Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur. La commission, à plusieurs reprises et encore une fois l’année dernière, dans le cadre de ses travaux sur les crédits budgétaires de la presse, a dénoncé la générosité du dispositif de l’article 81 du code précité. Elle ne peut donc qu’être favorable à la limitation de ce mécanisme aux salariés et indépendants les plus modestes. Par conséquent, elle est favorable à la proposition de Mme Jouve qui s’appuie sur les différents rapports budgétaires de la commission.
M. David Assouline. C’est un cavalier !
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. Cet amendement a sa place non pas dans le présent texte, mais dans une loi de finances. Il constitue un cavalier. Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
Mme la présidente. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.
M. David Assouline. Je demande à Mme Jouve de bien vouloir retirer cet amendement. Mieux vaudrait avoir ce débat, y compris en commission, lors de l’examen du projet de loi de finances, car la mesure est globale, et ainsi aborder l’ensemble de la fiscalité de la presse. À cet égard, je puis vous garantir que ce ne sont pas les journalistes qui coûtent le plus cher. Mme la ministre vient de nous annoncer un travail sérieux destiné à reconsidérer certaines aides à la presse et fort heureusement à y mettre bon ordre.
S’il l’on veut s’attaquer aux niches ou aux exonérations fiscales, pourquoi cibler les journalistes ? Examinons plutôt la question au moment de l’examen du budget en envisageant tous les secteurs concernés. Quoi qu’il en soit, aborder ce problème au détour d’un tel texte ne me semble pas logique.
Le retrait de cet amendement ne signifie pas le refus du débat. Il s’agit simplement de l’organiser au moment où il doit avoir lieu.
Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Abate, pour explication de vote.
M. Patrick Abate. Dans mon rapport sur la presse que j’ai eu l’honneur de conduire lors du projet de loi de finances pour 2016, j’ai évoqué le problème de la fiscalité, car il n’est pas possible de faire l’impasse sur cette question très importante.
Néanmoins, la situation ne peut pas être réglée au détour d’une telle proposition de loi. Il s’agit effectivement d’un problème global de justice et de fiscalité. Madame Jouve, même si les membres de mon groupe sont sensibles à ces questions, à titre personnel, je préférerais reporter le débat à un autre moment. Je vous appelle également au retrait.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote.
Mme Marie-Christine Blandin. Madame Jouve, vous posez de bonnes questions. Je suis néanmoins troublée, ce qui prouve que nous avons besoin de temps. Vous parlez d’un revenu brut annuel de 62 340 euros, ce qui, divisé par douze, représente environ 5 000 euros, soit un revenu de 4 000 euros net. Cela ne fait pas beaucoup en termes de cotisations sociales et patronales. Je suis donc étonnée du décalage.
Par ailleurs, prévoir l’application du dispositif pour l’imposition des revenus de 2016 est un peu brutal. Je rappelle que certaines personnes sont mensualisées. Il faudrait au moins prévoir une année supplémentaire.
Tous ces arguments plaident en faveur d’un différé de cet arbitrage.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 28 rectifié bis.
J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Je rappelle que l'avis de la commission est favorable et que celui du Gouvernement est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 235 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 333 |
Pour l’adoption | 205 |
Contre | 128 |
Le Sénat a adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l'article 11 quinquies.
Article 11 sexies
(Non modifié)
I. – Au 2 de l’article 199 terdecies-0 C du code général des impôts, le montant : « 1 000 € » est remplacé par le montant : « 5 000 € » et le montant : « 2 000 € » est remplacé par le montant : « 10 000 € ».
II. – La perte de recettes pour l’État est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. – (Adopté.)
Article 11 septies
(Non modifié)
L’article 12 de la loi n° 47-585 du 2 avril 1947 relative au statut des entreprises de groupage et de distribution des journaux et publications périodiques est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les recours contre les décisions prises par l’Autorité de régulation de la distribution de la presse en application du présent article sont de la compétence de la cour d’appel de Paris. » – (Adopté.)
Article 11 octies
Le 6° de l’article 18-6 de la loi n° 47-585 du 2 avril 1947 précitée est ainsi modifié :
1° Les mots : « , selon des critères objectifs et non discriminatoires définis dans un cahier des charges, » sont supprimés ;
2° À la fin, le mot : « chalandise » est remplacé par le mot : « desserte » ;
3° Sont ajoutées quatre phrases ainsi rédigées :
« Les décisions de cette commission sont motivées. La commission fait application de critères objectifs et non discriminatoires visant à garantir l’impartialité de la distribution de la presse, à préserver les équilibres économiques du système collectif de distribution, à contribuer à l’efficience économique et à l’efficacité commerciale du réseau des dépositaires et des diffuseurs de presse et à assurer le respect, par ces agents de la vente, de leurs obligations définies par les décisions de portée générale du Conseil supérieur des messageries de presse qui sont devenues exécutoires. Les décisions de la commission qui ont pour effet de modifier les conditions d’exécution contractuelle d’un dépositaire ou d’un diffuseur de presse ou de mettre fin à son contrat sont prises après que les parties au contrat ont été mises en mesure de présenter leurs observations. Ces décisions prennent effet après un délai qui tient compte des spécificités de l’exécution et de l’équilibre du contrat ; ».
Mme la présidente. L'amendement n° 75, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 5, deuxième phrase
Après les mots :
système collectif de distribution,
insérer les mots :
à limiter les coûts de distribution pour les entreprises de presse,
La parole est à Mme la ministre.
Mme Audrey Azoulay, ministre. Cet amendement répond à une demande d’amélioration du texte de la commission. Il s’agit de rétablir un membre de phrase qui commençait malencontreusement par « notamment », adverbe qui vous a déplu, mesdames, messieurs les sénateurs.
Il semble néanmoins important de maintenir la mention dans l’article 18-6 de la loi Bichet du critère de limitation des coûts de distribution, qui est un critère essentiel dans les décisions en matière d’implantation des dépositaires de presse et des points de vente.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur. Favorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 11 octies, modifié.
(L'article 11 octies est adopté.)
Articles additionnels après l'article 11 octies
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 60, présenté par Mmes Blandin, Bouchoux et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Après l'article 11 octies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article 2 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, il est inséré un article 2 … ainsi rédigé :
« Art. 2 … – Toute entité juridique employant des journalistes professionnels au sens de l’article L. 7111-3 du code du travail, produisant ou diffusant de l’information, notamment agence de presse, entreprise de publication de presse, entreprise audiovisuelle, multimédia, électronique, doit :
« 1° Soit se doter d’une équipe rédactionnelle permanente et autonome composée de tous les journalistes professionnels au sens de l’article L. 7111-3 du même code qui y contribuent. Elle participe à l’élaboration d’une charte éditoriale et déontologique et veille au respect des chartes de déontologie de la profession.
« Sans préjudice des dispositions relatives aux représentants du personnel, cette équipe rédactionnelle désigne son ou ses représentants selon les modalités électorales qui régissent les élections professionnelles dans les entreprises.
« Ces représentants ont un rôle de porte-parole et organisent les consultations de l’équipe rédactionnelle.
« Ils bénéficient de la même protection que celle dont bénéficient les délégués du personnel en vertu des articles L. 2411-5 et suivants du même code.
« L’équipe rédactionnelle doit être consultée par sa direction avant tout changement de politique éditoriale ou rédactionnelle. Les projets éditoriaux lui sont soumis annuellement. Elle peut s’y opposer.
« Elle doit également être consultée sur la nomination aux postes de responsable de la rédaction que ce soit directeur de l’information, directeur de la rédaction ou rédacteur en chef. Elle peut s’opposer à ces nominations.
« En cas de changement important dans la composition du capital ou dans l’équipe de direction affectant de manière préoccupante la situation économique de l’entreprise, l’équipe rédactionnelle peut prendre l’initiative d’un scrutin de défiance. Elle a aussi la faculté de saisir le comité d’entreprise pour faire jouer le droit d’alerte ;
« 2° Soit se doter d’une association de journalistes dont les titulaires de la carte de presse sont membres de droit. Les statuts de celle-ci sont conformes aux règles édictées par décret en Conseil d’État.
« S’il y a lieu, la forme associative peut être remplacée par une société des rédacteurs, dont les parts sociales sont détenues par les salariés titulaires de la carte de presse.
« Lorsque l’entreprise édite une publication d’information politique et générale, l’association des journalistes ou la société des rédacteurs désigne un représentant qui siège de droit, avec voix consultative, au conseil d’administration ou de surveillance.
« La désignation du responsable de la rédaction donne lieu à un vote, à bulletin secret, de tous les membres de l’association des journalistes ou de la société des rédacteurs.
« Dans le cas où la désignation est opérée, alors qu’elle a été rejetée à la majorité des trois cinquièmes des suffrages exprimés, elle est considérée de droit comme opérant le changement notable prévu au 3° de l’article L. 7112-5 du code du travail.
« L’association des journalistes ou la société des rédacteurs participe avec la société éditrice à l’élaboration d’une charte éditoriale et déontologique, énonçant les engagements souscrits à l’égard des lecteurs par tous ceux qui concourent à la publication. Cette charte est reproduite dans la publication au moins une fois par an. »
La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.
Mme Marie-Christine Blandin. Cette disposition figurait dans une proposition de loi de 2010. Il s’agit de donner une réalité juridique à l’équipe des journalistes.
Il importe de cloisonner l’éditorial d’un côté et l’économique de l’autre.
Tout à l’heure, un collègue siégeant sur les travées du groupe Les Républicains s’insurgeait de ne pas avoir pu disposer de sa presse quotidienne en raison de l’action d’un syndicat, lequel appliquait des mesures de rétorsion parce qu’une tribune n’avait pas été publiée.
Dans ce conflit, il serait intéressant de savoir qui refusait la publication. S’agissait-il de l’éditorial ou du groupe économique ? Il est très important d’accorder une entité juridique à l’ensemble de l’équipe rédactionnelle. Cette dernière, permanente et autonome – association de journalistes disposant d’une charte –, doit pouvoir se protéger contre toutes les influences extérieures.
Le présent texte dans sa rédaction actuelle a été bien amoindri, en particulier pour ce qui concerne le secret des sources. Il est essentiel de donner des moyens à ceux qui constituent un pan de notre démocratie pour exister à part entière !
Mme la présidente. L'amendement n° 2 rectifié, présenté par M. Abate, Mme Gonthier-Maurin, M. P. Laurent, Mme Prunaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 11 octies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article 6 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, il est inséré un article 6 … ainsi rédigé :
« Art. 6 … – Toute entité juridique employant des journalistes professionnels au sens de l’article L. 7111-3 du code du travail, produisant ou diffusant de l’information, notamment agence de presse, publication de presse, entreprise audiovisuelle, multimédia, électronique doit :
« 1° Soit se doter d’une équipe rédactionnelle permanente et autonome composée de tous les journalistes professionnels au sens de l’article L. 7111-3 du même code qui y contribuent. Elle veille au respect des chartes de déontologie de la profession.
« L’équipe rédactionnelle doit être consultée par sa direction avant tout changement de politique éditoriale ou rédactionnelle. Les projets éditoriaux lui sont soumis annuellement. Elle peut s’y opposer.
« Elle doit également être consultée lors de la nomination d’un responsable de la rédaction qu’il soit directeur de l’information, directeur de la rédaction ou rédacteur en chef. Elle peut s’opposer à cette nomination.
« En cas de changements importants dans la composition du capital ou dans l’équipe de direction affectant de manière préoccupante la situation économique de l’entreprise, l’équipe rédactionnelle peut prendre l’initiative d’un scrutin de défiance. Elle a aussi la faculté de saisir le comité d’entreprise pour faire jouer le droit d’alerte ;
« 2° Soit se doter d’une association de journalistes dont les titulaires de la carte de presse sont membres de droit. Les statuts de celle-ci sont conformes aux règles édictées par décret en Conseil d’État.
« Lorsque l’entreprise édite une publication d’information politique et générale, l’association des journalistes ou la société des rédacteurs désigne un représentant qui siège de droit, avec voix consultative, au conseil d’administration ou de surveillance.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Cet amendement vise à la fois à reconnaître l’existence des équipes rédactionnelles et à définir les missions de ces dernières. L’enjeu est ici multiple.
Il s’agit tout d’abord de permettre l’émergence de contre-pouvoirs au sein des rédactions entre les différents pôles. En effet, si la majorité des services des rédactions sont unis, la rédaction est encore reconnue comme un conglomérat d’individualités et non comme un collectif.
Ensuite, cela permettrait d’assurer une protection non pas individuelle, mais collective des journalistes et des collaborateurs. Il s’agit de répondre à une exigence démocratique en collectivisant un droit de conscience individuel, bien souvent très difficile à mettre en œuvre en pratique, du fait de l’atomisation des rédactions.
Par ailleurs, cet amendement tend à définir les pouvoirs de cette équipe rédactionnelle. Il s’agit de permettre aux journalistes d’être consultés de manière effective sur toute décision de la direction, du conseil d’administration ou du conseil de surveillance qui impliquerait directement l’équipe rédactionnelle.
Ainsi, l’instauration de cette équipe rédactionnelle serait une mesure de nature à limiter l’influence des intérêts économiques dans l’exercice à proprement parler du journalisme au sein des rédactions.
Mme la présidente. L'amendement n° 27, présenté par Mme N. Goulet, n'est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission sur les amendements restant en discussion ?
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur. Nous avons effectivement eu ce débat à la faveur de l’inscription d’une proposition de loi à l’ordre du jour de notre assemblée en 2010.
Renforcer l’indépendance des journalistes a été notre préoccupation commune au cours de nos discussions. Avec l’article 1er, les journalistes se voient reconnaître un droit d’opposition étendu, qui garantit, avec la clause de cession et la clause de conscience, leur indépendance. Nous avons généralisé le principe des chartes, ainsi que l’établissement des comités de déontologie. Nous avons donc posé un cadre pour veiller à cet objectif que nous souhaitons atteindre.
Ces deux amendements vont très loin en ce qu’ils visent à créer un véritable contre-pouvoir au sein des entreprises de presse. Cela ne me semble pas opportun. Il convient en effet de respecter les hiérarchies existantes pour le bon fonctionnement de ces sociétés.
Je vous rappelle, à cet égard, mes chers collègues, qu’il revient au directeur de la publication, lequel représente l’actionnaire, d’assurer la responsabilité du contenu diffusé, y compris en droit pénal de la diffamation.
Le directeur de la publication porte la responsabilité pénale de la publication. L’article 42 de la loi du 29 juillet 1881 relative à la liberté de la presse énumère les personnes qui peuvent être poursuivies comme auteurs principaux des crimes ou délits, et fixe l’ordre dans lequel elles pourront être recherchées : d’abord les directeurs de publication ou éditeurs quelles que soient leurs professions ou leurs dénominations, ensuite, les codirecteurs de publication.
Ce système de responsabilités « en cascade » permet d’identifier plus facilement celui contre lequel doivent être engagées les poursuites. En première ligne se trouve le directeur de publication, auquel la loi impute la responsabilité des écrits publiés par les membres de la rédaction, avant l’auteur principal du délit de presse.
Dans ce cadre, ériger la rédaction elle-même en entité juridique serait source de confusion dans la chaîne des responsabilités susmentionnée.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Audrey Azoulay, ministre. Nous sommes tous d’accord pour garantir la protection des journalistes contre les interventions éventuelles d’actionnaires des titres ou celles d’annonceurs. Mais la création d’une équipe rédactionnelle autonome et permanente n’est pas la voie que nous avons choisie lors de la construction de l’équilibre de ce texte.
Par ailleurs, une telle mesure pourrait remettre en cause la responsabilité du directeur de la publication instaurée par la loi de 1881, puisque celui-ci définit la ligne éditoriale du journal ; il en assume la responsabilité juridique et supporte seul les risques encourus – notamment pénaux, comme cela a été souligné. Il est donc normal qu’il soit le seul à déterminer et à infléchir, le cas échéant, la ligne éditoriale.
En outre, le dispositif choisi au travers de cette proposition de loi et la référence à la charte déontologique de l’entreprise, laquelle a été introduite à l’Assemblée nationale, apportent déjà une référence collective, qui est l’objectif que vous visez, mesdames Blandin et Gonthier-Maurin, en éclairant le droit du journaliste à refuser certains actes professionnels. Il me semble que nous sommes parvenus à un équilibre satisfaisant auquel il ne convient pas ajouter cet élément supplémentaire.
Je vous demande par conséquent de bien vouloir retirer ces amendements. À défaut, j’y serai défavorable.
Mme la présidente. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.
M. David Assouline. Il semblerait que j’aie beaucoup inspiré par mes travaux passés Mme Blandin et le groupe écologiste, puisque la mesure défendue au travers de l’amendement n° 60 reprend l’article 1er de la proposition de loi relative à l’indépendance des rédactions que j’ai déposée en 2010. Mais ma proposition de loi ne comprenait pas qu’un seul article et prévoyait un dispositif cohérent et complet pour ce qui concerne la constitution en entité juridique de la rédaction.
C’était, selon moi, l’une des réponses possibles au mouvement de concentration dans la presse écrite, notamment dans la PQR, la presse quotidienne régionale, où des groupes attentaient à l’intégrité de la rédaction. Celle-ci se voyait dépourvue de son travail et de son autonomie rédactionnelle, puisqu’elle était mise dans le « pot commun », tout en gardant les titres d’un seul actionnaire qui décidait d’une seule ligne rédactionnelle.
Or la multitude des titres garantit la pluralité des lignes rédactionnelles auxquelles chaque rédaction avait adhéré ; d’un seul coup, le schéma changeait et les rédactions ne pouvaient pas réagir !
Je serais gêné que l’on fasse autant référence à mes travaux passés, comme si j’éprouvais aujourd'hui un problème à défendre ma proposition initiale ? Je n’ai aucun problème ! Je souligne que je suis à l’origine de la discussion de ce jour, et non le groupe écologiste.
En tout état de cause, un seul texte ne peut inclure trois lois : une loi sur la concentration, une loi sur l’indépendance des rédactions comme entités juridiques et une loi élaborée conjointement avec nos amis de l’Assemblée nationale et avec le Gouvernement traitant de sujets beaucoup plus précis. Si durant ce quinquennat nous adoptons cette proposition de loi, ce serait déjà un grand pas de fait par rapport à notre point de départ ! Et je continuerai ensuite à me battre tant que j’en aurai l’énergie pour que les autres pas soient réalisés.
Quoi qu’il en soit, nous ne pouvons pas tout inscrire dans ce texte ni surtout galvauder le dispositif que l’on veut défendre par des imprécisions juridiques qui le fragiliseraient.
Le groupe socialiste et républicain s’abstiendra pour éviter les scrutins publics à répétition. C’est un texte issu de ses rangs dont le rapporteur est de droite. Cependant, la droite n’a même pas pris la peine d’être majoritaire dans l’hémicycle cet après-midi. C’est un peu fort !
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote.
Mme Marie-Christine Blandin. Certes, le dispositif anti-concentration examiné précédemment et le taux 37,5 %, sans être des propositions bricolées, méritaient un plus large débat. Mais en l’espèce, je ne suis pas d’accord quand M. Assouline parle d’imprécisions. Je lui recommande de lire l’ensemble de l’amendement : on peut reprocher à celui-ci tout ce que l’on veut, mais pas d’être imprécis. Sa rédaction est même un travail de dentelle !
Permettez-moi de prendre un exemple pour justifier cette entité juridique qui consolide l’indépendance. Un grand hebdomadaire de gauche est en ce moment sous le feu des regards en raison d’une tribune cosignée par des intellectuels, notamment par Claude Lanzmann, au sujet du licenciement du numéro deux de la rédaction, une femme. D’aucuns invoquent telle ou telle action pour la pousser dehors. Pour ma part, je ne cautionne rien, car j’ignore tout de l’affaire. Je sais simplement que la société des rédacteurs note l’intervention politique d’un actionnaire…
Par cet amendement, nous ne visons rien d’autre que la séparation de l’économique et de l’éditorial. C’est pourquoi nous maintenons l’amendement.
Mme la présidente. L'amendement n° 76, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l'article 11 octies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À la première phrase du troisième alinéa de l’article L. 132-44 du code de la propriété intellectuelle, les mots : « au dernier alinéa de l’article L. 2232-21 et » et les mots : « dans les conditions prévues à l’article L. 2232-21 du même code, » sont supprimés.
La parole est à Mme la ministre.
Mme Audrey Azoulay, ministre. Il s’agit d’un amendement de coordination qui vise à mettre en cohérence des dispositions du code de la propriété intellectuelle relatives aux droits d’auteurs des journalistes avec certains articles du code du travail qui ont été modifiés par la loi du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l’emploi.
Il s’agit de consolider dans le code de la propriété intellectuelle la compétence de la commission des droits d’auteurs des journalistes comme commission paritaire de branche pour rendre pleinement effectifs les accords de droits d’auteurs conclus dans certaines entreprises de presse lorsqu’ils sont passés avec des salariés non mandatés, les accords conclus avec des salariés mandatés ne nécessitant plus, eux, de validation par la commission susvisée. Dans le cas de salariés non mandatés, du fait des changements intervenus dans le code du travail, la procédure de validation ne fonctionnait plus.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur. Favorable.
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l'article 11 octies.
Titre III
DISPOSITIONS DIVERSES, TRANSITOIRES ET FINALES
Article 12
Pour l’application des articles 3 et 4, les conventions conclues entre le Conseil supérieur de l’audiovisuel et les éditeurs de services de radio et de télévision font l’objet d’un avenant en tant que de besoin, avant le 1er juillet 2017.
Mme la présidente. L'amendement n° 77, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Remplacer les mots :
avant le 1er juillet 2017
par les mots :
dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi pour les services à vocation nationale de radio généraliste ou de télévision ou avant le 1er juillet 2017 pour les autres services
La parole est à Mme la ministre.
Mme Audrey Azoulay, ministre. La commission a souhaité différer de six mois, soit jusqu’au 1er juillet 2017, le délai d’adaptation par le CSA des conventions des chaînes, afin d’y intégrer les nouvelles dispositions de la proposition de loi tenant à l’honnêteté, au pluralisme et à l’indépendance de l’information et des programmes qui y concourent.
Je comprends que le CSA ait besoin de temps pour adapter les nombreuses conventions des chaînes locales de radio et de télévision. En revanche, le délai initial adopté par l’Assemblée nationale de six mois, soit jusqu’à la fin de l’année 2016, est suffisant pour permettre d’adapter les conventions des chaînes nationales.
Le présent amendement a donc pour objet de maintenir le délai de six mois pour les modifications des conventions tenant compte des dispositions de la présente proposition de loi pour les services à vocation nationale dont le nombre plus réduit permet, me semble-t-il, de respecter ce délai.