amendement n° 71 rectifié, présenté par Mme Costes, MM. Arnell, Artano et A. Bertrand, Mme M. Carrère, MM. Castelli et Dantec, Mme N. Delattre, MM. Gabouty, Gold et Guérini, Mme Jouve, M. Labbé, Mme Laborde et MM. Menonville et Requier, est ainsi libellé :
Après l’article 5
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À la deuxième phrase du deuxième alinéa de l’article 43-11 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, après le mot : « démocratique » sont insérés les mots : « en France et au sein des institutions européennes ».
La parole est à Mme Josiane Costes.
Mme Josiane Costes. Cet amendement tend à s’inscrire dans la même logique que l’amendement n° 70 précédemment défendu. Il s’agit, une fois encore, de faire émerger les questions européennes dans le débat public européen.
L’article 43-11 de la loi du 30 septembre 1986 définit les missions des sociétés nationales de programme qui composent le secteur public de la communication audiovisuelle : France Télévisions, Radio France et les chaînes en charge de l’audiovisuel extérieur de la France. Il prévoit notamment que celles-ci « favorisent le débat démocratique, les échanges entre les différentes parties de la population ainsi que l’insertion sociale et la citoyenneté », mais aussi d’autres missions plus spécifiques encore, comme la promotion de langues régionales ou le développement de la création artistique.
Selon l’esprit qui nous anime depuis le début de l’examen de ce projet de loi, il nous a semblé nécessaire d’inscrire la dimension européenne du débat démocratique et de la citoyenneté dans cet article, afin d’inciter ces médias à familiariser davantage les citoyens aux enjeux européens, notamment à l’actualité législative européenne. Il existe un véritable besoin d’information de nos concitoyens, pour qui le fonctionnement des institutions européennes reste assez opaque.
Au vu des programmes actuellement proposés par les chaînes publiques, la dimension européenne du débat démocratique ne va pas de soi, malgré le renforcement des prérogatives attachées à la citoyenneté européenne.
Cet amendement vise également à ne pas cantonner les débats relatifs à l’Union européenne aux seules périodes de campagnes électorales, ce qui contribue, selon nous, à des positions électorales pro ou anti-européennes.
Un tel travail de fond d’analyse et d’information devrait permettre à terme de distinguer, dans l’esprit de nos concitoyens, l’outil – les institutions européennes – et le fond – les programmes politiques qui sont mis en œuvre par le biais de cet outil. Il est en effet urgent de transférer le débat idéologique de l’existence de ces institutions vers les politiques qu’elles permettent de mettre en œuvre.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Richard, rapporteur. L’objet de ce projet de loi n’est pas de réformer les obligations des émetteurs publics en matière de débats audiovisuels et d’information.
Par ailleurs, pourquoi préciser dans les textes sur l’audiovisuel que la loi doit garantir le débat démocratique ? Au fond, si le législateur ne dit rien, c’est bien que le débat est démocratique là où il s’exerce, c’est-à-dire y compris dans les institutions européennes.
C’est donc non pas par la simple inscription de cette disposition dans la loi de 1986 que nous obtiendrons ce résultat, mais par un dialogue avec les responsables des chaînes et avec le Conseil supérieur de l’audiovisuel, le CSA, travail que mène d’ailleurs notre commission de la culture, de manière que cet accent européen dans l’actualité, que Mme Costes réclame à juste titre, puisse être renforcé.
Par conséquent, la commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettrait un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Madame la sénatrice, le Gouvernement partage pleinement l’ambition de renforcer le caractère européen du scrutin. C’est précisément ce qui l’a conduit à réformer la circonscription d’élection des représentants au Parlement européen.
C’est également parce qu’il a conscience de la nécessité de consolider le dispositif de campagne officielle au regard des impératifs d’équité et de représentativité que le Gouvernement a proposé de modifier les dispositions de la loi de 1977 relatives à la répartition du temps d’antenne, comme nous l’avons vu hier soir.
Madame la sénatrice, je salue votre volonté de promouvoir le débat européen, comme vous l’avez fait pour la programmation télévisée lors de l’examen d’un précédent amendement.
Cependant, en ce qui concerne cet amendement, le Gouvernement ne souhaite pas créer de nouvelles règles qui sortent du champ du projet de loi. Or ajouter aux obligations des sociétés nationales de programme prévues par la loi de 1986 celles de favoriser le débat démocratique dans les institutions européennes excède non seulement le cadre du présent texte, mais aussi son principal objet, le Parlement européen, car ces obligations seraient applicables même hors campagne électorale.
En outre, il n’est pas évident de déterminer précisément ce que recouvre la notion de débat démocratique dans les autres institutions de l’Union que sont la Commission européenne, le Conseil de l’Union européenne, etc.
Pour ces raisons, le Gouvernement sollicite le retrait de cet amendement, dont l’application semble difficile.
Mme la présidente. Madame Costes, l’amendement n° 71 rectifié est-il maintenu ?
Mme Josiane Costes. Hier soir, nous avons beaucoup débattu du problème des circonscriptions qui éloignent peu ou prou le citoyen des élections européennes. À mon avis, les causes exogènes sont tout aussi importantes et le débat européen n’est pas assez présent dans les médias.
Si notre génération a été particulièrement sensibilisée au problème de l’Europe, la jeunesse actuelle l’est beaucoup moins. C’est pourquoi il me paraît juste de mettre l’accent sur ce point.
Par conséquent, je maintiens cet amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 71 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 6
(Non modifié)
I. – Au 1° du I de l’article 11 de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique, après les mots : « d’une société », sont insérés les mots : « , d’une entreprise ou d’un organisme ».
II. – Le I de l’article 35 de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 précitée est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« L’article 11 est applicable dans sa rédaction résultant de la loi n° … du … relative à l’élection des représentants au Parlement européen. »
Mme la présidente. L’amendement n° 79, présenté par M. Richard, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Le présent article entre en vigueur à l’occasion du prochain renouvellement général des représentants au Parlement européen.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Richard, rapporteur. Le Gouvernement et la commission ont repéré une petite imperfection dans l’obligation de la nouvelle déclaration d’intérêts, qui s’appliquera aux parlementaires européens à partir des prochaines élections européennes.
Certes, l’article 6 rectifie la définition de la déclaration d’intérêts et les conditions de cette obligation, mais il convient de préciser qu’il entrera en vigueur à l’issue des élections européennes et qu’il est à la charge des nouveaux élus.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 6, modifié.
(L’article 6 est adopté.)
Article additionnel après l’article 6
Mme la présidente. L’amendement n° 64 rectifié, présenté par Mme Costes, MM. Arnell, Artano et A. Bertrand, Mme M. Carrère, MM. Castelli et Dantec, Mme N. Delattre, MM. Gabouty, Gold et Guérini, Mme Jouve, M. Labbé, Mme Laborde et MM. Menonville et Requier, est ainsi libellé :
Après l’article 6
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de l’éducation est ainsi modifié :
1° Au quatrième alinéa de l’article L. 111-1, après les mots : « sa citoyenneté » sont insérés les mots : « en France et au sein de l’Union européenne » ;
2° À l’article L. 121-1, après les mots : « responsabilité civique » sont insérés les mots : « en France et au sein de l’Union européenne » ;
3° Au premier alinéa de l’article L. 131-1-1, après les mots : « sa citoyenneté » sont insérés les mots : « en France et au sein de l’Union européenne » ;
4° Au premier paragraphe de l’article L. 312-15, après les mots : « aux valeurs de la République » sont insérés les mots : « et aux droits et devoirs des citoyens en France et au sein de l’Union européenne ».
La parole est à Mme Josiane Costes.
Mme Josiane Costes. Madame la ministre, vous rappeliez hier le niveau d’abstention dans certains territoires lors des dernières élections européennes : près de 70 % ! Or celui-ci est encore plus élevé chez certaines catégories d’électeurs – il est de l’ordre de 73 % chez les électeurs de moins de 35 ans.
Bien qu’il ne s’agisse pas de l’un des objectifs explicites de ce projet de loi et que les retombées ne se manifesteront vraisemblablement pas dès 2019, il me paraît nécessaire de s’attaquer à ce phénomène en modifiant les dispositions relatives à l’éducation morale et civique dans le code de l’éducation.
La mission civique de l’éducation nationale n’a pas varié depuis la Lettre aux instituteurs de Jules Ferry. Elle est toujours de « préparer à notre pays une génération de bons citoyens ». Les prérogatives liées à la citoyenneté française ont en revanche évolué, une citoyenneté européenne ayant été créée pour les ressortissants des États membres de l’Union.
C’est pourquoi il est aujourd’hui nécessaire d’adapter les programmes, afin que tous les enfants de ce pays, et non pas seulement les élèves sélectionnés pour les classes européennes, puissent accéder à cette nouvelle culture civique européenne.
Je ne doute pas que la vulgarisation du fonctionnement des institutions européennes représentera un défi pour les professeurs, mais une meilleure prise en compte de ce nouveau cadre d’exercice de la citoyenneté me paraît primordiale pour réduire le taux d’abstention aux élections européennes des futures générations.
Les ajouts que je propose ont, me semble-t-il, toute leur place au sein de la définition de l’éducation morale et civique actuelle.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Richard, rapporteur. Cet amendement s’inscrit dans la même logique que nos débats précédents : il vise à modifier plusieurs articles du code de l’éducation et à prendre parti sur le contenu de programmes éducatifs, tous les niveaux étant concernés, de la maternelle à l’enseignement supérieur. Or les conditions de notre débat ne nous semblent pas optimales pour procéder à une modification substantielle des programmes.
Sur le fond, les propositions de notre collègue auraient toute leur place dans une proposition de résolution parlementaire, à laquelle nous adhérerions tous, invitant le Conseil des programmes à réfléchir à ce sujet. Quelque chose me dit que Jean-Michel Blanquer ne dirait pas non… (Sourires.)
Notre objection porte non pas sur le fond, mais sur la méthode. Nous nous opposons à l’injection systématique, dans l’ensemble du code de l’éducation, de nouvelles obligations. Ce n’est pas la bonne méthode pour atteindre le but.
Si Mme Costes acceptait de retirer son amendement et de déposer à la place une proposition de résolution, je pense que celle-ci serait votée ici à l’unanimité.
La commission demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi elle émettrait un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Madame Costes, on voit bien le fil rouge de tous vos amendements. On ne peut évidemment qu’adhérer à votre démarche. Cela dit, comme je l’ai indiqué tout à l’heure, les dispositions de cet amendement vont au-delà du cadre du présent texte.
Vous savez que le Président de la République a lancé l’idée d’organiser des consultations citoyennes, lesquelles auront lieu dans de nombreux pays européens entre les mois d’avril et d’octobre. J’espère que les jeunes seront attirés par ces débats.
Par ailleurs, comme vous l’avez souligné dans votre précédente intervention, certaines générations ont eu une culture européenne. Aujourd’hui, ce qui serait positif, ce serait de réintroduire un peu plus d’Europe dans les programmes des cours d’instruction civique ou d’histoire.
Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi il émettrait un avis défavorable.
Mme la présidente. Madame Costes, l’amendement n° 64 rectifié est-il maintenu ?
Mme Josiane Costes. Je partage tout à fait votre avis, madame la ministre. Bien sûr, il n’est pas assez question d’Europe dans les programmes scolaires, de la maternelle à l’université. Dès lors, comment voulez-vous que les élèves âgés de 10 ans ou 12 ans aujourd’hui soient sensibilisés aux problèmes européens ? Pourquoi, dans dix ans, lorsqu’ils auront 18 ans, iraient-ils voter ?
C’est là un problème très important, sur lequel je tiens à alerter. Je maintiens donc mon amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Paccaud, pour explication de vote.
M. Olivier Paccaud. Je m’exprime évidemment en tant que sénateur, mais aussi en tant que professeur d’histoire, une caractéristique que partagent d’autres collègues ici.
Je puis vous assurer que la dimension européenne figure dans les programmes, et pas en mauvaise place, que les enseignants la font vivre et qu’ils respectent les programmes, et cela dès l’école primaire, évidemment, puis au collègue et au lycée. Mon collègue Max Brisson, qui a effectué à peu près le même parcours que moi, pourra vous le confirmer.