M. Martial Bourquin. Tous les dix-huit à vingt-quatre mois, les membres de la branche se réunissent ; ils sont proches du terrain, parce qu’ils travaillent dans les entreprises. Ils peuvent signer des accords de groupe, mais ces derniers doivent obligatoirement être plus généreux que les accords de branche.
Durant les deux semaines d’examen de ce projet de loi, nous allons débattre pour savoir s’il faut privilégier l’entreprise ou la branche. Eh bien, il faut favoriser les deux, l’entreprise et la branche. Sur une question comme celle du remplacement des personnes en formation par des chômeurs de longue durée, la branche peut apporter des solutions.
Une chose, en Allemagne, devrait nous mettre d’accord : la volonté de cogestion, la volonté de trouver des accords entre le patronat et les salariés. (M. Jean-François Husson s’exclame.) Certains accords de branche ont ainsi pu prévoir de reporter des augmentations de salaire lorsque l’entreprise irait mieux et ne serait plus en difficulté. Toutefois, il n’est pas bon de mettre la branche de côté.
M. Alain Néri. Très bien !
M. Martial Bourquin. J’ai moi-même, en tant que syndicaliste, mené des accords de branche qui ont constitué des avancées pour les employeurs comme pour les salariés. Vouloir opposer les choses est une gigantesque erreur. C’est la raison pour laquelle il s’agit d’un très bon amendement.
Lorsque nous aborderons l’article 2, nous veillerons à avoir un vrai débat sur la place de la branche et de l’entreprise.
Mme la présidente. La parole est à M. Gaëtan Gorce, pour explication de vote.
M. Gaëtan Gorce. Nos collègues de la majorité nous invitent à nous rendre dans les entreprises, comme si nous n’y étions jamais allés ! Vous avez voté le budget des services spéciaux, mais avez-vous été agent secret autrement que devant votre poste de télévision ? (Sourires sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe CRC.) Avez-vous exercé dans un service de gynécologie ?
M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Oui ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Gaëtan Gorce. Avez-vous même été syndicaliste, comme Martial Bourquin ?
Les parlementaires ont vocation à traiter l’ensemble des sujets. Évitez donc d’employer de tels arguments, qui n’élèvent pas le niveau du débat. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC. – Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) Et si mes propos vous irritent, chers collègues de la majorité sénatoriale, après tout, tant mieux : cela me fait plaisir de ne pas irriter seulement le Gouvernement…
J’en reviens au sujet qui nous intéresse. Je sais qu’il existe déjà un dispositif de rotation des emplois. Ce que j’ai proposé à Mme la ministre, c’est l’articulation des deux. Ce qu’il faudrait mettre en place, aujourd’hui, c’est un grand plan de formation et de qualification.
Vous avez fait allusion à votre plan concernant les demandeurs d’emploi. Pour ma part, je pense à ceux qui occupent déjà un emploi et qui sont confrontés à la question de l’élévation des qualifications. D’où l’articulation avec l’idée de la rotation : il s’agit de mettre en place un dispositif volontariste, s’appuyant sur la formation massive des salariés. Plutôt que de continuer à baisser les cotisations sociales, ce qui coûte extrêmement cher, nous considérons qu’il faut relever le niveau de formation des salariés en créant, au travers d’une obligation de négocier et d’aboutir, avec un accompagnement financier, ce mouvement de formation et de qualification, complété par un mécanisme de rotation.
Je fais observer que nous consacrons beaucoup d’argent à la baisse des cotisations sociales, pour des résultats qui sont, depuis le début, extrêmement modestes.
Bien sûr, nous créons une accoutumance. Certes, nous ne pouvons pas revenir sur ces baisses de cotisations, parce que cela se traduirait par un alourdissement des charges des entreprises, ce qui n’est pas souhaitable. Toutefois, la prise en charge des baisses de cotisations, même si elle a été progressivement relevée, maintient l’échelle des salaires à un niveau relativement faible. Nous favorisons ainsi les mauvaises pratiques.
Nous devrions y réfléchir. C’est presque au-delà de 1,5 SMIC que nous devrions accorder ces allocations, afin d’encourager les entreprises à mener ce travail d’élévation des qualifications, donc des salaires.
Si un problème de pouvoir d’achat se pose dans notre pays, c’est aussi parce que les salaires sont trop bas, les qualifications étant trop faibles. C’est de cela que souffre notre économie, et non d’un poids excessif des cotisations sociales ou du code du travail.
Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Cadic, pour explication de vote.
M. Olivier Cadic. Pour réagir aux propos de M. Bourquin, je voudrais rappeler que la délégation aux entreprises s’est rendue à Londres, dans le cadre de l’élaboration d’un rapport d’information se fondant justement sur le témoignage des entrepreneurs français installés au Royaume-Uni. Au moment de la grave crise de 2008, on nous a cité les nombreux cas d’entreprises où les salariés, en accord avec l’entrepreneur, ont fait le choix de travailler sur trois jours plutôt que d’être licenciés. Ces choix étaient arrêtés au niveau de l’entreprise.
Vous avez raison de souligner qu’il ne faut pas opposer la branche et l’entreprise, monsieur Bourquin, mais il convient également de préserver la liberté de l’entreprise de rejoindre une branche, ou pas. Dans certains cas, la branche fonctionne bien et est très utile. Faisons confiance aux gens !
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 183 rectifié bis.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 184 rectifié bis.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. L'amendement n° 115 rectifié, présenté par MM. Antiste, Cornano, Desplan et Karam et Mme Jourda, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 4
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Garantir par des sanctions appropriées une égalité salariale effective entre femmes et hommes occupant un poste équivalent, à ancienneté et compétence égales ;
La parole est à M. Maurice Antiste.
M. Maurice Antiste. Bien qu’ayant été introduit dans le droit français depuis près d’un demi-siècle, le principe « à travail égal, salaire égal » n’est toujours pas respecté dans la pratique, puisqu’un écart de 10 % environ subsiste pour des emplois équivalents.
La « refondation » de la partie législative du code du travail doit selon moi être l’occasion de mettre en place des sanctions suffisamment dissuasives pour les entreprises, afin d’assurer l’application effective de cette égalité salariale entre femmes et hommes occupant un poste équivalent, à ancienneté et compétence égales.
C’est ainsi que je propose, après l’alinéa 4, d’insérer un alinéa ainsi rédigé : « Garantir par des sanctions appropriées une égalité salariale effective entre femmes et hommes occupant un poste équivalent, à ancienneté et compétence égales ».
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. Nous partageons tous l’objectif de l’auteur de l’amendement concernant l’égalité salariale effective. Dans notre esprit, cet objectif relève pleinement de l’alinéa 4 de cet article, qui pose le principe général de protection des droits et des libertés fondamentales des travailleurs.
Cet alinéa est un clin d’œil appuyé au travail du comité Badinter, qui n’a pas été retenu en tant que tel dans le corps du projet de loi. On se souvient que l’article 31 du rapport de ce comité est justement consacré à l’égalité de rémunération. Ce principe est selon nous satisfait par cet alinéa.
Sur le fond, je veux rappeler le travail constant accompli par tous les gouvernements qui se sont succédé, notamment la loi du 23 mars 2006 relative à l’égalité salariale entre les femmes et les hommes, portée à l’époque par Nicole Ameline, qui a instauré des sanctions assez significatives. En effet, toute entreprise qui n’a pas conclu un plan d’égalité professionnelle, lequel comprend notamment l’égalité salariale, peut se voir infliger une sanction de l’ordre de 1 % de la masse salariale : ce n’est pas rien ! Cette logique de sanctions est donc d’ores et déjà inscrite dans la loi de 2006. Je ne dispose pas d’éléments statistiques, mais peut-être Mme la ministre pourra-t-elle nous en communiquer.
Nous partageons naturellement vos préoccupations, mais, selon nous, votre amendement est satisfait par l’alinéa 4 de l’article 1er, à travers le principe général de protection des droits et des libertés fondamentales. J’espère que le travail de résorption des écarts engagé depuis de nombreuses années et les sanctions prévues permettront d’obtenir très rapidement une convergence.
Néanmoins, vous l’aurez compris, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Myriam El Khomri, ministre. Comme je l’ai dit tout à l’heure, l’enjeu de la commission de refondation est justement de travailler à droit constant. C’est aux parlementaires qu’il revient de faire évoluer le droit. Je partage tout à fait l’objectif de votre amendement, monsieur le sénateur. Les écarts injustifiés de salaire entre les femmes et les hommes sont tout à fait inacceptables dans notre pays. Vous me donnez l’occasion de vous dire ce qu’il en est aujourd'hui.
De nombreux outils ont été mis en œuvre, M. le rapporteur l’a souligné. Le Gouvernement s’y est également activement engagé, notamment par l’encadrement du temps partiel, le renforcement des accords sur l’égalité professionnelle.
Au 15 janvier 2016, près de 2100 entreprises ont fait l’objet d’une mise en demeure. Elles ont alors six mois pour se mettre en règle. Nous rencontrons une difficulté, puisque seulement 34 % des entreprises de 50 à 299 salariés sont couverts par un accord, 69 % des entreprises de 299 à 999 salariés, et 84 % des entreprises de plus de 1000 salariés. Quelque 6 % de ces mises en demeure ont fait l’objet d’une sanction, pour un montant d’environ 408 000 euros.
L’enjeu, aujourd'hui, concerne les plus petites entreprises. Je me suis rendue voilà quelques mois devant le Conseil supérieur de l’égalité professionnelle, le CSEP, pour identifier les leviers en vue de développer ces accords sur l’égalité salariale dans les entreprises de 50 à 299 salariés. Dans le même temps, nous prenons des dispositions pour multiplier les contrôles.
Je partage par conséquent tout à fait votre volonté, monsieur le sénateur. L’enjeu de cette commission, je le répète, n’est pas d’ajouter des objectifs, puisqu’elle travaille à droit constant, ce qui constitue une garantie pour les salariés. C’est aux parlementaires, et non à une commission d’experts ou de praticiens du droit social, même en lien avec les partenaires sociaux et les associations de la société civile, qu’il revient de faire évoluer le droit.
C’est la raison pour laquelle je vous invite à retirer votre amendement, monsieur le sénateur. À défaut, l’avis du Gouvernement serait défavorable.
Mme la présidente. Monsieur Antiste, l'amendement n° 115 rectifié est-il maintenu ?
M. Maurice Antiste. Puisque la commission et le ministre sont d’accord, ma question est la suivante : en quoi cela dérangerait-il de faire ce rappel en maintenant mon amendement ? J’invite l’assemblée à aller dans mon sens, et à l’unanimité ! (Sourires.)
Je maintiens donc mon amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Je ne doute pas de l’engagement de Mme la ministre pour essayer d’obtenir l’égalité professionnelle et salariale. Le problème, c’est que de nombreuses lois vont dans ce sens depuis des années, que nous sommes en 2016 et que ces textes ne sont pas appliqués. Nous nous creusons la tête pour faire en sorte que les entreprises respectent les lois.
Cela correspond tout de même à un manque à gagner de 52 milliards d’euros pour la protection sociale ! Je l’ai dit devant l’un des responsables de la Cour des comptes, qui ne m’a absolument pas contredite. Le problème, m’a-t-il répondu, c’est que cela ouvrirait des droits nouveaux. Effectivement, de meilleurs salaires ouvrent des droits nouveaux, une meilleure retraite, etc.
Dans ces conditions, en 2016, il est important de suivre la proposition de notre collègue. À un moment donné, il faut que cessent ces contournements de la loi : il n’y a aucune raison que l’égalité entre les femmes et les hommes ne soit pas pleine et entière, que ce soit l’égalité professionnelle ou l’égalité salariale.
Or ce n’est jamais le bon véhicule législatif, ni jamais le bon moment ! Et pendant ce temps, on voit proliférer les temps partiels imposés, les bas salaires pour les femmes et tous les contournements de la loi que j’ai évoqués.
D’ailleurs, la commission des affaires sociales ne vise même pas la parité dans la composition de la commission, qui doit simplement « tendre à » respecter un objectif de parité. C’est perpétuellement le cas : nous tendons à la parité ! Il y en a assez ! L’égalité doit être respectée, et il faut l’affirmer dans tous les véhicules législatifs qui nous permettent de le faire.
J’invite donc à voter en faveur de cet amendement. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
Mme la présidente. La parole est à M. Gaëtan Gorce, pour explication de vote.
M. Gaëtan Gorce. Je souhaite également l’adoption de cet amendement, et je ne puis m’empêcher de faire le rapprochement avec les débats que nous avons eus précédemment. Chaque fois, on nous explique que les choses sont en cours.
Nous avons une politique de l’emploi formidable, par exemple ; il suffit de mobiliser les moyens déjà engagés ! Or cela dure depuis plus de vingt-cinq ans, sans que le chômage de masse et le chômage de longue durée quittent leur niveau élevé. Nos concitoyens doivent le savoir : tout est en place en matière de formation et de qualification. Des réformes ont été menées à bien, on en lance de nouvelles et la rotation des emplois est à l’œuvre…
En fait, rien ne fonctionne : le système de la formation bénéficie toujours aux mêmes ; la politique de l’emploi ne permet pas de réduire le chômage ; depuis des années, nous affichons l’égalité salariale entre hommes et femmes dans un certain nombre de politiques, sans aucun résultat. Tout cela continue, et l’on se contente de déclarations. Il ne faut pas s’étonner, ensuite, que nos électeurs nous sanctionnent dans les urnes. Ce qu’ils veulent, ce sont des actes, et non une accumulation de déclarations !
Des mesures concrètes, suivies d’une volonté de les mettre en œuvre : voilà ce que serait une politique réformatrice !
Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Bouchoux, pour explication de vote.
Mme Corinne Bouchoux. Je remercie Mme la ministre de la précision des chiffres qu’elle a donnés. Cet amendement est vraiment de ceux dont il sera difficile d’expliquer le rejet au grand public : oui, nous en partageons la finalité, mais nous ne l’adoptons pas, parce que ce n’est pas le moment et que cela va poser des problèmes dans certaines entreprises, etc.
Si des membres de la délégation aux droits des femmes sont présents dans notre assemblée ce soir, ils reconnaîtront dans cette proposition le genre de mesures qui, depuis très longtemps, sur toutes les travées de cet hémicycle, font consensus. Il s’agit simplement d’affirmer que l’égalité salariale à emploi équivalent, ce doit être maintenant.
Très franchement, je comprends vos précautions, madame la ministre. Toutefois, un rejet ne serait pas explicable au grand public. Il me paraît donc important que cet amendement recueille un vote unanime.
Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Cadic, pour explication de vote.
M. Olivier Cadic. Nous sommes tous d’accord avec le concept : il faut une égalité salariale. Néanmoins, quelque 21 discriminations figurent au code pénal, et il convient de lutter contre toutes ces discriminations. Or il paraît difficilement envisageable de les citer toutes à cet endroit précis du texte !
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Myriam El Khomri, ministre. Je n’ai pas dit que cette disposition posait des problèmes aux entreprises ; je ne m’en préoccupe pas. La question, pour moi, est d’appliquer la loi. Cela explique mon souhait de vous communiquer des données très concrètes sur l’application de cette loi et sur les difficultés que nous rencontrions dans les plus petites entreprises, notamment en termes de mise en œuvre.
J’ai également expliqué que la commission de refondation avait pour fonction, non pas de faire évoluer le droit, mais de laisser une plus grande place à la négociation collective. D’ailleurs, c’est précisément parce que la préoccupation exprimée n’entre pas dans le cadre de cette commission que j’ai suggéré le retrait de cet amendement.
Tels sont les propos que j’ai tenus. Mais si, chaque mois, à la suite de ma rencontre avec le Conseil supérieur de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, je demande à mes services un bilan sur les mises en demeure et amendes appliquées, c’est bien parce que je considère ce sujet particulièrement important. Au-delà des lois qui sont votées, il me revient de mettre ces mesures en œuvre.
Par ailleurs, la volonté réformatrice ne s’exprime pas qu’en mots. L’État, avec les régions, forme actuellement près de 500 000 demandeurs d’emploi. Moi qui, avec Clotilde Valter ou avec les présidents de région, me rends sur le terrain, je considère que, pour des personnes attendant depuis six ou huit mois un financement de la région, ce sont, non pas des mots, mais des actes qui sont posés, redonnant un peu de crédibilité à la politique.
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Néri, pour explication de vote.
M. Alain Néri. Un parlementaire a pour fonction première d’élaborer la loi, laquelle doit effectivement protéger les citoyennes et les citoyens et garantir l’application des valeurs fondamentales de la République : la liberté, l’égalité et la fraternité.
Dans sa proposition, notre collègue Maurice Antiste demande tout simplement davantage d’égalité, et il souhaite sanctuariser l’égalité salariale entre hommes et femmes dans la loi.
Tout le monde semble d’accord, mes chers collègues. Il serait tout de même très positif que, à minuit trente-cinq, au moment de lever la séance, nous parvenions à un vote unanime sur une mesure emportant l’accord de tous. Par conséquent, je ne me contenterai pas d’entendre certains nous expliquer qu’ils sont pour, mais qu’ils voteront contre. De grâce, un peu de cohérence !
Pour ma part, je suis favorable à l’égalité entre hommes et femmes, en particulier s’agissant des salaires. Je vous invite donc à voter l’amendement de M. Antiste. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Joyandet, pour explication de vote.
M. Alain Joyandet. Ne souhaitant pas allonger les débats, je formulerai simplement une suggestion, allant dans le sens d’une modification de l’amendement.
À chaque nouveau texte concernant les entreprises, c’est toujours l’angle de la punition qui est retenu. L’entreprise est automatiquement suspecte – un peu comme dans les contrôles fiscaux qui s’éternisent, y compris lorsque l’on ne trouve rien.
Tout le monde, m’a-t-il semblé, souhaite voir évoluer la relation entre administration et entreprise. Pourquoi, par conséquent, ne pas rectifier cet amendement ? Plutôt que de pénaliser les entreprises n’étant pas parvenues à instaurer l’égalité, on créerait une prime pour celles qui ont déjà atteint ce but. Progressivement, elles auraient toute envie de mettre en œuvre cette égalité ! (Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe CRC.)
M. Alain Néri. Une prime aux automobilistes qui ne franchissent pas les feux rouges… Très bonne idée, monsieur Joyandet !
Mme la présidente. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.
Mme Cécile Cukierman. Je ne peux que réagir à cette dernière intervention. Malheureusement, en matière d’égalité salariale, on ne suspecte pas… On constate !
Oui, c’est une réalité, et non une suspicion : certaines entreprises pratiquent une inégalité salariale, ce qui conduit les femmes, moins bien payées à la fin de leur vie professionnelle, à bénéficier de retraites moins importantes. Malheureusement, c’est une réalité que l’on constate quotidiennement – chaque 8 mars, année après année, la presse dans toute sa diversité livre le même article –, et ce malgré un certain nombre de lois, cela a été rappelé, qui existent aujourd'hui, mais qui ne sont pas appliquées.
La question est donc, non pas de donner une prime aux entreprises respectant la parité, mais bien de sanctionner celles qui ne la respectent pas. Il faut prendre cette question à bras-le-corps, en faisant preuve de volontarisme. Sans cela, on crée des inégalités, que l’on ne corrige pas, et, en définitive, on ne protège pas les plus faibles.
C’est pourquoi nous voterons cet amendement.
M. Alain Joyandet. Pour ma part, je préfère la carotte au bâton !
Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.
Mme Nicole Bricq. Je vois que le débat s’enflamme. Je voudrais tout de même rappeler l’objet de cet article 1er : instaurer une commission chargée de réécrire le code du travail à droit constant, comme Mme la ministre n’a cessé de le répéter. Cette commission n’aura pas à élaborer la loi à notre place !
Je comprends la préoccupation exprimée ici, et je la partage. Toutefois, nous allons examiner, dans quelque temps, un texte sur l’égalité citoyenne ; c’est dans ce texte que vous pourrez demander l’intégration de ces mesures d’égalité, mes chers collègues.
Mme Éliane Assassi. On nous l’a déjà faite, celle-là !
Mme Nicole Bricq. Si vous voulez les assortir de sanctions, vous pourrez le faire. Vous pouvez également voter en faveur de cet amendement, tout comme vous avez voté en faveur des précédents. Néanmoins, j’y insiste, le travail d’élaboration de la loi ne sera pas du ressort de la commission d’experts.
Il en ira autrement quand, demain après-midi, le groupe communiste proposera un amendement tendant à modifier le texte de la commission du Sénat, mais, ici, nous parlons d’une commission d’experts, et ce ne sont pas des experts qui vont faire la loi à ma place !
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 115 rectifié.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n'adopte pas l'amendement.)
Mes chers collègues, nous avons examiné 8 amendements au cours de la journée ; il en reste 887.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.