Mme la présidente. La parole est à M. Claude Kern.
M. Claude Kern. Madame la présidente, madame la ministre, madame la rapporteur, mes chers collègues, la particulière technicité du présent texte ne doit pas masquer son intérêt et ses enjeux. Ce projet de loi a pour objectif de faciliter l’accès à la culture du plus grand nombre. Le groupe UDI-UC ne peut que souscrire à un tel objectif et votera donc ce projet de loi, qui adapte à notre législation des directives européennes dans les domaines de la propriété littéraire et artistique et du patrimoine culturel.
Soulignons par ailleurs que ce texte est examiné dans un cadre particulièrement contraint. Tout d’abord, l’adaptation au droit européen implique une retranscription fidèle et précise de dispositions que le législateur national ne peut pas modifier substantiellement. Ensuite, la procédure d’adaptation de notre droit interne au droit européen impose au législateur national de répondre à des délais précis.
La procédure d’urgence selon laquelle s’est déroulé l’examen de ce texte est motivée par plusieurs retards de transposition : les dates butoirs de deux des trois directives étant dépassées. Ainsi, le délai de transposition de la directive relative à la durée de protection du droit d’auteur s’est éteint au 1er novembre 2013, tandis que celui de la directive relative aux œuvres orphelines expirait le 29 octobre dernier. Nous déplorons les conséquences de ce retard, notamment au regard de la sécurité juridique ; certaines mesures seront rétroactives pour la période courant entre le 1er novembre 2013 et la date de la promulgation de la loi.
Cependant, le consensus qui s’est dégagé en commission paritaire mixte ne laisse guère de doute quant à l’adoption du présent texte. La transposition de ce texte sera donc bientôt effective, et c’est une bonne chose.
Le présent projet de loi vise à transposer trois directives.
La première est la directive du 27 septembre 2011 modifiant la durée de protection du droit d’auteur et de certains droits voisins. Notre groupe tient à saluer les apports importants de ce projet de loi qui renforce notamment la défense des droits voisins des artistes-interprètes et des producteurs du seul secteur de la musique.
Le principal objet de la directive est de porter de cinquante à soixante-dix ans la durée de protection de certains droits voisins. Il s’agit de ceux des artistes-interprètes et des producteurs du seul secteur de la musique, le but étant de prendre en compte leur plus grande longévité, reflet de l’allongement général de la durée de la vie. Les droits dont ils sont titulaires arrivent à l’échéance de plus en plus souvent de leur vivant. Nous ne pouvons que soutenir la transposition fidèle ici faite de cette directive.
La deuxième la directive est celle du 25 octobre 2012, relative à certaines utilisations autorisées des œuvres orphelines.
Le texte permet à un certain nombre d’organismes, dont les bibliothèques accessibles au public, de numériser et de mettre à la disposition du public des œuvres appartenant à leurs collections et considérées comme orphelines, c’est-à-dire dont les titulaires de droits d’auteur ou de droits voisins n’ont pu, malgré des recherches diligentes, être retrouvés. Cette faculté, qui doit s’exercer dans un cadre non lucratif, est également ouverte aux musées, aux services d’archives, aux institutions dépositaires du patrimoine cinématographique ou sonore, aux établissements d’enseignement et aux organismes publics de radiodiffusion.
Nous nous réjouissons de l’accord trouvé avec l’Assemblée nationale sur l’article 2, relatif aux droits voisins, grâce à l’excellent travail de Mme la rapporteur et de Mme la présidente de la commission de la culture. Le Sénat a en effet, supprimé une mention non conforme à la directive, incluant les recettes issues de la location des œuvres dans l’assiette de la rémunération annuelle supplémentaire des artistes-interprètes et ouvert la possibilité pour les sociétés de perception et de répartition des droits agissant pour le compte des artistes-interprètes de demander au producteur l’état des recettes provenant de l’exploitation du phonogramme, confortant ainsi les droits des artistes-interprètes.
Des discussions tout aussi constructives ont eu lieu sur l’article 4, relatif aux conditions de mise à disposition au public des œuvres orphelines après leur numérisation. Notre assemblée avait supprimé la limitation à cinq ans du droit à des aides pour la numérisation des œuvres orphelines. L’objectif de cette modification était de lisser l’impact de l’amortissement sur une longue période. Nous sommes satisfaits du compromis retenu en commission mixte paritaire, qui fait passer la durée d’amortissement de cinq à sept ans. La rédaction finale est plus fidèle à l’esprit de la directive et nous saluons cette avancée.
Le projet de loi transpose, enfin, la directive du 15 mai 2014 relative à la restitution des biens culturels ayant quitté illicitement le territoire d’un État membre. L’objet de ce texte est de garantir la restitution, au profit d’un autre État membre, de tout bien culturel considéré comme un « trésor national de valeur artistique, historique ou archéologique » ayant quitté illicitement son territoire après le 1er janvier 1993. Cette rédaction apparaît conforme aux objectifs assignés par la directive.
Par ailleurs, nous saluons les efforts entrepris en matière d’intelligibilité et de lisibilité du texte, notamment à travers un travail d’actualisation des différentes terminologies existantes et surtout d’adaptation du vocabulaire issu de la directive aux terminologies de droit interne.
En conclusion, nous ne voyons pas de raison de nous opposer à ce projet de loi, qui reste fidèle aux textes communautaires, tout en regrettant le dépôt tardif de ce projet de loi, retard qui, entre autres conséquences négatives, interdit au Parlement de travailler comme il le devrait. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC, ainsi qu’au banc de la commission.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Vivette Lopez.
Mme Vivette Lopez. Madame la présidente, madame la ministre, madame la rapporteur, mes chers collègues, je souhaite souligner, comme je l’avais fait en première lecture, le retard pris par le Gouvernement pour assurer cette transposition de directives, ce qui l’a conduit à recourir à la procédure accélérée. Je me permets de rappeler que, la semaine dernière, nous avons également examiné en procédure accélérée une proposition de loi dont un volet concernait l’Agence France Presse. Il s’agissait, cette fois, de mettre notre droit en conformité avec les recommandations de l’Union européenne en matière de concurrence.
Ce manque de réactivité du Gouvernement aux prescriptions européennes nous oblige finalement à étudier des textes très techniques dans des délais restreints, ce qui n’est guère respectueux du travail parlementaire. (Mme Claudine Lepage s’exclame.)
De plus, pour le présent texte, une telle négligence, outre qu’elle peut à juste titre donner le sentiment aux artistes-interprètes que l’on fait peu de cas de leurs attentes, a eu de véritables conséquences en matière de sécurité juridique puisqu’il a un effet rétroactif pour la période courant entre le 1er novembre 2013 et la date de promulgation de la loi.
Cela étant, les rapporteurs, celui du Sénat comme celui de l’Assemblée nationale, ont travaillé rapidement et ont pu trouver une rédaction commune pour la quasi-totalité du texte. Seuls deux articles ont fait l’objet de divergences et ont provoqué la réunion d’une commission mixte paritaire.
Le premier d’entre eux, l’article 2, concerne la prolongation de la durée des droits voisins des artistes-interprètes et des producteurs du secteur de la musique, dans le cadre d’une directive de 2011, avec une durée de protection qui passe de cinquante à soixante-dix ans. Pour calculer la rémunération annuelle supplémentaire, le texte initial avait inclus dans l’assiette les recettes perçues grâce à la location de phonogrammes. Notre rapporteur, Colette Mélot, s’est inquiétée de la non-conformité de cette mention avec la directive, qui exclut expressément le louage. La commission mixte paritaire a conservé la rédaction du Sénat sur ce point.
A également été maintenue une disposition que nous avions adoptée et aux termes de laquelle les sociétés de perception et de répartition des droits des artistes-interprètes peuvent demander au producteur un état des recettes réalisées grâce à l’exploitation de l’œuvre. Il s’agit d’inscrire dans la loi l’obligation d’information pesant sur les producteurs et de permettre aux artistes interprètes de se reposer sur l’intervention d’une SPRD.
Dans ce domaine aussi, le Sénat a apporté sa valeur ajoutée, au service d’une meilleure protection des artistes-interprètes, dont la situation financière est souvent fragile lorsqu’ils achèvent leur carrière.
La commission mixte paritaire a également examiné la question de l’exploitation des œuvres orphelines par certains organismes ayant une mission d’intérêt public, tels que les bibliothèques, les établissements d’enseignement ou les musées. Le projet de loi doit permettre à ces organismes sans but lucratif de rendre accessibles des textes dont on ne peut retrouver l’auteur ; cet objectif s’inscrit dans le cadre de la stratégie numérique pour l’Europe développée par la Commission européenne.
Le projet de loi instaure, pour la mise à disposition du public de ces œuvres – par un procédé de numérisation, par exemple –, une procédure que l’organisme devra respecter, afin de s’assurer que le titulaire des droits est réellement introuvable. Comme une telle recherche s’avère coûteuse, il a été prévu que les organismes exploitant les œuvres orphelines pourraient répercuter leurs frais sur les utilisateurs, du moins en ce qui concerne les frais de numérisation et de mise à disposition du public.
La question restant à trancher était la durée pendant laquelle cette répercussion des frais pourrait avoir lieu. L’Assemblée nationale l’avait restreinte à cinq ans, mais notre rapporteur avait craint que cette mesure ne fût contre-productive, les bibliothèques étant incitées à répercuter fortement leurs frais sur les premières années de mise à disposition des œuvres.
La commission mixte paritaire est parvenue à une solution de compromis : vu que l’organisme ne peut répercuter éternellement les coûts réalisés, mais que ces coûts peuvent avoir un effet fortement dissuasif en raison de leurs conséquences financières, elle a porté de cinq à sept années leur durée d’amortissement.
En ce qui concerne le dernier volet du projet de loi, la lutte contre le trafic des biens culturels, le texte adopté par l’Assemblée nationale a été entériné sans modification, le Sénat ayant approuvé la dérogation créée en matière de charge de la preuve afin de renforcer le dispositif.
Mes chers collègues, le texte qui ressort de la procédure parlementaire est équilibré, respectueux des objectifs fixés par les directives européennes et porteur d’avancées sur les trois sujets traités. Le groupe UMP le votera bien évidemment. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC, ainsi qu’au banc de la commission.)
Mme la présidente. La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte élaboré par la commission mixte paritaire.
Je rappelle que, en application de l’article 42, alinéa 12, du règlement, le Sénat, lorsqu’il examine après l’Assemblée nationale le texte élaboré par la commission mixte paritaire, se prononce par un seul vote sur l’ensemble du texte en ne retenant que les amendements présentés ou acceptés par le Gouvernement.
Je donne lecture du texte élaboré par la commission mixte paritaire :
projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’union européenne dans les domaines de la propriété littéraire et artistique et du patrimoine culturel
Titre Ier
Dispositions relatives à l’allongement de la durée de protection de certains droits voisins
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Article 2
(Texte de la commission mixte paritaire)
Après l’article L. 212-3 du code de la propriété intellectuelle, sont insérés des articles L. 212-3-1 à L. 212-3-4 ainsi rédigés :
« Art. L. 212-3-1. – I. – Au-delà des cinquante premières années du délai de soixante-dix ans prévu au 2° du I de l’article L. 211-4, l’artiste-interprète peut notifier son intention de résilier l’autorisation donnée en application de l’article L. 212-3 à un producteur de phonogrammes lorsque celui-ci n’offre pas à la vente des exemplaires du phonogramme en quantité suffisante ou ne le met pas à la disposition du public de manière que chacun puisse y avoir accès de sa propre initiative.
« II. – Si au cours des douze mois suivant la notification prévue au I, le producteur de phonogrammes n’offre pas à la vente des exemplaires du phonogramme en quantité suffisante et ne le met pas à la disposition du public de manière que chacun puisse y avoir accès de sa propre initiative, l’artiste-interprète peut exercer son droit de résiliation de l’autorisation. L’artiste-interprète ne peut renoncer à ce droit.
« III. – Les modalités d’exercice du droit de résiliation sont définies par décret en Conseil d’État.
« Art. L. 212-3-2. – Lorsqu’un phonogramme contient la fixation des prestations de plusieurs artistes-interprètes, ceux-ci exercent le droit de résiliation mentionné à l’article L. 212-3-1 d’un commun accord.
« En cas de désaccord, il appartient à la juridiction civile de statuer.
« Art. L. 212-3-3. – I. – Si l’autorisation donnée en application de l’article L. 212-3 prévoit une rémunération forfaitaire, le producteur de phonogrammes verse à l’artiste-interprète, en contrepartie de l’exploitation du phonogramme contenant la fixation autorisée, une rémunération annuelle supplémentaire pour chaque année complète au-delà des cinquante premières années du délai de soixante-dix ans prévu au 2° du I de l’article L. 211-4. L’artiste-interprète ne peut renoncer à ce droit.
« Toutefois, le producteur de phonogrammes qui occupe moins de dix personnes et dont le chiffre d’affaires annuel ou le total du bilan annuel n’excède pas deux millions d’euros n’est pas tenu, pour l’exercice en question, au versement de la rémunération mentionnée au premier alinéa du présent I dans l’hypothèse où les frais des opérations de calcul et de contrôle seraient hors de proportion avec le montant de la rémunération à verser.
« II. – Le montant global de la rémunération annuelle supplémentaire mentionnée au I du présent article est fixé à 20 % de l’ensemble des recettes perçues par le producteur de phonogrammes au cours de l’année précédant celle du paiement de ladite rémunération annuelle pour la reproduction, la mise à la disposition du public par la vente ou l’échange, ou la mise à disposition du phonogramme de manière que chacun puisse y avoir accès de sa propre initiative, à l’exclusion des rémunérations prévues aux articles L. 214-1 et L. 311-1.
« III. – Le producteur de phonogrammes fournit, à la demande de l’artiste-interprète ou d’une société de perception et de répartition des droits mentionnée au IV et chargée de percevoir la rémunération annuelle supplémentaire de l’artiste-interprète, un état des recettes provenant de l’exploitation du phonogramme selon chaque mode d’exploitation mentionné au II.
« Il fournit, dans les mêmes conditions, toute justification propre à établir l’exactitude des comptes.
« IV. – La rémunération annuelle supplémentaire prévue aux I et II est perçue par une ou plusieurs sociétés de perception et de répartition des droits régies par le titre II du livre III et agréées à cet effet par le ministre chargé de la culture.
« L’agrément prévu au premier alinéa du présent IV est délivré en considération :
« 1° De la qualification professionnelle des dirigeants des sociétés ;
« 2° Des moyens humains et matériels que ces sociétés proposent de mettre en œuvre pour assurer la perception et la répartition de la rémunération prévue aux I et II, tant auprès de leurs membres qu’auprès des artistes-interprètes qui ne sont pas leurs membres ;
« 3° De l’importance de leur répertoire et de la représentation des artistes-interprètes bénéficiaires de la rémunération prévue aux I et II au sein des organes dirigeants ;
« 4° De leur respect des obligations prévues au titre II du livre III.
« Un décret en Conseil d’État fixe les modalités de délivrance et de retrait de cet agrément.
« Art. L. 212-3-4. – Si l’autorisation donnée en application de l’article L. 212-3 prévoit une rémunération proportionnelle, le producteur de phonogrammes ne peut retrancher les avances ou les déductions définies contractuellement de la rémunération due à l’artiste-interprète en contrepartie de l’exploitation du phonogramme contenant la fixation autorisée après les cinquante premières années du délai de soixante-dix ans prévu au 2° du I de l’article L. 211-4. »
Titre II
Dispositions relatives à l’exploitation de certaines œuvres orphelines
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Article 4
(Texte de la commission mixte paritaire)
Le titre III du livre Ier de la première partie du code de la propriété intellectuelle est complété par un chapitre V ainsi rédigé :
« Chapitre V
« Dispositions particulières relatives à certaines utilisations d’œuvres orphelines
« Art. L. 135-1. – Sont soumises au présent chapitre :
« 1° Les œuvres orphelines, au sens de l’article L. 113-10, qui ont été initialement publiées ou radiodiffusées dans un État membre de l’Union européenne et qui appartiennent à l’une des catégories suivantes :
« a) Les œuvres publiées sous la forme de livres, revues, journaux, magazines ou autres écrits faisant partie des collections des bibliothèques accessibles au public, des musées, des services d’archives, des institutions dépositaires du patrimoine cinématographique ou sonore ou des établissements d’enseignement, à l’exception des photographies et des images fixes qui existent en tant qu’œuvres indépendantes ;
« b) Les œuvres audiovisuelles ou sonores faisant partie de ces collections ou qui ont été produites par des organismes de radiodiffusion de service public avant le 1er janvier 2003 et qui font partie de leurs archives.
« Le fait pour un organisme mentionné aux a et b de rendre une œuvre accessible au public, avec l’accord des titulaires de droits, est assimilé à la publication ou à la radiodiffusion mentionnées au premier alinéa du présent 1°, sous réserve qu’il soit raisonnable de supposer que les titulaires de droits ne s’opposeraient pas aux utilisations de l’œuvre orpheline prévues à l’article L. 135-2 ;
« 2° Toute œuvre considérée comme orpheline dans un autre État membre en application de l’article 2 de la directive 2012/28/UE du Parlement européen et du Conseil, du 25 octobre 2012, sur certaines utilisations autorisées des œuvres orphelines.
« Art. L. 135-2. – Les organismes mentionnés au 1° de l’article L. 135-1 ne peuvent utiliser les œuvres mentionnées à ce même article que dans le cadre de leurs missions culturelles, éducatives et de recherche et à condition de ne poursuivre aucun but lucratif et de ne percevoir, le cas échéant et pour une durée ne pouvant excéder sept ans, que les recettes couvrant les frais découlant directement de la numérisation et de la mise à la disposition du public des œuvres orphelines qu’ils utilisent. Ils mentionnent le nom des titulaires de droits identifiés, respectent le droit moral de ces derniers et communiquent les informations prévues au 2° de l’article L. 135-3 ou à l’article L. 135-4. Cette utilisation est faite selon les modalités suivantes :
« 1° Mise à la disposition du public d’une œuvre orpheline de manière que chacun puisse y avoir accès de sa propre initiative ;
« 2° Reproduction d’une œuvre orpheline à des fins de numérisation, de mise à disposition, d’indexation, de catalogage, de préservation ou de restauration.
« Art. L. 135-3. – Un organisme mentionné au 1° de l’article L. 135-1 ne peut faire application de l’article L. 135-2 qu’après avoir :
« 1° Procédé à des recherches diligentes, avérées et sérieuses des titulaires de droits, en application du premier alinéa de l’article L. 113-10, dans l’État membre de l’Union européenne où a eu lieu la première publication ou, à défaut de celle-ci, la première radiodiffusion de l’œuvre. Ces recherches comportent la consultation des sources appropriées pour chaque catégorie d’œuvres. Lorsque l’œuvre n’a fait l’objet ni d’une publication, ni d’une radiodiffusion mais a été rendue accessible au public dans les conditions définies au dernier alinéa du 1° de l’article L. 135-1, ces recherches sont effectuées dans l’État membre où est établi l’organisme qui a rendu l’œuvre accessible au public. Pour les œuvres audiovisuelles, les recherches sont effectuées dans l’État membre où le producteur a son siège ou sa résidence habituelle ;
« 2° Communiqué le résultat des recherches mentionnées au 1°, ainsi que l’utilisation envisagée de l’œuvre orpheline, au ministre chargé de la culture, ou à l’organisme désigné à cette fin par celui-ci, qui le transmet sans délai à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur mentionné au paragraphe 6 de l’article 3 de la directive 2012/28/UE du Parlement européen et du Conseil, du 25 octobre 2012, sur certaines utilisations autorisées des œuvres orphelines, aux fins de l’inscription de ces informations dans la base de données établie par cet office à cet effet.
« Art. L. 135-4. – Lorsqu’une œuvre orpheline est déjà inscrite dans la base de données mentionnée au 2° de l’article L. 135-3, l’organisme n’est pas tenu de procéder aux recherches mentionnées au même article. Il doit indiquer, dans les conditions prévues audit article, l’utilisation de l’œuvre orpheline qu’il envisage.
« Art. L. 135-5. – Lorsque les recherches diligentes, avérées et sérieuses mentionnées à l’article L. 135-3 ont permis d’identifier et de retrouver le ou les titulaires des droits sur une œuvre, celle-ci cesse d’être orpheline.
« Lorsqu’une œuvre a plus d’un titulaire de droits et que tous ses titulaires n’ont pu être identifiés et retrouvés, l’utilisation de l’œuvre prévue à l’article L. 135-2 est subordonnée à l’autorisation du ou des titulaires identifiés et retrouvés.
« Art. L. 135-6. – Lorsqu’un titulaire de droits sur une œuvre orpheline justifie de ses droits auprès d’un organisme mentionné à l’article L. 135-3, ce dernier ne peut poursuivre l’utilisation de l’œuvre qu’avec l’autorisation du titulaire de droits.
« L’organisme verse au titulaire de droits une compensation équitable du préjudice que celui-ci a subi du fait de cette utilisation. Cette compensation est fixée par accord entre l’organisme et le titulaire de droits. Elle peut tenir compte, lorsqu’ils existent, des accords ou tarifs en vigueur dans les secteurs professionnels concernés.
« Le titulaire de droits peut se faire connaître à tout moment, nonobstant toute stipulation contraire.
« L’organisme auprès duquel le titulaire de droits justifie de ses droits informe sans délai le ministre chargé de la culture, ou l’organisme désigné à cette fin par celui-ci, qui transmet cette information à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur mentionné au 2° de l’article L. 135-3.
« Art. L. 135-7. – Un décret en Conseil d’État définit les modalités d’application du présent chapitre, notamment les sources d’informations appropriées pour chaque catégorie d’œuvres qui doivent être consultées au titre des recherches prévues au 1° de l’article L. 135-3. »
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Titre III
Dispositions relatives à la restitution de biens culturels sortis illicitement du territoire d’un État membre de l’Union européenne
Titre IV
Dispositions transitoires et dispositions relatives à l’outre-mer
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Mme la présidente. Sur les articles du texte élaboré par la commission mixte paritaire, je ne suis saisi d’aucun amendement.
Quelqu’un demande-t-il la parole sur l’un de ces articles ?...
Le vote est réservé.
Vote sur l'ensemble
Mme la présidente. Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire, je donne la parole à M. Patrick Abate, pour explication de vote.
M. Patrick Abate. Ce projet de loi va dans le sens d’une plus grande protection des auteurs et des biens culturels, et favorise le rayonnement et l’accessibilité des œuvres ; d’une manière générale, il convient tout à fait au groupe CRC.
Il harmonise notre législation avec celle des autres États de l’Union européenne en portant de cinquante à soixante-dix ans la durée de protection des droits d’auteur et des droits voisins dans le secteur musical, confronté à des défis particuliers liés au développement de nouveaux usages numériques et au téléchargement illégal.
Par ailleurs, il crée une exception ou une limitation au droit d’auteur et aux droits voisins pour les œuvres orphelines écrites, cinématographiques, audiovisuelles ou sonores. Il s’agit de permettre aux bibliothèques, aux musées, aux services d’archive et aux établissements d’enseignement de numériser leur collection et de mettre à disposition du public des œuvres orphelines dans le cadre de missions culturelles, éducatives et de recherche sans but commercial ou économique.
Enfin, le projet de loi renforce les mécanismes de restitution des biens culturels ayant quitté illicitement le territoire d’un État membre de l’Union européenne.
Disons-le honnêtement, on ne peut pas considérer que l’engagement de la procédure accélérée ait empêché le Parlement de travailler sérieusement, d’enrichir le projet de loi et d’aboutir à un compromis.
En revanche, nous tenons à réaffirmer notre attachement à une grande loi sur la création culturelle et le patrimoine ; promise par le Gouvernement, mais trop souvent reportée, elle permettrait de traiter de ces questions dans le cadre d’un texte consacré à la culture.
Pour l’heure, nous voterons le présent projet de loi.