Mme Christine Prunaud. Nous proposons de supprimer cet article, qui est pour nous la simple reformulation des alinéas 1 à 7 de l’article 62 du livre des procédures fiscales, le LPF. Il se contente en fait d’ajouter littéralement le cas des « examens de la situation fiscale personnelle » à la liste des contentieux autorisant la régularisation spontanée. Un ajout au demeurant peu dispensateur de plus-value légale, puisque l’article vise déjà l’ensemble des impôts de manière générique.
Pour mémoire, la procédure d’examen de la situation fiscale personnelle, dite ESFP, ne concerne que 4 000 contribuables par an, qui disposent d’ailleurs, bien souvent, des conseils juridiques requis.
Pour information, en 2016, les procédures concernées ont produit, en moyenne, plus de 175 000 euros de rappels d’impôt à payer et 81 000 euros de pénalités appliquées.
Par comparaison, les contrôles sur pièces consacrés à l’impôt sur le revenu ont dégagé, pour leur part, une moyenne de 3 400 euros de droits simples.
Le reste de l’article n’apporte rien de plus au cadre existant, les articles L. 80 A et L. 80 B du livre des procédures fiscales définissant le rescrit fiscal. Leur plus récente rédaction découle de la loi de finances rectificative pour 2017, promulguée en décembre dernier.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
Mme Pascale Gruny, rapporteur. L’avis sera défavorable.
L’article 4 contient plusieurs des principales dispositions fiscales du texte : la réduction de 30 % de l’intérêt de retard en cas de régularisation par le contribuable au cours d’un contrôle fiscal pour l’ensemble des procédures de contrôle et l’inscription dans la loi de la procédure de rescrit fiscal en cours de contrôle. Je veux surtout mentionner la « garantie fiscale », que les députés ont introduite et que la commission spéciale a préservée, en vertu de laquelle tous les points examinés lors d’un contrôle fiscal et n’ayant pas fait l’objet de rehaussement seront considérés comme tacitement validés par l’administration.
Telles sont les raisons pour lesquelles la commission spéciale tient absolument à cet article.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Le Gouvernement tient lui aussi beaucoup à l’article 4, qui renforce les garanties accordées au contribuable et concourt directement à l’objectif qu’il s’est fixé dans le cadre de ce projet de loi.
Tout d’abord, il prévoit de réduire de 30 % le montant dû au titre de l’intérêt de retard en cas de régularisation par le contribuable au cours d’un contrôle fiscal pour l’ensemble des procédures de contrôle.
Ensuite, il vise à inscrire dans la loi la procédure de rescrit fiscal en cas de contrôle.
Enfin, il prévoit que les points examinés par l’administration lors d’un contrôle fiscal, sur lesquels elle a pu prendre position en toute connaissance de cause, lui soient opposables.
Il s’agit pour nous de véritables avancées pour les contribuables. J’émets donc, au nom du Gouvernement, un avis défavorable sur cet amendement de suppression.
Mme la présidente. L’amendement n° 205, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéas 8 et 9
Remplacer ces alinéas par trois alinéas ainsi rédigés :
1° bis Après le 1° de l’article L. 80-B, sont insérés un 1° bis et un 1° ter ainsi rédigés :
« 1° bis Lorsque, dans le cadre d’un examen ou d’une vérification de comptabilité et dès lors qu’elle a pu se prononcer en toute connaissance de cause, l’administration a pris position sur les points examinés lors du contrôle, lesquels sont communiqués au contribuable selon les modalités fixées au second alinéa de l’article L. 49 ;
« 1° ter En matière de contributions indirectes, lorsque, dans le cadre d’un contrôle ou d’une enquête et dès lors qu’elle a pu se prononcer en toute connaissance de cause, l’administration a pris position sur les points examinés lors du contrôle ou de l’enquête, lesquels sont communiqués au contribuable selon les modalités fixées par l’article L. 80-M ; »
La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Je disais à l’instant, me prononçant sur l’amendement n° 134, que le Gouvernement tenait à l’article 4. Et nous tenons à ce que ledit article soit parfaitement applicable, permettant de mettre en place le système de la garantie fiscale dans de bonnes conditions pour que les bénéfices qui en sont attendus soient véritablement au rendez-vous.
Comme je viens de le dire, cet article renforce la sécurité juridique des contribuables en rendant opposables à l’administration fiscale les conclusions, même tacites, de tout contrôle fiscal externe.
Cette garantie ne vaut naturellement que pour les situations de fait identiques, à droit constant, et seulement pour des contribuables de bonne foi, qui ne se sont livrés à aucune dissimulation ou manœuvre frauduleuse.
Cette garantie n’empêche pas l’administration de changer de position, mais ce changement, du fait de la garantie, ne vaut que pour l’avenir, conformément à l’esprit du projet de loi.
Il est toutefois nécessaire de clarifier le texte, car il reste, en l’état, imprécis quant au champ sur lequel porte la garantie, ce qui risque d’introduire des effets pervers. Je pense au risque de pousser les vérificateurs à des investigations toujours plus exhaustives de peur de délivrer une garantie sans avoir suffisamment approfondi le contrôle, ce qui irait à rebours de la philosophie même du texte. Autre risque, celui de générer un contentieux quant à l’identification des points sur lesquels porte effectivement la garantie.
Afin de lever toute ambiguïté quant à la définition des points du contrôle sur lesquels l’administration a pris position, même tacitement, il est donc proposé que le vérificateur liste les points examinés lors de ce contrôle, y compris ceux sur lesquels l’administration a conclu qu’ils ne comportaient ni erreur, ni inexactitude, ni omission, ni insuffisance dans le calcul des droits et taxes éligibles mentionnés par la proposition de rectification ou l’avis d’absence de rectification pour clarifier la portée des conclusions de l’administration fiscale.
En cohérence, l’amendement n° 205 du Gouvernement déposé à l’article 4 bis A introduit par Mme la rapporteur vise à modifier les articles L. 49 et L. 80 M du livre des procédures fiscales.
Par ailleurs, afin de compléter ce dispositif de sécurité juridique, il est proposé de l’appliquer également en matière de contributions indirectes et, par suite, de le recodifier au bon article du livre des procédures fiscales, soit l’article L. 80 B.
Dans le cadre d’un contrôle d’enquêtes en matière de contributions indirectes, les points contrôlés seront mentionnés, selon le cas, lors de l’information orale ou dans la proposition de taxation écrite.
Enfin, cette mesure n’a pas la même portée s’agissant de l’examen de la situation fiscale des particuliers, les points examinés présentant souvent un caractère ponctuel, par exemple la déductibilité d’une dépense d’équipement de chauffage ou les modalités d’imposition d’une prime exceptionnelle. Dans ces cas, la garantie prévue par cet article 4 ne trouve pas réellement à s’appliquer, alors qu’elle a, en revanche, tout son intérêt pour les contrôles de comptabilité des professionnels, lesquels portent, quant à eux, sur des points de méthode récurrents, comme la durée des amortissements ou la politique des prix de transfert. Telle est la raison pour laquelle le présent amendement resserre le champ de la garantie sur les professionnels dans le cas d’une vérification ou d’un examen de comptabilité.
Je dirai, en guise de synthèse, que nous apportons des précisions sur les conditions dans lesquelles la garantie est applicable pour éviter des incertitudes et faire en sorte que les vérificateurs de l’administration ne soient pas pris en défaut ou manquent d’ambition dans la délivrance des garanties. Nous resserrons le dispositif sur les entreprises et non pas sur les particuliers, considérant que l’intérêt réel porte sur la situation et le développement des entreprises. Enfin, nous proposons, par cet amendement, d’élargir le dispositif au secteur des douanes et des droits indirects, qui, à l’heure actuelle, n’est pas inclus dans la garantie fiscale.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
Mme Pascale Gruny, rapporteur. Cet amendement vise à remettre en cause la « garantie fiscale » insérée par nos collègues députés à l’article 4, en vertu de laquelle tous les points examinés lors d’un contrôle fiscal et n’ayant pas fait l’objet d’une rectification seraient considérés comme tacitement validés par l’administration fiscale.
Cela pourrait sembler la moindre des choses, mais il se trouve que tel n’est pas le cas aujourd’hui : le fait qu’un vérificateur examine un point sans rien trouver à y redire ne garantit nullement qu’un prochain contrôle sur les mêmes exercices aboutisse à la même conclusion.
La commission spéciale est très attachée à la « garantie fiscale », qui est sans doute la disposition la plus importante du volet fiscal de ce texte. Cette garantie est, pour le coup, un véritable gage de confiance mutuelle entre l’administration et les contribuables.
L’amendement du Gouvernement est présenté comme un simple aménagement de la « garantie fiscale » : les particuliers en seraient exclus, ce qui peut se comprendre, et le dispositif serait, en contrepartie, étendu aux contributions indirectes.
La réalité, c’est que le cœur de la mesure disparaît, puisque le principe d’approbation tacite serait remplacé par un principe d’approbation expresse, limité à certains des points contrôlés et laissé à la discrétion de l’administration.
La mesure serait ainsi largement vidée de sa substance par cet amendement, car il supprime le principe que nous défendons : à l’issue d’un contrôle, tout point examiné, à condition bien sûr que ce soit en toute connaissance de cause, doit être soit contesté, soit validé.
Ce que demandent les contribuables, à juste titre, c’est une sortie de l’ambiguïté. Telles sont les raisons pour lesquelles j’émets, au nom de la commission spéciale, un avis défavorable.
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Mme la rapporteur me pardonnera d’insister sur les arguments du Gouvernement.
Pour nous, il s’agit non pas de remettre en cause le principe de la « garantie fiscale », mais de faire en sorte qu’elle soit appliquée de la manière la plus efficace possible.
Vous partagez, comme nous, l’objectif de resserrer le dispositif sur les entreprises plutôt que sur les particuliers. En effet, nous en avons tous conscience, c’est principalement sur les méthodes d’élaboration et les processus récurrents que le principe même de la garantie trouve à s’appliquer.
J’ai cru comprendre – c’est en tout cas ce que j’ai déduit de votre silence ou de votre approbation tacite, pour le coup (Sourires.) – que l’élargissement aux droits indirects et au secteur des douanes irait aussi dans le sens recherché par la commission spéciale de votre assemblée.
Peut-être avons-nous une divergence, laquelle est apparue – et vous me pardonnerez cette nouvelle taquinerie – lors de l’adoption de l’article additionnel que vous avez proposé à la commission spéciale, visant à amener le ou les vérificateurs à dresser la liste des points examinés et considérant ainsi que celle-ci valait garantie tacite pour l’ensemble des points ayant fait l’objet d’une vérification.
Nous considérons, en tout cas dans un premier temps, que les services de la DGFiP, qui sont principalement mobilisés pour ces travaux d’inspection et de vérification, doivent être en capacité de lister les points ayant fait l’objet d’une vérification en cohérence et en conformité avec les dispositions de l’amendement que vous avez proposé et fait adopter par la commission spéciale.
Toutefois, nous considérons aussi que ce même vérificateur doit être en capacité de dire, parmi les points vérifiés, ceux qui font l’objet de l’application de la garantie parce que ce sont ceux-ci qui ont été examinés en toute connaissance de cause et avec la garantie que le vérificateur ait pu aller au bout de ses opérations de contrôle.
Il faut avoir en tête que, dans d’autres dispositions du projet de loi que nous vous proposons et qui ont recueilli un avis favorable, d’abord, de l’Assemblée nationale, puis de la commission spéciale, nous envisageons de limiter à neuf mois sur trente-six la durée de contrôle auquel sont soumises les entreprises, notamment les PME, auxquelles ce dispositif sera appliqué à titre expérimental. Cela signifie que nous avons aussi pour objectif de réduire le temps pendant lequel ces contrôles auront lieu. Un certain nombre de points peuvent, par conséquent, faire l’objet de vérifications qui, aux yeux du vérificateur, ne seraient pas suffisamment complètes pour l’amener à délivrer cette garantie.
Nous avons donc véritablement cet objectif d’efficacité : il s’agit, en effet, de passer de la garantie tacite à la garantie explicite afin non seulement de sécuriser le vérificateur, mais aussi de faire en sorte de réduire le plus possible les contentieux sur l’interprétation faite de la garantie.
Je suis désolé, madame la présidente, d’avoir été un peu long, mais je tenais vraiment à souligner que, si nous sommes attachés à ce principe de garantie, la recherche d’efficacité sur ledit principe nous amène à proposer les aménagements contenus dans cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Pascale Gruny, rapporteur. Je vais maintenir l’avis que j’ai exprimé. J’entends bien que la tâche des contrôleurs n’est pas toujours facile, mais l’administration fiscale peut traiter – en langage informatique, on dirait « mouliner » – le fichier des écritures comptables des entreprises pour faire sortir énormément de points.
Je pense donc sincèrement que l’on peut maintenir la rédaction que nous proposons pour cet article. Je conçois que vous vouliez, monsieur le secrétaire d’État, le resserrer sur les entreprises et l’élargir aux contributions indirectes, mais il vous sera possible d’inclure ces éléments dans un autre article du texte.
Quoi qu’il en soit, la commission spéciale reste défavorable à votre amendement.
M. Antoine Lefèvre. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Le Gouvernement prend bien évidemment acte du vote du Sénat. Dans la poursuite de cette discussion sur l’article 4 et la garantie, nous avons déposé à l’instant – et vous pardonnerez, je l’espère en tout cas, cette façon peut-être un peu cavalière de procéder –, un amendement de repli. (L’amendement est distribué.)
Il vise, dans un premier temps et pour rejoindre l’un de nos points d’accord, à élargir le champ de la garantie aux droits indirects, et donc au secteur des douanes. Nous pourrons ainsi, à l’occasion de cette séance et au-delà de la petite divergence que nous avons, faire évoluer malgré tout la rédaction de cet article sur la question des droits indirects, comme je l’ai dit en défendant l’amendement n° 205.
Mme la présidente. Je suis donc saisie d’un amendement n° 216, présenté par le Gouvernement, ainsi libellé :
Après l’alinéa 9
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« En matière de contributions indirectes, il en est de même lorsque, dans le cadre d’un contrôle ou d’une enquête, et dès lors qu’elle a pu se prononcer en toute connaissance de cause, l’administration a pris position sur les points du contrôle, y compris tacitement. » ;
Cet amendement vient d’être présenté par M. le secrétaire d’État.
Quel est l’avis de la commission spéciale ?
Mme Pascale Gruny, rapporteur. Comme le texte de cet amendement vient juste de nous être distribué, je ne peux pas donner l’avis de la commission spéciale et m’exprimerai à titre personnel.
Je ne peux être favorable à cet amendement s’il s’insère dans la rédaction que nous proposons pour l’article 4, que nous souhaitons maintenir en l’état. Nous suggérons qu’il figure dans le projet de loi sous la forme d’un article additionnel. Je le répète, je ne souhaite pas que l’article 4 soit modifié.
Mme la présidente. Monsieur le secrétaire d’État, il faut que vous vous exprimiez sur cette demande de la commission spéciale, qui supposerait que le Gouvernement procède à une rectification de son amendement.
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Le Gouvernement dépose cet amendement de repli à l’article 4, car il vise strictement le même objet. L’article 4 définit le périmètre auquel s’applique la garantie fiscale. Il nous semble, par conséquent, tout à fait logique de faire figurer la question des droits indirects à l’article 4.
Je ne souscris pas, ce que vous me pardonnerez, madame la rapporteur, à l’argument selon lequel il faudrait créer un article additionnel. L’article 4 porte sur la définition de la garantie fiscale. Nous élargissons son périmètre, conformément aux attentes exprimées à de nombreuses reprises, tant par la commission spéciale que par un certain nombre de députés et de fonctionnaires de la direction générale des douanes et des droits indirects. Sa place logique est donc bien au cœur de l’article 4, qui définit le régime de la garantie.
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Richard.
M. Alain Richard. Je pense que l’avis de Mme la rapporteur, prononcé un peu à l’improviste, ne peut pas être tout à fait complet. L’amendement est en effet rédigé pour s’insérer dans le déroulement de l’article 4. On ne peut pas en faire un article spécifique, parce qu’il faudrait le réécrire.
Monsieur le secrétaire d’État, ne serait-il pas préférable de réserver un moment ce point et de le réexaminer un peu plus tard, laissant aux services de la commission le temps d’en vérifier l’impact ?
Mme la présidente. Mme le rapporteur peut s’exprimer, mais il me semble qu’il faut procéder au vote de l’amendement.
La parole est à M. le président de la commission spéciale.
M. Jean-François Husson, président de la commission spéciale. Madame la présidente, je vous demande une suspension de séance de cinq minutes.
Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt-deux heures, est reprise à vingt-deux heures dix.)
Mme Pascale Gruny, rapporteur. Nous restons sur notre position : nous sommes d’accord avec ce que vous voulez mentionner, monsieur le secrétaire d’État, mais à condition que cela figure dans un article additionnel.
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. J’entends la position de la commission, mais au-delà de la conviction sur le fond que ce que nous proposons relève véritablement de l’article 4 et que cela nous paraît devoir figurer au cœur de celui-ci, il faut aussi avoir en tête une question de légistique et d’écriture législative.
Le Gouvernement propose un amendement qui intervient après l’alinéa 8 de l’article 4, l’alinéa 8 ayant pour objet de modifier l’article L. 80 A du livre des procédures fiscales. Quant à l’alinéa 10, qui vient juste après, il modifie l’article L. 80 B.
Mme la rapporteur souhaite que soit introduit un article additionnel après l’article 4, ce qui reviendrait à viser une deuxième fois l’article L. 80 A du livre des procédures fiscales dans un article qui viendrait après l’article 4 et après que nous ayons visé, au dixième alinéa, l’article L. 80 B.
En matière légistique, la logique veut – ce qui me paraît reconnu et partagé – que les articles du code que nous sommes amenés à modifier le soient dans l’ordre.
Dans la mesure où cette modification porte sur l’article L. 80 A, nous devons l’introduire par amendement avant les dispositions concernant l’article L. 80 B, c’est-à-dire entre l’alinéa 8 et l’alinéa 10 de l’article 4.
C’est la raison pour laquelle je maintiens cet amendement sur l’article 4, à l’alinéa que j’ai mentionné.
Mme la présidente. Pour résumer, madame le rapporteur, l’avis de la commission est défavorable sur l’amendement n° 216 tel qu’il est présenté et ne serait favorable que si cet amendement tendait à insérer un article additionnel. Est-ce bien cela ?
Mme Pascale Gruny, rapporteur. D’un point de vue légistique, trois articles du texte visent les procédures douanières et les intérêts de retard. Alors, monsieur le secrétaire d’État, à votre argument selon lequel cet amendement doit rester dans le cadre de l’article 4, car il se réfère aux procédures douanières, je vous rétorque qu’il peut prendre la forme d’un article additionnel, après l’article 4. On peut trouver d’autres exemples dans ce même texte.
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Je maintiens, madame la présidente, que nous modifions l’article L. 80 A, ce qui nécessite de le faire dans l’ordre et, donc, de maintenir l’amendement à l’endroit du texte où nous l’avons proposé, après l’alinéa 9. Il s’agit de respecter un principe légistique reconnu. En termes de lisibilité et donc d’intelligibilité de la loi, y compris au regard de la jurisprudence du Conseil constitutionnel, il est extrêmement important, à notre sens, de respecter l’ordre des articles du livre des procédures fiscales que nous examinons.
J’appelle aussi l’attention des uns, ou des unes, et des autres sur ceci : ce que nous proposons, après avoir pris acte de la position de la commission spéciale, qui a refusé des modifications plus importantes à l’article 4 que nous lui soumettions, va à la fois dans le sens du travail de la commission et, surtout, dans le sens de l’intérêt des contribuables.
Avec cet amendement, nous ne visons qu’un objectif : faire en sorte que la garantie fiscale qui s’applique aux impôts directs s’applique aussi aux impôts indirects. L’extension du champ ainsi proposée correspond parfaitement aux souhaits de la commission spéciale.
Je vous invite à adopter cet amendement, qui permettra aux entreprises, et aux particuliers, de bénéficier d’une garantie fiscale tant sur les impôts directs que sur les impôts indirects. Je rappelle que la légistique nous impose véritablement de maintenir cet amendement à cet endroit du texte.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 4.
(L’article 4 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 4
Mme la présidente. L’amendement n° 28 rectifié bis, présenté par MM. Mouiller et Gremillet, Mmes Lamure et Garriaud-Maylam, MM. Pillet, D. Laurent, Pellevat, Bonne et Henno, Mme Eustache-Brinio, MM. Longeot, Kern, Mandelli, Rapin, Daubresse, Brisson, Chaize et Paccaud, Mme Lavarde, MM. Cuypers, Morisset, Saury et Milon, Mme Dumas, MM. Revet et Pointereau, Mmes Imbert, Malet et Canayer, M. Forissier, Mme Deromedi, MM. Lefèvre, Bazin et Leroux, Mme Morhet-Richaud, MM. Karoutchi, Savary, Canevet, Mayet et H. Leroy, Mmes L. Darcos et Renaud-Garabedian, MM. Bansard, Bonhomme, Savin, Gilles, Perrin et Raison, Mme Billon, MM. Chatillon, Frassa et Reichardt, Mmes Duranton, Deroche et Férat et M. Kennel, est ainsi libellé :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le troisième alinéa de l’article L. 277 du livre des procédures fiscales est complété par une phrase ainsi rédigée : « Toutefois, pour les entreprises de moins de vingt-et-un salariés, le débiteur qui n’a pas encore engagé de poursuite judiciaire est dispensé de constituer des garanties sur le montant des droits contestés. »
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Philippe Mouiller.
M. Philippe Mouiller. Cet amendement concerne les entreprises de moins de vingt et un salariés. En cas de procédure fiscale à la demande du comptable du Trésor public, le réclamant, pour pouvoir bénéficier effectivement du sursis de paiement qu’il a demandé, doit constituer des garanties propres à assurer le recouvrement de la créance du Trésor, sous forme de cautionnement, d’hypothèque, ou encore de nantissement, et ce que l’on soit ou non en phase contentieuse.
Ces garanties sont très coûteuses pour les petites entreprises et obèrent leur capacité de financement. Cette situation force certaines entreprises à choisir entre la poursuite d’un contentieux ou le développement de leur activité.
De fait, quand bien même le contribuable serait de bonne foi, il est tenu de constituer des garanties lorsque celles-ci lui sont demandées.
De plus, aux termes de l’article R. 277-1 du LPF, une entreprise de moins de vingt et un salariés de bonne foi qui veut se prévaloir du sursis de paiement peut se retrouver dans une situation préjudiciable si le comptable public refuse ses propositions de garanties. En effet, dans ce cas, l’entreprise se retrouvera de facto privée du droit au sursis de paiement.
Nous demandons donc par cet amendement une dispense totale de constitution de garantie en cas de sursis de paiement, et ce uniquement pendant la phase non contentieuse de la procédure.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
Mme Pascale Gruny, rapporteur. La commission demande le retrait de cet amendement.
Nous sommes bien conscients qu’il peut être très difficile de constituer des garanties pour un redevable qui sollicite un sursis de paiement. Cela dit, supprimer cette obligation ferait courir un risque trop important, non seulement au Trésor public, bien sûr, mais surtout à l’entreprise elle-même si la réclamation venait à être rejetée. Au final, cette disposition risquerait d’aboutir à une hausse des défaillances d’entreprises, à l’inverse de l’intention de ses auteurs.
Par ailleurs, rappelons que les garanties ne sont pas nécessairement constituées en espèces : il peut s’agir de marchandises, de titres, ou encore d’une caution bancaire.
C’est peut-être d’ailleurs là que se trouve la solution au problème que cet amendement vise à résoudre : dans l’accès des TPE et PME aux prêts et cautions bancaires. Monsieur le secrétaire d’État, le Gouvernement a annoncé, pour cette année, un projet de loi portant plan d’action pour la croissance et la transformation des entreprises, ou PACTE. Le Gouvernement a-t-il l’intention de traiter ce problème dans le cadre de ce projet de loi ?
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. L’avis du Gouvernement est le même que celui de la commission, et pour les mêmes raisons : nous demandons le retrait de cet amendement ; à défaut, notre avis sera défavorable.
Vous avez évoqué, madame le rapporteur, la question des cautions. Vous savez que le projet de loi PACTE est encore en élaboration. Nous sommes dans une phase de consultations et de concertation ; le texte n’a pas encore été transmis au Conseil d’État ni donc été examiné par le conseil des ministres. Dès lors, votre proposition sera évidemment transmise à mes collègues du ministère de l’économie et des finances, qui jugeront dans quelle mesure ils pourront intégrer ces dispositions dans le texte qu’ils préparent.