M. Philippe Dominati, rapporteur. Je constate que tous les orateurs se sont félicités du souhait exprimé par les autorités d’Andorre de ratifier au plus tôt une convention fiscale avec la France. Cette avancée diplomatique est saluée sur toutes les travées de cet hémicycle. En fait, le problème qui se pose est franco-français et concerne notre droit fiscal. Il a surgi lors de l’examen du texte par la commission des finances au Sénat – il faut noter que le projet de loi a été adopté par l’Assemblée nationale – et n’implique en aucun cas notre voisin andorran.

Monsieur le secrétaire d’État, je ne vous ai pas entendu lors de votre intervention liminaire ou à l’instant exprimer la moindre intention du Gouvernement de réparer un dysfonctionnement de l’administration fiscale. La rédaction de cette convention pouvait se justifier à une époque, mais, la fiscalité andorrane ayant évolué, on aurait pu tenter de la corriger. Désormais, le dysfonctionnement risque d’être d’ordre diplomatique.

Pour donner satisfaction aux autorités d’Andorre, il appartient au gouvernement français de mener ce travail le plus vite possible. Cela suppose de reconnaître l’existence du léger problème franco-français qui se pose à l’article 25 de cette convention, qui a également été relevé par M. Frassa. Sans cette clause, la convention aurait pu être ratifiée immédiatement. Or on nous a opposé des délais sans même examiner le problème.

La question que je vous pose est donc simple, et elle s’adresse aussi à la présidente de la commission des finances : la discussion, par le Sénat, d’un projet de loi autorisant la ratification d’une convention fiscale sert-elle réellement à quelque chose ? Si on nous déclare que, dans ce domaine, la moindre évolution nécessite des années, il est de facto inutile que la Haute Assemblée examine de tels textes à l’avenir.

Mme Michèle André, présidente de la commission des finances. Non !

M. Philippe Dominati, rapporteur. Si le Sénat a un rôle, il doit le jouer. De son côté, l’exécutif doit réagir en engageant les travaux normatifs nécessaires. Nous pouvons comprendre que ceux-ci nécessitent du temps, mais, dans cette affaire, ce qui me frappe, c’est que le Gouvernement se contente d’invoquer le respect de la parole de l’État.

À l’issue de ce débat, je ne peux malheureusement que vous le confirmer : la commission des finances demande le rejet de ce texte.

M. Olivier Cadic. Excellent !

M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix l’article unique constituant l’ensemble du projet de loi.

J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe UMP.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 80 :

Nombre de votants 338
Nombre de suffrages exprimés 328
Pour l’adoption 141
Contre 187

Le Sénat n'a pas adopté.

Article unique (début)
Dossier législatif : projet de loi autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Principauté d'Andorre en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu
 

3

 
Dossier législatif : projet de loi autorisant la ratification de l'amendement au protocole de Kyoto du 11 décembre 1997
Discussion générale (suite)

Amendement au protocole de Kyoto du 11 décembre 1997

Adoption définitive en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission

Discussion générale (début)
Dossier législatif : projet de loi autorisant la ratification de l'amendement au protocole de Kyoto du 11 décembre 1997
Article unique (début)

M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, autorisant la ratification de l’amendement au protocole de Kyoto du 11 décembre 1997 (projet n° 138, texte de la commission n° 169, rapport no 168, avis n° 189).

Dans la discussion générale, la parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Thierry Mandon, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé de la réforme de l'État et de la simplification. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, le protocole de Kyoto est aujourd’hui le seul instrument international juridiquement contraignant de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Il met en œuvre la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques de 1992, qui fixe les grandes orientations de la lutte contre le dérèglement climatique. Adopté en 1997, entré en vigueur en 2005, le protocole de Kyoto a permis de réduire les émissions des pays développés durant une première période d’application de 2008 à 2012.

Vous le savez, le gouvernement français est totalement mobilisé pour mettre au point un accord prenant le relais de ce protocole et qui pourrait être adopté à Paris, en décembre 2015, lors de la vingt et unième conférence des Nations unies sur le climat, événement peut-être plus connu sous le nom de COP 21. Ce nouvel accord devra être applicable à tous les émetteurs et entrera en vigueur en 2020. Il est donc impératif que l’action internationale en faveur de la protection de notre climat se poursuive entre la fin de la première période du protocole de Kyoto, en 2012, et l’entrée en vigueur de l’accord de Paris – accord auquel nous espérons aboutir –, en 2020.

C’est la raison pour laquelle je me présente devant vous aujourd’hui. Le projet de loi qui est proposé à votre approbation autorise en effet la ratification de l’amendement de Doha au protocole de Kyoto. Cet amendement, adopté en décembre 2012, vise à ouvrir une deuxième période d’engagement de 2013 à 2020 afin de prolonger les efforts de réduction des émissions. Il fait partie de l’équilibre politique trouvé en 2011 lors de la conférence sur le climat de Durban ; c’est la promesse d’engagement dans une deuxième période du protocole de Kyoto qui a, pour beaucoup, ouvert la voie à l’élaboration d’un nouvel accord universel sur le climat.

Tel qu’il a été adopté, cet amendement est conforme aux positions de la France et des autres États membres de l’Union européenne, qui parlent, il faut le souligner, d’une seule voix lors des négociations internationales sur le climat. L’Union européenne s’est en effet dotée d’un paquet énergie-climat en 2008, dont l’un des objectifs est de réduire de 20 % les émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2020 par rapport aux niveaux de 1990. L’objectif européen fixé pour la deuxième période du protocole de Kyoto découle directement de celui que contient le paquet énergie-climat. C’est la raison pour laquelle l’Union européenne s’est engagée à mettre en œuvre l’amendement dès le 1er janvier 2013, sans attendre son entrée en vigueur. Tout porte à croire que l’objectif que s’est fixé l’Union européenne à l’horizon de 2020 pourra être atteint, voire dépassé, puisque ses émissions ont déjà été réduites de 18 %.

D’autres partenaires ont également proposé un objectif de réduction de leurs émissions pour la période 2013-2020 : l’Australie, la Biélorussie, le Kazakhstan, le Liechtenstein, Monaco, la Norvège, la Suisse et l’Ukraine. En revanche, le Canada, qui a décidé de se retirer du protocole de Kyoto en 2011, la Russie, le Japon et la Nouvelle-Zélande n’ont pas souhaité se réengager. Les États-Unis sont également restés en retrait, puisqu’ils n’ont jamais ratifié ce protocole.

Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, le GIEC, vient de nous rappeler l’urgence à agir si nous voulons limiter l’augmentation de la température mondiale en dessous de 2 degrés par rapport aux niveaux préindustriels. Cette deuxième période ne couvrant que 15 % des émissions de gaz à effet de serre, vous devinerez aisément qu’elle ne permet pas, à elle seule, de faire face au défi climatique. Toutefois, de nombreux pays se sont fixé des objectifs en dehors de ce cadre, notamment les États-Unis, la Nouvelle-Zélande et les pays émergents. Bien que cette deuxième période soit imparfaite d’un point de vue climatique, elle joue un rôle de transition essentiel.

Élaborer un nouvel accord avec 195 pays nécessite du temps. Il en a manqué en 2009 à Copenhague pour parvenir à l’adoption d’un successeur au protocole de Kyoto, celui-ci doit donc continuer à s’appliquer jusqu’à ce que l’accord de Paris entre en vigueur. L’abandon de cet instrument et le vide juridique qu’il aurait automatiquement entraîné auraient été perçus comme un recul de la communauté internationale.

Par ailleurs, cette deuxième période nous permet de continuer à accumuler de l’expérience sur les outils de mise en œuvre des politiques climatiques. Cela est vrai s’agissant des mécanismes de marché prévus par le protocole comme des règles de suivi des émissions de gaz à effet de serre, puisque l’amendement de Doha ajoute un septième gaz à ceux que couvre déjà le protocole de Kyoto, et non le moindre : le trifluorure d’azote, qui a un pouvoir de réchauffement 17 000 fois supérieur à celui du CO2.

Il convient également de noter que l’amendement introduit un mécanisme de révision des engagements de réduction des émissions de gaz à effet de serre de manière à les rendre plus ambitieux en cours de période. En raison de la faible participation, ce mécanisme pourrait toutefois ne pas être utilisé mais il est susceptible de nous inspirer pour élaborer ce que nous souhaitons être l’accord de 2015.

La ratification de l’amendement au niveau européen est un processus long, trente instruments de ratification devant être rassemblés avant que nous ne les déposions en même temps auprès du Secrétaire général des Nations unies. Tous les États membres de l’Union européenne doivent mener leur propre processus de ratification au niveau national. L’Islande a fait le choix de prendre un engagement conjoint avec ses partenaires de l’Union européenne.

Une décision du Conseil relative à la conclusion de l’amendement de Doha et à l’exécution conjointe des engagements qui en découlent est en outre en cours de négociation à Bruxelles. Certaines réticences ont été formulées par la Pologne, que nous nous efforçons actuellement de dépasser.

Dans la perspective de notre présidence de la conférence sur le climat de 2015, il est essentiel que l’amendement au protocole de Kyoto soit ratifié dans les meilleurs délais pour envoyer un signal positif sur la mise en œuvre des engagements. Tout comme la capitalisation du Fonds vert pour le climat est une véritable attente des pays vulnérables, la ratification de l’amendement est une demande forte à laquelle nous devons répondre. En autorisant cette ratification, vous contribuerez donc à favoriser la confiance entre les États, qui est une des clefs du succès de la COP 21.

Telles sont, monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, les principales observations qu’appelle l’amendement au protocole de Kyoto qui fait l’objet du projet de loi aujourd’hui proposé à votre approbation.

M. le président. La parole est à Mme la rapporteur.

Mme Leila Aïchi, rapporteur de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui l’amendement au protocole de Kyoto du 11 décembre 1997, adopté à Doha le 8 décembre 2012 après de longues et difficiles négociations.

Je vais tout d’abord aborder rapidement le protocole de Kyoto, dont l’amendement de Doha vise à prolonger les objectifs pour la période 2013-2020.

Le protocole de Kyoto fait suite à la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, la CCNUCC, adoptée à New York, en 1992, par 154 États et entrée en vigueur le 21 mars 1994. Adopté lors de la troisième conférence des parties, ou COP 3, au Japon, en novembre 1997, il renforce les engagements pris par les pays développés en vue de réduire le réchauffement planétaire d’origine humaine. Entré en vigueur le 16 février 2005, il ne porte que sur la période 2008-2012.

Toutefois, le protocole de Kyoto constitue le seul instrument international juridiquement contraignant permettant de limiter la hausse de la température mondiale en dessous de 2 degrés Celsius par rapport aux niveaux préindustriels. Il vise à réduire ou à limiter les émissions de six gaz à effet de serre provenant des secteurs de l’énergie, des procédés industriels, de l’utilisation des solvants, de l’agriculture et des déchets. Il contient un objectif global de réduction du total des émissions de gaz à effet de serre d’au moins 5 % par rapport à l’année 1990 et des engagements chiffrés pour les pays développés qui les ont acceptés.

Selon le principe des « responsabilités communes mais différenciées » de la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, seuls les pays développés en raison de leur « responsabilité » historique et les « pays en transition vers une économie de marché » – ceux de l’ancien bloc de l’Est – ont des engagements chiffrés. À l’époque, l’Union européenne des Quinze s’était ainsi engagée à réduire collectivement ses émissions de gaz à effet de serre de 8 % par rapport à l’année 1990, tandis que les États-Unis n’ont jamais ratifié ce protocole. Le Canada, qui l’avait ratifié en 2002, a annoncé sa volonté de s’en désengager en décembre 2011, avec effet l’année suivante. Les grands pays en voie de développement, comme la Chine et l’Inde, n’y ont pas pris part.

Comme le protocole de Kyoto, l’amendement de Doha est le résultat de longues négociations. En effet, dès 2007, le plan d’action de Bali a décidé d’un cadre de négociation en prévision de la fin de la période d’engagement de Kyoto. La COP 15, réunie à Copenhague, en 2009, s’est cependant soldée par un échec et n’a donc pas permis d’aboutir à un nouvel accord international.

Ce n’est qu’en 2011 que la COP 17, réunie à Durban, est parvenue à un accord prévoyant notamment la conclusion, au plus tard en 2015, d’un accord mondial sur les changements climatiques, sous réserve de la souscription par les pays développés d’une deuxième période d’engagement dans le cadre du protocole de Kyoto, à compter du 1er janvier 2013.

Sur le modèle du protocole de Kyoto, l’amendement de Doha prévoit un objectif global de réduction du total des émissions de gaz à effet de serre d’au moins 18 % par rapport à l’année 1990, ainsi que les nouveaux engagements de réduction chiffrés souscrits par les États parties qui les ont acceptés. Ceux-ci sont toutefois moins nombreux qu’au cours de la première période. Le Japon et la Russie, notamment, ont refusé de s’engager à nouveau. Au total, les pays engagés dans cette deuxième période ne sont responsables que de 15 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Cela confère à l’amendement de Doha une portée finalement assez modeste. C’est peu, mais c’est mieux que rien !

Cet amendement contient également un mécanisme de révision du niveau d’ambition, sans lequel la seconde période du protocole de Kyoto n’aurait vraisemblablement pas pu être adoptée à Doha. Il s’agit d’une procédure simplifiée qui permet une adoption et une mise en œuvre rapide des nouveaux objectifs, sans nouvelle ratification. Une première table ronde ministérielle a d’ailleurs eu lieu, à Bonn, le 5 juin 2014. Elle n’a toutefois pas permis de relever les engagements des pays développés, comme le demandent, de manière constante, les pays en développement.

Le clivage Nord-Sud a d’ailleurs failli se révéler fatal à la COP 20 de Lima, qui vient de s’achever. De nombreuses heures de négociation supplémentaires ont été nécessaires pour rallier un certain nombre de pays en développement qui s’opposaient au premier texte présenté. Le principe de « responsabilités communes mais différenciées » et « les capacités respectives », ainsi que la nécessité pour les pays développés d’augmenter leurs soutiens financiers à l’égard des pays en développement ont été réaffirmés dans la décision finale.

L’amendement de Doha règle également la délicate question des surplus de quotas d’émission par rapport aux émissions réelles, ou « air chaud », accordés aux pays en transition pendant la première période, afin de relancer leur économie. Il a été décidé que les quotas accordés en seconde période ne pourraient pas dépasser la moyenne des émissions nationales sur la période 2008-2010.

Voilà donc sommairement exposé l’essentiel du contenu de l’amendement de Doha. De fait, il s’agit, vous l’aurez compris, d’un amendement de transition, à haute portée symbolique. Il permet en effet la poursuite du protocole de Kyoto sur la période 2013-2020, comblant ainsi un vide juridique entre la fin de sa période d’engagement, en 2012, et l’entrée en vigueur d’un nouvel accord mondial sur le climat, prévue en 2020. Celui-ci devrait être conclu, sous l’égide de la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, lors de la COP 21 de Paris, en décembre 2015. C’est une étape qui s’inscrit dans la politique climatique de l’Union européenne et de la France. L’engagement de l’Union européenne et de ses États membres d’une réduction des gaz à effet de serre de 20 % par rapport à 1990 correspond aux objectifs définis dans le paquet énergie-climat pour 2020. L’Union, comme la France, a dépassé l’objectif qui lui était fixé pour la première période du protocole de Kyoto et devrait faire de même pour la deuxième.

Cet amendement a en sus une portée symbolique, parce qu’il est parallèle au processus d’élaboration de l’accord mondial sur le climat. Il sera nécessairement à l’ordre du jour de la COP 21 de décembre 2015, la conférence des parties de la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques servant également de cadre à la réunion des parties au protocole de Kyoto.

Ce processus d’élaboration d’un accord mondial a été relancé par le sommet sur le climat organisé par le Secrétaire général des Nations unies, à New York, le 23 septembre 2014. Il est conforté par la première réunion de capitalisation du Fonds vert pour le climat, qui vient de se dérouler à Berlin, le 20 novembre 2014. Celle-ci était très attendue par les pays en voie de développement. Vingt et un pays se sont engagés à verser 9,3 milliards de dollars sur la période 2015-2018. La France contribue, comme vous le savez, à hauteur de 1 milliard de dollars. Espérons que cela permette au Fonds vert d’entrer dans sa phase opérationnelle courant 2015 et d’engager sa programmation d’ici à la COP 21. Cela constituerait un signal fort en direction des pays en développement.

Pour financer le Fonds vert, et plus généralement la lutte contre le réchauffement climatique, je souhaite, à titre personnel, vous proposer une piste de réflexion. Il pourrait être pertinent de s’intéresser davantage à la dynamique spéculative qui entoure les cours de la bourse et des matières premières, notamment à leur grande volatilité. En effet, les cours de la bourse sont aujourd’hui, dans une très large mesure, déconnectés de l’économie réelle. Plus de la moitié des ordres passés n’étant jamais exécutés, il pourrait être possible de taxer les ordres de bourse non réalisés. De fait, une telle taxe – même minime – sur le montant de ces transactions virtuelles permettrait de rationaliser les comportements des acteurs économiques et financiers concernés et de donner de la réalité aux cours de la bourse, et donc de mieux les contrôler, tout en déclenchant un effet de levier pour le Fonds vert.

Dans la perspective de la conclusion d’un accord universel sur le climat, la France s’est engagée à appliquer la deuxième période d’engagement dès le 1er janvier 2013 et à ratifier l’amendement au protocole de Kyoto le plus rapidement possible. Elle a d’ores et déjà pris les mesures nécessaires à la mise en œuvre de cette deuxième période de l’engagement souscrit par l’Union européenne et ses États membres.

Cette ratification soulignera ainsi la volonté de la France de parvenir à un accord mondial sur le climat dans le prolongement de l’accord européen d’octobre 2014 visant à réduire de 40 % les émissions de gaz à effet de serre à l’horizon de 2030 et de l’accord sino-américain du 12 novembre dernier. La France veut y voir un encouragement pour le sommet sur le climat de Paris en 2015, alors même que le dernier rapport du GIEC, publié à Copenhague au début de ce mois de novembre, recommande d’agir vite. La décision finale de la COP de Lima, qui vient de s’achever après prolongation, laisse également augurer un succès, puisqu’elle a jeté les bases de la négociation de l’accord final et a encadré, dans cette perspective, les contributions nationales attendues au premier trimestre de 2015.

Par ailleurs, la proposition de décision du Conseil « COM (2013) 768 final » relative à la conclusion de l’amendement de Doha au protocole de Kyoto, à la CCNUCC et à l’exécution conjointe des engagements prévoit que l’Union européenne et ses États membres doivent déposer les instruments de ratification au plus tard le 16 février 2015. Il est d’autant plus important que la France autorise cette ratification qu’il semble primordial que l’Union européenne et ses États membres arrivent unis au rendez-vous du Bourget dans un an, tout comme il est souhaitable que l’amendement de Doha entre en vigueur le plus rapidement possible. À la date du 14 novembre 2014, dix-neuf États seulement l’avaient ratifié.

Telles sont les raisons pour lesquelles la commission vous demande d’adopter le projet de loi autorisant la ratification de l’amendement au protocole de Kyoto du 11 décembre 1997. (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste, de l’UDI-UC et de l’UMP.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Jérôme Bignon, rapporteur pour avis de la commission du développement durable, des infrastructures, de l'équipement et de l'aménagement du territoire. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, notre commission s’est saisie pour avis avec beaucoup d’à-propos d’un texte qui nous concerne tous et qui s’inscrit dans la logique transversale du développement durable.

Revenant de Lima, où le président de la commission des affaires économiques, le président de la commission du développement durable et quatre autres sénateurs ont participé, selon des modalités diverses, aux négociations relatives au climat, je tiens à dire que jamais texte n’a été autant d’actualité que ce projet de loi autorisant la ratification de l’amendement au protocole de Kyoto du 11 décembre 1997. Si j’ose dire, il est véritablement « branché » sur cette négociation.

En ouvrant la conférence de Lima, le Secrétaire général des Nations unies Ban Ki-moon a abordé cinq points, dont le dernier visait à demander, avec insistance, aux nations présentes ou représentées de ratifier, en signe de symbole, l’accord signé à Doha, ne serait-ce que pour prolonger l’application du protocole de Kyoto jusqu’en 2020. L’Union européenne a spontanément accepté, mais elle était bien seule face au reste du monde. Or dans la dernière ligne de droite avant la conférence de Paris, il est urgent de ratifier « l’amendement de Doha ».

La prise de conscience du réchauffement climatique par la communauté scientifique doit remonter à une trentaine d’années. Il est intéressant de se rappeler que le cheminement a été long, y compris parmi les scientifiques : des voix divergentes ont longtemps résonné. Aujourd’hui, on peut penser que, après le cinquième rapport du GIEC, un consensus s’est dégagé pour reconnaître la réalité du phénomène – en tout cas, elle est peu discutée ou plus discutée du tout – et admettre son origine anthropique. Nous sommes donc passés à une deuxième phase, celle de la prise de conscience collective de l’urgence à agir, grâce à la société civile, qui s’est emparée de cette question ; ce n’est pas notre collègue Ronan Dantec qui me contredira.

M. Ronan Dantec. Absolument !

M. Jérôme Bignon, rapporteur pour avis. Le fait que les populations du monde entier aient conscience que le climat se dérègle et qu’il importe d’agir pour éviter de mettre en péril notre planète a fait progresser l’idée qu’il fallait rechercher une solution technique, politique et financière.

Je ne reviendrai pas en détail sur le protocole de Kyoto – Leila Aïchi l’a décrit –, qui date de 1997. Je me contenterai de souligner que c’est le seul instrument international juridiquement contraignant. Il a marqué, après la conférence de Rio de Janeiro en 1992, le point de départ d’un processus itératif de conférences internationales. Depuis lors, le monde entier s’est réuni à vingt reprises pour parler du climat. On le voit bien, pour avancer, le chemin est long !

Aujourd'hui, il s’agit de se mettre d’accord sur l’application de nouvelles contraintes. À Lima, les représentants de quelque 194 pays étaient réunis autour de la table pour en discuter. Or il faut avoir à l’esprit le fait que ces pays sont très éloignés les uns des autres.

Avec cette conférence, on mesure l’extraordinaire processus de rassemblement : 20 000 personnes sont venues à Lima et 40 000 sont attendues l’année prochaine à Paris. Ce déplacement de masse est considérable, même si les moyens modernes facilitent l’organisation d’un tel événement.

Au-delà du nombre de pays concernés, il convient de noter les différences extraordinaires entre les pays : de petits États insulaires, aujourd'hui touchés par le réchauffement climatique – les îles Maldives sont souvent citées, avec quelques communautés du Pacifique –, se retrouvent à côté de pays colossalement riches et développés, comme les États-Unis, qui ont une vision différente de cette question. Il faut donc parvenir à combiner les points de vue de tous ces États à la taille, au PIB, à la population et au positionnement géographique tellement différents. Voilà pourquoi j’ai évoqué en commission la construction de la tour de Babel, qui a échoué parce que les hommes étaient très nombreux et parlaient des langues différentes. Le processus collectif auquel nous assistons me fait penser à cet épisode de la Bible.

Mme Catherine Procaccia. Ce n’est pas très optimiste !

M. Jérôme Bignon, rapporteur pour avis. Veillons à ne pas aboutir au même résultat.

Le bilan de la première période d’engagement du protocole de Kyoto est relativement mitigé, comme l’a relevé Mme la rapporteur de la commission des affaires étrangères : les émissions mondiales de gaz à effet de serre ont augmenté de 30 % entre 1990 et 2010. Le protocole de Kyoto ne reflète plus la réalité des émissions de gaz à effet de serre. Il a été conçu pour retranscrire les engagements des pays développés, qui représentaient, en 1997, plus de la moitié des émissions mondiales. La défection des grands États comme les États-Unis ou le Canada a accentué le décalage entre les émissions couvertes par le protocole et les émissions effectivement constatées. En outre, un certain nombre de pays en voie développement en 1997, qui produisaient donc peu de gaz à effet de serre à l’époque, sont aujourd'hui devenus des pays émergents.

M. Ronan Dantec. C’est vrai !