M. François Grosdidier, rapporteur. Les refus d’obtempérer constituent un phénomène délictuel de plus en plus prégnant, qui met en cause l’autorité de l’État et la sécurité des forces de l’ordre.

Selon les informations fournies par le ministère de l’intérieur, de 2012 à 2016, le nombre de ces délits est passé de 5 624 à 7 812 pour la seule zone gendarmerie, c’est-à-dire de 15 à 21 par jour. Cela représente une augmentation de près de 40 % en quatre ans.

Face à la recrudescence de ce phénomène préoccupant, il est proposé de renforcer la répression des peines encourues du chef du délit de refus d’obtempérer. Par comparaison, le régime espagnol connaît une forte baisse des refus d’obtempérer, dans un cadre juridique très dissuasif : quatre ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende.

Par ailleurs, en France, depuis 2011, le délit de fuite, incrimination comparable, mais ne protégeant que des intérêts matériels, est réprimé de trois ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende.

Jusqu’alors puni de trois mois d’emprisonnement et de 3 750 euros d’amende, le refus d’obtempérer se verrait réprimé d’un an d’emprisonnement et de 7 500 euros d’amende – on est loin de ce qui se pratique en Espagne et des peines applicables au délit de fuite –, permettant de rendre applicable l’article 395 du code de procédure pénale relatif au jugement en comparution immédiate.

D’autres mesures viennent alourdir la répression de cette infraction en instaurant les peines complémentaires déjà prévues pour le refus d’obtempérer aggravé du code de la route : l’annulation du permis de conduire dans un délai moindre et la confiscation de véhicules appartenant au condamné.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Bruno Le Roux, ministre. Monsieur le rapporteur, vous venez de rappeler que le nombre de refus d’obtempérer s’est nettement accru depuis quelques années. Cette situation constitue une manifestation concrète et inacceptable du délitement de la perception de l’autorité publique par certains individus qui met gravement en péril l’intégrité de nos policiers, de nos gendarmes, mais aussi de l’ensemble de nos concitoyens.

J’ai évoqué lors de la discussion générale le décès, au début du mois de décembre dernier, du major Rusig dans l’Ariège. Ce décès a pour origine un refus d’obtempérer dans le cadre duquel, pour se soustraire au contrôle, le contrevenant a délibérément foncé sur le gendarme.

Je pourrais également faire référence à ce qui s’est passé le 18 janvier dernier, à Méru, dans l’Oise. Lors d’une opération anti-délinquance, des gendarmes ont tenté de contrôler un véhicule. Le conducteur a refusé d’obtempérer et pris la fuite. Repéré quelques minutes plus tard sur le territoire d’une commune voisine, il a une nouvelle fois refusé d’obtempérer, percuté le véhicule des gendarmes et pris la fuite, avant d’être immobilisé, quelques kilomètres plus loin lors d’un nouveau contrôle, par un usage des armes des gendarmes.

Il est donc indispensable de se doter d’une incrimination suffisamment dissuasive grâce à l’augmentation des peines encourues, portées à un an d’emprisonnement et à 7 500 euros d’amende.

Il est également cohérent de rapprocher la peine encourue pour refus d’obtempérer de celle qui l’est pour les faits qui, souvent, motivent ceux qui refusent de se soumettre aux injonctions. Je pense notamment à la conduite sans permis, fait pour lequel une peine d’un an est prévue.

Cet accroissement des peines encourues permettra aussi d’apporter une réponse pénale rapide dès lors que le parquet pourra recourir à la procédure de comparution immédiate. L’ajout de nouvelles peines complémentaires contribue de surcroît à renforcer l’aspect dissuasif et répressif de cette incrimination.

J’ai présidé hier à la mise en place du Conseil national de la sécurité routière. Si le Parlement adopte cet amendement, je demanderai immédiatement au délégué interministériel à la sécurité routière d’en assurer la publicité. Nos concitoyens doivent savoir que, en cas de défaut de permis ou d’assurance, on s’arrête au contrôle ; on n’essaie pas de passer en force.

Cela me semble nécessaire compte tenu de l’augmentation des refus d’obtempérer ; c’est la raison pour laquelle le Gouvernement soutient cet amendement. Il faut aussi continuer à avoir les explications nécessaires à partir de cette nouvelle incrimination, afin que personne ne veuille se soustraire demain à un contrôle.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 44.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 7.

L'amendement n° 11 rectifié bis, présenté par MM. Grand, Masclet, Danesi et Joyandet, Mmes Garriaud-Maylam et Micouleau, MM. J.P. Fournier et Vasselle, Mmes Deromedi et Cayeux, MM. Huré, Bonhomme, Savary, Milon, Reichardt, Rapin, Legendre, Laufoaulu, Doligé, del Picchia et G. Bailly, Mme Duchêne, MM. Karoutchi, Charon et Chasseing, Mme de Rose, MM. Revet, Chaize et Laménie, Mmes Giudicelli et Hummel, M. Pellevat et Mme Gruny, est ainsi libellé :

Après l'article 7

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le chapitre III du titre III du livre IV du code pénal est complété par une section ainsi rédigée :

« Section

« Du signalement de la présence des forces de sécurité intérieure

« Art. 433-… – Le fait de diffuser, par quelque moyen que ce soit et quel qu’en soit le support, tout message de nature à signaler la présence des forces de sécurité intérieure est puni de six mois d’emprisonnement et de 7 500 € d’amende. »

La parole est à M. Jean-Pierre Grand.

M. Jean-Pierre Grand. Alors que l’état d’urgence est en vigueur dans notre pays, le signalement de la présence des forces de l’ordre constitue une source d’information majeure pour les délinquants, voire pour les terroristes.

En effet, c’est un simple contrôle qui a permis la localisation à Milan et l’arrêt de la fuite de l’auteur présumé de l’attentat de Berlin. Le signalement de la présence des forces de l’ordre aurait pu compromettre cette chance. C’était en Italie ; cela aurait pu se dérouler en France…

Par ailleurs, dans un contexte où les forces de l’ordre sont victimes d’attaques du fait même de leur qualité, leur signalement risque d’en faire des cibles privilégiées et localisées.

L’attaque de policiers au cocktail Molotov à Viry-Châtillon, présente dans toutes les mémoires, est une triste illustration de ces phénomènes particulièrement violents.

L'article L. 2242-10 du code des transports, résultant de la loi du 22 mars 2016 relative à la prévention et à la lutte contre les incivilités, contre les atteintes à la sécurité publique et contre les actes terroristes dans les transports collectifs de voyageur, prévoit l’interdiction de diffuser, par quelque moyen que ce soit et quel qu’en soit le support, tout message de nature à signaler la présence de contrôleurs ou d’agents de sécurité employés ou missionnés par un exploitant de transport public de voyageurs.

Il est donc proposé de légiférer de manière similaire, afin d’interdire toutes les formes de signalisation de la présence des forces de l’ordre qui n’ont pas à être géolocalisées.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François Grosdidier, rapporteur. Je comprends vos motivations, mon cher collègue. Vous faites référence à un cas particulièrement grave, aux conséquences très dommageables, de signalement de la présence policière.

Toutefois, le mode le plus fréquent de signalisation de la présence policière est souvent le simple appel de phares de la part d’un automobiliste. Or une peine de six mois d’emprisonnement et 7 500 euros d’amende pour un simple appel de phares paraîtrait pour le moins disproportionnée !

Certes, signaler la présence des forces de sécurité intérieure peut, dans certaines circonstances, comme la recherche d’un fugitif ou d’une personne suspectée d’un enlèvement, avoir des conséquences négatives, mais la création d’un tel délit va trop loin et me semble contraire au principe de nécessité des peines posé à l’article VIII de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen.

Nous pourrions discuter du principe. Quoi qu’il en soit, la peine me paraît disproportionnée. Je demande donc le retrait de cet amendement. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.

Je rappelle, par ailleurs, que l’amendement que nous avons adopté sur le délit d’obtempérer peut déjà conduire les automobilistes à bien davantage de civisme qu’aujourd'hui.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Bruno Le Roux, ministre. Même avis. Je n’aurais pas pu mieux dire que M. le rapporteur !

Mme la présidente. Monsieur Grand, l'amendement n° 11 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Jean-Pierre Grand. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L'amendement n° 11 rectifié bis est retiré.

L'amendement n° 15 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Après l'article 7

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le titre Ier du livre III du code de la sécurité intérieure est ainsi modifié :

1° Les articles L. 311-1 et L. 313-1 sont abrogés ;

2° L’intitulé du chapitre III est ainsi rédigé :

« Chapitre III

« Fabrication et commerce » ;

3° L’intitulé du chapitre VI est ainsi rédigé :

« Chapitre VI

« Acquisition, détention et transferts au sein de l’Union européenne, importations et exportations » ;

II. – Les articles L. 2331-2, L. 2332-2, L. 2336-1, L. 2337-1, L. 2339-3-1, L. 2339-5 et L. 2339-9 du code de la défense sont abrogés.

La parole est à M. le ministre.

M. Bruno Le Roux, ministre. Cet amendement n’est pas de fond. Il est de pure forme, mais il est nécessaire à la sécurisation juridique d’une évolution très importante dans la conduite, par l’État, de la politique publique de contrôle de la circulation des armes sur notre territoire.

Il a plus précisément pour objet de permettre, dans des conditions de sécurité juridique incontestables, l’insertion dans les codes de la sécurité intérieure, d’une part, et de la défense, d’autre part, des dispositions d’un décret qui sera pris avant la fin de ce trimestre, modifiant la répartition des compétences entre les ministères de l’intérieur et de la défense en matière de gestion des armes civiles.

Vous le savez, puisque c’est inscrit dans la loi de finances pour 2017, le Gouvernement a décidé de clarifier le partage des compétences sur la thématique des armes, dont l’organisation actuelle remonte à 1939. Le ministère de la défense est naturellement compétent s’agissant des armes et matériels de guerre ; le ministère de l’intérieur, chargé de la sécurité publique, doit quant à lui disposer de toutes les compétences sur les armes civiles, depuis leur fabrication et leur commerce jusqu’à leur acquisition et leur détention.

J’ai d’ailleurs récemment inauguré un nouveau service du ministère de l’intérieur : le service central des armes, qui a pour vocation de piloter cette politique de contrôle des armes civiles.

Cette réorganisation des compétences se fera par voie réglementaire : c’est l’objet du décret que je viens d’évoquer, lequel devra être codifié au nom du principe, à valeur constitutionnelle, de lisibilité et d’intelligibilité du droit.

Il faut pour cela mettre en harmonie formellement, au nom du principe de l’homothétie qui gouverne les règles de codification, l’architecture des deux codes, entre leurs parties législatives, aujourd’hui calées sur le schéma actuel de répartition des compétences entre les deux ministères, et réglementaires, qui vont être modifiées par le décret.

Il est donc simplement proposé par cet amendement, qui n’a pas, j’y insiste, de portée normative – la norme se trouve dans le décret à venir – et qui est purement légistique, d’adapter l’architecture, en quelque sorte l’annonce de plan, des deux codes pour permettre, en toute sécurité juridique, l’insertion de la nouvelle répartition réglementaire des compétences entre les deux ministères. C’est par conséquent formel, mais c’est néanmoins indispensable pour sécuriser la codification du décret à venir.

Il ne s’agit pas, bien sûr, de modifier la loi pour rendre possible le décret. Je viens de l’indiquer, sur le fond, la matière est réglementaire, comme l’a précisé le Conseil constitutionnel. Il s’agit simplement d’adapter l’architecture de la partie législative des codes pour permettre, selon les règles de codification, l’insertion du décret à venir.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François Grosdidier, rapporteur. La commission est favorable à cet amendement technique nécessaire et parfaitement cohérent avec ce qui a été adopté lors de la discussion du dernier projet de loi de finances.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 15 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 7.

L'amendement n° 16, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Après l’article 7

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Avant le dernier alinéa du II de l’article L. 4139-16 du code de la défense, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les volontaires dans les armées, en service au sein de la gendarmerie nationale, peuvent, sur demande agréée, être maintenus en service au-delà de la limite de durée de service pour une période d’une année. »

La parole est à M. le ministre.

M. Bruno Le Roux, ministre. Le statut de volontaire dans les armées a été créé lors de la réforme du service national en 1997.

C’est un sujet que connaît particulièrement bien le sénateur Alain Richard, la gendarmerie nationale compte près de 12 000 de ces volontaires dans ses rangs : il s’agit des gendarmes adjoints volontaires. En qualité d’agents de police judiciaire adjoints, ils secondent les sous-officiers de gendarmerie et sont aujourd’hui indispensables au service de la gendarmerie nationale.

Leur statut est, depuis sa création, enserré dans une durée maximale de service fixée à cinq ans. Dans le cadre des enjeux de sécurité que connaît actuellement notre pays, il est impérieux que la gendarmerie nationale puisse conserver plus longtemps dans ses rangs ces personnels formés et disposant d’une expérience opérationnelle avérée.

Le mécanisme proposé permettra aux gendarmes adjoints volontaires d’être, à leur demande, maintenus en activité pour une sixième et dernière année.

Il permettra également d’aligner, au sein du ministère de l’intérieur, sur la même durée de contrat les gendarmes adjoints volontaires et les adjoints de sécurité de la police nationale, qui pourront ainsi tous servir pour une période maximale de service de six années.

Élément important pour la bonne compréhension de l’enjeu, 500 à 600 gendarmes adjoints volontaires atteignent chaque année cette limite des cinq ans. C’est l’équivalent d’un mois d’activité de la chaîne de recrutement de la gendarmerie.

Cet amendement vise à contribuer à réaliser le schéma d’emploi de la gendarmerie nationale en maintenant dans l’emploi des personnels déjà expérimentés plutôt qu’en les remplaçant par des jeunes gendarmes adjoints volontaires dont la durée de formation a par ailleurs été raccourcie de treize à neuf semaines. Garder ces militaires une année supplémentaire, c’est ne pas recruter ni former l’équivalent de cinq compagnies d’élèves gendarmes adjoints volontaires, alors que les capacités de nos écoles sont actuellement sous très grande tension.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François Grosdidier, rapporteur. Il s’agit d’une proposition très opportune, qui permet de renforcer substantiellement le vivier de gendarmes adjoints sur lesquels nous pouvons compter pour assurer les missions de sécurité publique.

La commission émet un avis favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 16.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 7.

Articles additionnels après l’article 7
Dossier législatif : projet de loi relatif à la sécurité publique
Article 9 (Texte non modifié par la commission)

Article 8

Après l’article 12 de la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 pénitentiaire, il est inséré un article 12-1 ainsi rédigé :

« Art. 12-1. – Les personnels de surveillance de l’administration pénitentiaire affectés aux équipes de sécurité pénitentiaire et individuellement désignés par le chef d’établissement ou par le directeur interrégional des services pénitentiaires peuvent procéder, sur l’ensemble de l’emprise foncière affectée au service public pénitentiaire ainsi qu’à ses abords immédiats, au contrôle des personnes, autres que les personnes détenues, à l’égard desquelles existe une ou plusieurs raisons sérieuses de penser qu’elles se préparent à commettre une infraction portant atteinte à la sécurité de l’établissement pénitentiaire.

« Dans le cadre de ce contrôle, ils peuvent inviter la personne concernée à justifier, par tout moyen, de son identité, procéder à des palpations de sécurité, à l’inspection visuelle de ses bagages et, avec son consentement, à leur fouille. La palpation de sécurité doit être faite par une personne de même sexe que la personne qui en fait l’objet.

« En cas de refus de la personne de se soumettre au contrôle ou d’impossibilité de justifier de son identité, le personnel mentionné au premier alinéa en rend compte immédiatement à tout officier de police judiciaire de la police nationale ou de la gendarmerie nationale territorialement compétent, qui peut alors lui ordonner sans délai de lui présenter sur-le-champ la personne ou de la retenir jusqu’à son arrivée ou celle d’un agent de police judiciaire placé sous son contrôle. À défaut de cet ordre, ce personnel ne peut retenir la personne. Lorsque l’officier de police judiciaire décide de procéder à une vérification d’identité en application de l’article 78-3 du code de procédure pénale, le délai prévu par le troisième alinéa de ce même article court à compter du début du contrôle. Les opérations de contrôle ayant donné lieu à l’application du présent alinéa font l’objet d’un rapport adressé au procureur de la République territorialement compétent par le personnel mentionné au premier alinéa.

« Un décret précise les conditions de définition de l’emprise foncière, de ses abords immédiats et de sa signalisation. » – (Adopté.)

Article 8
Dossier législatif : projet de loi relatif à la sécurité publique
Article additionnel après l'article 9

Article 9

(Non modifié)

I. – À titre expérimental et pour une durée de trois ans, le juge des enfants peut, dans le cas prévu au 3° de l’article 375-3 du code civil, sur réquisitions écrites du ministère public, charger un service du secteur public de la protection judiciaire de la jeunesse d’apporter l’aide et le conseil et d’exercer le suivi prévus au premier alinéa de l’article 375-4 du même code, lorsque la situation et l’intérêt de l’enfant le justifient. Les dépenses afférentes à ces mesures sont prises en charge financièrement par l’État.

II. – Dans un délai de six mois avant le terme de l’expérimentation, le Gouvernement adresse au Parlement un rapport d’évaluation de l’expérimentation.

Mme la présidente. L'amendement n° 3, présenté par MM. Vandierendonck et Bigot, est ainsi libellé :

Alinéa 1

Supprimer les mots :

, sur réquisitions écrites du ministère public

La parole est à M. Jacques Bigot.

M. Jacques Bigot. Je sais que la commission et le Gouvernement sont défavorables à cet amendement. Par conséquent, je le retire.

Mme la présidente. L'amendement n° 3 est retiré.

Je mets aux voix l'article 9.

(L'article 9 est adopté.)

Article 9 (Texte non modifié par la commission)
Dossier législatif : projet de loi relatif à la sécurité publique
Article 10

Article additionnel après l'article 9

Mme la présidente. L'amendement n° 40 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Après l’article 9

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° L’article 727-1 est ainsi rédigé :

« Art. 727-1. – I. – Aux fins de prévenir les évasions et d’assurer la sécurité et le bon ordre des établissements pénitentiaires ou des établissements de santé destinés à recevoir des personnes détenues, le ministre de la justice peut autoriser les agents individuellement désignés et habilités de l’administration pénitentiaire à :

« 1° Intercepter, enregistrer, transcrire ou interrompre les correspondances de personnes détenues émises par la voie des communications électroniques et autorisées en détention, à l’exception de celles avec leur avocat, et conserver les données de connexion y afférentes ;

« 2° Accéder aux données stockées dans un équipement terminal ou un système informatique qu’utilise une personne détenue et dont l’utilisation est autorisée en détention, les enregistrer, les conserver et les transmettre.

« Les personnes détenues ainsi que leurs correspondants sont informés au préalable des dispositions du présent article.

« L’autorisation est délivrée pour une durée maximale d’un an, renouvelable.

« II. – La découverte dans un établissement visé au I, de tout équipement terminal, système informatique ou support de données informatiques dont la détention est illicite, fait l’objet d’un avis immédiat au procureur de la République.

« Sous réserve d’une éventuelle saisie de ces matériels par l’autorité judiciaire ouvrant à la personne détenue les voies de recours prévues à l’article 41-5, le procureur de la République peut autoriser, par tout moyen, l’administration pénitentiaire à les conserver, s’il estime que ceux-ci ne sont pas utiles à la manifestation de la vérité.

« Dans ce cas et pour les finalités visées au I du présent article, le ministre de la justice peut autoriser les agents individuellement désignés et habilités de l’administration pénitentiaire à mettre en œuvre les techniques visées au 2° du I. L’autorisation est délivrée pour une durée maximale d’un an, renouvelable.

« La personne concernée, lorsqu’elle est identifiée, est alors informée de la décision de l’administration pénitentiaire de mettre en œuvre ces techniques. Elle est également informée que les matériels seront détruits à l’issue du délai prévu au troisième alinéa du présent II, sauf si l’exploitation de ces données conduit à l’ouverture d’une procédure judiciaire au dossier de laquelle ils sont alors versés.

« III. – Chaque mise en œuvre d’une technique de recueil de renseignement donne lieu à l’établissement d’un relevé qui mentionne les dates de début et de fin de cette mise en œuvre ainsi que la nature des renseignements collectés. Ce relevé est tenu à la disposition du procureur de la République, qui peut y accéder de manière permanente, complète et directe, quel que soit son degré d’achèvement.

« La décision de mettre en œuvre les techniques prévues au présent article est consignée dans un registre tenu par la direction de l’administration pénitentiaire, elle peut faire l’objet d’un recours devant le juge administratif dans les conditions prévues par le code de justice administrative.

« Les données ou enregistrements qui ne font l’objet d’aucune transmission à l’autorité judiciaire en application du présent code sont détruits à l’issue d’une durée de quatre-vingt-dix jours à compter de leur recueil.

« Les transcriptions ou les extractions sont détruites dès que leur conservation n’est plus indispensable à la poursuite des finalités mentionnées au I.

« Lorsque les données ou enregistrements servent de support à une procédure disciplinaire, les délais mentionnés au troisième alinéa du présent III sont suspendus jusqu’à l’extinction des voies de recours.

« Il est dressé un procès-verbal rendant compte des opérations de destruction.

« Les données, enregistrements, transcriptions, extractions et procès-verbaux mentionnés au présent III sont mis à disposition du procureur de la République, qui peut y accéder à tout instant.

« IV. – Les modalités d’application du présent article sont fixées par décret en Conseil d’État. » ;

2° L’article 230-45 est ainsi modifié :

a) Au deuxième alinéa, les mots : « , 709-1-3 ainsi que des 1° et 3° de l’article 727-1 » sont remplacés par les mots : « et 709-1-3 » ;

b) Au quatrième alinéa, les mots : « ainsi que des 2° et 4° de l’article 727-1 » sont supprimés.

II. – Après le titre V du livre VIII du code de la sécurité intérieure, il est inséré un titre V bis ainsi rédigé :

« TITRE V bis

« DU RENSEIGNEMENT DE SÉCURITÉ PÉNITENTIAIRE

« Art. L. 855-1. – Dans le respect des dispositions de l’article L. 801-1 autres que ses 3° et 4°, les services de l’administration pénitentiaire désignés par décret en Conseil d’État pris après avis de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement peuvent être autorisés à recourir aux techniques mentionnées aux articles L. 851-1, L. 851-4, L. 851-5, L. 851-6 et au I de l’article L. 852-1 dans les conditions prévues aux titres II et V du présent livre, à l’encontre des seules personnes détenues, aux fins de prévenir les évasions et d’assurer la sécurité et le bon ordre des établissements pénitentiaires ou des établissements de santé destinés à recevoir des personnes détenues. »

La parole est à M. le garde des sceaux.

M. Jean-Jacques Urvoas, garde des sceaux. La loi du 3 juin 2016 a modifié le code de la sécurité intérieure pour intégrer les services relevant du ministre de la justice au deuxième cercle de la communauté du renseignement et permettre la création d’un véritable renseignement pénitentiaire.

Comme je l’ai indiqué lors de la discussion générale, le travail d’élaboration des textes réglementaires d’application a été l’occasion de constater qu’il était nécessaire de préciser dans la loi elle-même certaines garanties procédurales initialement renvoyées au décret, concernant notamment les modalités de demande, la durée de l’autorisation ou les voies de recours.

Le présent amendement vise donc à préciser ce cadre juridique et à procéder à une répartition des techniques entre le code de procédure pénale et le code de la sécurité intérieure.

Trois techniques sont maintenues dans le code de procédure pénale au titre de la prévention des évasions, du maintien de la sécurité et du bon ordre de la sécurité des établissements. Bien que d’un usage fréquent, elles ne sont jamais mises en œuvre à l’insu des personnes visées, mais s’appliquent soit à des matériels autorisés en détention, soit à des matériels non autorisés, mais dont l’appréhension et l’exploitation sont notifiées au détenu concerné.

Les techniques de renseignement mises en œuvre à l’insu des détenus sont, quant à elles, inscrites dans le code de la sécurité intérieure et soumises au régime de droit commun du renseignement, sous le contrôle de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement, la CNCTR.

L’ensemble de ces techniques ne concerne que les seules personnes détenues pour des finalités de prévention des évasions et de maintien du bon ordre et de la sécurité des établissements ; les éventuels recours contre les décisions de l’administration pénitentiaire relèvent du seul contentieux administratif.

Le dispositif ainsi précisé permettra le développement et la structuration du renseignement pénitentiaire, qui représente aujourd’hui un enjeu de premier ordre.