M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.
Mme Nicole Bricq. Je comprends tout à fait l’attachement des membres du groupe socialiste à ce qui fut présenté, au cours du précédent quinquennat, comme une réforme phare.
Mais évitons les faux procès : tout le monde, y compris le Gouvernement, est favorable à la modernisation du prélèvement de cet impôt ô combien sensible pour nos concitoyens, du moins pour ceux qui le paient – nous savons qu’ils sont de moins en moins nombreux, puisqu’à peine 50 % des foyers sont concernés.
J’ai moi-même très longtemps été favorable au prélèvement à la source : je ne comprenais pas pourquoi la France ne s’y mettait pas, alors que tous ses voisins européens l’avaient mis en place. Mais ils l’avaient fait – je voudrais le souligner – à une époque déjà ancienne, lorsque la numérisation n’existait pas. Internet était inconnu, alors ! Pour eux, une telle réforme représentait une simplification extraordinaire.
Vous y allez très fort, mes chers collègues du groupe socialiste : vous proposez un amendement de suppression. Il serait vraiment dommage de le voter, dans la mesure où nous disposerons bientôt d’éléments qui nous permettront d’apprécier la nature de la modernisation qui pourrait être effectuée d’ici un an.
Des expérimentations sont menées ; il serait dommage, en supprimant l’article 9, de se priver d’un outil nouveau qui permettra d’éclairer tous les acteurs parlementaires. L’article comprend quand même trois alinéas et prévoit notamment la remise d’un rapport au Parlement.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Gérald Darmanin, ministre. Je voudrais remercier Mme Bricq pour son intervention qui, je crois, pourrait achever de convaincre M. le rapporteur général.
Monsieur Marc, si l’ancien secrétaire d’État dont vous parlez est le même que celui qui vous a présenté le budget, vous devriez vous méfier de la sincérité de ses propos ! (Vives protestations sur les travées du groupe socialiste et républicain. – M. Roger Karoutchi s’esclaffe.)
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. Il s’appelait Eckert !
Mme Laurence Rossignol. Provocateur !
M. Gérald Darmanin, ministre. Songez que, peut-être, nous aurions pu éviter de prendre un décret d’avance !
Mme Michèle André, présidente de la commission des finances. Les décrets d’avance sont monnaie courante !
M. Gérald Darmanin, ministre. Puis-je me permettre de souligner que, lorsque je suis arrivé aux responsabilités qui sont les miennes, il y a huit semaines, tous les syndicats m’ont dit que la DGFiP avait fait un travail absolument extraordinaire, comme vous l’avez souligné avec raison, mesdames, messieurs les sénateurs, mais que quelques questions continuaient de se poser sur le fonctionnement du passage au prélèvement à la source ? Mais peut-être faut-il comprendre que l’on ne doit pas écouter les syndicats de fonctionnaires ?
Je vous rappelle que le taux de recouvrement de l’impôt sur le revenu s’élève aujourd’hui à 97 %. La moindre des choses que nous devons aux Français, s’agissant du lien fiscal que nous entretenons avec eux, c’est qu’il fonctionne correctement !
Je souhaite souligner un deuxième point : l’expérimentation prévue avait lieu après le « top départ », puisqu’il fallait prendre une décision au début du mois de juillet.
Mme Nicole Bricq. Eh oui !
M. Gérald Darmanin, ministre. Nous aurions donc envoyé les feuilles d’imposition assorties du fameux taux neutre. Si l’expérimentation se passait bien, tout allait bien ; mais une expérimentation, par définition, n’a d’intérêt que si l’on prend le temps d’en tirer les conclusions.
Enfin, s’agissant de la relation de confiance qui doit être construite avec les entreprises, le Gouvernement est dans l’attente et à l’écoute. Quant aux éventuelles surcharges pour les TPE et PME, 97 % des entreprises seulement, si j’ose dire, ont adopté la DSN : 3 % des entreprises sont donc encore hors DSN. (Protestations sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
Or la politique intervient toujours là où résistent les derniers pourcentages. À examiner tous les signaux d’alerte, je constate donc que nous n’étions pas tout à fait prêts ! Je préfère que nous reportions d’un an la mise en œuvre du dispositif et que nous fassions les choses bien, plutôt que d’aller absolument le plus vite possible, sachant que le décret n’a été signé que quelques jours avant les échéances électorales !
Madame la sénatrice Gonthier-Maurin, concernant la question juridique de savoir s’il est légal ou non d’inclure la retenue à la source dans ce texte, et puisque les sages du Conseil constitutionnel auront à lire les comptes rendus de nos débats, je souligne d’abord qu’il ne s’agit pas d’une disposition organique.
Ensuite, nous avons tout à fait le droit de reporter la mesure ; c’est même la bonne gestion fiscale qui commande de prévenir dès maintenant, au cœur de l’été, après un débat présidentiel très important sur ce sujet notamment, que nous la reportons.
En outre, votre démonstration, madame la sénatrice, est contradictoire : soit la retenue à la source établit un nouveau lien de l’entreprise avec les salariés, soit elle n’établit aucun nouveau lien. Et, d’évidence, s’agissant de la possibilité pour les entreprises, qui sont déjà collectrices d’impôt – c’est le cas pour la TVA ou la CSG –, de collecter à la source l’impôt sur le revenu, ce point a tout à fait sa place dans le cadre de la loi que nous vous présentons, qui porte sur le dialogue social. Il ne s’agit évidemment pas d’un cavalier législatif.
Enfin, je le répète, il ne s’agit pas ici de préparer la fusion entre l’IR et la CSG : le Gouvernement a déjà eu l’occasion de dire qu’il ne le ferait pas et qu’une telle fusion n’était pas dans ses intentions. (Applaudissements sur les travées du groupe La République en marche.)
Mme Nicole Bricq. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote. (Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean Desessard. Monsieur le président, monsieur « mandat-unique-de-maire-de-Marseille », nous ne nous verrons plus dans l’hémicycle ! (Sourires.)
M. Roger Karoutchi. Vous irez à Marseille, mon cher collègue !
M. Jean Desessard. Nous nous verrons certainement, une fois dans l’année, à Maussane-les-Alpilles ! (Nouveaux sourires.)
Je souhaite intervenir pour exprimer ma position, qui n’est pas celle de l’ex-groupe écologiste, mais celle d’un non-inscrit écologiste. J’étais moi aussi, comme Mme Bricq, favorable à la retenue à la source. Je n’ai pas rejoint En marche, mais j’ai moi aussi évolué, et il ne me semble pas idiot que nous nous donnions une année supplémentaire pour réfléchir à un prélèvement mensuel. Avec l’évolution incontestable des modalités de travail – les cas de multiemployeurs ou d’emplois multifonctions se multiplient –, si les moyens numériques nous permettent d’obtenir le même résultat par un prélèvement mensuel, nous pourrions éviter la complexité de l’impôt à la source.
Un non-inscrit écologiste, ne représentant pas l’ensemble des non-inscrits écologistes, souhaite donc dire qu’il ne votera pas l’amendement proposé par le groupe socialiste. Je me rallie aux interrogations formulées par Mme Bricq.
M. le président. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.
M. David Assouline. Le débat porte non pas sur le bien-fondé de la retenue à la source en soi, mais sur le fait d’introduire une telle disposition dans un texte portant sur un tout autre objet.
Certes, la Constitution confère au Gouvernement le privilège de pouvoir faire passer des cavaliers législatifs sans que ceux-ci soient considérés comme tels par le Conseil constitutionnel. Mais la méthode, elle, est pour le moins cavalière !
Je souhaite également faire une observation de forme. Le décret que le précédent gouvernement avait pris peu avant l’élection présidentielle faisait suite à un grand débat dans la société française. On ne peut pas dire que la décision avait été prise « en catimini ». Il y avait eu beaucoup de discussions. La réforme avait été longuement construite et expliquée et de nombreux fonctionnaires y avaient travaillé concrètement.
Et voilà que vous nous demandez d’avaliser en quelques minutes, au détour d’un texte dont ce n’est pas l’objet, une mesure décidée sans débat !
Vous pourriez sans doute vous prévaloir d’une certaine légitimité si une telle mesure avait été mise en débat au cours de l’élection présidentielle ; les Français l’auraient, en quelque sorte, validée en élisant Emmanuel Macron. Mais, contrairement à ce que vous affirmez, monsieur le ministre – je suis allé vérifier –, cela n’a pas été le cas ; le report n’a été annoncé qu’au mois de juin, soit plusieurs semaines après l’élection présidentielle.
Mme Nicole Bricq. Mais non ! Il avait été annoncé pendant la campagne présidentielle !
M. David Assouline. Ce n’est pas cela, la démocratie ! On pourrait considérer que le débat a été tranché par le peuple lors des élections si l’actuel Président de la République avait annoncé au cours de la campagne son intention de reporter le prélèvement à la source. Mais il ne l’a pas fait.
Mme Nicole Bricq. Si !
M. le président. L’amendement n° 150 rectifié, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Les articles 60 et 82 de la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017 sont abrogés.
La parole est à Mme Christine Prunaud.
Mme Christine Prunaud. Cet amendement vise à supprimer la disposition de la loi de finances relative à la création de l’imposition par retenue, qui représente un danger tant pour le devenir des prélèvements fiscaux et sociaux que pour les citoyens, dont l’impôt personnel augmenterait à coup sûr. Il tend également à instituer un comité de suivi régional du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, le CICE, pour s’assurer que les TPE et PME en bénéficient.
Selon le droit actuel, lorsque le comité d’entreprise constate que le CICE n’est pas utilisé conformément à son objet, il peut demander des explications à l’employeur. Si l’employeur refuse de s’expliquer ou si l’utilisation non conforme du CICE est confirmée, le comité d’entreprise peut rédiger un rapport qu’il transmettra au comité de suivi régional du CICE.
En l’état, le dispositif n’est pas suffisamment effectif. L’absence de sanctions peut décourager l’action des représentants du personnel.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des finances ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. J’ai l’impression que notre collègue vient plutôt de défendre l’amendement n° 151 rectifié, dont nous serons saisis dans quelques instants.
L’amendement n° 150 rectifié vise à abroger le prélèvement à la source.
Je me suis déjà exprimé à cet égard. La commission y est, par définition, défavorable. Nous préférons attendre les résultats de l’expérimentation et de l’audit pour nous prononcer définitivement sur l’avenir du prélèvement à la source.
Adopter un tel amendement, ce serait opter pour le statu quo. Or je ne crois pas que ce soit la position majoritaire parmi nous. Il faut faire évoluer l’impôt, le rendre plus contemporain.
À nos yeux, il existe des options autres que le simple prélèvement à la source. Je pense notamment à la mensualisation contemporaine. J’ai entendu des prises de position en ce sens sur certaines travées. En tout cas, il n’est pas souhaitable d’en rester au statu quo, sur la base d’un impôt historique.
Par ailleurs, l’amendement n° 150 rectifié a également pour objet la suppression de l’article 82 de la loi du 29 décembre 2016 de finances pour 2017, qui transforme la réduction d’impôt pour l’emploi d’un salarié à domicile en crédit d’impôt. Cela nous emmène bien au-delà du débat sur le seul prélèvement à la source.
Par conséquent, la commission des finances émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 151 rectifié, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéas 3 et 4
Remplacer ces alinéas par deux paragraphes ainsi rédigés :
II. – Les dispositions de l’article 244 quater C du code général des impôts cessent d’être applicables pour les exercices ouverts à compter du 30 septembre 2017.
III. – L’article L. 2323-56 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le comité de suivi régional peut décider, après avoir entendu l’employeur et les représentants du personnel, de suspendre ou de retirer l’aide accordée. Le cas échéant, il peut en exiger le remboursement. »
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. En 2003, lors de sa mise en place, le CICE nous avait été vendu comme une mesure permettant d’améliorer la compétitivité des entreprises. Je rappelle que ce crédit est calculé sur la masse salariale pour les salaires inférieurs à 2,5 SMIC : de 4 %, il est passé à 6 %, pour atteindre 7 % à compter du 1er janvier 2017.
Puisque nous disposons aujourd’hui d’un peu de recul, examinons ce qu’il en est en matière d’emploi et d’investissement. Selon France Stratégie, l’organisme chargé d’analyser la situation, 120 000 emplois au maximum auraient été créés ou maintenus.
Les charges à payer au titre du CICE par le budget pour les remboursements de l’impôt sur les sociétés s’élevaient à 15,2 milliards d’euros en 2016, et le stock de créances était de 17,11 milliards d’euros à cette période, soit 17,11 milliards d’euros non consommés, mais qui devront être couverts dans les prochains budgets.
Une augmentation de 5 milliards d’euros de crédits sera nécessaire en 2018. Nous ne pensons pas qu’il faille se satisfaire de simples améliorations des marges des entreprises sans retour sur l’emploi, l’investissement ou la compétitivité.
L’adoption de notre amendement permettrait une orientation budgétaire autre que celle qui nous est proposée actuellement : les dépenses publiques seraient peut-être plus efficaces si elles étaient consacrées à la satisfaction des besoins de nos concitoyens plutôt qu’au CICE…
M. le président. L’amendement n° 152, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. Alinéa 3
Remplacer les mots :
et de présenter
par les mots :
, et présentant
II. Alinéa 4
Remplacer les mots :
les résultats de simulations et de tests
par les mots :
des analyses
La parole est à M. le ministre.
M. Gérald Darmanin, ministre. Cet amendement a pour objet de préciser le champ du rapport qui sera remis au Parlement avant le 30 septembre. Cela correspond, me semble-t-il, à la volonté des parlementaires, en particulier des membres de votre assemblée.
Le Gouvernement pourra ainsi répondre aux questions des parlementaires lors de l’examen du projet de loi de finances. L’idée est de leur fournir un maximum d’informations pour qu’ils puissent prendre des décisions en connaissance de cause, sur la base de chiffres les plus objectivés possible, et non sur celle de simples rapports.
M. le président. L’amendement n° 209, présenté par Mme Garriaud-Maylam, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Ce rapport examine aussi les conditions spécifiques de mise en œuvre du prélèvement à la source pour les non-résidents fiscaux.
La parole est à Mme Joëlle Garriaud-Maylam.
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Les alinéas 3 et 4 de cet article 9 prévoient la présentation au Parlement d’un rapport sur le prélèvement à la source, mais ils ne mentionnent aucunement les Français de l’étranger.
J’aimerais pourtant vous dire combien cette disposition suscite d’interrogations et d’inquiétudes parmi nos compatriotes expatriés et leurs élus, les conseillers consulaires : d’abord, parce que les Français de l’étranger paient souvent des impôts dans deux pays différents ; ensuite, parce que tous les pays n’ont pas conclu de convention fiscale avec la France ; enfin, et tout particulièrement, parce que le crédit d’impôt pour éviter le double prélèvement pendant l’année de transition pourrait présenter de sérieuses difficultés.
Nous souhaiterions donc que le rapport comprenne une étude spécifique sur l’application du dispositif à la situation particulière des Français de l’étranger.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des finances ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis. Ainsi que je l’ai déjà indiqué, je reconnais que l’article 9 n’a pas grand rapport avec le dialogue social, mais l’amendement n° 151 rectifié n’en a absolument aucun : c’est un pur cavalier ! Je ne dis pas que le débat sur l’efficacité du CICE est dépourvu d’intérêt, mais sa place est en loi de finances, pas dans le cadre de l’examen du présent projet de loi.
La commission des finances émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
Je me réjouis que le Gouvernement accepte l’apport du Sénat et souhaite enrichir le rapport permettant d’analyser les options autres que le prélèvement à la source. M. le ministre souligne simplement la difficulté de procéder à des tests compte tenu des délais impartis. C’est l’objet de l’amendement n° 152, auquel la commission des finances est favorable.
Enfin, par son amendement n° 209, notre collègue Joëlle Garriaud-Maylam souligne les difficultés spécifiques des Français de l’étranger. J’avoue que nous n’avons pas forcément pu expertiser tous les cas de figure, en particulier ceux des pays n’ayant pas de convention fiscale avec la France. Sans doute serait-il utile d’enrichir notre réflexion à cet égard. Peut-être M. le ministre pourrait-il nous apporter des précisions ? Faute d’information, la commission des finances a souhaité s’en remettre à la sagesse du Sénat.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur les amendements nos 151 rectifié et 209 ?
M. Gérald Darmanin, ministre. Je n’entrerai pas dans le débat sur le CICE, que nous pourrons avoir lors de l’examen de projet de loi de finances. L’amendement n° 151 rectifié est très éloigné de l’objet du présent projet de loi.
L’adoption de l’amendement n° 209 aurait, je le crains, des effets contraires à la philosophie défendue par Mme Garriaud-Maylam, qui souhaite assurer la protection des Français de l’étranger.
L’étude préalable contient une dizaine de pages sur la situation particulière de ces personnes. Certes, ainsi que M. le rapporteur général de la commission des finances l’a souligné, les situations des Français de l’étranger varient selon les pays. Mais, en général, les retenues à la source spécifiques aux non-résidents sont préférables pour eux, notamment en raison de leur caractère libératoire… (M. Robert del Picchia acquiesce.) Je me réjouis de constater qu’un sénateur des Français de l’étranger approuve mes propos.
Nos compatriotes expatriés ont bien plus d’avantages à rester dans le système actuel. Au-delà des modalités de recouvrement, les retenues à la source spécifiques aux revenus salariaux et assimilés de source française des non-résidents sont plus favorables.
Je sollicite donc le retrait de cet amendement, dont l’adoption serait sans doute défavorable, d’un point de vue fiscal, à beaucoup de Français de l’étranger, notamment au regard des conventions que nous avons signées avec d’autres pays.
M. le président. La parole est à M. Bruno Retailleau, pour explication de vote.
M. Bruno Retailleau. Monsieur le président, après l’hommage que M. le président du Sénat vous a adressé, je souhaite vous exprimer, au nom de chacun des membres du groupe que vous avez présidé – j’ai pris votre succession –, notre profonde affection.
Vous nous quitterez peut-être dans quelques heures ou quelques jours, mais votre voix, avec cet incomparable accent marseillais qui la distingue entre mille, résonnera encore dans cet hémicycle longtemps après votre départ !
J’en viens à l’objet de notre débat. Nous soutiendrons l’amendement du Gouvernement, qui va dans le bon sens, M. le rapporteur général l’a souligné.
Depuis des mois, notre position n’a pas varié. Nous n’avons jamais été favorables à la retenue à la source. Certes, nous ne sommes pas hostiles – bien au contraire ! – au caractère contemporain de l’impôt, mais nous ne voulions pas surcharger encore les entreprises en leur imposant ce rôle de collecteur de l’impôt sur le revenu des personnes physiques, qui n’est pas du tout le même que celui de collecteur de la TVA.
Grâce aux travaux de la commission des finances, en particulier de son rapporteur général, le Sénat a pu trouver une solution – je pense qu’il faudra l’étudier, monsieur le ministre, d’autant que vous-même vous êtes engagé sur ce chemin – qui conjugue le caractère contemporain de l’impôt au souci d’amoindrir les charges pesant sur les entreprises. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme Joëlle Garriaud-Maylam, pour explication de vote.
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. J’ai bien entendu les propos de M. le ministre, mais il me paraît tout de même important que le rapport présenté à la fin du mois de septembre, à la suite de l’expérimentation, prenne en compte la situation spécifique des Français de l’étranger. Il est vrai que l’on a systématiquement tendance à les oublier ; certains discours n’y font même plus du tout référence, contrairement à ce qui avait toujours été la tradition républicaine. Ils font pourtant partie intégrante de notre société !
Je ne vous demande pas beaucoup, ministre : simplement de soutenir une telle démarche.
M. le président. La parole est à M. Thierry Carcenac, pour explication de vote.
M. Thierry Carcenac. Nous voterons évidemment contre les amendements nos 151 rectifié et 209. Mon explication de vote porte sur l’amendement n° 152.
Je tiens à souligner l’intérêt de la déclaration sociale nominative, ou DSN. Cet outil, qui permet de simplifier les déclarations des entreprises, permet de faire énormément baisser leurs coûts. Or vingt-quatre lignes sont supprimées. Le rapport permettra peut-être de clarifier l’effet des mesures envisagées sur les entreprises. J’ai d’ailleurs entendu M. le ministre reconnaître que l’évaluation de la charge résultant pour elles de l’introduction de la retenue à la source était peut-être exagérée.
Nous voterons l’amendement du Gouvernement.
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. L’amendement présenté par les communistes aura le soutien du groupe écologiste honoraire. (Rires.)
M. Jean-Claude Luche. Feu le groupe écologiste ! (Sourires.)
M. Jean Desessard. Macron nous a « tuer » ! (Rires.)
Nous, les écologistes, avons toujours condamné le CICE, estimant qu’il n’était pas créateur d’emplois. À nos yeux, cela a été une erreur du quinquennat qui vient de s’écouler. D’ailleurs, ses principaux protagonistes l’ont payé très cher ; nous aussi, il est vrai… (Sourires.)
Nous sommes donc partisans de la suppression du dispositif. Le Gouvernement veut le supprimer, mais pour le remplacer par une exonération ou une diminution des cotisations sociales. Pour ma part, je souhaiterais que l’exonération concerne les cotisations salariales, afin d’augmenter le pouvoir d’achat des salariés. Cela permettrait de relancer l’économie, ce dont nous avons besoin.
Je soutiens donc cet amendement, qui tend à supprimer le CICE et permet d’aller vers une suppression des cotisations sociales salariales, en vue de relancer le pouvoir d’achat.
Je serais très intéressé de savoir comment Mme Bricq – certes, je ne veux pas la forcer à prendre la parole (Rires sur les travées du groupe Les Républicains.) –, qui a défendu le CICE avec une telle fougue pendant cinq ans, peut aujourd’hui défendre la position, légèrement contraire, du Gouvernement… (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe CRC, du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote.
Mme Marie-France Beaufils. J’ai bien entendu M. le ministre et M. le rapporteur général de la commission des finances, qui me reprochent de vouloir introduire un cavalier législatif.
En réalité, j’utilise simplement un cavalier gouvernemental pour pointer du doigt la tendance actuelle à réduire la capacité d’intervention de l’impôt sur les sociétés au sein du budget de la Nation. Il me paraît intéressant de soulever ce débat.
Par ailleurs, j’aimerais que nous puissions avoir une véritable discussion sur la manière de soutenir le dynamisme de notre économie. C’est nécessairement l’investissement qui subira les effets de la baisse de 13 milliards d’euros des dotations aux collectivités territoriales. Pourtant, l’investissement de ces dernières est nettement plus dynamisant qu’une dépense fiscale de 13 milliards d’euros pour le CICE ! On le voit très clairement sur le terrain.
Enfin, il est pour le moins curieux de nous demander, à nous qui sommes hostiles au prélèvement à la source, d’attendre les conclusions des études supplémentaires pour savoir quel en sera le coût pour les entreprises. Nous pensons pour notre part qu’il faut conserver l’impôt actuel et sa prise en charge par les services fiscaux, avec les moyens humains nécessaires. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Gérald Darmanin, ministre. Madame Garriaud-Maylam, je ne voudrais pas que l’on ne se méprenne pas sur mes propos.
Nos compatriotes qui vivent à l’étranger ont évidemment toute la considération du Gouvernement. Je m’engage à ce qu’il y ait un petit zoom sur le sujet dans le rapport ; nous pourrons ainsi avoir en débat en loi de finances si leur situation se révèle plus complexe que je ne le croyais.
Mais il ne faudrait pas que l’adoption de votre amendement, même si je ne doute pas de vos bonnes intentions, ait pour effet de placer nos compatriotes expatriés dans une situation fiscale moins favorable.
Aussi, sous le bénéfice de l’engagement que je prends devant vous – le rapport qui sera remis au Parlement le 30 septembre comportera un chapitre sur la situation spécifique des Français de l’étranger –, je vous suggère de retirer votre amendement.
M. le président. Madame Garriaud-Maylam, l’amendement n° 209 est-il maintenu ?
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Non, monsieur le président, je vais le retirer.
Toutefois, je regrette qu’il ne puisse pas être adopté. Je ne vois pas pourquoi le Gouvernement y est hostile. Mon amendement vise simplement à obtenir des précisions. Il ne s’agit pas de porter de jugement de valeur sur le prélèvement à la source. Je pense que le geste aurait été utile et apprécié.
Comme M. le ministre a pris un engagement, nous verrons bien ce qu’il en est. Honnêtement, je n’ai pas trouvé les dix pages consacrées à ce sujet dans l’étude d’impact. Mais peut-être ai-je mal regardé…