M. le président. Madame Yonnet, l’amendement n° 42 rectifié est-il maintenu ?
Mme Évelyne Yonnet. J’ai bien entendu M. le ministre. Toutefois, en toute franchise, je souhaite que les décisions qui ont été prises par les parlementaires en matière pénale soient appliquées beaucoup plus en amont.
Le problème risque en effet de s’aggraver, car le milieu rural est désormais affecté, et non plus seulement le milieu urbain. Cela aurait également constitué un signal fort pour les collectivités : ce sont elles qui s’occupent du relogement des victimes et qui essayent de monter les dossiers, parfois lourds. Il faut donc prendre conscience de ce problème, et appliquer les lois rapidement.
Cela dit, je retire mon amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 42 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l’article 7.
(L’article 7 est adopté.)
Article additionnel après l'article 7
M. le président. L’amendement n° 4 rectifié, présenté par MM. Reichardt, Dufaut, Bonhomme, Doligé, Masclet, Danesi, Kennel, Commeinhes, Laufoaulu, Perrin, Raison, Laménie, Lefèvre et Cuypers, Mme Lamure, MM. del Picchia et Chaize, Mme Deromedi et M. Huré, est ainsi libellé :
Après l’article 7
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La section 4 du chapitre Ier du titre II du livre II du code de procédure pénale est complétée par un paragraphe ainsi rédigé :
« Paragraphe…
« De la clôture des débats
« Art. 461-… – Le président déclare les débats terminés. Lorsque le prévenu est libre et que les circonstances de l’affaire le justifient, le président peut enjoindre au prévenu de ne pas quitter le palais de justice pendant la durée du délibéré, en indiquant, le cas échéant, le ou les locaux dans lesquels il doit demeurer, et invite le chef du service d’ordre à veiller au respect de cette injonction. »
La parole est à M. Éric Doligé.
M. Éric Doligé. Cet amendement s’explique par son texte même. J’en présenterai néanmoins rapidement le contenu.
Cet amendement vise à créer, pour le tribunal correctionnel, une faculté de garder sous escorte un prévenu pendant le temps du délibéré, soit en général quelques dizaines de minutes. Une telle disposition est destinée à éviter qu’un détenu comparaissant libre ne prenne la fuite entre la fin des plaidoiries et le prononcé de la peine, ce qui participerait à la décrédibilisation de l’action de la justice. On alignerait ainsi les procédures correctionnelles sur les procédures criminelles.
Une telle mesure me paraît d’une simplicité évidente, quand bien même elle ne serait pas toujours facile à mettre en œuvre.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Pillet, rapporteur. Dans les faits, je crains qu’une telle disposition ne suscite des tensions quasi insupportables lors de la préparation des délibérés.
Surtout, elle pose selon moi une difficulté de taille : comme le jugement n’est pas encore rendu et que le prévenu n’est donc pas encore condamné, celui-ci est toujours présumé innocent pendant le délibéré. Une telle mesure me semblerait donc contraire au principe constitutionnel d’exercice des droits de la défense. Il y a là un trop grand risque.
C’est la raison pour laquelle la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jacques Urvoas, garde des sceaux. Un tel dispositif a été créé pour la cour d’assises, dans la loi du 15 juin 2000, pour la raison suivante : si l’accusé quittait la cour, cela empêchait le prononcé de la sentence, au nom de l’oralité des débats. Or la procédure correctionnelle est tout à fait différente, car elle ne repose pas sur le principe de l’oralité des débats. Dès lors, même si le prévenu quitte le tribunal, cela n’empêche pas le prononcé de la peine, le respect du contradictoire étant réputé acquis.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Éric Doligé, pour explication de vote.
M. Éric Doligé. Je m’attendais, monsieur le rapporteur, à ce que vous m’expliquiez ne pouvoir me suivre, car l’application de mon amendement, qui est certes bon, aurait suscité des problèmes… Vous m’auriez alors demandé de le retirer ; cela eût été élégant !
M. François Pillet, rapporteur. Je peux toujours le faire !
M. Éric Doligé. M. le ministre aurait pu aussi me faire une telle demande.
Cela dit, compte tenu des explications qui m’ont été données, je retire mon amendement, monsieur le président.
M. François Pillet, rapporteur. Cela, c’est élégant !
M. le président. L’amendement n° 4 rectifié est retiré.
Chapitre III
Garantir l’équilibre du jugement
Article 8
I. – L’article 132-18-1 du code pénal est ainsi rétabli :
« Art. 132-18-1. – I. – Pour les crimes commis en état de récidive légale, la peine d’emprisonnement, de réclusion ou de détention ne peut être inférieure aux seuils suivants :
« 1° Cinq ans, si le crime est puni de quinze ans de réclusion ou de détention ;
« 2° Sept ans, si le crime est puni de vingt ans de réclusion ou de détention ;
« 3° Dix ans, si le crime est puni de trente ans de réclusion ou de détention ;
« 4° Quinze ans, si le crime est puni de la réclusion ou de la détention à perpétuité.
« Toutefois, la juridiction peut prononcer une peine inférieure à ces seuils en considération des circonstances de l’infraction, de la personnalité de son auteur ou des garanties d’insertion ou de réinsertion présentées par celui-ci.
« Lorsqu’un crime est commis une nouvelle fois en état de récidive légale, la juridiction ne peut prononcer une peine inférieure à ces seuils que si l’accusé présente des garanties exceptionnelles d’insertion ou de réinsertion.
« II. – Pour les délits commis en état de récidive légale, la peine d’emprisonnement ne peut être inférieure aux seuils suivants :
« 1° Deux ans, si le délit est puni de cinq ans d’emprisonnement ;
« 2° Trois ans, si le délit est puni de sept ans d’emprisonnement ;
« 3° Quatre ans, si le délit est puni de dix ans d’emprisonnement.
« Toutefois, la juridiction peut prononcer, par une décision spécialement motivée, une peine inférieure à ces seuils ou une peine autre que l’emprisonnement en considération des circonstances de l’infraction, de la personnalité de son auteur ou des garanties d’insertion ou de réinsertion présentées par celui-ci.
« La juridiction ne peut prononcer une peine autre que l’emprisonnement lorsqu’est commis une nouvelle fois en état de récidive légale un des délits suivants :
« 1° Violences volontaires ;
« 2° Délit commis avec la circonstance aggravante de violences ;
« 3° Agression ou atteinte sexuelle ;
« 4° Délit puni de dix ans d’emprisonnement.
« Par décision spécialement motivée, la juridiction peut toutefois prononcer une peine d’emprisonnement d’une durée inférieure aux seuils prévus au présent article si le prévenu présente des garanties exceptionnelles d’insertion ou de réinsertion.
« Les dispositions du présent article ne sont pas exclusives d’une peine d’amende et d’une ou plusieurs peines complémentaires.
« III. – Pour les délits prévus aux articles 222-9, 222-12 et 222-13, au 3° de l’article 222-14, au 4° de l’article 222-14-1 et à l’article 222-15-1, la peine d’emprisonnement ne peut être inférieure aux seuils suivants :
« 1° Dix-huit mois, si le délit est puni de sept ans d’emprisonnement ;
« 2° Deux ans, si le délit est puni de dix ans d’emprisonnement.
« Toutefois, la juridiction peut prononcer, par une décision spécialement motivée, une peine inférieure à ces seuils ou une peine autre que l’emprisonnement en considération des circonstances de l’infraction, de la personnalité de son auteur ou des garanties d’insertion ou de réinsertion présentées par celui-ci.
« IV. – (Supprimé) ».
II (nouveau). – La première phrase du premier alinéa de l’article 362 du code de procédure pénale est complétée par les mots : « , ainsi que, si les faits ont été commis en état de récidive légale, du I et, le cas échéant, du II de l’article 132-18-1 du même code ».
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements identiques.
L’amendement n° 7 est présenté par Mmes Cukierman et Assassi, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L’amendement n° 14 est présenté par MM. Anziani, Bigot, Sueur, Leconte et les membres du groupe socialiste et républicain.
L’amendement n° 31 est présenté par Mmes Benbassa, Archimbaud, Blandin et Bouchoux et MM. Dantec, Desessard, Gattolin, Labbé et Poher.
L’amendement n° 46 rectifié est présenté par MM. Mézard, Amiel, Arnell, Bertrand, Castelli, Collin, Collombat, Esnol, Fortassin, Guérini et Hue, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et MM. Requier et Vall.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Christian Favier, pour présenter l’amendement n° 7.
M. Christian Favier. Cet amendement vise à supprimer le rétablissement des peines planchers pour les crimes et délits punis d’une peine d’emprisonnement supérieure à cinq ans. Ces peines, inefficaces pour lutter contre la récidive, sont en outre à l’origine d’un allongement de la durée des peines ; elles accroissent par conséquent la surpopulation carcérale.
De plus, la réintroduction des peines planchers porte atteinte au principe constitutionnel d’individualisation des peines et affaiblit le pouvoir d’appréciation du juge.
Enfin, alors que ces peines ont été supprimées par la loi Taubira du 15 août 2014, voilà à peine plus de deux ans, on les réintègre sans se donner le temps de pouvoir mesurer avec du recul les effets de cette suppression.
Nous proposons en conséquence la suppression de cet article.
M. le président. La parole est à M. Alain Anziani, pour présenter l’amendement n° 14.
M. Alain Anziani. Cet article restaure les peines planchers. Or celles-ci sont inutiles et inefficaces : tous les chiffres le montrent, en particulier ceux qui sont fournis par l’Union syndicale des magistrats, l’USM. Par ailleurs, un tel principe nous heurte, à l’évidence, puisqu’il nie toute possibilité d’individualisation des peines.
Nous sommes contre la réintroduction de ces peines planchers et nous demandons donc la suppression de cet article.
M. le président. La parole est à Mme Esther Benbassa, pour présenter l’amendement n° 31.
Mme Esther Benbassa. L’article 8 vise tout simplement à rétablir les peines planchers abrogées par la réforme pénale de 2014.
Nous sommes ici vraiment dans la posture. Ce mécanisme, qui heurte le principe d’individualisation des peines, a été abrogé parce que les peines planchers ont montré leur totale inefficacité en matière de lutte contre la récidive. Il est aberrant de vouloir y revenir !
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour présenter l’amendement n° 46 rectifié.
M. Jean-Claude Requier. Cet article n’a pas été substantiellement modifié par la commission des lois. Il prévoit pourtant le rétablissement du mécanisme des peines planchers et le doublement des peines encourues en cas de récidive : nous irions plus loin encore que le législateur de 2007 !
Il faut rappeler que les études actuellement disponibles sur les effets des mesures de la loi du 10 août 2007 renforçant la lutte contre la récidive ne permettent pas de conclure qu’elles auraient eu un effet déterminant sur la baisse de la récidive ou de la délinquance. En revanche, leur rôle dans l’augmentation de la population carcérale est évident.
En outre, l’introduction du mécanisme des peines planchers n’aurait pas eu d’impact sur le taux de peines de prison avec ou sans sursis prononcées en cas de récidive, qui demeure autour de 94 %, comme le révélait l’étude d’impact de la loi de 2014.
C’est pourquoi il est proposé de supprimer cet article, qui, en rétablissant un dispositif n’ayant pas fait ses preuves, introduit une énième et inefficiente modification du code pénal.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Pillet, rapporteur. Nous avons eu ce débat à de multiples reprises. Il n’aura tout de même échappé à personne que la peine plancher, telle qu’elle est prévue dans ce texte, n’est pas tout à fait la même : elle ne s’appliquera qu’au-delà d’une peine d’emprisonnement supérieure à cinq ans. (Mme Cécile Cukierman s’exclame.) Qui plus est, elle ne concerne plus du tout les mineurs. C’est tout de même différent !
Par ailleurs, quelles que soient ses convictions, nul ne peut dire que le rétablissement des peines planchers porte atteinte à l’individualisation des peines, voire à l’opportunité des poursuites. La commission des lois a en effet veillé à ce que, systématiquement, la peine plancher ne soit qu’une possibilité que le juge peut évacuer s’il estime que les conditions motivant l’individualisation de la peine ou l’invocation de circonstances atténuantes sont réunies.
On peut ne pas être d’accord sur les suites, les conséquences, les effets, les bénéfices ou non de la peine plancher, mais on ne peut pas considérer qu’il est porté atteinte à un quelconque droit fondamental.
C’est la raison pour laquelle la commission émet un avis défavorable sur ces amendements de suppression.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jacques Urvoas, garde des sceaux. J’ai la chance de débattre de ce sujet quasi systématiquement depuis que je suis garde des sceaux ! Cette disposition a été déposée sur tous les textes, même, de façon incidente, lors de la prolongation de l’état d’urgence. Je ne remobiliserai pas l’appareil argumentatif pour expliquer pourquoi je suis contre le retour des peines planchers. (M. Bruno Sido s’exclame.)
Le Gouvernement émet donc un avis favorable sur ces amendements identiques.
M. Éric Doligé. C’est dommage !
M. le président. La parole est à M. Jacques Bigot, pour explication de vote.
M. Jacques Bigot. Je voterai bien entendu ces amendements de suppression.
Je souhaite appeler l’attention du rapporteur sur l’incohérence de sa position. Monsieur le rapporteur, au cours de la discussion générale, vous avez indiqué que ce qui importait, c’était non le quantum des peines, mais leur efficacité et leur mise en œuvre rapide.
Pour des individus qui sont déjà en détention provisoire, cette mise en œuvre est immédiate et appliquée. En revanche, pour ceux qui ne le sont pas, elle peut être relativement longue, pour des raisons que nous permet de mieux cerner le tour des juridictions que nous accomplissons dans le cadre de la mission d’information sur le redressement de la justice.
Certes, les magistrats pourront prononcer une peine inférieure à la peine plancher en considération des circonstances de l’infraction, de la personnalité de son auteur, des garanties d’insertion ou de réinsertion que celui-ci présente. En revanche, ils ne pourront en aucun cas le faire parce que les prisons sont trop pleines – vous avez d’ailleurs souligné qu’elles l’étaient, monsieur le rapporteur.
Ce faisant, vous oubliez que, une fois de plus, on en conclura que la peine prévue par le législateur de la droite n’est pas appliquée par les magistrats et que ceux-ci sont laxistes. Vous avez pourtant vous-même reconnu qu’ils ne l’étaient pas. Vous n’êtes pas cohérent, mais je comprends que vous ne puissiez pas systématiquement aller à l’encontre de votre groupe.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 7, 14, 31 et 46 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 8.
(L'article 8 est adopté.)
Article 9
(Non modifié)
Aux premier et avant-dernier alinéas des articles 132-25 et 132-26-1 et à l’article 132-27 du code pénal, les mots : « deux ans » sont remplacés par les mots : « un an » et les mots : « un an » sont remplacés par les mots : « six mois ».
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L'amendement n° 8 est présenté par Mmes Cukierman et Assassi, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 15 est présenté par MM. Anziani, Bigot, Sueur, Leconte et les membres du groupe socialiste et républicain.
L'amendement n° 32 est présenté par Mmes Benbassa, Archimbaud, Blandin et Bouchoux et MM. Dantec, Desessard, Gattolin, Labbé et Poher.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour présenter l’amendement n° 8.
Mme Cécile Cukierman. Cet amendement vise à répondre au principe du tout-répressif que défend ce texte, ce qui ne correspond pas du tout à notre philosophie.
Contrairement aux peines planchers, l’aménagement des peines paraît efficace dans la prévention de la récidive et répond à une nécessité de justice pénale à caractère plus humain, qui tient compte de la personnalité et de la situation du condamné. De plus, l’affaiblissement de l’aménagement des peines s’oppose aux recommandations du Conseil de l’Europe et des règles pénitentiaires européennes, qui considèrent que la peine privative de liberté ne doit être que la peine « de dernier recours ».
Voilà pourquoi nous demandons la suppression de cet article.
M. le président. La parole est à M. Alain Anziani, pour présenter l'amendement n° 15.
M. Alain Anziani. Voilà un article bien étrange, qui supprime l’aménagement des peines inférieures à deux ans pour les primodélinquants et inférieures à un an pour les récidivistes. C’est d’autant plus étonnant et incohérent que, en 2009, nous avons longuement débattu de la loi pénitentiaire de Rachida Dati, laquelle avait fait adopter un aménagement de peine avec ce quantum, et que, en 2014, une nouvelle majorité avait confirmé ces dispositions.
Aujourd’hui, sans que l’on sache vraiment pourquoi, on nous propose d’aller à la fois contre la loi de 2014, ce que l’on peut comprendre venant de votre part, chers collègues de la majorité sénatoriale, et contre celle de 2009, qui a fait l’objet d’un consensus.
Nous demandons donc la suppression de cet article.
M. le président. La parole est à Mme Esther Benbassa, pour présenter l'amendement n° 32.
Mme Esther Benbassa. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Pillet, rapporteur. Oui, cet article revient sur la loi pénitentiaire de 2009, dont nous tirons les leçons.
La disposition prévue à cet article a fait l’objet d’un consensus assez large parmi les magistrats que j’ai eu l’occasion d’auditionner. Beaucoup estiment en effet qu’un seuil d’aménagement trop élevé conduit à dénaturer la peine d’emprisonnement et lui retire son rôle dissuasif.
Or, comme les magistrats l’affirment eux-mêmes, les peines d’emprisonnement d’une durée supérieure à un an sont dans la majeure partie des cas le résultat d’une décision réfléchie. D’un point de vue plus pratique, ils sont également nombreux à relever que les peines d’emprisonnement d’une durée supérieure à un an sont généralement difficilement aménageables.
C’est la raison pour laquelle j’ai pris l’initiative de modifier en commission cet article, pour tenir compte des indications des magistrats. Quand l’expérience commande la révision d’une mesure, il faut le faire : cela s’appelle le pragmatisme.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur ces amendements identiques de suppression.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jacques Urvoas, garde des sceaux. Les aménagements de peine n’ont pas du tout pour ambition de dénaturer la peine. Ils visent au contraire à individualiser son exécution, afin d’encourager la prévention de la récidive. Si le texte est maintenu dans sa rédaction, la surpopulation carcérale s’aggravera. (M. Charles Revet s’exclame.)
Le Gouvernement émet donc un avis favorable sur ces amendements.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 8, 15 et 32.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 9.
(L'article 9 est adopté.)
Article 10
I. – Le chapitre II du titre III du livre Ier du code pénal est ainsi modifié :
1° Après le mot : « présent, », la fin du second alinéa de l’article 132-29 est ainsi rédigée : « des conséquences qu’entraînerait une condamnation pour une nouvelle infraction qui serait commise dans les délais prévus aux articles 132-35 et 132-37. » ;
2° L’article 132-35 est ainsi modifié :
a) Les mots : « ayant ordonné la révocation totale du sursis dans les conditions définies à l’article 132-36 » sont remplacés par les mots : « sans sursis qui emporte révocation » ;
b) Les mots : « totale ou partielle » sont supprimés ;
3° L’article 132-36 est ainsi rédigé :
« Art. 132-36. – Toute nouvelle condamnation à une peine d’emprisonnement ou de réclusion révoque le sursis antérieurement accordé, quelle que soit la peine qu’il accompagne.
« Toute nouvelle condamnation d’une personne physique ou morale à une peine autre que l’emprisonnement ou la réclusion révoque le sursis antérieurement accordé qui accompagne une peine quelconque autre que l’emprisonnement ou la réclusion.
« La révocation du sursis est intégrale. » ;
4° L’article 132-37 est ainsi modifié :
a) Les mots : « ayant ordonné la » sont remplacés par les mots : « sans sursis emportant » ;
b) La seconde occurrence des mots : « du sursis » est supprimée ;
5° L’article 132-38 est ainsi rédigé :
« Art. 132-38. – En cas de révocation du sursis simple, la première peine est exécutée sans qu’elle puisse se confondre avec la seconde.
« Toutefois, la juridiction peut, par décision spéciale et motivée, dire que la condamnation qu’elle prononce n’entraîne pas la révocation du sursis antérieurement accordé ou n’entraîne qu’une révocation partielle, pour une durée qu’elle détermine, du sursis antérieurement accordé. Elle peut également limiter les effets de la dispense de révocation à l’un ou plusieurs des sursis antérieurement accordés. » ;
6° À l’article 132-39, les mots : « totale du sursis n’a pas été prononcée dans les conditions prévues à l’article 132-36 » sont remplacés par les mots : « du sursis n’a pas été encourue ».
II. – (Non modifié) Le chapitre Ier du titre IV du livre V du code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° L’article 735 est abrogé ;
2° À la fin de l’article 735-1, la référence : « 735 » est remplacée par la référence : « 711 ».
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L'amendement n° 10 est présenté par Mmes Cukierman et Assassi, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 16 est présenté par MM. Anziani, Bigot, Sueur, Leconte et les membres du groupe socialiste et républicain.
L'amendement n° 33 est présenté par Mmes Benbassa, Archimbaud, Blandin et Bouchoux et MM. Dantec, Desessard, Gattolin, Labbé et Poher.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Christian Favier, pour présenter l’amendement n° 10.
M. Christian Favier. Cet article avait pour objet initial de rétablir la révocation automatique et intégrale du sursis simple, supprimée par la loi Taubira du 15 août 2014. Même si les modifications apportées en commission par M. le rapporteur vont dans le bon sens, en permettant au juge de faire obstacle par une décision spéciale et motivée à la révocation automatique du sursis, les dispositions prévues continuent à nuire à l’individualisation des peines, principe à valeur constitutionnelle.
Je le répète, il est nécessaire de laisser la révocation à la libre appréciation du juge. C’est pourquoi nous souhaitons la suppression de cet article.
M. le président. La parole est à M. Alain Anziani, pour présenter l'amendement n° 16.
M. Alain Anziani. Même motif, mêmes effets : cette disposition augmentera la surpopulation carcérale, ainsi que vient de le souligner M. le garde des sceaux. En outre, elle n’améliorera certainement pas la réinsertion, qui devrait être l’objectif premier du législateur.
M. le président. La parole est à Mme Esther Benbassa, pour présenter l'amendement n° 33.
Mme Esther Benbassa. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Pillet, rapporteur. La commission des lois est très cohérente : le juge peut déroger à la révocation automatique, en ne la prononçant pas ou en s’y opposant. L’individualisation des peines est donc bien préservée.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur ces amendements identiques de suppression.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jacques Urvoas, garde des sceaux. Même si le texte adopté par la commission des lois prévoit désormais une exception pertinente au principe de révocation automatique et intégrale du sursis, le mécanisme proposé nuit toujours à une appréciation fine et individualisée de la situation de la personne condamnée, ainsi que, par conséquent à l’efficacité de la sanction pénale.
Par ailleurs, le texte ne rétablit pas la possibilité qui était auparavant ouverte à la personne condamnée de demander, lorsque la juridiction du jugement n’avait pas expressément statué sur une dispense de révocation du sursis, de bénéficier ultérieurement de cette demande.
Le Gouvernement émet donc un avis favorable sur ces amendements identiques de suppression.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 10, 16 et 33.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 10.
(L'article 10 est adopté.)
Article 11
La section 2 du chapitre II du titre III du livre Ier du code pénal est ainsi modifiée :
1° Le premier alinéa de l’article 132-42 est ainsi modifié :
a) À la première phrase, le mot : « trois » est remplacé par le mot : « cinq » ;
b) À la deuxième phrase, le mot : « cinq » est remplacé par le mot : « sept » ;
c) À la dernière phrase, le mot : « sept » est remplacé par le mot : « dix » ;
2° Au premier alinéa de l’article 132-47, les mots : « peut être » sont remplacés par le mot : « est » ;
3° L’article 132-48 est ainsi modifié :
a) À la première phrase du premier alinéa, les mots : « peut, après avis du juge de l’application des peines, ordonner » sont remplacés par les mots : « ordonne, après avis du juge de l’application des peines » ;
b) Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Toutefois, la juridiction peut, par décision spéciale et motivée, faire obstacle à la révocation du sursis antérieurement accordé. » ;
4° Au début de l’article 132-49, il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« La révocation partielle du sursis ne peut être ordonnée qu’une fois » ;
5° L’article 132-50 est ainsi rédigé :
« Art. 132-50. – Si la juridiction ordonne l’exécution de la totalité de l’emprisonnement et si le sursis avec mise à l’épreuve a été accordé après une première condamnation déjà prononcée sous le même bénéfice, la première peine est d’abord exécutée à moins que, par décision spéciale et motivée, la juridiction ne dispense le condamné de tout ou partie de son exécution. »