Mme la présidente. La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte de la commission.
proposition de loi tendant à réformer le système de sécurité sociale des étudiants
Article 1er
L’article L. 381-4 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :
« Art L. 381-4. – Les élèves et les étudiants des établissements d’enseignement supérieur, des écoles techniques supérieures, des grandes écoles et classes du second degré préparatoires à ces écoles sont affiliés au régime de sécurité sociale des assurés sociaux dont ils étaient les ayants droit autonomes au titre de l’article L. 161-14-1. L’affiliation prend fin à l’issue de la période d’études ou lorsqu’est atteint l’âge limite fixé par voie réglementaire.
« Les élèves et les étudiants qui, à leur date d’entrée dans l’enseignement supérieur, ne relèvent d’aucun régime de sécurité sociale, sont affiliés au régime général dans les conditions fixées à l’article L. 380-1. »
Mme la présidente. La parole est à M. Cyril Pellevat, sur l'article.
M. Cyril Pellevat. Madame la présidente, madame la secrétaire d'État, madame le rapporteur, mes chers collègues, je souhaite intervenir à ce stade de nos débats pour exposer les différentes raisons qui m’amènent à soutenir ce texte.
Tout d’abord, comme l’a fort justement souligné notre rapporteur, Catherine Procaccia, le régime actuel de sécurité sociale des étudiants est à bout de souffle depuis que la première d’entre elles, la LMDE, confrontée à un déficit de 35 millions d’euros, a été placée sous administration provisoire, en juillet dernier, par l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution.
Le plan d’adossement mis en place avec la MGEN était une bouée de sauvetage pour la LMDE, mais le renoncement à cet engagement par le conseil d’administration de la MGEN, le 24 octobre dernier, précipite un peu plus la mutuelle étudiante vers une cessation de paiement possible dès l’été 2015 pour près de 920 000 étudiants.
Cette situation démontre pleinement que le régime actuel de sécurité sociale de plusieurs centaines de milliers d’étudiants ne fonctionne plus et qu’il est urgent de trouver une solution rapide, pérenne et efficiente pour nos étudiants, comme le permet cet article 1er.
En outre, la mauvaise qualité du service rendu par ces mutuelles a été dénoncée à plusieurs reprises. Ainsi la FAGE et l’UFC-Que Choisir, dont l’enquête a été rendue publique le 24 septembre dernier, pointent la persistance de graves dysfonctionnements dans la gestion des mutuelles étudiantes : des délais parfois très longs dans la délivrance de la carte Vitale ; des délais de remboursement médicaux qui se prolongent ou qui n’aboutissent pas ; des permanences téléphoniques hasardeuses, qui ne sont pas à la hauteur des attentes des étudiants, lesquels cotisent à hauteur de 213 euros par an pour être finalement assez mal couverts ; des conseillers mutualistes formés d’abord et avant tout à des techniques commerciales, parfois agressives, pour vendre le maximum de produits tels que des complémentaires santé, des services bancaires ou des repas en fast-food. Tout cela ne peut que réduire l’accès aux soins et compromettre ainsi la santé de milliers d’étudiants.
Cet article 1er, qui constitue le cœur de la proposition de loi, répond ainsi à la volonté de nombreux étudiants de ne plus être affiliés à un régime particulier.
Le dispositif proposé est donc un choc de simplification administrative pour les étudiants et leurs familles, le gage non seulement d’un service de meilleure qualité, contribuant à une meilleure santé de nos étudiants, mais aussi de la sanctuarisation de nos campus face aux intérêts marchands des mutuelles. Enfin, et ce n’est pas anecdotique au regard de la situation économique actuelle, ce rattachement suscitera des économies, potentiellement de l’ordre de 70 millions d’euros.
Pour toutes ces raisons, mes chers collègues, vous l’aurez compris, je voterai cet article 1er et l’ensemble de la proposition de loi. (Mlle Sophie Joissains applaudit.)
Mme Catherine Deroche. Bravo !
Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Cadic, sur l'article.
M. Olivier Cadic. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, madame la rapporteur, mes chers collègues, la proposition de loi soumise à notre examen est une proposition de loi comme je les aime : elle vise non seulement à simplifier la vie de nos concitoyens étudiants ou parents d’étudiants, mais aussi à réaliser des économies et à améliorer la qualité du service rendu.
Mes chers collègues, la situation de 1,7 million de jeunes, ainsi que de leurs familles, est ici entre nos mains. En effet, la mutation inter-régimes – situation sociale temporaire le temps des études supérieures – constitue pour beaucoup d’entre eux un véritable calvaire administratif, lourd de formalisme et de dysfonctionnements. Et encore, je n’aborde pas la situation des jeunes qui occupent un emploi parallèlement à leurs études supérieures. Pour eux, c’est la double peine : en sus de subir des services mal rendus, ils sont parfois soumis à la double cotisation.
Je félicite donc notre collègue Catherine Procaccia de son initiative, qui nous permet, enfin, de mettre un terme à cette exception française qu’est le régime de sécurité sociale des étudiants.
Du reste, comme l’a justement souligné ma collègue Élisabeth Doineau, cette exception ne constitue pas un modèle, aucun de nos voisins européens ne l’ayant copiée. Certes, il ne sera pas facile pour ceux qui tirent avantage de cette situation depuis plus d’un demi-siècle de s’en détacher. D’ailleurs, depuis l’annonce de cette réforme possible, les coalitions conservatrices ont commencé à manœuvrer.
Nous ne devons pas nous laisser impressionner, car mettre fin à la délégation de gestion ne constitue en rien une attaque contre un acquis social : soit les jeunes concernés resteront attachés au régime des assurés sociaux dont ils étaient les ayants droit, soit ils intégreront le régime général. Par ailleurs, l’autonomie des étudiants n’est pas remise en cause, puisqu’ils seront affiliés à titre personnel.
Aussi ai-je été particulièrement fier de cosigner cette proposition de loi, qui ouvre la voie à une simplification du régime de sécurité sociale. Je me permets d’espérer qu’il s’agit de la première étape vers, un jour, le régime unique universel, auquel chacun a droit.
Pour l’ensemble de ces raisons, je voterai cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.)
Mme la présidente. La parole est à M. Stéphane Ravier, sur l’article.
M. Stéphane Ravier. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, madame la rapporteur, mes chers collègues, les organismes estudiantins de sécurité sociale ont décidément du plomb dans l’aile.
La MNEF a eu beau changer de nom après le scandale politico-financier qui est encore dans toutes les mémoires, son successeur, la LMDE, est à son tour dans la tourmente. Toutefois, ces difficultés en révèlent d’autres, encore plus profondes, justifiant l’adoption de cette proposition de loi.
En effet, l’autonomie de la « sécu étudiante » apparaît aujourd’hui comme un dogme, éloigné des besoins des étudiants de bénéficier, comme tout un chacun, d’une qualité de service. Outre des influences politiques qui n’ont rien à y faire, même si elles ont longtemps eu cours, ces organismes souffrent aujourd’hui d’une taille trop réduite pour offrir des services satisfaisants au meilleur prix. Ils reviennent donc plus cher et sont moins bien équipés que le régime général.
J’appelle le Gouvernement, dont certains membres ou amis ont un passé fourni en la matière, à dépasser sa nostalgie de jeunesse et à mettre fin à cette « sécu étudiante » qui ne résiste plus aujourd’hui – si j’ose dire – à l’examen.
Mme Nicole Bricq. Vous êtes dans la nuance !
M. Stéphane Ravier. Nous voterons donc cette proposition de loi.
Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteur.
Mme Catherine Procaccia, rapporteur. Madame la secrétaire d'État, vous avez déjà pris un certain nombre d’engagements, mais je voudrais vous rappeler qu’il y a urgence. Et je le dis aussi à Dominique Gillot, il ne faut pas attendre l’été prochain, en raison des problèmes informatiques que cela pourrait causer. Le Gouvernement doit mettre tous les acteurs autour de la table pour prendre les décisions qui s’imposent dans les trois mois. Autrement, la solution transitoire prévue par ma proposition de loi, avant son entrée en vigueur d’ici à trois ans, ne pourra être mise en œuvre.
Autre question de fond : au cours des auditions, madame la secrétaire d’État, le directeur général de la CNAM nous a clairement dit qu’il ne pourrait procéder à aucun adossement, notamment, sans modification législative ou réglementaire.
Quelle est la nature exacte de cette modification. Est-elle législative ou réglementaire ? Et quand interviendra-t-elle ?
M. René-Paul Savary. Bonne question !
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Geneviève Fioraso, secrétaire d'État. Madame Procaccia, nous avons nous aussi discuté avec la CNAM et son directeur général. Or la réponse qui nous a été donnée n’est pas la même : il s’agit d’une relation conventionnelle, et cela se fera sans modification réglementaire ou législative. À l’instar de la procédure suivie pour la mutuelle de la police, cela se fera par convention, en toute transparence.
Oui, je me suis engagée, et je tiendrai ces engagements. J’ai conscience que l’agenda est serré, mais nous voulons absolument poursuivre la démarche engagée, à savoir préserver la spécificité d’une complémentaire étudiante et faire en sorte que le régime général soit géré de façon plus fluide. Tel est le sens des discussions et des débats que nous avons en ce moment.
Enfin, je ne peux résister à la tentation de dire à M. Ravier – auquel je ne répondrai pas sur le fond, car cela n’en vaut pas la peine – que le parti auquel il appartient compte également d’anciens administrateurs de la MNEF, et qu’il peut donc s’appuyer sur ces sources, certes quelque peu anciennes.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 1er.
(L'article 1er est adopté.)
Article 2
(Non modifié)
L’article L. 381-6 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, les mots : « aux caisses primaires d’assurance maladie » sont supprimés ;
2° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Ils versent une cotisation forfaitaire dont le montant est fixé par arrêté ministériel, après consultation des associations d’étudiants. L’exonération de cette cotisation est de droit pour les boursiers. Elle peut être décidée à titre exceptionnel dans des conditions fixées par voie réglementaire. »
Mme la présidente. L'amendement n° 1, présenté par Mme Procaccia, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 4, dernière phrase
Remplacer cette phrase par deux phrases ainsi rédigées :
Les étudiants qui, pour l'année universitaire, remplissent les conditions fixées à l'article L. 313-1, sont également exonérés de la cotisation forfaitaire. L'exonération peut être décidée à titre exceptionnel dans des conditions fixées par voie réglementaire.
La parole est à Mme la rapporteur.
Mme Catherine Procaccia, rapporteur. Rendons à César ce qui est à César : Mme Archimbaud est le véritable auteur de cet amendement. Toutefois, comme il n’a pu être déposé à temps, la commission l’a repris, car ses dispositions correspondent tout à fait aux attentes décrites dans notre rapport.
En l’occurrence, il s'agit de la situation des étudiants salariés qui, dès lors qu’ils ont travaillé un nombre suffisant d’heures pour bénéficier de la sécurité sociale générale, sont soumis à une double cotisation, à la fois à la sécurité sociale étudiante et au régime général.
Cet amendement vise à mettre fin à cette situation. En effet, tout au long des auditions que nous avions menées il y a deux ans, il s’est révélé que jamais un étudiant n’a réussi à se faire rembourser cette cotisation indûment payée.
Notre proposition, qui est de bonne foi, me semble donc répondre à de véritables attentes.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Geneviève Fioraso, secrétaire d'État. Le Gouvernement n’étant pas favorable à cette proposition de loi dans son ensemble, il ne peut l’être à cet amendement, même si ses dispositions sont intéressantes.
Mme la présidente. La parole est à Mme Dominique Gillot, pour explication de vote.
Mme Dominique Gillot. Madame la secrétaire d'État, nous avons bien compris que le Gouvernement était défavorable à cette proposition de loi.
Nonobstant, cet amendement à l’article 2 tend à aborder un sujet récurrent, celui des étudiants stagiaires, apprentis ou alternants qui sont amenés à cotiser différemment, à sortir du régime, à y rentrer… À un moment donné, il faudra tout de même que ce sujet soit traité de manière uniforme et que le même régime s’applique à tous les jeunes qui poursuivent des études après leur baccalauréat. Quel que soit leur statut, ils méritent tous la même attention de la part de la nation.
Mme Catherine Deroche. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à Mme Aline Archimbaud, pour explication de vote.
Mme Aline Archimbaud. Sans préjuger de la position de mon groupe sur l’ensemble de ce texte, je dois dire qu’il s’agit d’un problème particulièrement grave : beaucoup d’étudiants passent par différents statuts, notamment celui de salarié, en raison de nécessités économiques.
Selon moi, cette proposition de loi doit être complètement retravaillée en gardant en tête cette question, qui est importante.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 2, modifié.
(L'article 2 est adopté.)
Article 3
(Non modifié)
Les articles L. 381-8 à L. 381-11 du code de la sécurité sociale sont abrogés. – (Adopté.)
Article 4
(Non modifié)
I. – Au 4° du I de l’article L. 111-1 du code de la mutualité, les références : « L. 381-8, L. 381-9, » sont supprimées.
II. – Le second alinéa de l’article L. 712-6 du code de la sécurité sociale est supprimé. – (Adopté.)
Article 4 bis (nouveau)
Pour les salariés des mutuelles mentionnées à l’article L. 381-9 du code de la sécurité sociale, la présente loi constitue une modification dans la situation juridique de l’employeur au sens de l’article L. 1224-1 du code du travail. – (Adopté.)
Article 5
La présente loi entre en vigueur à compter du 1er septembre de la troisième année suivant sa promulgation. – (Adopté.)
Article 6
Les éventuelles conséquences financières résultant pour les organismes de sécurité sociale de la présente proposition de loi sont compensées à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. – (Adopté.)
Vote sur l'ensemble
Mme la présidente. Avant de mettre aux voix l'ensemble de la proposition de loi, je donne la parole à Mme la rapporteur.
Mme Catherine Procaccia, rapporteur. Madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, je crois que cette proposition de loi a le mérite d’exister et qu’elle pose une question importante s’agissant de la sécurité sociale étudiante, et sous un angle inédit.
Le rapport que j’ai rédigé il y a deux ans avec M. Kerdraon contenait nombre de pistes d’améliorations, dont aucune, je le répète, n’a été mise en œuvre. Le système que mes quatre-vingts collègues cosignataires de cette proposition de loi et moi-même vous proposons est effectivement simple, tellement simple que sans doute jamais l’administration n’y avait pensé. (Sourires.)
Cela fait soixante-dix ans que les textes sont régulièrement modifiés. Pour quel résultat ? Nous constatons un vrai problème de fonctionnement. Cette proposition de loi doit permettre à tous les intervenants de s’interroger sur cette réalité : les étudiants sont-ils si différents des autres jeunes du même âge ? Pourquoi devraient-ils être dotés d’un régime propre ? Pourquoi devrait-il y avoir des actions spécifiques de prévention en leur direction, et non au bénéfice de toute une génération ?
Je vous renvoie à l’exigence de simplicité, c’est-à-dire, en l’occurrence, au fait de ne pas changer sans cesse de régime : quelque 80 % des parents des enfants concernés sont rattachés au régime général, 80 % des étudiants resteront dans ce même régime et 80 % d’entre eux, quand ils travailleront, dépendront également du régime général ! Avec la mesure que je propose, vous économiserez trois ou quatre transferts d’un régime à l’autre, trois ou quatre cartes vitales à rééditer, et vous éviterez de laisser les gens sans droits !
Ce système est simple, et j’espère que les députés auront la sagesse de faire prospérer ce texte à l’Assemblée nationale. En tout cas, je souhaite que, aujourd'hui, au Sénat, on jette les bases d’un système plus simple, et même d’un système transitoire, qui puisse fonctionner. En effet, jusqu’à présent, nous ne sommes parvenus qu’à des discussions entre les divers acteurs concernés, sans jamais rien de concret. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)
Mme Catherine Deroche. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Geneviève Fioraso, secrétaire d'État. J’ai déjà exposé, dans mon propos liminaire, la démarche du Gouvernement, et j’ai eu l’occasion de dire tout le bien que je pensais du rapport coproduit par Ronan Kerdraon et vous-même, madame Procaccia, ainsi que tout l’intérêt qu’il a suscité auprès du Gouvernement.
J’ajoute que, outre son intérêt, ce rapport a suscité l’engagement du Gouvernement de répondre aux questions posées par la santé des étudiants. J’ai d'ailleurs eu l’occasion d’en parler sans fard et sans tabou lors de la discussion de la loi sur l'enseignement supérieur et la recherche. Sans renier aucunement les propos que j’ai tenus alors, je ne puis laisser dire que le Gouvernement n’a rien fait, puisque nous avons engagé une démarche avec la MGEN ; malheureusement, elle n’a pu aboutir dans la forme que nous avions initialement souhaitée ensemble.
Cette démarche se poursuivra en suivant une voie différente, avec l’affiliation à un régime de sécurité sociale générale, qui, encore une fois, préservera les droits des étudiants, et une complémentaire santé. Celle-ci tiendra tout de même compte du passé et surtout de la spécificité du régime des étudiants, dont la gestion continuera ainsi d’impliquer le personnel étudiant.
En effet, je suis convaincue, pour l’avoir constaté dans différents secteurs – non seulement dans celui de la santé, mais aussi dans des espaces de vie culturelle ou d’animation –, que la gestion par les étudiants et pour les étudiants d’un système de santé, qu’il s'agisse de prévention ou de soins, est d’abord un élément de leur formation et de leur responsabilisation. C'est également un élément de persuasion pour les actions de prévention, car personne, mieux qu’un jeune, ne convaincra un autre jeune de lui parler de ses addictions et d’envisager de se faire suivre, ou de lui parler de ses problèmes d’isolement, par exemple.
À cet égard, j’ai encore vécu, cette semaine, un cas de suicide d’étudiant lié à ces problèmes, et vous savez que ces désordres, ces sensations d’isolement, qui donnent parfois lieu à des gestes dramatiques, sont de plus en plus fréquents dans cette population.
Voilà pourquoi je suis convaincue qu’une spécificité doit être maintenue avec une complémentaire santé, à laquelle nous allons nous atteler. Nous avons déjà engagé une démarche en ce sens avec la MGEN. Il nous reste quelques semaines pour aboutir, après quoi je serai prête à revenir faire le point dans cet hémicycle.
Mme la présidente. La parole est à M. Jérôme Durain, pour explication de vote.
M. Jérôme Durain. Au terme des interventions des uns et des autres, il est clair que nous sommes globalement d’accord sur le constat : complexité du circuit de gestion, illisibilité du système pour ses utilisateurs, surcoûts, concurrences inutiles. Et, pour l’essentiel, nous tombons également d’accord sur les objectifs, que Mme la secrétaire d'État a d'ailleurs rappelés : assurer la bonne gestion du régime, améliorer la qualité du service rendu aux étudiants et assurer une simplification de leurs démarches.
Finalement, c'est sur le scénario retenu par cette proposition de loi que nous divergeons. Mme Doineau disait tout à l'heure qu’il aurait fallu une proposition de loi médiane, et c'est effectivement notre point de départ. D’après elle, le réseau emeVia pourrait reprendre la LMDE. Or cette proposition de loi l’empêcherait… De fait, soit l’on garde un régime de sécurité sociale étudiant, soit l’on en sort, mais l’on ne saurait faire l’un et l’autre.
Dès lors, de l’adoption probable de cette proposition de loi, qui fait suite au rapport Procaccia-Kerdraon, largement évoqué ce soir, nous ne tirons pas les mêmes conséquences. Oui, il faut simplifier, mieux gérer et améliorer le service ! Toutefois, nous avons une vraie divergence – j’allais dire, une divergence politique – sur l’utilité d’un régime étudiant de sécurité sociale.
Ce qui nous importe, ce n’est pas l’avenir de telle ou telle mutuelle, l’avenir de la LMDE ou celui du réseau emeVia : ce qui nous importe, c'est la santé des étudiants. Contrairement à vous, madame Procaccia, nous croyons que les étudiants constituent une population spécifique. D'ailleurs, Roland Kerdraon affirmait lui-même que l’on ne peut nier que la sécurité sociale étudiante a fait ses preuves et qu’elle constitue le meilleur outil pour rendre les étudiants pleinement acteurs de leur santé.
C'est tout l’intérêt de la prévention par les pairs dont nous avons parlé à plusieurs reprises. Nous ne croyons pas à l’innocuité sociale de la disparition des mutuelles : quelque 1 309 équivalents temps plein sont concernés, et 650 d’entre eux se trouveraient sans solution de reprise si nous adoptions cette proposition de loi.
Nous ne croyons pas non plus à la neutralité en termes de confidentialité et d’intimité dans l’hypothèse d’un retour des étudiants dans le régime général. Nous pensons en outre que ce scénario radical de suppression du régime obligatoire étudiant est hasardeux en ce qui concerne la réalisation des économies annoncées.
Pour toutes ces raisons, nous voulons préserver la spécificité de ce régime étudiant, évidemment en l’améliorant, et nous sommes confiants quant au résultat de négociations entre les acteurs, sur la base d’une logique d’adossement – logique que nous avons défendue.
Pour avancer dans cette direction, nous nous en remettons ainsi aux engagements que, ce soir, Mme la secrétaire d'État a pris devant nous.
Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Watrin, pour explication de vote.
M. Dominique Watrin. Chacun, ici, a pu le constater : nul ne nie la réalité des difficultés actuellement rencontrées par les étudiants. Néanmoins, dire que le régime étudiant de sécurité sociale est un régime archaïque, comme j’ai pu l’entendre, cela me paraît excessif, voire dangereux. De grâce, ne jetons pas le bébé avec l’eau de bain !
Je retiendrai de ce débat que d’autres propositions, d’autres solutions sont possibles. Certaines ont été énoncées – elles peuvent d'ailleurs éventuellement se combiner –, qui permettent de maintenir un régime spécifique de sécurité sociale pour les étudiants. Ces derniers pourraient ainsi être représentés, être acteurs de leur santé et mener des actions correspondant bien à leur spécificité. Il me semble que ces pistes-là ont été tracées.
Autre élément, très important, on a entendu que l’adossement à l'assurance maladie présenterait des difficultés juridiques. Or Mme la secrétaire d'État a très clairement indiqué qu’il ne se rencontrerait là aucun problème insurmontable. Cette précision mérite d'être prise en compte.
Pour notre part, nous voterons bien sûr contre cette proposition de loi qui supprime le régime social étudiant.
Toutefois, d'une certaine manière, la balle est dans le camp du Gouvernement. On a constaté qu’il existait une certaine urgence à traiter les problèmes posés – sans précipitation, certes. Mme la secrétaire d'État s'est engagée sur des délais, mais sans préciser lesquels. J’espère donc qu’elle coconstruira, avec tous les acteurs concernés, les meilleures solutions possibles et que la représentation nationale saura très vite quelles mesures elle compte prendre.
Mme la présidente. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi dans le texte de la commission, modifié.
(La proposition de loi est adoptée.) – (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)
Mme la présidente. L'ordre du jour de la présente séance est épuisé.