M. le président. L'amendement n° 961, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 38
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
... – La première phrase du deuxième alinéa de l'article L. 314-7 est complétée par les mots : « , ou une prime prenant en compte les cas dans lesquels les producteurs sont également consommateurs de tout ou partie de l’électricité produite ».
La parole est à Mme la ministre.
Mme Ségolène Royal, ministre. Il s'agit d’un amendement rédactionnel, qui tend à aligner les conditions de l’autoconsommation en ce qui concerne l’obligation d’achat et les compléments de rémunération.
Cette prise en compte de l’autoconsommation dans les mécanismes de complément de rémunération favorisera le développement du résidentiel tertiaire et, par exemple, la couverture des centres commerciaux par des panneaux photovoltaïques, notamment dans les territoires d’outre-mer. En effet, les installations y sont quasiment inexistantes, malgré un potentiel de production d’énergie photovoltaïque très important.
D’où la nécessité de réglementer correctement l’autoconsommation. Même si l’énergie est revendue sur le réseau, l’autoconsommation est prise en compte. Cela incite les grandes surfaces à produire et à consommer leur énergie, plutôt que de rester inactives et d’utiliser des énergies fossiles. Ce dispositif aidera les zones commerciales à s’équiper, sur leurs toits, de centrales photovoltaïques.
M. Ladislas Poniatowski, au nom de la commission des affaires économiques. Nous sommes d’autant plus favorables que nous souhaitions déposer un amendement similaire. Cependant, l’article 40 de la Constitution se serait appliqué… Nous nous sommes empressés de le retirer, et nous sommes ravis que le Gouvernement ait proposé ces dispositions !
M. Jean-Pierre Raffarin. Quelle cohérence !
M. le président. L'amendement n° 756, présenté par MM. Dantec, Labbé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 44
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
… – L’article L. 314-14 du code de l’énergie est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le producteur bénéficiant du complément de rémunération prévu à l’article L. 314-18 pour l’électricité produite en France conserve le bénéfice des garanties d’origine correspondantes. Lorsqu’une garantie d’origine est vendue, une part de la recette fixée par décret vient en déduction du complément de rémunération versé au producteur. »
La parole est à M. Ronan Dantec.
M. Ronan Dantec. Notre débat étant assez technique, je vais apporter quelques précisions. La garantie d'origine, outil de traçabilité de l'électricité renouvelable, permet aux fournisseurs qui le souhaitent de proposer à leurs clients des « offres vertes » valorisant le caractère renouvelable de l’électricité fournie.
Lorsque la production bénéficie du tarif d’obligation d'achat, le bénéfice de la garantie d'origine est transféré à l'acheteur obligé – en l’occurrence Électricité de France ou les entreprises locales de distribution – qui, s'il la valorise, se voit soustraire la totalité de la recette correspondante du montant de la compensation qu’il recevra au titre de la contribution au service public de l’électricité, la CSPE. Cette absence d’incitation a pour conséquence logique qu’il n’existe aucun marché des garanties d’origine pour les installations sous contrat d’obligation d'achat.
Dans le cadre du complément de rémunération, le bénéficiaire potentiel des garanties d’origine doit être défini, et l'utilisation du produit de leur éventuelle vente être déterminée.
Le présent amendement vise à transposer à la production d’électricité les dispositions déjà adoptées pour la production de biométhane en matière de propriété des garanties d’origine et de partage des recettes de la vente éventuelle desdites garanties d’origine.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
M. Ladislas Poniatowski, au nom de la commission des affaires économiques. M. Dantec a raison de rappeler que nous avons évoqué le sujet tout à l’heure, lors de l’examen de l’amendement déposé par M. Mouiller sur les entreprises locales de distribution.
Cher collègue, cette précision est inutile, dans la mesure où, contrairement aux contrats d’achat où l’électricité est effectivement acquise par l’acheteur obligé et pour laquelle il est par conséquent nécessaire de préciser, comme c’est le sas à l’article L. 314-14 du code de l’énergie, que les garanties d’origine associées restent la propriété du producteur, le complément de rémunération aboutit non pas à une cession d’électricité au payeur obligé, mais uniquement au versement d’un complément financier.
Ainsi, dès lors que le producteur reste propriétaire de l’électricité produite et qu’il lui appartient de la vendre sur le marché, celui-ci conserve automatiquement le bénéfice de ses garanties d’origine. Votre amendement est donc satisfait sur ce point.
La deuxième phrase de votre amendement est également satisfaite par la rédaction de l’article L. 314-20, qui dispose qu’il est tenu compte, parmi les recettes de l’exploitation prises en considération pour fixer le complément de rémunération, de la valorisation par le producteur de ses garanties d’origine.
Par conséquent, votre amendement étant doublement satisfait, je vous invite à le retirer.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Ségolène Royal, ministre. Les deux objectifs sont déjà satisfaits par des dispositions existantes, en l’occurrence tant par le texte sur les garanties d’origine que par l’article que nous sommes en train d’examiner.
Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi il émettrait un avis défavorable.
M. le président. Monsieur Dantec, l'amendement n° 756 est-il maintenu ?
M. Ronan Dantec. Les associations s’inquiétaient beaucoup de savoir si, dans le cadre du complément de rémunération, le bénéficiaire potentiel des garanties d’origine était bien défini. Toutefois, mon amendement est satisfait, notamment par les réponses que vient de l’apporter M. le rapporteur et de Mme la ministre.
Je le retire, donc, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 756 est retiré.
L'amendement n° 749, présenté par MM. Dantec, Labbé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 45
Après les mots :
en vigueur
insérer les mots :
des textes réglementaires d'application
La parole est à M. Ronan Dantec.
M. Ronan Dantec. Le texte actuel de l’alinéa 45 précise que le contrat d’achat continue à s’appliquer dans sa rédaction antérieure à la promulgation de la présente loi jusqu’à la date d’entrée en vigueur des décrets dressant la liste des installations éligibles au contrat d’achat et de celles qui sont éligibles au complément de rémunération.
Cependant, il a été annoncé par le ministère de l’écologie qu’une série d’arrêtés complémentaires d’application desdits décrets serait prise, spécifiant les détails du mécanisme du complément de rémunération par la filière des énergies renouvelables donnée.
La publication des arrêtés fixant les détails de chacun des mécanismes de rémunération sera conditionnée à une notification à la Commission européenne et à la validation du mécanisme proposé par celle-ci. Les délais de publication de l’ensemble des textes d’application ne sont donc pas entièrement maîtrisables par le pouvoir réglementaire.
Par conséquent, il est indispensable que la période transitoire pendant laquelle l’obligation d’achat demeure soit étendue jusqu’à l’entrée en vigueur réelle – j’insiste sur ce mot – du complément de rémunération, qui correspondra à l’entrée en vigueur des différents arrêtés par filière, postérieurs à la date d’entrée en vigueur du décret mentionné.
Il faut noter, en particulier, que le tarif d’achat pour l’éolien terrestre a été notifié à la Commission européenne et demeure, au regard des lignes directrices européennes, valable dix ans à compter de son approbation, le 27 mars 2014, ce qui entraînera une mise en œuvre du complément de rémunération à une date potentiellement différente des autres filières.
Vous l’avez compris, mes chers collègues, il s’agit de sécuriser la période transitoire avant l’entrée en vigueur du complément de rémunération, en précisant que le dispositif du complément de rémunération commence à s’appliquer à compter de la publication de l’ensemble des textes réglementaires d’application.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
M. Ladislas Poniatowski, au nom de la commission des affaires économiques. Cher collègue, je ne sais pas si vous souhaitez sécuriser la période de transition ; ce qui est sûr, c’est que vous allez retarder le plus possible la mise en place de ce nouveau mécanisme !
La rédaction actuelle, qui a encore été précisée par votre commission, a d’ores et déjà prévu que toutes les demandes antérieures à la date de publication du décret dressant la liste des installations éligibles au complément de rémunération pourront bénéficier de l’obligation d’achat dans sa version en vigueur à la date de la demande. Se référer aux textes d’application des textes d’application ne me paraît, par conséquent, pas nécessaire.
C'est pourquoi je vous invite à retirer votre amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Dantec, l'amendement n° 749 est-il maintenu ?
M. Ronan Dantec. Je ne suis pas aussi convaincu par la réponse de M. le rapporteur que je l’ai été lors de l’examen de l’amendement précédent. Il faudra revenir sur cette question, me semble-t-il.
Néanmoins, je retire mon amendement, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 749 est retiré.
L'amendement n° 750, présenté par MM. Dantec, Labbé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 46
Après les mots :
d'entrée en vigueur
insérer les mots :
des textes réglementaires d'application
La parole est à M. Ronan Dantec.
M. Ronan Dantec. Cet amendement étant très proche du précédent, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 750 est retiré.
La parole est à M. Gérard Miquel, pour explication de vote sur l'article.
M. Gérard Miquel. Je voterai cet article. Toutefois, je souhaite attirer l’attention de Mme la ministre et de nos collègues sur un problème important.
La biomasse représente dans notre pays une source d’énergie renouvelable considérable. Nous avons des réserves dont le potentiel demeure inexploité. Cependant, nous pâtissons d’un inconvénient majeur : les installations de biomasse, pour produire de l’électricité en cogénération, ne sont soutenues, quant aux tarifs de reprise, qu’à partir de cinq mégawatts.
En Allemagne il n’existe pas de limite basse de puissance – l’électricité est reprise entre quatorze et dix-sept euros –, de même qu’en Autriche, où il n’y a pas de limite de puissance. Par ailleurs, pour nos installations photovoltaïques, on reprend l’électricité à partir de 90 kilowatts, et de 150 kilowatts pour les installations de méthanisation agricole.
Pourquoi ne reprenons-nous pas l’électricité issue de la biomasse dans les mêmes conditions qu’Allemagne ou en Autriche ? Cela nous permettrait d’équiper nos réseaux de chaleur pour produire de l’électricité, sans consommer davantage de biomasse. Nous aurions ainsi une production importante, qui contribuerait à atteindre les objectifs que nous nous sommes fixés en matière de mix énergétique.
J’aimerais que vous nous aidiez à résoudre ce problème, madame la ministre. Nous devons travailler sur ce point, et je ne comprends pas pourquoi nous ne nous alignons pas sur l’Allemagne et l’Autriche, qui ont pris une longueur d’avance assez importante en la matière.
À terme, madame la ministre, il vous faudra, me semble-t-il, intervenir auprès d’EDF et des organismes de régulation pour mettre un terme à cette discrimination négative envers la biomasse.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Ségolène Royal, ministre. Votre objection est tout à fait fondée, monsieur le sénateur. Y compris au sein de mon ministère, la biomasse est très souvent oubliée lorsque l’on dresse la liste des énergies renouvelables. Il a vraiment fallu procéder à une remise à niveau et développer la sensibilité au potentiel du milieu rural.
Heureusement, l’ADEME, l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, avec le fonds chaleur, a beaucoup investi sur la biomasse. Cette culture doit être respectée et pouvoir monter en puissance sur l’ensemble du territoire.
Les petites installations sont déjà très fortement soutenues par le fonds chaleur, mais je vous propose d’examiner de plus près la comparaison à laquelle vous vous livrez avec l’Allemagne. Je ne dispose pas ici d’éléments de réponse, mais je vais m’en enquérir et je vous communiquerai par écrit les résultats de mes investigations sur la différence de traitement qui peut exister pour la biomasse entre la France et l’Allemagne, et sur les raisons de cette différence. Du reste, ce sujet m’intéresse.
La biomasse peut être utilisée à la fois pour la chaleur, l’électricité et les carburants. Il s'agit véritablement d’une filière de valorisation des territoires ruraux. La France est l’un des premiers producteurs de matière première de biomasse ; il est évident que nous avons là une carte à jouer et que cette énergie doit vraiment monter en puissance.
M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle, pour explication de vote sur l’article.
M. Alain Vasselle. Je voudrais, dans le texte de l’article 23, relever un point, qui avait fait l’objet de l’amendement n° 752 de M. Dantec, dont je regrette d'ailleurs qu’il ait été assez rapidement retiré. En effet, il me semble que notre collègue avait raison, au moins sur la forme. En tout état de cause, la référence à une « rémunération raisonnable » ne me semble pas présenter de caractère normatif.
J’aimerais que M. le rapporteur, M. le président de la commission et Mme la ministre nous expliquent quelle est la définition du raisonnable. Comment appliquerez-vous cette disposition, qui est suffisamment vague pour faire l’objet d’une diversité d’interprétations et qui donnera inévitablement lieu à de nombreux contentieux ?
Il n’y aura qu’une seule lecture de ce texte au Sénat, et il me paraîtrait sage de veiller, au sein de la commission mixte paritaire, à ce que la rédaction soit davantage conforme au droit français.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Ladislas Poniatowski, au nom de la commission des affaires économiques. M. Dantec ayant retiré son amendement n° 752, nous ne nous étions pas étendus sur ce point.
Mon cher collègue, ce terme existe dans le code de l’énergie. Sont notamment cités la prime versée aux opérateurs d’effacement, à l’article L. 123-1, la prime pouvant s’ajouter aux tarifs d’achat garantis et les tarifs réglementés de vente, à l’article L. 337-6. Ces termes n’ont donc pas été inventés, même si, j’en conviens, ils sont propres au code de l’énergie.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Ségolène Royal, ministre. La question posée sur la notion de « rémunération raisonnable » est importante. Cette dernière est fixée par la Commission de régulation de l’énergie et par la Commission européenne. En pratique, elle correspond à un taux de rentabilité maximal de 8 %.
M. Alain Vasselle. C’est une précision importante !
M. le président. Je mets aux voix l'article 23, modifié.
(L'article 23 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 23
M. le président. L'amendement n° 755, présenté par MM. Dantec, Labbé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Après l'article 23
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa de l’article L. 342-3 du code de l’énergie est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Lorsque le raccordement est destiné à desservir une installation de production à partir de sources d’énergie renouvelable et emporte réalisation de travaux pour des ouvrages à créer ou à renforcer conformément au schéma régional de raccordement au réseau des énergies renouvelables mentionné à l’article L. 321-7, le délai de raccordement ne peut excéder dix-huit mois à compter de l’acceptation par le producteur de la proposition de raccordement du gestionnaire de réseau. »
La parole est à M. Ronan Dantec.
M. Ronan Dantec. Voilà encore un amendement qui est extrêmement important pour les producteurs d’énergies renouvelables.
Les délais de raccordement sont extrêmement longs en France si on les compare à ceux qui existent en Allemagne, et c’est l’une des raisons du retard du développement des énergies renouvelables dans notre pays. Nous voulons donc, au travers de cet amendement, renforcer la visibilité administrative pour les producteurs.
En effet, entre 2007 et 2013, le délai moyen de raccordement s’est progressivement accru pour atteindre un différentiel de dix mois. En 2014, le délai moyen de raccordement atteignait désormais trente mois. À titre d’exemple, un échantillonnage de soixante projets éoliens montre que le délai moyen entre l’obtention de la proposition technique et financière et la convention de raccordement est déjà de seize mois, les délais de raccordement pouvant ensuite atteindre plusieurs années.
De tels délais ne sont pas économiquement viables. Par ailleurs, les coûts de raccordement connaissent une augmentation constante et régulière.
Cet amendement de simplification administrative et de sécurisation économique des producteurs vise évidemment à accélérer la réalisation des installations.
Dès lors que l’on se situe dans le cadre du schéma régional, c'est-à-dire d’une planification discutée collectivement en amont, un délai de dix-huit mois me semble encore relativement long. Au Royaume-Uni, un amendement de ce type a permis de résorber des retards de raccordement très importants.
Cet amendement, loin d’être théorique, me semble aujourd’hui nécessaire pour sécuriser les producteurs. Ses dispositions tiennent compte de la réalité sur le terrain et intègrent la planification que nous sommes en train de mettre en œuvre au travers du schéma régional.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
M. Ladislas Poniatowski, au nom de la commission des affaires économiques. Je sais que, pendant de nombreuses années, on a reproché à ERDF de traîner les pieds, notamment pour le raccordement de petits projets photovoltaïques ou de petites fermes de cinq ou six éoliennes. Cela a pu être le cas.
Vous n’inventez certes pas les délais que vous mentionnez dans votre argumentaire, monsieur Dantec. Ils ont été mis en avant dans certains colloques, ainsi que, encore récemment, par le syndicat des énergies renouvelables. Il est vrai que, pour certains projets, les délais de raccordement dépassent largement les dix-huit mois. Mais, dans d’autres cas, le raccordement est aussi beaucoup plus rapide, et nous n’avons pas de statistiques officielles.
Si le raccordement prend parfois du temps, c’est aussi en raison de la complexité technique de certains projets. En outre, il s'agit tout de même de travaux coûteux ! Lorsqu’il faut raccorder une installation photovoltaïque ou éolienne au réseau à basse ou moyenne tension, ce sont parfois les collectivités locales qui doivent mettre la main à la poche.
S’il est opportun de favoriser les énergies renouvelables et de rémunérer les producteurs, quels qu’ils soient, n’oublions pas que ce sont souvent des tiers, à savoir les communes et les syndicats d’électricité, qui payent les travaux de raccordement, notamment à un réseau à basse tension.
Au travers de votre amendement, vous faites allusion non pas à cette question, monsieur Dantec, mais à certains abus qui ont pu avoir lieu. Toutefois, prévoir dans la loi un délai maximal de dix-huit mois risque de bloquer totalement certains projets qui sont techniquement très difficiles à raccorder.
En conséquence, la commission a émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Ségolène Royal, ministre. Il est vrai que, souvent, les collectivités territoriales et certains opérateurs économiques locaux, après avoir réalisé des investissements lourds dans les énergies renouvelables, attendent longtemps le raccordement de leurs installations, notamment dans la biomasse.
C’est la raison pour laquelle nous avons cherché à programmer les investissements au travers des schémas régionaux de raccordement des énergies renouvelables. L’idée est de travailler de façon plus contractuelle et de mettre chacun face à ses responsabilités, plutôt que de prévoir un régime de sanctions. En effet, le dépassement du délai maximal déboucherait inévitablement sur des contentieux visant à réclamer des indemnités en cas d’absence de production effective.
Je vous propose donc le choix pragmatique des schémas de raccordement, qui permettent d’anticiper les besoins et de conduire, je l’espère, à une réduction significative des délais, en modifiant le rapport de forces. Cette mesure est sans doute moins rigoureuse que votre proposition, monsieur Dantec, mais elle est aussi davantage dans l’air du temps.
Bien que le problème soit réel, le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi il émettrait un avis défavorable.
M. le président. Monsieur Dantec, l'amendement n° 755 est-il maintenu ?
M. Ronan Dantec. J’entends l’argument, avancé par M. le rapporteur, de la survenue d’un problème technique spécifique. Je suis prêt d’ailleurs à rectifier mon amendement en ce sens – cette méthode a porté ses fruits hier soir sur d’autres sujets.
Pour le reste, je reste sur ma faim, y compris après la réponse de Mme la ministre. Dès lors que l’on consacre beaucoup d’énergie à la définition d’un schéma régional, qui doit lui-même être élaboré dans un certain délai, il me semble logique de prévoir une contrainte de temps pour le raccordement. Sinon, le gain est nul !
Je rappelle que, au Royaume-Uni, on a gagné 1,2 gigawatt depuis 2009 avec une disposition de ce type. Il est temps, me semble-t-il, d’envoyer un signal. Cet amendement n’est pas seulement punitif. Il me semble juste, et je veux bien prévoir une exception en cas de problèmes techniques spécifiques.
Je maintiens donc mon amendement, monsieur le président.
M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle, pour explication de vote.
M. Alain Vasselle. Je ne suis pas insensible à l’amendement présenté par M. Dantec.
Actuellement, dans mon département, un réseau éolien est bloqué par ERDF, qui met en avant un certain nombre de difficultés techniques majeures. Tous les permis de construire ont été délivrés, et nous attendons maintenant depuis six ou sept ans… À un moment, il faut bien fixer une limite, et il me semble que notre collègue a raison de lancer ce signal.
Ensuite, je ne sais pas quelle méthode il convient de privilégier : celle qu’a développée Mme la ministre est peut-être suffisante pour faire bouger les lignes. Toujours est-il que cette situation existe sur le territoire national et qu’elle est mal vécue par les collectivités locales, qui attendent avec impatience l’installation de ces éoliennes.
Je voulais donc relayer l’intervention de Ronan Dantec, afin que le Gouvernement soit sensibilisé à cette situation. Peut-être devrait-il se rapprocher d’ERDF pour faire en sorte que les travaux soient réalisés.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Ségolène Royal, ministre. J’entends cet argument. J’ai d'ailleurs admis, dans mon intervention précédente, qu’il y avait un vrai problème de délai de raccordement : la diligence n’est pas forcément la règle. Beaucoup d’investissements restent ainsi en suspens.
L’autre solution serait d’inscrire un délai maximal dans les contrats de service public signés avec ERDF. Compte tenu du débat qui vient d’avoir lieu, je m’en remets à la sagesse du Sénat. Je précise toutefois qu’il me serait plus facile d’inscrire ce délai maximal dans les contrats si le Parlement en votait le principe. Je pourrais alors faire en sorte que les délais s’appliquent, soit par la voie réglementaire, soit dans le cadre d’une démarche contractuelle avec ERDF.
M. le président. La parole est à M. Gérard Miquel, pour explication de vote.
M. Gérard Miquel. Il s'agit d’un sujet extrêmement technique. Les petites installations de production se raccordent facilement : comme elles n’envoient pas des quantités énormes d’électricité sur le réseau, celui-ci est capable de les récupérer. En revanche, lorsqu’il s’agit d’une grosse installation, il faut se rendre à un poste de transformation, qui peut être éloigné de plusieurs kilomètres. Les collectivités locales doivent intervenir ; c’est parfois un peu compliqué.
Quand on dépose un permis de construire, il faut envisager toutes les hypothèses, et savoir à quelle distance on se trouve du lieu à partir duquel on peut injecter ses productions sur le réseau, d’autant qu’il ne s’agit pas de productions linéaires, l’éolien dépendant évidemment du vent. Je ne voudrais pas que l’instauration d’un délai de dix-huit mois conduise ERDF à penser qu’elle a dix-huit mois pour raccorder toutes les installations. Il faut faire attention à cela, car on éprouve déjà parfois des difficultés, même pour de petites installations.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 23.
L'amendement n° 754, présenté par MM. Dantec, Labbé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 23
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 342-9 du code de l’énergie est ainsi rédigé :
« Art. L. 342-9. - La convention ou le protocole de raccordement et le contrat d’accès au réseau liant un gestionnaire du réseau public de distribution et le demandeur du raccordement ou le producteur est établi sur la base de modèles publiés par le gestionnaire du réseau public de distribution.
« Ces modèles et ces protocoles sont approuvés par la Commission de régulation de l’énergie, préalablement à leur publication. Ces modèles et ces protocoles sont révisés sur l’initiative du gestionnaire de réseau concerné ou à la demande de la Commission de régulation de l’énergie. »
La parole est à M. Ronan Dantec.