Sommaire
Présidence de M. Gérard Larcher
Secrétaires :
MM. Philippe Adnot, Jean Desessard.
2. Éloge funèbre de Claude Dilain, sénateur de la Seine-Saint-Denis
Suspension et reprise de la séance
présidence de M. Jean-Claude Gaudin
4. Communication du Conseil constitutionnel
5. Croissance, activité et égalité des chances économiques. – Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
Article additionnel après l'article 23 bis A
Amendement n° 1374 de Mme Éliane Assassi. – Rejet par scrutin public.
Amendement n° 1078 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.
Adoption de l’article.
Amendement n° 1375 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.
Amendement n° 1376 de Mme Éliane Assassi. – Retrait.
Adoption de l’article.
Article additionnel après l’article 23 bis
Amendement n° 984 rectifié de M. Francis Delattre. – Retrait.
PRÉSIDENCE DE Mme Jacqueline Gourault
Amendement n° 1377 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.
Adoption de l’article.
Demande de priorité de l’article 40 ter après l’article 35 nonies. – M. Vincent Capo-Canellas, président de la commission spéciale ; Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État. – La priorité est de droit.
Amendement n° 1711 rectifié de la commission. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Amendement n° 446 de M. Jean Desessard. – Rejet.
Amendement n° 1378 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.
Adoption de l’article.
Amendement n° 1379 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.
Amendement n° 1380 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.
Adoption de l’article.
Amendement n° 19 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.
Amendement n° 1382 de Mme Éliane Assassi. – Retrait.
Amendement n° 1468 rectifié de Mme Marie-Noëlle Lienemann. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Article 23 septies (nouveau) – Adoption.
Article additionnel après l'article 23 septies
Amendement n° 20 de Mme Éliane Assassi. – Rejet par scrutin public.
Amendement n° 1383 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.
Amendement n° 704 de M. Roger Karoutchi. – Rejet.
Amendement n° 989 de M. Gérard Collomb. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Articles additionnels après l’article 24
Amendement n° 636 rectifié bis de M. Pierre Jarlier. – Retrait.
Amendement n° 577 rectifié quater de Mme Jacky Deromedi. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Articles additionnels après l'article 24 bis
Amendement n° 343 de M. Alain Joyandet. – Retrait.
Amendement n° 344 de M. Alain Joyandet. – Retrait.
Amendement n° 941 rectifié ter de Mme Gisèle Jourda. – Rejet.
Suspension et reprise de la séance
Présidence de Mme Françoise Cartron
Articles additionnels après l'article 24 bis (suite)
Amendement n° 21 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.
Amendement n° 1710 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 1709 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 1708 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 1392 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.
Amendement n° 1385 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.
Adoption de l’article modifié.
Articles additionnels après l’article 25
Amendement n° 1386 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.
Amendement n° 1457 rectifié de M. Francis Delattre. – Retrait.
Amendement n° 133 rectifié bis de M. Albéric de Montgolfier. – Retrait.
Amendement n° 1502 du Gouvernement. – Rejet.
Amendement n° 927 de M. François Aubey. – Retrait.
Adoption de l’article.
Article additionnel après l’article 25 bis A
Amendement n° 1373 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.
Article 25 bis BA (nouveau) – Adoption.
Mme Michelle Demessine
Adoption de l’article.
Amendement n° 1079 de M. Paul Vergès. – Rejet.
L’article demeure supprimé.
Article 25 bis D – Adoption.
Amendement n° 1530 du Gouvernement. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Articles additionnels après l'article 25 bis E
Amendement n° 309 rectifié de Mme Marie-Noëlle Lienemann. – Rejet.
Amendement n° 401 rectifié de Mme Catherine Tasca. – Retrait.
Article 25 bis F – Adoption.
Article 25 bis – Adoption.
Article 25 ter – Adoption.
Article 25 quater – Adoption.
Article 25 quinquies – Adoption.
Adoption de l’article.
Amendement n° 1555 du Gouvernement. – Devenu sans objet.
Article 25 octies – Adoption.
Articles additionnels après l'article 25 octies
Amendement n° 308 rectifié de Mme Marie-Noëlle Lienemann. – Rejet.
Amendement n° 986 rectifié de M. Francis Delattre. – Rejet.
Article 25 nonies (nouveau) – Adoption.
Amendement n° 1387 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.
Amendement n° 1389 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.
Amendement n° 1707 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 1390 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.
Adoption de l’article modifié.
Articles additionnels après l’article 25 decies
Amendement n° 660 rectifié de M. Claude Kern. – Rejet.
Amendement n° 661 rectifié de M. Claude Kern. – Retrait.
Amendement n° 1388 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.
Renvoi de la suite de la discussion.
compte rendu intégral
Présidence de M. Gérard Larcher
Secrétaires :
M. Philippe Adnot,
M. Jean Desessard.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Éloge funèbre de Claude Dilain, sénateur de la Seine-Saint-Denis
M. le président. Mesdames, messieurs les ministres, mesdames, messieurs les secrétaires d’État, mes chers collègues, le 3 mars dernier, la nouvelle du décès de Claude Dilain (Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que les membres du Gouvernement, se lèvent.), a provoqué une profonde tristesse, non seulement dans sa ville de Clichy-sous-Bois, qui lui était si chère, et dans le département de la Seine-Saint-Denis, pour lequel il s’était inlassablement battu, mais aussi au Sénat de la République, qu’il avait rejoint en septembre 2011 et où il était unanimement apprécié et estimé de tous ses collègues.
Pour ma part, je me rappelle avec émotion l’annonce de son décès par le président de son groupe, notre collègue Didier Guillaume.
Claude Dilain nous a quittés à l’âge de soixante-six ans. L’émotion que sa disparition a provoquée et dont les plus hautes autorités de l’État se sont fait l’écho atteste que Claude Dilain était encore plus qu’un élu exemplaire. Inlassable défenseur des banlieues et des plus modestes, il était un homme de bien, un homme de convictions, un homme de cœur, un homme généreux, un homme d’écoute et un homme de parole.
L’engagement politique était d’abord, pour Claude Dilain, un acte de fraternité. Je vais lui donner une nouvelle fois la parole, en citant les réponses qu’il avait apportées, il y a moins d’un an, à une question qui lui était posée sur l’engagement politique :
« S’engager en politique ne devrait jamais être autre chose qu’un geste de fraternité, parce que cela suppose de donner ce que l’on porte en soi, d’aller vers les autres, de ne pas se situer en surplomb, de ne pas agir avec arrogance ou condescendance.
« Nous ne devons jamais oublier que, lorsque les citoyens nous élisent, ils ne nous placent pas sur un piédestal, mais ils nous accordent leur confiance.
« Nous avons le devoir de nous en montrer dignes. L’actualité nous le montre aussi : quand on oublie la fraternité, d’abord on se met en dehors de la République, puisque notre devise inclut la fraternité, ensuite on se livre à des comportements cyniques où la fraternité n’a plus de place ».
Que dire de plus, sinon relever la brûlante actualité de ces propos de Claude Dilain, qui n’a jamais cessé d’être le porte-parole des quartiers les plus déshérités ?
La fidélité de Claude Dilain à ses convictions et la noblesse morale qui le caractérisaient se retrouvent dans l’itinéraire exemplaire du médecin pédiatre qu’il fut encore jusqu’à l’an dernier et qui concevait, là aussi, son métier comme l’engagement d’une vie ; dans l’itinéraire du maire passionné de Clichy-sous-Bois qu’il avait été, comme il aimait à le rappeler, « durant seize ans, trois mois et vingt-trois jours » ; enfin, dans l’itinéraire du sénateur de la Seine-Saint-Denis, qui portait haut, depuis trois ans, les valeurs d’égalité et de solidarité qui étaient les siennes.
Claude Dilain était un fils de cette banlieue qu’il n’aura jamais cessé de défendre. Fils d’un ouvrier gazier, il avait grandi dans le quartier du Bel-Air à Saint-Denis. Remarquable exemple de la méritocratie républicaine, il mena à bien de longues études médicales et, après avoir accompli sa spécialité en pédiatrie, il décida d’ouvrir en 1978 son cabinet médical dans cette ville de Clichy-sous-Bois pour laquelle il avait eu un « coup de foudre », comme il l’expliquait dans son livre, publié en 2006, Chronique d’une proche banlieue.
Médecin passionné, il avait toujours été attentif à la vie de la cité. Son engagement de médecin et son engagement politique se rapprochaient dans son esprit : « Même quand je suis devenu maire, disait-il, je suis resté médecin. Je recevais les familles, mais je veillais aussi à leur rendre visite, parce qu’il me semble essentiel de savoir comment vivent les gens, de les rencontrer chez eux ».
Claude Dilain fut maire de Clichy-sous-Bois de juin 1995 à octobre 2011, après avoir été réélu en 2001, puis en 2008, en obtenant à chaque fois plus de 60 % des voix dès le premier tour.
À la tête de cette commune, Claude Dilain se battit avec abnégation pour lutter, sans jamais céder au découragement, contre les difficultés liées à la grande pauvreté et à la marginalité.
Sa première préoccupation était d’être un élu responsable et de démontrer qu’on pouvait être à la fois le maire d’une ville manquant de moyens et un gestionnaire assez exemplaire. Il consacra ainsi son premier mandat de maire à redresser les finances de la ville.
Cela n’empêcha pas le maire ambitieux pour sa ville qu’il était de soutenir des projets remarquablement audacieux, qui pouvaient étonner. Il avait ainsi fait venir en résidence des photographes et des écrivains et défendu le projet d’une Villa Médicis à Clichy-sous-Bois, presque en signe de défi, mais aussi comme un message d’espérance, comme ce rayon de lumière que fut la Renaissance.
Et lorsque le président Jacques Chirac, le recevant à l’Élysée après des temps très difficiles pour cette commune, l’interrogea sur les besoins de Clichy-sous-Bois, Claude Dilain réclama un tramway, qui devrait être opérationnel en 2018, mais aussi la présence de la police, au travers d’un commissariat qui a ouvert ses portes en 2011. L’un et l’autre n’étaient pas antinomiques : ils s’inscrivaient dans le projet cohérent qu’il défendait pour sa cité.
Le maire de Clichy-sous-Bois était devenu, en 2005, le symbole de nos banlieues et avait acquis une stature nationale, et même internationale, lorsque la mort de deux adolescents, que l’on a évoquée encore il y a peu, fut à l’origine, chacun s’en souvient, de trois semaines de troubles et d’émeutes, non seulement à Clichy-sous-Bois, mais dans de nombreuses cités.
Claude Dilain fut alors sur tous les fronts, passant ses jours et ses nuits sur le terrain. Il ne cessa jamais d’appeler à la paix, mais aussi d’interpeller les autorités sur la détresse de certains de nos quartiers.
En 2010, il avait organisé dans sa ville une visite pour des parlementaires. Il saisit cette occasion pour exprimer un message qu’il jugeait essentiel : la politique de la ville ne pourra résoudre les problèmes des banlieues les plus difficiles que si elle est défendue au plus haut niveau de l’État.
C’est dans cet état d’esprit, et pour porter la voix de ceux qui vivent dans les quartiers et qui, parfois, sont sans voix, que Claude Dilain fut élu, le 25 septembre 2011, sénateur de la Seine-Saint-Denis.
Alors qu’il était un membre assidu de notre commission des affaires sociales, où il était estimé de tous pour sa compétence et pour sa courtoisie, la banlieue et la problématique du logement dégradé restèrent toujours au cœur de son action.
Durant trois ans et demi, au Palais du Luxembourg, il fut un acteur passionné de la politique de la ville et un défenseur acharné des territoires urbains en difficulté. Une nouvelle fois, il fit preuve de son dynamisme et de sa compétence dans ces domaines en étant notamment l’un des rapporteurs au Sénat de la loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové.
Il remit aussi au Gouvernement un remarquable rapport de vérité sur les « copropriétés dégradées », vaste problème pour sa commune et pour bien d’autres, dans lequel il préconisait des mesures exceptionnelles, extraordinaires, seules capables à ses yeux de résoudre réellement ce problème, depuis trop longtemps délaissé.
Il établit encore un bilan, qu’il jugeait décevant, de l’application de la loi instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale, la loi DALO, dont il souhaitait une amélioration de la gouvernance dans le respect de la mixité sociale : cela a été rappelé à quelques mètres de sa mairie lors de l’hommage que certains d’entre nous lui ont rendu dans sa commune.
Enfin, la reconnaissance unanime des compétences de Claude Dilain se traduisit en 2014 par sa nomination à la présidence du conseil d’administration de l’Agence nationale de l’habitat, à la tête duquel il succédait à notre ancien collègue Dominique Braye.
Dans toutes ses fonctions liées à son mandat de parlementaire, Claude Dilain demeura l’homme de convictions qu’il n’a jamais cessé d’être. J’emprunte à nouveau sa voix : « Le rôle des hommes politiques est de retisser le lien social là où il n’y a plus forcément le sentiment d’appartenir à la même communauté républicaine, et ce quelle que soit notre origine ou notre couleur de peau ».
Estimant qu’il lui fallait consacrer tout son temps à sa tâche de parlementaire, il démissionna de son mandat de maire le 3 octobre 2011. Il se consacra ainsi sans compter à son mandat de sénateur. Il était d’ailleurs, depuis octobre dernier, secrétaire du Sénat.
Le 17 février dernier, il était encore à la tribune de cet hémicycle pour interroger le Gouvernement, afin de faire avancer la cause des personnes handicapées, singulièrement dans les établissements scolaires. Ainsi, jusqu’à son dernier souffle, Claude Dilain aura mis toute son énergie au service des plus faibles.
Mes chers collègues, la personnalité et l’action exceptionnelle qu’a conduite Claude Dilain tout au long de sa vie publique ont fait honneur au Sénat, ainsi qu’à la fonction d’élu local et de maire.
À nos collègues du groupe socialiste, à nos collègues de la commission des affaires sociales, qui perdent l’un de leurs membres, ainsi qu’à Mme Évelyne Yonnet, à qui incombe la lourde charge de lui succéder, j’exprime de nouveau notre sympathie attristée.
À ses cinq enfants, à chacun de ses petits-enfants et à son épouse, je présente les condoléances sincères et émues du Sénat de la République et leur dis la peine personnelle que je prends à leur chagrin.
La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Monsieur le président, je vous remercie de l’hommage sincère et juste que vous venez de rendre à Claude Dilain, auquel s’associe l’ensemble des membres du Gouvernement.
Je voudrais à mon tour dire quelques mots pour saluer la mémoire de ce grand élu de la République et, on peut le dire, homme d’exception.
Claude Dilain a consacré sa vie à lutter contre les inégalités, contre la relégation, contre les conditions de vie indignes que subissaient et que subissent encore les habitants de nombreuses villes de banlieue. Il était, au sens le plus fort du terme, un humaniste et un altruiste.
Claude Dilain, c’est d’abord un engagement exemplaire au service des autres. Petit-fils d’un éboueur anarchiste, fils d’un ouvrier, il passe son enfance à Saint-Denis, dans le quartier difficile du Bel-Air.
Dès la fin de ses études de médecine, il choisit d’être aux côtés des plus fragiles, des plus pauvres, des relégués.
Devenu pédiatre, il aurait pu quitter les quartiers défavorisés qui l’avaient vu grandir, mais il fait tout le contraire. Dès 1978, il revient s’installer en Seine-Saint-Denis, à Clichy-sous-Bois, « une commune pauvre et de pauvres », comme il la décrivait lui-même.
Il fut d’ailleurs pendant de nombreuses années le seul pédiatre de cette ville qui compte pourtant plusieurs dizaines de milliers d’habitants, dont beaucoup d’enfants.
C’est dans sa ville de Clichy-sous-Bois qu’il commence son engagement public. Militant associatif, il se bat pour améliorer la vie quotidienne des habitants, s’opposant par exemple à la construction d’une route qui aurait scindé la commune en deux.
En 1995, il est élu maire de Clichy-sous-Bois pour la première fois. Il est réélu en 2001 et en 2008, chaque fois dès le premier tour, avec plus de 60 % des voix, comme vous l’avez rappelé, monsieur le président.
Partisan du non-cumul des mandats, il ne quittera la mairie que pour entrer au Sénat, après les élections de septembre 2011.
Pendant les seize années durant lesquelles il fut maire de Clichy, il continua d’exercer son métier de médecin. À ses yeux, les fonctions de maire et de pédiatre se complétaient l’une l’autre, car elles le plaçaient toutes deux au plus près des habitants et contribuaient à l’enraciner dans sa ville.
Mesdames, messieurs les sénateurs, lors de vos débats sur la limitation du cumul des mandats, en 2013, il soulignait d’ailleurs qu’il avait appris autant de choses dans son bureau de maire que dans son cabinet de médecin et que l’expertise dont il se servait au Sénat, il la tirait autant de la première expérience que de la seconde.
À la tête du conseil municipal de Clichy-sous-Bois, il mène un combat obstiné contre le chômage, contre la pénurie de services publics et contre les marchands de sommeil.
Ces combats n’étaient pas seulement des combats sociaux ; ils étaient aussi des combats démocratiques.
Claude Dilain savait que pour s’impliquer dans la vie publique, il faut tout d’abord bénéficier de conditions de vie décentes. C’est ainsi qu’il constatait, en 2010, que la participation aux élections régionales avait été particulièrement faible à Clichy-sous-Bois, et il ajoutait : « Comment reprocher aux électeurs clichois de se désintéresser d’élections dont ils se sentent exclus sur ce territoire abandonné de la République ? »
Il se battra aussi, et surtout, pour désenclaver une commune qui, bien que située à quinze kilomètres de Paris, semble parfois bien éloignée de la capitale, comme il le racontera dans ses Chroniques d’une proche banlieue.
Ce combat a été fructueux, puisque Claude Dilain a obtenu de haute lutte – on s’en souvient – l’arrivée du tramway T4 dans sa commune. Ce lien direct entre Clichy-sous-Bois et Paris auquel il tenait tant rapprochera dans deux ans sa commune de la capitale.
Son engagement, ce fut aussi, tout au long de sa vie, la lutte contre le mal-logement et pour la mixité sociale. Président de l’Agence nationale de l’habitat à partir de 2008, il avait formulé des propositions concrètes pour en finir avec la ghettoïsation de certains quartiers, pour mettre fin à une fracture territoriale et sociale qui ne cesse de s’accentuer.
Je suis fier de pouvoir dire aujourd’hui que ces propositions ont été la principale source d’inspiration du plan en faveur des quartiers sensibles que le Premier ministre a présenté en mars dernier et qui comporte d’importantes mesures en matière de logement.
Claude Dilain était aussi un esprit pragmatique, qui avait à cœur de faire connaître les difficultés des Clichois aux pouvoirs publics, afin qu’ils y apportent des réponses concrètes.
C’est dans cette perspective qu’il conviait régulièrement des députés, des sénateurs, des ministres dans sa commune ; il voulait qu’ils voient de leurs propres yeux les logements délabrés, les ascenseurs perpétuellement en panne, les cages d’escalier incendiées, le manque d’équipements publics.
S’il faisait tout cela, ce n’était pas pour qu’on le plaigne : c’était pour obtenir le soutien de l’État, pour obtenir des moyens supplémentaires, qui lui auraient permis de ne plus être le « représentant impuissant de la République française », comme il l’écrivait dans une tribune en 2010.
Loin de tout misérabilisme, Claude Dilain était animé par deux sentiments qui, lorsqu’ils sont bien employés, font partie des plus puissants ressorts de l’action politique : la colère et l’indignation devant l’injustice.
Claude Dilain restera pour beaucoup l’une des figures marquantes des violences urbaines qui ont embrasé la France en 2005. Pendant ces événements tragiques, son courage et sa sincérité ont fait de lui le porte-parole des banlieues.
Chaque jour et chaque nuit, inlassablement, Claude Dilain a arpenté les rues de Clichy-sous-Bois pour parler aux habitants, mais aussi pour les écouter. Il fait partie de ceux, trop rares à l’époque, qui ont contribué à apaiser les tensions et à rétablir le calme.
Comme maire, il dut lutter contre un double danger : celui d’une violence aveugle, qui, en détruisant des services et des équipements publics, ne pouvait que dégrader encore les conditions de vie des habitants, et celui d’une stigmatisation des jeunes de banlieue.
En effet, certains ont voulu se servir des émeutes de 2005 comme d’un prétexte pour propager la peur, le mépris et la division. À ceux-là, Claude Dilain apportait toujours la même réponse : il leur disait que seule une politique de la ville ambitieuse, adossée à des moyens considérables, était capable de lutter efficacement contre la détresse des habitants des banlieues et de réconcilier les territoires de la République.
Il leur disait aussi que, sans cette politique, nous serions condamnés à voir progresser un sentiment délétère susceptible de rompre notre pacte républicain, celui de ne pas vivre dans le même monde.
Claude Dilain a porté son engagement en faveur des quartiers sensibles jusque dans l’hémicycle de la Haute Assemblée. Depuis 2011, il était devenu une figure marquante du Sénat, un élu dont la voix résonnait sur toutes les questions qui concernaient de près ou de loin l’égalité et la justice sociale.
Il fut ainsi le rapporteur de plusieurs grandes lois sur la politique de la ville et de l’urbanisme, l’auteur de rapports remarqués sur le logement, l’un des défenseurs les plus ardents de la métropole du Grand Paris et l’avocat infatigable d’une meilleure répartition des charges et des richesses entre les communes de la banlieue parisienne.
Je suis persuadé que chacun d’entre vous, en cet instant, se remémore sa force de conviction, sa fermeté, sa détermination, cette force qui ne sombrait jamais dans la brutalité.
Notre hommage à l’élu exemplaire ne peut être complet sans évoquer la personnalité de Claude Dilain, sa bonté, sa bienveillance, sa générosité et son sens aigu de la dignité humaine, qui le conduisaient à accorder une attention égale à tous ceux qu’il rencontrait.
Claude Dilain avait une qualité rare : il traitait chacun de la même manière et accordait à chacun la même écoute, le même respect, qu’il soit ouvrier ou ministre.
S’il faisait campagne, ce n’était jamais pour conquérir une parcelle de pouvoir, ni même pour être reconnu dans son action ; c’était pour améliorer la vie des autres, pour apporter sa contribution à ce grand combat, celui de la lutte contre l’injustice et contre la pauvreté.
Son engagement et ses combats restent d’une brûlante actualité et ils ne s’éteindront pas avec lui. Désormais, il appartient à chacun d’entre nous de défendre à notre tour les valeurs portées par Claude Dilain tout au long de sa vie : la justice, l’égalité et le progrès. À nous aussi de les défendre avec le même esprit, celui d’une révolte dépourvue d’animosité, d’une détermination qui n’écrase pas les autres, mais qui les élève, d’une colère dirigée non pas vers la destruction, mais vers l’action.
Au nom du Gouvernement, je présente à la famille de Claude Dilain, aux habitants de Clichy-sous-Bois, à ses collègues sénateurs et à ses collaborateurs mes plus sincères condoléances.
M. le président. Mesdames, messieurs les ministres, mesdames, messieurs les secrétaires d’État, mes chers collègues, je vous invite maintenant à partager un moment de recueillement à la mémoire de Claude Dilain. (Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que les membres du Gouvernement, observent une minute de silence.)
Mes chers collègues, conformément à notre tradition, en signe d’hommage à Claude Dilain, nous allons interrompre nos travaux pendant quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à quatorze heures cinquante, est reprise à quinze heures quarante-cinq, sous la présidence de M. Jean-Claude Gaudin.)
PRÉSIDENCE DE M. Jean-Claude Gaudin
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
3
Conférence des présidents
M. le président. Mes chers collègues, la conférence des présidents, qui s’est réunie cet après-midi, mardi 14 avril 2015, a établi comme suit l’ordre du jour des prochaines séances du Sénat.
SEMAINE RÉSERVÉE PAR PRIORITÉ AU GOUVERNEMENT(suite)
Mardi 14 avril
L’après-midi, le soir et la nuit :
- Suite du projet de loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques.
Mercredi 15 avril
À 14 heures 30 et le soir :
- Suite du projet de loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques.
En outre, à 14 heures 30 :
- Désignation des vingt-trois membres de la mission d’information sur la commande publique.
Jeudi 16 avril
À 9 heures 30, à 16 heures 15, après les questions d’actualité au Gouvernement, et le soir :
- Suite du projet de loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques.
Vendredi 17 avril
À 9 heures 30, à 14 heures 30, le soir et la nuit :
- Quatre conventions internationales en forme simplifiée ;
- Suite du projet de loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques.
Éventuellement, samedi 18 avril
Le matin et l’après-midi :
- Suite du projet de loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques.
Je vous rappelle que nous suspendrons nos travaux en séance plénière du lundi 20 avril au dimanche 3 mai.
SEMAINE RÉSERVÉE PAR PRIORITÉ AU GOUVERNEMENT
Lundi 4 mai
À 10 heures, à 14 heures 30, le soir et la nuit :
- Suite du projet de loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques.
Mardi 5 mai
À 14 heures 30, le soir et la nuit :
- Suite du projet de loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques ;
- Projet de loi ratifiant l’ordonnance du 19 décembre 2014 relative à l’élection des conseillers métropolitains de Lyon ;
- Projet de loi relatif à la réforme de l’asile.
Mercredi 6 mai
À 14 heures 30 :
- Explications de vote des groupes sur le projet de loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques.
De 15 heures 30 à 16 heures :
- Vote par scrutin public sur ce projet de loi.
À 16 heures :
- Proclamation du résultat du scrutin public.
À 16 heures 15 et le soir :
- Projet de loi modifiant la loi du 2 juillet 2004 relative à l’octroi de mer ;
- Éventuellement, suite du projet de loi ratifiant l’ordonnance du 19 décembre 2014 relative à l’élection des conseillers métropolitains de Lyon ;
- Suite du projet de loi relatif à la réforme de l’asile.
En outre, à 14 heures 30 :
- Désignation des vingt et un membres de la commission d’enquête sur le bilan et le contrôle de la création, de l’organisation, de l’activité et de la gestion des autorités administratives indépendantes.
Jeudi 7 mai
À 9 heures 30 et à 16 heures, après les questions cribles thématiques sur la forêt française :
- Deux conventions internationales en forme simplifiée ;
- Projet de loi autorisant la ratification de l’accord d’association entre l’Union européenne et la Communauté européenne de l’énergie atomique et leurs États membres, d’une part, et l’Ukraine, d’autre part ;
- Suite de l’ordre du jour de la veille.
SEMAINE SÉNATORIALE DE CONTRÔLE
Lundi 11 mai
À 14 heures 30 et le soir :
- Suite du projet de loi relatif à la réforme de l’asile.
L’ordre du jour du mardi 12 au vendredi 29 mai reste inchangé.
Y a-t-il des observations sur les propositions de la conférence des présidents relatives à la tenue des séances et à l’ordre du jour autre que celui qui résulte des inscriptions prioritaires du Gouvernement ?...
Ces propositions sont adoptées.
4
Communication du conseil constitutionnel
M. le président. Le Conseil constitutionnel a informé le Sénat, le 14 avril 2015, que, en application de l’article 61-1 de la Constitution, le Conseil d’État avait adressé au Conseil constitutionnel un arrêt de renvoi d’une question prioritaire de constitutionnalité portant sur les dispositions du f du 3° du 3 de l’article 158 du code général des impôts (Revenu imposable ; 2015 473 QPC).
Le texte de cet arrêt de renvoi est disponible à la direction de la Séance.
Acte est donné de cette communication.
5
Croissance, activité et égalité des chances économiques
Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, considéré comme adopté par l’Assemblée nationale en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution, après engagement de la procédure accélérée, pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques (projet n° 300, texte de la commission n° 371, rapport n° 370, tomes I, II et III).
Nous poursuivons la discussion du texte de la commission spéciale.
TITRE Ier (SUITE)
LIBÉRER L’ACTIVITÉ
Chapitre V (SUITE)
Urbanisme
M. le président. Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus, au sein du chapitre V du titre Ier, à un amendement portant article additionnel après l’article 23 bis A.
Article additionnel après l'article 23 bis A
M. le président. L'amendement n° 1374, présenté par Mme Assassi, M. Le Scouarnec et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 23 bis A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé
Le deuxième alinéa de l’article 18 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Ce décret peut comporter une mesure temporaire de gel des loyers dans les zones tendues au sens de l’article 232 du code général des impôts. »
La parole est à M. Jean-Pierre Bosino.
M. Jean-Pierre Bosino. Durant les débats qui se sont tenus au sein de la commission sur le deuxième alinéa de l’article 18 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986, il nous a été répondu que notre amendement était satisfait par l’encadrement de la hausse des loyers, tel que le prévoyaient ces dispositions. Nous ne le pensons pas, mais si tel est le cas, nous souhaitons simplement que le texte soit plus explicite sur la notion de gel des loyers.
Nous proposons donc une nouvelle rédaction de l’article 18 précité : « Un décret en Conseil d'État, pris après avis de la Commission nationale de concertation, fixe annuellement le montant maximum d'évolution des loyers des logements vacants et des contrats renouvelés. Ce décret peut comporter une mesure temporaire de gel des loyers dans les zones tendues au sens de l’article 232 du code général des impôts ».
Un gel des loyers nous paraît indispensable, car cette mesure d’urgence pour le logement permettrait de redonner du pouvoir d’achat aux ménages fortement touchés par les hausses importantes des loyers.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur de la commission spéciale. Le présent amendement vise à rendre possible une mesure temporaire de gel des loyers dans les zones tendues.
La loi du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, dite « loi ALUR », a encadré l’évolution des loyers sans en prévoir le gel. Elle a ainsi modifié les règles de révision des loyers dans les zones tendues, dans lesquelles on constate de sérieuses difficultés d’accès au logement sur l’ensemble du parc résidentiel existant, qui se caractérisent notamment par le niveau élevé des loyers et des prix d’acquisition des logements anciens ou par le nombre important de demandes de logement par rapport au nombre d’emménagements annuels dans le parc locatif social.
Il est ainsi prévu que le loyer du nouveau contrat de location ne peut excéder le dernier loyer appliqué au précédent locataire, sauf exception telle qu’un loyer manifestement sous-évalué ou la réalisation de travaux d’amélioration.
Le dispositif en vigueur permet déjà d’apporter des réponses adaptées aux difficultés que rencontrent nombre de nos concitoyens pour trouver un logement à un prix abordable, particulièrement dans les zones tendues.
Par conséquent, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du numérique. La loi du 6 juillet 1989 qui a été modifiée par la loi ALUR permet à la fois d’encadrer l’évolution des loyers et leur plafond.
Dans les zones tendues, il n’est pas opportun d’empêcher cette évolution sous la forme d’un gel, car ces loyers ont été fortement encadrés par la loi ALUR. En outre, une telle mesure serait certainement inconstitutionnelle, car elle serait disproportionnée au regard du principe du droit de propriété et de l’objectif visé par le législateur, qui n’est pas celui qui figure dans le présent amendement.
J’ajoute qu’il est important d’assurer une certaine prévisibilité sur le marché du bâtiment, de l’immobilier et de la construction. Il s’agit d’un délicat équilibre à trouver entre la protection du pouvoir d’achat des locataires, qui est essentiel, et la préservation de ce secteur, qui est source de croissance et d’emploi lorsque sont réunies les conditions favorables à l’investissement. Tel est le sens de l’action du Gouvernement.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Aujourd’hui, entre 25 % et 30 % des revenus de nos concitoyens, voire davantage chez les plus modestes, sont consacrés au logement. Cette situation est particulièrement injuste, vous en conviendrez, madame la secrétaire d’État, d’autant que, outre une augmentation de 50 % en dix ans, les loyers ont augmenté de 23 % pour la seule période de 2002 à 2007. En dépit d’un ralentissement tout récent, le niveau des loyers reste extrêmement élevé.
Le logement est d’ailleurs au cœur des préoccupations de l’immense majorité des Français, vous le savez pertinemment, mes chers collègues. Il est devenu une source majeure d’exclusion et d’inégalités. Permettez-moi à cet égard de vous rappeler quelques chiffres : plus de trois millions de personnes sont touchées par le mal-logement, parmi lesquelles quelque 150 000 sont sans abri, dont nombre de familles, surtout des femmes et des enfants.
Le coût du logement grève de façon considérable le pouvoir d’achat des ménages. De plus, la mauvaise qualité du bâti est souvent à l’origine d’une précarité énergétique qui se répercute sur son coût.
Parmi les grands axes d’intervention permettant de lutter contre la crise du logement, la Fondation Abbé Pierre préconise la régulation des marchés et la maîtrise du coût du logement. Cet objectif, que nous partageons, est particulièrement pertinent dans les zones tendues, qui se trouvent sur tout le territoire, et pas seulement dans l’agglomération parisienne et les autres grandes villes.
Le gel des loyers, au travers de cet amendement, permettrait de redonner du pouvoir d’achat à des ménages fortement affectés par la crise et le niveau très élevé des loyers. Ce serait une mesure à la fois de justice sociale et d’efficacité économique.
C’est pourquoi les arguments que vous nous avez opposés, madame la secrétaire d’État, madame le corapporteur, ne nous ont pas convaincus. Il est important d’apporter à ce problème une réponse efficace, peut-être un peu plus audacieuse politiquement. De notre point de vue, le gel y répond.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1374.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n 144 :
Nombre de votants | 339 |
Nombre de suffrages exprimés | 339 |
Pour l’adoption | 29 |
Contre | 310 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Article 23 bis B
(Non modifié)
Après le I de l’article 5 de la loi n° 2010-238 du 9 mars 2010 visant à rendre obligatoire l’installation de détecteurs de fumée dans tous les lieux d’habitation, il est inséré un I bis ainsi rédigé :
« I bis. – Les propriétaires ayant signé un contrat d’achat des détecteurs au plus tard au 8 mars 2015 sont réputés satisfaire à l’obligation prévue à l’article L. 129-8 du code de la construction et de l’habitation, à la condition que le détecteur de fumée soit installé avant le 1er janvier 2016. »
M. le président. L'amendement n° 1078, présenté par Mme Assassi, M. Le Scouarnec et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Rédiger ainsi cet alinéa :
« I bis. – Les propriétaires sont réputés satisfaire à l’obligation prévue à l’article L. 129-8 du code de la construction et de l’habitation, à la condition que le détecteur de fumée soit installé avant le 1er janvier 2016. »
La parole est à M. Éric Bocquet.
M. Éric Bocquet. Cet amendement de clarification a pour objet l’installation des détecteurs de fumée. (Exclamations sur les travées de l'UMP.) Nous souscrivons pleinement à l’exigence de sécurité conduisant à étendre ces dispositifs à tous les lieux d’habitation. Nous souscrivons également à l’idée selon laquelle il revient aux propriétaires de satisfaire à cette obligation. À nos yeux, cette condition est la garantie d’une égalité de tous face au risque d’incendie.
À travers cet amendement, nous cherchons uniquement à rendre cette obligation plus claire et plus simple. Nous proposons de modifier la rédaction de cet article en supprimant la précision selon laquelle cette obligation est imposée aux propriétaires « ayant signé un contrat d’achat des détecteurs au plus tard au 8 mars 2015 ». Le présent texte gagnerait à mentionner la seule obligation, faite à tout propriétaire, d’installer un détecteur avant le 1er janvier 2016.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Cet amendement vise à repousser l’obligation d’installation des détecteurs de fumée au 1er janvier 2016, ce sans aucune condition.
Monsieur Bocquet, vous en conviendrez, cette disposition ne clarifie pas le dispositif en question. A contrario, si cette modification était adoptée, elle créerait une incohérence avec le premier paragraphe de l’article 5 de la loi du 9 mars 2010, lequel fixe l’entrée en vigueur de cette obligation au 8 mars 2015.
En conséquence, j’émets un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État. Monsieur Bocquet, je relève qu’il ne s’agit pas d’un simple amendement rédactionnel.
Mme Nicole Bricq. Eh non !
Mme Annie David. Il s’agit d’une clarification !
Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État. En effet, vous proposez de reporter l’entrée en vigueur de l’obligation d’installation des détecteurs de fumée dans les logements.
Mme Nicole Bricq. Eh oui !
Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État. Or ces équipements constituent un levier essentiel pour assurer la sécurité de nos concitoyens. Souvenez-vous de la campagne de sensibilisation menée par le Gouvernement en partenariat avec les sapeurs-pompiers : « Bien équipé, bien préparé, je suis en sécurité ».
M. Jean-Patrick Courtois. Certes !
Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État. L’enjeu est simple : il faut lutter contre les 250 000 incendies domestiques qui se déclarent chaque année en France.
Voilà pourquoi le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement. C’est une chose de répondre aux enjeux de stockage et d’équipement que soulèvent les détecteurs. C’en est une autre de reporter la mise en œuvre de cette obligation. Nous ne souhaitons pas suivre cette voie. Au cas où un bailleur n’aurait pas satisfait à ses obligations légales, une franchise lui est applicable par l’assureur. Ce dispositif doit entrer en vigueur à la date initialement déterminée par la législation !
M. le président. Je mets aux voix l'article 23 bis B.
(L'article 23 bis B est adopté.)
Article 23 bis
(Non modifié)
I. – Le chapitre Ier du titre préliminaire du livre III du code de la construction et de l’habitation est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa de l’article L. 301-3, après les mots : « location-accession », sont insérés les mots : « , de celles en faveur des logements intermédiaires définis à l’article L. 302-16, de celles en faveur des logements faisant l’objet d’une convention mentionnée à l’article L. 321-4 » ;
2° L’article L. 301-5-1 est ainsi modifié :
a) Au 1° du IV, le mot : « et » est remplacé par les mots : « , au logement intermédiaire et en faveur de la location-accession ainsi que » ;
b) La première phrase du deuxième alinéa du VI est complétée par les mots : « , ainsi que les conditions d’attribution des aides en faveur du logement intermédiaire et de la location-accession » ;
3° Après la première phrase du troisième alinéa de l’article L. 301-5-2, est insérée une phrase ainsi rédigée :
« Elle fixe les conditions d’attribution des aides en faveur du logement intermédiaire et de la location-accession, ainsi que les conditions de la signature des conventions mentionnées à l’article L. 321-4. »
II. – Au 1° du I de l’article L. 3641-5, au 1° du II de l’article L. 5217-2 et au 1° du VI de l’article L. 5219-1 du code général des collectivités territoriales, après le mot : « social », sont insérés les mots : « , au logement intermédiaire et en faveur de la location-accession ».
III. – Les conventions conclues en application des articles L. 301-5-1 et L. 301-5-2 du code de la construction et de l’habitation, dans leur rédaction antérieure à la promulgation de la présente loi, peuvent faire l’objet d’un avenant pour prendre en compte les mêmes articles L. 301-5-1 et L. 301-5-2, dans leur rédaction résultant de la présente loi.
M. le président. La parole est à M. Michel Le Scouarnec, sur l'article.
M. Michel Le Scouarnec. Madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, en prenant la parole sur le présent article, je tiens à évoquer le sujet de l’accession à la propriété.
La promotion du logement intermédiaire et de la location-accession assurée via cet article 23 bis ne doit pas nous conduire à détourner notre attention de la véritable urgence qui se fait jour dans ce domaine : le mal-logement, qui, dans notre pays, touche plus de 3,5 millions de personnes.
Je le dis et je le répète : le logement intermédiaire n’est pas du logement social pur. Il ne répondra pas, à lui seul, aux enjeux d’égal accès au logement.
En revanche, le logement intermédiaire peut être un levier complémentaire en faveur de la mixité sociale. Il est très demandé par les jeunes couples qui débutent dans la vie, et en particulier par ceux d’entre eux qui s’installent au cœur des agglomérations. Au reste, bien des quartiers de centre-ville souhaitent conserver ces jeunes ménages, ne serait-ce que pour maintenir les classes de leurs écoles.
La demande de logements intermédiaires est forte, notamment du fait des prix élevés du foncier.
Bien souvent, les communes mènent des politiques volontaristes pour garder les familles jeunes et actives. Toutefois, il faut rester très vigilant pour que les ménages concernés ne s’endettent pas trop. Le total des remboursements et des charges ne doit pas les placer dans une situation financière trop tendue. En effet, comment parler d’accession à la propriété en dehors de toute considération humaine ?
Aujourd’hui, pour devenir propriétaire, il faut non seulement disposer des ressources suffisantes mais aussi témoigner d’une certaine stabilité dans son parcours professionnel. Comment se porter acquéreur d’un logement alors que le pouvoir d’achat est en berne ? Les propriétaires, comme les locataires, doivent faire face à des dépenses courantes de logement qui augmentent plus vite que leurs revenus. Je songe notamment aux charges locatives.
Selon la lettre Conjoncture logement, pour devenir propriétaire de son logement en France, il vaut mieux être jeune ou vieux,…
M. Roland Courteau. Même si nous, nous sommes tous jeunes ! (Sourires.)
M. Michel Le Scouarnec. … mais en disposant de revenus supérieurs à la médiane des salaires français. Dès lors, seule une minorité de nos concitoyens peut prétendre au statut de propriétaire. Les chiffres sont accablants : entre 2009 et 2012, l’accession à la propriété des personnes à revenu moyen a reculé de 37 % !
On le constate clairement, en dehors d’une politique sociale ambitieuse, il sera bien difficile de faciliter l’accession à la propriété. À ce jour, l’on dénombre 1,3 million de demandeurs de logement. À mon sens, cet article 23 bis ne répond pas à l’urgence vécue et ressentie par nos concitoyens en matière de logement. Pour ces derniers, cet enjeu constitue pourtant une priorité ! L’accès au logement social est durci et les bailleurs sont contraints de céder une partie de leur parc au nom de l’accession sociale à la propriété.
Le logement ne devrait plus être considéré comme une marchandise comme les autres, et les pouvoirs publics seraient bien inspirés de mettre en place une politique publique et un service public du logement à la hauteur des enjeux ! Cette action s’appuierait sur la mobilisation de l’ensemble des outils disponibles : prêt à taux zéro, éco-prêt, politique foncière, définition du rôle des banques et intervention publique. À nos yeux, il est primordial de revenir à un équilibre plus sain entre l’aide à la pierre et l’aide à la personne.
M. le président. L'amendement n° 1375, présenté par Mme Assassi, M. Le Scouarnec et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Jean-Pierre Bosino.
M. Jean-Pierre Bosino. Mes chers collègues, cet article 23 bis a été introduit en commission par le biais d’un amendement du Gouvernement et n’a donc pas été soumis à l’étude d’impact. Il délègue aux métropoles, aux EPCI compétents en matière d’habitat et aux départements les compétences de l’État dans le domaine des aides en faveur du logement intermédiaire et de la location-accession.
Vous le savez, la loi de finances pour 2014 a créé des avantages fiscaux en faveur du logement intermédiaire. D’une part, les opérations comprenant au moins 25 % de logements sociaux bénéficient d’un taux de TVA à 10 %. D’autre part, les logements intermédiaires neufs font l’objet d’une exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties, pour une durée de vingt ans.
L’octroi de ces deux avantages fiscaux est soumis à la délivrance d’un agrément par le préfet de département. Il en va de même des opérations de location-accession, qui peuvent bénéficier du prêt social location-accession, d’un taux réduit de TVA et d’une exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties pendant quinze ans.
Le présent article permet à l’État de déléguer la compétence d’attribution de ces aides.
À nos yeux, cette mission doit rester du ressort de l’État. Cet article acte, hélas ! le désengagement budgétaire de celui-ci. Il s’inscrit dans la droite ligne de la dernière loi de finances, qui a accentué ce mouvement.
En la matière, on déplore une nouvelle fois l’absence d’une ambition nécessaire à la mise en œuvre d’une politique réellement novatrice. Tournant le dos à cette logique, le Gouvernement mise sur l’initiative privée et sur la territorialisation en vue de développer l’offre immobilière pour le plus grand nombre.
Souvenons-nous qu’au titre de la loi de finances pour 2015, le niveau global des aides à la pierre s’établit à peine à 160 millions d’euros en crédits de paiement, alors que 1,9 milliard d’euros sont prévus pour le logement intermédiaire, dont 1 milliard d’euros au titre du budget de l’État.
Au regard du nombre de demandeurs de logements accessibles ou aidés, de la situation économique qui conduit à l’exclusion d’un nombre sans cesse croissant de nos concitoyens, la politique du logement doit rester une politique nationale. En outre, la construction de véritables logements sociaux doit demeurer prioritaire.
Mes chers collègues, voilà pourquoi nous vous demandons de voter cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Cet amendement tend à supprimer un article que la commission spéciale a adopté sans aucune modification. Aussi, je ne puis qu’émettre un avis défavorable.
Monsieur Bosino, je vous suis lorsque vous dénoncez le désengagement de l’État en matière de logement. Ce mouvement est bien réel. Toutefois, contrairement à vous, je ne pars pas du principe que l’attribution des aides au logement intermédiaire doit demeurer du ressort de l’État, bien au contraire : ce transfert relève de la simplification administrative et permettra d’accroître l’efficacité des politiques locales de l’habitat. En effet, le délégataire de cette compétence aura à sa disposition tous les leviers lui permettant d’intervenir, pour la gestion des aides financières et pour la définition du programme local de l’habitat, le PLH.
Nous allons, à n’en pas douter, examiner longuement le dossier du logement intermédiaire. Aussi, j’ajoute à l’intention de M. Le Scouarnec, qu’il serait bon de fixer d’emblée les termes du débat.
Cher collègue, il faut bien distinguer le logement intermédiaire du logement social sur lequel, je le sais, vous aurez à cœur de revenir régulièrement.
Vous l’avez souligné vous-même, le logement intermédiaire ne doit pas prendre la place du logement social dont les besoins sont criants, importants et prioritaires.
Mme Annie David. Mais on supprime les aides publiques !
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Pour autant, le logement intermédiaire doit être encouragé, parce qu’il s’adresse à une catégorie de population à la fois trop riche pour bénéficier d’un logement social et trop pauvre pour assumer les loyers du parc privé, ce particulièrement dans les zones tendues. Il faut garantir un équilibre pour tous les segments de l’offre de logement. Ainsi, conformément à nos vœux unanimes, le parcours résidentiel pourra redevenir une réalité.
Mme Catherine Deroche, corapporteur de la commission spéciale. Très bien !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État. À l’instar de la commission spéciale, le Gouvernement est défavorable à cet amendement. En effet, nous soutenons une dynamisation de l’offre et de l’accès au logement intermédiaire. Cette politique ne nuit pas à l’accès au logement social !
Mme Annie David. Si, puisque l’on modifie le plafond d’accès !
Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État. Mme la corapporteur l’a clairement dit : il faut constater avec réalisme que certaines catégories intermédiaires de la population française n’ont pas accès au logement social et ne peuvent accéder au parc privé. (Mme Annie David s’exclame.) Ainsi, à Paris, zone tendue par excellence, le rapport entre les loyers du parc social et ceux du parc privé est de un à trois. Il convient bel et bien de répondre aux besoins des catégories intermédiaires !
À cette fin, l’échelon local est bien le niveau le plus pertinent pour mener les politiques de l’habitat : les bassins de vie se définissent à l’échelle de l’agglomération, de l’intercommunalité ou du département.
M. Jean-Pierre Bosino. Mais l’on réduit les moyens des collectivités !
Mme Nicole Bricq. Au vote !
Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État. La délégation de cette compétence à leur profit est d’autant plus logique que l’attribution des logements intermédiaires obéit à un critère de mixité sociale : le même échelon doit être compétent pour les logements sociaux et pour les logements intermédiaires.
M. le président. La parole est à M. Francis Delattre, pour explication de vote.
M. Francis Delattre. Dans ce texte copieux, cet article 23 bis concernant le logement est particulièrement important. Il va permettre à chaque groupe de faire part de sa volonté de le soutenir ou non.
Pour notre part, nous le soutiendrons, pour deux raisons.
Premièrement, le concept plutôt nouveau de location-accession est inscrit noir sur blanc dans la loi pour la première fois. Grâce à ce dispositif, il est possible de louer un logement pendant trois à cinq ans pour en devenir ensuite propriétaire, les premiers loyers servant d’apport initial et la barrière limitant l’accès des primo-accédants à la propriété est abaissée, par application d’un taux de TVA réduit. Cela fonctionne bien dans les communes qui l’ont mis en œuvre.
En outre, les rapports de la Cour des comptes relèvent que certains locataires devraient déjà avoir quitté le logement purement social. Cette formule leur offre une possibilité de transition entre location et accession.
Deuxièmement, s’agissant des crédits à la pierre qu’évoquait M. Jean-Pierre Bosino, ils restent à un niveau très importants, pratiquement celui de l’aide à la personne. Cet article constitue l’amorce d’une réforme en vue de privilégier les primo-accédants sur les investisseurs purs et durs, lesquels possèdent déjà leur logement.
Il est de bonne politique d’aider les jeunes couples qui s’engagent dans la vie en leur permettant de bénéficier de ce dispositif et des aides qui l’accompagnent. Nous devons tous envisager une réforme de l’aide à la pierre visant à attribuer les crédits d’État à celles et ceux qui en ont vraiment besoin, plutôt qu’aux investisseurs en quête de défiscalisation. (Mme Annie David et M. Jean-Pierre Bosino s’exclament.) Si celle-ci est nécessaire pour certains produits immobiliers, seule une telle réforme pourrait permettre de traiter sérieusement les problèmes auxquels sont confrontés les jeunes qui cherchent à accéder à la propriété.
Mes chers collègues, nous serons tous un jour retraités. Au regard de ce que seront les pensions de retraite dans dix ou vingt ans, nous avons tout intérêt à encourager l’accession sociale à la propriété. En effet, les pensions de retraite permettront très difficilement, dans de nombreuses villes, notamment en région parisienne, d’acquitter un loyer. (M. Jean-Claude Lenoir opine.) Pour une fois, nous anticiperions un véritable problème : le vieillissement de la population.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Je voudrais essayer de convaincre nos collègues du groupe CRC que cet article est bon.
Le logement intermédiaire est maintenant défini dans la loi ALUR. C’est un concept d’urbanisme et un concept de production. Il offre aux plans locaux d'urbanisme des outils favorisant la mixité sociale et la régulation foncière.
Nous avions pris l’exemple de la ville de Saint-Ouen, qui négociait des niveaux de loyers inférieurs au marché, à condition que cela ait un impact sur le prix du foncier.
À partir de cet exemple est née l’idée de faire du logement intermédiaire un concept d’urbanisme, ce qui permet de faire figurer dans les documents le pourcentage de logements de ce type, à côté de la proportion de logements sociaux et d’offrir un outil pour agir sur la mixité sociale. Cette catégorie inclut, en outre, l’accession sociale à la propriété avec le PSLA, lequel constitue le seul véritable outil dédié à cet objectif, grâce au bénéfice de la TVA à 5,5 %.
M. Le Scouarnec, je suis sensible au risque de surendettement, mais je rappelle qu’il n’est pas dû, en France, à l’accession sociale à la propriété. J’en veux pour preuve que le Fonds de garantie de l’accession sociale à la propriété, le FGAS, n’a quasiment jamais été utilisé. Le surendettement est lié au crédit à la consommation et non à l’accession sociale, à condition que les organismes qui pratiquent le PSLA, comme les coopératives HLM, veillent à s’assurer du respect des critères de sécurisation.
Nous devons donc soutenir l’accession sociale à la propriété. Aujourd’hui, dans les coopératives HLM, 75 % des accédants PSLA sont des locataires en HLM qui accèdent à la propriété.
Le concept de logement intermédiaire est donc nécessaire.
La stratégie du Gouvernement vise à distinguer le logement intermédiaire comme opportunité – PSLA et inscription dans les documents d’urbanisme – du zonage strict conditionnant des aides fiscales pour les opérateurs afin de réaliser ce type de logements. Il convient en effet d’éviter que des « arrosages » d’aides fiscales inconsidérés ne conduisent à la production de logements intermédiaires n’importe où et n’importe comment, sans considération des réalités locales.
La délégation des aides à la pierre du logement intermédiaire est cohérente avec les autres aides à la pierre. Les endroits où le logement intermédiaire peut se substituer au logement social sont très peu nombreux, et les endroits où éventuellement le logement social pourrait être impacté par le logement intermédiaire sont souvent ceux qui sont protégés par la loi SRU et l’objectif de 25 %.
Je plaide en faveur de cette délégation des aides à la pierre sur les territoires, notamment pour l’accession sociale à la propriété, car, bien souvent, les élus y sont favorables, mais ne connaissent ni les outils ni les moyens dont ils pourraient disposer. Comme vous, je suis favorable à un renforcement des aides à la pierre pour le logement social.
Quant à la location-attribution, monsieur Delattre, c’est vieux comme le monde ! À ma naissance, le dispositif existait déjà. Le PLSA a été créé ultérieurement, d’ailleurs, pas à l’initiative d’un gouvernement de gauche, et je l’avais soutenu. Vous le voyez, je ne suis pas sectaire. Nous devons la création de ce prêt à M. de Robien, si j’ai bonne mémoire. Puis, au fil du temps, nous avons, les uns et les autres, amélioré le dispositif.
Par ailleurs, vous avez affirmé que l’aide à la pierre est égale à l’aide à la personne. C’est totalement inexact ! Ou alors vous mettez dans l’aide à la pierre les bonifications de la Caisse des dépôts et consignations pour le Livret A, vous y mettez tout. En réalité, nous manquons d’aide à la pierre pour le logement social ! Mais la présente disposition n’est pas de nature à nous permettre de renforcer ce que je plaide depuis des années, en espérant que le Président de la République tiendra son engagement du doublement de l’aide à la pierre à la fin de son mandat.
Un sénateur du groupe UMP. Vous rêvez !
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.
Mme Annie David. Nous n’avons rien à enlever aux propos de notre collègue Marie-Noëlle Lienemann sur l'accession sociale à la propriété et la nécessité de permettre à chacun de se loger.
Le problème, c’est qu’il n’est question ici que du logement intermédiaire, et non du logement social au sens propre. En conséquence, l’argent public qui sera affecté à ces logements intermédiaires ne sera pas consacré au logement social. C’est cela que nous contestons.
Afin de permettre à chacun de se loger, pourquoi ne pas relever le plafond de ressources permettant de se loger en logement social, plutôt que d’attribuer de l’argent public à la construction privée ? Nous plaidons pour que le logement social soit accessible à tous !
Nous ne sommes donc pas en contradiction avec vos propos, ma chère collègue. Nous refusons seulement que des constructions privées bénéficient d’argent public, ainsi que le permet cet article. Nous maintenons donc cet amendement et nous le soumettons au vote.
M. le président. La parole est à M. Daniel Dubois, pour explication de vote.
M. Daniel Dubois. Je pourrais tenir quasiment les propos de Mme Marie-Noëlle Lienemann. En matière de parcours résidentiel, les approches dogmatiques sont vaines…
Mme Annie David. Qui est dogmatique ?
M. Daniel Dubois. … au regard du vécu des gens.
Pour parvenir à accéder à la propriété, en particulier dans les zones tendues, certains peuvent partir du prêt locatif aidé d’intégration, ou PLAI, et bénéficier ensuite d’un logement PLUS, puis d’un logement prêt conventionné locatif – PCL – ou d’un logement prêt locatif social – PLS –, et passer dans l’accession locative et devenir propriétaire. Cette situation existe. (Mme Annie David opine.)
Votre explication relative au risque que l’élargissement de la délégation d’aide à la pierre au logement intermédiaire ne constitue une raison supplémentaire pour l’État d’abandonner le financement du logement social est intéressante. Cette question se pose effectivement.
Si les collectivités locales, qu’elles soient délégataires d’aide à la pierre ou pas, ne soutenaient pas la construction de logements locatifs, la situation serait catastrophique sur le territoire français. Aujourd’hui, pourtant, elles sont bien maltraitées dans le cadre de leurs recettes futures.
Ma communauté de communes, qui rassemble 8 000 habitants en territoire rural, qui, je le signale au passage, va perdre 77 000 euros de dotation globale de fonctionnement cette année, a apporté 9 000 euros par logement locatif social construit sur son territoire. Telle est aujourd’hui la réalité de nos territoires !
Si l’État continue à tirer vers le bas les recettes versées aux collectivités locales et à ne pas plus aider le logement locatif, parcours ou pas parcours, on construira de moins en moins de logements locatifs et de logements intermédiaires, parce qu’il n’y aura plus d’argent pour le faire.
Cela étant dit, je suis tout de même favorable à la cohérence de ce texte, et je voterai naturellement l’article dans la rédaction du Gouvernement. (M. Gérard Roche applaudit.)
M. le président. La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur.
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. En réponse à Mme Assassi, il est certain que le logement intermédiaire doit être financé, mais dans un cadre garantissant l’étanchéité des fonds publics d’État entre ceux qui sont consacrés au logement intermédiaire et ceux qui concernent le logement social.
Mme Annie David. Ce n’est pas écrit !
M. le président. L'amendement n° 1376, présenté par Mme Assassi, M. Le Scouarnec et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par quatre paragraphes ainsi rédigés :
IV. – Le I de l’article 244 quater J du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Au treizième alinéa, la somme : « 64 875 € » est remplacée par la somme : « 54 098 € » ;
2° Au quatorzième alinéa, la somme : « 32 500 € » est remplacée par la somme : « 65 000 € ».
V. – La perte de recettes pour l’État résultant de l’application du 2° du IV ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
VI. – Les IV et V ne s’applique qu’aux sommes venant en déduction de l'impôt dû
VII. – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Patrick Abate.
M. Patrick Abate. Pour appuyer ce qui vient d’être dit, à propos de l’accès social à la propriété, il s’agit, à travers cet amendement, de diminuer les conditions de ressources ouvrant droit à l’avance remboursable sans intérêt et, corrélativement, d’en augmenter le montant.
Il paraît indispensable de recentrer le prêt à taux zéro afin d’en faire une aide déterminante dans l’acte d’achat. Il doit redevenir le soutien public qui permet l’accès à la propriété, avec un montant suffisamment significatif pour rendre l’achat possible.
Aujourd’hui, le prêt à taux zéro, ou PTZ, est ouvert aux ménages aisés au détriment des plus fragiles. Rappelons en effet que l’accession à la propriété est fermée aux ménages les plus modestes. C’est pourtant sur l’accession sociale que doit être porté le principal effort de la collectivité. Tel est le sens de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Votre amendement est sans objet, puisqu’il tend à modifier un dispositif de prêt à taux zéro qui n’est plus appliqué et qui a été remplacé par le dispositif de prêt à taux zéro dit « PTZ+ », lequel vise à soutenir l’accession à la propriété des ménages modestes.
L’avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État. L’avis est également défavorable. Cet amendement vise à modifier un dispositif qui s’est éteint le 31 décembre 2010 et il est donc sans effet.
M. le président. Monsieur Abate, l'amendement n° 1376 est-il maintenu ?
M. Patrick Abate. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 1376 est retiré.
Je mets aux voix l'article 23 bis.
(L'article 23 bis est adopté.)
Article additionnel après l’article 23 bis
M. le président. L'amendement n° 984 rectifié, présenté par M. Delattre, Mme Imbert, MM. Carle, de Nicolaÿ, Laufoaulu, Vasselle, J. Gautier et D. Laurent, Mme Micouleau, MM. Milon et Calvet, Mme Mélot, MM. G. Bailly, Doligé et Laménie, Mme Duchêne, M. Houel, Mme Primas et MM. Leleux, Trillard et Malhuret, est ainsi libellé :
Après l’article 23 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Au premier alinéa de l’article L. 302-5 du code de la construction et de l’habitation, le nombre : « 1 500 » est remplacé par le nombre : « 2 500 ».
II. – La perte de recettes pour l’État résultant du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Francis Delattre.
M. Francis Delattre. Après une quinzaine d’années d’application, nous pouvons tirer quelques enseignements de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains, dite loi SRU.
Sur le fond, faire la ville dans la ville allait dans la bonne direction, en permettant de densifier les secteurs urbains, tout en épargnant notamment les terres agricoles et les espaces naturels.
Néanmoins, un certain nombre d’îlots posent problème, car, dans ces zones, la géographie, le sol, le respect des réglementations et des lois gênent véritablement l’extension du parc social. Ainsi, lorsque votre territoire relève de la loi Littoral, la construction peut être soit complètement interdite soit très réglementée. Il en va de même pour les zones situées dans un parc naturel. Si votre ville comprend de nombreux monuments historiques, l’intervention de l’administration chargée de ces monuments rendra difficile l’extension du parc social.
Au final, les situations où il n’y a pas de solution foncière se multiplient. Le dispositif est relativement injuste, car, en général, les élus essayent de trouver une solution, quitte à se mettre parfois dans l’illégalité.
Je le redis, après une quinzaine d’années d’application de la loi, il faut avoir le courage de dire ce qui fonctionne et ce qui pose problème. Or, là, nous sommes face à une véritable difficulté. C'est la raison pour laquelle je propose de modifier le fameux seuil de 1 500 habitants pour le porter à 2 500 : cela résoudra non pas tous les problèmes, mais les trois quarts d’entre eux.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. L’application de la loi SRU fait l’objet de débats ô combien récurrents au Sénat et nous aurons certainement l’occasion d’en discuter de nouveau à de nombreuses reprises dans cet hémicycle. C'est non pas au détour d’un amendement que l’on doit rouvrir ce débat, mais plutôt dans le cadre soit de la discussion du budget du logement lors de l’examen du projet de loi de finances, soit au travers d’une proposition de loi dédiée à ce sujet.
Aujourd’hui, l’article 55 de la loi SRU s’applique dans toutes les communes de plus de 3 500 habitants des régions hors Île-de-France et à celles de plus de 1 500 habitants en Île-de-France. Monsieur Delattre, vous proposez de relever ce dernier seuil à 2 500 habitants. Dans un récent rapport, la Cour des comptes a même proposé d’aller plus loin que vous, en préconisant que le seuil de 3 500 habitants soit appliqué à l’ensemble du territoire, y compris en Île-de-France.
Or il faut tout de même reconnaître que la région la plus tendue, celle dans laquelle les demandes sont les plus nombreuses, est bien l’Île-de-France. Qu’il y ait un effort de solidarité porté par un certain nombre de communes paraît être une idée qui, loin d’être ubuesque, a véritablement une certaine légitimité.
Cependant, je le répète, ce n’est pas le moment d’ouvrir ce genre de débat. Aussi, je vous demande, mon cher collègue, de retirer votre amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement qui porte sur un sujet ayant été longuement, et parfois vivement, débattu dans cet hémicycle au moment de l’examen de la loi du 18 janvier 2013.
À l’époque, le texte adopté a permis de bâtir un dispositif équilibré, sur lequel il n’est pas question de revenir. En effet, la loi impose un quota de 30 % de logements sociaux. En Île-de-France, les communes de plus de 1 500 habitants sont soumises à cette obligation. Il s’agit d’un enjeu de mixité sociale, de lutte contre les inégalités sociales. Ce seuil de 1 500 habitants n’est d’ailleurs, en réalité, pas une nouveauté, puisqu’il est en vigueur depuis l’année 2000. Les communes ont donc eu beaucoup de temps pour s’adapter à leurs obligations législatives.
Le Gouvernement a décidé d’aller plus loin : les communes de plus de 1 500 habitants qui ne respecteront pas le quota de logements sociaux verront les préfets, qui sont les représentants de l’État dans les territoires, sévir. Dans les communes carencées en logements sociaux, les préfets devront utiliser pleinement l’outil que constitue l’arrêté de carence. Il permet une préemption par l’État des terrains ou des logements sous forme de reprise, y compris des permis de construire.
Vous l’aurez compris, nous ne reviendrons pas sur l’équilibre qui a été trouvé, car il répond à un impératif de mixité sociale. En revanche, le Gouvernement s’assurera que la loi SRU est désormais bien respectée partout, y compris en Île-de-France, par les communes qui n’avaient pas jusqu’à présent rempli leurs obligations légales.
M. le président. Monsieur Delattre, l'amendement n° 984 rectifié est-il maintenu ?
M. Francis Delattre. La réponse du Gouvernement n’est pas satisfaisante. Mon amendement vise non pas à protéger les communes qui ne respectent pas la loi, mais à permettre l’examen de situations extraordinaires, lorsque les communes sont dans l’impossibilité d’atteindre l’objectif.
M. Christophe Béchu. Exact !
M. Francis Delattre. Si on ne regarde pas la réalité en face, on peut tenir le discours qui a été le vôtre – entre nous soit dit, il est très répétitif –, mais il est complètement déconnecté des réalités du terrain. (M. Christophe Béchu opine.)
Néanmoins, pour faire plaisir à Mme la corapporteur, je retire mon amendement, en espérant que ce débat permettra aux uns et aux autres de réfléchir utilement à la question.
M. le président. L'amendement n° 984 rectifié est retiré.
Article 23 ter
(Non modifié)
Le code de la construction et de l’habitation est ainsi modifié :
1° Au début du premier alinéa de l’article L. 302-16, les mots : « Dans les communes appartenant à une zone d’urbanisation continue de plus de 50 000 habitants telle que définie à l’article 232 du code général des impôts ainsi que dans les communes de plus de 15 000 habitants en forte croissance démographique définies par décret pris en application du septième alinéa de l’article L. 302-5 du présent code, » sont supprimés ;
2° Au premier alinéa de l’article L. 254-1, les mots : « , dans le périmètre mentionné à l’article L. 302-16, » sont supprimés ;
3° À la fin de la troisième phrase du sixième alinéa du IV de l’article L. 302-1, les mots : « , dans les secteurs mentionnés à l’article L. 302-16, l’offre de logements intermédiaires définie à cet article » sont remplacés par les mots « l’offre de logements intermédiaires définis à l’article L. 302-16 » ;
4° Au vingt-deuxième alinéa de l’article L. 421-1, les mots : « , dans les communes appartenant à une zone d’urbanisation continue de plus de 50 000 habitants telle que définie à l’article 232 du code général des impôts ainsi que dans les communes de plus de 15 000 habitants en forte croissance démographique définies par décret pris en application du septième alinéa de l’article L. 302-5 du présent code, » sont supprimés ;
5° Au trente-sixième alinéa de l’article L. 422-2 et au quarante et unième alinéa de l’article L. 422-3, les mots : « , dans les communes appartenant à une zone d’urbanisation continue de plus de 50 000 habitants telle que définie à l’article 232 du code général des impôts ainsi que dans les communes de plus de 15 000 habitants en forte croissance démographique définies par décret pris en application du septième alinéa de l’article L. 302-5 du code de la construction et de l’habitation, » sont supprimés.
(Mme Jacqueline Gourault remplace M. Jean-Claude Gaudin au fauteuil de la présidence.)
PRÉSIDENCE DE Mme Jacqueline Gourault
vice-présidente
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 18 est présenté par Mme Assassi, M. Le Scouarnec et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 445 est présenté par M. Desessard et les membres du groupe écologiste.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Laurence Cohen, pour présenter l'amendement n° 18.
Mme Laurence Cohen. Je vous donne ici lecture d’une dépêche parue le 10 avril dernier : « La Cour européenne des droits de l’homme a condamné la France pour le non-relogement d’une famille prioritaire au titre du DALO. Une décision importante qui fournit une nouvelle arme juridique pour les demandeurs prioritaires en attente de relogement. »
C’est une nouvelle pierre à l’édifice jurisprudentiel du droit au logement opposable, ou DALO, qui vient d’être posée : la Cour européenne des droits de l’homme, la CEDH, dans un arrêt en date du 9 avril 2015, a pour la première fois condamné la France pour ne pas avoir relogé une famille reconnue prioritaire au titre du droit au logement opposable par un jugement du 28 décembre 2010 du tribunal administratif de Paris.
Le préfet de région était alors condamné à reloger la famille, sous astreinte de 700 euros par mois de retard. Au jour du jugement de la CEDH, la famille n’avait toujours pas été relogée.
La Cour européenne estime que l’État français a violé l’article 6 paragraphe 1 de la Convention européenne des droits de l’homme, qui consacre le droit à un procès équitable : le défaut d’exécution du jugement en question ne se fonde sur aucune justification valable au sens de la jurisprudence de la Cour. Celle-ci a jugé que le manque de ressources de l’État pour assurer le relogement n’était pas un argument valable.
Il s’agit là d’un nouveau recours pour les personnes prioritaires, alors que la loi DALO donne déjà la possibilité au juge français de condamner l’État sous astreinte à assurer le relogement des familles prioritaires.
Deux jugements du tribunal administratif de Paris du 17 décembre 2010 avaient également reconnu la responsabilité de l’État pour méconnaissance de son obligation de relogement, et condamné ce dernier à verser, au-delà des astreintes, des dommages et intérêts aux familles non relogées.
L’État est donc désormais juridiquement responsable face aux bénéficiaires du DALO, alors que, en 2014, 8 519 jugements d’astreinte ont été prononcés pour non-relogement de personnes pourtant reconnues au titre du droit au logement opposable.
Selon le dernier bilan du DALO, publié en mars 2015, les chiffres sont toujours en hausse, notamment en Île-de-France.
René Dutrey, secrétaire général du Haut Comité pour le logement des personnes défavorisées, demande la mise en place d’un plan d’urgence, comportant des objectifs chiffrés par territoire, pour reloger les plus de 59 000 ménages reconnus au titre du droit au logement opposable, en attente depuis six mois à sept ans.
Mes chers collègues, au regard de ces informations, il est grand temps que nos débats échappent quelque peu à la logique mercantile qui parfois apparaît et structure notre débat sur le logement au sein du projet de loi sur la croissance et l’activité.
Au bénéfice de ces informations, je ne peux que vous inviter à adopter cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Joël Labbé, pour présenter l'amendement n° 445.
M. Joël Labbé. L’article 23 ter supprime le ciblage du développement du logement intermédiaire sur les seules zones tendues. Il constitue ainsi une incitation au développement du logement intermédiaire comme investissement immobilier rentable pour les constructeurs.
L’expérience a montré que si le logement intermédiaire répond à un réel besoin dans les zones tendues, notamment pour les jeunes ménages, certaines opérations ont été des échecs, car les immeubles construits ont connu des taux de remplissages très faibles.
Construire là où il n’y a pas de demande contribue à « artificialiser » les sols et s’avère être un mauvais investissement pour les épargnants qui ont fait ce choix.
Voilà pourquoi nous proposons, à travers le présent amendement, de supprimer cet article.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Mme Cohen nous a fait un long exposé sur le droit au logement opposable. Pourtant, ni l’article examiné ni l’amendement proposé ne portent sur cette question. Nous parlons bien ici du zonage du logement intermédiaire, comme l’a rappelé M. Labbé en présentant son amendement.
S’agissant justement de l’amendement n° 445, il vise à supprimer l’article 23 ter, qui, lui-même, supprime la condition de zonage dans la définition du logement intermédiaire.
Je rappellerai que le zonage réglementaire du logement intermédiaire fixé par l’ordonnance du 20 février 2014 sur le logement intermédiaire est basé sur la taxe sur les logements vacants, alors que le zonage fiscal des dispositifs d’aide existant en faveur du logement intermédiaire repose, lui, sur le zonage ABC.
Cette différence de zonage est pour le moins discutable. L’article 23 ter apporte une simplification bienvenue en supprimant le zonage réglementaire dans la définition du logement intermédiaire.
Pour cette raison, la commission spéciale a donné un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État. L’avis du Gouvernement est également défavorable, pour des raisons similaires.
L’article 23 ter a uniquement pour objet de supprimer le zonage relatif aux mesures de l’ordonnance du 20 février 2014. Ces mesures concernent la définition du logement intermédiaire, la possibilité qui est donnée aux collectivités territoriales de prévoir le développement du logement intermédiaire dans leurs documents de programmation.
Il est important de rappeler que les aides financières et fiscales favorisant la production de logements intermédiaires, comme la TVA réduite à 10 %, restent soumises à un zonage. Elles ne s’appliquent qu’aux zones tendues, là où la demande en logements intermédiaires est la plus nécessaire.
Je rappelle aussi que le dézonage de l’ordonnance ne supprime pas du tout le zonage des aides au logement intermédiaire, qui restent circonscrites aux zones tendues.
Il n’est donc nullement question en l’espèce d’étendre le logement intermédiaire.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Je souhaiterais de nouveau expliquer à mes collègues pour quelle raison ils devraient soutenir la position du Gouvernement, à savoir l’article.
Je rappelle qu’il y a deux sujets distincts : la définition du logement intermédiaire et son introduction dans les documents d’urbanisme. Le prêt social location-accession, le PSLA, est massivement utilisé en dehors des zones tendues. Si l’on veut indiquer dans des documents d’urbanisme qu’il faut du logement intermédiaire parce qu’on souhaite favoriser le logement en location-accession, le logement intermédiaire doit être accessible en dehors des zones tendues.
En revanche – et là, je comprends très bien les arguments des uns et des autres –, il serait illégitime que l’aide fiscale de l’État concerne l’ensemble des territoires. Je sais que nos collègues du groupe CRC sont défavorables à une aide fiscale sur le logement intermédiaire. On peut en débattre. Mais, à partir du moment où un dispositif d’aide fiscale sur le logement intermédiaire existe, il est nécessaire, en effet, qu’il soit ciblé sur les zones tendues. Car vous avez raison, chers collègues : les aides fiscales qui ont été conçues auparavant ont souvent constitué des opportunités fiscales qui arrosaient le territoire de logements qui apparaissent vides car en décalage par rapport aux revenus de nos concitoyens.
Donc, ici, nous nous situons vraiment dans un cadre qui simplifie, qui offre un cadre opérationnel, dans l’esprit de ce qui était – je le rappelle – débattu lors de l’examen de la loi ALUR. Nous avions alors expliqué qu’il nous fallait un outil d’urbanisme qui contribue à lutter contre la spéculation et à permettre notamment l’accession sociale à la propriété dans les documents d’urbanisme, à travers le concept de logement intermédiaire.
Par ailleurs, je rappelle que les aides fiscales sont bien ciblées sur les zones tendues. (M. Marc Daunis opine.) Ensuite, il est possible de débattre sur les aides fiscales, mais, très honnêtement, cela ne revient pas à dénaturer l’esprit de la loi ALUR. Cela conduit plutôt à lui rendre une opérationnalité et une visibilité.
Mme la présidente. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.
Mme Annie David. Nous n’allons pas reprendre le débat que nous avons eu voilà un instant. Je partage en effet, de nouveau, ce qui vient d’être dit par Mme Lienemann. Néanmoins, les aides fiscales et le financement de ces logements intermédiaires se feront forcément au détriment du financement des logements sociaux. (Exclamations sur les travées de l'UMP.) Et ce que nous contestons…
M. Francis Delattre. Le logement, c’est une chaîne !
Mme Annie David. Je vous ai écouté, mon cher collègue. Si vous voulez bien avoir la même élégance. Je vous écouterai de nouveau lorsque vous prendrez la parole.
Ce que nous contestons, disais-je, c’est ce financement, qui ne pourra pas être élastique.
Je partage également ce que disait tout à l’heure M. Dubois. En effet, ce parcours, exemplaire, ai-je envie de dire, d’une famille qui pourra passer d’un logement à un autre, c’est ce que nous soutenons. Concernant l’accession sociale à la propriété, là aussi nous sommes favorables à ce parcours pour les familles susceptibles d’en bénéficier. Sauf que, vous et moi, nous le savons bien, la majorité des familles ne peut pas bénéficier d’un tel parcours.
Il faut donc penser aussi à toutes les familles qui n’ont pas la possibilité d’avoir accès à ces logements. Et, en effet, au moment des débats relatifs à la loi ALUR, la discussion avait conduit à la conclusion suivant laquelle le logement intermédiaire ne peut être qu’un complément du logement social et sa production doit être strictement encadrée.
Or, à travers l’article précédent et le présent article, nous désencadrons ce logement intermédiaire et c’est ce que nous avons contesté par le biais du précédent amendement et ce que nous récusons au travers de l’amendement que nous avons présenté à l’instant.
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Dubois, pour explication de vote.
M. Daniel Dubois. Je rejoins encore une fois Mme Lienemann. Ce n’est pas la première fois mais, en tous les cas, là aussi, il y a de la cohérence et cela rend les choses plus efficaces.
Cela étant dit, faire et défaire, c’est toujours travailler. Je tiens tout de même à rappeler à nos collègues qu’avant la loi ALUR nous avions débattu dans cet hémicycle aux fins d’habiliter le Gouvernement à légiférer par voie d’ordonnance, d’abord sur la problématique des permis de construire, qui étaient attaqués.
Le deuxième sujet visé par l’ordonnance était le logement intermédiaire. J’étais intervenu à l’époque pour soulever le fait que nous allions autoriser le Gouvernement à légiférer par voie d’ordonnance sur le logement intermédiaire alors que la loi ALUR était sur le point d’être débattue dans l’hémicycle. Vous m’aviez rétorqué qu’il fallait tout de même réagir rapidement, en cohérence, relancer l’activité économique. Je m’aperçois finalement que, si nous avions débattu plus longuement de la loi ALUR, nous aurions peut-être évité un certain nombre de catastrophes. Car le niveau actuel de construction de logements sur notre territoire est tout de même catastrophique ! (Mme Annie David s’exclame.)
Voilà ce que je tenais à dire : cohérence et incohérence, travaillez et travaillons !
Mme la présidente. La parole est à M. Joël Labbé.
M. Joël Labbé. Ayant été convaincu par les arguments avancés, notamment par Marie-Noëlle Lienemann, je retire l’amendement n° 445. (Marques d’approbation et applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
Mme la présidente. L’amendement n° 445 est retiré.
La parole est à Mme Samia Ghali, pour explication de vote sur l’amendement n° 18.
Mme Samia Ghali. Madame David, à Marseille, dans les quartiers nord, par exemple, là où je suis maire, quand il y a une construction, 80 % des personnes qui accèdent à la propriété sortent du parc HLM. C’est important parce cela permet de libérer des places dans le parc HLM et de donner à d’autres familles la possibilité d’accéder au logement social, notamment sur les questions du DALO, qui sont importantes.
Le PSLA – je partage les propos de Marie-Noëlle Lienemann – apporte des garanties et permet aux familles qui veulent accéder à la propriété de ne plus être angoissées face à l’endettement. En effet, la situation économique actuelle fait que la peur du crédit amène à ce que l’on ne se lance pas facilement dans l’accession à la propriété.
Le PSLA est une arme exceptionnelle pour permettre à ces familles d’accéder à la propriété.
Ces questions, j’espère que nous les aborderons en leur temps pour que nous défendions ensemble le développement, partout, du PSLA, qui me semble pouvoir répondre à beaucoup de questions en matière d’accession à la propriété.
Mme la présidente. L'amendement n° 1377, présenté par Mme Assassi, M. Le Scouarnec et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
I. – Les plafonds de ressources pour l’attribution des logements locatifs sociaux fixés en application de l’article L. 441-1 du code de la construction et de l’habitation sont majorés de 10,3 % à compter de la date de promulgation de la présente loi.
II. – Le dernier alinéa de l’article L. 441-1 du même code est supprimé.
La parole est à M. Jean-Pierre Bosino.
M. Jean-Pierre Bosino. L’article 23 ter – nous sommes toujours dans le même débat –, introduit par les rapporteurs en commission à l’Assemblée nationale, poursuit la même logique d’incitation fiscale, que nous avons déjà évoquée lors de l’examen de l’article 23 bis.
Il prévoit en effet de remodeler le périmètre des territoires éligibles à toutes les aides possibles, afin de rendre plus attractif l’investissement privé dans la réalisation des logements intermédiaires.
Nous sommes opposés à cette orientation de l’action publique. C’est donc en pleine cohérence avec cette prise de position que nous avons proposé, dans un amendement précédent, la suppression de cet article 23 ter.
Avec le présent amendement, nous vous proposons non pas une disposition de repli, aménageant l’article, mais une réécriture complète, réorientant au contraire l’action publique en matière de logement. En effet, à travers cet amendement, nous suggérons de revenir sur la loi Boutin – nous n’en avions pas encore parlé –, que la gauche dans son ensemble a combattue, ici, dans cet hémicycle.
Alors que la droite a réduit les conditions d’accès du plus grand nombre aux logements sociaux en abaissant les seuils de ressources donnant accès à ces logements, nous proposons au contraire de majorer ces plafonds de ressources de 10,3 %. Cela ouvrirait la porte de ce type de logements à de nombreuses familles qui en sont aujourd’hui exclues et qui ne trouvent pourtant pas de logement dans le parc privé du fait d’une offre insuffisante ou du montant des loyers qui sont pratiqués.
Cela permettrait aussi de faire sortir de la précarité résidentielle ceux qui disposent aujourd’hui d’un logement social mais dont les ressources ont augmenté et qui, du fait de la loi Boutin, risquent d’être expulsés.
Enfin, une telle mesure permettrait de renforcer la mixité dans nos territoires en difficulté. On ne peut avoir comme Premier ministre un homme qui parle d’ « apartheid », pour caractériser certains quartiers, et poursuivre cette action avec des mesures qui organisent et renforcent les disparités sociales avec des logements, et donc des territoires, socialement réservés. D’un côté les riches, de l’autre les pauvres et, au milieu, ceux qui ne le sont plus ou pas encore.
Il est urgent de remettre de l’ordre dans les politiques publiques en faveur du logement et la question des plafonds de ressources est une question essentielle, mais ce n’est pas avec les mesures que l’on nous propose que l’on répondra à cet enjeu.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Monsieur Bosino, je vous rappelle qu’actuellement 64,3% de nos concitoyens sont éligibles au logement HLM et qu’une majoration du plafond de ressources pour l’accès au parc HLM conduirait de fait à augmenter le nombre de nos concitoyens éligibles au parc social. Or, vous me l’accorderez, cela poserait un problème parce qu’il serait impossible d’apporter une réponse aux personnes qui viendraient grossir le rang des demandeurs de logements sociaux, en tout cas dans l’immédiat. Cette augmentation aurait aussi pour conséquence de diminuer les cas d’application de surloyers, alors qu’ils contribuent à la mutualisation des ressources entre HLM.
Aussi, en ne permettant plus la révision annuelle des plafonds, l’amendement conduit également à figer ces plafonds de ressources, ce qui ne semble pas souhaitable. La commission spéciale a donné un avis défavorable à votre amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
Les plafonds de ressources d’accès au logement social permettent déjà à une large part de la population d’avoir accès à ce parc social. Je vous donne quelques chiffres pour illustrer mon propos : à Paris, par exemple, 77 % des célibataires sont éligibles à un logement social du fait de leur revenu fiscal de référence mensuel ; en région, dans les territoires, le pourcentage s’élève à 85 % des célibataires (Exclamations sur les travées du groupe CRC.) ainsi qu’à 76% des couples avec enfant.
Cette disposition que vous proposez aurait donc pour effet de remettre en cause la baisse des plafonds de ressources opérée par une loi adoptée en 2009, la loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion, dite « loi MOLLE », pour mieux cibler l’accès des ménages au parc social.
La logique choisie par le Gouvernement consiste effectivement à mieux cibler les bénéficiaires des logements sociaux afin que les personnes qui ont vraiment besoin d’un accès au parc social en tirent avantage, et, parallèlement, à attirer vers les logements intermédiaires les personnes qui n’entreraient pas dans les critères d’éligibilité, lesquels sont déjà largement ouverts.
Mme Éliane Assassi. Vérifiez vos chiffres !
Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Abate, pour explication de vote.
M. Patrick Abate. Il y a, d’un côté, les statistiques et, de l’autre, la réalité. Je suis le maire d’une petite ville dans laquelle, en effet, j’ai très souvent à répondre négativement sur le principe d’un accès à un logement social.
Premièrement, un couple dans lequel chacun des partenaires gagne le SMIC n’a pas accès au parc social. C’est la réalité. Et l’on est tous les jours confronté à cette situation lorsqu’on gère le territoire, quelles que soient les statistiques.
Deuxièmement, se pose la question du surloyer. Une partie des quartiers de ma petite ville se sont vidés, de manière systématique, de gens qui étaient là depuis longtemps, qui ont vécu des années voire des dizaines d’années dans un logement social et qui, à un moment donné, ont été confrontés au surloyer ; ne pouvant plus payer, ils trouvent dans les logements dégradés dont on a parlé tout à l’heure à l’occasion de l’hommage à notre regretté collègue Claude Dilain, dans les copropriétés dégradées, des loyers encore moins chers et des conditions d’accès encore moins complexes que dans le logement social.
Il y a un vrai problème de mixité sociale, auquel on ne répond pas et auquel notre amendement, selon nous, pourrait, en tout cas en partie, répondre.
Mme la présidente. La parole est à M. Christophe Béchu, pour explication de vote.
M. Christophe Béchu. Il y a effectivement les statistiques d’un côté et la réalité de l’autre. On est dans un débat qui est surréaliste !
Ou bien le groupe CRC dépose un amendement de cohérence qui prévoit que le taux de logement social construit dans ce pays atteigne les 70% dont on est en train de parler, de ceux qui sont à l’heure actuelle éligibles au logement social et nous aurons un débat qui sera clair. Ou bien l’on reste dans un débat de faux-semblants.
Aujourd’hui, la réalité du logement social dans notre pays, c’est qu’il y a un écart considérable entre le nombre de personnes qui y ont droit sans relever les plafonds de ressources et le nombre de logements sociaux disponibles.
Vous parlez, cher collègue, d’une commune que vous connaissez parce que c’est la vôtre. Dans la commune dont je suis maire, il y a 37 % de logements sociaux et 75 % de la population peut potentiellement accéder, compte tenu de ses ressources, au logement social. Si l’on adoptait votre amendement, on augmenterait encore le décalage grandissant entre ceux qui y ont potentiellement accès et les autres. Et on est en train d’opposer les formes de logement, alors que ce dont on a besoin pour construire des parcours résidentiels c’est aussi une forme de variété !
La réalité, c’est que ce n’est pas sur les plafonds de ressources de ces personnes qu’il faut se battre. C’est éventuellement sur le pourcentage de PLAI, parce qu’il existe des zones d’ombre à l’intérieur du logement social et à l’intérieur des obligations globales, sur lesquelles il y a potentiellement un souci. Ce n’est pas sur ceux qui sont les plus proches de la « sortie » des plafonds et pour lesquels précisément les logements intermédiaires que nous sommes en train de défendre sont aussi un des moyens de faire en sorte de pouvoir loger l’ensemble de nos concitoyens dans de bonnes conditions.
Chers collègues du groupe CRC, c’est précisément parce qu’un décalage considérable existe entre les statistiques et la réalité – vous n’avez pas le monopole de ce constat – que nous devons bien nous garder de relever les plafonds de ressources, puisque nous n’arrivons même pas à faire face aux demandes résultant des plafonds actuels !
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Monsieur Béchu, ce n’est pas parce que nous n’arrivons pas à satisfaire la demande que nous ne devons pas mener une politique un peu plus ambitieuse et audacieuse ! (Marques d’approbation sur les travées du groupe CRC.)
Permettez-moi, mes chers collègues, de soumettre à votre réflexion deux faits.
D’abord, 80 % des salariés de notre pays gagnent moins de 2 000 euros par mois ; telle est la réalité, que nous connaissons tous.
Ensuite, s’il est vrai que nous n’arrivons pas à faire face à la demande, nous voyons bien où les offices d’HLM rencontrent des difficultés ; ainsi, dans mon département du Val-de-Marne, les villes où la droite est majoritaire ne respectent pas la loi SRU. (Protestations sur les travées de l'UMP.) Chers collègues de droite, c’est ainsi que les choses se passent, au moins dans mon département ; allez vous rendre compte par vous-mêmes !
Je salue les efforts accomplis, notamment par les préfets, pour essayer de faire appliquer la loi. Reste que, aujourd’hui, il y a des territoires où celle-ci n’est pas appliquée.
M. Jean-Pierre Bosino. Et voilà !
Mme Laurence Cohen. On peut bien, ensuite, se déclarer impuissant, et rechercher d’autres moyens pour atteindre un petit résultat dans la lutte contre le mal-logement. Seulement voilà : le mal-logement est un problème extrêmement profond, comme la Fondation Abbé Pierre le répète jour après jour, force statistiques à l’appui, et des plus fiables.
Je constate que, chaque fois que nous avançons des propositions pour simplement assurer le respect de la loi SRU et pour qu’enfin certains maires ne puissent plus rester hors la loi, nous nous heurtons à une levée de boucliers. Après quoi, on essaie d’opposer les logements intermédiaires et les logements sociaux. Oui, les deux sont complémentaires, mais à condition que la loi SRU soit effectivement appliquée. Or aujourd’hui elle ne l’est pas et rien n’est fait pour l’aide à la pierre !
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 23 ter.
(L'article 23 ter est adopté.)
Demande de priorité
M. Vincent Capo-Canellas, président de la commission spéciale. Madame la présidente, en application de l’article 44, alinéa 6, du règlement, la commission spéciale demande que l’article 40 ter du projet de loi soit examiné immédiatement après l’article 35 nonies. En effet, ces deux articles portant exactement sur le même objet, le forfait social, il nous paraît opportun de les grouper pour en débattre.
Par ailleurs, mes chers collègues, je me permets de vous signaler que, en à peine plus d’une heure, nous n’avons examiné que sept amendements. Les rapporteurs et moi-même, ainsi que tous les membres de la commission spéciale, comprenons bien que, le projet de loi abordant des questions très variées, de nombreux sujets de discussion peuvent fort légitimement être soulevés. Néanmoins, il serait peut-être préférable de nous en tenir aux amendements qui ont été déposés, en essayant d’éviter les sujets connexes. En tout cas, je me permets de vous livrer cette suggestion, étant entendu qu’il nous reste 1 049 amendements à examiner. Au rythme de sept amendements à l’heure, faites le calcul…
M. Jean-Claude Lenoir. Très bien !
Mme la présidente. Je suis saisie d’une demande de priorité de la commission spéciale de l’article 40 ter après l’article 35 nonies.
Je rappelle que, aux termes de l’article 44, alinéa 6, du règlement du Sénat, lorsqu’elle est demandée par la commission saisie au fond, la priorité est de droit, sauf opposition du Gouvernement.
Quel est l’avis du Gouvernement sur cette demande de priorité ?
Mme la présidente. La priorité est de droit.
Article 23 quater A
(Non modifié)
Le code de la construction et de l’habitation est ainsi modifié :
1° À la seconde phrase du septième alinéa de l’article L. 411-2, après le mot : « général », sont insérés les mots : « , jusqu’au 1er janvier 2020, » ;
2° Après le 17° de l’article L. 421-1, il est inséré un 18° ainsi rédigé :
« 18° De construire et d’acquérir, dans la limite de 10 % des logements locatifs sociaux mentionnés à l’article L. 302-5 détenus par l’organisme, des logements locatifs dont le loyer n’excède pas les plafonds mentionnés au titre IX du livre III et destinés à être occupés par des personnes physiques dont les ressources n’excèdent pas les plafonds fixés au même titre IX. Ils peuvent également améliorer, attribuer, gérer et céder de tels logements. » ;
3° Après le trente-cinquième alinéa de l’article L. 422-2 et le quarantième alinéa de l’article L. 422-3, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Elles peuvent aussi construire et acquérir, dans la limite de 10 % des logements locatifs sociaux mentionnés à l’article L. 302-5 détenus par l’organisme, des logements locatifs dont le loyer n’excède pas les plafonds mentionnés au titre IX du livre III et destinés à être occupés par des personnes physiques dont les ressources n’excèdent pas les plafonds fixés au même titre IX. Elles peuvent également améliorer, attribuer, gérer et céder de tels logements. »
Mme la présidente. L'amendement n° 1711 rectifié, présenté par Mme Estrosi Sassone, au nom de la commission, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 4, première phrase
1° Remplacer les mots :
mentionnés au titre IX du livre III
par les mots :
fixés par voie réglementaire
2° Remplacer les mots :
au même titre IX
par les mots :
par voie réglementaire
II. – Alinéa 6, première phrase
1° Remplacer les mots :
mentionnés au titre IX du livre III
par les mots :
fixés par voie réglementaire
2° Remplacer les mots :
au même titre IX
par les mots :
par voie réglementaire
La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur.
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Charles Revet. Pourquoi ?
M. Ladislas Poniatowski. Pour quelle raison ?
Mme la présidente. Madame la secrétaire d'État, souhaitez-vous apporter des précisions au Sénat ?
Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État. De notre point de vue, il ne s’agit pas d’un amendement rédactionnel. Il est présenté comme tel parce qu’il vise à substituer aux mots « mentionnés au titre IX du livre III » du code de la construction et de l’habitation les mots « fixés par voie réglementaire ». En réalité, cette modification aurait pour effet de supprimer la référence précise aux plafonds de ressources et de loyer du prêt locatif intermédiaire. Ces plafonds sont certes fixés par voie réglementaire, mais il importe que leur principe soit inscrit dans la loi.
M. Marc Daunis. C’est tout sauf rédactionnel !
Mme Annie David. En effet !
Mme la présidente. La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur.
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Plutôt que d’un amendement rédactionnel, j’aurais dû parler d’un amendement à visée légistique : on ne mentionne pas dans la loi un article qui relève du pouvoir réglementaire. (Marques d’approbation sur plusieurs travées de l'UMP.)
Mme Nicole Bricq. Ce ne serait pas la première fois !
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 23 quater A, modifié.
(L'article 23 quater A est adopté.)
Article 23 quater
I. – L’article L. 421-1 du code de la construction et de l’habitation est ainsi modifié :
1° Au vingt-deuxième alinéa, les mots : « de construire et gérer » sont remplacés par les mots : « de construire, d’acquérir et de gérer » ;
2° Après le vingt-cinquième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Ces filiales peuvent également acquérir des locaux à usages commercial, professionnel ou d’habitation, à l’exception des logements locatifs sociaux définis à l’article L. 302-5, en vue de leur transformation en logements locatifs intermédiaires remplissant les conditions fixées aux trois alinéas précédents et se voir confier la gestion de logements locatifs intermédiaires ou confier la gestion de logements locatifs intermédiaires à une autre personne morale, par le biais d’un mandat. » ;
3° Avant le dernier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les offices publics de l’habitat peuvent également participer à des sociétés ayant le même objet que les filiales de logement locatif intermédiaire défini aux vingt-troisième à vingt-cinquième alinéas du présent article, lorsqu’une telle participation leur permet, avec d’autres organismes mentionnés à l’article L. 411-2 du présent code, d’exercer un contrôle conjoint sur cette société dans les conditions mentionnées à l’article L. 233-3 du code de commerce. Ces sociétés sont soumises aux mêmes règles que les filiales mentionnées ci-dessus. »
II. – L’article L. 422-2 du même code est ainsi modifié :
1° Au trente-sixième alinéa, les mots : « de construire et gérer » sont remplacés par les mots : « de construire, d’acquérir et de gérer » ;
2° Après le trente-neuvième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Ces filiales peuvent également acquérir des locaux à usages commercial, professionnel ou d’habitation, à l’exception des logements locatifs sociaux définis à l’article L. 302-5, en vue de leur transformation en logements locatifs intermédiaires remplissant les conditions fixées aux trois alinéas précédents et se voir confier la gestion de logements locatifs intermédiaires ou confier la gestion de logements locatifs intermédiaires à une autre personne morale, par le biais d’un mandat. » ;
3° Après l’antépénultième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les sociétés anonymes d’habitations à loyer modéré peuvent également participer à des sociétés ayant le même objet que les filiales de logement locatif intermédiaire défini aux trente-septième à trente-neuvième alinéas du présent article, lorsqu’une telle participation leur permet, avec d’autres organismes mentionnés à l’article L. 411-2 du présent code, d’exercer un contrôle conjoint sur cette société dans les conditions mentionnées à l’article L. 233-3 du code de commerce. Ces sociétés sont soumises aux mêmes règles que les filiales mentionnées ci-dessus. »
III. – L’article L. 422-3 du même code est ainsi modifié :
1° Au quarante et unième alinéa, les mots : « de construire et gérer » sont remplacés par les mots : « de construire, d’acquérir et de gérer » ;
2° Après le quarante-quatrième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Ces filiales peuvent également acquérir des locaux à usages commercial, professionnel ou d’habitation, à l’exception des logements locatifs sociaux définis à l’article L. 302-5, en vue de leur transformation en logements locatifs intermédiaires remplissant les conditions fixées aux trois alinéas précédents et se voir confier la gestion de logements locatifs intermédiaires ou confier la gestion de logements locatifs intermédiaires à une autre personne morale, par le biais d’un mandat. » ;
3° Avant le dernier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les sociétés anonymes coopératives de production d’habitations à loyer modéré peuvent également participer à des sociétés ayant le même objet que les filiales de logement locatif intermédiaire défini aux quarante-deuxième à quarante-quatrième alinéas du présent article, lorsqu’une telle participation leur permet, avec d’autres organismes mentionnés à l’article L. 411-2 du présent code, d’exercer un contrôle conjoint sur cette société dans les conditions mentionnées à l’article L. 233-3 du code de commerce. Ces sociétés sont soumises aux mêmes règles que les filiales mentionnées ci-dessus. »
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 446, présenté par M. Desessard et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
I. – Alinéas 2, 8 et 14
Remplacer les mots :
d’acquérir et de gérer
par les mots :
de gérer et, à condition que le territoire concerné respecte les obligations fixées par l’article 55 de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains, d’acquérir
II. – Alinéas 10 et 16, au début de ces alinéas
Insérer les mots :
« À condition que le territoire concerné respecte les obligations fixées par l’article 55 de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains,
La parole est à M. Joël Labbé.
M. Joël Labbé. Cet amendement vise à la fois à encadrer le développement du logement intermédiaire et à assurer le respect de l’esprit de la loi SRU. En effet, si le logement intermédiaire est assurément nécessaire, la volonté de le soutenir ne doit pas conduire à faire dévier les organismes de logement social de leur mission première.
Ainsi, la possibilité que l’article 23 quater offre aux filiales des organismes de logement social d’acquérir du logement intermédiaire ouvre à celles-ci des perspectives nouvelles qui risquent d’inciter les maisons mères à rééquilibrer leur activité en faveur du logement intermédiaire, plus rentable, au détriment du logement social, dont les moyens financiers et humains seront nécessairement réduits.
Il convient donc de conditionner la possibilité pour les filiales d’organismes d’HLM de mener ces activités nouvelles au respect des obligations en matière de construction de logement social sur le territoire concerné. Faire respecter la loi SRU : tel est l’objet de cet amendement !
Mme la présidente. L'amendement n° 1378, présenté par Mme Assassi, M. Le Scouarnec et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 4
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« L’acquisition ne peut avoir lieu que si sont respectées les obligations fixées par l’article L. 302-5 du code de la construction et de l’habitation. »
II. – Après l'alinéa 10
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« L’acquisition ne peut avoir lieu que si sont respectées les obligations fixées par l’article L. 302-5 du code de la construction et de l’habitation. »
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Mme Éliane Assassi. Cet amendement est défendu, madame la présidente. Vous voyez que nous tenons compte de la suggestion de M. le président de la commission spéciale !
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. La commission spéciale est défavorable à ces deux amendements, qui visent à subordonner la possibilité pour les filiales des organismes d’HLM d’acquérir des logements intermédiaires ou des locaux destinés à être transformés en logements intermédiaires au respect des obligations fixées par la loi SRU en matière de logement social sur le territoire concerné.
Des dispositions ont déjà été prises pour éviter que les organismes d’HLM ne rééquilibrent leur production vers le logement intermédiaire. Grâce à elles, le développement du logement intermédiaire, que l’on doit encourager, ne nuira pas à la production de logements sociaux.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État. Les auteurs de ces amendements redoutent que la faculté offerte aux filiales des organismes d’HLM d’acquérir et de gérer des logements intermédiaires ne porte préjudice à l’activité première des organismes mères : la production de logements sociaux.
Je leur signale que la création de filiales par un organisme d’HLM est déjà strictement encadrée. Ainsi, l’ordonnance du 20 février 2014 relative au logement intermédiaire comporte des dispositions garantissant l’étanchéité des fonds alloués au secteur du logement social. Au demeurant, le représentant de l’État dans le département peut s’opposer à la création d’une telle filiale, si elle est de nature à porter atteinte à la capacité de l’organisme mère à remplir les missions qui lui ont été conférées en matière de logement social. De surcroît, toute augmentation de capital d’une filiale par l’organisme mère est soumise à un contrôle destiné à assurer le maintien de l’activité dans le domaine du logement social.
Dans ces conditions, le Gouvernement est défavorable à ces deux amendements.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Je comprends le souci des auteurs de ces amendements : éviter que les organismes de logements sociaux ne soient « embarqués » dans des opérations liées au logement intermédiaire dont les déficits rejailliraient sur la production de logements sociaux.
Néanmoins, comme Mme la secrétaire d’État l’a fort bien expliqué, la loi instaure une étanchéité en interdisant aux organismes d’HLM de combler des déficits de leurs filiales opérant dans le domaine du logement intermédiaire. Remarquez que, en sens inverse, les profits que ces filiales réalisent peuvent être reversés à la maison mère qu’est l’organisme d’HLM ; en d’autres termes, la rentabilité du logement intermédiaire peut augmenter les moyens dont disposent les organismes d’HLM.
En outre, restreindre le champ d’intervention de ces filiales aux communes ayant atteint le quota fixé par la loi SRU ne me paraît pas souhaitable. En effet, les organismes privés, n’étant pas soumis à la même obligation, pourraient seuls intervenir dans les communes où ce quota n’est pas respecté. Or les filiales d’organismes d’HLM opérant dans le domaine du logement intermédiaire proposent la plupart du temps aux élus de produire à la fois du logement social et du logement intermédiaire, soit pour favoriser la mixité soit pour combler un retard dans l’application de la loi SRU.
Dès lors, mes chers collègues, vous comprenez qu’en fermant à ces filiales un marché sur lequel elles pourraient être utiles en réalisant des opérations mixtes intelligentes, on favoriserait le secteur privé sans faire progresser l’application de la loi SRU.
Faut-il permettre le développement du logement intermédiaire dans les communes qui ne remplissent pas les obligations fixées par la loi SRU, à tout le moins dans celles qui n’œuvrent pas à rattraper leur retard ? La question pourrait se poser, mais ce n’est pas celle que soulèvent ces amendements. Ainsi donc, tout en comprenant leur intention, je suggère aux auteurs des amendements de les retirer. Je leur garantis que les organismes d’HLM ne seront pas exposés à des risques liés à des opérations de logement intermédiaire, ni même poussés à privilégier le logement intermédiaire au détriment du logement social !
Mme la présidente. La parole est à M. Éric Bocquet, pour explication de vote.
M. Éric Bocquet. Je désire apporter quelques explications sur la motivation profonde des auteurs de l’amendement n° 1378.
Il nous semble surprenant d’encourager la filialisation dans un secteur, le logement social, dont nous savons tous depuis de nombreuses années qu’il aiguise parfois de formidables appétits financiers. Alors qu’on prétend changer les règles du jeu pour rentabiliser ce secteur, pour le soumettre à une forme de logique marchande,…
M. Alain Chatillon. Oh !
M. Éric Bocquet. … permettez-moi de faire état d’un propos de M. André Yché, président du directoire de la Société nationale immobilière.
M. Yché a déclaré voilà quelque temps qu’il fallait engager une « profonde révision du rôle des organismes de logement social », ces derniers devant cesser d’assumer leur mission sociale pour s’ouvrir à de nouveaux métiers : « constructeurs, vendeurs, syndics, gestionnaires de copropriétés ». Et M. Yché d’ajouter : « Ils doivent, de fait, devenir de véritables opérateurs immobiliers globaux et acquérir progressivement toutes les compétences de gestionnaires de portefeuilles d’actifs immobiliers qu’impliquent leurs nouvelles missions. » Avant de conclure : « En d’autres termes, le métier d’avenir, ce n’est pas celui de bailleur social, c’est celui d’opérateur immobilier global d’intérêt général. »
À entendre ces propos, chacun comprendra qu’il y avait lieu d’appeler à la plus extrême vigilance !
M. le président. La parole est à M. Francis Delattre, pour explication de vote.
M. Francis Delattre. Je pense très sincèrement que l’étanchéisation est purement fictive. En effet, la loi permet aux offices d’HLM de vendre à leurs locataires le bien où ils résident.
M. Charles Revet. Heureusement !
M. Francis Delattre. Heureusement, en effet. C’est l’accession sociale que nous connaissons. Les offices d’HLM récupèrent ainsi des moyens…
M. Charles Revet. Exactement !
M. Francis Delattre. … qu’ils investissent où ils veulent, y compris dans du logement intermédiaire. (Non ! sur plusieurs travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Ils ne le peuvent pas !
M. Francis Delattre. Quoi que vous disiez, c'est ce que l’on constate ! C'est ainsi que fonctionnent tous les conseils d'administration…
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Certainement pas !
M. Francis Delattre. … que je fréquente. Je ne vois donc pas pourquoi dans l’Essonne il en irait autrement. Mais je suis favorable à cette souplesse.
En réalité, quand vous faites des enquêtes auprès des locataires pour savoir s'ils souhaitent accéder à la propriété de leur logement, un large consensus se dessine en dépit du fait que certaines organisations – nous les connaissons tous – plaident contre cette accession. Nos compatriotes qui payent un loyer pendant des années interprètent donc cette possibilité d’accéder à la propriété comme une chance.
Or le logement intermédiaire est une seconde chance. Il faut donc aborder ces problèmes avec souplesse et ouverture, et faire en sorte que nous comblions les aspirations réelles de la population.
Tout à l'heure, vous avez évoqué l’arme de préfet. Eh bien, je parle de l’arme du peuple, dont j’ai le regret de répéter à certains d’entre vous, mes chers collègues, qu’il souhaite accéder à la propriété de son logement (Mme Laurence Cohen s’exclame.), pour nombre de raisons que nous connaissons tous.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 23 quater.
(L'article 23 quater est adopté.)
Article 23 quinquies
(Non modifié)
Le code de la construction et de l’habitation est ainsi modifié :
1° Le vingt-huitième alinéa de l’article L. 421-1 est supprimé ;
2° Le quarante-deuxième alinéa de l’article L. 422-2 est supprimé ;
3° Le quarante-septième alinéa de l’article L. 422-3 est supprimé.
Mme la présidente. L'amendement n° 1379, présenté par Mme Assassi, M. Le Scouarnec et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Dominique Watrin.
M. Dominique Watrin. Cela vient d'être dit, et c'est vrai : il se manifeste de toutes parts des velléités de recherche de plus-values latentes, qui peuvent être réalisées grâce au parc social. À cet égard, la banalisation de la SNI, sous l’impulsion de son directeur, est assez éclairante.
Cette société est en effet devenue un opérateur immobilier qui a ni plus ni moins copié les règles spéculatives du marché, et s’est éloignée de son ambition fondatrice, celle de l’intérêt général. Cela devrait constituer une mise en garde pour nous tous.
Que dire aussi des propositions du MEDEF ? Pour avoir regardé ce qu’il écrit dans son Livre blanc sur le logement, je vous citerai quelques propositions : « Développer la culture de projet en s’appuyant sur le savoir-faire des opérateurs privés », « Acquérir les grands opérateurs publics fonciers de façon massive et à des conditions abordables, via des groupements mixtes associant les promoteurs privés », « Développer la vente HLM sécurisée aux occupants du parc social ». En fait, le MEDEF a un projet de société fondé sur une dérégulation sociale massive au profit de promoteurs privés. Gardons cela à l’esprit !
Dès lors, nous considérons qu’il y a une certaine indécence à prétexter la nécessité de répondre aux besoins des classes moyennes pour privatiser, par couches successives, le logement social. Selon nous, le logement n’est pas un bien d’investissement – c'est là une vision que nous récusons, et qui a été le principal moteur de la spéculation, de la déréglementation financière et de l’endettement.
Il faut répondre à la crise du logement en luttant contre la précarité qui s’est répandue dans le monde du travail et contre le recul de nombre de protections sociales. Mais il faut aussi faire du logement un bien différent ; il convient de réhabiliter et de renforcer une vraie politique publique du logement qui soit préservée des marchés financiers et des logiques spéculatives.
C’est pourquoi nous vous proposons de voter le présent amendement, qui vise à s'opposer à la filialisation des organismes d’HLM.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Il s’agit d’un amendement de suppression, sur lequel la commission spéciale a donné un avis défavorable, puisqu'elle a adopté l’article 23 quinquies sans aucune modification.
Je rappellerai simplement que l’interdiction actuelle de cumul des fonctions d’administrateur, de membre du directoire ou de membre de conseil de surveillance pour les organismes d’HLM et leurs filiales dédiées au logement intermédiaire rend presque impossible, aujourd'hui, la création de telles filiales par les organismes d’HLM de taille moyenne.
En levant l’interdiction du cumul des fonctions, l’article 23 quinquies permet de favoriser le développement de filiales dédiées au logement intermédiaire, mais dans un cadre garantissant l’étanchéité nécessaire et financière entre l’organisme d’HLM et sa filiale.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État. L’avis est défavorable.
Je ne répéterai pas les règles garantissant l’absence de porosité entre les bailleurs et les filiales dans la production de logement social. J’insiste néanmoins sur le fait que les aides à la pierre ne vont pas au logement intermédiaire, et que les communes qui ne font pas les efforts nécessaires pour produire du logement social et rattraper leur retard – c'est-à-dire les communes considérées comme carencées – sont exclues des dispositifs de logement intermédiaire.
La filialisation n’est donc en aucun cas une privatisation du parc social, et c'est même l’inverse ! Elle obéit à une logique de compartimentage qui permet justement de s'assurer, notamment au plan comptable, que la porosité n’est pas possible.
L'amendement a pour objet de supprimer l’article 23 quinquies qui, lui-même, supprime l’interdiction d’administrateurs communs entre les organismes d’HLM et leurs filiales. En réalité, monsieur le sénateur, vous et vos collègues du groupe CRC êtes opposés à la filialisation des organismes d’HLM. Les alinéas supprimés portent non pas sur le principe même de la création, par les organismes d’HLM, de filiales, mais uniquement sur le fonctionnement des conseils d'administration, en alignant ce fonctionnement des filiales sur le droit commun des filiales.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Je crains qu’il n’y ait une confusion entre la SNI et des organismes d’HLM. La SNI est une société d’économie mixte qui peut créer toutes les filiales qu’elle souhaite dans le cadre de son objet. Ainsi, des sociétés d’HLM se rencontrent parmi les filiales de la SNI, notamment en Île-de-France.
La loi encadre l’intervention des sociétés d’HLM. Dans ces sociétés, je tiens à le rappeler, il y a déjà du logement intermédiaire. Le PLI peut être aujourd'hui considéré comme une forme de logement intermédiaire.
Aussi, la capitalisation des filiales ne peut en aucun cas être réalisée à partir de la vente de logements locatifs régis par les règles s'appliquant au monde HLM. Seul serait possible, si j’ai bien compris, le transfert d’une partie du parc PLI pour servir de base à la filiale. Mais c’est déjà du logement intermédiaire, et donc pas du logement considéré comme relevant du logement social encadré habituel.
Je veux le dire à M. Delattre : il n’y a pas de porosité possible entre les deux types de logements.
Quant à la vente d’HLM, je pense qu’elle est possible, mais vous verrez que, en dépit d’organismes très bénévolents en la matière, la capacité à acheter des locataires est, hélas ! bien inférieure à leurs souhaits.
Mme la présidente. L'amendement n° 1380, présenté par Mme Assassi, M. Le Scouarnec et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Après l’article L. 302-6 du code de la construction et de l’habitation, il est inséré un article L. 302-6-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 302-6-1. – Pour l’inventaire mentionné à l’article L. 302-6, chaque logement locatif social est affecté d’un coefficient égal à 1. Toutefois, pour les logements financés à partir du 1er janvier 2016, chaque logement financé à l’aide d’un prêt locatif aidé d’intégration est affecté d’un coefficient de 1,5 et chaque logement financé à l’aide d’un prêt locatif social d’un coefficient de 0,5. »
La parole est à M. Patrick Abate.
M. Patrick Abate. Cet amendement tend à favoriser la production de logements très sociaux.
En effet, la part des financements de logements financés à l’aide d’un prêt locatif aidé d’intégration – PLAI –, destinés aux publics les plus défavorisés, ne représente encore que le cinquième des financements accordés.
Dans le même temps, les logements financés à l’aide d’un prêt locatif social – PLS –, dont les loyers sont souvent inaccessibles pour les foyers les plus modestes, n’en accueillent qu’un tiers.
Je rappelle qu’en juin 2012 un rapport d’information sénatorial du regretté Claude Dilain et de Gérard Roche, intitulé Le droit au logement opposable à l’épreuve des faits, pointait du doigt ces difficultés et montrait que les logements sociaux intermédiaires sont plutôt attribués à la classe moyenne, alors que 66 % des requérants DALO – et c’est à ceux-là que l’on s’intéresse – présentent des ressources si faibles qu’ils relèvent d’un PLAI.
Au regard des besoins de logements recensés pour les personnes les plus défavorisées, il faut donc inciter les communes à produire plus de logements à caractère très social et à ralentir la production de PLS. Aussi, à travers le présent amendement, il est proposé, à partir du 1er janvier 2016, d’affecter un coefficient incitateur de 1,5 aux PAI et de 0,5 aux PLS lors du décompte opéré chaque année par le préfet.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Si l’on conçoit l’intention des auteurs de l'amendement, à savoir favoriser la production de logements très sociaux, la réduction que vous proposez, qui s'appliquerait à ces logements, risquerait au contraire de rigidifier et de complexifier le système sans pouvoir s'adapter, au cas par cas, aux besoins des communes.
Aussi, l’avis est défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État. L’avis est également défavorable. D’abord, pour la raison qui vient d’être évoquée : le risque d’une « décorrélation » entre la production de logement social et l’analyse locale des besoins au plus près des populations. Ensuite, en raison d’un grand risque de complexification du dispositif. Enfin, parce que la loi en vigueur oblige déjà à faire du logement très social pour les communes carencées, c'est-à-dire celles qui n’ont pas respecté leurs obligations de réaliser au moins 30 % des logements sociaux en PLAI, et 20 à 30 % en PLS.
Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Abate, pour explication de vote.
M. Patrick Abate. Je comprends ces arguments, qui sont tout à fait fondés : faut-il légiférer sur ce qui peut être considéré comme relevant d’un intérêt local et retirer au niveau local sa capacité à appréhender le problème ? Mais toute la problématique est ainsi faite : des communes vous expliqueront très tranquillement que, sur leur territoire, elles n’ont pas besoin de logement social ni de se soumettre à la loi…
Dans le cadre de la fracture territoriale qui s'approfondit dans notre pays, les populations les plus mobiles se trouvent dans les communes dont le potentiel fiscal est le plus élevé et l’effort fiscal le moins élevé. Elles ont fui ces fameuses communes à faible potentiel fiscal, mais où l’effort fiscal est extrêmement important, communes concentrant les populations les moins mobiles qui, elles, n’ont pas le choix de partir. À cet égard, les périphéries un peu privilégiées des grandes villes ressemblent bien peu à certaines banlieues…
Si je comprends votre argumentation, je ne la retiens pas, car elle correspond globalement à la philosophie du texte.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Nous avons eu cette discussion, qui porte sur l’application de la loi SRU, lors de l’examen de la loi ALUR, lorsque nous nous sommes interrogés sur la pertinence de créer un coefficient qui favorise les PLAI, plutôt que les PLS.
Après de longues discussions, nous avons conclu de façon assez unanime que l’idéal était plutôt d’augmenter partout la production de logements à prix abordable. Je rappelle en effet que les logements conventionnés sont compris dans le périmètre de la loi SRU.
S’il fallait créer un coefficient, tel que le souhaitent les auteurs de cet amendement, il me semble qu’il conviendrait plutôt de valoriser celui qui est appliqué au PLAI, plutôt que d’abaisser celui qui est affecté au PLS. Sans cela, les prêts locatifs à usage social, les PLUS, seraient favorisés au détriment des PLAI.
Dès lors, faisons plutôt appliquer la loi SRU. Le débat sur les PLAI, quant à lui, porte surtout sur leur financement. Nous aurons donc l’occasion d’en discuter lors de l’examen du projet de loi de finances.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 23 quinquies.
(L’article 23 quinquies est adopté.)
Article 23 sexies
(Non modifié)
L’ordonnance n° 2014-159 du 20 février 2014 relative au logement intermédiaire est ratifiée.
Mme la présidente. L’amendement n° 19, présenté par Mme Assassi, M. Le Scouarnec et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Non seulement cet article invite les parlementaires à ratifier une énième ordonnance, mais le texte de cette dernière est modifié par le présent projet de loi.
La question de l’accès au logement social est à nos yeux trop importante, vous l’avez constaté dans nos interventions, mes chers collègues, pour que cette disposition nous paraisse adaptée. Il suffit de lire le dernier rapport de la Fondation Abbé Pierre sur cette question, et de constater que 60 % seulement de la demande en logement social est satisfaite, pour s’en convaincre.
Nous considérons que le principe de sincérité des débats parlementaires est bafoué. C’est pourquoi nous proposons la suppression du présent article.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. La commission spéciale ne peut qu’être défavorable à un amendement qui tend à supprimer un article qu’elle a adopté sans modification.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Axelle Lemaire, secrétaire d’État. Le développement du parc de logements intermédiaires est l’un des objectifs du plan de relance du logement.
À travers cet amendement, vous refusez, mesdames, messieurs les sénateurs du groupe CRC, de ratifier une ordonnance qui vient offrir des mesures complémentaires pour les outils financiers en faveur du logement intermédiaire. Parmi ces mesures figurent la définition du logement intermédiaire, la possibilité d’intégrer du logement intermédiaire au sein des programmes locaux de l’habitat, la clarification du zonage, ou encore l’obligation pour les bailleurs sociaux de rendre étanche la production de logements par la création de filiales.
La ratification de cette ordonnance doit permettre de disposer de tout cet éventail d’outils complémentaires, qui sont nécessaires à la relance du logement, et notamment du logement intermédiaire.
Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Dubois, pour explication de vote.
M. Daniel Dubois. Lorsque nous avions discuté de cette ordonnance, je m’étais battu contre ce qui me semblait une incohérence : le Gouvernement demandait à légiférer par ordonnance sur le logement intermédiaire quand nous aurions pu traiter de ce sujet dans nos débats sur la loi ALUR.
La loi ALUR a été votée, et je me rends compte que la fameuse ordonnance sur le logement intermédiaire n’est ratifiée qu’aujourd’hui, au sein de ce projet de loi.
Trop, c’est trop ! À titre personnel, je voterai donc cet amendement déposé par le groupe CRC.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 1382, présenté par Mme Assassi, M. Le Scouarnec et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
À la seconde phrase du IV de l’article 232 du code général des impôts, le taux : « 12,5 % » est remplacé par le taux : « 15 % » et le taux : « 25 % » est remplacé par le taux : « 30 % ».
La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud. En matière de logement, il faut peut-être rappeler des chiffres qui peuvent paraître paradoxaux. Alors que 3,5 millions de personnes sont mal logées, que 10 millions sont touchées par la crise du logement, que 150 000, dont 30 000 enfants, vivent sans domicile fixe, de nombreux logements restent vacants. En dix ans, le nombre de logements vides en France est passé de 1,9 million en 2004 à 2,64 millions en 2014. Le taux de vacance a ainsi grimpé de 6,3 % à 7,8 %.
Il est certes possible de rétorquer qu’en les libérant tous, cela ne suffirait pas pour loger tous ceux qui attendent d’être logés.
Néanmoins, inciter les propriétaires pourrait porter ses fruits. Tel est le sens de cet amendement, qui tend à doubler la taxe annuelle sur les logements vacants, qui ne s’applique qu’aux logements restés vacants au moins deux années consécutives, et ce afin de décourager la vacance spéculative.
Mme la présidente. L’amendement n° 1468 rectifié, présenté par Mme Lienemann, est ainsi libellé :
Compléter cet alinéa par un paragraphe ainsi rédigé :
… - À la première phrase de l’article L. 254-8 du code de la construction et de l’habitation, après le mot : « contrats », sont insérés les mots : « de bail réel immobilier ».
La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Il s’agit d’une tout autre question que celle qui a été évoquée à l’instant par Thierry Foucaud.
Cet amendement vise à rendre opérationnel le bail réel immobilier, lequel, je vous le rappelle, mes chers collègues, sert de base au logement intermédiaire. Il constitue en effet une mesure pour lutter contre la spéculation de longue durée, sur le foncier notamment. Il est en particulier très utile pour ce qui est du foncier différé.
Cet amendement vise à apporter une précision à l’article L. 254–8 du code de la construction et de l’habitation, en ajoutant après le mot « contrats » les mots « de bail réel immobilier. En effet, si les articles L. 254–4 et L. 254–5 du même code prévoient explicitement le régime de la nullité des contrats respectivement de location ou de cession de droits réels successifs, issus du contrat de bail réel immobilier, leur rédaction, trop générale, qui ne spécifie pas dans un des articles le bail réel immobilier, est source de confusion.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. La commission est défavorable à l’amendement n° 1382, pour deux raisons.
Il nous semble d’abord important de limiter l’augmentation des impôts et autres taxes. Plutôt que de punir, en doublant la taxe dédiée, les propriétaires de logements vacants, il conviendrait de réfléchir aux causes de ce phénomène. Cela permettrait d’élaborer des mesures incitatives,…
M. Charles Revet. Très bien !
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. … afin que les propriétaires remettent des logements sur le marché.
Sur la forme, ensuite, nous l’avons dit voilà un instant, il ne paraît pas souhaitable de supprimer la ratification de l’ordonnance relative au logement intermédiaire, prévue à l’article 23 sexies.
L’amendement n° 1468 rectifié, quant à lui, vise à préciser que le régime de nullité des contrats prévu à l’article L. 254–8 du code de la construction et de l’habitation s’applique aux contrats de bail réel immobilier.
Il s’agit d’une précision utile. L’avis de la commission spéciale est donc favorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Axelle Lemaire, secrétaire d’État. Le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 1382.
Je vais me permettre de vous rappeler, mesdames, messieurs les sénateurs, ce qui fut l’objet de la réforme de la taxe sur les logements vacants, adoptée récemment.
Le périmètre de l’application de la taxe a été étendu aux communes qui appartiennent à une zone d’urbanisation continue de 50 000 habitants, au lieu de 200 000 habitants auparavant.
En outre, la vacance est désormais entendue de manière beaucoup plus stricte.
Enfin, le taux de la taxe a été porté à 25 %, et ce dès la deuxième année du constat de la vacance.
Cette réforme a déjà conduit à une forte augmentation du nombre de logements imposables car considérés comme vacants : ils étaient 90 000 l’année précédant la réforme ; ils sont aujourd’hui 250 000. Les recettes de l’État en la matière vont donc passer de 21 millions d’euros à 51 millions d’euros.
Concernant l’amendement n° 1468 rectifié, déposé par Marie-Noëlle Lienemann, le Gouvernement y est favorable puisqu’il tend à apporter une précision utile. Il vise en effet à sécuriser la rédaction de la disposition du code de la construction et de l’habitation portant sur le régime de la nullité du contrat de bail réel immobilier, qui est aujourd’hui confuse.
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Néri, pour explication de vote sur l’amendement n° 1382.
M. Alain Néri. Le nombre de logements vacants en France est trop important. On peut en identifier deux catégories.
La première est composée de ceux qui ne sont pas susceptibles de constituer un logement décent. Nous aurions peut-être intérêt à réfléchir aux aides à apporter aux propriétaires bailleurs afin de leur permettre d’améliorer la qualité du logement qu’ils pourraient offrir à ceux qui en cherchent un.
Il y a donc un effort à faire, madame la secrétaire d’État, en faveur des aides de l’État en la matière. Aider les opérations programmées d’amélioration de l’habitat – OPAH –, par exemple, c’est améliorer l’habitat, d’abord, donner du travail aux entreprises locales, ensuite, et revivifier les bourgs-centres, où se situent la plupart des logements concernés, enfin.
On peut ranger dans la seconde catégorie de très nombreux logements vacants. Il s’agit souvent de logements que certains de nos concitoyens ont construits ou achetés dans l’idée de les louer pour améliorer leur retraite. Cela explique que nombre de personnes retraitées en sont aujourd’hui propriétaires.
Or il arrive malheureusement trop souvent que le loyer ne soit pas payé, ou que, pire encore, le logement soit rendu dans un état dégradé à la fin de la période de location, quand c’en est une.
Le bailleur peut donc estimer préférable de ne pas louer un logement, plutôt que de ne pas percevoir de loyer ou de le retrouver dans un tel état.
C’est en voyant quel est le vrai problème que nous pouvons apporter une vraie solution. À mon sens, la vraie solution, c’est la mise en place d’un fonds national de garantie des loyers qui fonctionne réellement ! Aujourd’hui, en effet, ce n’est pas le cas.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Eh oui !
M. Alain Néri. Ce fonds pourrait voir sa gestion confiée aux offices d’HLM, qui savent faire payer les loyers et entretenir les logements. Cela permettrait de remettre un certain nombre de logements à disposition très rapidement. Comme pour les OPAH, en effet, on peut faire de ces logements des logements dignes très rapidement, puisqu’il s’agit uniquement de travaux de second œuvre. La construction de logements neufs, elle, requiert un délai minimal de trois ou quatre ans.
Je suggérerai donc à nos collègues du groupe CRC de bien vouloir retirer cet amendement, afin de demander, avec nous, qu’une réflexion s’engage sur la mise en place d’un véritable fonds national de garantie des loyers. Les logements qui en profiteraient pourraient être conventionnés. Il me semble que tout propriétaire préfère un loyer assuré, même plus faible, à l’absence de loyer.
Cette création permettrait de mettre nombre de logements vacants sur le marché, et donc d’apporter un complément de ressources aux retraités bailleurs, qui pourraient ainsi vivre plus dignement.
Mme la présidente. La parole est à M. Thierry Foucaud, pour explication de vote.
M. Thierry Foucaud. Mme la corapporteur a indiqué, au moment de défendre la position défavorable de la commission sur l’amendement n° 1382, qu’il fallait réfléchir aux causes de l’existence des logements vacants. Je n’y vois pas d’opposition ; c’est d’ailleurs ce que nous demande aussi de faire Alain Néri.
En revanche, je ne comprends pas pourquoi il faut réfléchir à la question posée par les logements laissés vacants par leur propriétaire, quand on nous impose la ratification de l’ordonnance sur le logement intermédiaire – je rappelle, mes chers collègues, que seules 60 % des demandes sont satisfaites – sans nous accorder le débat que nous demandons sur cette question.
Nous voulons bien que l’on réfléchisse, nous acceptons le débat notamment sur la question de la garantie de loyer, qu’il faudrait appliquer…
M. Roland Courteau. Tout à fait, ce n’est pas appliqué !
M. Thierry Foucaud. … car elle existe – n’est-ce pas, madame Lienemann... (Mme Marie-Noëlle Lienemann opine.) Je suis contre les faux semblants et les faux débats. Pour montrer que nous sommes capables de réfléchir ensemble, même si vous avez voté l’ordonnance, alors que nous sommes contre et que nous voulons tout de suite du logement social, nous retirons cet amendement ; de toute façon, il n’aurait pas été adopté. Nous vous proposons de nous livrer ensemble à une réflexion sur la façon de taxer ces logements vacants pour redonner du fond – du moins je l’espère – en faveur du logement social qui fait défaut en France.
Mme la présidente. L'amendement n° 1382 est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 1468 rectifié.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 23 sexies, modifié.
(L'article 23 sexies est adopté.)
Article 23 septies (nouveau)
Après l’article L. 421-12-1 du code de la construction et de l’habitation, il est inséré un article L. 421-12-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 421–12–2. – L’office et le directeur général peuvent décider par convention des conditions de la rupture du contrat qui les lie. Le président et le directeur général conviennent des termes de la convention lors d’un entretien préalable à la rupture, au cours duquel chacun peut être assisté par la personne de son choix. La convention de rupture définit le montant de l’indemnité de rupture. Cette disposition n’est pas applicable aux fonctionnaires détachés dans l’emploi de directeur général.
« Les conditions d’application du présent article, notamment la définition des modalités de calcul de l’indemnité de rupture, sont précisées par voie réglementaire. » – (Adopté.)
Article additionnel après l'article 23 septies
Mme la présidente. L'amendement n° 817 rectifié bis, présenté par M. Gabouty, Mme Loisier, MM. Guerriau, Médevielle, D. Dubois et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :
Après l’article 23 septies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le 1° du I de l'article L. 122–2 du code de l'urbanisme est abrogé.
La parole est à M. Jean-Marc Gabouty.
M. Jean-Marc Gabouty. La loi du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, dite loi ALUR, a introduit, via l’article L. 122–2 du code de l’urbanisme, des dispositions visant à limiter l’urbanisation pour les communes qui ne sont pas couvertes par un schéma de cohérence territoriale, un SCOT.
Si ces dispositions se comprennent pour les zones naturelles, agricoles ou forestières, et les secteurs non constructibles visés par l’article L. 122–2 du même code, il est cependant paradoxal qu’elles concernent également les zones à urbaniser des plans locaux d’urbanisme.
Identifiées comme telles, ces zones doivent pouvoir s’ouvrir à des projets de logements, sans qu’il soit nécessaire de recourir à de lourdes procédures dérogatoires qui ont pour conséquence de freiner les projets d’urbanisme alors même que la demande de logement est significative.
On constate dans le domaine de l’urbanisme une complexification des procédures, un alourdissement et une extension des délais qui vont à l’encontre de l’objectif visé, à savoir la construction de logements.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. La commission spéciale a émis un avis défavorable.
Il s’agit, ici, de remettre en cause le principe d’urbanisation limitée, qui, je le rappelle, permet, par le recours au SCOT, d’éviter un étalement urbain non contrôlé.
Il me paraît essentiel que l’on préserve une certaine cohérence dans l’aménagement urbain entre les différents plans locaux d’urbanisme.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État. Le Gouvernement est également défavorable à cet amendement.
Il n’est pas possible que le Sénat souhaite encourager le mitage des territoires ainsi qu’une urbanisation incontrôlée, qui se développerait, notamment, au détriment des zones agricoles.
Le principe d’urbanisation limité est issu de la loi SRU. Il a été renforcé dans le cadre de la loi ALUR. Il empêche l’ouverture à l’urbanisation de nouvelles zones à urbaniser dans les communes qui sont non couvertes par un SCOT. À compter du 1er janvier 2017, ce principe sera étendu à l’ensemble des communes non couvertes par un SCOT. C’est un encouragement majeur en faveur d’un aménagement du territoire respectueux des grands équilibres et vertueux en termes de consommation économe de l’espace.
Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Genest, pour explication de vote.
M. Jacques Genest. À titre personnel, je suis très favorable à cet amendement. Aujourd'hui, il est quasiment impossible de construire en France sur presque tout le territoire. Un tel amendement permettrait de libérer un peu la constructibilité sans créer de grands problèmes de mitage. C’est très important, en particulier en zones rurales.
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. Je voterai cet amendement, car l’on rencontre beaucoup de problèmes, notamment dans les communes rurales, pour obtenir un permis de construire.
Mme la présidente. La parole est à M. Charles Revet, pour explication de vote.
M. Charles Revet. Moi aussi, je voterai cet amendement, tout simplement parce que de temps en temps, trop c’est trop !
La raréfaction des terrains a entraîné une augmentation des coûts de ces derniers, ce qui fait que des familles qui pouvaient encore construire il y a dix, vingt ou trente ans ne le peuvent plus aujourd'hui. En effet, le prix du foncier est parfois aussi élevé que celui de la bâtisse elle-même.
Par ailleurs, les services qui instruisent les dossiers, notamment au niveau de l’État, font une application plus que stricte de la législation. (M. Jean-Louis Carrère s’exclame.) Dans mon département, par exemple, une commune a modifié son plan d’occupation des sols pour élaborer un PLU sans prélever un seul mètre carré de terrain agricole, elle ne prévoyait d’utiliser que ce que j’appellerai « les dents creuses ». Or cette commune s’est vue refuser très longtemps l’adoption de son PLU, parce que les aménagements étaient situés trop loin du centre-bourg, alors qu’ils étaient dans des hameaux. Pourtant, je le répète, pas un seul mètre carré de terrain agricole n’était amputé.
Il est un moment où il faut tout de même faire preuve d’un peu de souplesse pour permettre à des familles souhaitant accéder à la propriété, y compris dans des communes rurales, de pouvoir le faire.
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Dubois, pour explication de vote.
M. Daniel Dubois. Lorsque nous avons débattu très longuement de la loi ALUR, beaucoup de collègues dans cet hémicycle ont pris la parole pour souligner que ce texte allait geler un certain nombre de terrains à bâtir sur tout le territoire, en particulier dans les zones périurbaines et rurales. Nous assistons donc à un gel à deux niveaux.
Premier acte, tous les terrains à urbaniser dans le futur qui n’ont pas été construits dans les neuf ans redeviennent zones naturelles.
Deuxième acte, tous les terrains qui sont constructibles dans un PLU sont gelés dans les communes non couvertes par un SCOT. Mme la rapporteur parle de mitage. Mais selon des documents d’urbanisme auxquels les élus ont réfléchi, qu’une décision politique a entérinés et qu’un arrêté préfectoral local a validés, il s’agit de terrains constructibles. Par conséquent, ce ne sont pas des opérations menées à la légère !
On pourrait envisager de bloquer les opérations de construction dans les territoires non couverts par un SCOT si l’on construisait 500 000 logements par an dans ce pays. Mais on en construit moins de 300 000… À un moment donné, il faut que le bon sens l’emporte.
Aujourd'hui, il y a des terrains constructibles dans un certain nombre de territoires. Par ailleurs, de nombreuses personnes souhaitent construire. Mais on le leur interdit en raison d’un certain nombre de dogmes. Je voterai donc cet amendement, des deux mains si je puis dire. (Mmes Annick Billon et Anne-Catherine Loisier applaudissent.)
Mme la présidente. La parole est à M. Pascal Allizard, pour explication de vote.
M. Pascal Allizard. Je suis ennuyé, car j’ai très envie de voter cet amendement.
M. François Patriat. Ne vous retenez pas !
M. Pascal Allizard. Dans quelques minutes, nos collègues Pierre Jarlier et François Aubey présenteront à leur tour deux amendements qui abordent la problématique de la constructibilité dans les zones N. Si j’étais certain que ces deux amendements, qui se ressemblent, étaient acceptés, je pourrais m’abstenir sur celui-ci. À défaut, je voterai l’amendement proposé par Jean-Marc Gabouty.
Je préside aussi un SCOT, comme d’autres ici. Or, Daniel Dubois vient de l’exposer excellemment, on est en train de tout empêcher et de tout bloquer.
M. Charles Revet. Voilà ! C’est absurde !
M. Pascal Allizard. C’est très mauvais à la fois pour le logement, pour l’économie et pour l’emploi. Madame le secrétaire d’État, il faut absolument déverrouiller cela.
M. Jean-Claude Lenoir. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à M. Claude Bérit-Débat, pour explication de vote.
M. Claude Bérit-Débat. Lors de l’examen de la loi ALUR, M. Dubois tenait à peu près le même discours qu’aujourd'hui.
Nos collègues qui siègent à droite dans cet hémicycle disent que l’on ne peut plus construire alors qu’il faut pouvoir le faire. M. Dubois affirme que le SCOT bloque les constructions dans une commune situées dans un PLU. Nous avons également eu ce débat pour le PLUI, le plan local d’urbanisme intercommunal, dont nous redébattrons certainement très rapidement ici même.
M. Jean-Claude Lenoir. Bientôt !
M. Claude Bérit-Débat. Il me semble que l’on mélange ici un peu tout. Le SCOT a une cohérence territoriale. Il me paraît logique d’avoir une telle cohérence à l’échelle d’un territoire plus vaste, comme on peut également l’avoir à l’échelle d’un PLUI à partir du moment où elle existe à l’échelle d’un territoire plus vaste et que l’on puisse avoir une cohérence entre le droit du sol dans une commune, le droit du sol dans une intercommunalité – communauté de communes ou communauté d’agglomération – et le droit du sol dans un schéma de cohérence territoriale qui englobe un territoire beaucoup plus grand.
En écho à l’intervention de mon collègue de Corrèze, élu comme moi d’un département rural, j’indique que les agriculteurs, eux, rappellent que l’urbanisation est responsable de la disparition de l’équivalent d’un département en terre agricole tous les sept ans en moyenne.
M. Charles Revet. C’est totalement faux !
M. Claude Bérit-Débat. Un agriculteur, absent aujourd'hui, nous l’a encore redit il n’y a pas très longtemps. Soyons donc vigilants. Un SCOT ne prend pas uniquement en compte la construction de logements, mais englobe également des sujets comme l’économie, la place accordée à l’agriculture, à la forêt, etc. Bref, il s’agit d’un ensemble de réflexions.
Personnellement, je suis très favorable à ce que l’on continue à mettre en place ce qui a été prévu par la loi ALUR. Je le dis non pas parce que j’ai participé à son élaboration, mais parce qu’il s’agit de dispositions de bon sens en termes d’aménagement du territoire.
Je suis donc contre l’amendement n° 817 rectifié bis, et je vous invite, mes chers collègues, à ne pas le voter. (M. Jean-Claude Lenoir s’exclame.)
M. Jacques Chiron. Très bien !
M. Francis Delattre. Et moi je vous invite à faire le contraire !
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Grand, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Grand. Madame le secrétaire d’État, j’appelle votre attention sur un problème de société. Finalement, vous avez décidé que les Françaises et les Français devaient vivre dans de l’urbain dense, au milieu d’immeubles dont vous déciderez de la hauteur. Ça, on n’en veut plus ! (Applaudissements sur plusieurs travées de l'UMP et de l’UDI-UC.)
Je suis maire d’une ville en zone urbaine depuis trente-deux ans. Aujourd'hui, je n’ai plus aucun pouvoir. On me répond sans cesse : immeubles, immeubles, immeubles !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. N’importe quoi !
M. Jean-Pierre Grand. Moi, je dis : immeubles, mais aussi autres formes de constructions.
Je comprends mes collègues. J’ai été député. Qu’ai-je constaté dans ma circonscription, et maintenant dans mon département ? J’ai vu des maires qui n’arrivaient pas à construire de petits lotissements.
M. Jean-Claude Lenoir. Eh oui !
M. Jean-Pierre Grand. Ils s’entendaient répondre : les gens n’ont qu’à aller à Montpellier où il y a des immeubles ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
Aujourd'hui, nous sommes confrontés à un problème sociétal. Quelle société voulons-nous ? Comment souhaitons-nous que nos concitoyens se logent ? Madame, je ne suis pas certain que ce que vous proposez à nos concitoyens soit ce qu’ils souhaitent pour eux-mêmes et pour leur famille. (Applaudissements sur plusieurs travées de l'UMP et de l’UDI-UC.)
Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote.
M. Gérard Longuet. Je suis totalement favorable à cet amendement, qui a été excellemment défendu, notamment par M. Dubois. Je n’aurais donc pas la prétention de dire plus et mieux, car les arguments avancés sont nourris de l’expérience. Seulement, nous butons sur un petit problème.
Nous avons devant nous, au banc du Gouvernement, un excellent secrétaire d’État chargé du numérique. Il pourrait nous répondre sur le numérique en milieu urbain ou en milieu rural.
Mme Nicole Bricq. C’est élégant !
M. Gérard Longuet. On aurait d'ailleurs pu imaginer qu’il soit à l’Assemblée nationale cet après-midi puisqu’on y traite du numérique en matière de renseignement.
Si nous avions un ministre (Une ministre ! sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.) ayant une compétence en matière d’aménagement du territoire, d’urbanisme, voire d’environnement ou encore sur le terrain économique de la construction, le Gouvernement aurait peut-être eu un peu plus de liberté : l’amendement de votre groupe, cher collègue Daniel Dubois, aurait éventuellement pu recueillir un avis de sagesse, le ministre (Exclamations sur les mêmes travées.), convaincu par vos arguments, ayant la possibilité de prendre un peu de recul. Or c’est un secrétaire d’État qui ne peut pas prendre de recul : permettez-moi de le déplorer ! (Applaudissements sur certaines travées de l'UMP.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Outre le fait que je ne trouve guère élégant d’appeler Mme la secrétaire d’État « madame le secrétaire d’État », monsieur Longuet, alors que vous savez que c’est maintenant la règle,…
Mme Annie David. C’est plus qu’inélégant !
M. Francis Delattre. Vous avez fait bien pis !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. … la manière dont vous présentez les choses me paraît très méprisante. Vous avez été ministre, et il a dû vous arriver de devoir représenter le gouvernement sur des sujets qui ne relevaient pas de votre compétence principale,…
M. Roland Courteau. Exactement !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. … mais vous étiez accompagné de collaborateurs et disposiez par ailleurs d’une information qui vous permettait de répondre. Votre remarque me semble d’autant plus inacceptable. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Pour en revenir à l’amendement, nous avons déjà eu ce débat plusieurs fois. Je vous le dis tout net, vous êtes caricaturaux lorsque vous voulez nous faire croire que notre vision de la France serait d’envoyer tout le monde dans des immeubles en ville.
M. Jean-Pierre Grand. C’est ce que vous faites !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Ce n’est pas du tout le cas ! Je vous donne un exemple. De nombreux centres-bourgs se dévitalisent parce qu’on a construit à leur périphérie une masse de lotissements.
M. Jacques Genest. Il n’y a pas que Paris en France !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Je ne parle pas de Paris, mon cher collègue ! Je pense au Massif central, à toutes les opérations que le dispositif Pinel est en train de financer dans les centres-bourgs de nos régions, lesquels sont dévitalisés parce qu’on a laissé l’étalement urbain s’opérer. Or il est très difficile de revitaliser des centres-bourgs, notre collègue de Saint-Flour pourrait en témoigner puisque sa commune travaille sur cette problématique.
Si vous laissez se développer la « périurbanité », il se produit une dévitalisation à la fois du cadre patrimonial, du commerce et de la mixité en centre-bourg. Les seuls opérateurs qui interviennent, ce sont ceux des logements sociaux et très sociaux. Je connais d’ailleurs des coopératives d’HLM qui construisent dans les villages de l’Hérault, monsieur Grand. C’est de cela dont je veux vous parler !
Vous caricaturez le débat ! Le SCOT doit protéger l’agriculture, permettre le renouveau des centres-bourgs, mais aussi garantir une urbanisation maîtrisée, car la terre est un bien rare. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. Francis Delattre. Blablaba !
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Le Scouarnec, pour explication de vote.
M. Michel Le Scouarnec. Si les villes sont obligées de construire en hauteur, c’est à cause du prix du foncier et pour ne pas consommer trop de terres agricoles.
Pour avoir été vice-président d’une communauté de communes et maire de la ville-centre,…
M. Bruno Sido. Cumulard ! (Sourires sur les travées de l’UMP.)
M. Michel Le Scouarnec. … je peux témoigner que mon intercommunalité a adopté un programme local de l’habitat à l’unanimité, toutes tendances politiques confondues. Je me dis donc que, grâce à une bonne connaissance des communes – leur superficie, les demandes des habitants… –, on peut élaborer un document d’urbanisme de manière consensuelle. Il y a du bon sens dans nos territoires. Faisons-leur confiance !
Bien sûr, l’adoption d’un SCOT suppose une longue période d’étude, ce qui est un frein au développement économique et à l’habitat. Chez nous, cette période a duré dix ans, et la situation est sans doute pareille ailleurs.
On ne peut pas faire comme si le besoin d’économiser le foncier pour l’agriculture n’était pas réel. Les maires des autres communes dites rurales ont bien compris qu’il fallait commencer à créer un habitat semi-collectif et concentrer un peu la population dans les bourgs. Cela étant, la surface de parcelle n’était pas la même dans la ville-centre et dans les communes de 2 000 ou 2 500 habitants.
Les maires sont assez intelligents pour élaborer, avec leur conseil municipal, un plan de développement de l’habitat cohérent avec les besoins de la population.
M. Charles Revet. Il faut faire confiance aux maires !
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. En Corrèze, il y a de très petites communes qui ne possèdent ni PLU ni carte communale.
Les maires ne sont pas forcément tous idiots : ils veulent conserver l’agriculture, mais ils voudraient aussi, sans gêner celle-ci, pourvoir construire dans leur commune ou leur hameau. Or même après une délibération du conseil municipal, pour des parcelles qui sont raccordées à l’eau, à l’électricité et qui ne nuisent pas à l’agriculture, les avis sont défavorables. Je souhaite donc que la loi soit moins draconienne.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-François Longeot, pour explication de vote.
M. Jean-François Longeot. Quelque chose me gêne dans ce débat : on montre du doigt les communes qui ne respectent pas la loi SRU en matière de logement social et, dans le même temps, on leur interdit de construire. J’aimerais un peu plus de cohérence !
Les maires ruraux ne sont pas des imbéciles ; ils sont capables de réfléchir…
M. Charles Revet. Exactement !
M. Jean-François Longeot. … et de se concerter avec les agriculteurs, même s’ils n’ont pas de document d’urbanisme, pour trouver des lieux à la fois pour permettre à l’agriculture de se développer et pour réaliser des constructions.
On ne peut pas laisser nos collectivités dans cette situation ! (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC, ainsi que sur certaines travées de l’UMP.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marc Gabouty, pour explication de vote.
M. Jean-Marc Gabouty. Je voudrais rappeler que cet amendement concerne des zones qui ont été classées « à urbaniser » dans des documents d’urbanisme approuvés.
L’absence de SCOT gèle le dispositif. Le problème, cela a été dit, c’est qu’il faut quatre à dix ans pour réaliser un SCOT. Au début des années 2000, on révisait un PLU en dix-huit mois, pour 15 000 euros. Aujourd'hui, il faut trois ans et demi, et cela coûte 40 000 euros ! Si c’est ainsi que l’on encourage un urbanisme maîtrisé, c’est tout de même paradoxal. D’un côté, on demande aux maires d’appuyer sur l’accélérateur pour la construction de logements et, de l’autre, l’État appuie sur le frein avec des contraintes excessives d’urbanisme. Dans ces conditions, comment voulez-vous avancer en matière de politique du logement ?
Il ne s’agit pas de ne pas tenir compte des documents d’urbanisme et de certaines orientations d’utilisation économe du territoire, y compris en matière agricole. Je suis un maire périurbain, dans le Massif central, et mon centre-bourg est revitalisé, avec de la mixité - on peut arriver à faire de la mixité, c’est un problème de volonté !
M. Charles Revet. Bien sûr !
M. Jean-Marc Gabouty. Dans ces secteurs, vous avez des zones à urbaniser qui sont de grandes « dents creuses » devenues matériellement impropres à l’exercice de l’agriculture, à l’exception de l’agriculture de proximité – je pense en particulier au maraîchage.
Nous instaurons donc des contraintes tout à fait excessives qui vont à l’encontre de l’objectif de la construction de logements. Je rappelle que cela ne concerne pas les zones agricoles. Il est vrai que les agriculteurs sont contre. Cela dit, il faut également reconnaître que ceux-ci sont parfois ravis de réaliser quelques plus-values en vendant leurs terrains. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC.)
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État. Je remercie Mme la sénatrice Lienemann d’être venue à mon secours…
M. Francis Delattre. Si le Gouvernement en est là,…
M. Éric Doligé. … la France va mal !
Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État. … pour regretter la manière dont le sénateur Gérard Longuet a abordé ce débat. Je me suis habituée à être appelée « Mme le secrétaire d’État » et je ne l’avais même pas remarqué. Cela m’a cependant remémoré la surprise qui fut la mienne, la première fois que j’ai été élue et que j’ai réalisé que certains parlementaires – souvent d'ailleurs les plus conservateurs, les plus caricaturaux, les plus réactionnaires – n’avaient pas compris que le monde avait changé, que les femmes faisaient aussi de la politique. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.) Sachez en outre que c’est une caractéristique toute féminine que de savoir faire plusieurs choses à la fois. (Sourires.) J’ai donc entendu votre argument pendant que je préparais le mien.
Sur le fond, la position du Gouvernement est équilibrée. Nous entendons, vous le constaterez dans la suite des débats, la demande des élus locaux de libérer une partie du foncier dans les zones rurales pour le logement. Nous le faisons, par exemple, grâce au prêt à taux zéro pour la rénovation de l’ancien dans les centres-bourgs. Nous sommes également très conscients et mobilisés sur le sujet de la protection de la nature et de ces zones rurales, qui assurent une grande diversité du paysage et de l’environnement dans notre pays. C’est sur la base de cet équilibre, qui se veut réaliste et pragmatique, que je suggère que nous continuions le débat autour des amendements qui restent à examiner.
Mme la présidente. La parole est à M. Éric Doligé, pour explication de vote.
M. Éric Doligé. Mesdames, présidente et secrétaire d’État,…
Mme Nicole Bricq. Et sénatrices !
M. Éric Doligé. … et sénatrices, en effet, ou collègues – comme ça, on ne sait pas si c’est féminin ou masculin –, je constate qu’on est dans une société de plus en plus administrée.
M. Bruno Sido. Eh oui !
M. Éric Doligé. Il est donc de plus en plus compliqué de faire avancer les choses. Il m’avait pourtant semblé que ce gouvernement comptait un secrétaire d’État chargé de la simplification…
M. Didier Guillaume. Et il simplifie !
M. Éric Doligé. … afin d’accélérer les procédures, de gagner du temps et de permettre à la France d’aller de l’avant. Or je constate que l’élaboration d’un SCOT coûte trois fois plus cher…
Mme Catherine Deroche, corapporteur. C’est vrai !
M. Éric Doligé. … et demande deux fois et demie plus de temps qu’il y a quelques années.
J’aurais aimé que ce texte apporte des simplifications. C’est pourquoi je voterai l’amendement qui nous est proposé, et je remercie nos collègues de l’avoir déposé. Il convient de résoudre ce problème le plus rapidement possible, car, en l’état, il est vraiment difficile de faire fonctionner nos collectivités.
Je ne sais pas, madame, quelles sont vos responsabilités en dehors d’être membre du Gouvernement, mais si vous étiez maire – vous l’êtes peut-être – d’une commune rurale, vous vous rendriez compte des difficultés que nous rencontrons pour aménager notre territoire, pour construire et faire vivre les entreprises locales. (Applaudissements sur plusieurs travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur.
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Après ces échanges nourris et fort intéressants, ayant écouté avec beaucoup d’intérêt mes collègues de l’UMP et de l’UDI-UC, plus particulièrement les représentants des territoires ruraux, Mme le corapporteur accepte d’être battue sur cet amendement. Je vais donc m’en remettre à la sagesse du Sénat.
Cela étant, je vous inviterai, mes chers collègues, à faire preuve de plus de discipline sur les amendements suivants. (Applaudissements sur les travées de l’UMP, ainsi qu’au banc de la commission.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Louis Carrère, pour explication de vote.
M. Jean-Louis Carrère. Je ne suis pas opposé à ce que Mme la corapporteur s’en remette à la sagesse du Sénat, mais que de subterfuges pour en arriver au vote d’un amendement !
Si je vous comprends bien, mes chers collègues, seraient responsables de tous les maux les gouvernements, qui feraient de mauvaises lois, ou la commission spéciale, qui émettrait de mauvais avis. Pourtant, l’avis de la commission spéciale était intelligent. Vous luttez souvent, et ce quelles que soient les travées sur lesquelles vous siégez, contre le mitage, l’utilisation intempestive de territoires. Or on ne peut pas défendre, d’un côté, l’agriculture et, de l’autre, le laisser-faire.
S’il est un territoire rural, la communauté de communes de la Haute Lande en est un, avec ses vastes étendues si peu peuplées. Le conseil départemental des Landes a eu la volonté politique de procéder à des réserves foncières. Voilà qui est de nature à répondre à la question posée précédemment par notre collègue Charles Revet à propos du prix prohibitif des terrains. Les jeunes du pays peuvent ainsi construire à des prix défiant toute concurrence. Les collectivités locales, à différents niveaux, ont donc agi, au lieu de faire la parlote pour essayer de régler leurs comptes.
Concernant les SCOT, j’ai eu le plaisir de présider, jusqu’il y a quelques semaines, le pays Adour Chalosse Tursan au sein duquel on a mis en place une telle structure, avec, bien sûr, l’assentiment des maires. Certes, c’est compliqué et c’est coûteux, et il n’aurait pas été possible de l’imposer à 100 communes et 78 000 habitants, mais on permet ainsi à deux agglomérations importantes du département – Dax et Mont-de-Marsan –, situées à la périphérie, avec un territoire vaste de la Chalosse et du Tursan, d’avoir une politique cohérente en matière d’habitat au regard de l’utilisation de l’espace et du respect de l’agriculture.
Mes chers collègues, arrêtons les chausse-trapes, même si je les déguste quelquefois avec délectation, et de jouer au plus malin ! On sait qu’on a les outils et qu’il faut de la cohérence. Dans les territoires ruraux, il n’y a rien de pire que le laisser-faire pour essayer d’obtenir les résultats que vous voulez atteindre, et que je partage. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. Charles Revet. Il ne faut pas que les outils publics aboutissent à des blocages !
Mme la présidente. La parole est à M. Bruno Sido, pour explication de vote.
M. Bruno Sido. J’étais probablement le seul ici à ne pas connaître l’article L. 122-2 du code de l’urbanisme. Après l’avoir lu, je comprends mieux pourquoi nos concitoyens votent à 45 %, voire à plus de 50 %, pour le Front national dès le premier tour dans nos campagnes. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. Charles Revet. Voilà !
M. Jean-Louis Carrère. Ça dépend des campagnes !
M. Bruno Sido. Pour résumer cet article, on ne peut plus construire, on ne peut plus élargir les zones de construction dans les communes qui ne sont pas couvertes par un SCOT.
M. Jean-Louis Carrère. C’est un peu vrai !
M. Bruno Sido. On interdit aux habitants d’une commune rurale de construire sur la petite parcelle limitrophe de la commune dont ils sont propriétaires.
M. Jean-Louis Carrère. On peut échanger !
M. Charles Revet. Mais non !
M. Bruno Sido. Pour qui croyez-vous qu’ils ont voté lors des élections départementales ?
Je comprends mieux maintenant pourquoi il faut supprimer l’article L. 122-2 du code de l’urbanisme. C’est la raison pour laquelle je voterai cet amendement. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.
Mme Annie David. Sur la forme, je tiens à dire que, si Mme la corapporteur s’en remet à la sagesse du Sénat, cela ne peut être qu’à titre personnel. (Exclamations sur les travées de l’UMP.)
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Oui, je me suis exprimée à titre personnel ! J’ai même dit que j’acceptais d’être battue sur cet amendement.
M. Charles Revet. Mme le corapporteur a le droit de changer d’avis après avoir écouté l’assemblée !
Mme Annie David. Bien sûr, mais, vous en conviendrez avec moi, elle ne peut pas modifier l’avis de la commission spéciale si celle-ci ne s’est pas réunie.
M. Francis Delattre. Ce n’est pas le politburo !
Mme Annie David. Sur le fond, je ne suis pas loin de partager les propos de notre collègue Jean-Louis Carrère.
Même si la discussion est très intéressante, la question de l’urbanisme mériterait un débat spécifique. Le projet de loi Macron a introduit des dispositions relatives à l’urbanisme – c’est ce qui a incité nos collègues à déposer cet amendement –, mais on est bien loin de la croissance, de l’activité et de l’égalité des chances économiques.
M. Charles Revet. Ce n’est pas notre faute si c’est une loi fourre-tout !
Mme Annie David. Je veux dire aux membres de la commission spéciale que Mmes et M. les corapporteurs ont bien insisté, au moment des débats en commission, sur le fait qu’il fallait rester dans le cadre du projet de loi. Or, là, on va bien au-delà !
Il est dommage que cette question soit traitée en un quart d’heure ou vingt minutes,…
M. Charles Revet. Une demi-heure !
Mme Annie David. … peut-être un peu plus, parce que nous avons les uns et les autres pris le temps d’exposer notre position, alors qu’elle mériterait, je le répète, un examen plus approfondi sur le fond.
M. Didier Guillaume. Très bien !
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 817 rectifié bis.
(L'amendement est adopté.) – (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.)
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 23 septies.
Article 24
I. – Le titre II du livre Ier du code de l’urbanisme est ainsi modifié :
1° Au dernier alinéa de l’article L. 123-1-11, au premier alinéa de l’article L. 123-13-2, à la première phrase du I de l’article L. 123-13-3 et à l’article L. 128-3, après la référence : « L. 127-1 », est insérée la référence : « , L. 127-2 » ;
2° Le chapitre VII est complété par un article L. 127-2 ainsi rétabli :
« Art. L. 127-2. – Le règlement peut délimiter des secteurs à l’intérieur desquels la réalisation de programmes de logements comportant des logements intermédiaires, définis à l’article L. 302-16 du code de la construction et de l’habitation, bénéficie d’une majoration du volume constructible qui résulte des règles relatives au gabarit, à la hauteur et à l’emprise au sol. Cette majoration, fixée pour chaque secteur, ne peut excéder 30 %. Pour chaque opération, elle ne peut être supérieure au rapport entre le nombre de logements intermédiaires et le nombre total de logements de l’opération.
« Cette majoration ne s’applique pas aux logements mentionnés à l’article 199 novovicies du code général des impôts.
« La partie de la construction en dépassement n’est pas assujettie au versement résultant du dépassement du plafond légal de densité. »
II. – À l’avant-dernier alinéa du IV de l’article L. 302-1 du code de la construction et de l’habitation, la référence : « de l’article L. 127-1 » est remplacée par les références : « des articles L. 127-1 et L. 127-2 ».
Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Abate, sur l'article.
M. Patrick Abate. Puisqu’on vient d’adopter un cavalier législatif, je serai rapide… (Sourires.)
L’article 24 duplique pour le logement intermédiaire le dispositif de majoration des droits à construire existant pour le logement social.
La problématique étant la même que précédemment, les positions de chacun seront, par cohérence, similaires. Je vais donc profiter de cette occasion pour rappeler très clairement que notre groupe n’oppose pas le logement intermédiaire au logement social. Nous ne remettons pas en cause l’intérêt de passer de la location à la propriété. Toutefois, nous avons le sentiment – d’ailleurs, vous le savez bien, mes chers collègues, il ne s’agit pas que d’un sentiment – que le projet de loi donne au logement intermédiaire un poids disproportionné eu égard aux immenses besoins à satisfaire dans le domaine du logement social pour combler la fracture territoriale et résoudre les problèmes de mixité. C’est dans cet esprit que nous présenterons deux amendements.
Mme la présidente. L'amendement n° 20, présenté par Mme Assassi, M. Le Scouarnec et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Comme vient de le dire mon collègue Patrick Abate, le logement intermédiaire ne suffira pas à lui seul à résorber la crise du logement. L’urgence réside dans la mise en œuvre de politiques publiques visant à améliorer l’offre de logements sociaux. Et la priorité est de mettre un terme aux expulsions locatives !
Voilà pourquoi nous proposons de supprimer l’article 24.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Nous n’allons pas refaire le débat entre logements intermédiaires et logements sociaux, car nous en avons déjà largement parlé. Je dirai simplement que l’avis est défavorable sur cet amendement, qui vise à supprimer le texte de la commission spéciale.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 20.
J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 145 :
Nombre de votants | 338 |
Nombre de suffrages exprimés | 338 |
Pour l’adoption | 19 |
Contre | 319 |
Le Sénat n'a pas adopté.
M. Bruno Sido. Quelle raclée !
Mme la présidente. L'amendement n° 1383, présenté par Mme Assassi, M. Le Scouarnec et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 4, première phrase
Rédiger ainsi le début de cette phrase :
« Sous réserve du respect par la commune des taux de logements locatifs sociaux fixés à l’article L. 302–5 du code de la construction et de l’habitation, le règlement (le reste sans changement...)
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Comme notre amendement de suppression n’a pas rencontré un franc succès, nous voulons, par cet amendement de repli, obtenir une garantie : l’investissement en faveur du logement intermédiaire ne doit pas se faire au détriment du logement social.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Aux termes de l’ordonnance relative au logement intermédiaire, « lorsqu’une commune fait l’objet d’un arrêté préfectoral de carence […], les dispositions relatives à l’offre de logement intermédiaire prévues par les documents de planification et de programmation sont privées d’effet ». Cette disposition devrait, me semble-t-il, vous donner satisfaction au moins partiellement, ma chère collègue.
Par cet amendement, vous proposez d’aller plus loin, mais cela conduirait à exclure du dispositif des communes qui s’efforcent d’atteindre l’objectif de 25 % de logements sociaux fixé par la loi SRU. Des garanties ont été prises, il ne me semble donc pas nécessaire d’aller plus loin encore. C’est pourquoi la commission spéciale a émis un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Les arguments que Mme la corapporteur a développés sont intéressants et rejoignent un certain nombre de préoccupations que nous avons exprimées. Toutefois, ayant déposé sur ce sujet un certain nombre d’amendements qui n’ont pas été adoptés, nous maintiendrons celui-ci, car nous avons la volonté d’aller plus loin.
Mme la présidente. L'amendement n° 704, présenté par MM. Karoutchi, Calvet, Morisset et Magras, Mme Deromedi, MM. G. Bailly, Sido, Kennel, Doligé et Mayet, Mmes Deseyne et Mélot, MM. Lefèvre, Mouiller et Delattre et Mmes Gruny et Primas, est ainsi libellé :
Alinéa 4, première phrase
Supprimer les mots :
comportant des logements intermédiaires définis à l’article L. 302-16 du code de la construction et de l’habitation,
La parole est à M. Éric Doligé.
M. Éric Doligé. C’est avec plaisir que je défends cet important amendement, qui ne vise qu’à bonifier l’article 24. Ce dernier est d’ores et déjà intéressant, puisqu’il permet de délimiter, au sein des documents d’urbanisme, des secteurs dans lesquels la réalisation de logements intermédiaires pourra bénéficier d’une majoration de constructibilité pouvant aller au-delà de 30 %.
Nous ne pouvons qu’être favorables à cette augmentation de la constructibilité. Notre majorité, je le rappelle, avait proposé d’augmenter le droit à construire de 30 %.
M. Charles Revet. Cette mesure avait été votée !
M. Éric Doligé. Cet amendement vise simplement à ouvrir cette possibilité au-delà du seul logement intermédiaire. Le nombre de logements pouvant être réalisés dans le cadre des 30 % de surface habitable supplémentaire sera beaucoup plus important, ce qui permettra à nombre de nos concitoyens qui rencontrent des difficultés pour se loger de trouver des solutions.
Cette disposition étant assez simple, il est tout aussi simple d’émettre un avis favorable et de le voter… (Sourires sur les travées de l’UMP.)
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Cet amendement vise à proposer que le bonus de constructibilité ne soit pas réservé au seul logement intermédiaire.
On peut saluer la volonté des nombreux auteurs de l’amendement de développer la construction de logements par des mesures fortes. Néanmoins, si l’on adoptait une telle disposition, qui étend le bonus de constructibilité sans distinction, on se demande à quoi servirait encore d’élaborer un PLU. (Eh oui ! sur les travées du groupe CRC.)
Si le règlement fixe des règles de constructibilité, puis de nouvelles règles permettant d’y déroger de manière très large, vous conviendrez que cela risque fort de tourner à l’absurde. Je vous rappelle en outre qu’il existe déjà des bonus de constructibilité très ciblés – pour le logement social, pour le logement intermédiaire, dans le domaine de la rénovation énergétique… Restons-en là ! C’est pourquoi je sollicite le retrait de l’amendement. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à M. Francis Delattre, pour explication de vote.
M. Francis Delattre. Nous connaissons bien cette procédure, qui a été votée et mise en application dans certaines villes.
Par une simple délibération, le conseil municipal peut décider d’une majoration de constructibilité, au sein du PLU, pouvant aller au-delà de 30 % dans certains secteurs. L’objectif est véritablement de s’attaquer au problème du foncier. En milieu urbain, de nombreuses difficultés se posent dans des secteurs entiers.
Mes chers collègues, il ne suffit pas d’être d’accord sur le principe de la loi SRU – faire la ville dans la ville –, il faut aussi prendre des dispositions qui permettent de le mettre en œuvre. Dès lors, permettre que, par une simple délibération, le conseil municipal puisse choisir, de façon complètement libre, les zones pouvant être densifiées, sans que toute la mécanique du PLU soit pour autant remise en question, c’est quand même permettre une offre foncière complémentaire, qui, dans beaucoup de villes, n’est pas inutile, notamment pour ce qui concerne le logement intermédiaire.
Nous pouvons peut-être en discuter encore.
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Oui, la réflexion doit mûrir !
M. Francis Delattre. Cependant, croyez-moi, dans beaucoup de nos villes, surtout dans les secteurs dits « tendus », améliorer la constructibilité n’est pas une mesure inutile – nos collègues des zones urbaines savent de quoi il en retourne ! En réalité, pour beaucoup de projets, c’est, au fond, le problème du foncier qui se pose.
Peut-être M. le ministre pourrait-il y réfléchir de manière approfondie. En effet, alors que le problème du foncier ne se réglera pas du jour au lendemain, la mesure proposée – une libre délibération du conseil municipal – constitue un moyen facile et pratique d’améliorer la situation.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Il suffit de changer le PLU !
Mme la présidente. La parole est à M. Marc Daunis, pour explication de vote.
M. Marc Daunis. Je ne comprends pas. En cas de besoin, il est toujours possible de réviser le PLU. À moins qu’on estime que le PLU a été élaboré par une bande de microcéphales : des élus locaux incapables de discerner ce qui est bon pour leur commune.
M. Bruno Sido. Un peu de mesure !
M. Marc Daunis. Je suis mesuré ! Respecter les élus locaux, c’est partir du principe que l’élaboration du PLU et la définition des droits à construire ont été faites après réflexion et de façon intelligente. Ne mettons pas les élus sous la pression d’un texte de loi qui modifierait automatiquement et de façon indifférenciée, sans critères, le travail de fond intelligent et raisonné qu’ils ont effectué, souvent en concertation avec la population. (Applaudissements sur quelques travées du groupe socialiste.)
M. Francis Delattre. Mais ils délibèrent !
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Dubois, pour explication de vote.
M. Daniel Dubois. Très honnêtement, je trouve que cet amendement est de bon sens.
M. Marc Daunis. Ah oui ?
M. Daniel Dubois. Mais peut-être suis-je un élu microcéphale…
Pourquoi limiter la portée de l’article 24 au logement intermédiaire ? C’est une vraie question ! Si l’objectif de construire 500 000 logements par an était atteint, si notre pays ne connaissait pas de crise du logement, s’il y avait du terrain à bâtir à tous les coins de rue, cela pourrait se comprendre, mais ce n’est pas le cas !
La proposition qui nous est faite consiste à prévoir une délibération du conseil municipal : il suffira que les élus, très certainement après examen du projet avec les opérateurs, donnent leur accord à la densification ou à la construction de logements sur un terrain classé constructible dans le document d’urbanisme. Cette solution est d’une efficacité totale pour améliorer le nombre de logements sur un territoire. Il est quand même beaucoup plus rapide de faire délibérer les élus que de modifier le document d’urbanisme. C’est pourquoi je voterai l’amendement.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Il est proposé d’étendre une mesure qui existe pour le logement social au logement intermédiaire.
Nous avons une règle : le PLU. S’il est possible d’augmenter la densité de logements, c’est aux élus de déterminer, dans le PLU, dans quels secteurs cela doit se faire. C’est aussi à eux de réfléchir à la définition, dans le PLU, d’une densité normale.
Si l’on prévoit une mesure spécifique, c’est pour éviter que le conseil municipal ne donne, délibération après délibération, un bonus de constructibilité et n’ouvre une opportunité financière à chaque opération.
M. Claude Bérit-Débat. Bien sûr !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Vous le savez bien, le droit à construire supplémentaire doit être justifié par un motif d’intérêt général, lequel doit être cadré.
Pour être franche, je ne suis pas fanatique de la mesure proposée : je me serais facilement contentée du logement social. Toutefois, force est de constater qu’on a besoin, dans la période actuelle, de dynamiser un peu le logement intermédiaire. De ce point de vue, l’article 24 vise à reconnaître que les opérations de logement intermédiaire, qui, quoi qu’on en dise, ne sont pas forcément d’une rentabilité mirobolante, relèvent aussi de l’intérêt général et doivent être mieux financées.
Pour ma part, j’estime qu’il est légitime de séparer le tout-venant des opérations présentant un intérêt général – le logement social et le logement intermédiaire. Vous passez votre temps à nous demander des mesures incitatives : en voilà une !
Mme la présidente. L'amendement n° 989, présenté par M. Collomb, Mme Schillinger, MM. Boulard et Patriat, Mme Guillemot et M. Caffet, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - À la première phrase du I de l’article 13 de la loi n° 2014-1545 du 20 décembre 2014 relative à la simplification de la vie des entreprises et portant diverses dispositions de simplification et de clarification du droit et des procédures administratives, après les mots : « L. 111-1-1 du code de l'urbanisme », sont insérés les mots : « , aux sixième et septième alinéas de l’article L. 123-1-1 du même code ».
La parole est à M. François Patriat.
M. François Patriat. Cet amendement vise à aligner la situation de l’établissement public de coopération intercommunale dont le périmètre est modifié alors qu’une révision du plan local d’urbanisme est en cours sur celui dont le périmètre reste inchangé pendant la révision du PLU.
Il s’agit de réparer un oubli de la loi du 20 décembre 2014, qui a étendu les délais imposés par certains textes aux établissements publics de coopération intercommunale pour élaborer ou réviser les plans locaux d’urbanisme intercommunaux, afin qu’ils intègrent les dispositions issues de la loi.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Dans le cas évoqué par M. Patriat, le bon sens veut que, par exception, on proroge les PLU existants sous leur forme antérieure à la loi Grenelle 2 et que la « grenellisation » du document se fasse en une seule fois, pour l’ensemble du territoire de l’EPCI, au moment de l’entrée en vigueur du PLU intercommunal.
La commission spéciale a donc émis un avis favorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Emmanuel Macron, ministre. Sur le fond, comme Mme la corapporteur vient de le dire, il s’agit incontestablement d’une mesure de bon sens. Toutefois, il ne nous semble pas que l’article 13 de la loi du 20 décembre 2014 soit le bon vecteur pour ce faire.
En outre, le Gouvernement, sensible au problème que vous soulevez, entend y répondre à l’article 15 ter A du projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, dit « projet de loi NOTRe », qui est actuellement en cours de discussion. Par conséquent, je vous invite à retirer votre amendement et à défendre la position que vous prônez – une sorte de concordance des temps dans les périmètres entre les différentes collectivités – dans le cadre de ce texte.
Mme la présidente. Monsieur Patriat, l'amendement n° 989 est-il maintenu ?
M. François Patriat. Attendre le projet de loi NOTRe, c’est attendre encore trois mois. Aujourd'hui, certains établissements intercommunaux sont en pleine révision avec des dossiers un peu complexes à traiter, des réunifications… Il me paraît donc difficile d’attendre encore.
Dans ces conditions, je maintiens l’amendement. Nous verrons où nous en sommes au moment de l’examen du projet de loi NOTRe.
M. Marc Daunis. Très bien !
Mme Nicole Bricq. Qui vivra verra !
Mme Catherine Tasca. Absolument !
Mme la présidente. Monsieur le ministre, puisque l’amendement a été maintenu, quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 24, modifié.
(L'article 24 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 24
Mme la présidente. Je suis saisie de six amendements identiques.
L'amendement n° 211 rectifié est présenté par MM. Mézard, Bertrand, Arnell, Castelli, Collin, Esnol et Fortassin, Mmes Laborde et Malherbe et M. Requier.
L'amendement n° 279 rectifié est présenté par Mme Lamure, MM. César, Kennel, Lefèvre, D. Laurent, Calvet, Sido, Laménie et P. Leroy, Mme Primas et MM. Houel, G. Bailly et Gremillet.
L'amendement n° 377 rectifié ter est présenté par MM. Genest, Darnaud, Vaspart, Bouchet, Béchu, Milon et Commeinhes.
L'amendement n° 396 est présenté par MM. Courteau et Guillaume, Mmes Bricq, Emery-Dumas et Génisson, MM. Bigot, Cabanel, Filleul, Marie, Masseret, Raynal, Richard, Sueur, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et apparentés.
L'amendement n° 855 rectifié bis est présenté par MM. Doligé et Cardoux, Mme Cayeux, MM. Charon et Falco, Mmes Garriaud-Maylam et Hummel, M. de Legge, Mme Micouleau et MM. Pointereau, Reichardt, D. Robert et Saugey.
L'amendement n° 1351 rectifié bis est présenté par M. Delattre, Mme Procaccia, M. Mouiller, Mmes Des Esgaulx, Deseyne et Imbert et M. de Nicolaÿ.
Ces six amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 24
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À l’article 22-2 de la loi n° 96-603 du 5 juillet 1996 relative au développement et à la promotion du commerce et de l’artisanat, les mots : « , les coordonnées de l’assureur ou du garant, ainsi que la couverture géographique de leur contrat ou de leur garantie » sont remplacés par les mots : « et les coordonnées de l’assureur ».
La parole est à M. Jacques Mézard, pour présenter l’amendement n° 211 rectifié.
M. Jacques Mézard. Il s’agit d’un amendement de simplification.
La loi du 18 juin 2014 relative à l’artisanat, au commerce et aux très petites entreprises oblige à mentionner sur les devis ou factures les coordonnées du garant, ainsi que la couverture géographique des contrats d’assurance ou de leur garantie. Cette mesure nous semble excessive. En effet, ces précisions représentent pour nos artisans une nouvelle source de complication, alors qu’elles n’apportent pas réellement de garanties supplémentaires aux consommateurs. Nous proposons donc de remplacer cette mention obligatoire par la mention des seules coordonnées de l’assureur.
Mme la présidente. La parole est à Mme Élisabeth Lamure, pour présenter l’amendement n° 279 rectifié.
Mme Élisabeth Lamure. Cet amendement identique tend à simplifier la vie des entreprises.
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Vaspart, pour présenter l’amendement n° 377 rectifié ter.
M. Michel Vaspart. Il est défendu.
Mme la présidente. La parole est à M. Roland Courteau, pour présenter l’amendement n° 396.
M. Roland Courteau. Il n’apparaît en effet pas nécessaire de mentionner sur les devis ou les factures les coordonnées de l’assureur ou du garant, ainsi que la couverture géographique de leur contrat ou de leur garantie. Il s’agit donc bien d’un amendement de simplification.
Mme la présidente. La parole est à M. Éric Doligé, pour présenter l’amendement n° 855 rectifié bis.
M. Éric Doligé. Je soutiens l’amendement de M. Courteau ! (Sourires.)
Mme la présidente. La parole est à M. Francis Delattre, pour présenter l’amendement n° 1351 rectifié bis.
M. Francis Delattre. Il est défendu !
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. La commission spéciale a émis un avis favorable (Ah ! sur les travées de l'UMP.) sur ces amendements identiques, qui visent à simplifier cette exigence légale en la limitant aux coordonnées de l’assureur.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Emmanuel Macron, ministre. L’adoption de ces amendements identiques simplifierait la vie de nos concitoyens, on ne peut le nier.
M. Charles Revet. Pour une fois qu’on peut le faire !
M. Emmanuel Macron, ministre. J’entends vos arguments, mais cette obligation a été introduite par la loi relative à l'artisanat, au commerce et aux très petites entreprises. Un souci de cohérence inter-temporelle de la part du Gouvernement ne peut pas être une mauvaise chose pour les acteurs économiques. (Sourires.) C’est au nom de cette cohérence que je ne peux émettre un avis favorable sur ces amendements identiques, qui visent à supprimer des dispositions que nous avons prises.
Même si cette mesure apporte de la lourdeur pour certains,…
M. Jean-François Husson. De la complexité !
M. Emmanuel Macron, ministre. … elle a son importance pour d’autres : c’est un outil de sécurisation. Si elle a été adoptée, c’est non pas pour le plaisir de rendre plus complexe la vie des artisans, mais pour répondre à une demande de bon nombre de leurs représentants, tels que la CAPEB – la confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment – et d’autres fédérations professionnelles. Il s’agit en effet de protéger les nombreux artisans qui ont une qualification et qui paient leur contrat d’assurance ou leur garantie face à une concurrence parfois déloyale, notamment d’artisans étrangers qui viennent s’installer sur nos territoires avec des règles moins-disantes et qui s’emparent des marchés.
Nous sommes ici face à des prescriptions contradictoires : d’une part, un souci de simplifier et, de l’autre, une volonté de protéger celles et ceux qui se conforment au droit. Nous avons fait le choix de la protection dans la loi relative à l'artisanat, au commerce et aux très petites entreprises. Nous ne pouvons nous dédire.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 211 rectifié, 279 rectifié, 377 rectifié ter, 396, 855 rectifié bis et 1351 rectifié bis.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 24.
Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L'amendement n° 636 rectifié bis, présenté par MM. Jarlier, Kern, Bonnecarrère et D. Dubois, Mme Gatel et MM. Détraigne, Roche, Guerriau et L. Hervé, est ainsi libellé :
Après l’article 24
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le II de l’article L. 123-1-5 du code de l’urbanisme est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Dans les zones agricoles et naturelles, des annexes peuvent être autorisées sous réserve de ne pas compromettre l’activité agricole et la qualité paysagère du site. »
La parole est à M. Daniel Dubois.
M. Daniel Dubois. Une évolution trop stricte des textes a empêché pendant de nombreux mois toute évolution a minima du bâti existant en zone agricole ou naturelle dans nombre de territoires dont l’héritage urbanistique se compose de cet habitat dispersé. Les communes et intercommunalités disposant d’un PLU ou d’un PLUI étaient particulièrement pénalisées.
Une première et sage évolution a permis d’assouplir les choses, mais elle n’est pas allée jusqu’au bout de la logique, empêchant toute construction d’annexes, qui s’avère pourtant parfois indispensable pour l’équilibre social et économique de ces territoires, sans générer de consommation foncière supplémentaire.
En outre, le risque est grand de voir proliférer l’installation illicite de ces annexes, qui, pour la plupart, ne compromettent en rien l’activité agricole.
Telles sont les raisons pour lesquelles il nous paraît important d’apporter ces modifications.
Mme la présidente. L'amendement n° 298 rectifié, présenté par M. Aubey, Mme Tocqueville, MM. Durain, Cabanel, Roux, Antiste et D. Bailly, Mmes Bataille et Blondin, MM. Botrel, Camani, Duran, Daunis et Desplan, Mme Claireaux, M. Cornano, Mmes Emery-Dumas et Jourda, MM. Jeansannetas, J. Gillot et Lorgeoux, Mme Lienemann, MM. F. Marc, Madec et Marie, Mme Monier, M. Montaugé, Mme Perol-Dumont, M. Tourenne, Mme Herviaux et MM. Vincent, Miquel, M. Bourquin, J.L. Dupont et Lenoir, est ainsi libellé :
Après l’article 24
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le II de l’article L. 123-1-5 du code de l’urbanisme est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Dans les zones agricoles ou naturelles et en dehors des secteurs mentionnés au présent 6°, le règlement peut délimiter des périmètres autour des bâtiments existants dans lesquels sont autorisées les annexes, dès lors que cela ne compromet pas l’activité agricole ou la qualité paysagère du site. Le règlement précise alors les conditions de hauteur, d’implantation et d’emprise des annexes, permettant d’assurer leur insertion dans l’environnement et leur compatibilité avec le maintien du caractère naturel, agricole ou forestier de la zone. Les dispositions du règlement prévues au présent alinéa sont soumises à l’avis de la commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers prévue à l’article L. 112-1-1 du code rural et de la pêche maritime. »
La parole est à M. François Aubey.
M. François Aubey. La loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové encadre les possibilités de construction en zones agricoles, naturelles et forestières. Les STECAL, qui sont des secteurs de taille et de capacité d’accueil limitées permettant d’ouvrir la constructibilité dans ces zones, et dont il a souvent été fait un usage abusif, ont dorénavant un caractère exceptionnel.
En dehors de ces secteurs, il est toutefois nécessaire de pouvoir continuer à gérer le bâti existant. C’est pour cette raison que la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt a autorisé les extensions des bâtiments à usage d’habitation. Or il apparaît nécessaire de compléter cette mesure en autorisant également les annexes des bâtiments existants, hypothèse fréquente dans les zones d’habitat dispersé. Il s’agit notamment des garages, des abris de jardin ou pour petits animaux…
C’est dans un souci d’équilibre et avec la volonté de ne pas remettre en cause les principes de gestion économe de l’espace et de protection des milieux naturels et des paysages que j’ai rédigé cet amendement visant à modifier l’article L. 123-1-5 du code de l’urbanisme.
Les dispositions introduites par la loi ALUR ont déjà eu de lourdes conséquences dans nos territoires, au premier rang desquelles la colère légitime des habitants, qui ne comprennent pas pourquoi ils ne peuvent plus avoir d’annexes, autrement dit d’aménagements n’emportant pas de consommation foncière supplémentaire, puisque celles-ci se situent sur des terrains déjà bâtis. Sans compter qu’il y a aussi une multiplication des constructions anarchiques illicites ou encore une baisse de l’activité économique dans les secteurs du bâtiment, de l’artisanat et de la maîtrise d’œuvre.
L’amendement que je vous présente est équilibré et comporte des garanties. Tout d’abord, le règlement graphique délimitera un périmètre excluant toute surface agricole ou naturelle. C’est une évidence, mais je tenais à le rappeler... Ensuite, le règlement devra comporter des dispositions encadrant ces annexes afin de protéger la zone en cause, telles que des conditions de hauteur, d’implantation et d’emprise. Enfin, tout comme pour les STECAL, ces dispositions – autrement dit, la délimitation et les conditions de réalisation des annexes – seront soumises pour avis à la commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers, la CDPENAF.
Mes chers collègues, nos territoires ruraux sont vivants et leurs habitants doivent pouvoir y vivre sereinement, sans contraintes excessives. C’est pourquoi je vous remercie de bien vouloir adopter cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. La commission spéciale sollicite le retrait de l’amendement n° 636 rectifié bis au profit de l’amendement n° 298 rectifié, qui est plus précis et détaillé.
L’amendement n° 298 rectifié vise à ajouter, au sein de l’article L. 123-1-5 du code de l’urbanisme, un nouveau cas d’assouplissement à l’interdiction de construction en zone agricole ou naturelle. Il s’agit de permettre la réalisation, non pas d’extension de bâtiments existants, mais d’annexes, comme les garages par exemple. Les mêmes garde-fous que pour les extensions de bâtiments existants sont prévus : le PLU doit autoriser ces annexes, en définir le périmètre, les règles de hauteur, d’implantation et d’emprise, de façon à ne pas compromettre l’activité agricole ou la qualité paysagère du site. À cela s’ajoute l’avis de la commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers.
De telles conditions paraissent de nature à éviter toute dérive. C’est pourquoi la commission spéciale a émis un avis favorable sur l’amendement n° 298 rectifié.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Emmanuel Macron, ministre. Le Gouvernement comprend le souhait de ne pas geler les constructions d’annexes dans les zones agricoles ou naturelles. Il convient toutefois de concilier l’objectif de développement des territoires et la lutte contre le mitage, c’est-à-dire l’urbanisation inconsidérée qui pourrait exister par ce biais. La construction d’un poulailler ou d’une d’annexe à la limite de ces zones permet à ces territoires et aux habitants de retrouver un peu d’air. Dans le même temps, il est nécessaire d’éviter les dérives.
L’amendement n° 298 rectifié est plus circonscrit que le vôtre, monsieur Dubois. C’est pourquoi je sollicite le retrait de l’amendement n° 636 rectifié bis au profit de celui de M. Aubey.
M. Jean-Claude Lenoir. Très bien !
M. Emmanuel Macron, ministre. La rédaction de votre amendement, monsieur Aubey, me paraît cependant devoir être encore affinée. Il me semble que nous devons utiliser le temps entre le vote du projet de loi par la Haute Assemblée et sa nouvelle lecture à l’Assemblée nationale pour l’améliorer et corriger les éventuelles impuretés qui resteraient.
Cela étant, le Gouvernement partage l’intention qui est la vôtre. C’est pourquoi il s’en remet à la sagesse du Sénat.
Mme la présidente. Monsieur Dubois, l’amendement n° 636 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Daniel Dubois. Je tiens à préciser que je ne suis pas l’auteur de l’amendement n° 636 rectifié bis, mais un cosignataire.
Vous avez indiqué, monsieur le ministre, que la rédaction de l’amendement de M. Aubey nécessitait d’être affinée. J’aimerais savoir si c’est en vue d’étendre le dispositif ou de le restreindre. Limiter la mesure aux abris de jardin et aux garages ne réglera en rien le problème des agriculteurs qui ont besoin d’agrandir un bâtiment d’élevage. On met difficilement une vache dans un abri de jardin !
Si les précisions apportées vont dans le sens d’un assouplissement, je retirerai l’amendement sans hésitation.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Emmanuel Macron, ministre. Je ne vais pas vous mentir : préciser ne signifie pas étendre. Néanmoins, nous souhaitons répondre aux besoins des agriculteurs et des habitants. Par conséquent, l’idée est tout à la fois de ne pas limiter l’extension à l’annexe ou au poulailler et d’éviter le mitage, c’est-à-dire la construction de logements ou de lotissements dans des zones agricoles ou naturelles.
Que les choses soient claires : oui pour faciliter la vie des agriculteurs et des habitants des zones rurales et pour ne pas geler ces territoires, mais non au mitage inconsidéré qui pourrait en découler ! Tel est l’équilibre que je souhaite préserver.
Mme la présidente. Monsieur Dubois, que décidez-vous finalement ?
M. Daniel Dubois. M. le ministre ayant précisé que c’est bien l’activité de l’agriculteur qui est prise en compte, je retire l’amendement.
Mme la présidente. L'amendement n° 636 rectifié bis est retiré.
La parole est à M. Yannick Botrel, pour explication de vote sur l’amendement n° 298 rectifié.
M. Yannick Botrel. J’ai cosigné l’amendement présenté par notre collègue Aubey, parce qu’il est à la fois nécessaire et de bon sens. Élu d’une région d’habitat dispersé – la Bretagne –, j’ai pu mesurer les inconvénients de « l’errance législative » des cinq dernières années en la matière.
Il a toujours été possible, par le passé, de pastiller ou de créer des micro-zones – les deux termes étaient utilisés indifféremment. C’est à la suite de l’annulation du PLU de Châteauneuf-du-Rhône, confirmée par un arrêt du Conseil d’État en 2010, qu’a été mis à mal ce pastillage de l’habitat diffus qui permettait d’attribuer des permis de construire.
Quelques mois plus tard, en juillet 2010, la loi Grenelle 2 a répondu à la situation créée par l’arrêt du Conseil d’État en autorisant le zonage et le pastillage de l’habitat existant. Bien évidemment, il n’a jamais été question de favoriser le mitage : les agriculteurs, en zone agricole, peuvent déposer des permis de construire dès lors que les bâtiments en question sont nécessaires aux besoins de leur exploitation.
Puis, c'est la raison pour laquelle je parle d’« errance législative », la loi ALUR a apporté des restrictions absolument considérables en délimitant les STECAL en petit nombre sur un territoire communal, voire en très petit nombre. Je connais une commune passée d’une centaine de secteurs où il était possible de construire à cinq ou six seulement. En creux, cela revenait à dire qu’aucun autre permis de construire ne pouvait être attribué aux non-agriculteurs dans le secteur agricole ou naturel de la commune et que les avancées de la loi Grenelle 2 n’existaient plus. En septembre 2014, la loi d’avenir pour l’agriculture est venue corriger en partie cette situation : des permis de construire peuvent désormais être délivrés, mais uniquement en cas d’habitations existantes.
À travers cet amendement absolument utile et nécessaire, nous voulons autoriser la délivrance de permis pour la construction d’annexes d’habitations de non-agriculteurs en zone A ou en zone N.
Ce sont tous ces allers et retours, entre 2010 et 2015, qui me font parler d’errance : les communes qui étaient en phase d’élaboration de leur PLU, et parfois à un stade assez avancé de leur réflexion et de leur travail, ont dû intégrer le recul incompréhensible provoqué par la loi ALUR. En votant cet amendement, nous rétablirions une situation logique.
Par ailleurs, je suis sensible à l’argument développé par nos collègues Dubois et Aubey : dès lors qu’une loi n’est pas applicable, le risque est grand de voir des particuliers outrepasser le cadre législatif et construire qui un petit garage, qui un petit abri de jardin.
Pour toutes ces raisons, je voterai cet amendement – ce n’est pas une surprise puisque j’en suis cosignataire –, et je pense que le Sénat devrait l’adopter à l’unanimité.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Lenoir, pour explication de vote.
M. Jean-Claude Lenoir. Je voudrais féliciter François Aubey de l’initiative qu’il a prise. Il a déposé un excellent amendement. La preuve, je l’ai cosigné. (Sourires.)
Je voudrais ajouter aux explications extrêmement claires de Mme la corapporteur, ainsi qu’à celles des autres intervenants, quelques mots dans la continuité de cette « errance législative » qui vient d’être évoquée.
Lors de l’examen du projet de loi d’avenir pour l’agriculture, nous avons adopté un amendement porté par notre rapporteur, Didier Guillaume, auquel je m’étais associé, ainsi que d’autres sénateurs. Cet amendement tendait à permettre le changement de destination d’un bâtiment agricole et l’extension d’une maison d’habitation.
Comme beaucoup d’entre nous, je suis attelé actuellement à l’élaboration d’un PLU intercommunal et, déjà, un certain nombre de demandes anticipent sur ce que sera ce PLU. Or nous nous heurtons à un vrai problème avec les annexes. Elles sont aujourd’hui autorisées, à condition de toucher l’habitation – on ne peut les séparer, ne serait-ce que de quelques mètres. Si cela ne pose aucun problème pour une véranda, je comprends que l’on veuille prendre quelques précautions et mettre un peu de distance quand il s’agit d’un poulailler… (Sourires.) D’autres constructions peuvent être concernées : abris de jardin, annexes de piscine… Cette disposition me semble donc tout à fait bienvenue.
Monsieur le ministre, vous représentez une administration extrêmement soucieuse, comme nous, du respect d’un certain nombre de dispositions. Il ne s’agit pas de construire n’importe où ni n’importe comment. Il faut que le règlement élaboré par les élus précise les conditions de construction de ces annexes. Les élus, nous sommes là pour en témoigner, sont extrêmement exigeants en matière de respect des règles existantes.
Il ne faut pas non plus oublier que la construction des annexes est soumise à l’approbation des commissions départementales. Il nous faut parfois calmer les ardeurs de certains qui souhaitent agrandir leur maison, mais oublient qu’il faut en passer par ces commissions.
Quelle que soit l’appréciation que l’on porte sur les commissions départementales, elles font partie des verrous qui garantissent que le droit ouvert par cet amendement sera très respectueux à la fois de l’espace agricole et de l’environnement bâti. Encore une fois, il ne s’agit pas de construire n’importe comment.
Pour conclure, je dirai que la solidarité normande s’est manifestée puisqu’un sénateur normand du groupe UDI-UC a également cosigné cet amendement. C’est dire si le bon sens l’a emporté ! (Sourires.) Personne n’ignore que l’une des vertus cardinales des Normands est de savoir s’organiser pour s’imposer : Guillaume le Conquérant a su le faire le premier ; nous savons aussi le faire pour conquérir l’opinion de la Haute Assemblée.
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote.
M. Daniel Gremillet. L’enthousiasme gagne notre assemblée, mais je suis un peu plus réservé. Je regrette que notre collègue Dubois ait retiré son amendement, car je pense que la réciprocité est primordiale.
Nous parlons ici des annexes de bâtiments non agricoles. Pour ma part, je souhaite parler de celles des bâtiments agricoles : dans un périmètre inférieur à cent mètres, vous ne pouvez, sans autorisation des installations classées, sans dérogation, obtenir de permis de construire.
Par ailleurs, l’expérience montre que l’abri de jardin est parfois détourné de son usage initial vers une autre activité. Si le maire et l’équipe municipale n’y prennent garde, l’usage transformera la destination de l’annexe. Il faut donc faire preuve d’une extrême prudence.
Je ne peux voter cet amendement, à moins qu’il ne soit rectifié pour intégrer la réciprocité en matière d’annexes agricoles.
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.
M. Pierre-Yves Collombat. Je voterai cet amendement, mais je trouve quelque peu surréaliste de devoir légiférer pour pallier les délires interprétatifs de l’administration. Car c’est ça le problème !
M. Philippe Mouiller. Il a raison !
M. Pierre-Yves Collombat. Je ne suis pas d’accord avec notre collègue Botrel : la loi ALUR ouvrait au contraire des possibilités, mais elle a été interprétée différemment.
M. Jean-Paul Emorine. Exactement !
M. Pierre-Yves Collombat. Nous sommes obligés de bidouiller en permanence les textes pour corriger les interprétations abusives, selon moi, de l’administration. Dès lors, si j’ai un message à faire passer au Gouvernement, qui nous invite souvent à nous réformer, c’est qu’il réforme son administration. Plutôt que de dire que ce qui n’est pas explicitement permis est interdit, mieux vaut interpréter les mots comme il convient !
En l’occurrence, cet amendement est une réponse à la quadrature du cercle : s’il ne faut pas permettre n’importe quoi – c’est évident ! – pour protéger les territoires, il faut également pouvoir y vivre. Avec un règlement très précis, je crois que l’on y arrivera.
Cela étant, je prends le pari que, dans trois mois, un nouvel amendement sera déposé parce que, dans tel ou tel endroit, l’administration aura interprété le texte à sa façon.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Emmanuel Macron, ministre. Je veux d’abord dire que c’est bien la loi qui a fermé ces possibilités, raison pour laquelle il nous faut la corriger. (M. Pierre-Yves Collombat marque son désaccord.)
Par ailleurs, monsieur Collombat, l’administration, ce sont des hommes et des femmes qui font, chaque jour, un travail formidable et sans qui nous ne serions pas là.
Il n’y a pas de mauvaise administration, il n’y a que de mauvais ministres. S’il faut s’en prendre à quelqu’un, c’est au responsable, c’est-à-dire au ministre. Tapez sur les ministres tant que vous voulez, ils peuvent vous répondre. Moi, je défendrai toujours mon administration, parce qu’elle ne peut pas vous répondre !
M. Jean-Claude Lenoir. Très bien !
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 24.
Article 24 bis (nouveau)
L’article L. 631-7-1 du code de la construction et de l’habitation est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque le local à usage d’habitation constitue l’habitation unique en France d’un ressortissant français établi hors de France, l’autorisation de changement d’usage prévue à l’article L. 631-7 ou celle prévue au présent article n’est pas nécessaire pour le louer pour de courtes durées à une clientèle de passage qui n’y élit pas domicile. »
Mme la présidente. L'amendement n° 577 rectifié quater, présenté par Mme Deromedi, M. Frassa, Mmes Garriaud-Maylam et Kammermann, MM. Duvernois, Vasselle, Charon, Commeinhes, Magras, Milon et Calvet et Mme Mélot, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La seconde phrase du deuxième alinéa de l'article 2 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 est ainsi modifiée :
1° le mot : « obligation » est remplacé par le mot : « raison » ;
2° après le mot «professionnelle, » est inséré le mot : « expatriation, ».
La parole est à Mme Jacky Deromedi.
Mme Jacky Deromedi. Il est important que nos compatriotes expatriés puissent conserver leur habitation en France, non seulement pour l'utiliser lors de leurs retours périodiques, mais aussi en prévision de leur réinstallation définitive. La location de courte durée constitue généralement le seul moyen de répondre à ces besoins de disponibilité sans condamner le bien à rester vacant pendant de longues périodes.
Or l’article 2 de la loi du 6 juillet 1989, modifié par la loi ALUR, dispose que ce texte s’applique aux locations de locaux à usage d’habitation ou à usage mixte professionnel et d’habitation qui constituent la résidence principale du preneur. Une résidence principale s’entend au sens de logement occupé au moins huit mois par an – sauf obligation professionnelle, raison de santé ou cas de force majeure – soit par le preneur ou son conjoint, soit par une personne à charge au sens du code de la construction et de l’habitation.
Cet amendement prévoit que la condition d’occupation du logement pendant au moins huit mois par an n’est pas opposable aux Français expatriés pour une raison professionnelle, à savoir détachement à l’étranger à la demande d’un employeur français, choix d’une activité professionnelle à l’étranger, y compris sous contrat local, ou volonté de suivre un conjoint. Il vise à assouplir le caractère trop restrictif de la formulation de la loi, lié à l’emploi du mot « obligation ». Il ne serait pas juste que seuls les salariés détachés par leur entreprise voient leur habitation en France bénéficier du statut de résidence principale.
Les assurances données par le Gouvernement lors de l’examen du projet de loi ALUR, selon lesquelles la situation des Français établis hors de France serait prise en compte par le texte en vigueur, ne nous rassurent pas complètement. En effet, l’article 2 de la loi du 6 juillet 1989 ne concerne pas de nombreux cas légitimes d’expatriation, notamment celui où l’un de nos compatriotes part à l’étranger pour rejoindre son conjoint. Il ne couvre pas non plus le cas des retraités qui espèrent rentrer en France dans un délai rapproché, sans pouvoir le faire immédiatement en raison de la faiblesse de leurs moyens ou de l’éducation de leurs enfants, si celle-ci est déjà engagée dans le système scolaire du pays de résidence.
Cet amendement reprend le texte de deux amendements cosignés par plusieurs sénateurs représentant les Français établis hors de France et défendus pas Christophe-André Frassa lors de l’examen du projet de loi ALUR.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. La commission spéciale a émis un avis favorable sur cet amendement, qui semble remédier à une différence de traitement inéquitable. Celle-ci n’avait pas été prise en compte au moment de l’adoption du droit en vigueur.
C’est une mesure de simplification et d’équité pour les Français de l’étranger qui choisissent de conserver leur résidence principale sur notre territoire.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Emmanuel Macron, ministre. En cheminant collectivement dans le droit existant, madame Deromedi, vous constaterez que des flexibilités existent et permettent de répondre au problème que vous soulevez.
Ouvrir, comme vous le proposez, le dispositif aurait des effets pervers, en particulier dans les zones les plus tendues, ce qui n’est pas souhaitable. Or il existe aujourd'hui plusieurs types de location de droit commun : pour un logement vide, la durée du bail est de trois ans ; pour un meublé, celle-ci est d’un an, voire de neuf mois si le locataire est étudiant.
Les locations de courte durée, notamment touristiques, sont soumises à une autorisation administrative, parfois avec compensation, parce qu’elles font l’objet d’un changement d’usage. On transforme en effet, de manière évidente, un logement en activité commerciale, puisqu’il s’agit de louer un appartement pour en percevoir des revenus. Ces autorisations ne sont pas requises si le logement est la résidence principale du propriétaire, ce qui suppose au moins huit mois de présence. Dans ce cas, la location de courte durée, que vous cherchez à étendre par le biais de cet amendement, est possible.
Dans les zones très tendues comme Paris, la location de courte durée est un phénomène bien réel et important. Elle peut être très rémunératrice : environ 1 000 euros par semaine, bien que le loyer dépende des quartiers. On estime qu’il y a à Paris 20 000 locations de courte durée, ce qui n’est pas rien. Cela pèse sur le marché immobilier parisien – j’appelle votre attention sur ce point –, en particulier pour les Françaises et les Français qui veulent se loger. On ne peut donc laisser une totale liberté en matière de changement d’usage, sinon ce serait au détriment des habitants.
Si je comprends bien votre souhait, il s’agit non pas d’ouvrir entièrement le dispositif, mais de couvrir le cas des Français établis hors de France qui veulent avoir recours à une location de courte durée, sans pour autant que le logement en question constitue leur résidence principale. Rien n’empêche les expatriés propriétaires de résidences secondaires à Paris, ou ailleurs, de conclure dans le cadre du droit commun des baux meublés courts d’un an ou de neuf mois, ce qui leur permet de louer leur logement dans un cadre défini, c'est-à-dire avec les autorisations adéquates.
Par ailleurs, la loi ALUR permet à la commune de définir certaines souplesses, en exonérant, sous certaines conditions, les demandes d’autorisation de changement d’usage. La loi ALUR confère donc aux élus la possibilité d’introduire une certaine souplesse dans un cadre défini, celui du bail meublé court.
Selon moi, si l’on ouvrait davantage les vannes, comme vous proposez de le faire, pour traiter un cas assez circonscrit, on risquerait de s’engouffrer, en zones tendues, dans un mécanisme de pression sur le marché locatif, alors même que certaines dispositions de la loi ALUR relatives au bail meublé court permettent d’apporter des réponses.
Au bénéfice de ces éclaircissements, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, je me verrai contraint d’émettre un avis défavorable. À mes yeux, la situation actuelle permet d’ores et déjà de répondre à la problématique rencontrée par les Françaises et les Français expatriés.
Mme la présidente. Madame Deromedi, l’amendement n° 577 rectifié quater est-il maintenu ?
Mme Jacky Deromedi. Les Français qui partent à l’étranger le font souvent parce qu’ils n’ont pas de travail en France ou parce qu’on leur propose un emploi leur permettant de nourrir leur famille. Ils cherchent non pas à faire un bénéfice en louant leur appartement, mais à couvrir leurs charges.
La plupart du temps, les Français de l’étranger ne sont pas des gens riches. Si, demain, ils perdent leur emploi à l’étranger, ils doivent savoir qu’ils ont toujours un toit en France, pour eux et pour leurs enfants. C’est quelque chose qu’on leur doit. Ils ne méritent pas d’être traités différemment des autres. C’est pourquoi je maintiens l’amendement.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 24 bis, modifié.
(L'article 24 bis est adopté.)
Articles additionnels après l'article 24 bis
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 343, présenté par MM. Joyandet et Raison, est ainsi libellé :
Après l’article 24 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les deux derniers alinéas de l’article L. 123-19 du code de l’urbanisme sont supprimés.
La parole est à M. Alain Joyandet.
M. Alain Joyandet. Cet amendement et celui qui va suivre ont été cosignés par mon excellent collègue Michel Raison. Ils sont donc forcément de bon sens, et j’espère que vous nous donnerez raison... (Sourires.)
La loi ALUR prévoit la caducité des plans d’occupation des sols et le transfert de la compétence « urbanisme » aux intercommunalités à partir de 2017. Entre une période comprise entre le 31 décembre 2015 et le 27 mars 2017, nous serons donc confrontés à un vide : les POS étant caducs, la compétence n’étant pas encore transférée aux intercommunalités, les communes qui disposent d’un POS devront revenir au droit commun, c'est-à-dire au règlement national d’urbanisme. À défaut, elles seront obligées de se réengager pendant deux ans dans une nouvelle procédure.
Compte tenu de l’état des finances locales et de la complexité à mettre en place de nouvelles procédures, cet amendement vise à supprimer les dispositions de l’article du code de l’urbanisme prévoyant la caducité.
Mme la présidente. L'amendement n° 344, présenté par MM. Joyandet et Raison, est ainsi libellé :
Après l’article 24 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 123-19 du code de l’urbanisme est ainsi modifié :
1° L’avant-dernier alinéa est ainsi modifié :
a) À la première phrase, la date : « 31 décembre 2015 » est remplacée par la date : « 27 mars 2017 » ;
b) À la troisième phrase, la date : « 1er janvier » est remplacée par la date : « 28 mars » ;
2° Le dernier alinéa est ainsi modifié :
a) La première phrase est ainsi modifiée :
- La date : « 31 décembre 2015 » est remplacée par la date : « 27 mars 2017 » ;
- À la fin, les mots : « , sous réserve d’être achevée au plus tard trois ans à compter de la publication de cette même loi » sont supprimés ;
b) À la fin de la seconde phrase, les mots : « et au plus tard jusqu’à l’expiration de ce délai de trois ans » sont supprimés.
La parole est à M. Alain Joyandet.
M. Alain Joyandet. Si la commission spéciale ou le Gouvernement estime que la suppression proposée par l’amendement précédent est trop compliquée, cet amendement de repli tend à ce que les POS ne soient pas caducs à partir de 2015, mais à compter de 2017, date à laquelle aura lieu le transfert de compétences.
M. Jean-Claude Lenoir. C’est le bon sens !
M. Alain Joyandet. L’adoption de cette disposition éviterait de nouvelles procédures administratives et, éventuellement, des coûts supplémentaires pour nos collectivités.
Mme la présidente. L'amendement n° 941 rectifié ter, présenté par Mmes Jourda et Monier, MM. Tourenne, Lalande et Madec, Mme Bataille, M. Cabanel, Mmes Lienemann, Herviaux et Emery-Dumas, MM. Vincent et Roux, Mme Schillinger, MM. J.C. Leroy, Jeansannetas, Labazée, Patriat, Berson, Sutour, Botrel, Duran, Antiste, F. Marc et Aubey, Mme Perol-Dumont, M. Vaugrenard, Mme Blondin, MM. Frécon, Guillaume et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Après l’article 24 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 123-19 du code de l’urbanisme est ainsi modifié :
1° L’avant-dernier alinéa est ainsi modifié :
a) À la première phrase, l’année : « 2015 » est remplacée par l’année : « 2016 » ;
b) À la troisième phrase, l’année : « 2016 » est remplacée par l’année : « 2017 » ;
2° Le dernier alinéa est ainsi modifié :
a) À la première phrase, l’année : « 2015 » est remplacée par l’année : « 2016 » et le mot : « trois » est remplacé par le mot : « quatre » ;
b) À la seconde phrase, le mot : « trois » est remplacé par le mot : « quatre ».
La parole est à Mme Gisèle Jourda.
Mme Gisèle Jourda. Cet amendement a pour objet de permettre aux communes qui ont engagé une procédure de transformation de leur plan d’occupation des sols en plan local d’urbanisme de bénéficier d’un délai d’une année supplémentaire, eu égard à la lourdeur des procédures administratives. Je ne veux pas dire par là que les personnels des administrations ne sont pas efficaces, mais simplement que les procédures en matière d’urbanisme sont parfois longues et risquent d’excéder les délais prévus par la loi ALUR.
Pour encourager les collectivités locales à se doter d’un PLU, la loi ALUR met fin aux POS. À cet égard, des dispositions transitoires ont bien été prévues : les POS qui n’auront pas été changés en plan local d’urbanisme au plus tard le 31 décembre 2015 seront caducs à compter de cette date.
Ce délai est trop court, surtout pour certaines petites communes, qui n’auront pas les moyens de se mettre en conformité d’ici à la fin de l’année 2015. Lorsque les POS deviendront caducs, les coefficients d’occupation des sols disparaîtront, ainsi que les bonus de constructibilité. Les opérations de logements sociaux resteront bloquées, ce qui sera très pénalisant pour les budgets des communes qui ont engagé des opérations pour être en conformité avec la loi.
Je vous demande, mes chers collègues, de prendre en compte la difficulté de ces collectivités, ainsi que leur volonté d’être en conformité avec la loi.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Monsieur Joyandet, l’article L. 123-19 du code de l’urbanisme programme la caducité du POS de manière plutôt raisonnable. Il dispose en effet que, si une procédure de révision du plan d’occupation des sols a été engagée avant le 31 décembre 2015, cette procédure peut être menée à terme, sous réserve d’être achevée au plus tard à la fin du mois de mars 2017. Il n’y a donc pas de passage brutal des règles du POS à celles du règlement national d’urbanisme, puisqu’un espace est laissé à l’initiative des collectivités pour conserver la maîtrise de leur droit du sol, en s’engageant, si elles le souhaitent, vers un PLU. Une simple délibération prescrivant la révision du POS suffit pour suspendre la caducité.
Les communes encore sous le régime du POS savent depuis plus d’un an que la caducité de leur POS est programmée et sera effective à compter du 1er janvier 2016. Elles savent également qu’elles peuvent faire obstacle à cette caducité en s’engageant dans l’élaboration d’un PLU avant le 31 décembre de cette année. Elles ont encore plus de huit mois pour prendre une délibération en ce sens et rester maîtresses de leur urbanisme.
J’ajouterai, en poussant un peu plus loin le raisonnement, que, si nous votions votre amendement de repli, le problème de la caducité des POS se poserait à l’identique en mars 2017 et qu’il faudrait de nouveau se poser la question de leur prorogation. (Protestations sur les travées de l'UMP.)
Madame Jourda, il n’y a pas de caducité couperet, puisqu’il suffit d’une simple délibération pour engager la révision du POS et sa mise en forme de PLU. Par ailleurs, grâce à des aménagements postérieurs à la loi ALUR, l’élaboration du PLU peut aller à son terme même après le transfert éventuel de la compétence « PLU » à l’intercommunalité.
La commission spéciale sollicite donc le retrait de ces trois amendements ; à défaut, l’avis sera défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Monsieur Joyandet, les amendements nos 343 et 344 sont-ils maintenus ?
M. Alain Joyandet. J’ai peur qu’il n’y ait une incompréhension. Je ne demande pas un délai supplémentaire, mais seulement à assurer la jonction entre le moment où le POS deviendra caduc et le transfert de la compétence « PLU », imposé par la loi ALUR, aux intercommunalités. En effet, lorsque le POS deviendra caduc au 1er janvier 2016, la commune n’aura plus aucun document d’urbanisme,…
M. Alain Richard. Pas du tout !
M. Alain Joyandet. … puisque la loi prévoit que la compétence « urbanisme » passera à l’intercommunalité en 2017. Il ne s’agit donc pas d’offrir aux communes la possibilité de lancer un nouveau projet d’urbanisme, il est simplement question de combler un vide juridique entre 2015 et 2017.
M. Pierre-Yves Collombat. Mais on ne passera pas automatiquement à l’intercommunalité !
M. Alain Joyandet. Écoutez, mes chers collègues, soit c’est nous qui nous trompons dans l’interprétation du texte (M. Alain Richard opine.), ce qui est possible, soit il y a une incompréhension de la part de la commission spéciale.
En tout cas, ce qu’on m’explique sur le terrain, c’est que l’intercommunalité sera compétente en matière de PLU en 2017 et que le POS communal deviendra caduc à partir du 31 décembre 2015, de sorte qu’un vide juridique se créera dans les communes, puisque, pendant deux ans, il n’y aura plus de documents d’urbanisme communal.
M. Gérard Cornu. C’est sûr !
M. Alain Joyandet. Par conséquent, si la commune ne lance aucun projet pendant ces deux ans, elle perdra forcément ses prérogatives en matière d’urbanisme et tombera dans le régime de droit commun, c’est-à-dire sous la tutelle de l’État, ce que les communes ne veulent à aucun prix.
Si une commune veut éviter de se retrouver dans cette situation en attendant 2017, elle devra engager une nouvelle démarche d’urbanisme, c’est-à-dire – car elle n’aura quasiment pas d’autre possibilité – lancer l’étude d’un PLU, puisque le POS sera désormais caduc. Or, on le sait, en deux ans, elle n’aura même pas le temps de le mener à bien, cela coûtera un argent fou et, en même temps, il y aura un vide juridique, puisque la commune sera soumise au régime de droit commun.
Je le répète, si vous lisez bien la loi, vous verrez que les communes seront plongées dans un vide juridique complet qui ne permettra plus aux maires de répondre aux besoins en matière d’urbanisme, puisque ce sera le préfet, pendant deux ans, qui prendra les choses en charge, à moins que la commune ne s’engage dans un nouveau projet. S’il y a un point que je n’ai pas compris, il faut me le dire ; en tout cas, j’espère avoir été clair.
Quoi qu’il en soit, je maintiens ces amendements, parce qu’ils me semblent aller dans le sens de l’intérêt général.
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Richard, pour explication de vote.
M. Alain Richard. Il me semble que le problème que soulève notre collègue Alain Joyandet est surmontable, parce que, par construction, un transfert de compétences intervient en un instant, à une date fixée.
Si donc, par choix, les communes intéressées ont reporté à une date qu’elles connaissent déjà le transfert de compétences, cela veut dire qu’elles resteront compétentes pour tous les actes préparatoires à cette transformation POS-PLU jusqu’au jour où le transfert de compétence interviendra.
Il suffit que les communes prennent la délibération dont nous avons parlé…
M. Alain Joyandet. Non !
M. Alain Richard. Monsieur Joyandet, je le répète, les communes resteront compétentes : tant qu’elle n’est pas transférée, la compétence de la commune n’est pas éteinte.
M. Alain Joyandet. Mais lisez le texte !
M. Alain Richard. Je me permets de faire appel à votre attention, mon cher collègue : encore une fois, tant que la compétence n’est pas transférée, elle est détenue par la commune. (Non ! sur les travées de l'UMP.)
Si, je puis vous l’affirmer, mes chers collègues, et la commune sera donc compétente pour prendre les actes préparatoires ; c’est aussi simple que cela.
De surcroît, je me permets de vous faire observer que, en pratique, un PLU intercommunal commencera tout simplement par être un collage des PLU communaux préexistants.
M. Pierre-Yves Collombat. Pas forcément !
M. Alain Joyandet. Je vous parle du POS, et non pas du PLU !
M. Alain Richard. C’est bien ce que je vous dis : la commune engagera la transformation du POS en PLU et ce travail sera terminé par l’intercommunalité ; c’est aussi simple que cela, il n’y aura aucun vide juridique.
Mme la présidente. La parole est à M. Bruno Sido, pour explication de vote.
M. Bruno Sido. Je pense que l’amendement du groupe socialiste est inutile, parce que le dernier alinéa de l’article L. 123-19 du code de l’urbanisme prévoit qu’une procédure de révision du POS engagée avant le 31 décembre 2015 peut être menée à terme sous réserve d’être achevée au plus tard trois ans à compter de la publication de la loi ALUR de 2014. Il suffit donc à un conseil municipal de voter la révision de son plan d’occupation des sols pour avoir trois ans devant lui.
Quant à mon collègue Alain Joyandet, j’ai envie de lui dire que le mieux est l’ennemi du bien et que, trois ans, c’est déjà beaucoup pour élaborer un PLUI,…
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Bien sûr !
M. Bruno Sido. … qui, de toute façon, finira bien par voir le jour.
M. Alain Joyandet. Ce n’est pas la question !
M. Bruno Sido. Mais si, c’est bien la question, mon cher collègue !
Je pense donc que ces amendements sont inutiles.
Mme la présidente. La parole est à Mme Gisèle Jourda, pour explication de vote.
Mme Gisèle Jourda. On parle du cas des intercommunalités, mais mon amendement concerne les communes, en particulier les plus petites d’entre elles, qui ont commencé à transformer leur POS en PLU – pour certaines, alors même que leur POS était en cours d’instruction – et qui se retrouvent aujourd’hui totalement coincées dans des procédures administratives. Il est indispensable de leur apporter un ballon d’oxygène en leur accordant un délai supplémentaire. Je ne vois pas pourquoi cela fait débat. Où est le problème, puisque cela permettra aux élus locaux de faire avancer leur dossier avec l’administration ?
Modifier un délai n’entraîne aucune complication : grâce à cette année supplémentaire, tout le monde sera en conformité et certaines communes pourront choisir la formule de l’intercommunalité si elles le souhaitent.
Notre pays est riche d’une très grande diversité de communes et les situations ne sont pas les mêmes partout. Il faut prendre en compte ces spécificités et accorder ce délai supplémentaire, car, entre l’entrée en vigueur de la loi ALUR et la mise en œuvre sur le terrain, il faut un certain temps pour se mettre en conformité, surtout dans les communes rurales.
On le sait, c’est en matière d’urbanisme que les délais sont les plus longs et les problématiques les plus lourdes administrativement. Et ce n’est pas le fait de prendre une délibération qui bloquera un processus ! C’est une situation que je n’ai jamais rencontrée dans ma carrière administrative. En revanche, j’ai vu le passage du POS au PLU, c’est pourquoi je vous demande de faire preuve de bon sens sur le sujet.
Je crois qu’on peut voter un allongement de délai ; on a cédé sur d’autres mesures qui n’auront pas des répercussions aussi importantes, surtout dans la vie quotidienne des élus locaux.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Lenoir, pour explication de vote.
M. Jean-Claude Lenoir. La clarification est nécessaire. Que se passera-t-il le 1er janvier 2016 pour la commune qui avait un POS et qui ne l’a pas transformé en PLU ? Est-ce qu’elle se retrouvera dans une sorte de no man’s land juridique, c’est-à-dire est-ce qu’elle sera soumise au règlement national d’urbanisme ?
Cela étant, est-il nécessaire d’accorder un délai supplémentaire ? Je suis toujours réservé sur les délais supplémentaires, car ils ne sont guère utilisés et, bien souvent, passés ces délais, on se retrouve avec les mêmes problèmes que l’octroi de délais supplémentaires était censé résoudre.
L’important, puisque les PLU doivent maintenant être intercommunaux, c’est de faire coïncider la fin des POS avec la mise en œuvre de ces PLUI.
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Joyandet, pour explication de vote.
M. Alain Joyandet. En fait, avec Michel Raison, nous allons retirer nos amendements pour ne pas allonger le débat. Le sujet étant très technique, je crois qu’il vaut mieux y revenir plus tard et voir ce qui se passe au cours de la navette.
Mme la présidente. Je crois que vous ne devez pas trop vous inquiéter…
Les amendements nos 343 et 344 sont retirés.
Madame Jourda, l'amendement n° 941 rectifié ter est-il maintenu ?
Mme Gisèle Jourda. Oui, madame la présidente.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 941 rectifié ter.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n'adopte pas l'amendement.)
Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures quarante-cinq, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de Mme Françoise Cartron.)
PRÉSIDENCE DE Mme Françoise Cartron
vice-présidente
Mme la présidente. La séance est reprise.
Dans la suite de la discussion du projet de loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, nous poursuivons l’examen des amendements tendant à insérer un article additionnel après l’article 24 bis.
L'amendement n° 397 rectifié, présenté par M. Madec, Mme Lienemann, MM. Assouline et Guillaume, Mmes Bricq, Emery-Dumas et Génisson, MM. Bigot, Cabanel, Filleul, Marie, Masseret, Raynal, Richard, Sueur, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Après l’article 24 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 631-7-1 A du code de la construction et de l’habitation, il est inséré un article L. 631-7-1-… ainsi rédigé :
« Art. L. 631-7-1... – Une délibération du conseil municipal peut définir un régime de déclaration préalable permettant d’affecter temporairement à l’habitation des locaux destinés à un usage autre que l’habitation pour une durée n’excédant pas quinze ans.
« Si la commune est membre d’un établissement public de coopération intercommunale compétent en matière de plan local d’urbanisme, la délibération est prise par l’organe délibérant de cet établissement.
« Jusqu’à l’expiration du délai mentionné au premier alinéa, les locaux peuvent, par dérogation à l’article L. 631-7, retrouver leur usage antérieur.
« En cas de location d’un local temporairement affecté à l’habitation en application du présent article, le contrat doit mentionner le caractère temporaire de cette affectation. Sous cette réserve, le retour des locaux à leur usage antérieur est un motif légitime et sérieux au sens de l’article 15 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986. Il ne constitue pas un événement au sens de l’article 11 de cette même loi. »
La parole est à M. Marc Daunis.
M. Marc Daunis. Cet amendement de bon sens vise à permettre, dans les zones dites « tendues », des changements d’usage temporaires. À cette fin, il tend à donner aux propriétaires d’un local à usage de bureaux ou professionnel la possibilité de le transformer en local d’habitation pendant une durée maximale de quinze ans et de lui rendre son usage initial sur simple déclaration.
En effet, la transformation de bureaux en logements peut être freinée par la complexité et le coût de la procédure indispensable pour revenir à la situation antérieure compte tenu des règles figurant à l’article L. 631-7 du code de la construction et de l’habitation et de la nécessité de proposer une compensation.
Dans le contexte actuel de pénurie de logements et de solutions d’hébergement en zone tendue, l’objet premier de cette disposition est d’assurer la réversibilité de l’usage des locaux et d’inciter ainsi les propriétaires à créer des logements en transformant des surfaces de bureaux vacants ou obsolètes. C’est la commune ou l’établissement public de coopération intercommunale compétent qui pourra prendre ou non une délibération autorisant la mise en œuvre de ce dispositif.
Cette mesure est susceptible d’avoir un effet réel sur le déblocage d’opérations foncières ou immobilières et donc de produire de l’activité économique. Son adoption rassurerait aussi un certain nombre de propriétaires et les inciterait à procéder à ces changements d’usage temporaires, ces personnes ne craignant plus de rencontrer des difficultés pour en revenir à l’état antérieur.
Cette problématique se rencontre aussi dans certains centres de village pour des rez-de-chaussée ou certaines maisons comportant un premier étage.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Il est tout à fait exact que les surfaces de bureaux vacants ont considérablement augmenté ces dernières années et qu’une partie d’entre elles pourrait être transformée en locaux à usage d’habitation, ce qui serait très souhaitable, en particulier dans les zones tendues en matière d’offre de logements.
Mais les obstacles identifiés ne sont pas résolus par le dispositif proposé.
Ceux-là sont d’abord d’ordre technique, car toutes les surfaces ne sont pas forcément adaptées à un usage d’habitation ou ne pourraient le devenir qu’à des coûts très importants.
Par ailleurs, les rendements du marché locatif résidentiel sont très inférieurs à ceux du marché locatif tertiaire, d’autant plus qu’un pourcentage de logements sociaux est imposé dans le permis de construire.
On peut enfin souligner qu’un changement d’usage temporaire va augmenter encore le coût de l’opération en ajoutant les frais de remise en l’état initial, ce qui diminue l’intérêt de la démarche.
Même si nous faisons tous le même constat, mon cher collègue, la réponse que vous proposez me semble inadaptée. La commission spéciale émet donc un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Carole Delga, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire. Le Gouvernement est favorable à la mesure présentée, car dans le contexte de pénurie de logements dans les zones tendues, ce dispositif souple permettrait de rassurer les propriétaires de locaux à usage de bureaux ou professionnels qui souhaiteraient les destiner temporairement à un usage d’habitation.
Nous devons tout faire pour accroître l’offre de logements.
Mme la présidente. La parole est à M. Marc Daunis, pour explication de vote.
M. Marc Daunis. Je remercie le Gouvernement de son avis favorable ; il fait preuve de pragmatisme et de bon sens.
Cela étant, premièrement, je constate, madame la corapporteur, que vous dressez le même constat que moi, sans pour autant proposer une solution.
Deuxièmement, j’aurais compris votre argumentation et les reproches que vous avez formulés à l’encontre de notre proposition si nous avions prévu de rendre ce dispositif obligatoire. Or nous précisons bien que c’est une faculté qui est offerte à la collectivité ou à l’EPCI compétent, qui pourront prendre ou non une délibération en ce sens eu égard aux différents inconvénients, réels, que vous soulignez.
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Dubois, pour explication de vote.
M. Daniel Dubois. La mesure proposée apporte de la souplesse et n’est nullement obligatoire. En outre, il sera toujours possible d’en revenir à l’état antérieur.
Qu’il soit possible, en zone tendue, de transformer des locaux commerciaux en logements grâce à un mécanisme souple me paraît être une bonne chose. À titre personnel, je voterai en faveur de cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. Je voterai également cet amendement.
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 24 bis.
Article 25
I. – (Supprimé)
II. – La loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 est ainsi modifiée :
1°A (nouveau) Au 8° de l’article 3, les mots : « loyer acquitté par le précédent locataire » sont remplacés par les mots : « loyer appliqué au précédent locataire » ;
1° À la première phrase du quatrième alinéa de l’article 3-2, après le mot : « lieux », sont insérés les mots : « d’entrée » ;
2° L’article 8-1 est ainsi modifié :
a) Le I est complété par les mots : « , à l’exception de la location consentie exclusivement à des époux ou à des partenaires liés par un pacte civil de solidarité au moment de la conclusion initiale du contrat » ;
b) Le VI est ainsi modifié :
– à la seconde phrase du premier alinéa, les mots : « la solidarité du colocataire sortant s’éteint » sont remplacés par les mots : « elles s’éteignent » ;
– au second alinéa, les mots : « le congé » sont remplacés par les mots : « l’extinction de la solidarité » ;
3° L’article 11-2 est ainsi rédigé :
« Art. 11-2. – Lorsqu’un immeuble à usage d’habitation ou à usage mixte d’habitation et professionnel de cinq logements ou plus, situé dans une des zones mentionnées au I de l’article 17, est mis en copropriété :
« 1° Les baux en cours dont le terme intervient moins de trois ans après la date de mise en copropriété sont prorogés de plein droit d’une durée de trois ans ;
« 2° Les autres baux en cours sont prorogés d’une durée permettant au locataire d’occuper le logement pendant une durée de six ans à compter de la mise en copropriété. » ;
4° La dernière phrase du premier alinéa du I de l’article 15 est remplacée par quatre alinéas ainsi rédigés :
« En cas d’acquisition d’un bien occupé :
« – lorsque le terme du contrat de location en cours intervient plus de trois ans après la date d’acquisition, le bailleur peut donner un congé pour vente au terme du contrat de location en cours ;
« – lorsque le terme du contrat de location en cours intervient moins de trois ans après la date d’acquisition, le bailleur ne peut donner congé à son locataire pour vendre le logement qu’au terme de la première reconduction tacite ou du premier renouvellement du contrat de location en cours ;
« – lorsque le terme du contrat en cours intervient moins de deux ans après l’acquisition, le congé pour reprise donné par le bailleur au terme du contrat de location en cours ne prend effet qu’à l’expiration d’une durée de deux ans à compter de la date d’acquisition. » ;
4° bis Le III du même article 15 est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Le présent alinéa est également applicable lorsque le locataire a à sa charge une personne de plus de soixante-cinq ans vivant habituellement dans le logement et remplissant la condition de ressources précitée et que le montant cumulé des ressources annuelles de l’ensemble des personnes vivant au foyer est inférieur au plafond de ressources déterminé par l’arrêté précité. » ;
b) Au dernier alinéa, après le mot : « locataire », sont insérés les mots : « , de la personne à sa charge » ;
5° À la seconde phrase du IV de l’article 24, après le mot : « demandes », sont insérés les mots : « additionnelles et » ;
6° Au deuxième alinéa de l’article 25-3, après la référence : « 1er, », est insérée la référence : « 3, » ;
7° L’article 25-8 est ainsi modifié :
a) La première phrase du septième alinéa du I est complétée par les mots : « ou remis en main propre contre récépissé ou émargement » ;
b) La seconde phrase du même alinéa est complétée par les mots : « ou de la remise en main propre » ;
c) La seconde phrase du premier alinéa du II est ainsi rédigée :
« Le présent alinéa est également applicable lorsque le locataire a à sa charge une personne de plus de soixante-cinq ans vivant habituellement dans le logement et remplissant la condition de ressources précitée et que le montant cumulé des ressources annuelles de l’ensemble des personnes vivant au foyer est inférieur au plafond de ressources déterminé par l’arrêté précité. » ;
d) (Supprimé)
e) À la seconde phrase du second alinéa du III, le mot : « redevable » est remplacé par le mot : « recevable » ;
8° L’article 25-9 est ainsi modifié :
a) Le dernier alinéa du I est complété par deux phrases ainsi rédigées :
« Pour l’application de l’article 17-2, la hausse du loyer convenue entre les parties ou fixée judiciairement s’applique au contrat renouvelé. Toutefois, si la hausse est supérieure à 10 %, elle s’applique par tiers annuel au contrat renouvelé et lors des renouvellements ultérieurs. » ;
b) Au II, après le mot : « Le », est insérée la référence : « I du ».
III. – Jusqu’à leur renouvellement ou leur reconduction tacite, les contrats des locations mentionnées au deuxième alinéa de l’article 2 et au premier alinéa de l’article 25-3 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 en cours à la date de publication de la présente loi demeurent soumis aux dispositions qui leur étaient applicables.
Toutefois :
1° Les articles 22 et 24 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 précitée leur sont applicables ;
2° L’article 7-1 de la même loi est applicable dans les conditions fixées à l’article 2222 du code civil ;
3° Les articles 1724, 1751 et 1751-1 du même code leur sont applicables ;
4° Le 2° du II du présent article est applicable aux contrats des locations mentionnées au deuxième alinéa de l’article 2 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 précitée ;
5° L’article 15 de la même loi, dans sa rédaction résultant du présent article, est applicable aux contrats des locations mentionnées au deuxième alinéa de l’article 2 de ladite loi ;
6° L’article 25-8 de la même loi, dans sa rédaction résultant du présent article, est applicable aux contrats de location mentionnés au premier alinéa de l’article 25-3 de ladite loi.
À compter de la date d’effet de leur renouvellement ou de leur reconduction tacite, les contrats des locations mentionnées au deuxième alinéa de l’article 2 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 précitée sont régis par l’ensemble des dispositions de cette même loi en vigueur au jour du renouvellement ou de la reconduction, à l’exception des articles 3, 17 et 17-2, qui ne s’appliquent qu’aux nouveaux baux et aux baux faisant l’objet d’un renouvellement.
À compter de la date d’effet de leur renouvellement ou de leur reconduction tacite, les contrats mentionnés au premier alinéa de l’article 25-3 de la même loi sont régis par l’ensemble des dispositions de cette même loi en vigueur au jour du renouvellement ou de la reconduction, à l’exception de l’article 3, du premier alinéa de l’article 22, de l’article 25-6 et du I de l’article 25-9, qui ne s’appliquent qu’aux nouveaux baux et aux baux faisant l’objet d’un renouvellement.
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, sur l'article.
Mme Laurence Cohen. L’article 25, tel qu’il nous est soumis aujourd’hui, suscite de nombreuses inquiétudes, notamment de la part des associations de locataires qui contestent les nouvelles modalités applicables aux ventes d’immeubles à la découpe et au congé donné au locataire pour cause de vente.
Il est en effet insupportable de voir des locataires, parfois fragilisés socialement, être aujourd’hui dans l’incapacité de garder leur logement.
C’est au principe même de la vente à la découpe qu’il convient de s’attaquer. Pourtant, le Gouvernement fait le choix d’assouplir les contraintes liées à une telle vente pour ne pas décourager les investisseurs. Ainsi, pour tranquilliser ceux-ci et leur assurer les importantes plus-values que procure la pratique, vous choisissez, madame la secrétaire d’État, de revenir sur certaines dispositions de la loi ALUR.
Cette dernière, loin d’être parfaite, certes, permettait au moins l’extension des droits des locataires, ce que vous qualifiez aujourd’hui de « surprotection ».
Parmi ces nouveaux droits, on pouvait noter la modification de l’article 11-2 de la loi du 6 juillet 1989 qui permet la prolongation de trois ans de la durée des baux des locataires d’immeubles comprenant au moins cinq logements concernés par une vente à la découpe. De fait, si aucune condamnation de la pratique de la vente à la découpe n’était prononcée, au moins les locataires se voyaient protéger des congés abusifs pour cause de vente.
Pourtant, aujourd’hui vous souhaitez revenir sur ce point à cause de la frilosité des investisseurs, ces mêmes investisseurs qui ne voient dans un immeuble qu’un bien ou une source d’opportunités spéculatives, foulant par là même le droit fondamental à se loger. Dois-je rappeler en cet instant que c’est cette spéculation immobilière qui a conduit, au début des années quatre-vingt-dix, à la grande crise immobilière dont nous sentons encore les effets ?
Les dispositifs de préemption des collectivités territoriales se révèlent inefficaces du fait des montants exorbitants concernés. Vous imaginez bien que si une collectivité ne peut s’aligner sur les tarifs, ce ne sont pas les locataires qui le feront !
Que se passera-t-il alors ? Les locataires soit rejoindront le contingent des personnes recherchant un logement, aggravant de facto la crise du logement, soit pourraient être relogés dans le parc social, déjà fortement affecté.
Par ailleurs, alors le délai d’attente pour obtenir un logement social à Paris, pour ne prendre que cet exemple, est de sept ans, on le constate bien, la garantie accordée aux locataires mis en congé pour cause de vente est largement insuffisante.
Les mesures issues de la loi ALUR visaient à répondre à un certain nombre de dérives observées dans les grandes métropoles. La logique suivie était non seulement d’assurer une garantie pour le locataire, mais aussi d’établir une distinction claire entre le bailleur, qui a pris le risque locatif, et l’acquéreur du bien.
Nous devons aussi nous interroger à propos de l’effet sur la croissance et l’activité que devraient produire des ventes à la découpe, que l’on peut assimiler non pas à des investissements, mais plutôt à des opérations uniques, très rentables à court terme, mais très dangereuses par la suite.
Une nouvelle fois, madame la secrétaire d’État, c’est non pas par dogmatisme ou par simplisme que nous nous opposons aux pratiques spéculatives de la vente à la découpe, mais parce que celles-ci ne visent au fond qu’à la satisfaction d’un petit nombre au détriment de la majorité.
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Le Scouarnec, sur l'article.
M. Michel Le Scouarnec. L’article 25 prévoit plusieurs modifications du code de la construction et de l’habitation.
Je souhaite évoquer la question de la population vieillissante, dont la précarité s’accroît.
Lors de l’examen par l’Assemblée nationale de l’article 25, qui porte sur la clarification du droit des rapports locatifs et contient des mesures de soutien à l’investissement immobilier, deux amendements visant à permettre une meilleure protection de ce public ont finalement été adoptés, ce dont je me réjouis.
Le premier a pour objet de renforcer la protection des locataires âgés de plus de soixante-cinq ans à faibles ressources et d’étendre cette protection aux ménages hébergeant un locataire âgé, en prenant en compte leurs ressources dans le cumul.
Le second doit profiter cette fois aux locataires de meublés qui ont à charge une personne âgée à faibles ressources.
Cependant, si ces dispositions nouvelles vont dans le sens d’une plus grande solidarité, elles sont bien loin de répondre à elles seules au défi majeur que représentent l’allongement de la durée de vie et l’augmentation des situations de dépendance dans notre société.
Surmonter chez soi les situations de handicap et vivre le plus longtemps possible à domicile, c’est ce que souhaitent la plupart des personnes. Ce souhait répond également à la volonté des élus de limiter le poids financier de l’hébergement.
Demeurer à son domicile nécessite dans ces conditions d’adapter l’habitat et de rendre les espaces extérieurs et les services accessibles. Si les actions en faveur de l’accessibilité progressent, nous savons à quel point les efforts devant être réalisés restent très importants.
Selon l’INSEE, le nombre de personnes âgées de plus de quatre-vingts ans aura doublé avant 2030 – dans cet hémicycle, nous sommes un certain nombre à être concernés ! (Sourires.) Nous le savons, cette réalité démographique rend nécessaire l’adaptation des logements pour favoriser en priorité le maintien à domicile et réduire les situations de dépendance. À nous de prendre les bonnes mesures aujourd’hui !
Alors que la construction de logements neufs est insuffisante, le vieillissement de la population va contribuer à accentuer la pénurie de logements.
Par ailleurs, les personnes âgées locataires du parc privé sont de plus en plus nombreuses à ne pas pouvoir faire face à l’augmentation des loyers et leur part dans la demande de logements d’HLM augmente fortement. Les personnes âgées de plus de soixante-quinze ans, jusque-là logées en maison individuelle, sont nombreuses également à souhaiter se rapprocher des services.
Aujourd’hui, la production neuve intégrant une meilleure qualité de l’habitat pour tous représente une part marginale de l’habitat, et l’adaptation du domicile relève exclusivement de l’initiative des habitants. En outre, même si les plus modestes peuvent profiter d’une aide financière pour réaliser une partie des travaux requis, les procédures sont encore bien souvent méconnues et trop lentes.
L’article 25 du présent projet de loi prévoit, lui, le développement de logements dits « intermédiaires », à mi-chemin entre logement social et logement privé, destinés aux classes moyennes, disposant de revenus trop importants pour rester dans le logement social et ne pouvant se loger dans le secteur libre.
Dans ces conditions, comment ne pas s’inquiéter face aux besoins croissants de véritables logements sociaux accessibles à tous, adaptés à la population vieillissante et aux situations nouvelles de dépendance ?
J’espère que nos débats sur cet article et les suivants permettront de prendre la mesure de ce défi majeur pour notre société et d’apporter des réponses au mal-logement et aux difficultés des personnes âgées.
Mme la présidente. L'amendement n° 21, présenté par Mme Assassi, M. Le Scouarnec et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Jean-Pierre Bosino.
M. Jean-Pierre Bosino. À la suite de Laurence Cohen et de Michel Le Scouarnec, je voudrais rappeler que nous sommes nombreux à combattre depuis des années ces opérations de vente à la découpe. Ces pratiques constituent des atteintes insupportables aux droits des locataires ; elles peuvent mettre en péril leur projet de vie et, dans les cas les plus graves, leur emploi au nom du prétendu droit de quelques-uns de s’enrichir sans limite sur le dos de ceux qui n’ont souvent d’autre ressource que le fruit de leur travail.
Nous sommes aussi nombreux à penser que la politique a vocation à rétablir les équilibres là où ils sont rompus et à protéger la liberté des uns contre les appétits des autres, comme s’y est employé Claude Dilain à qui nous avons rendu hommage cet après-midi.
Or le Livre blanc sur le logement du MEDEF publié voilà quelques jours propose de revenir sur « les dispositions les plus contre-productives de la loi ALUR, principalement le dispositif d’encadrement des loyers » et de « simplifier et raccourcir les procédures à l’encontre des locataires défaillants de mauvaise foi ».
C’est dans cette philosophie que s’inscrit l’article 25 du présent texte, puisqu’il revient au moins partiellement sur une protection au profit des locataires, au prétexte de trouver une voie d’équilibre entre droits des locataires et fluidité du marché.
Certes, lors des débats à l’Assemblée nationale, M. Macron a déclaré que le projet de loi procédait en fait « à un aménagement technique du texte [la loi ALUR], précisément pour éviter, à cause de l’empilement des délais, d’une surprotection […] une fuite des investissements ».
Nos collègues députés le soulignaient avant nous, c’est la réalité des pratiques des marchands de biens dans les zones les plus tendues qui rendaient nécessaires les dispositions de la loi ALUR.
Comme le rappellent de nombreuses associations, il ne saurait y avoir à l’égard de locataires en prise avec un « découpeur » de protection excessive, car la capacité concrète d’exercice de ses droits par un locataire dépend avant tout du socle protecteur contre le congédiement en fin de bail : comment faire appliquer un encadrement des loyers ou un contrôle des charges excessives si le locataire risque en fait de se trouver mis à la rue dans les mois qui suivent ? Comment exiger le respect des obligations de mise aux normes pour obtenir un logement décent si on doit perdre son toit ?
La loi ALUR était un premier pas, certes timide, pour rétablir la volonté parlementaire qui s’est exprimée au moment de la discussion de la loi de 1989. Alors qu’elle n’a pas encore produit ses effets, on tire déjà un trait sur ses dispositions concernant les ventes à la découpe ! C’est assez impressionnant, alors même que, nous le savons, nombre de locataires sont victimes de ces dernières dans les grandes métropoles, en particulier à Paris, et qu’ils vivent dans la peur du lendemain à la suite des ventes auxquelles procèdent, entre autres, des investisseurs institutionnels.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. L’article 25 du présent projet de loi est long, technique et complexe ; il comprend un ensemble de dispositions destinées à insérer plus de lisibilité et de cohérence dans la première partie de la loi ALUR, notamment en ce qui concerne les relations entre les bailleurs et les propriétaires.
En effet, la loi ALUR comporte de nombreuses modalités d’application mal pensées, des articles aux contours imprécis. Ces approximations ont créé, tout le monde s’accorde sur ce point, une certaine insécurité juridique, qu’il convient de pallier.
Tel est l’objet de l’article 25 tel qu’il a été modifié par la commission spéciale et dont l’adoption contribuera, je l’espère, à rassurer les acteurs du marché du logement et à relancer plusieurs projets qui sont aujourd’hui bloqués.
Votre amendement, mon cher collègue, tend à supprimer l’article 25. Dans la mesure où la commission spéciale a adopté cet article, elle émet bien évidemment un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Carole Delga, secrétaire d'État. Le projet de loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques prévoit en effet une évolution des règles applicables en matière de congé pour vente et vente à la découpe, afin de pouvoir assurer un équilibre entre la nécessaire protection des locataires et l’incitation à l’investissement dans le logement.
En commission, nous avons eu sur cette question un large débat, qui a abouti à l’adoption d’une position équilibrée. Il ne s’agit pas de revenir à la situation antérieure au vote de la loi ALUR ni de remettre en cause les avancées et les mesures de protection mises en place en faveur des locataires. Je citerai la faculté, pour la collectivité, de racheter les logements en cours de vente à la découpe, les dispositifs visant à protéger les personnes âgées de plus de soixante-cinq ans dans le cadre d’un congé pour vente, l’abaissement du seuil de dix à cinq logements pour définir les immeubles soumis à la législation protectrice de la vente à la découpe, enfin, les mesures de protection du locataire en matière de congé pour reprise.
Par ailleurs, ces dispositions ne modifient en rien le régime de vente à la découpe et des congés pour vente pour les locataires les plus vulnérables, c’est-à-dire ceux qui sont soumis à des baux de trois ans.
Cependant, le cumul d’un certain nombre d’allongements de délais introduits par la loi ALUR pour les congés pour vente, d’une part, et pour vente à la découpe, d’autre part, a parfois conduit, lorsque la durée du bail est de six ans, à empêcher le propriétaire de récupérer son logement pendant douze ou quinze ans. Des durées aussi longues peuvent clairement devenir dissuasives pour les petits propriétaires ou les investisseurs modestes, d’autant qu’elles ne correspondaient pas à la philosophie des débats.
Cela étant, tous les investisseurs n’ont pas forcément intérêt à ce que leur locataire, qui paie donc un loyer, quitte le logement qu’ils viennent d’acquérir.
Le principe qui guide l’action du Gouvernement est bien entendu de garantir un délai incompressible de trois ans entre la cession d’un bien et un éventuel congé pour vente délivré par le nouveau propriétaire, quel que soit le cas de figure envisagé.
J’insiste sur la nécessité de se doter de règles applicables claires et compréhensibles en cette période de difficultés, notamment d’accès au logement pour nombre de Français.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 973 est présenté par MM. Labbé, Desessard et les membres du groupe écologiste.
L'amendement n° 1393 est présenté par Mme Assassi, M. Le Scouarnec et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. – Alinéa 11
Après le mot :
copropriété
rédiger ainsi la fin de cet alinéa :
, les baux en cours sont prorogés de plein droit d’une durée de trois ans de plus que leur durée contractuelle ou légale antérieure. » ;
II. – Alinéas 12 et 13
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Joël Labbé, pour présenter l’amendement n° 973.
M. Joël Labbé. Je présenterai quatre amendements visant au maintien de la loi ALUR.
Madame la corapporteur, avec tout le respect que je vous dois, je tiens à préciser que cette loi a permis de véritables avancées dans les rapports entre propriétaires, bailleurs et locataires.
Le présent amendement, mesuré, tend donc à prévoir, en cas de mise en copropriété en zone tendue, le maintien du texte initial de la loi ALUR, car il est nécessaire de consolider les droits de ce que l’on appelle les « découpés ».
Les locataires bénéficient d’une protection apparente de six ans, mais, sauf mise en cause d’une illégalité particulière, l’opérateur n’attend le plus souvent que six à huit mois pour appliquer les accords collectifs puis vendre tout de suite le bien à une personne physique. La loi Aurillac du 13 juin 2006 est alors complètement insuffisante pour protéger contre le chantage immédiat à la vente forcée. C’est pourquoi cet amendement vise à compléter le dispositif existant.
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Le Scouarnec, pour présenter l'amendement n° 1393.
M. Michel Le Scouarnec. Même si la loi ALUR ne nous satisfaisait pas entièrement, elle avait mis en place plusieurs mesures de protection supplémentaires au profit des locataires, en particulier ceux qui sont touchés par les ventes à la découpe. Ces dernières consistent, rappelons-le, à la mise en vente, lot par lot, d’appartements dans un immeuble appartenant à une société privée. Les dispositions adoptées à l’époque ont reçu notre soutien. Et voilà que le Gouvernement veut les annuler par le biais du présent projet de loi.
Ian Brossat, adjoint à la maire de Paris chargé du logement, avait déclaré : « Nous sommes confrontés à de nombreux cas de ventes à la découpe à Paris. C’est le visage le plus abject de la spéculation immobilière : des financiers achètent des immeubles entiers, et les revendent à la découpe le double du prix d’achat. Ce sont de véritables drames humains que l’on ne peut tolérer. »
Nous sommes de plus en plus nombreux à défendre cette exigence de voir cesser cette pratique de la vente à la découpe, y compris au sein du Parlement. J’en veux pour preuve l’amendement identique au nôtre, déposé par Pascal Cherki, député de Paris, et les prises de position de votre ancienne collègue Cécile Duflot, madame la secrétaire d’État. À cet égard, nous partageons totalement les propos de Joël Labbé.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Monsieur Labbé, je le répète, la loi ALUR a institué un dispositif particulièrement complexe et des contraintes extrêmement dissuasives pour les institutionnels qui doivent investir, plus particulièrement dans les territoires situés en zone tendue.
Ces deux amendements tendent à supprimer le plafonnement à six ans de la durée pendant laquelle le locataire a droit au maintien dans les lieux, en cas de vente à la découpe.
La commission spéciale a quant à elle souhaité, dans le paragraphe II du présent article 25, limiter à six ans à compter de la mise en copropriété, le cumul de la durée du bail restant à courir et de la prorogation automatique des baux. Par conséquent, elle émet un avis défavorable sur ces deux amendements.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Carole Delga, secrétaire d'État. Le Gouvernement émet également un avis défavorable, madame la présidente.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. À titre personnel, je soutiendrai ces amendements, et ce pour une raison simple : j’ai participé à l’élaboration de la loi ALUR et, à cette occasion, j’ai présenté, par voie d’amendements, nombre des dispositions qui sont aujourd’hui partiellement remises en cause. Certes, vous avez raison, madame la secrétaire d’État, le présent texte n’annule pas tous les dispositifs de protection. Néanmoins, de mon point de vue, il les affaiblit.
Pascal Cherki, député de Paris, a lui aussi déposé plusieurs amendements à l’Assemblée nationale, car ce sont surtout les grandes métropoles qui sont touchées par le système de la vente à la découpe.
Je considère que la loi ALUR est meilleure que les mesures qui nous sont proposées, et je vais vous donner un argument pour expliquer ma position. Il n’est pas vrai que les institutionnels ont déserté l’investissement à cause de la loi ALUR : voilà maintenant dix à quinze ans qu’ils ont massivement déstocké par le mécanisme des congés pour vente. Le Gouvernement s’attache à les faire revenir sur le secteur du logement ; nous en avons parlé tout à l’heure à propos du logement intermédiaire. Je soutiens cette démarche, car je reste convaincue que cet investissement est rentable, à la condition que l’on garantisse aux institutionnels comme aux bailleurs la réception du loyer.
Le dispositif de la loi ALUR instaurait des protections nécessaires ainsi que la garantie universelle des loyers, sur laquelle Jacques Mézard avait beaucoup travaillé. Cette garantie permettait à tout bailleur public ou privé d’obtenir l’assurance de recevoir les loyers concernés : il était ainsi assuré de la rentabilité de son placement ou de son bien.
Je ne reprendrai pas la parole à chaque fois, mais ma position est la même à l’égard de tous les amendements déposés par le groupe écologiste et le groupe CRC sur l’article 25.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 973 et 1393.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 974 est présenté par MM. Labbé, Desessard et les membres du groupe écologiste.
L'amendement n° 1394 est présenté par Mme Assassi, M. Le Scouarnec et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. – Alinéa 16
Supprimer cet alinéa.
II. – Alinéa 17
Supprimer les mots :
lorsque le terme du contrat de location en cours intervient moins de trois ans après la date d’acquisition,
La parole est à M. Joël Labbé, pour présenter l’amendement n° 974.
M. Joël Labbé. Mes chers collègues, comme nombre d’entre vous, je souhaite faciliter la bonne marche de nos débats. Ma plaidoirie est faite : cet amendement, comme celui que j’ai précédemment défendu, tend à garantir le maintien de la loi ALUR dans sa rédaction initiale.
M. Vincent Capo-Canellas, président de la commission spéciale. Merci de votre concision !
Mme la présidente. La parole est à Mme Annie David, pour présenter l’amendement n° 1394.
Mme Annie David. Il faut le dire et le répéter : à l’instar de nos collègues écologistes, nous souhaitons maintenir les dispositions de la loi ALUR. Michel Le Scouarnec vient de le souligner : si toutes les mesures de ce texte ne nous convenaient pas intégralement, ce dernier nous a paru, dans son ensemble, tout à fait intéressant, et nous l’avons soutenu.
Le présent amendement tend à revenir sur la rédaction de deux alinéas de l’article 25, qui, à nos yeux, sont typiques d’une logique que nous dénonçons, dans la mesure où elle conduit à favoriser les acteurs de la spéculation.
Les membres du groupe CRC sont favorables à un droit au logement pour toutes et pour tous. Nous refusons cette logique et nous vous proposons, mes chers collègues, en adoptant cet amendement, de revenir aux dispositions de la loi ALUR !
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. En examinant ces dispositions, la commission spéciale s’est efforcée d’assurer un certain rééquilibrage dans les rapports locatifs et dans les relations entre le propriétaire et le bailleur, tout en maintenant une sécurité suffisamment forte pour les locataires.
En conséquence, elle émet un avis défavorable sur ces deux amendements.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 974 et 1394.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 975 est présenté par MM. Labbé, Desessard et les membres du groupe écologiste.
L'amendement n° 1395 est présenté par Mme Assassi, M. Le Scouarnec et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 18
Rédiger ainsi cet alinéa :
« - un congé pour reprise respectant les formes et conditions du présent article peut être délivré, une fois écoulée une durée de deux ans à compter de la date d’acquisition. » ;
La parole est à M. Joël Labbé, pour présenter l’amendement n° 975.
M. Joël Labbé. Mes chers collègues, convenez-en, changer la loi d’une année sur l’autre nuit gravement à la stabilité juridique. Pour les propriétaires comme pour les bailleurs, la situation devient de plus en plus compliquée !
En apparence, l’alinéa 18 de l’article 25 clarifie le calcul d’un délai fixé par la loi ALUR dans sa rédaction antérieure. En réalité, il introduit un changement profond, ouvrant une brèche particulièrement périlleuse.
La durée de bail établie par l’article 10 de la loi de 1989 s’impose à tous, et le congé fixé par l’article 15 de la loi ALUR ne peut être modifié qu’en fin de bail. La rédaction initiale de ce texte n’autorisait pas de congé avant un délai de deux ans après l’achat, mais les effets du congé ne pouvaient pour autant déroger à la durée du bail éventuellement reconduit.
À cet égard, le présent projet de loi risque de rompre l’égalité devant la loi : un bailleur serait soumis à l’article 10 de la loi ALUR, tandis qu’un acquéreur, parfaitement avisé de la présence, dans les murs, d’un locataire, ferait l’objet d’une disposition plus favorable.
Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Abate, pour présenter l'amendement n° 1395.
M. Patrick Abate. À nos yeux, cet alinéa 18 ne rééquilibre pas les rapports entre le bailleur et le locataire, mais introduit bel et bien une distorsion particulièrement lourde et dangereuse. Les risques ne sont pas minces ! M. Labbé vient de le rappeler : dans la pratique, une telle disposition reviendrait inévitablement à rompre l’égalité de chacun devant la loi. Alors qu’un bailleur serait soumis à l’article 10 de la loi ALUR, l’acquéreur d’un bien, sachant pourtant qu’un locataire l’occupe, ferait, lui, l’objet d’une disposition qui l’avantagerait très nettement.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. En vertu de la rédaction adoptée par la commission spéciale, le congé ne prend effet qu’au terme d’un délai de deux ans à compter de la date d’acquisition. Ces deux amendements visent à revenir sur cette mesure de rééquilibrage et de clarification. La commission spéciale y est par conséquent défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Carole Delga, secrétaire d'État. Ainsi rédigés, ces amendements tendent, dans certains cas, à interdire à un propriétaire-bailleur d’occuper son logement pour une durée de cinq ans suivant l’acquisition du bien.
Contrairement à ce qui a pu être affirmé, cette mesure diffère des dispositions découlant de la loi ALUR, car cette dernière permet bien de déconnecter les effets du terme du contrat en cours, afin d’assurer à l’ensemble des locataires une durée minimale d’occupation.
Le présent article maintient le mécanisme de la loi ALUR et permet de lever une incertitude quant aux modalités de délivrance du congé pour reprise susceptibles de susciter des difficultés d’application.
Pour ces raisons, le Gouvernement est défavorable à ces amendements.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 975 et 1395.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 976 est présenté par MM. Labbé, Desessard et les membres du groupe écologiste.
L'amendement n° 1396 est présenté par Mme Assassi, M. Le Scouarnec et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. - Après l’alinéa 35
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
… - Après l’article 14 de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, il est inséré un article 14-1 ainsi rédigé :
« Art. 14-1. - Les dispositions de l’article 14 ne visent que les clauses contractuelles des contrats de location en cours lors de la promulgation de la loi n° … du … pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques. Les deuxième et troisième alinéas du même article ne citent que les articles dont l’application immédiate est de nature à s’imposer à l’encontre de dispositions contractuelles antérieures.
« À l’inverse, toutes les dispositions nouvelles de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 relative à une rupture des relations contractuelles, qu’il s’agisse du jeu de la clause résolutoire et de la résolution judicaire visées par l’article 24 notamment pour défaut de paiement, de la délivrance des congés visée par l’article 15, ou de la prorogation de bail résultant notamment de l’article 11-2, et plus généralement tous les effets légaux du contrat de bail, qui ne relèvent pas des dispositions contractuelles antérieures et ne sont donc pas visés par l’article 14, sont immédiatement applicables aux baux en cours, sous réserve des dispositions nécessitant publication préalable d’un décret d’application. Ainsi, les dispositions de l’article 7-1 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 précitée relatives aux délais de prescription s’appliquent immédiatement, dans les conditions fixées par l’article 2222 du code civil. »
II. – Alinéa 38
Remplacer les mots :
Les articles 22 et 24
par les mots :
L’article 22
et les mots :
leur sont applicables
par les mots :
leur est applicable
III. – Alinéas 39 et 42
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Joël Labbé, pour présenter l’amendement n° 976.
M. Joël Labbé. Les dispositions de cet amendement, techniques et juridiques à la fois, exigent quelques explications.
La clarification des baux, auxquels s’appliquent les nouvelles mesures introduites par le biais de la loi ALUR, est un objectif unanimement visé. Elle forme, au surplus, l’objet de cet amendement.
Le paragraphe III de l’article 25, à savoir ses alinéas 36 à 45, introduit des dispositions techniques visant à sécuriser le droit. C’est, de fait, une réécriture de l’article 14 de la loi ALUR qui ne dit pas son nom. Il convient de l’annuler par souci de clarté.
Par ailleurs, les mesures relatives aux ruptures de bail doivent être placées dans un article additionnel, faute de quoi cette nouvelle rédaction introduira des contradictions supplémentaires.
Dans cette rédaction, toute ambiguïté quant à la détermination des baux, nouveaux ou en cours, auxquels s’appliquent les mesures nouvelles de la loi ALUR, serait levée, comme le dépôt de garantie, la prévention des expulsions, les délais de prescription, la division de l’immeuble en copropriété, ou encore la délivrance des congés.
Mme la présidente. La parole est à Mme Michelle Demessine, pour présenter l'amendement n° 1396.
Mme Michelle Demessine. Cet amendement tend, comme celui de nos collègues écologistes, à clarifier une disposition de la loi ALUR visant à sécuriser le parcours locatif des locataires de bonne foi confrontés à des difficultés de paiement. Il s’agit de l’article 27 de la loi précitée qui a modifié l’article 24 de la loi du 6 juillet 1989 prévoyant l’allongement à trois ans du délai de paiement que le juge peut accorder au locataire en situation de payer sa dette locative, ce pour éviter l’expulsion.
L’application de cette disposition fait l’objet de contestations au regard de la formulation de l’article 14 de la loi ALUR, dont ce n’est pourtant pas l’objet. Ce qui est contesté, c’est l’application de cette mesure aux baux en cours lors de l’entrée en vigueur de la loi ALUR. En effet, l’article 14 de ce texte énumère une série de dispositions immédiatement applicables, au rang desquelles ne figure pas ledit article 24.
En conséquence, cet amendement tend à assurer une clarification, je le répète. Nous nous appuyons, à cette fin, sur un avis tout récent de la Cour de cassation.
Conformément à une jurisprudence ancienne, illustrée notamment par des arrêts rendus au sujet de renouvellement de baux ou de délivrance du congé, la Cour de cassation a jugé que « la loi nouvelle régit immédiatement les effets légaux des situations juridiques ayant pris naissance avant son entrée en vigueur et non définitivement réalisées. » Cette instance estime donc que la faculté offerte au juge d’accorder un délai de paiement de trois ans au maximum au locataire en situation de régler sa dette locative s’analyse comme un effet légal du bail, s’agissant non pas d’un dispositif soumis à la liberté contractuelle des parties mais d’un pouvoir accordé au juge par la loi.
Ainsi, la Cour de cassation a considéré que l’article 24 modifié de la loi du 6 juillet 1989 s’appliquait aux baux en cours à la date d’entrée en vigueur de la loi ALUR. Elle fonde sa réponse sur l’article 2 du code civil, qui s’applique indépendamment de l’existence des dispositions transitoires prévues à l’article 14 de la loi ALUR, lesquelles ne visent que ce qui entre dans le champ contractuel du bail. Elle s’appuie également sur le fait que l’article 27 de la loi ALUR prend place dans une partie de ce texte destinée à « améliorer la prévention des expulsions » et à « traiter les impayés le plus en amont possible ».
L’allongement du délai de paiement accordé au locataire menacé d’expulsion répond à une certaine urgence sociale liée à la crise du logement. La Cour de cassation estime qu’en repoussant l’entrée en vigueur de cette mesure, on lui ferait perdre son efficacité et que l’on aboutirait « à la coexistence, pendant plusieurs années, de deux régimes distincts de clause résolutoire ». Elle conclut que cette situation entraînerait « une inégalité de traitement des locataires selon la date de signature de leur bail. »
Mes chers collègues, je ne doute pas que vous aurez à cœur de faire respecter l’esprit de la loi ALUR, votée dans cette enceinte même, et, ce faisant, d’appuyer les impératifs rappelés avec force par la Cour de cassation.
Mme la présidente. L'amendement n° 1710, présenté par Mme Estrosi Sassone, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 38
Rédiger ainsi cet alinéa :
1° L'article 22 ainsi que l'article 24, dans sa rédaction résultant du présent article, de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 précitée leur sont applicables ;
La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur, pour présenter cet amendement et pour donner l’avis de la commission sur les amendements nos 976 et 1396.
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. L’amendement n° 1710 est un amendement de coordination, madame la présidente.
Quant aux amendements identiques nos 976 et 1396, la commission spéciale a jugé quelque peu imprécise leur rédaction.
A priori, ces amendements ne tendent pas à distinguer aussi clairement que les dispositions adoptées par la commission spéciale, d’une part, les mesures modifiant substantiellement l’équilibre du contrat – je songe notamment à l’encadrement des loyers – et n’étant pas censées être appliquées aux situations en cours, et, d’autre part, les dispositions ne modifiant pas fondamentalement l’accord entre le bailleur et le locataire, et dont l’application immédiate se justifierait par la nécessité de simplicité et d’intelligibilité du droit. Pour ces raisons, la commission spéciale émet un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Carole Delga, secrétaire d'État. L’adoption des amendements nos 976 et 1396, tels que rédigés, créerait plus de difficultés de compréhension qu’elle n’assurerait de clarifications. Aussi, le Gouvernement émet un avis défavorable. En revanche, il est favorable à l’amendement de coordination n° 1710.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 976 et 1396.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. L'amendement n° 1709, présenté par Mme Estrosi Sassone, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 35
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
9° Au dernier alinéa du I, à l’avant-dernier alinéa du III, au V, et à la seconde phrase du premier alinéa du VIII de l’article 40 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, les mots : « neuvième à dix-neuvième », sont remplacés par les mots : « treizième à vingt-troisième ».
La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur.
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Il s’agit d’un amendement de coordination.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 1708, présenté par Mme Estrosi Sassone, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 41
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur.
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Il s’agit d’un amendement de cohérence juridique. Il ressort de l’analyse juridique qu’il est préférable de ne pas appliquer aux baux en cours les dispositions relatives à la colocation, en particulier celles qui concernent l’engagement contractuel des colocataires sortant.
Je précise que le présent amendement ne devrait pas avoir pas de conséquence particulière pour les conjoints ou les personnes unies par un PACS, puisque ceux-ci relèvent d'un régime de solidarité d'ordre public prévu par l'article 1751 du code civil. Le conjoint qui quitterait le domicile où continuerait à habiter sa famille et, le cas échéant, ses enfants, ne doit plus acquitter sa part de loyer.
En effet, la solidarité légale d’ordre public prend alors le relais de l’obligation contractuelle, la qualité de parent et de conjoint s’accompagne, bien entendu, d’obligations plus puissantes que celles de simple colocataire, et le présent amendement ne modifie pas cette mécanique juridique de bon sens.
Mme la présidente. Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 248 rectifié est présenté par MM. Mézard, Bertrand, Arnell, Castelli, Collin, Esnol et Fortassin, Mmes Laborde et Malherbe et MM. Requier et Collombat.
L'amendement n° 398 est présenté par Mme Lienemann, M. Guillaume, Mmes Bricq, Emery-Dumas et Génisson, MM. Bigot, Cabanel, Filleul, Marie, Masseret, Raynal, Richard, Sueur, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et apparentés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 41
Remplacer la référence :
2°
par la référence :
3°
La parole est à M. Jacques Mézard, pour présenter l’amendement n° 248 rectifié.
M. Jacques Mézard. Le présent amendement tend à corriger ce qui nous semble être une erreur. Nous proposons d’étendre aux baux en cours le mécanisme de prorogation de bail prévu à l'article 11-2 de la loi du 6 juillet 1989 pour les biens soumis à des ventes à la découpe et non, comme indiqué dans la version actuelle, pour les biens en colocation.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour présenter l’amendement n° 398.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Il est défendu.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Je préfère à ces amendements celui que j’ai présenté, au nom de la commission spéciale.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Carole Delga, secrétaire d'État. L’amendement n° 1708 vise à supprimer les dispositions prévoyant l’application aux baux en cours des mesures relatives à la colocation. Il ressort clairement de l’exposé des motifs de l’amendement du Gouvernement adopté en commission spéciale et tendant à modifier l’article 25 du projet de loi que l’objectif recherché était bien de rendre applicable aux baux en cours l’article 11-2 de la loi du 6 juillet 1989, mais pas les dispositions relatives à la colocation.
Dès lors, la volonté initiale du Gouvernement n’étant pas d’appliquer les nouvelles règles de solidarité en matière de colocation aux baux en cours, il paraît nécessaire de les écarter du mécanisme visé.
Je vous demande par conséquent, madame la corapporteur, de retirer cet amendement en faveur des amendements identiques n° 248 rectifié et 398.
Mme la présidente. Madame la corapporteur, l'amendement n° 1708 est-il maintenu ?
Mme Dominique Estrosi Sassone. Oui, madame la présidente.
Mme la présidente. En conséquence, les amendements nos 248 rectifié et 398 n’ont plus d'objet.
L'amendement n° 1392, présenté par Mme Assassi, M. Le Scouarnec et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Le titre III du livre VI du code de la construction et de l’habitation est complété par un chapitre VI ainsi rédigé :
« Chapitre VI
« Permis de mise en copropriété
« Art. L. 636–1. – Toute division par lots d’un immeuble comprenant au moins cinq locaux à usage d’habitation doit faire l’objet d’un permis de mise en copropriété.
« Art. L. 636–2. – Le permis de mise en copropriété est instruit et délivré dans les formes, conditions et délais déterminés par un décret en Conseil d’État. Il est délivré par le maire au nom de la commune. Lorsqu’une commune fait partie d’un établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d’habitat, elle peut, en accord avec cet établissement, lui déléguer cette compétence qui est alors exercée par le président de l’établissement public au nom de l’établissement. Cette délégation de pouvoir doit être confirmée dans les mêmes formes après chaque renouvellement du conseil municipal ou après l’élection d’un nouveau président de l’établissement public.
« Pour l’instruction des documents visés au présent chapitre, le maire ou, s’il est compétent, le président de l’établissement public de coopération intercommunale peut déléguer sa signature aux agents chargés de l’instruction des demandes.
« Art. L. 636–3. – Toute demande de permis de mise en copropriété est déposée à la mairie. Dans les cas où la commune a délégué ses compétences à un établissement public de coopération intercommunale, le maire conserve un exemplaire de la demande et transmet les autres exemplaires au président de l’établissement public compétent dans la semaine qui suit le dépôt.
« Art. L. 636–4. – Toute personne souhaitant obtenir un permis de mise en copropriété doit assortir sa demande d’un dossier présentant l’état de l’immeuble au regard de normes techniques et environnementales définies par décret ainsi que les contrats de location des logements loués.
« Art. L. 636–5. – Ce permis de diviser ne sera délivré, qu’après examen de la conformité technique, actuelle ou prévisible, de l’immeuble et des lots divisés, avec des normes minimales d’habitabilité. Dans la ou les zones géographiques où la situation résidentielle provoquée par l’évolution et le niveau anormal du marché porte atteinte à la mixité sociale, ce permis de diviser ne sera délivré qu’en tenant compte des engagements souscrits dans un dossier locatif, permettant de garantir la pérennité de la situation locative des locataires ou occupants habitant l’immeuble et de maintenir la fonction locative existante. Un décret en Conseil d’État définit les modalités d’application du présent article.
« Art. L. 636–6. – Préalablement à la délivrance du permis de mise en copropriété, le maire ou le président de l’établissement public de coopération intercommunale recueille l’avis des organisations représentatives des locataires et des organisations représentatives des bailleurs concernés.
« Art. L. 636–7. – L’autorité compétente peut refuser de délivrer le permis de mise en copropriété si l’immeuble ne répond pas à des normes techniques et environnementales définies par décret en Conseil d’État, si la mise en copropriété de l’immeuble va à l’encontre des objectifs définis dans le programme local de l’habitat, en particulier au titre de la mixité sociale, ou si les locataires ou occupants de bonne foi des locaux d’habitation ne disposent pas d’un contrat de location d’au moins six ans à compter de la date de demande du permis.
« Art. L. 636–8. – Un décret en Conseil d’État détermine les modalités d’application du présent chapitre. »
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Par cet amendement, nous proposons d’instaurer un permis de mise en copropriété, afin de renforcer les garanties offertes aux locataires lors des procédures de congé pour vente.
Afin de parer aux faux débats, précisons qu’il s’agit en l’espèce de porter atteinte non pas au droit de propriété, mais au droit de spéculer abusivement.
La vente à la découpe est une atteinte aux droits des locataires et constitue un véritable détournement de la loi de 1989. Les dispositifs actuels ne protègent pas les locataires des agissements des marchands de biens. En sus, les légères avancées qui interviennent parfois sont remises en cause dans les six mois qui suivent.
Or les marchands de biens piétinent le droit au logement des locataires, contraints d’acheter leur appartement ou de le quitter, grossissant ainsi les rangs des demandeurs de logements et étant bien souvent rejetés extra-muros.
L’article 25 remettant en cause la protection des locataires en cas de vente à la découpe, il nous a semblé opportun de déposer le présent amendement. Rappelons-le, l’idée qui le sous-tend était partagée par l’ensemble de la gauche il n’y a pas si longtemps !
M. Pierre-Yves Collombat. Mais les choses évoluent, il faut se moderniser !
Mme Laurence Cohen. Délivré par le maire ou par le président de l’EPCI, le permis de mise en copropriété serait exigé pour toute opération de division par lots d’un immeuble d’au moins cinq logements.
Il est donc question d’agir sur les causes de l’inflation immobilière, c’est-à-dire la spéculation, et non uniquement sur son effet : la baisse du pouvoir d’achat. N’est-il pas, en effet, de la responsabilité publique d'éviter les dérèglements du marché du logement ?
Les élus locaux doivent pouvoir maintenir la vocation locative des logements et s’opposer éventuellement aux ventes par lots.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Contrairement à ce que vous affirmez, ma chère collègue, le dispositif que vous proposez semble bien porter atteinte au droit de propriété – il s’appliquerait à tout le territoire. Or, une telle atteinte n’est pas justifiée par des motifs d’intérêt général.
En outre, il s’ajoute à des mécanismes existants depuis la loi ALUR qui soumettent à autorisation préalable les travaux conduisant à la création de plusieurs logements dans un immeuble, afin de vérifier que les conditions minimales d’habitabilité sont respectées.
Ce permis de mise en copropriété, qui constitue un mécanisme supplémentaire en matière de conformité des lots divisés à des normes minimales d’habitabilité, paraît donc superfétatoire.
Il semble également attentatoire au droit de propriété de subordonner la délivrance de ce permis de diviser au respect des objectifs de mixité sociale définis dans le programme local de l’habitat.
La commission spéciale a donc émis un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Carole Delga, secrétaire d'État. L’article 175 de la loi ALUR prévoyait d’engager une réflexion sur ce sujet, de manière que nous disposions de pistes susceptibles de nous permettre de régler ces questions.
Afin de laisser le temps à cette réflexion d’aboutir, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. L'amendement n° 1385, présenté par Mme Assassi, M. Le Scouarnec et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… - Le dernier alinéa de l’article 1115 du code général des impôts est ainsi rédigé :
« L’exonération des droits et taxes de mutation n’est pas applicable aux reventes consistant en des ventes par lots déclenchant le droit de préemption prévu à l’article 10 de la loi n° 75-1351 du 31 décembre 1975 relative à la protection des occupants de locaux à usage d’habitation ou celui prévu à l’article 15 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986. »
La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Cet amendement tend à revenir sur un avantage fiscal plus qu’anormal, notamment en période de tension sur le marché du logement.
Comme vous le savez, mes chers collègues, les opérations de vente à la découpe sont effectuées non plus par des bailleurs, mais par des investisseurs. Elles correspondent non pas à une réalité économique, mais à des impératifs financiers. Depuis plus de dix ans, les membres de mon groupe alertent sur les risques inhérents à ce genre d’opérations. Et nous n’avons pas toujours été seuls à le faire dans cet hémicycle !
Les ventes à la découpe témoignent incontestablement de la financiarisation du marché du logement. Or la question du logement est trop grave pour que nous tolérions une telle dérive.
En outre, ces opérations emportent une autre conséquence immédiate : le transfert des habitants modestes vers la périphérie des grandes villes. Loin de favoriser la mixité sociale, elles provoquent une véritable déstabilisation.
L’article 1115 du code général des impôts prévoit que, sous condition de réalisation des ventes dans un délai de deux ans à compter de l’acquisition d’un bien, les marchands de biens bénéficient d’une exonération de droits de mutation.
Aujourd’hui comme hier, nous souhaitons revenir sur cette mesure discutable, sinon scandaleuse, singulièrement en période de difficultés pour les finances publiques.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Vous proposez de remettre en cause le régime fiscal prévu à l’article 1115 du code général des impôts. Une telle mesure pourrait entraîner des effets pervers et entraver des opérations de rénovation. C’est la raison pour laquelle la commission spéciale y est défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Carole Delga, secrétaire d'État. Dans l’objectif de limiter les effets d’une imposition en cascade, le législateur a prévu une exonération des droits et taxes sur les mutations d’immeubles s’inscrivant dans une activité commerciale d’achat en vue de la revente destinée à faciliter l’ajustement des marchés foncier et immobilier.
Afin d’éviter la rétention foncière, ce régime de faveur est enserré dans une durée maximale de revente fixée à cinq ans et réduite à deux ans dans le cas de reventes par lots déclenchant le droit de préemption du locataire, dites « ventes à la découpe ».
Monsieur le sénateur, votre proposition visant à ne plus appliquer cette exonération au profit de ces ventes aurait pour effet de renforcer la rétention foncière des immeubles initialement taxés et freinerait la rénovation des logements et leur remise rapide sur le marché. En outre, elle renchérirait le prix d’acquisition de l’immeuble, et donc sans doute le prix de vente proposé aux locataires dans le cadre du droit de préemption.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement vous suggère de retirer cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. Monsieur Foucaud, l'amendement n° 1385 est-il maintenu ?
M. Thierry Foucaud. Oui, madame la présidente.
Madame la secrétaire d’État, vous savez que ces ventes à la découpe constituent un scandale. Le groupe politique, dont la tendance est la même que la vôtre d’ailleurs, comme nous et nos amis écologistes, est depuis longtemps intervenu dans cet hémicycle sur ce sujet.
Ces opérations de financiarisation ne profitent pas au logement social, ni même au logement intermédiaire, dont il était question cet après-midi.
Les résidents sont forcés de fuir vers la périphérie selon des logiques strictement liées à l’argent – le rapport va passer de cent à cinq cents – et non pour des raisons liées au logement, en particulier social. Je souhaite donc que vous votiez en faveur de cet amendement, mes chers collègues.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 25, modifié.
(L'article 25 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 25
Mme la présidente. L'amendement n° 1386, présenté par Mme Assassi, M. Le Scouarnec et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 25
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article 101 de la loi n° 2009-323 du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion est abrogé.
La parole est à M. Patrick Abate.
M. Patrick Abate. Le présent amendement vise à supprimer l’article 101 de loi du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion. Avec cet article, qui est relatif au statut de résident temporaire, on a vraiment affaire au must de la déréglementation : c'est l’UberPOP des relations entre les propriétaires ou gestionnaires de biens et les locataires !
Le statut de résident temporaire prévoit un contrat locatif d’exception renouvelable tous les trois mois, ainsi que la possibilité d’expulser l’occupant, y compris pendant la trêve hivernale, sans relogement, et l’obligation pour ce dernier de surveiller des locaux vacants tout en payant un loyer pouvant tout de même atteindre 200 euros.
Il faut se remémorer l’historique de ce statut. C'est une entreprise d’origine néerlandaise nommée Camelot qui a lancé au départ cette drôle de relation contractuelle. Une recherche menée sur un moteur internet bien connu relative à la façon d’éviter de payer des impôts en utilisant l’article 101 de la loi de 2009 nous conduit, tout de suite après le site de Légifrance, sur le site de Camelot. Je vous invite à vérifier par vous-même, mes chers collègues ! Je devais être l’un des rares à ne pas connaître ce site, mais on est vraiment, je le répète, dans l’UberPOP du logement.
Le locataire est précaire ; il risque sa vie, puisqu’il est censé surveiller une résidence. Les personnes intéressées, qui, au cours de leurs pérégrinations, tombent par hasard sur un logement vacant, comme un château, sont même encouragées à le signaler sur UberPOP… pardon ! sur Camelot et à se porter volontaire pour le surveiller.
Bien évidemment, il s’agit d’une forme de travail dissimulé, organisé au détriment d’entreprises, comme les sociétés de gardiennage, qui, elles, payent leurs impôts et appliquent le droit du travail ; elles sont ainsi soumises à une concurrence déloyale.
Le statut de résident temporaire crée une insécurité juridique majeure. Je vous invite à lire les conditions ce type de contrat : il faut être non-fumeur, français ou, au moins, originaire d’un pays de l’Union européenne, en bonne santé, certificat médical à l’appui… Toutes ces conditions dérogent de manière extraordinaire au droit du travail. Ce contrat va donc à l’encontre de nos grands principes.
Compte tenu de ces éléments, je ne serais pas étonné, mes chers collègues, que vous votiez à l’unanimité en faveur de cet amendement visant à l’abrogation de ce statut tout à fait moyenâgeux. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Monsieur Abate, je suis, pour ma part, étonnée que vous puissiez proposer d’abroger un dispositif permettant à la fois d’éviter toute occupation sauvage de locaux inoccupés et de répondre à une demande de logement. Celle-ci est certes temporaire, mais, vous le savez, elle existe bel et bien, compte tenu des difficultés d’accès au logement et des évolutions sociétales que constituent la mobilité et la décohabitation.
Ce mécanisme, instauré dans un premier temps de manière expérimentale, a été prolongé jusqu’en 2018 par la loi ALUR. Il fait l’objet de contrôles a posteriori effectués par les services de l’État. Encadré comme il l’est et testé à titre expérimental, il me semble aller dans un sens plutôt positif.
Pour toutes ces raisons, la commission spéciale émet un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Carole Delga, secrétaire d'État. L’avis est également défavorable. Ce dispositif avait été institué à titre expérimental. Compte tenu de son bilan globalement positif, le Gouvernement estime nécessaire de le renouveler pour cinq années supplémentaires, jusqu’au 31 décembre 2018.
Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Abate, pour explication de vote.
M. Patrick Abate. Dont acte ! Effectivement, ce dispositif a été prorogé à titre expérimental dans le cadre de la loi ALUR et un bilan biannuel doit être établi.
Je ne remets pas en cause le caractère positif de la mesure, mais de quoi parle-t-on ? S’il s’agit du caractère positif du gardiennage pour certaines habitations vacantes exposées à des situations d’insécurité, comme les squats, je n’en doute pas.
Néanmoins, madame la corapporteur, ce type de dispositif ne peut, en aucune manière, être une réponse aux problèmes de logement que nous connaissons. Il s’agit d’un « service » qui est rendu dans le cadre d’un pseudo-contrat de travail. Je me demande bien ce qu’il y a de positif là-dedans…
Mme la présidente. Les amendements identiques nos 418, 589, 593 et 600 ne sont pas soutenus.
Je suis saisie de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 1457 rectifié, présenté par M. Delattre, Mme Imbert, MM. Carle, Laufoaulu, Vasselle, Mouiller, J. Gautier, Portelli, D. Laurent, Bouchet, Milon et Calvet, Mme Mélot, MM. G. Bailly, Pierre, Mandelli et Laménie, Mme Gruny, MM. Houel et Perrin, Mme Primas et MM. P. Leroy, Leleux, Cardoux et Trillard, est ainsi libellé :
Après l’article 25
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le V de l’article 156 bis du code général des impôts est ainsi rédigé :
« V. – Le bénéfice des dispositions de l’article 156 propres aux immeubles classés ou inscrits au titre des monuments historiques, ou ayant reçu le label délivré par la Fondation du patrimoine en application de l’article L. 143-2 du code du patrimoine, n’est pas ouvert aux immeubles ayant fait l’objet d’une division à compter du 1er janvier 2009 sauf si :
« 1° Cette division fait l’objet d’un agrément délivré par le ministre chargé du budget, après avis du ministre chargé de la culture, lorsque l’immeuble a fait l’objet d’un arrêté de classement, en tout ou en partie, au titre des monuments historiques, d’une inscription à l’inventaire supplémentaire des monuments historiques, ou de la délivrance du label de la Fondation du patrimoine en application de l’article L. 143-2 du code du patrimoine, au moins douze mois avant la demande d’agrément ;
« 2° Le bénéfice est affecté, dans les deux ans qui suivent la demande d’agrément mentionnée au 1° du présent article, à l’habitation pour au moins 75 % de ses surfaces habitables portées à la connaissance de l’administration fiscale.
« Les immeubles ou fractions d’immeubles destinés à une exploitation à caractère commercial ou professionnel ne sont pas considérés comme affectés à l’habitation. »
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Philippe Mouiller.
M. Philippe Mouiller. La réforme de 2009 avait assaini le régime fiscal des monuments historiques et posé les bases d’un équilibre vertueux : droit de regard des administrations de la culture et du budget contre le maintien d’un avantage dérogatoire.
L’article 90 de la seconde loi de finances rectificative pour 2014 a modifié ce dispositif de soutien aux immeubles classés et inscrits au titre des monuments historiques. L’objectif affiché par le Gouvernement était de modifier le régime d’incitation fiscale relatif aux monuments historiques, afin de recentrer le bénéfice de la déduction des déficits sur le revenu global sur des projets immobiliers clairement identifiables et principalement orientés vers la réhabilitation ou la construction de logements.
La mesure adoptée a eu des effets désastreux, puisque, en dépit de l’absence de toute étude d’impact et de débat étayé, deux tiers des monuments historiques en copropriété ont été exclus du bénéfice fiscal de ce régime. Ainsi, l’ensemble des immeubles inscrits à l’inventaire supplémentaire des monuments historiques, de même que ceux qui dépendent de la Fondation du patrimoine, ne peuvent désormais plus prétendre à l’agrément ministériel autorisant leur division.
Dans ce contexte, les abus invoqués ne sauraient raisonnablement être imputés à l’administration, souveraine en la matière.
L’amendement n° 1457 rectifié tend à rétablir la possibilité de diviser les immeubles inscrits et labellisés, dans le cadre de projets destinés à la réhabilitation ou la création de logements, sous contrôle de l’agrément ministériel.
L’État, les collectivités locales ou les établissements publics sont les premiers propriétaires de ces immeubles. Au regard du contexte actuel, il convient de faciliter ces cessions. Sinon, faute de pouvoir vendre ces biens dans le cadre de projets facilitant la création de logements, et donc la mise en copropriété, ces acteurs en subiraient pour toujours les charges sans en retirer une quelconque utilité en contrepartie.
Mme la présidente. L'amendement n° 968 rectifié, présenté par MM. Guené, Baroin, Milon, Calvet, Commeinhes, B. Fournier, Leleux et Legendre, Mmes Des Esgaulx et Deseyne, MM. Trillard, Danesi et de Legge, Mme Deromedi, MM. Bignon et Lefèvre, Mme Lamure et MM. De Montgolfier, Pierre, Béchu, J.C. Leroy, Doligé, Sido, Paul, Charon, Vasselle, Longuet, Laménie, César et de Nicolaÿ, est ainsi libellé :
Après l’article 25
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – La première phrase du V de l’article 156 bis du code général des impôts est ainsi modifiée :
a) Après les mots : « arrêté de classement », sont insérés les mots : « ou d’une inscription » ;
b) Après les mots : « monuments historiques », sont insérés les mots : « ou de la délivrance du label de la Fondation du patrimoine en application de l’article L. 143-2 du code du patrimoine, ».
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Charles Guené.
M. Charles Guené. Cet amendement, cosigné par plusieurs de mes collègues, est presque identique à celui qui vient d’être présenté ; aussi, j’insisterai sur l’intérêt du dispositif proposé davantage que sur son mécanisme.
En réalité, les dispositions que comporte cet amendement auraient mérité de figurer dès l’origine dans le présent projet de loi. Elles intéressent grandement les collectivités locales, car elles pourraient être génératrices d’investissements et de création de logements.
Comme cela vient d’être expliqué, la seconde loi de finances rectificative pour 2014 a bouleversé la réforme de 2009, qui avait établi un équilibre assez consensuel entre les parties s’agissant des bâtiments des monuments historiques.
L’exclusion du bénéfice fiscal a bouleversé totalement l’équilibre économique du système, particulièrement les opérations dépendant de la Fondation du patrimoine et concernant les anciennes casernes, les gares, les hospices, bref tous les bâtiments qui permettent aux collectivités locales de créer du logement, alors que les petites opérations, pourtant très peu créatrices de logements, ont été préservées.
Le système mis en place, loin de produire des économies, dégrade en réalité la situation budgétaire à la fois de l’État et des collectivités locales.
Je ne m’étendrai pas davantage sur ce sujet. Néanmoins, je me réserve la possibilité d’intervenir en explication de vote si jamais je n’avais pas été assez convaincant, notamment auprès de Mme la secrétaire d'État.
Mme la présidente. L'amendement n° 419 n’est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission sur les amendements nos 1457 rectifié et 968 rectifié ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. La commission spéciale est favorable à l’amendement n° 968 rectifié, qui vise à réintégrer dans le champ de la dépense fiscale les copropriétés de monuments inscrits et labellisés. La réintégration des monuments historiques inscrits et des immeubles labellisés par la Fondation du patrimoine constituera en effet un signal positif pour le secteur du bâtiment et permettra de mener à terme des projets d’intérêt public dans nos territoires.
Je demande donc aux auteurs de l’amendement n° 1457 rectifié de bien vouloir le retirer au profit de l’amendement n° 968 rectifié, dont la rédaction me paraît plus aboutie.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Carole Delga, secrétaire d'État. Messieurs les sénateurs, vous proposez, par vos amendements, de revenir sur les aménagements apportés par la seconde loi de finances rectificative pour 2014 au régime fiscal des monuments historiques. Je ne suis pas favorable à ces propositions.
Comme vous le savez, la réforme de la fin de l’année dernière a eu pour objet de clarifier et de rendre objectifs les critères d’octroi de l’agrément. Elle a ainsi permis d’offrir une meilleure visibilité sur l’éligibilité des projets de division de monuments historiques à l’aide fiscale sous le régime de l’agrément. En effet, la réalisation de la majorité des projets de réhabilitation d’immeubles protégés était compromise par l’impossibilité pour les promoteurs de justifier des précédentes conditions de l’agrément relatif à l’intérêt patrimonial du monument et à l’importance des charges relatives à son entretien.
Par ailleurs, le second objectif de cette réforme était de réorienter, en concertation avec le ministère de la culture, ce dispositif fiscal sur les bâtiments classés au titre des monuments historiques, dont la préservation a paru la plus souhaitable pour le patrimoine culturel national.
De plus, la réhabilitation de ces bâtiments classés s’avère très coûteuse pour leur propriétaire, à savoir les collectivités locales. Des mesures transitoires ont été prévues dans le cadre de la réforme susvisée, afin de sauvegarder l’aide publique aux projets suffisamment aboutis pour faire l’objet d’une demande d’agrément.
Je souligne que, pour les années 2013-2014, moins de 20 projets par an ont donné lieu à une demande d’agrément, sur les 46 000 immeubles protégés en France. Nous sommes donc loin du bouleversement qui a pu être évoqué.
J’observe, enfin, que votre position irait au-delà d’un simple rétablissement du dispositif antérieur et de l’objectif visé par ce dernier, puisque les immeubles inscrits au titre des monuments historiques ou bénéficiant du label de la Fondation du patrimoine seraient agréés sous la seule condition d’une affectation au logement, quel que soit le montant des charges d’entretien.
Telles sont les raisons pour lesquelles je vous suggère de retirer vos amendements ; à défaut, j’y serai défavorable.
Mme la présidente. Monsieur Mouiller, acceptez-vous de retirer l'amendement n° 1457 rectifié au profit de l'amendement n° 968 rectifié ?
M. Philippe Mouiller. Oui, madame la présidente. J’ai bien noté que l’amendement de M. Guené était mieux rédigé ! (Sourires.)
Mme la présidente. L'amendement n° 1457 rectifié est retiré.
Monsieur Guené, l’amendement n° 968 rectifié est-il maintenu ?
M. Charles Guené. Oui, madame la présidente, car je ne suis pas convaincu par les arguments de Mme la secrétaire d'État, ce dont elle doit se douter.
Cela étant, je tiens à remercier mon collègue d’avoir bien voulu se rallier à cet amendement.
Quoi qu’il en soit, il y a là un intérêt financier, y compris pour l’État. Il ressort de l’étude que nous avons effectuée que les bâtiments en cause restent une charge à la fois pour l’État et pour les collectivités locales et que le dispositif modifié ne permet pas de les rediviser et de les réaffecter.
Vous avez certes indiqué, madame la secrétaire d’État, que relativement peu de bâtiments ont été concernés jusqu’à présent, mais la modification du régime a tout de même fortement perturbé les collectivités. Quoi qu’il en soit, l’investissement qui pourrait être effectué en l’espèce permettra à la fois de développer, naturellement, la construction, de réaliser l’encaissement sur les ventes, d’éviter des frais d’entretien souvent fastidieux et de bénéficier de recettes de taxe foncière et de taxe d’habitation.
À mes yeux, dans la période actuelle, caractérisée par de fortes contraintes pesant sur les collectivités locales, nous serions bien inspirés, mes chers collègues, de voter en faveur de cet amendement.
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 25.
L'amendement n° 133 rectifié bis, présenté par MM. de Montgolfier, Revet, Husson et Perrin, Mme Deseyne, MM. Saugey, de Nicolaÿ, Longuet, Pierre, Paul, Karoutchi, Calvet, Raison et Commeinhes, Mme Des Esgaulx, M. César, Mme Lopez, MM. Leleux et Legendre, Mmes Deromedi, Micouleau, Gruny et Duchêne, MM. Doligé, Mandelli et Bignon, Mme Imbert, MM. B. Fournier, Lefèvre, Darnaud, Morisset, Genest, Charon et Milon, Mme Lamure, MM. Gremillet, Laménie, Grand, Houpert et Grosdidier et Mme Garriaud-Maylam, est ainsi libellé :
Après l’article 25
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I.- L’article 244 quater C du code général des impôts est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« … – Le crédit d’impôt prévu au I est applicable aux propriétaires de monuments historiques classés ou inscrits relevant du régime fiscal prévu au 3° du I et au 1°ter du II de l’article 156. »
II.- Les dispositions du I ne s'appliquent qu'aux sommes venant en déduction de l'impôt dû.
III - La perte de recettes résultant pour l'État des I et II est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Charles Revet.
M. Charles Revet. Le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, ou CICE, est un dispositif mis en place à la fin de l’année 2012 qui a pour finalité de faire baisser le coût de la masse salariale, afin que les entreprises puissent financer l’amélioration de leur compétitivité et réinvestir dans de nouveaux projets.
Les propriétaires gestionnaires de monuments historiques qui détiennent 50% du patrimoine national protégé sont des acteurs de premier ordre de la filière du tourisme, parce qu’ils participent activement à l’attractivité des territoires par le développement d’offres culturelles et de services innovants.
Filière économique, sociale et dynamique, les monuments historiques concourent de manière significative à la croissance.
Du fait de leur mission de service public de conservation et de mise en valeur du patrimoine national, les propriétaires amenés à embaucher du personnel qualifié doivent pouvoir bénéficier de ce crédit d’impôt, afin de développer l’emploi, bien que n’étant pas des entreprises.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Mon cher collègue, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement, puisque l’élargissement du dispositif prévu à l’article 156 du code général des impôts devrait permettre aux propriétaires de monuments historiques de remplir les missions qui sont les leurs sans avoir recours au CICE.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Carole Delga, secrétaire d'État. Le Gouvernement est défavorable : l’exploitation d'un monument historique permet déjà de bénéficier du CICE si elle est exercée à titre professionnel sous la forme d’une société ou d’une entreprise individuelle. En revanche, je le rappelle, le CICE ne concerne que les entreprises et non les particuliers employeurs. Il nous faut faire la part des choses et rester assez rigoureux dans le raisonnement.
Mme la présidente. Monsieur Revet, l’amendement n° 133 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Charles Revet. Mme la corapporteur m’ayant indiqué que cet amendement était pratiquement satisfait en raison de l’existence de dispositifs qui permettent de répondre aux questions qu’il tendait à résoudre, je le retire.
Mme la présidente. L’amendement n° 133 rectifié bis est retiré.
L'amendement n° 1502, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 25
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La loi n° 46-942 du 7 mai 1946 instituant l'Ordre des géomètres experts est ainsi modifiée :
1° Le 2° de l’article 1er est complété par les mots : « et, à ce titre, lève et dresse, à toutes échelles et sous quelque forme que ce soit, les plans et documents topographiques nécessaires à la réalisation de ces missions » ;
2° Après le premier alinéa de l’article 2, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les travaux prévus au 2° de l’article 1er sont ouverts à la concurrence et peuvent, à ce titre, être réalisés notamment par des géomètres experts ou des géomètres topographes. »
La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Carole Delga, secrétaire d'État. Le présent amendement concerne les géomètres-experts. À ce jour, ces derniers disposent d’un monopole sur les opérations participant à la détermination des limites des biens fonciers. Aussi, ils peuvent se voir confier davantage d’opérations que les géomètres-topographes. Or ce monopole, issu de la loi de 1946 établissant le statut de la profession, trouve sa justification dans la protection de la propriété foncière. À ce titre, il est considéré comme constitutionnel par le juge. Il n’est donc pas question d’y porter atteinte en l’espèce.
En revanche, il est utile de définir plus clairement dans la loi, au même titre que sont présentées les activités relevant du monopole, toutes les activités qui n’en relèvent pas et de rappeler que celles-ci peuvent donc être exercées par les géomètres-topographes.
Juridiquement, cette clarification ne remet pas en cause le monopole légal des géomètres-experts mais peut contribuer à en clarifier les limites auprès des clients publics et privés des géomètres-topographes.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Madame la secrétaire d’État, cet amendement vise à clarifier le champ de compétence des géomètres-topographes, afin d’instaurer davantage de concurrence pour des activités qui ne relèvent pas du monopole des seuls géomètres-experts.
Nos collectivités territoriales ont plus que jamais besoin de clarté juridique et d’outils leur permettant d’optimiser la dépense publique. C’est la raison pour laquelle la commission spéciale a émis un avis favorable.
Pour autant, je souhaite attirer votre attention sur un point. Il semblerait que l’avis de la profession de géomètre-expert, qui ne bénéficie ni d’un numerus clausus ni de tarifs, n’ait jamais été sollicité préalablement à la discussion du présent projet de loi alors qu’il est d’usage de consulter les instances représentatives des professions en cause avant toute modification des textes les concernant.
Aussi, même si la commission spéciale a en effet émis un avis favorable, à titre personnel, je souhaite que vous puissiez nous apporter tous les éléments d’information attestant bien du fait que cette profession a été consultée ou va l’être, afin qu’aucune disposition ne soit mise en œuvre tant que les géomètres-experts n’auront pas pu être associés à une concertation, qui doit être la plus large possible.
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.
M. Pierre-Yves Collombat. Mes chers collègues, vous vous souvenez certainement qu’il n’y a pas si longtemps, chaque année, nous était soumis un texte de simplification et de clarification du droit qui venait de l’Assemblée nationale. Il s’agissait d’une sorte de catalogue, du type Le Chasseur français, qui évoquait un peu tous les sujets. (Sourires.) Je constate que, sous d’autres atours, la situation est à peu près la même.
Loin de moi l’idée d’en revenir à la discussion générale, mais en l’espèce, si mes renseignements sont exacts, il existe un problème de définition de frontières entre géomètres-experts et géomètres-topographes et d’intégration éventuelle d’une profession dans l’autre. Cette opération est menée en collaboration avec Mme la ministre du logement, de l’égalité des territoires et, accessoirement, de la ruralité. Apparemment, une concertation a porté ses fruits, puisque le processus est en cours. Et puis, tout d’un coup, la loi Macron arrive et remet tout en cause.
Alors, de deux choses l’une. Soit les métiers sont les mêmes : pourquoi alors existe-t-il deux professions distinctes? Soit il s’agit de professions différentes, en l’occurrence l’une d’entre elles, celle des géomètres-experts, ayant des compétences que l’autre n’a pas, notamment en matière d’attestations relatives à la propriété, auquel cas l’on ne peut pas organiser la confusion.
Par conséquent, cette prétendue clarification n’en est pas une. À quoi sert-elle ? Et que clarifie-t-elle si la situation est si claire que cela ?
Je ne voterai pas en faveur de cette proposition, qui introduirait des difficultés là où il n’y en a pas sans résoudre pour autant celles qui sont en cours de traitement.
Afin de ne pas reprendre la parole sur l’amendement suivant, je précise que certaines conditions, me semble-t-il, sont exigées pour permettre l’intégration d’une profession dans l’autre, tels la vérification des connaissances ou encore le suivi d’un stage.
Laissons le temps faire son office et les choses se clarifier, comme tel est apparemment le cas : l’affaire est en cours au ministère du logement.
Comme l’a dit Mme la corapporteur, il n’y a pas eu de concertation. L’amendement arrive, si je puis dire, comme un cheveu sur la soupe. En quoi organiser la confusion entre ces deux professions contribuera à libérer l’économie, objectif qu’est censé poursuivre le présent projet de loi ?
Mme la présidente. La parole est à M. Charles Revet, pour explication de vote.
M. Charles Revet. Mon propos ira dans le même sens que celui de M. Collombat, parce que j’ai l’impression qu’il y a beaucoup de confusion dans cette affaire.
Madame la secrétaire d’État, il faudrait que vous nous précisiez si les deux professions en cause sont accessibles par la même formation ou non et quelles sont plus généralement les différences existantes entre elles. Il semble bien qu’il y en ait. Si j’ai bien compris, la loi ALUR a instauré un dispositif qui permet aux géomètres-topographes d’acquérir en deux ans le même niveau de formation que les géomètres-experts.
Il s’agit là d’un point très important. Toutes les collectivités et les particuliers font appel à des géomètres. La confiance, par conséquent, importe. Je n’entends pas, par ces propos, laisser entendre que les géomètres-topographes ne méritent pas la confiance de leurs clients. Néanmoins, il faut que ces derniers soient assurés que les géomètres-topographes, eu égard à leur compétence, pourront leur délivrer les prestations de qualité qu’ils sont en droit d’attendre.
La mesure proposée introduirait une disparité. De surcroît, compte tenu du manque de précision, nous ne pouvons pas voter en faveur du présent amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Bruno Retailleau, pour explication de vote.
M. Bruno Retailleau. Je serais assez bref. Mme la corapporteur a fait une synthèse de ce que beaucoup d’entre nous pensent, mes chers collègues.
Pour ma part, je n’ai jamais entendu un seul élu mentionner une difficulté à travailler avec telle ou telle profession. Cela étant, comme l’a d’ailleurs souligné Mme la corapporteur, on ne peut pas légiférer sans concertation. Par conséquent, les membres du groupe UMP voteront contre cet amendement du Gouvernement.
Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Chaize, pour explication de vote.
M. Patrick Chaize. J’apporterai à mon tour quelques commentaires sur l’amendement présenté par le Gouvernement.
En premier lieu, il me paraît surprenant, voire discourtois, de constater que les instances représentatives des géomètres-experts n’ont pas été consultées sur cette proposition, alors même que, depuis près de deux ans, des négociations ont été engagées entre ces derniers et les géomètres-topographes, afin de régler la question sous l’égide du ministère. Cette démarche législative piétine de fait ces négociations, ce qui est regrettable et risque même d’aller à contre-courant des avancées déjà obtenues.
En second lieu, je m’interroge sur l’opportunité de cette démarche eu égard à l’objectif premier du projet de loi que nous examinons, à savoir soutenir la croissance. Le présent amendement ne semble pas aller en ce sens.
Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Abate, pour explication de vote.
M. Patrick Abate. L’amendement présenté par le Gouvernement procède du même esprit que d’autres dispositions dont nous avons déjà débattu, s’agissant en particulier des notaires.
Nous sommes en présence d’une profession qui ne pose aucun problème ; les élus locaux ne font état d’aucune difficulté dans les rapports qu’ils entretiennent avec les géomètres-experts. De plus, les deux écoles publiques et l’école privée qui forment ces professionnels et qui sont établies à Strasbourg, au Mans et à Paris sont prêtes à recruter davantage. Du reste, personne ne conteste que le renouvellement de la profession soit satisfaisant.
Sans doute les géomètres-topographes souhaitent-ils accéder à cette profession. Cette aspiration est légitime, mais elle a déjà été prise en compte dans la loi ALUR. Dans ces conditions, je peine à comprendre l’intérêt de la disposition nouvelle proposée par le Gouvernement.
Je rappelle simplement que l’accès à la profession de géomètre-topographe est un peu moins contraignant que le cursus de formation des géomètres-experts : ceux-ci sont des ingénieurs qui, à l’issue de leur master, réalisent deux années de stage à temps plein chez un professionnel ; les géomètres-topographes, pour leur part, ne sont pas soumis à cette obligation.
Par ailleurs, je ne suis pas certain qu’une concertation, même minimale, ait été menée avec la profession ; en tout cas, les échos qui nous parviennent du terrain nous portent à croire qu’il n’y en a pas eu.
Pour ces raisons, le présent amendement nous inspire les plus vives réserves. De façon générale, nous avons le sentiment qu’on cherche à stigmatiser des professions qui, parce qu’elles sont réglementées, peuvent donner le sentiment d’être un peu protégées, alors que leur statut protège aussi les citoyens et les élus locaux qui ont affaire à elles. Sans compter que ces professions, qui participent au service public, sont à l’origine d’un nombre tout à fait infinitésimal de contentieux, compte tenu de la qualité de la formation des professionnels et de la confiance dont ils sont dignes.
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. À ma connaissance, les géomètres-experts, en plus d’être des ingénieurs, ainsi que M. Abate vient de le signaler, ont suivi des études de droit qui les qualifient pour émettre un avis juridique autorisé, ce qui n’est pas le cas, semble-t-il, des géomètres-topographes.
Par ailleurs, je ne comprends pas davantage que les orateurs précédents quel avantage est à espérer pour la libération de notre économie d’une confusion entre des professionnels qui, de surcroît, n’ont pas été consultés.
Dans ces conditions, je voterai contre l’amendement n° 1502.
Mme la présidente. La parole est à M. Henri Tandonnet, pour explication de vote.
M. Henri Tandonnet. Je pensais que nous en avions terminé avec les professions réglementées... C’était compter sans le Gouvernement, qui propose d’insérer dans le projet de loi un article additionnel à vrai dire assez surprenant.
En effet, comme les orateurs précédents l’ont souligné, la profession de géomètre-expert n’a pas été consultée. De plus, je ne pense pas que la mesure présentée soit source de clarification en ce qui concerne l’activité réservée aux géomètres-experts en matière d’élaboration de documents d’arpentage garantissant la sécurité juridique des transactions immobilières.
À la vérité, il semblerait surtout que les géomètres-topographes soient bien en cour au ministère de l’économie, car l’article additionnel proposé par le Gouvernement n’est, en définitive, qu’un article de publicité en leur faveur !
Mme Nicole Bricq. C’est surtout vous qui leur faites de la publicité !
M. Henri Tandonnet. En tout cas, je répète que la formulation proposée, fondée sur l’adverbe « notamment », ne serait source d’aucune clarification. C’est pourquoi je voterai contre l’amendement.
M. François Zocchetto. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à M. Éric Doligé, pour explication de vote.
M. Éric Doligé. Je suppose, madame la secrétaire d’État, que ce n’est pas sans raison que le Gouvernement a déposé cet amendement. Quelle est donc cette raison ? S’agit-il de tirer une partie de la profession vers le haut ou bien d’en tirer une autre vers le bas ? J’aimerais bien connaître la réponse, car nous savons qu’on nivelle plus souvent par le bas qu’on n’aligne par le haut !
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Carole Delga, secrétaire d'État. Madame la corapporteur, vous avez expliqué que le ministère du logement, de l’égalité des territoires et de la ruralité avait lancé une concertation globale avec les géomètres-experts et les géomètres-topographes, dans le cadre de laquelle le point dont nous débattons était abordé. Je vous signale que cette concertation porte sur plusieurs sujets relatifs à ces professions.
Monsieur Revet, la question que vous avez soulevée en ce qui concerne la formation des professionnels se rapporte à un autre amendement, auquel le Gouvernement sera défavorable, car il touche à un domaine qui relève du pouvoir réglementaire.
Monsieur Doligé, la clarification que nous proposons entre les fonctions de géomètre-expert et de géomètre-topographe vise à améliorer et à tirer vers le haut l’exercice de ces professions.
Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Mézard, pour explication de vote.
M. Jacques Mézard. J’ai attendu d’entendre vos explications, madame la secrétaire d’État, pour me forger un avis sur cet amendement. Or je n’ai pas été convaincu par vos arguments. En effet, vous parlez de clarification, mais j’ai trouvé que votre démonstration n’était pas très claire – pour être très clair… (Sourires.)
En fin de compte, le Gouvernement propose de donner la possibilité aux géomètres-topographes de concurrencer les géomètres-experts sur une partie des missions de ces derniers. M. Doligé a eu raison de le faire observer il y a quelques instants : s’il s’agit d’aligner les professions vers le bas, que le Gouvernement le dise !
Quel est donc le véritable objectif de cette mesure ? On ne le comprend pas. Grâce à elle, de meilleurs travaux seront-ils réalisés à meilleur coût, en particulier pour nos collectivités territoriales ? En vérité, alors que la profession de géomètre-expert possède un ordre et une formation spécialisée sur laquelle d’autres orateurs ont déjà insisté, on discerne mal la véritable motivation du Gouvernement, au-delà du plaisir qu’il cherche à faire, peut-être, aux géomètres-topographes.
Dès lors, nous ne pouvons pas nous laisser persuader d’accepter des modifications fondamentales pour des professionnels qui ont suivi des études et beaucoup travaillé pour acquérir des compétences. Il n’est pas possible de leur dire : les études que vous avez faites sont peut-être très bonnes, mais d’autres qui n’ont pas la même formation vont pouvoir faire le même travail que vous, moins bien et pas forcément moins cher !
M. Hubert Falco. Très bien !
Mme la présidente. L'amendement n° 927, présenté par M. Aubey, est ainsi libellé :
Après l’article 25
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le premier alinéa de l’article 4 de la loi n° 46-942 du 7 mai 1946 instituant l’ordre des géomètres experts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Ce stage se limite aux compétences requises pour réaliser les travaux prévus au 1° de l’article 1er pour les géomètres-topographes agréés par le ministère de l’économie. »
M. François Aubey. Je le retire, madame la présidente !
Mme la présidente. L’amendement n° 927 est retiré.
Article 25 bis A
(Non modifié)
Le code de la construction et de l’habitation est ainsi modifié :
1° L’article L. 313-3 est ainsi modifié :
a) Au début de la première phrase du treizième alinéa, sont ajoutés les mots : « Concernant les ressources de la participation des entreprises à l’effort de construction perçues par les organismes mentionnés au douzième alinéa, » ;
b) À la première phrase du dernier alinéa, après la première occurrence du mot : « au », est insérée la référence : « treizième alinéa du » ;
c) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Concernant les ressources de la participation des entreprises à l’effort de construction perçues par des organismes collecteurs agréés non associés de l’Union des entreprises et des salariés pour le logement, la nature et les règles d’utilisation des emplois, les enveloppes minimales et maximales consacrées à chaque emploi ou catégorie d’emplois et le montant maximal annuel affecté au financement des investissements et des charges nécessaires au fonctionnement de ces organismes sont fixés par convention entre l’État et chacun de ces organismes. Ces conventions sont d’une durée de cinq ans. » ;
2° Au a du 2° du I de l’article L. 342-2, les mots : « de la convention prévue » sont remplacés par les mots : « des conventions prévues ».
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Le Scouarnec, sur l'article.
M. Michel Le Scouarnec. L’article 25 bis A du projet de loi concerne les règles d’utilisation des fonds du 1 % patronal et les frais de fonctionnement de l’organisme collecteur rattaché à la SNCF. Il est destiné à combler un vide juridique, ainsi qu’on le lit dans le rapport, où il est rappelé à juste titre que la participation des employeurs à l’effort de construction dans notre pays s’élève au total à 3,3 milliards d’euros.
Seulement, cet effort se traduit par un affaiblissement des crédits spécifiques au logement, un recul des dispositifs de solidarité, une ponction accrue des acteurs du secteur et un renforcement de la rente privée. Singulièrement, comment croire que la crise du logement que nous traversons pourra être résolue par l’accentuation des exonérations fiscales et par la diminution des aides à la pierre ? Comment croire aussi que le 1 % logement pourra pallier éternellement tous les désengagements de l’État ?
Cette ambiguïté est patente dans le présent article, censé opérer une coordination avec certaines dispositions de la loi ALUR. Pourtant, à peine quelques semaines après le vote de cette loi, que nous avions considérée avec prudence mais qui tentait d’opérer une sorte de régulation, ses principales mesures ont été dénoncées, avant même la publication des décrets d’application. Ce renoncement est fort regrettable.
Je tiens à aborder également la situation du 1 % logement, qui est toujours plus sollicité. Il n’est pas sain que l’ensemble de la politique du logement, voire même l’ensemble de la politique de la ville, soit financé par ce seul dispositif, sur lequel reposent les missions d’aide à la pierre, le financement de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine et, depuis peu, les aides personnelles au logement.
Par ailleurs, on ne peut pas alourdir les missions du 1 % logement sans revoir les conditions mêmes de celui-ci. À cet égard, je vous rappelle, mes chers collègues, que nous proposons de rétablir un financement qui soit réellement de 1 %, à partir de dix salariés. Cette mesure apporterait un vrai grand bol d’oxygène ; elle serait un levier véritablement efficace pour relancer le secteur du bâtiment et faire reculer la crise. Voilà une proposition de nature à changer la donne !
Cette exigence doit être conciliée avec celle, minimale, de retrouver les 30 000 emplois perdus dans le secteur du bâtiment et des travaux publics. De fait, relancer la construction sociale, c’est relancer également la bataille pour l’emploi et la lutte contre le chômage massif et de longue durée.
Pour ce qui concerne le développement du logement intermédiaire, qui est l’un des objectifs du projet de loi, nous n’avons pas d’objection de principe à faire valoir, car il convient de favoriser la mixité sociale, qui suppose la diversité de l’offre. Seulement, pour nous, le logement intermédiaire, c’est le prêt locatif social.
L’urgence est aussi de faire baisser les prix du marché, afin de réduire le poids des dépenses liées au logement qui sont dans notre pays supérieures d’environ 30 % à ce qu’elles sont en Allemagne.
Certes, le 1 % logement ne peut pas tout. Le choc de construction doit passer par un financement renforcé des acteurs du logement et des aides directes à la construction publique.
Nous ne partageons pas la vision plutôt libérale de l’exercice du droit fondamental au logement sur laquelle repose le présent article. Elle ne permettra ni d’atteindre les engagements de construction de 500 000 logements par an ni de relever le défi essentiel que représente l’accès de nos concitoyens à un logement de qualité, économe en énergie et adapté à leurs moyens. Non, cette vision n’est pas la bonne pour répondre aux besoins de millions de nos concitoyens. Dommage, car la situation est très grave !
M. Patrick Abate. Très bien !
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 25 bis A.
(L'article 25 bis A est adopté.)
Article additionnel après l’article 25 bis A
Mme la présidente. L'amendement n° 1373, présenté par Mme Assassi, M. Le Scouarnec et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 25 bis A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement, avant le 31 décembre 2015, un rapport sur la possibilité de l’instauration d’un moratoire sur les loyers dans le secteur public.
La parole est à M. Jean-Pierre Bosino.
M. Jean-Pierre Bosino. Alors que le présent projet de loi a pour objectif de promouvoir la construction de logements intermédiaires, nous pensons qu’il faut avant tout lutter contre la hausse démesurée des loyers. C’est pourquoi nous considérons qu’il convient de décider en urgence d’un gel des loyers dans le secteur public.
Comme nous l’avions déjà souligné lors de la discussion du projet de loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, le logement est devenu au fil du temps, du fait de la modération salariale – c’est un euphémisme – et de la pression foncière et immobilière, le principal poste de dépenses des ménages, à plus forte raison des ménages populaires, dont le loyer absorbe souvent plus de 30 % des revenus.
Mes chers collègues, nous vous invitons à donner véritablement un sens aux expressions « pouvoir d’achat », « croissance » et « intérêt général » !
Alors que la question des prélèvements obligatoires et de leur répartition se pose avec acuité tous les jours, il est impératif de se pencher très sérieusement sur la question du logement, et d’examiner ce que celui-ci représente aujourd’hui dans l’ordre des priorités pour une grande partie des familles de notre pays.
Si le Gouvernement, comme il l’a confirmé cet après-midi, se refuse à endiguer la hausse des loyers dans le secteur privé, ce que nous regrettons et dénonçons, il ne peut pas s’abriter derrière les mêmes arguments en ce qui concerne le logement public.
Il le peut d’autant moins que, dans le secteur public social, la détérioration tendancielle des conditions de financement a conduit maints organismes à pratiquer des politiques locatives visant à percevoir des loyers toujours plus élevés en rémunération du service rendu. Sans compter que la situation financière de certains organismes a entraîné des plans de redressement assortis de hausses de loyers supérieures à la moyenne et, pour le moins, à l’inflation.
L’instauration d’un moratoire dans le secteur public social serait donc un signal fort adressé à des locataires dont la modestie des ressources est connue et dont le pouvoir d’achat est particulièrement sensible à la moindre évolution du loyer, des tarifs de l’eau ou de l’énergie, ou encore des frais de transport.
Ce serait l’occasion de mettre en œuvre une plus large concertation entre le Gouvernement, les organismes bailleurs et les associations de locataires.
C'est la raison pour laquelle nous vous proposons, mes chers collègues, de voter en faveur de cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. S'agissant d’une demande de rapport, la commission spéciale émet un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 1373.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 25 bis BA (nouveau)
Au V de l’article 123 de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, l’année « 2015 » est remplacée par l’année « 2016 ». – (Adopté.)
Article 25 bis B
(Non modifié)
Après le quinzième alinéa de l’article L. 441-1 du code de la construction et de l’habitation, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Dans les conventions de réservation mentionnées aux dixième à douzième alinéas ainsi que dans les conventions résultant d’une délégation mentionnée au treizième alinéa, en cours à la date de publication de la loi n° … du … pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques ou signées à compter de cette date, et conclues pour des logements situés dans les zones mentionnées au premier alinéa du I de l’article 17 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986, le délai dans lequel le réservataire propose un ou plusieurs candidats à l’organisme propriétaire des logements ne peut excéder un mois à compter du jour où le réservataire est informé de la vacance du logement. Le présent alinéa est d’ordre public. »
Mme la présidente. La parole est à Mme Michelle Demessine, sur l'article.
Mme Michelle Demessine. Cet article porte sur la question de la gestion locative, question particulièrement importante, notamment si l’on garde à l’esprit que la plupart des organismes d’HLM ont constitué des patrimoines en recourant à des financements divers et variés, dont la diversité emporte, entre autres conséquences, la répartition de droits dits « de réservation » et donc d’attribution.
Parce que les collectivités locales garantissent les emprunts des organismes d’HLM, s’acquittent de la surcharge foncière et subventionnent directement les organismes bailleurs, elles bénéficient d’un contingent de réservation.
Parce que l’État subventionne la réalisation de logements et garantit les ressources mobilisées pour les construire, les préfets sont, de même, titulaires de droits de réservation.
Enfin, parce que les organismes collecteurs de la participation des entreprises à l’effort de construction sont mis à contribution pour boucler le budget de certaines opérations, ils se voient, eux aussi, attribuer un certain pourcentage de logements réservés, dont les occupants pourront provenir des entreprises cotisant auprès de ces organismes.
Comme chacun le sait, cela correspond au schéma traditionnel de la répartition des attributions sur un patrimoine donné, à raison des financements apportés par chaque partenaire.
Il est proposé à juste titre de traiter par le présent article le problème suivant : lorsqu’un logement devient vacant en raison du départ du locataire pour tout motif communément admis, le réservataire ne présente pas forcément un candidat rapidement. Nous le savons, lorsqu’un service municipal du logement ou le service de la préfecture est en cause, le nombre des candidats au relogement, notamment en zone tendue, est élevé, voire excessif, comme mes collègues l’ont indiqué à plusieurs reprises. C'est le fruit de politiques du logement qui, avant de se pencher sur la demande, commencent par sécuriser l’offre et préfèrent assurer la rentabilité de l’investissement immobilier avant de conforter la liberté du parcours résidentiel des familles...
Le problème se pose singulièrement pour ce qui concerne les collecteurs de la PEEC – la participation des employeurs à l'effort de construction –, qui sont réservataires de lots plus ou moins importants de logements, notamment ceux qui doivent faire face à leurs obligations à l’égard de demandeurs de logement à faibles ressources ou d’origine étrangère. On trouvera peut-être curieux que ces collecteurs rencontrent quelques difficultés pour satisfaire ces obligations.
Dans les faits, au-delà de la faculté laissée aux organismes bailleurs de proposer, en cas de vacance, des candidats au relogement pour les logements dont les attributaires n’ont pas de candidature à proposer, il convient de s’interroger sur l’efficacité de conventions passées entre les parties qui veilleraient à éviter cette vacance technique pour le moins délicate.
De telles conventions doivent, à notre sens, être promues aux fins d’apporter des solutions acceptables pour tous en matière d’exercice du droit au logement.
Sur la base de ces remarques, nous voterons l’article 25 bis B.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 25 bis B.
(L'article 25 bis B est adopté.)
Article 25 bis C
(Supprimé)
Mme la présidente. L'amendement n° 1079, présenté par M. Vergès, Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
L’article L. 221-5 du code monétaire et financier est ainsi modifié :
1° Après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Une quote-part du fonds d’épargne est consacrée pour financer les prêts au bénéfice du logement social dans les départements et régions d’outre-mer. » ;
2° Au troisième alinéa, la référence : « deux premiers » est remplacée par la référence : « trois premiers ».
La parole est à M. Michel Billout.
M. Michel Billout. Je défends cet amendement à la place de Paul Vergès, sénateur de La Réunion.
Un plan logement outre-mer a été récemment présenté. Il a pour objectif de donner un coup de fouet à la construction et aux réhabilitations des logements outre-mer.
Je vous donne quelques chiffres, mes chers collègues : selon le Gouvernement, 90 000 logements supplémentaires sont nécessaires dans les outre-mer et 10 000 logements sociaux doivent y être construits ou réhabilités chaque année ; le nombre de demandes de logement en attente à La Réunion ne s'élève, lui, qu’à 22 000 – c’est un chiffre avancé par les partenaires les plus timides ; il faudrait construire 8 000 logements par an toujours à La Réunion pour répondre aux besoins actuels et, éventuellement, accueillir la génération future.
En outre, l’ensemble des bailleurs sociaux, notamment ceux de La Réunion, tirent depuis des mois la sonnette d’alarme sur la production de logements sociaux en ce début de l’année 2015.
Toujours à La Réunion, plus de 80 % des 3 350 projets de logements locatifs sociaux financés par la ligne budgétaire unique, ou LBU, en 2014 ne peuvent être lancés, les dossiers étant retenus à l’instruction par les services fiscaux, ce pour des raisons purement administratives ! C’est ainsi toute une partie de la programmation locative pour 2014, soit plus de 2 500 logements, qui est aujourd’hui bloquée faute de règles établies par les autorités administratives d’État. Les marchés de travaux ne sont pas lancés.
Cette situation a évidemment des conséquences dramatiques pour le secteur du bâtiment et des travaux publics, dont le chiffre d’affaires est passé, entre 2005 et 2012, de deux milliards à un milliard d’euros, et dont le nombre de salariés est passé de 25 000 à 15 000, soit une perte de 10 000 emplois, une véritable hécatombe !
Les bailleurs sociaux de La Réunion, comme ceux des autres régions d’outre-mer, d’ailleurs, sont également inquiets en raison d’incertitudes relatives à la mise en œuvre des dispositifs de crédit d’impôt, de la suppression de l’allocation logement accession, dont la conséquence est une remise en cause de l’équilibre du financement des programmes LES, qui concernent les logements évolutifs sociaux, ou encore de la baisse des crédits de la LBU qui s’élève à dix millions d’euros par rapport aux exercices antérieurs.
Le Gouvernement nous annonce que le plan logement outre-mer sera rapidement opérationnel. Nous en prenons acte. Néanmoins, ce plan sous-tend une interrogation. Il repose en effet sur une volonté, et je cite le Gouvernement : « faire converger des mesures déjà connues ». Cela sera-t-il suffisant pour résoudre cette question prioritaire pour les ultramarins ? Rappelons qu’un habitant sur dix concerné par la politique de la ville est ultramarin.
Il est impératif, à notre sens, d’ouvrir de nouvelles pistes de financement, notamment par une nouvelle répartition des fonds d’épargne.
En outre-mer comme en France métropolitaine, les épargnants participent à la collecte des livrets d’épargne défiscalisés. Il est donc légitime que la loi prévoie qu’une part de cette collecte soit expressément utilisée pour la construction de logements dans ces départements et régions d’outre-mer. Tel est l’objet de cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. En pratique, cet amendement est satisfait, puisque les prêts au logement social de la Caisse des dépôts et consignations ne se limitent pas à la métropole. La commission spéciale en demande donc le retrait.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Carole Delga, secrétaire d'État. Cet amendement est inutile, la Caisse des dépôts et consignations finançant déjà le logement social dans les départements et régions d'outre-mer.
Mme la présidente. Monsieur Billout, l’amendement n° 1079 est-il maintenu ?
M. Michel Billout. Comme il m'est difficile, en raison du décalage horaire, de demander son avis à M. Vergès, je le maintiens.
Mme la présidente. En conséquence, l’article 25 bis C demeure supprimé.
Article 25 bis D
(Non modifié)
L’article L. 211-2 du code de l’urbanisme est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le titulaire du droit de préemption urbain peut déléguer son droit à une société d’économie mixte agréée mentionnée à l’article L. 481-1 du code de la construction et de l’habitation, à l’un des organismes d’habitations à loyer modéré prévus à l’article L. 411-2 du même code ou à l’un des organismes agréés mentionnés à l’article L. 365-2 dudit code, lorsque l’aliénation porte sur un des biens ou des droits affectés au logement. Leur organe délibérant peut déléguer l’exercice de ce droit, dans des conditions définies par décret en Conseil d’État. Par dérogation à l’article L. 213-11 du présent code, les biens acquis par exercice du droit de préemption en application du présent alinéa ne peuvent être utilisés qu’en vue de la réalisation d’opérations d’aménagement ou de construction permettant la réalisation des objectifs fixés dans le programme local de l’habitat ou déterminés en application du premier alinéa de l’article L. 302-8 du code de la construction et de l’habitation. » – (Adopté.)
Article 25 bis E
I. – Le début du troisième alinéa de l’article 21 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis est ainsi rédigé : « Lorsque le syndic en fonction a été désigné deux fois consécutivement, le conseil syndical peut procéder à une mise en concurrence de plusieurs projets de contrat de syndic avant la tenue de la prochaine assemblée générale appelée à se prononcer sur la désignation d’un syndic, sans préjudice… (le reste sans changement). »
II. – Le I entre en vigueur trois mois après la promulgation de la présente loi.
Mme la présidente. L'amendement n° 1530, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Remplacer cet alinéa par quatre alinéas ainsi rédigés :
I. – L’article 21 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis est ainsi modifié :
1° Le troisième alinéa est ainsi rédigé :
« Tous les trois ans, le conseil syndical procède à une mise en concurrence de plusieurs projets de contrat de syndic avant la tenue de la prochaine assemblée générale appelée à se prononcer sur la désignation d’un syndic, sans préjudice de la possibilité, pour les copropriétaires, de demander au syndic l’inscription à l’ordre du jour de l’assemblée générale de l’examen des projets de contrat de syndic qu’ils communiquent à cet effet. Toutefois, le conseil syndical est dispensé de procéder à cette mise en concurrence lorsque l’assemblée générale annuelle qui précède celle appelée à se prononcer sur la désignation d’un syndic après mise en concurrence obligatoire décide à la majorité de l’article 25 d’y déroger. Cette question est obligatoirement inscrite à l’ordre du jour de l’assemblée générale concernée. » ;
2° Le quatrième alinéa est supprimé.
La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Carole Delga, secrétaire d'État. Le Gouvernement a souhaité réintroduire le principe d’une mise en concurrence obligatoire des syndics de copropriété tout en laissant l'assemblée générale des copropriétaires souveraine pour déterminer, à la majorité qualifiée, si cette mise en concurrence est pertinente au regard de son jugement sur la qualité des prestations du syndic en place.
Cet amendement tend à modifier le projet issu des travaux de l’Assemblée nationale en instaurant une obligation de mise en concurrence tous les trois ans. L’assemblée générale des copropriétaires pourrait cependant décider d’y déroger lors de l’assemblée générale annuelle qui précède celle qui désigne le syndic. La question de cette possible dérogation serait obligatoirement inscrite à l’ordre du jour lors de cette assemblée générale.
Le présent amendement, s’il était adopté, permettrait d’assurer la protection des propriétaires – l’obligation de mettre en concurrence leur syndic à intervalle régulier serait fixée – et la liberté de déroger à cette mise en concurrence s'ils sont satisfaits des prestations de leur syndic. Rappelons que, à n’importe quelle assemblée générale, tout copropriétaire peut toujours faire inscrire à l’ordre du jour la question de la mise en concurrence du syndic, indépendamment de l’intervalle de trois ans que cet amendement tend à instituer : cette disposition n’est pas remise en cause.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. La mesure que vous proposez, madame la secrétaire d’État, paraît relativement équilibrée. Pour autant, ce dispositif semble assez complexe à mettre en œuvre. C’est pourquoi la commission spéciale souhaiterait que l’on arrive à en vérifier la faisabilité et que – peut-être dans le cadre de la commission mixte paritaire – des améliorations soient proposées.
Quoi qu’il en soit, elle émet un avis favorable sur cet amendement
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 25 bis E, modifié.
(L'article 25 bis E est adopté.)
Articles additionnels après l'article 25 bis E
Mme la présidente. L'amendement n° 309 rectifié, présenté par Mme Lienemann, est ainsi libellé :
Après l’article 25 bis E
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le IV de l’article 28 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est ainsi modifié :
a) La première phrase est ainsi modifiée :
- les mots : « et autorisation » sont remplacés par les mots : « puis accord » ;
- après le mot : « département, », sont insérés les mots : « qui s’assure que l’organisation projetée pour la gestion des équipements et biens à usage collectif n’est pas de nature à créer des risques sérieux pour la sécurité des occupants ou à compromettre gravement leurs conditions d'occupation, » ;
- après les mots : « sur dalle », sont insérés les mots : « ou imbriqués » ;
b) Après la première phrase, sont insérées deux phrases ainsi rédigées :
« Le maire et le représentant de l’État sont saisis par un courrier exposant les motifs de la division en volumes ainsi que les principes de l’organisation qui sera mise en place après la scission de la copropriété pour la gestion des éléments d'équipements et biens à usage collectif ou d’intérêt général. Si le maire ne se prononce pas dans un délai de deux mois, son avis est réputé favorable. » ;
c) À la dernière phrase, les mots : « son avis est réputé favorable » sont remplacés par les mots : « son silence vaut accord » ;
2° Le troisième alinéa est ainsi modifié :
a) Après le mot : « entretien », sont insérés les mots : « , et le cas échéant la propriété et la valorisation » ;
b) Après le mot : « équipements », sont insérés les mots : « et biens » ;
c) Après le mot : « collectif », sont insérés les mots : « ou d’intérêt général » ;
3° Le troisième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Cette décision peut prévoir l’adhésion obligatoire à l’union de syndicats des propriétaires de volumes et syndicats issus de la division. »
La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Cet amendement est assez technique et assez compliqué.
Les copropriétés gigantesques, telle celle de la tour Montparnasse à Paris, posent le problème de leur séparation par lots afin de réaliser des rénovations et des restructurations. Des dispositions permettant cette division en volumes figurent déjà dans la loi ALUR. Mais la mise en œuvre technique de cette opération nécessiterait, pour être plus opérationnelle, des clarifications. Tel est l’objet du présent amendement, dont l’adoption permettrait aux ensembles immobiliers complexes intéressés, en particulier les copropriétés en difficulté – chacun a en mémoire le travail de Claude Dilain –, d’engager des travaux de rénovation et de remise aux normes notamment énergétiques, ainsi que des constructions de logements entre autres sociaux et des créations de surfaces commerciales.
Pour ne pas ralentir les opérations de restructuration de ces ensembles immobiliers tout en s’assurant que la restructuration aboutira à un ensemble immobilier dont la gestion sera cohérente et l’entretien des équipements collectifs ne posera pas de problème de sécurité, cet amendement tend ainsi à préciser que le maire donne son avis et le préfet son accord. Celui-ci s’assure que l’organisation projetée pour la gestion des équipements et biens à usage collectif n’est pas de nature à créer des risques sérieux pour la sécurité des occupants ou à compromettre gravement leurs conditions d'occupation.
À cette fin, le maire et le préfet sont saisis par un courrier dans lequel sont exposés les motifs de la division en volumes, ainsi que les principes de l’organisation qui sera mise en place pour la gestion des équipements collectifs, afin de s’assurer qu’il n’existe aucun vide juridique pour ce qui concerne les responsabilités d’entretien. Il est spécifié que l’avis du maire est soumis, comme l’est l’accord du préfet, au principe suivant lequel le silence vaut acceptation.
Il est également indiqué que la division en volumes peut concerner un ensemble immobilier complexe comportant plusieurs bâtiments distincts, sur dalle ou imbriqués.
En outre, pour assurer une bonne gestion des éléments d’équipements communs, à usage collectif ou d’intérêt général, comme cela était le cas dans la copropriété d’origine, nous proposons que l’adhésion à l’union de syndicats, organisme de gestion des équipements communs, puisse être rendue obligatoire. Et les missions de l’union de syndicats sont précisées.
En clair, il s’agit d’essayer d’organiser les choses pour éviter les vides juridiques, afin de garantir par un accord conjoint du maire et du préfet le respect de l’intérêt collectif, qui passe notamment par l’entretien du bâtiment.
Cet amendement est, certes, technique, mais c’est parce que la situation est compliquée ! (Sourires.) Il y a de réelles difficultés sur le terrain. Je souhaite bien du plaisir à ceux qui voudraient rénover une partie d’une copropriété située sur une dalle comprenant un ensemble immobilier et un centre commercial !
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Pillet, corapporteur de la commission spéciale. Ma chère collègue, nous serons au moins d’accord pour dire que votre amendement est très technique et compliqué. (Sourires.) En revanche, nous n’avons pas forcément le même avis sur le fond.
Cet amendement tend à modifier substantiellement la procédure, consacrée par la loi ALUR, de scission de copropriété en volumes pour les ensembles immobiliers complexes. Il ne nous paraît pas souhaitable de décider de telles modifications de l’article 28 de la loi du 10 juillet 1965 au travers d’un simple amendement de séance portant article additionnel, sans véritable évaluation de leurs conséquences.
Vous en conviendrez, un tel dispositif soulève plusieurs questions importantes. Quel serait l’effet de l’application du dispositif de scission en volumes aux bâtiments que vous qualifiez d’« imbriqués » ?
La loi du 10 juillet 1965 autorise la division en volumes pour les bâtiments distincts sur dalle ou les entités homogènes affectées à des usages différents ; voilà qui ressemble à ces fameux immeubles « imbriqués »… Elle n’interdit pas explicitement la division en volumes d’un bâtiment unique. Les « immeubles imbriqués » me semblent donc d’ores et déjà couverts par les textes en vigueur. (Mme Marie-Noëlle Lienemann manifeste son scepticisme.)
Les bâtiments imbriqués relèvent d’un autre type d’ensemble immobilier. Il faut une véritable étude préalable avant d’autoriser leur scission en volumes.
La loi ALUR a déjà considérablement assoupli la procédure. Il n’est pas possible d’aller plus loin sans une réflexion approfondie.
Au demeurant, et nous pourrons nous rejoindre sur ce point, l’adoption de cet amendement alourdirait la rédaction de l’article 28 de la loi du 10 juillet 1965, en ajoutant des précisions qui ne relèvent pas du domaine législatif. Je pense par exemple aux modalités d’information du maire et du préfet par courrier. Certaines dispositions sont même inutiles. Aux termes de l’amendement, le représentant de l’État dans le département s’assure que le projet « n’est pas de nature à créer des risques sérieux pour la sécurité des occupants ou à compromettre gravement leurs conditions d’occupation ». Or l’autorisation donnée par le préfet a déjà justement pour objet de vérifier que le projet ne porte pas atteinte à la salubrité, à la tranquillité et à la sécurité publiques.
Enfin, l’introduction de nouvelles notions dont le sens est relativement proche de celles qui existent déjà à l’article 28 de la loi du 10 juillet 1965 nuit à la lisibilité du droit. Je ne vois pas ce que la notion de « biens à usage collectif » apporte de plus par rapport à la celle d’« équipements à usage collectif », déjà prévue dans les textes en vigueur.
Je peux parfaitement concevoir que des difficultés ponctuelles se posent. Mais le dispositif proposé n’y apporte pas de solution évidente.
Aussi, et pour parler en termes simples, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Carole Delga, secrétaire d’État. Je pourrais également me contenter de termes simples pour indiquer que le Gouvernement est favorable à cet amendement. (Sourires.) Toutefois, je tiens à expliciter notre position.
La situation est effectivement délicate. Dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville, certains ensembles immobiliers qui étaient de très bonne facture ont périclité au fil des années, la division en volumes ayant rendu la gestion des équipements collectifs et des dalles trop compliquée.
L’amendement tend à rendre la procédure de division en volumes d’une copropriété plus opérationnelle. Le fait de préciser la nature du contrôle du préfet, qui est fondé sur des motifs d’ordre public, donne de la visibilité aux copropriétaires voulant scinder leur copropriété.
Le dispositif proposé semble équilibré. Il ne freine pas l’initiative privée et permet d’éviter les difficultés de gestion de ces ensembles immobiliers, notamment pour des questions de sécurité ou d’ordre publics.
Mme la présidente. L’amendement n° 401 rectifié, présenté par Mme Tasca, M. Guillaume, Mmes Bricq, Emery-Dumas et Génisson, MM. Bigot, Cabanel, Filleul, Marie, Masseret, Raynal, Richard, Sueur, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Après l’article 25 bis E
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article 42 de la loi n° 65–557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis est ainsi modifié :
1° À la première phrase du deuxième alinéa, les mots : « les copropriétaires opposants ou défaillants » sont remplacés par les mots : « un minimum de 10 % de tous les copropriétaires, en nombre, » ;
2° À la première phrase du troisième alinéa, les mots : « un copropriétaire » sont remplacés par les mots : « au moins 10% de tous les copropriétaires, en nombre, ».
La parole est à M. Yannick Vaugrenard.
M. Yannick Vaugrenard. L’article 42 de la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis autorise un opposant ou un défaillant seul à remettre en cause une décision prise à la majorité des voix des copropriétaires, voire à l’unanimité des voix moins la sienne.
Cela semble acceptable pour les copropriétés composées de dix à douze lots, c’est-à-dire la moyenne des copropriétés françaises. Cependant, pour une copropriété de plus de cent lots, l’opposant unique se trouve dans une position de force que l’on pourrait considérer comme exorbitante.
Cet amendement de bon sens tend à modifier l’article 42 de la loi du 10 juillet 1965, afin de préciser que les recours contre les décisions des assemblées générales sont introduits par un minimum de 10 % de tous les copropriétaires.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Pillet, corapporteur. Cet amendement tend à imposer que toute action en contestation d’une décision prise par l’assemblée générale des copropriétaires soit introduite par un minimum de 10 % des copropriétaires sans considération des tantièmes représentés par leurs lots. Cela signifie qu’un copropriétaire détenant 70 % des tantièmes d’une copropriété ne pourrait pas engager l’action.
Je comprends bien le sens de votre proposition, mon cher collègue : vous voulez lutter contre certaines actions abusives.
Simplement, une telle disposition serait sans doute attentatoire au droit d’accès de tout citoyen au juge. Elle pose donc un problème constitutionnel et conventionnel. (M. Jacques Mézard acquiesce.) Le fait de contester une décision n’est qu’une faculté ; il revient ensuite au juge d’apprécier les suites à y donner.
En outre, comme vous l’avez indiqué, ce sont avant tout les propriétés de plus de cent lots qui sont visées. Or le dispositif envisagé, qui n’établit pas de distinction, s’appliquerait également aux ensembles de dix à douze lots, ce qui pourrait poser problème.
Enfin, le dernier alinéa de l’article 42 de la loi du 10 juillet 1965 permet déjà de sanctionner les actions abusives ou dilatoires de certains copropriétaires en leur infligeant une amende de 150 euros à 3 000 euros.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement, en particulier pour des raisons de constitutionnalité et de conventionnalité.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Emmanuel Macron, ministre. Je partage la lecture juridique de M. le corapporteur. On ne peut pas limiter ainsi le recours, même abusif, contre une décision.
En outre, la contestation des décisions des assemblées générales est déjà encadrée. Elle doit être formée dans un délai de deux mois ; ce n’est pas un droit de veto. Le juge chargé d’en apprécier la recevabilité reste souverain pour se prononcer sur l’annulation de la décision.
On ne peut pas considérer que le propriétaire défaillant, du seul fait de son absence à l’assemblée générale, n’a plus d’intérêt à agir.
Cet amendement va donc trop loin pour être recevable sur le plan juridique, même si j’en comprends le sens. J’en sollicite le retrait. À défaut, j’y serai défavorable.
Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Mézard, pour explication de vote.
M. Jacques Mézard. Je ne peux pas voter cet amendement, qui, comme l’a indiqué M. le corapporteur, paraît inconstitutionnel ; il s’agit d’une atteinte au droit de propriété.
Ce n’est pas parce qu’une copropriété compte un nombre important de lots qu’il faut empêcher un copropriétaire de défendre ses droits ; il peut très bien être victime d’un abus de majorité. Une telle mesure me paraît inconcevable d’un point de vue juridique.
Au demeurant, le dispositif envisagé pourrait créer beaucoup plus de difficultés qu’il n’en résoudrait. Dans des copropriétés importantes, une majorité de copropriétaires peuvent avoir intérêt à imposer des décisions tout à fait contraires à la simple équité entre les copropriétaires.
Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Guillemot, pour explication de vote.
Mme Annie Guillemot. Force est de le constater, il s’agit d’un problème important pour les copropriétés privées, notamment celles qui sont dégradées.
Dans certaines copropriétés, les cinq dernières assemblées générales ont été annulées sans que cela ait encore fait l’objet d’un jugement. Il peut arriver qu’un propriétaire ayant 70 % des tantièmes d’une copropriété s’oppose à l’installation d’un ascenseur pendant dix ans ! C’est un sujet sérieux.
L’amendement qui nous est proposé me semble tout à fait opportun. La situation des copropriétés dégradées est l’un des problèmes les plus importants de notre pays.
Mme la présidente. Monsieur Vaugrenard, l’amendement n° 401 rectifié est-il maintenu ?
M. Yannick Vaugrenard. Non, je le retire, madame la présidente. J’ai bien entendu les objections juridiques qui ont été formulées, même si cet amendement semblait de bon sens et politiquement recevable.
Je souhaite que nous puissions travailler de manière plus approfondie sur le sujet, afin d’essayer de régler les problèmes auxquels il a été fait référence ; je pense notamment à la situation des copropriétés dégradées.
Mme la présidente. L’amendement n° 401 rectifié est retiré.
Article 25 bis F
(Non modifié)
Au dernier alinéa du III de l’article 40 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986, les références : « et les cinq premiers alinéas de l’article 23 » sont remplacées par les références : « , les cinq premiers alinéas de l’article 23 et les articles 25-3 à 25-11 ». – (Adopté.)
Article 25 bis
(Non modifié)
Le second alinéa de l’article L. 133-8 du code de la construction et de l’habitation est supprimé. – (Adopté.)
Article 25 ter
(Non modifié)
À la deuxième phrase du III de l’article L. 201-5 du code de la construction et de l’habitation, les mots : « correspond à » sont remplacés par les mots : « ne peut excéder ». – (Adopté.)
Article 25 quater
(Non modifié)
L’article L. 261-10-1 du code de la construction et de l’habitation est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Un décret en Conseil d’État détermine les conditions d’application du présent article, notamment la nature de la garantie financière d’achèvement ou de remboursement. » – (Adopté.)
Article 25 quinquies
(Non modifié)
I. – À l’article 25-1 A de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, le mot : « assermenté » est supprimé.
II. – Au dernier alinéa de l’article L. 741-2 du code de la construction et de l’habitation, le mot : « assermenté » est supprimé. – (Adopté.)
Article 25 sexies
(Non modifié)
Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnance, dans un délai de douze mois à compter de la promulgation de la présente loi, toute mesure de nature législative propre à créer un contrat de bail de longue durée dénommé : « bail réel solidaire », par lequel un organisme de foncier solidaire mentionné à l’article L. 329-1 du code de l’urbanisme consent à un preneur, s’il y a lieu avec obligation de construire ou de réhabiliter des constructions existantes, des droits réels en vue de la location ou de l’accession à la propriété des logements, sous des conditions de plafonds de ressources, de loyers et, le cas échéant, de prix de cession. Cette ordonnance définit également les modalités d’évolution de ce bail ainsi que de la valeur des droits réels en cas de mutations successives. Elle prévoit les règles applicables en cas de résiliation ou de méconnaissance des obligations propres à ce contrat.
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Le Scouarnec, sur l'article.
M. Michel Le Scouarnec. L’article 25 sexies prévoit une nouvelle possibilité d’ordonnance relative à la création d’un nouveau type de bail réel solidaire issu de la loi ALUR. Je souhaiterais vous faire part des enjeux en matière de logement à destination des étudiants.
Notre pays connaît actuellement une grave crise du logement. Elle est mise en lumière chaque année par le rapport de la Fondation Abbé Pierre.
Parmi les premières victimes, les étudiants connaissent trop souvent des situations locatives et d’hébergement précaires. Ils rencontrent de plus en plus de difficultés pour se loger, notamment dans les grandes agglomérations, qui regroupent l’essentiel des grandes écoles ou universités.
Aujourd’hui, le logement est la principale source d’inquiétudes des étudiants et la principale source de dépenses, tant à la rentrée universitaire, avec le versement de la caution exigée par les bailleurs, que chaque mois, avec le règlement du loyer.
Le maintien du cumul possible entre la demi-part fiscale des parents et les aides au logement a permis de rassurer financièrement les étudiants. Mais l’accès à un logement, surtout dans les grandes villes universitaires, est de plus en plus malaisé.
Certes, la fin de la garantie « Loca-pass » pour le secteur privé à compter du 1er janvier 2010 et l’article 56 de la loi du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion, qui a ramené la caution de deux mois à un mois, ont réduit le coût de l’entrée dans un logement. Mais ils ont également abouti à une forte augmentation des exigences des bailleurs en ce qui concerne les garants.
À l’heure où le montant de la garantie parentale nécessaire atteint cinq fois le montant du loyer, soit 3 500 euros de salaire mensuel en moyenne à Paris, selon les chiffres de l’Observatoire national de la vie étudiante, Repères 2014, pour un loyer mensuel moyen de 709 euros, les difficultés deviennent de plus en plus importantes pour l’ensemble de la population étudiante.
La garantie des risques locatifs, la GRL, est une des solutions à apporter en réponse aux demandes des étudiants. Mais elle n’est pas suffisante. Il est donc urgent d’agir et de prendre des engagements pour augmenter le nombre de résidences sociales étudiantes.
La question du logement est aussi prépondérante pour les 1,5 million à 2 millions de travailleurs saisonniers.
Ce bail réel solidaire pourrait constituer une première réponse cohérente, équilibrée et efficace aux difficultés de logement des étudiants et des travailleurs saisonniers.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 25 sexies.
(L'article 25 sexies est adopté.)
Article 25 septies
Le code des assurances est ainsi modifié :
1° À la première phrase du deuxième alinéa de l’article L. 241-1, les mots : « être en mesure de » sont supprimés ;
2° L’article L. 243-2 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, les mots : « être en mesure de » sont supprimés ;
b) À la fin de la seconde phrase du deuxième alinéa, les mots : « les mentions minimales devant figurer dans ces attestations » sont remplacés par les mots : « un modèle type d’attestation d’assurance » ;
c) À la fin du dernier alinéa, les mots : « mention doit être faite dans le corps de l’acte ou en annexe de l’existence ou de l’absence d’assurance » sont remplacés par les mots et une phrase ainsi rédigée : « l’attestation d’assurance mentionnée au deuxième alinéa doit y être annexée. Un arrêté du ministre chargé de l’économie fixe un modèle type d’attestation d’assurance. »
Mme la présidente. Je suis saisie de cinq amendements identiques.
L'amendement n° 210 rectifié est présenté par MM. Mézard, Bertrand, Arnell, Barbier, Castelli, Collin, Esnol et Fortassin, Mmes Laborde et Malherbe et M. Requier.
L'amendement n° 376 rectifié ter est présenté par MM. Genest, Darnaud, Vaspart, Milon, Reichardt, Calvet et Béchu.
L'amendement n° 380 rectifié bis est présenté par Mme Lamure, MM. César, Houel, D. Laurent et G. Bailly, Mme Primas et MM. Laménie, Pierre et Lefèvre.
L'amendement n° 648 rectifié bis est présenté par MM. Tandonnet et Gabouty, Mme Joissains, MM. Détraigne, Longeot, Roche, Bonnecarrère et Canevet, Mme Férat, MM. Bockel, Guerriau, Cigolotti, Delahaye, Cadic, Marseille, Pozzo di Borgo, Namy et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC.
L'amendement n° 856 rectifié bis est présenté par MM. Doligé et Cardoux, Mme Cayeux, MM. Charon et Commeinhes, Mme Garriaud-Maylam, MM. Grosdidier et Houel, Mme Hummel et MM. Kennel, de Legge, Mayet, Pointereau, D. Robert et Saugey.
Ces cinq amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Jacques Mézard, pour présenter l’amendement n° 210 rectifié.
M. Jacques Mézard. L’article 25 septies prévoit l’obligation d’annexer au contrat de vente un modèle type d’attestation d’assurance de l’entreprise ayant participé à la construction de l’ouvrage, en faveur de l’acquéreur d’un bien immobilier construit dans les dix ans précédant la vente. Il s’agit de pallier les difficultés d'identification, en cas de sinistre, de l'assureur de l'entrepreneur ayant participé à la construction de l'ouvrage. L’article résulte de l’adoption d’un amendement à l’Assemblée nationale ; il ne figurait pas dans le texte initial.
L’application d’une telle mesure représentera une charge supplémentaire pour les entreprises, notamment pour les plus petites. Cela va donc à l'encontre des objectifs de simplification de la vie des entreprises qui sont défendus par le Gouvernement.
Monsieur le ministre, nous avons régulièrement un débat sur l’équilibre à trouver entre défense des consommateurs, simplification des procédures et accélération d’un certain nombre de chantiers.
D’ailleurs, les personnes immatriculées au répertoire des métiers ou au registre des entreprises relevant du secteur de l'artisanat, ainsi que les entrepreneurs relevant du régime prévu à l'article L. 133-6-8 du code de la sécurité sociale doivent indiquer sur chacun de leurs devis et sur chacune de leurs factures leur assurance professionnelle, quand elle est obligatoire, et les coordonnées de l'assureur.
Nous proposons de supprimer l’article 25 septies.
Monsieur le ministre, en France, les actes de vente sont réalisés par les excellents notaires, auxquels vous vouez une sollicitude que nous avons tous remarquée. (Sourires.) Or ces actes sont de plus en plus épais.
M. Charles Revet. Eh oui ! Comme les projets de loi !
M. Jacques Mézard. Il faut donc savoir ce que l’on veut. Pour simplifier et faciliter les transactions, mieux vaut ne pas ajouter des pages et des pages aux actes de vente !
Soyons lucides ! Très peu de nos concitoyens lisent réellement l’intégralité des actes. Dans le rapport, il est indiqué que la commission est favorable à cet article, parce que les précisions nouvelles « renforcent l’information des consommateurs et contribuent donc à consolider la confiance dans les professionnels de l’immobilier, ce qui est un facteur pouvant faciliter la reprise du marché de la construction ». S’il suffisait d’annexer des pages et des pages supplémentaires aux actes de vente pour faciliter le marché de la construction, cela se saurait depuis longtemps ! J’ai plutôt l’impression que ces mesures ont l’effet inverse.
Mme la présidente. L’amendement n° 376 rectifié ter n'est pas soutenu.
La parole est à Mme Élisabeth Lamure, pour présenter l'amendement n° 380 rectifié bis.
Mme Élisabeth Lamure. L’obligation d’annexer au contrat de vente un modèle type d’attestation d’assurance de l’entreprise ayant participé à la construction de l’ouvrage, en faveur de l’acquéreur d’un bien immobilier construit dans les dix ans précédant la vente, représente une charge administrative et financière supplémentaire pour les entreprises, notamment pour les plus petites.
Cela risque d’entraîner également une multiplication de réclamations infondées, de complexifier la vie des entreprises au lieu de la simplifier et d’alourdir leurs charges au lieu de les alléger.
Nous proposons donc de supprimer l’article 25 septies.
Mme la présidente. La parole est à M. Henri Tandonnet, pour présenter l'amendement n° 648 rectifié bis.
M. Henri Tandonnet. Cet amendement est identique à ceux qui viennent d’être présentés.
L’attestation n’apportera pas grand-chose pour une assurance obligatoire. Les assurances sont quasiment les mêmes. La publicité est déjà inscrite sur les factures ou sur les devis. L’article 25 septies introduit une complication bien inutile.
Mme la présidente. La parole est à M. Éric Doligé, pour présenter l'amendement n° 856 rectifié bis.
M. Éric Doligé. Vous vous en souvenez peut-être, le Sénat a adopté récemment un amendement visant à supprimer une disposition assez proche pour les artisans et les petites entreprises. J’espère qu’il en sera de même ici.
L’amendement n° 856 rectifié bis est identique à ceux qui viennent d’être présentés. Il a tout de même un avantage par rapport aux autres : l’exposé des motifs est plus explicite. Du coup, si le Sénat adopte nos amendements identiques, ce sera, à mes yeux, probablement grâce à cela ! (Rires.)
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. La commission spéciale a estimé que le dispositif prévu à l’article 25 septies était de nature à consolider la confiance dans les professionnels de l’immobilier. Cela peut faciliter la reprise du marché de la construction.
Cependant, les amendements de suppression que nous examinons soulèvent directement la question du bilan entre les avantages et les coûts de l’introduction d’une telle nouvelle exigence dans notre droit.
En tant que corapporteur, et à titre personnel, je soutiens le texte adopté par la commission spéciale. La confiance du consommateur est un facteur essentiel. Nul ne peut nier qu’une telle mesure pourrait apporter un « coup de pouce » à la reprise dans ce domaine moteur de la production.
Cependant, le débat sur les inconvénients de l’article 25 septies reste ouvert. Nous ne disposons pas d’une étude d’impact susceptible de nous apporter un chiffrage et de mettre en lumière d’éventuels effets pervers.
Je propose donc de recueillir l’avis et les explications détaillées du Gouvernement, qui a d’ailleurs déposé un amendement visant à simplifier le dispositif envisagé sur la base d’une concertation avec les professionnels.
Mme la présidente. Quel est donc l’avis du Gouvernement ?
M. Emmanuel Macron, ministre. Je profite de l’occasion qui m’est offerte pour présenter l’amendement n° 1555 du Gouvernement.
Vous avez raison, monsieur Mézard. Il faut résoudre l’équation infernale entre simplification de la vie des uns et sécurisation des autres. Nous devons trouver un équilibre. Le sujet a déjà été évoqué tout à l’heure à propos des garanties que les professionnels doivent fournir de manière transparente à leurs clients.
L’article 25 septies est issu de l’adoption à l’Assemblée nationale d’un amendement d’origine parlementaire. Il prévoit de nouvelles contraintes pour les professionnels, qui devront annexer aux devis et factures les documents relatifs à la responsabilité civile décennale, les attestations d’assurance... C’est un élément additionnel qui permet au consommateur d’avoir plus de visibilité sur la nature de la garantie.
Je ne contesterai pas l’une des prémisses de votre raisonnement : c’est un fait que cette disposition alourdit et complexifie la procédure. En même temps, il est évident que la mesure améliore la qualité de l’information transmise au consommateur, au bénéfice de celui qui offre une garantie décennale, avec un contrat d’assurance en bonne et due forme. En effet, et c’est d’ailleurs ce qui a motivé l’amendement voté à l’Assemblée nationale, certains professionnels étant manifestement moins rigoureux que d’autres, il y a des situations de concurrence déloyale.
La loi prévoit donc d’apporter une transparence totale sur les obligations du professionnel à l’égard du consommateur.
Le choix qu’expriment les auteurs de ces amendements est différent de celui qui a été retenu à l’Assemblée nationale avec le soutien du Gouvernement. Je ne peux donc que vous demander de les retirer. À défaut, l’avis serait défavorable.
Monsieur Mézard, je signale que la lourdeur de la procédure de vente et de la documentation liée n’est pas une conséquence directe de cet article. Elle résulte de l’article 54 de la loi ALUR, qui a prévu d’ajouter des pièces annexes aux promesses de vente. Je veux vous rassurer : le Gouvernement prendra une ordonnance, en cours de rédaction, pour simplifier et remiser la dématérialisation de ces pièces, afin d’éviter qu’elles ne soient systématiquement jointes aux contrats de vente, dont la volumétrie a largement augmenté.
Le Sénat a d’ailleurs habilité le Gouvernement à procéder par ordonnance sur ce sujet en votant la loi du 20 décembre 2014 relative à la simplification de la vie des entreprises et portant diverses dispositions de simplification et de clarification du droit et des procédures administratives.
Mme Annie David. Pas nous !
M. Emmanuel Macron, ministre. La conséquence indésirable sur laquelle vous mettez l’accent lors de la cession d’un bien n’aurait donc pas lieu. Il n’en demeure pas moins que l’article accroît la lourdeur de la procédure pour des professionnels, mais dans le sens de l’amélioration de l’information des consommateurs.
L’amendement n° 1555 du Gouvernement vise à apporter quelques précisions. Il tend en particulier à améliorer l’information du consommateur, en prévoyant d’annexer systématiquement les attestations d’assurance aux factures et devis des professionnels assurés. Nous proposons aussi de prévoir la mise en place de mentions minimales applicables à tous les professionnels par voie d’arrêté pour permettre une information uniformisée.
Par ailleurs, cet amendement vient également rétablir, dans le cadre de la vente de biens immobiliers, via l’indication de l’acte de vente, la référence à l’existence ou non d’une assurance de responsabilité civile décennale.
Nous proposons des amodiations à la rédaction prévue par l’Assemblée nationale, mais elles s’inscrivent dans la logique du texte initial. Il est donc demandé un arbitrage de nature politique à la Haute Assemblée. Cela va dans le sens des amendements que vous avez défendus. Tous visent à la simplification de la vie des entreprises, afin de clarifier l’information à destination du consommateur, ce qui était l’ambition du texte initial.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 210 rectifié, 380 rectifié bis, 648 rectifié bis et 856 rectifié bis.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme la présidente. En conséquence, l’article 25 septies est supprimé, et les amendements nos 1555, 514 rectifié et 548 rectifié n’ont plus d'objet.
Toutefois, pour la bonne information du Sénat, j’en rappelle les termes.
L'amendement n° 1555, présenté par le Gouvernement, était ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 4
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…) La première phrase du deuxième alinéa est complétée par les mots :
« , jointes aux devis et factures des professionnels assurés ».
II. – Alinéa 5
Remplacer les mots :
type d’attestation d’assurance
par les mots :
d’attestation d’assurance comprenant des mentions minimales
III. – Alinéa 6
Remplacer les mots :
l'attestation d'assurance mentionnée au deuxième alinéa doit y être annexée. Un arrêté du ministre chargé de l'économie fixe un modèle type d'attestation d'assurance
par les mots :
mention doit être faite dans le corps de l'acte ou en annexe de l'existence ou de l'absence des assurances mentionnées au premier alinéa. L'attestation d’assurance mentionnée à l'alinéa précédent doit y être annexée
L’amendement n° 514 rectifié, présenté par MM. Cigolotti, Roche, Médevielle, Kern et Pozzo di Borgo, et l’amendement n° 548 rectifié, présenté par Mme Laborde, MM. Arnell, Bertrand, Castelli, Collin, Esnol et Fortassin, Mme Malherbe et MM. Mézard, Requier et Collombat, étaient identiques.
Tous deux étaient ainsi libellés :
Après l’alinéa 4
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…) La première phrase du deuxième alinéa est complétée par les mots : « annexées aux devis et factures des professionnels assurés » ;
Article 25 octies
(Non modifié)
L’article L. 211-3 du code de l’urbanisme est complété par les mots : « du présent code, ni à l’aliénation de terrains au profit du preneur à bail à construction conclu à l’occasion d’une opération d’accession sociale à la propriété, prévue au dernier alinéa de l’article L. 251-1 du code de la construction et de l’habitation ». – (Adopté.)
Articles additionnels après l'article 25 octies
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 308 rectifié, présenté par Mme Lienemann, est ainsi libellé :
Après l’article 25 octies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au e) de l’article L. 422-2 du code de l’urbanisme, les mots : « dans lesquelles l’État détient la majorité du capital » sont remplacés par les mots : « contrôlées au sens de l’article L. 233-3 du code de commerce par l’État, seul ou conjointement avec une autre personne publique ».
La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Historiquement, la société d’économie mixte ADOMA, ex-SONACOTRA, était propriété de l’État. D’après la loi, les permis de construire d’ADOMA étaient délivrés par le préfet lorsqu’une majorité du capital était détenue par l’État. Simplement, et cela ne vous aura pas échappé, d’autres partenaires, en particulier la Caisse des dépôts et consignations, y ont été associés, et l’État ne détient plus la majorité du capital, qui reste pourtant majoritairement public.
Nous voulons en fait rétablir le fait que les préfets délivrent les permis de construire, compte tenu du changement de majorité du capital.
Nous proposons ainsi de remplacer, dans le code de l’urbanisme, les mots : « dans lesquelles l’État détient la majorité du capital » par les mots : « contrôlées au sens de l’article L. 233-3 du code de commerce par l’État, seul ou conjointement avec une autre personne publique ».
Le texte de l’amendement n° 399 est différent, mais son objet est similaire. Je le considère comme défendu.
Mme la présidente. Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 249 rectifié bis est présenté par MM. Bertrand, Arnell, Castelli, Collin, Esnol et Fortassin, Mmes Laborde et Malherbe et MM. Requier et Mézard.
L'amendement n° 399 est présenté par Mme Lienemann, M. Guillaume, Mmes Bricq, Emery-Dumas et Génisson, MM. Bigot, Cabanel, Filleul, Marie, Masseret, Raynal, Richard, Sueur, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et apparentés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 25 octies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au e) de l’article L. 422-2 du code de l’urbanisme, les mots : « la majorité » sont remplacés par les mots : « au moins un tiers ».
La parole est à M. Jacques Mézard, pour présenter l'amendement n° 249 rectifié bis.
M. Jacques Mézard. Nous entendons tirer les conséquences de la baisse de la part de l’État dans le capital de la société d’économie mixte ADOMA, l’ancienne SONACOTRA.
À la fin de l’année 2014, l’État a annoncé que sa part dans ADOMA passerait sous la barre des 50 %, le groupe Caisse des dépôts devenant le nouvel actionnaire majoritaire. Cette évolution de la répartition du capital a des conséquences en matière de délivrance des autorisations d’urbanisme.
En effet, selon l’article L 422-2 du code de l’urbanisme, les autorisations sont systématiquement délivrées par le maire, au nom de l’État, dans les cas où les logements sont construits par des sociétés dont le capital est majoritairement détenu par l’État.
Le seuil plancher de la part du capital d’ADOMA détenue par l’État étant fixé à 33 %, notre amendement vise à modifier l’article L 422-2 en alignant le niveau minimal de participation de l’État dans le capital des sociétés de construction pour lesquelles l’autorité administrative de l’État est compétente pour se prononcer sur un projet.
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Les auteurs de ces amendements veulent tirer les conséquences de la réduction de la part de l’État dans le capital d’ADOMA, qui intervient dans le secteur du logement dit « très social ».
L’hébergement d’urgence est effectivement une compétence de l’État. Nous savons que les collectivités rechignent parfois à accueillir les constructions nécessaires à ADOMA. Toutefois, la position selon laquelle il appartient au maire de délivrer et d’autoriser le permis de construire peut aussi se comprendre.
La commission émet donc un avis défavorable sur ces trois amendements.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Emmanuel Macron, ministre. Le Gouvernement a un avis favorable sur ces amendements visant à maintenir l’état du droit avant modification du capital d’ADOMA au 1er janvier 2015 en matière de délivrance des autorisations d’urbanisme par l’autorité de l’État, lorsque la demande est déposée par cette société.
Après la montée au capital de la Société nationale immobilière, ou SNI, qui est, je le rappelle, une filiale de la Caisse des dépôts et consignations, l’État, auparavant majoritaire, ne devrait plus disposer que du tiers du capital. Les autorisations d’urbanisme portant sur des foyers de travailleurs migrants ne relèveraient donc plus de l’État. Dès lors, les demandes ne seraient plus instruites par ses services, ce qui pourrait être source de blocage.
Ces amendements, en actant la compétence du préfet, permettent au système de continuer à fonctionner comme auparavant. Jusqu’alors, c’était le maire qui délivrait ces titres au nom de l’État, alors majoritaire au capital d’ADOMA.
La perte de la majorité au capital d’ADOMA peut nous mettre dans une situation de blocage malencontreux. Selon nous, ces amendements de simplification permettront de continuer à faire fonctionner cette société d’économie mixte en tenant compte de la baisse de la part de l’État dans le capital sur les procédures de vente.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 249 rectifié bis et 399.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L'amendement n° 251 rectifié bis est présenté par MM. Bertrand, Arnell, Castelli, Collin, Esnol et Fortassin, Mmes Laborde et Malherbe et MM. Requier, Mézard et Collombat, et ainsi libellés :
Après l’article 25 octies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L’article L. 3211-7 du code général de la propriété des personnes publiques est ainsi modifié :
1° Le I est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour les communes qui ne font pas l'objet d'un constat de carence, dans le cadre d'un programme de construction de logements sociaux, dans les conditions fixées au présent article, une décote est possible pour la part du programme dont l'objet est la construction d'équipements publics destinés en tout ou partie aux occupants de ces logements. La décote ainsi consentie est alignée sur la décote allouée pour la part du programme consacrée aux logements sociaux. Les modalités d'application du présent alinéa et la liste des équipements publics concernés sont fixées par décret en Conseil d'État. » ;
2° Le dernier alinéa du II est supprimé.
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jacques Mézard.
M. Jacques Mézard. La crise du logement que connaît notre pays doit amener des décisions volontaristes pour relancer la construction de nouveaux logements, notamment sociaux.
L’État et les collectivités ont évidemment leur rôle à jouer. En cédant une partie des terrains qu’il possède et qui sont peu ou ne pas sont utilisés, l’État doit permettre de libérer de nouveaux espaces pour la construction de logement.
Pour favoriser l’acquisition de ces terrains par les collectivités ou les bailleurs sociaux, un dispositif de décote, instauré par la loi du 18 janvier 2013 relative à la mobilisation du foncier public en faveur du logement et au renforcement des obligations de production de logement social, permet de minorer la valeur des actifs fonciers pour les mettre à portée de main des constructeurs de logements sociaux.
L’article additionnel que nous vous proposons d’insérer vise à renforcer le dispositif en l’élargissant aux équipements publics, quelle que soit la situation des terrains concernés par le programme, sans le limiter aux seuls organismes éligibles à la décote de droit. Cela aurait également pour effet de raccourcir les délais d’instruction en évitant l’inscription préalable du terrain sur la liste régionale, l’objectif étant évidemment d’accélérer et de faciliter la construction.
Mme la présidente. L'amendement n° 1504, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 25 octies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 3211-7 du code général de la propriété des personnes publiques est ainsi modifié :
1° Le I est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour les communes qui ne font pas l'objet d'un constat de carence, dans le cadre d'un programme de construction de logements sociaux, dans les conditions fixées au présent article, une décote est possible pour la part du programme dont l'objet est la construction d'équipements publics destinés en tout ou partie aux occupants de ces logements. La décote ainsi consentie est alignée sur la décote allouée pour la part du programme consacrée aux logements sociaux. Les modalités d'application du présent alinéa et la liste des équipements publics concernés sont fixées par décret en Conseil d'État. » ;
2° Le dernier alinéa du II est supprimé.
La parole est à M. le ministre.
M. Emmanuel Macron, ministre. Il s’agit d’apporter une correction à la loi du 18 janvier 2013. Comme cela a été indiqué, la décote n’était pas prévue pour les équipements publics construits sur un foncier public. Cela produisait un biais dans la décote, et il convient de le rectifier.
À l’inverse, la décote pour les logements sociaux peut être obtenue pour les terrains inscrits sur cette liste, c’est une décote de droit, ou d’autres terrains hors liste, c’est la décote dite consentie. L’amendement permet de clarifier le dispositif actuel en matière de décote en le complétant.
Par ailleurs, il permet aussi de consentir une décote pour les équipements publics sur les terrains publics hors liste, ce qui facilitera les cessions de terrains et équipements décotés.
L’objectif du dispositif proposé, qui complète la loi du 18 janvier 2013, est de rendre plus simple ce mécanisme de décote. C’est l’un des mécanismes de libération du foncier, en particulier du foncier public, qui doit être simplifié pour être pleinement efficace.
Dans ces conditions, je retire mon amendement au profit de l’amendement n° 251 rectifié bis, qui a été présenté par M. Mézard.
Mme la présidente. L'amendement n° 1504 est retiré.
Monsieur le ministre, le gage est-il levé sur l’amendement n° 251 rectifié bis ?
Mme la présidente. Il s’agit donc de l'amendement n° 251 rectifié ter.
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. La commission émet un avis favorable sur cet amendement.
La Commission nationale de l’aménagement, de l’urbanisme et du foncier, présidée par Thierry Repentin, avait appelé de ses vœux une telle réforme dans le rapport qu’elle avait présenté au mois de janvier dernier devant la commission des affaires économiques du Sénat.
J’observe que la condition d’absence de constat de carence de la commune et le renvoi au décret pour déterminer les équipements publics concernés sont maintenus.
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 25 octies.
L'amendement n° 986 rectifié, présenté par M. Delattre, Mme Imbert, MM. Carle, de Nicolaÿ, Laufoaulu, Vasselle, Mouiller, J. Gautier, D. Laurent et Mayet, Mme Micouleau, MM. Bouchet, Bignon, Milon et Calvet, Mme Mélot, MM. G. Bailly, Pierre et Doligé, Mme Troendlé, M. Laménie, Mmes Gruny et Duchêne et MM. Houel, Perrin, Leleux, Trillard et Malhuret, est ainsi libellé :
Après l’article 25 octies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement, avant le 1er janvier 2016, un rapport relatif à la création d’un organisme chargé de centraliser l’intégralité des contrats d’assurance garantissant la responsabilité civile décennale, obligatoire en vertu de l’article L. 241-1 du code des assurances, souscrits par les professionnels réalisant des travaux de construction.
Ce rapport analyse également la possibilité, pour toute personne physique ou morale agissant en tant que maître d’ouvrage, au sens de l’article 1792 et suivants du code civil, de demander par lettre à l’organisme visé à l’alinéa précédent, à être informé de l’existence et du contenu du contrat d’assurance obligatoire visé à l’alinéa précédent, souscrit par le constructeur d’ouvrage et en vigueur au moment de l’ouverture du chantier, ou le maître d’œuvre, avec qui il est lié par un contrat de construction de maison individuelle.
La parole est à M. Philippe Mouiller.
M. Philippe Mouiller. Cet amendement vise à demander un rapport sur la création d’un fichier central des contrats d’assurance décennale, à l’instar du fichier recensant l’intégralité des assurances construction.
Cela permettrait à un bénéficiaire tiers d’un contrat d’assurance décennale d’identifier plus facilement l’assureur de l’entrepreneur défaillant, et de rendre ainsi pleinement effectif le droit inscrit à l’article L. 124-3 du code des assurances d’agir directement à l’encontre de l’assureur « décennal » de l’entrepreneur par le consommateur maître d’ouvrage.
Actuellement, les obligations consistant à être en mesure de justifier de la souscription de l’assurance décennale prévue par le code des assurances ne suffisent pas à résoudre cette difficulté. L’article 22-2 de la loi du 18 juin 2014 relative à l’artisanat, au commerce et aux très petites entreprises impose simplement à l’entrepreneur d’indiquer sur les devis et factures l’assurance professionnelle souscrite au titre de son activité, sa couverture géographique et les coordonnées de l’assureur. De telles dispositions ne garantissent pas la réalité de l’existence de cette assurance et de son contenu.
Le consommateur peut se retrouver dépourvu des ressources suffisantes pour refaire des travaux devenus nécessaires pour rendre son logement habitable.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. La commission spéciale, qui ne déroge pas à sa jurisprudence, émet un avis défavorable sur cette demande de rapport.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 986 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 25 nonies (nouveau)
L’ordonnance n° 2004-632 du 1er juillet 2004 relative aux associations syndicales de propriétaires est ainsi modifiée :
1° Le d de l’article 1er est complété par les mots : « lorsqu’il n’existe pas de plan local d’urbanisme » ;
2° L’article 40 est ainsi modifié :
a) Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :
« Elle est dissoute d’office : » ;
b) Après le b, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« La dissolution est constatée, à la demande de toute personne, par l’autorité administrative.
« Une association syndicale autorisée peut, en outre, être dissoute par acte motivé de l’autorité administrative : » ;
c)°Au début de l’avant-dernier alinéa, la mention : « c) » est remplacée par la mention : « 1° » ;
d)°Au dernier alinéa, la mention : « d) » est remplacé par la mention : « 2° ».
3° À l’article 41, après le mot : « prononçant », sont insérés les mots : « ou constatant ». – (Adopté.)
Article 25 decies (nouveau)
Le dernier alinéa de l’article L. 433-2 du code de la construction et de l’habitation est ainsi rédigé :
« Un organisme d’habitations à loyer modéré peut également, en application de l’article 1601-3 du code civil ou des articles L. 262-1 à L. 262-11 du présent code, vendre des logements à une personne privée, dès lors que ces logements font partie d’un programme de construction composé majoritairement de logements sociaux, dans la limite de 30 % de ce programme. Ces logements sont réalisés sur des terrains, bâtis ou non, ayant été acquis dans le cadre des articles L. 3211-7 ou L. 3211-13-1 du code général de la propriété des personnes publiques ou sur un terrain situé sur le territoire des communes appartenant à une zone d’urbanisation continue de plus de 50 000 habitants, telle que définie à l’article 232 du code général des impôts. Cette vente est soumise à l’autorisation du représentant de l’État dans le département du lieu de l’opération et subordonnée au respect, par l’organisme d’habitations à loyer modéré, de critères prenant notamment en compte la production et la rénovation de logements locatifs sociaux, tels que définis à l’article L. 445-1 du présent code. »
Mme la présidente. L'amendement n° 1387, présenté par Mme Assassi, M. Le Scouarnec et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Patrick Abate.
M. Patrick Abate. L’article 25 decies, qui a été introduit par voie d’amendement en commission, prévoit d’étendre la possibilité pour un organisme d’HLM de vendre à des acteurs privés une fraction des logements construits dans un programme de construction composé majoritairement de logements sociaux.
Je le rappelle, la loi ALUR avait permis aux organismes d’HLM, de manière expérimentale et pour une durée de cinq ans, de vendre à des opérateurs privés des logements libres faisant partie, à titre accessoire, d’une opération principale de construction de logements sociaux réalisés sur des terrains acquis dans le cadre de la loi du 18 janvier 2013 relative à la mobilisation du foncier public en faveur du logement et au renforcement des obligations de production de logement social.
L’article 25 decies prévoit, d’une part, d’étendre le champ d’application de ce dispositif, qui devait s’appliquer seulement à titre expérimental à des opérations dont le programme était défini avec la collectivité et les services de l’État, et, d’autre part, de le pérenniser. Or nous n’avons pas de retour probant sur les effets attendus en termes de mixité sociale et de fonctionnement de la vente en état futur d’achèvement, ou VEFA, inversée. Pourtant, vous voulez étendre ce dispositif aux zones dites « tendues ». De plus, le caractère accessoire disparaît, puisque le plafond de la part de logements libres est fixé à 30 % du total de l’opération.
Or, dans certains cas, la pratique s’est révélée contreproductive : elle rend la production de logements sociaux directement dépendante de la conjoncture immobilière. En outre, une enquête récente de la Caisse des dépôts et consignations montre que ce mode de production est assez souvent plus onéreux. D’ailleurs, certains organismes souhaitent limiter le recours à la VEFA et revenir à une maîtrise d’ouvrage directe.
Vous le comprendrez, cet article nous semble donc un peu prématuré, et il ne nous enthousiasme pas vraiment.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
En effet, la commission spéciale est favorable au mécanisme de la VEFA inversée, qui permet aux organismes d’HLM de contribuer plus activement à la production de logements sociaux, dans un souci de mixité sociale.
Par ailleurs, les organismes d’HLM conservent leur expertise en matière de maîtrise d’ouvrage et peuvent exercer un contrôle direct sur la qualité des logements produits.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Chers collègues du groupe CRC, j’aimerais vous convaincre du bien-fondé de cet article, qui vise justement à prévenir effets pervers que vous dénoncez.
Il est vrai que les organismes d’HLM doivent trop souvent recourir à la VEFA ! Ils sont obligés d’accompagner des opérations de promoteurs privés, soit parce que le plan local d’urbanisme a fixé un plafond de 20 % de logements privés, soit parce qu’il s’agit d’opérations d’aménagement complexes. Même si les organismes d’HLM ont un savoir-faire, ils n’ont pas la possibilité technique de vendre à des personnes privées. C’est ce que l’on appelle la « VEFA inversée ».
Le dispositif avait été mis en place pour des terrains publics à titre expérimental. Mais, et cela ne vous aura pas échappé, il faut un certain temps pour libérer les terrains publics. Or de grandes opérations d’aménagement sont en cours dans le Grand Paris ou dans les métropoles. Si les organismes d’HLM n’ont pas ces compétences, les opérateurs privés s’en saisiront systématiquement.
Certes, le secteur privé doit œuvrer dans bien des cas. Mais il importe aussi que les bailleurs sociaux interviennent en partenariat avec le privé, pour la partie le concernant, afin de procéder à cet aménagement. À défaut, les organismes d’HLM sont condamnés à être le « bagage accompagné » du privé.
Je n’ai pas pour philosophie de dire que ces organismes ne doivent jamais être aménageurs ou qu’ils doivent toujours l’être. Il faut une porosité selon les opérations : les organismes doivent vendre au privé, via la VEFA inversée – les promoteurs privés n’y sont d’ailleurs pas défavorables – et des promoteurs directs doivent vendre directement aux organismes d’HLM, avec la VEFA directe. L’intervention dans le secteur marchant ne peut être qu’accessoire, au regard non seulement du statut des organismes d’HLM, mais également des services d’intérêt économique général, les SIEG.
Mes chers collègues, cet article vise à donner des outils au monde HLM pour intervenir dans toute une série d’opérations d’aménagement – le choix revient d’ailleurs à l’aménageur –, sans le priver pour autant de toute intervention sur les grandes opérations. Cette mesure est unanimement attendue par les offices d’HLM, y compris dans certaines municipalités communistes !
Je suggère donc le retrait de cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Marc Daunis, pour explication de vote.
M. Marc Daunis. J’irai dans le même sens que ma collègue Marie-Noëlle Lienemann.
Permettez-moi d’évoquer une situation que je viens de vivre en tant que maire. Un appel à manifestation d’intérêt a été lancé pour une opération de 250 logements sur une propriété communale. La commune a deux possibilités : soit recourir aux promoteurs privés habituels avec, sur le porte-bagages, le bailleur social – un contingent de logements sociaux est prévu – qui n’a pas la maîtrise ; soit, au travers de la VEFA inversée, faire du bailleur social le pivot de l’opération, qui décidera en partenariat avec les promoteurs privés.
Chers collègues du groupe CRC, je pense que vous faites une erreur profonde en combattant ce dispositif.
Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Abate, pour explication de vote.
M. Patrick Abate. Ce débat montre bien que nous jouons aux apprentis sorciers ! Le projet de loi touche un peu à tout.
J’entends les arguments qui ont été avancés. Mais on ne se donne pas vraiment le temps de discuter au fond des sujets abordés. En matière de logement, on remet en cause des dispositions importantes, notamment certaines qui figurent dans la loi ALUR. Et il en va de même pour le droit du travail !
Tous ces éléments, qui se bousculent dans le texte, auraient mérité un examen plus cohérent !
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Le Scouarnec, pour explication de vote.
M. Michel Le Scouarnec. En tant que maire, j’ai expérimenté la VEFA.
En période de crise du logement, la VEFA traditionnelle a eu un tel succès que les bailleurs sociaux ont dû racheter les logements ! On a mis en place un partenariat entre les promoteurs privés et les organismes d’HLM concernant 20 % ou 30 % de logements.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Vous parlez de la VEFA normale ! Mais l’article concerne la VEFA inversée ! Ce n’est pas du tout pareil !
M. Michel Le Scouarnec. On n’a jamais pratiqué la VEFA inversée !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Non, parce que ce n’était pas légal !
M. Michel Le Scouarnec. Depuis quand est-ce légal ?
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Justement, on l’a obtenue de manière limitative !
M. Michel Le Scouarnec. Quand on procède au renouvellement urbain, on est amené à accepter la vente d’une partie des logements, car l’office d’HLM a souvent des difficultés pour financer l’opération. Certes, cela ne fait pas partie de notre philosophie, mais nous faisons des concessions ; il faut faire preuve de réalisme et de pragmatisme.
M. Bruno Sido. Absolument !
M. Michel Le Scouarnec. Nous le faisons, même si nous n’avions pas envisagé cette option au départ. On apprend aussi en marchant…
M. Marc Daunis. C’est la VEFA inversée !
M. Michel Le Scouarnec. Notre collègue Marie-Noëlle Lienemann essaie de nous « vendre » la VEFA inversée, mais je ne suis pas certain que le dispositif présente un intérêt majeur !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Tout le mouvement HLM y est favorable !
M. Michel Le Scouarnec. Cette formule me laisse dubitatif…
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 1389, présenté par Mme Assassi, M. Le Scouarnec et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Les articles L. 443-7 à L. 443-15 et L. 443-15-2 à 443-15-2-3 du code de la construction et de l’habitation sont abrogés.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Cet amendement vise à modifier la rédaction de l’article 25 decies, afin de maintenir le caractère locatif des logements HLM.
Comme nous avons déjà eu l’occasion de le souligner, des habitations construites avec de l’argent public doivent être mises au service d’une politique publique du logement et elles ne pas être vendues à des personnes privées ; cela relève du bon sens. Cette disposition est d’autant plus logique que le nombre de demandeurs de logements ne cesse d’augmenter. Les bailleurs sociaux rencontrent aujourd’hui de plus en plus de difficultés pour investir. Alors que la solution réside dans un réengagement de l’État au travers des aides à la pierre, il nous est proposé que les organismes d’HLM puissent vendre des logements.
Mais vendre des logements HLM, c’est, en quelque sorte, vendre notre patrimoine commun, une richesse pour les habitants d’une ville ! C’est une politique à courte vue !
Nous ne pouvons évidemment pas adopter une telle disposition. C’est pourquoi nous vous invitons à adopter cet article dans une nouvelle rédaction, mes chers collègues.
Mme la présidente. L'amendement n° 1707, présenté par Mme Estrosi Sassone, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 2, première phrase
Remplacer les références :
L. 262-1 à L. 262-11
par les références :
L. 261-1 à L. 261-22
La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur.
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Cet amendement, qui concerne la VEFA inversée, tend à corriger une référence de code, car le dispositif ne s’applique pas en cas de vente d’immeuble à rénover.
Mme la présidente. L'amendement n° 1390, présenté par Mme Assassi, M. Le Scouarnec et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… - L’article L. 443-7 du même code est ainsi modifié :
1° Le deuxième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Lorsque la commune sur laquelle se situent les logements fait l’objet d’un arrêté de carence, l’organisme ne peut procéder à la vente de logements sociaux. » ;
2° À la première phrase du troisième alinéa, les mots : « consulte la commune d’implantation ainsi que » sont remplacés par les mots : « demande l’avis conforme de la commune d’implantation et consulte ».
La parole est à M. Jean-Pierre Bosino.
M. Jean-Pierre Bosino. La VEFA normale n’est pas toujours une bonne chose pour les organismes d’HLM, qui rachètent parfois des logements dans un état pitoyable. Et la VEFA inversée, ce n’est pas beaucoup mieux. En effet, on recherche là un dispositif visant à financer du logement,…
M. Jean-Pierre Bosino. … alors que ce ne serait pas nécessaire si les aides à la pierre étaient correctes.
À nos yeux, si VEFA inversée il doit y avoir, il convient de mieux encadrer le dispositif, notamment sur deux points : d’une part, la vente de logements sociaux ne peut pas avoir lieu dans les villes faisant l’objet d’un arrêté de carence ; d’autre part, l’avis de la commune sur le territoire de laquelle se situerait une vente de logements sociaux doit être rendu obligatoire.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur les amendements nos 1389 et 1390 ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Ces deux amendements portent sur la vente de logements sociaux. Je ne comprends donc pas pourquoi vous avez évoqué la VEFA inversée, monsieur Bosino. Cela n’a rien à voir ! (Mme Marie-Noëlle Lienemann acquiesce.)
L’amendement n° 1389 prévoit de supprimer la possibilité de vendre des logements sociaux. L’amendement n° 1390 a pour objet de préciser, d’une part, que la vente de logements sociaux n’est pas possible lorsque la commune fait l’objet d’un arrêté de carence et, d’autre part, que la décision de vendre ne peut être prise qu’après avis conforme de la commune.
Permettez-moi de vous exposer la position partagée par un certain nombre d’élus et d’acteurs dans ce domaine.
La vente de logements sociaux a deux objets. Elle permet, d’une part, à des locataires sociaux de devenir propriétaires de leur logement – peu de personnes peuvent, me semble-t-il, être défavorables à une telle mesure ! – et, d’autre part, aux organismes d’HLM d’obtenir des fonds propres, qu’ils pourront réinvestir en finançant de nouvelles opérations de logements sociaux.
Enfin, je rappelle que la décision d’aliéner des logements sociaux est très encadrée.
Il ne me semble donc pas du tout souhaitable de remettre en cause ce dispositif. C’est pourquoi la commission émet un avis défavorable sur ces deux amendements.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Emmanuel Macron, ministre. L’adoption de l’amendement n° 1389 reviendrait à bloquer l’accession sociale à la propriété dans le parc locatif. (Protestations sur les travées du groupe CRC.)
Mme Laurence Cohen. Notre amendement a trait au financement du logement social !
M. Emmanuel Macron, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs du groupe CRC, vous voulez supprimer les articles du code de la construction et de l’habitation qui permettent la vente de logements HLM. Or ces dispositions sont prévues pour privilégier les occupants des logements concernés par les ventes.
La vente de logements est un moyen pour les organismes d’HLM, de reconstituer des fonds propres et de réinvestir, ce qui est complémentaire du financement du logement social. Et c’est tout à fait normal ! À défaut, il n’y aurait aucune gestion dynamique du parc. Cela conduirait à une glaciation du monde du logement social.
Des critères permettent d’équilibrer la répartition géographique de la demande. Il est important d’avoir de l’accession à la propriété dans le parc locatif HLM. C’est un des leviers de l’accession à la propriété. Il est donc normal que le mécanisme soit préservé.
Certes, il convient d’éviter que certains bailleurs ne puissent avoir une politique de vente sans réinvestir l’argent récolté dans le logement social. Nous le savons bien, c’est le principal défi du logement social depuis plusieurs années. Je peux à la rigueur vous suivre sur cette préoccupation.
Mais le fait d’empêcher les organismes d’HLM de gérer leur parc de manière dynamique en permettant à certains publics d’accéder à la propriété pour réinvestir pourrait conduire à tout bloquer. Ainsi, on évite la diminution trop importante du parc social, et on respecte l’une des contraintes imposées à ces cessions.
Je ne souscris donc ni à la philosophie ni au contenu de cet amendement, dont l’adoption aboutirait à un blocage complet. L’avis du Gouvernement est donc défavorable.
Je soutiens en revanche l’amendement n° 1707, qui est un amendement de rectification formelle.
L’amendement n° 1390 vise à interdire la vente de logements HLM dans les communes faisant l’objet d’un arrêté de carence et à rendre obligatoire l’avis des communes d’implantation de ces logements. Or la procédure actuelle prévoit d'ores et déjà un encadrement extrêmement rigoureux. Peut-être avez-vous en tête des exemples très précis de dysfonctionnements ?
D'abord, l’article L. 443-7 du code de la construction et de l’habitation prévoit que la vente de logements HLM « ne doit pas avoir pour effet de réduire de manière excessive le parc de logements sociaux locatifs existant sur le territoire de la commune ». L’avis de la commune d’implantation est donc requis.
Il appartient aux acteurs locaux, maires et préfets, d’apprécier la situation. Dès lors, quand bien même le maire ne fait pas son travail – apparemment, c’est l’hypothèse que vous envisagez –, le préfet intervient, échange avec celui-ci, voire saisit le ministre du logement, qui peut bloquer l’opération, surtout lorsque la commune fait partie des communes carencées. Comme nous l’avons déjà vu lors de l’examen des articles précédents, ces communes font l’objet d’un suivi tout particulier du ministre du logement.
Dans ces conditions, l’interdiction urbi et orbi me semble excessive. Les dispositions qui figurent d'ores et déjà dans notre code suffisent normalement à empêcher la survenue de la situation que vous redoutez, sauf dans l’hypothèse où il y aurait eu un dysfonctionnement dans la chaîne et où nous n’aurions pas pris nos responsabilités.
Je vous invite à nous fournir les cas précis que vous avez en tête et que vous souhaitez couvrir par cet amendement, afin que nous puissions vous apporter des réponses. Mais il ne paraît pas souhaitable d’édicter un principe d’interdiction générale.
Pour ces raisons, j’émets un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. La question de la vente des logements HLM est importante.
Monsieur le ministre, l’encadrement actuel des conditions de la vente ne me semble effectivement pas suffisamment rigoureux. On ne peut pas être hostile à toute vente de logements HLM. Dans certains endroits, cela concourt à la mixité, la mise en œuvre est raisonnable et il y a une certaine fluidité du parc HLM. Je ne peux donc pas voter un amendement tendant à interdire la vente de logements HLM ou à la réduire de manière drastique.
Néanmoins, ne nous racontons pas d’histoires : certains des HLM vendus ne le sont pas aux occupants. Des organismes se vendent entre eux des HLM par bloc, afin de récolter des fonds propres et, parfois, de toucher deux fois la subvention. Dieu sait que je défends le mouvement HLM ! Mais il y a des organismes d’HLM qui, ayant bénéficié d’un prêt locatif à usage social, un PLUS, ou d’un prêt locatif aidé d’intégration, un PLAI, vendent des logements à d’autres organismes pour toucher de nouvelles subventions ; je ne suis pas certaine qu’il s’agisse là d’un bon usage des fonds publics !
Par ailleurs, vous indiquez que la possibilité de vendre les logements HLM permet d’en construire davantage. Or la production globale de logements HLM en France est dérisoire ; le parc s’est accru de 400 000 logements en dix ans, soit une moyenne de 40 000 par an. En d’autres termes, les destructions ou les ventes n’ont pas été compensées, même pas selon la règle du : « un pour un ». Quand on ne construit que 90 000 logements alors que plus de 150 000 sont financés, c’est qu’il y a de la perte en ligne ! En réalité, un certain nombre d’organismes vendent des logements sans en produire en nombre équivalent. On nous avait pourtant promis que, pour un logement vendu, il y aurait deux logements construits ! La vente de logements HLM manque de clarté sur bien des aspects.
Il y a aussi bien des zones d’ombre sur l’intervention des préfets. Dans une réunion du Comité régional de l’habitat, un préfet m’expliquait qu’une ville des Hauts-de-Seine comptant 4 % de logements sociaux ne pourrait pas faire passer ce taux à plus de 5,7 % en quatre ou cinq ans ; c’est deux poids deux mesures ! Croyez-moi, dans d’autres territoires, les préfets, qui sont tout de même chargés de faire respecter la loi, auraient été plus exigeants !
Monsieur le ministre, les préfets doivent faire preuve de rigueur. Le principe « selon que vous serez puissant ou misérable », qui existe malheureusement encore, n’a pas lieu d’être dans notre République.
Je ne peux pas approuver les amendements nos 1389 et 1390, que je trouve mal cadrés et trop globaux. Mais la vente de logements HLM, de la manière dont elle s’opère aujourd'hui, n’a pas trouvé son rythme de croisière. Elle ne saurait en aucun cas devenir le mode de financement du logement social. La réalité, c’est que l’argent gagné par la vente de logements sociaux n’a pas permis d’accroître massivement le parc.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Bosino, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Bosino. Je suis pour partie d’accord avec l’intervention de Marie-Noëlle Lienemann. Je peux comprendre que nos amendements apparaissent clivants. Mais le vrai problème, c’est quand même la question du financement du logement social !
Comme nous l’avons souligné cet après-midi, l’aide à la pierre est trop faible. Et le 1 %, qui est d’ailleurs passé à 0,47 %, a été asséché en raison des opérations de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine, l’ANRU. Certes, celles-ci sont positives. Mais, le 1 % ayant complètement été asséché, il y a un manque maintenant pour le financement du logement social.
Évidemment, nous ne sommes pas opposés par principe à toute vente de logements HLM, pour que des locataires puissent accéder à leur logement. Néanmoins, cela concerne un certain parc, le plus souvent dans des logements individuels. La vente de logements collectifs suppose que l’on crée une copropriété : certains restent locataires quand d’autres deviennent propriétaires.
Dans les immeubles où l’on a commencé à vendre des logements HLM, des locataires et des propriétaires s’y côtoient. Les situations qui ne sont pas simples.
Ce n’est pas une bonne méthode pour alimenter le financement du logement social. Ce n’est pas avec un tel bricolage que nous nous en sortirons ! La vente de logements HLM individuels est plus envisageable. Et encore ! Il faut aussi conserver des logements sociaux individuels ; cela répond à une demande.
La France des propriétaires, c’est un mythe ! Tout le monde ne sera pas propriétaire. D'ailleurs, tout le monde n’en a pas envie ! (Marques d’approbation sur les travées du groupe CRC.)
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à M. Marc Daunis, pour explication de vote.
M. Marc Daunis. Chers collègues du groupe CRC, vous avez évoqué la mixité sociale. Mais vous avez refusé le logement intermédiaire. À présent, vous refusez les ventes de logements HLM.
Comment obtenir de la mixité sociale si, dans les endroits où le logement social est largement majoritaire, les personnes avec les revenus les plus élevés s’en vont et sont remplacées par les bénéficiaires du droit au logement opposable ? Sans possibilité de vendre une partie des logements, ce sont des quartiers entiers qui connaîtront une paupérisation lourde ! Ce sont des réalités concrètes que nous connaissons tous !
On a vendu une partie du patrimoine. Des copropriétés ont été créées. Et, contrairement à ce qui vient d’être dit, cela marche bien, grâce aux conditions qui ont été posées.
Vos refus réitérés conduisent à paupériser violemment des quartiers et à empêcher la mixité que vous revendiquez par ailleurs. En cela, vos amendements me paraissent dangereux !
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Ce n’est pas par nos amendements que nous bloquons les choses !
Le problème est que ce projet de loi aborde des sujets extrêmement vastes et importants, sur la vie quotidienne. Le texte détricote des lois votées voilà seulement un an ; je pense à la loi ALUR. Sur une question aussi fondamentale que le logement, c’est du bricolage !
Nous bloquons la mixité, dites-vous… Mais il faudrait commencer par arrêter de pratiquer des surloyers ! Ce serait une mesure efficace et importante. En plus, elle est attendue par les locataires. Le courage politique, c’est d’afficher ce que l’on veut faire et la manière dont on veut construire une politique de logement social ! (Mme Nicole Bricq proteste.) Madame Bricq, comme d’habitude, vous n’êtes pas d’accord avec nos propositions pour le progrès social ! (Exclamations amusées sur les travées de l'UMP.)
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Emmanuel Macron, ministre. Nous ne parviendrons pas à purger le débat sur la mobilité dans le parc et sur sa gestion dynamique.
Toutefois, je veux revenir sur le financement et l’utilisation des fonds. En effet, au-delà des désaccords que nous pouvons avoir sur la gestion du parc, il faut savoir si l’argent ainsi mobilisé est bien utilisé.
Ma collègue Sylvia Pinel va saisir, au nom du Gouvernement, l’Agence nationale de contrôle du logement social, afin que celle-ci retrace précisément la manière dont l’argent issu des ventes de logements HLM est utilisé et réinvesti dans le logement social. L’Agence me paraît à même de le faire.
J’engage le Gouvernement sur ce point. Il faut donner une pleine visibilité sur cette problématique importante. La transparence sera faite.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 25 decies, modifié.
(L'article 25 decies est adopté.)
Articles additionnels après l’article 25 decies
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 242 rectifié bis est présenté par MM. Mézard, Bertrand, Arnell, Castelli, Collin, Esnol et Fortassin, Mmes Laborde et Malherbe et M. Requier.
L'amendement n° 402 est présenté par Mme Lienemann, M. Guillaume, Mmes Bricq, Emery-Dumas et Génisson, MM. Bigot, Cabanel, Filleul, Marie, Masseret, Raynal, Richard, Sueur, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et apparentés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 25 decies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de la construction et de l’habitation est ainsi modifié :
1° L’article L. 200-4 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Ce droit de jouissance portant sur un ou plusieurs logements confère à ces organismes et sociétés le droit d’en consentir la location dans le respect des dispositions qui les régissent. » ;
2° Après l’article L. 200-9, il est inséré un article L. 200-9-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 200-9-1. – I. Peuvent conclure une convention d’occupation temporaire du logement à titre de résidence principale, au profit d’un tiers :
« – l’associé qui bénéficie de la dérogation mentionnée au dernier alinéa des articles L. 201-2 et L. 202-2 ;
« – les héritiers ou légataires d’un associé décédé dans les limites de la durée mentionnée au I de l’article L. 201-9 et au dernier alinéa de l’article L. 202-9-1.
« Les dispositions de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986, et notamment son article 11, sont applicables à la convention d’occupation temporaire mentionnée au premier alinéa.
« Un décret en Conseil d’État détermine les conditions régissant cette convention temporaire d’occupation.
« II. Au terme de la dérogation mentionnée au dernier alinéa des articles L. 201-2 et L. 202-2, l’associé est tenu soit d’occuper à nouveau le logement à titre de résidence principale, soit de céder ses parts sociales, soit de se retirer de la société. À défaut, son exclusion de la société est prononcée par l’assemblée générale des associés. » ;
3° Le deuxième alinéa de l’article L. 200-10 est ainsi modifié :
a) Après les mots : « les locataires », sont insérés les mots : « ou les occupants » ;
b) Sont ajoutés les mots : « ou à la convention temporaire d’occupation mentionnée à l’article L. 200-9-1 » ;
4° Le dernier alinéa des articles L. 201-2 et L. 202-2 est complété par les mots : « et notamment la durée maximale de cette dérogation » ;
5° Au I de l’article L. 201-9, après les mots : « deux ans », sont insérés les mots : « à compter de l’acceptation de la succession ou de la donation » ;
6° Après l’article L. 202-9, il est inséré un article L. 202-9-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 202-9-1. – Lorsque les statuts de la société d’attribution et d’autopromotion prévoient une attribution en jouissance, les héritiers ou légataires d’un associé décédé, si aucun d’entre eux ne décide d’occuper le logement à titre de résidence principale, sont tenus soit de céder leurs parts sociales, soit de se retirer de la société, après un délai de deux ans à compter de l’acceptation de la succession ou de la donation. À défaut, leur exclusion de la société est prononcée par l’assemblée générale des associés. »
La parole est à M. Jacques Mézard, pour présenter l’amendement n° 242 rectifié bis.
M. Jacques Mézard. Nous voulons attirer l’attention de la Haute Assemblée sur les nouvelles formes d’habitat qui tendent à se développer de plus en plus en France et à l’étranger.
Aujourd’hui, nombre de nos concitoyens souhaitent mettre en adéquation leur besoin de logement avec leurs moyens, ce qui est tout à fait justifié. Mais ils sont aussi de plus en plus nombreux à nourrir un véritable projet de vie avec leurs voisins et leur quartier.
L’habitat participatif, qui a été introduit pour la première la maison individuelle et logement collectif. Des ménages décident de mettre en commun leurs moyens et leurs idées pour aborder autrement la question du logement. Face à la réduction, que nous déplorons souvent, des aides de l’État, les initiatives locales venant des collectivités ou des citoyens doivent être encouragées. Il y a plusieurs expériences intéressantes. Néanmoins, il est aussi nécessaire d’y apporter à un cadre légal et juridique précis.
C’est pourquoi cet amendement vise à compléter les dispositions relatives aux sociétés d’habitat participatif contenues dans le code de la construction et de l’habitation aux articles L. 200-1 et suivants. Il s’agit d’apporter un peu plus de facilité.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour présenter l'amendement n° 402.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Il est défendu.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. D’après les remontées de terrain, la plupart des sujets évoqués par les auteurs de ces amendements seraient en cours de discussion entre l’ensemble des acteurs concernés et l’État, en vue de l’élaboration d’un décret d’application de la loi ALUR.
En revanche, le contenu de ces amendements ne semble pas avoir fait l’objet d’une concertation préalable et suscite des interrogations quant à leur pertinence juridique, en particulier pour faciliter le financement de l’habitat participatif.
Dans ces conditions, il nous est donc apparu raisonnable de répondre aux souhaits exprimés par les acteurs de terrain, qui marquent leur préférence pour donner une base normative solide et concertée à leur projet à long terme, au lieu de s’empresser d’adopter un dispositif perfectible.
La commission émet donc un avis défavorable sur ces deux amendements identiques.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Emmanuel Macron, ministre. Il s’agit d’un sujet important. Un décret relatif aux sociétés d’habitat participatif est effectivement en préparation, dans le cadre de la mise en œuvre de la loi ALUR ; il fait actuellement l’objet d’une concertation.
Toutefois, même si la concertation a bien avancé sous l’autorité du ministère du logement, le décret n’apparaît, pour partie, pas suffisant.
Certains éléments nécessitent donc ’être corrigés par la voie législative. C’est l’objet de ces amendements, qui expriment une prise en compte des préoccupations des professionnels et des acteurs concernés.
Le Gouvernement émet donc un avis favorable sur ces deux amendements.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Madame la corapporteur, nous ne devons pas rencontrer pas les mêmes acteurs sur le terrain ! Pour ma part, je suis régulièrement en contact avec le président de la Fédération nationale des sociétés coopératives d’HLM, beaucoup d’opérations ayant été réalisées en lien avec ces sociétés.
Nous partageons l’analyse du Gouvernement. Les causes juridiques aux blocages des opérations en cours ne sont pas de nature réglementaire. Les problèmes ont été recensés dans le cadre des négociations menées en vue de l’élaboration du décret. Si nous ne prenons pas rapidement des mesures, nous aurons peu de vecteurs législatifs susceptibles de faire avancer les choses.
Certes, le dialogue est toujours nécessaire. J’ai beaucoup participé à la discussion, tout comme nombre de mes collègues, notamment Annie Guillemot, qui est très fréquemment en contact avec les associations et les réseaux d’habitat participatif.
Nous devons adopter des dispositions législatives, faute de quoi les opérations en cours, décret ou non, ne pourront pas être menées à bien.
Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Mézard, pour explication de vote.
M. Jacques Mézard. Je partage l’analyse de Marie-Noëlle Lienemann.
Mme la corapporteur ne nous a pas expliqué quels seraient les problèmes posés par l’adoption de nos amendements. On nous dit qu’il y aurait un manque de concertation ? Mais cela fait longtemps que nous avons conscience de la nécessité d’avancer sur l’habitat participatif ! Tout le monde en est parfaitement informé.
Ce que nous proposons serait un « plus » pour les constructions. Mais peut-être y a-t-il une opposition idéologique à l’habitat participatif ? Je précise simplement que cette formule se développe dans pratiquement tous les pays européens. Pourquoi devrions-nous rester à la traîne ?
Je ne vois pas ce qui pourrait soulever un problème juridique ou technique dans nos amendements. Nous souhaitons tous développer et faciliter la construction. Ce serait, me semble-t-il, une bonne chose d’adopter une disposition législative en ce sens.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 242 rectifié bis et 402.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 25 decies.
Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 244 rectifié est présenté par MM. Mézard, Bertrand, Arnell, Barbier, Castelli, Collin, Esnol et Fortassin, Mmes Laborde et Malherbe et MM. Requier et Collombat.
L'amendement n° 1506 rectifié est présenté par le Gouvernement.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 25 decies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La première phrase du deuxième alinéa de l’article L. 481-1 du code de la construction et de l’habitation est supprimée.
La parole est à M. Jacques Mézard, pour défendre l’amendement n° 244 rectifié.
M. Jacques Mézard. Cet amendement vise à rapprocher les règles applicables aux sociétés d’économie mixte, ou SEM, de celles qui prévalent pour les organismes d’habitation à loyer modéré. Cela permet de lever une ambiguïté dans la rédaction de l’article L. 481-1 du code de la construction et de l’habitation.
Cet article réserve l’agrément aux seules SEM locales, mais laisse un flou sur la situation des SEM d’État, qui ne peuvent pas en bénéficier, sauf si elles étaient liées par une convention d’utilité sociale lors de la publication de la loi ALUR.
L’adoption de cet amendement permettra d’assurer une égalité de traitement de tous les acteurs du logement social, y compris les SEM d’État, et de sécuriser notre régime de logement social vis-à-vis du droit communautaire. Cela nous paraît tout à fait indispensable.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre, pour présenter l'amendement n° 1506 rectifié.
M. Emmanuel Macron, ministre. Cet amendement, qui est identique à l’amendement n° 244 rectifié, vise à lever toute ambiguïté dans la rédaction de l’article L. 481-1 du code de la construction et de l’habitation.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Ces deux amendements tendent utilement à combler une lacune de la loi ALUR. La commission y est favorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 244 rectifié et 1506 rectifié.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 25 decies.
L'amendement n° 250 rectifié, présenté par MM. Mézard, Bertrand, Arnell, Barbier, Castelli, Collin, Esnol et Fortassin, Mmes Laborde et Malherbe et MM. Requier et Collombat, est ainsi libellé :
Après l’article 25 decies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À la seconde phrase du premier alinéa du VII de l’article L. 3211-7 du code général de la propriété des personnes publiques, après les mots : « professionnels de l’immobilier », sont insérés les mots : «, des professionnels de l’aménagement ».
La parole est à M. Jacques Mézard.
M. Jacques Mézard. L’amendement n° 250 rectifié vise à élargir la composition de la Commission nationale de l’aménagement de l’urbanisme et du foncier à une représentation des professionnels de l’aménagement.
Nous avons tous vu au cours de ces débats l’importance de la question foncière dans les opérations d’aménagement. C’est devenu un paramètre majeur dans l’équilibre économique et financier d’une opération. La récente mise en place par Mme la ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité du réseau national des aménageurs, le 12 février dernier, a rappelé cette dimension.
La Commission nationale de l’aménagement de l’urbanisme et du foncier a pour mission de s’assurer que la stratégie adoptée par l’État et ses établissements publics concernés est de nature à favoriser la cession de biens appartenant à leur domaine privé au profit de logements sociaux.
La présence en son sein d’un représentant des professionnels de l’aménagement permettra d’éclairer utilement ces travaux et facilitera l’adoption de propositions pertinentes de nature à débloquer des dossiers de cession s’inscrivant dans un périmètre d’opérations d’aménagement par leur éclairage sur les conditions de montage et d’équilibre financier d’une opération d’aménagement.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Cet amendement concerne la représentation des professionnels de l’aménagement.
En réalité, une telle préoccupation est déjà prise en compte. L’article R. 3211-17-6 du code général de la propriété des personnes publiques prévoit dans la composition de la Commission nationale de l’aménagement de l’urbanisme et du foncier la présence de deux personnalités qualifiées désignées en raison de leur compétence dans les domaines de l’aménagement, de l’urbanisme et du foncier.
Cette précision dans la loi ne me semble donc pas s’imposer. La commission émet un avis de sagesse, mais plutôt défavorable, afin de ne pas alourdir le code général de la propriété des personnes publiques.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Emmanuel Macron, ministre. Le Gouvernement émet un avis favorable sur cet amendement.
La mission de la Commission nationale de l’aménagement de l’urbanisme et du foncier est de s’assurer que la stratégie adoptée par l’État et ses établissements publics est de nature à favoriser la cession de biens appartenant à leur domaine privé au profit de logements sociaux.
Le fait de compléter la composition de la Commission par des représentants des professionnels de l’aménagement aux côtés des professionnels de l’immobilier en éclairera utilement les travaux. Cela répond à une demande des acteurs concernés.
La présence des professionnels de l’immobilier étant déjà prévue par la loi du 18 janvier 2013, il semble opportun, par parallélisme, de permettre celle des professionnels de l’aménagement, ainsi que M. Mézard le suggère.
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 25 decies.
L'amendement n° 1503 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 25 decies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 réglementant les conditions d’exercice des activités relatives à certaines opérations portant sur les immeubles et les fonds de commerce est ainsi modifiée :
1° L’article 3 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa du 4° , les mots : « au titre II » sont remplacés par les mots : » aux titres II et II bis » ;
b) Au dernier alinéa, les mots : « posées par les 1° et 4° ci-dessus » sont remplacés par les mots : « posées par le 1° ci-dessus et ne pas être frappée d’une des incapacités ou interdictions d’exercer définies au titre II ci-après » ;
2° Au premier alinéa de l’article 3-1 et à l’article 13-5, après les mots : « personnes mentionnées à l’article 1er » sont insérés les mots : « et, lorsqu’il s’agit de personnes morales, leurs représentants légaux et statutaires » ;
3° Au premier alinéa de l’article 4-1, après les mots : « ou des liens de nature juridique qu’elles » sont insérés les mots : « ou leurs représentants légaux et statutaires » ;
4° Au 1° de l’article 13-1, après les mots : « personnes mentionnées à l’article 1er », sont insérés les mots : « et, lorsqu’il s’agit de personnes morales, à leurs représentants légaux et statutaires » ;
5° À la première phrase de l’article 13-3, après les mots : « les personnes mentionnées à l’article 1er », sont insérés les mots : » et, lorsqu’il s’agit de personnes morales, leurs représentants légaux et statutaires » ;
6° À l’article 13-4, après les mots : « dans l’exercice de ses activités » sont insérés les mots : « ou, lorsqu’il s’agit d’une personne morale, par un de ses représentants légaux et statutaires » ;
7° L’article 13-8 est ainsi modifié :
a) Après le cinquième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les représentants légaux et statutaires des personnes morales peuvent en outre faire l’objet d’une interdiction temporaire ou définitive de gérer, diriger et administrer une personne morale exerçant les activités mentionnées à l’article 1er. » ;
b) La première phrase du sixième alinéa est complétée par les mots : « ou, lorsqu’il s’agit d’une personne morale, de ses représentants légaux et statutaires » ;
c) À l’avant-dernier alinéa, après les mots : « de l’intéressé », sont insérés les mots : « ou de la personne morale qu’il représente ».
La parole est à M. le ministre.
M. Emmanuel Macron, ministre. Cet amendement vise à apporter une série de corrections et d’adaptations de la loi du 2 janvier 1970 réglementant les conditions d’exercice des activités relatives à certaines opérations portant sur les immeubles et les fonds de commerce, ou loi Hoguet, qui a été modifiée par la loi du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové. Nous proposons d’améliorer la coordination entre les deux textes.
Premièrement, la loi ALUR a introduit un régime de sanctions disciplinaires pour les personnes physiques et morales titulaires d’une carte professionnelle. Or la loi Hoguet disposait que les personnes physiques devaient notamment justifier d’une aptitude professionnelle et ne pas être frappées d’une des incapacités ou interdictions résultant de condamnations pénales. L’articulation entre ces deux textes n’a pas été prévue. Cet amendement tend à y remédier.
Deuxièmement, même si les représentants légaux et statutaires des personnes morales ne sont pas titulaires d’une carte professionnelle, ils sont soumis aux mêmes exigences d’aptitude professionnelle et aux mêmes interdictions que celles qui s’appliquent aux personnes physiques. L’amendement vise donc à compléter les dispositions de la loi du 2 janvier 1970 en apportant une précision : lorsque les activités mentionnées à l’article 1er de cette même loi sont exercées par une personne morale, ses représentants légaux et statutaires sont également soumis au code de déontologie et à des poursuites disciplinaires devant la commission de contrôle.
Troisièmement, il faut indiquer que lorsque la personne titulaire d’une carte professionnelle est une personne morale, les personnes soumises à l’obligation de formation continue par l’article 3-1 de la loi Hoguet sont ses représentants légaux ou statutaires.
Quatrièmement, nous voulons étendre l’obligation d’information prévue à l’article 4-1 de la loi Hoguet, en prévoyant que l’information doit également porter sur les liens capitalistiques et juridiques des représentants légaux et statutaires des personnes morales avec les entreprises dont elles proposent les services.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Cet amendement porte sur un nouveau sujet. Nous nous demandons si cela a bien sa place dans le projet de loi.
Quoi qu’il en soit, la commission s’en remet à la sagesse du Sénat.
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 25 decies.
Je suis saisie de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 322 est présenté par M. Navarro.
L'amendement n° 660 rectifié est présenté par MM. Kern et Détraigne, Mme Gatel et MM. Marseille et Médevielle.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. – Après l’article 25 decies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de la consommation est ainsi modifié :
1° Après le 4° bis de l’article L. 312-8, il est inséré un 4° ter ainsi rédigé :
« 4° ter Mentionne que l’emprunteur peut souscrire auprès de la société de financement de son choix une caution solidaire dans les conditions fixées à l’article L. 312-9-1 ; »
2° Après l’article L. 312-9, il est inséré un article L. 312-9-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 312-9-1 – Lorsque le prêteur propose à l’emprunteur un contrat de cautionnement en vue de se substituer à l’emprunteur dans le paiement des échéances impayées dudit prêt, les dispositions suivantes sont appliquées :
« 1° Au contrat de prêt sont annexées les conditions de mise en jeu du cautionnement ;
« 2° Toute modification apportée ultérieurement à la définition de la teneur de la garantie, aux modalités de la mise en jeu du cautionnement ou à la tarification du contrat est inopposable à l’emprunteur qui n’y a pas donné son acceptation ;
« 3° Lorsque la société de financement a subordonné sa garantie à l’agrément du bénéficiaire de l’engagement et que cet agrément n’est pas donné, le contrat de prêt est résolu de plein droit à la demande de l’emprunteur sans frais ni pénalité d’aucune sorte. Cette demande doit être présentée dans le délai d’un mois à compter de la notification du refus de l’agrément.
« Un décret en Conseil d’État définit les conditions dans lesquelles le prêteur et la société de financement s’échangent les informations préalables à la souscription des contrats.
« Le prêteur ne peut, en contrepartie de son acceptation en garantie d’un contrat de cautionnement autre que le contrat de cautionnement qu’il propose, ni modifier le taux, qu’il soit fixe ou variable, ou les conditions d’octroi du crédit, prévus dans l’offre définie à l’article L. 312-7, ni exiger le paiement de frais supplémentaires, y compris les frais liés aux éventuels travaux d’analyse de cet autre contrat de cautionnement. »
II. – En conséquence, faire précéder cet article d’une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :
Chapitre VI
Cautionnement bancaire
L’amendement n° 322 n’est pas soutenu.
La parole est à M. Claude Kern, pour présenter l'amendement n° 660 rectifié.
M. Claude Kern. Cet amendement vise à instaurer une réelle liberté de choix pour le consommateur en matière de cautionnement bancaire des prêts immobiliers, afin de répondre aux graves dysfonctionnements concurrentiels qui sont régulièrement constatés.
Depuis dix ans, le cautionnement, c'est la première des garanties, avant l’hypothèque, et le privilège du prêteur de deniers. Non seulement les banques dirigent les clients vers le cautionnement, mais, en plus, elles imposent leurs organismes de cautionnement. Le choix se limite ainsi souvent entre la filiale possédée en commun avec les banques, le crédit logement et la filiale exclusive de la banque, dite « captive ».
Outre un marché tenu à 95 % par les banques, une telle pratique empêche les clients de tirer parti du grand écart tarifaire, avec un rapport d’un à deux et demi, constaté entre organismes.
Cette concurrence sclérosée aboutit à des marges extrêmement importantes – le taux rentabilité nette peut atteindre 45 % –, au détriment des consommateurs.
Sur ce marché de 520 millions d’euros par an, l’instauration d’une véritable concurrence permettrait, en s’alignant simplement sur l’acteur le moins cher, de dégager 210 millions d’euros par an, soit une réduction de près de 41 % de la facture globale et 560 euros d’économie par dossier de crédit. En poussant plus loin la concurrence et en réduisant les marges, l’économie réalisable passerait en moyenne à 270 millions d’euros par an.
Cet amendement vise à assurer aux consommateurs une liberté effective de choix de leur organisme de cautionnement bancaire, à l’instar de ce que les lois Lagarde et Hamon ont permis en matière d’assurance emprunteur.
Mme la présidente. Les deux amendements suivants sont également identiques.
L'amendement n° 385 est présenté par Mme Schillinger.
L'amendement n° 545 rectifié est présenté par Mme Laborde, MM. Mézard, Arnell, Bertrand, Castelli, Collin, Esnol et Fortassin, Mme Malherbe et MM. Requier et Collombat.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 25 decies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de la consommation est ainsi modifié :
1° Après le 4° bis de l’article L. 312-8, il est inséré un 4° ter ainsi rédigé :
« 4° ter Mentionne que l’emprunteur peut souscrire auprès de la société de financement de son choix une caution solidaire dans les conditions fixées à l’article L. 312-9-1; »
2° Après l’article L. 312-9, il est inséré un article L. 312-9-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 312-9-1. – Lorsque le prêteur propose à l’emprunteur un contrat de cautionnement en vue de se substituer à l’emprunteur dans le paiement des échéances impayées dudit prêt, les dispositions suivantes sont appliquées :
« 1° Au contrat de prêt sont annexées les conditions de mise en jeu du cautionnement ;
« 2° Toute modification apportée ultérieurement à la définition de la teneur de la garantie, aux modalités de la mise en jeu du cautionnement ou à la tarification du contrat est inopposable à l’emprunteur qui n’y a pas donné son acceptation ;
« 3° Lorsque la société de financement a subordonné sa garantie à l’agrément du bénéficiaire de l’engagement et que cet agrément n’est pas donné, le contrat de prêt est résolu de plein droit à la demande de l’emprunteur sans frais ni pénalité d’aucune sorte. Cette demande doit être présentée dans le délai d’un mois à compter de la notification du refus de l’agrément.
« Un décret en Conseil d’État définit les conditions dans lesquelles le prêteur et la société de financement s’échangent les informations préalables à la souscription des contrats.
« Le prêteur ne peut, en contrepartie de son acceptation en garantie d’un contrat de cautionnement autre que le contrat de cautionnement qu’il propose, ni modifier le taux, qu’il soit fixe ou variable, ou les conditions d’octroi du crédit, prévus dans l’offre définie à l’article L. 312-7, ni exiger le paiement de frais supplémentaires, y compris les frais liés aux éventuels travaux d’analyse de cet autre contrat de cautionnement. »
La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour présenter l’amendement n° 385.
Mme Patricia Schillinger. Cet amendement vise à instaurer une liberté de choix pour le consommateur en matière de cautionnement bancaire des prêts immobiliers.
Le cautionnement des crédits immobiliers consiste, pour un emprunteur, à faire appel à une société externe pour garantir à sa banque qu’il paiera bien les échéances de son prêt. En cas de défaillance, cette société se substitue à l’emprunteur et peut ensuite se retourner contre lui pour récupérer les sommes avancées.
Alors que le cautionnement est la garantie la plus fréquemment utilisée – cela représentait 56,3 % du marché en 2012 – en matière de crédit immobilier, devant l’hypothèque, les banques imposent leur organisme de cautionnement aux clients emprunteurs.
Outre un marché détenu à 95 % par les banques, une telle pratique empêche les clients de tirer parti du grand écart tarifaire constaté entre les organismes. Ainsi, les consommateurs n’ont le choix qu’entre une filiale et une filiale !
Les écarts de coût entre acteurs peuvent varier du simple à plus du double, mais les emprunteurs, orientés vers la filiale de l’établissement dans lequel ils souscrivent leur prêt, ne peuvent pas en profiter. Cette concurrence sclérosée aboutit à des marges extrêmement importantes et pénalise les consommateurs.
Sur ce marché de 520 millions d’euros par an, l’instauration d’une véritable concurrence permettrait, en s’alignant simplement sur l’acteur le moins cher, de dégager 210 millions d’euros par an, soit une réduction de près de 41 % de la facture globale et 560 euros d’économie par dossier de crédit. L’économie réalisable passerait à 270 millions d’euros par an en moyenne, soit un gain de pouvoir d’achat substantiel.
Cet amendement vise à assurer aux consommateurs une liberté effective de choix de leur organisme de cautionnement bancaire, à l’instar de ce que les lois Lagarde et Hamon ont permis en matière d’assurance emprunteur.
Mme la présidente. La parole est à Mme Françoise Laborde, pour présenter l'amendement n° 545 rectifié.
Mme Françoise Laborde. Le cautionnement bancaire consiste, pour un consommateur, à faire appel à une société pour garantir à sa banque le bon paiement des mensualités d’un crédit immobilier, et ce moyennant finances lors de la souscription dudit crédit.
Cette pratique, qui est parfois intégrée dans les contrats de prêt sans distinction claire, est assez méconnue des emprunteurs. C’est donc une aubaine pour les banques, qui dégagent ainsi des marges injustifiées.
Selon une étude réalisée l’an dernier, près de 50 % de la prime payée par les consommateurs retourne dans la poche des banques qui imposent le cautionnement.
À l’heure actuelle, ces dernières font prévaloir quasiment systématiquement leurs filiales aux consommateurs avec des prix pouvant varier du simple au double.
Nous voulons rendre ce marché plus concurrentiel, afin de faire baisser les prix facturés aux clients. Le fait d’avoir davantage de transparence et une saine concurrence permettrait d’économiser plus de 700 euros en moyenne par emprunt, soit plus de 40 % du prix du cautionnement.
Cet amendement va donc dans le sens d’une plus grande liberté et d’une plus grande efficacité économique.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Les associations de consommateurs affirment qu’une telle mesure pourrait rendre du pouvoir d’achat aux Français.
Toutefois, il faut, me semble-t-il, rester prudent sur le sujet. Le marché de la caution étant très concentré, il n’est pas certain qu’une mise en concurrence permettrait de faire baisser les prix, d’autant plus que le coût de la caution dépend très largement de la qualité de l’emprunteur.
En outre, si le prix de la caution est répercuté sur l’emprunteur, il s’agit d’un contrat signé entre la banque et la société de caution. On peut donc se demander si la liberté de choix de l’emprunteur ne serait pas factice.
L’Autorité de la concurrence et la Banque de France travaillent toutes les deux sur ce sujet important.
À titre personnel, je suis plutôt défavorable à ces amendements. Mais la commission spéciale s’en remet à l’avis du Gouvernement.
Mme la présidente. Quel est donc l’avis du Gouvernement ?
M. Yves Pozzo di Borgo. J’espère qu’il ne va pas défendre les banques ! (Sourires.)
Mme Marie-Noëlle Lienemann. J’allais le dire !
M. Yves Pozzo di Borgo. Il y a conflit d’intérêts ! (Nouveaux sourires.)
M. Emmanuel Macron, ministre. Nous avons ouvert de nombreux sujets consuméristes ces derniers jours et obtenu d’importantes avancées – je pense notamment à la mobilité bancaire – sans céder à aucun lobby puissant.
Les auteurs de ces amendements proposent d’instaurer une liberté de choix en matière de cautionnement des prêts immobiliers. Or le cautionnement sert non pas le consommateur, mais la banque : il s’agit d’un mécanisme qu’elle utilise pour couvrir son risque.
Les associations de consommateurs, qui poussent beaucoup cette mesure, mettent en avant un retour pour le consommateur. Je n’adhère pas à cette philosophie : en s’immisçant dans l’organisation choisie par la banque, on va créer de la complexité, ce qui n’apportera pas forcément grand-chose au consommateur. Autant je n’avais pas d’états d’âme sur la mobilité, autant j’en ai sur ce sujet.
Dans le cas de l’assurance emprunteur, le bénéficiaire de la garantie, c’est l’emprunteur ; dans le cautionnement, c’est la banque prêteuse. Le choix de la caution dépend donc de la politique de risque de cette dernière. En outre, la qualité et la solvabilité de l’organisme de caution ont un effet direct sur les exigences de capital prudentiel liées au crédit bancaire et au taux proposé.
Certaines banques décident de cautionner en interne et d’autres d’avoir recours à des structures externes. Je pense qu’il faut leur laisser cette liberté.
Par ailleurs, le modèle de garantie par caution, qui est spécifiquement français, présente de nombreux avantages à ne pas négliger. D’abord, il s’agit d’une garantie indépendante de la valeur du bien immobilier. Ensuite, le prix est moins élevé pour le consommateur que celui de l’hypothèque. Enfin, le taux de sinistralité est faible, au regard des autres modèles.
Il n’est pas non plus évident que l’ouverture du cautionnement ait un effet sur le coût du crédit ; elle pourrait être à l’origine de coûts supplémentaires. Comme les banques prêteuses vont devoir analyser la qualité de la caution externe à laquelle on les oblige à recourir, il peut y avoir du coût interstitiel. En outre, le crédit cautionné pourrait devenir moins intéressant pour les banques, du fait des coûts supplémentaires, avec de possibles effets d’éviction des personnes couvertes par ces mécanismes.
Par ailleurs, les organismes de caution pourraient accroître le coût de leurs prestations. In fine, le coût du crédit pour le consommateur serait ainsi susceptible d’augmenter.
Je ne vais pas faire de modélisation. Simplement, les effets attendus par celles et ceux qui défendent une telle mesure me semblent particulièrement optimistes. En effet, rien ne garantit que l’effet soit très positif pour le consommateur.
Comme Mme le corapporteur l’a indiqué, l’Autorité de la concurrence, qui s’est saisie du sujet, remettra un rapport. À mon avis, un rapport contradictoire sera ensuite nécessaire, afin que nous puissions être véritablement éclairés.
Compte tenu des potentiels effets indésirables et du fait que le mécanisme relève de l’organisation des banques et ne concerne pas directement le consommateur, je sollicite le retrait de ces amendements. À défaut, l’avis serait défavorable.
Mme la présidente. L’amendement n° 660 rectifié est-il maintenu, monsieur Kern ?
M. Claude Kern. Oui, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 385 est-il maintenu, madame Schillinger ?
Mme Patricia Schillinger. Non, je le retire, madame la présidente.
Toutefois, je souhaite que la Banque de France se penche sur le sujet. Il faut qu’une étude plus fine soit réalisée. Les arguments de M. le ministre m’interpellent ; il ne s’agit évidemment pas de donner un chèque en blanc !
Mme la présidente. L’amendement n° 385 est retiré.
Qu’en est-il de l’amendement n° 545 rectifié, madame Laborde ?
Mme Françoise Laborde. Je le retire également, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 545 rectifié est retiré.
Je suis saisie de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 323 est présenté par M. Navarro.
L'amendement n° 661 rectifié est présenté par M. Kern, Mme Gatel et M. Médevielle.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. – Après l’article 25 decies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le chapitre V du titre IV du livre IV du code de l’énergie est complété par une section 3 ainsi rédigée :
« Section 3
« Transparence
« Art. L. 445-6. - Chaque fournisseur national de gaz rend publics au plus tard au premier jour de chaque mois :
« – le détail géographique du zonage tarifaire mentionné à l’article L. 445-3 ainsi que la variation tarifaire appliquée entre les zones pour chacune de ses offres ;
« – la grille tarifaire correspondant à chacune de ses offres. Cette dernière est transmise aux associations de consommateurs représentatives au niveau national et agréées en application de l’article L. 411-1 du code de la consommation qui en font la demande. »
II. – En conséquence, faire précéder cet article d’une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :
Chapitre …
Énergie
L’amendement n° 323 n’est pas soutenu.
La parole est à M. Claude Kern, pour présenter l’amendement n° 661 rectifié.
M. Claude Kern. Je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 661 rectifié est retiré.
L’amendement n° 833 rectifié bis n’est pas soutenu.
L'amendement n° 1388, présenté par Mme Assassi, M. Le Scouarnec et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 25 decies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au deuxième alinéa de l’article L. 221-5 du code monétaire et financier, le nombre : « 1,25 » est remplacé par le nombre : « 1,40 ».
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Il s’agit d’une mesure que nous réclamons depuis plusieurs années. Elle a toute sa place dans ce débat.
Nous souhaitons renforcer les moyens destinés au financement du logement social, en accroissant les moyens du fonds d’épargne géré par la Caisse des dépôts et consignations et en mettant un terme à la banalisation du livret A. Nous voulons ainsi mettre fin à un véritable détournement de l’épargne populaire.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. La commission est défavorable à cet amendement, qui vise à revenir sur un compromis trouvé entre les réseaux bancaires, la Caisse des dépôts et consignations et l’État sur le niveau de centralisation du livret A et du livret de développement durable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Mes chers collègues, nous avons examiné 98 amendements au cours de la journée ; il en reste 957 à examiner.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
6
Ordre du jour
Mme la présidente. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, mercredi 15 avril 2015, à quatorze heures trente et le soir :
Suite du projet de loi, considéré comme adopté par l’Assemblée nationale en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution après engagement de la procédure accélérée, pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques (n° 300, 2014-2015) ;
Rapport de Mmes Catherine Deroche, Dominique Estrosi Sassone et M. François Pillet, fait au nom de la commission spéciale (n° 370, tomes I, II et III, 2014-2015) ;
Texte de la commission (n° 371, 2014-2015).
En outre, à quatorze heures trente : désignation des vingt-trois membres de la mission d’information sur la commande publique.
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée le mercredi 15 avril 2015, à une heure quinze.)
Le Directeur du Compte rendu intégral
FRANÇOISE WIART