M. André Reichardt, rapporteur. Absolument !
M. Jean-Jacques Hyest. Légiférer par petits bouts, c’est confirmer une absence de vision sur ces problématiques.
Il en est ainsi, d’ailleurs, sur un certain nombre de sujets qui ont été traités au coup par coup : on peut ici prendre l’exemple de l’article 7 sur la réalisation des opérations d’aménagement et de construction, sujet déjà abordé dans la loi du 1er juillet 2013 pour accélérer les projets de construction, dans l’ordonnance du 3 octobre 2013 relative au développement de la construction de logement ou encore dans la loi ALUR, sur laquelle nous revenons aujourd’hui.
Dans ces conditions, caractérisées par des modifications législatives répétées et une instabilité permanente, comment voulez-vous que, dans notre pays, on ait envie de construire, ce qui est pourtant une nécessité ? Monsieur le secrétaire d’État, il ne faut pas s’étonner que le nombre de constructions diminue en permanence.
Un texte donc sans colonne vertébrale, trop peu ambitieux, mais aussi des habilitations trop imprécises dans de nombreux cas : c’est ce qui a amené les commissions à mieux les encadrer
Tel est le cas avec l’article 1er – n’est-ce pas, madame Procaccia ? –, avec l’article 2 ter visant à fixer le régime juridique du portage salarial et l’article 2 quater visant à sécuriser les conditions d’application de la réglementation du travail à temps partiel, sur lesquels est intervenue la commission des affaires sociales. La commission des lois a fait de même avec l’article 12.
Parfois, et les commissions s’y sont employées, il est préférable de modifier directement la législation sans recourir aux ordonnances. C’est ce qui a été fait sur les articles 7, 7 ter, 15, 16 et 28. Je n’y reviens pas.
La commission a également supprimé des habilitations, manière, pour le Parlement, monsieur le secrétaire d’État, de dire au Gouvernement, ce qu’il se plaît à faire de temps en temps, qu’il est, lui, Parlement, tout à fait en mesure de légiférer. C’est le cas à l’article 5, qui avait pour objet de fusionner des commissions territorialement compétentes en matière d’aménagement du territoire et de services au public. Cette habilitation avait déjà été supprimée par l’Assemblée nationale ; notre commission des lois a confirmé cette suppression.
Enfin, nous avons supprimé l’habilitation prévue à l’article 4, à notre sens la plus injustifiée, cet article reprenant à l’identique une habilitation supprimée conforme par les deux assemblées dans le projet de loi relatif à la modernisation et à la simplification du droit et des procédures dans les domaines de la justice et des affaires intérieures. Il faut ici saluer la persévérance du Parlement, qui sait avoir de la mémoire en certaines occasions !
En conclusion, je souhaiterais aborder deux sujets importants pour une large majorité de sénateurs du groupe UMP.
Il s’agit tout d’abord de l’information préalable des salariés en cas de projet de transmission de l’entreprise. Nous nous étions déjà opposés à ce dispositif lors de la discussion du projet de loi relatif à l’économie sociale et solidaire. Ce n’est pas une bonne mesure et elle ne facilite certainement pas la transmission des entreprises.
La transmission de petites entreprises peut être réussie, et j’en connais des exemples, mais à condition qu’il y ait un dialogue entouré d’une certaine discrétion, pour trouver le meilleur repreneur, loin d’éventuelles tentatives de déstabilisation : si tout est sur la place publique, cela ne marche pas !
À mon sens, cette idée sympathique méconnaît totalement la réalité de la vie des entreprises. C’est pourquoi le groupe UMP soutient la suppression de cette disposition.
M. Christophe Béchu. Très bien !
M. Jean-Jacques Hyest. Il s’agit ensuite du compte personnel de prévention de la pénibilité.
Mme Nicole Bricq. Ah !
M. Jean-Jacques Hyest. On nous a rétorqué que notre amendement de suppression était un cavalier. Non, ce n’en est pas un, car, s’il y a une mesure qui complexifie la vie des entreprises, c’est bien celle-là.
Mais n’allez pas croire que le groupe UMP est défavorable à la prise en compte de la pénibilité dans le calcul des retraites. D’ailleurs, nous avions abordé la question dès 2003. Seulement, si le Gouvernement s’était engagé à laisser un délai de six mois aux entreprises pour mettre en place le compte personnel de prévention de la pénibilité, la publication tardive des décrets, le 10 octobre 2014, ne leur laissera, dans les faits, qu’à peine plus de deux mois pour mettre en place toutes les étapes du dispositif. En effet, l’entrée en vigueur des quatre premiers critères est prévue pour le 1er janvier 2015.
Mme Annie David. Il n’y a que quatre critères qui sont concernés.
M. Dominique Watrin. Ce n’est pas la totalité !
M. Jean-Jacques Hyest. Oui, les quatre premiers, je l’ai précisé.
Ce dispositif est en totale contradiction avec le choc de simplification. De surcroît, il est source d’insécurité juridique, et il renchérira le coût du travail, mais, apparemment, cela n’est pas si important pour certains… Enfin, il pourrait même contribuer à anesthésier la prévention.
Voilà où nous en sommes. Je pense que nous pourrions trouver des solutions à ce problème, mais la brutalité de cette mise en œuvre inquiète, je vous l’assure, les chefs d’entreprise, qui ne savent pas comment faire et sont aux prises avec des difficultés presque insurmontables.
En conclusion, je dirai que, si le Gouvernement a pris conscience de l’ampleur du défi, ses hésitations, et notamment le recours aux ordonnances, sont le signe d’une volonté de gagner du temps sur une politique publique dont il ne dessine toujours pas les contours. Pour autant, la nécessité de voir ce projet de loi adopté l’emporte sur l’imprécision des habilitations, d’autant que nos commissions ont très bien travaillé ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP. – M. le rapporteur applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Vaspart.
M. Michel Vaspart. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mesdames, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, c’est avec une certaine émotion que je prends la parole pour la première fois dans cet hémicycle (Encouragements sur les travées de l'UMP.), tout particulièrement sur un tel sujet, la simplification de la vie des entreprises.
En effet, pendant des années, j’ai été, dans mon département, les Côtes-d’Armor, dirigeant d’une entreprise de 220 salariés et, bien sûr, j’ai été régulièrement confronté à des lourdeurs administratives, des contraintes totalement excessives, sans parler des grandes difficultés que rencontre de manière générale le créateur d’entreprise.
Au-delà du progrès technique, qui permet d’évidentes et régulières simplifications, notamment grâce à l’informatique, combien d’annonces de simplification administrative ont été faites depuis une quinzaine d’années, voire plus, pour si peu de résultats concrets !
On compte même toujours plus de réglementations complexes, qui sont appliquées par des administrations déconcentrées tatillonnes paralysant littéralement notre économie.
Monsieur le secrétaire d’État, la France est bloquée. Bloquée au niveau de ses entreprises, de ses agriculteurs, de ses artisans, des collectivités locales. Bloquée par l’excès de lois, de normes et de règlements. Bloquée, parce que l’on décourage bien souvent l’initiative et la créativité, le résultat étant que plus de 400 000 jeunes travaillent aujourd’hui à Londres. Bloquée parce que les décrets d’application ne sont souvent pas conformes à l’esprit de la loi ou parce que l’administration en fait une application trop stricte.
L’administration, au lieu d’être facilitatrice du projet, est souvent un frein. Combien d’exemples en ce sens avons-nous, les uns et les autres, dans nos territoires ? Le principal mal français, de mon point de vue, c’est cet excès de normes et de règlements qui conduit au blocage de notre société. Les agriculteurs de mon département des Côtes-d’Armor m’ont applaudi lorsque, voilà deux semaines je l’ai dit haut et fort, ne faisant qu’exprimer ce que chacun pense au fond de lui-même.
D’une manière générale, lorsque l’on parle de simplification de l’environnement juridique pour les entreprises, il faudrait toujours partir du principe que les entrepreneurs ont besoin d’un environnement juridique et fiscal stable, qu’ils aimeraient surtout pouvoir travailler en paix en essayant de rester compétitifs par rapport à leurs concurrents étrangers. Les entreprises françaises connaissent déjà des charges sociales bien plus lourdes que leurs homologues de nombre de pays voisins, y compris européens. Si seulement nous pouvions éviter d’y ajouter la complexité administrative...
Évidemment, lorsque l’on apprend qu’un ancien ministre du redressement productif a rejoint, hier, les bancs de l’INSEAD de Fontainebleau pour suivre une formation continue en management, on ne peut pas s’empêcher de penser qu’il y a un gouffre entre certains responsables politiques et le monde de l’entreprise !
Monsieur le secrétaire d’État, vous étiez jeudi dernier à l’Élysée avec une partie du Gouvernement pour la présentation, à grand renfort de communication numérique, de cinquante nouvelles mesures destinées à faciliter la vie des entreprises comme des particuliers.
Avec ces nouvelles mesures de simplification des normes et pratiques administratives, le Gouvernement a annoncé des gains pour le pays supérieurs à 11 milliards d’euros à l’horizon 2016. Ce chiffre donnerait presque le vertige : pour donner un ordre d’idée, c’est davantage que les quelque 9,6 milliards d’économies annoncées pour le budget de la sécurité sociale pour 2015 ! C’est beaucoup, mais n’est-ce pas encore un effet d’annonce ? (Si ! sur les travées de l'UMP.)
De ces récentes annonces, j’ai relevé que la déclaration sociale nominative, ou DSN, en cours d’expérimentation, qui permet d’automatiser les déclarations aux organismes sociaux via la fiche de paie, devrait améliorer sensiblement la gestion des entreprises, et devrait aussi permettre de réaliser 1,6 milliard d’euros d’économies pour les employeurs, une fois généralisée en 2016.
Je suivrai également avec beaucoup d’attention le travail en cours sur la déclaration fiscale unique pour les entreprises, elles qui remplissent aujourd’hui quatre déclarations par an !
La réduction des délais à tous les niveaux et des mesures de simplification à l’embauche iraient encore dans le bon sens.
Évidemment, il ne faut pas attendre de la simplification uniquement des économies budgétaires. Nombre d’efforts de simplification des procédures administratives ne constituent pas des économies à proprement parler, mais représentent surtout des gains de temps – et donc d’argent – pour les entreprises.
On se contentera donc, à ce stade, de s’interroger sur la réalité du montant des économies annoncées, tout en se réjouissant, bien sûr, d’une initiative bien plus ambitieuse que le texte discuté aujourd’hui.
Certes, ce dernier « entend intensifier la démarche de simplification en faveur des entreprises », mais il apparaît comme très peu ambitieux, si l’on me permet cette appréciation. En effet, il comprend une collection de mesures disparates plus ou moins précises – parfois trop, parfois insuffisamment – assortie de vagues annonces d’économies, sur le détail desquelles la lecture de l’étude d’impact ne renseigne pas du tout.
Alors, oui, il y a bien quelques simplifications de codes, code du travail, code de la sécurité sociale ou code de commerce ; des simplifications fiscales et comptables, aussi, et quelques clarifications. Mais certaines de ces simplifications sont si précises qu’elles rendent un peu perplexe le nouveau parlementaire que je suis, et plusieurs orateurs, du reste, ont exprimé ce sentiment. Il en va ainsi de la suppression de la déclaration des congés d’été pour les boulangers, devenue obsolète et de toute façon inappliquée. (M. le rapporteur le conteste.)
Et j’écoutais, en commission puis en séance, la discussion menée par mon collègue Gérard Cornu sur l’opportunité du maintien de l’article 11 bis, qui prévoit une dérogation à l’interdiction d’utilisation des motoneiges...
Mais je ne voudrais pas donner dans la caricature, et cela d’autant moins que la bonne volonté avec laquelle vous vous employez à « décomplexifier », monsieur le secrétaire d'État, est réelle. Mais le fait est que, avec ce texte, on est très loin du compte, et quelque chose me dit que vous n’êtes peut-être pas en désaccord avec ce constat...
Plus grave, alors que le Gouvernement a largement contribué à la création de nouvelles normes législatives depuis deux ans,…
Mme Nicole Bricq. Eh bien oui !
M. Michel Vaspart. … il revient avec ce texte sur ce qu'il a rendu plus complexe, en le regrettant ! Ainsi, en juillet dernier, lors de la discussion du présent projet de loi à l’Assemblée nationale, un amendement du Gouvernement a été adopté pour revenir sur certaines dispositions de la loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, dite « loi ALUR », qui n’avait été votée que quelques semaines auparavant.
S’il faut évidemment s’en réjouir, puisque cette loi est un bon exemple de ce que l’on a fait de plus complexe et de plus paralysant en matière d’urbanisme et de logement dans la période récente, tout de même, que de temps passé et perdu à faire et défaire sans cesse !
De même, je regrette le rejet de nombreux amendements présentant une certaine consistance que nos collègues députés avaient déposés sur le présent texte, discuté cet été au pas de charge.
Au Sénat, le travail accompli par les différents rapporteurs doit être salué. Je me réjouis tout particulièrement qu’à l’initiative de notre collègue Jean-Jacques Hyest la commission des lois du Sénat ait supprimé les articles 19 et 20 de la loi sur l’économie sociale et solidaire, qui créent une obligation d’information des salariés en cas de cession.
Vous parlez de simplifier ? Vous ne cessez de complexifier ! (Protestations sur les travées du groupe CRC.) Ces dispositions ont créé des situations d’instabilité juridique évidentes. Or l’instabilité juridique conjuguée à la complexité administrative est une calamité pour l’économie de notre pays.
J’espère que la suppression de ces articles sera confirmée en séance publique, et j’ose espérer que la commission mixte paritaire maintiendra cette suppression. Je regrette en tout cas que tous les appels des chefs d’entreprise qui ont convergé vers le ministère de l’économie pour obtenir au moins une clarification soient restés sans réponse.
Pour reprendre la fameuse phrase de Martin Luther King, mes chers collègues, je fais un rêve : et si l’Assemblée nationale et le Sénat arrêtaient temporairement de voter des lois et formaient un groupe de députés et de sénateurs pour revoir les lois, décrets et règlements qui sont de nature à bloquer notre pays…
M. Charles Revet. Ce serait la meilleure des choses à faire !
M. Michel Vaspart. Monsieur le secrétaire d'État, je souhaite que le Gouvernement vous donne vraiment les moyens de votre ambition pour notre pays, ambition que je partage. Mais, à l’évidence, il reste bien du chemin à parcourir.
Un des orateurs qui m’ont précédé à cette tribune parlait de la place de la France dans un classement international des charges administratives : nous nous situons au 130e rang sur 148 !
M. Thani Mohamed Soilihi. Il faut quitter cette place !
M. Michel Vaspart. Monsieur le secrétaire d'État, nous sommes en état d’urgence !
Mais je m’en voudrais de terminer sur un constat critique sans faire une proposition alternative. Elle est simple : pourquoi ne déciderait-on pas que le Parlement doit consacrer quelques mois de ses travaux, au sein d’un groupe mixte composé de députés et de sénateurs, à un travail de pure simplification des textes – lois, décrets et règlements – qui contribuent à paralyser la France ? Aux grands maux, les grands remèdes ! Les missions parlementaires telles que celle qui vous avait été confiée, monsieur le secrétaire d'État, ne suffisent pas, pas plus que les conseils de simplification, qui n’interviennent qu’à la marge.
Monsieur le secrétaire d'État, cette indispensable simplification est attendue par nos concitoyens, par l’ensemble des professions et aussi par les élus locaux. C’est, pour moi, une priorité absolue si l’on veut débloquer notre pays et lui redonner confiance ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. André Reichardt, rapporteur. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à M. Martial Bourquin. (Encouragements sur les travées du groupe socialiste.)
M. Roland Courteau. Enfin de l’enthousiasme !
M. Martial Bourquin. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, pour la deuxième fois cette année, notre assemblée examine un texte relatif à la simplification de la vie des entreprises. Nous avons tout lieu de nous en féliciter.
La simplification des procédures administratives, et plus particulièrement celles qui visent les entreprises, fait régulièrement irruption dans notre calendrier législatif. Cela prouve que le sujet est bien réel et qu’il nécessite une action forte et rigoureuse pour parvenir au choc de simplification que tout le monde attend.
Je voudrais dire à mon collègue Michel Vaspart, qui m'a précédé à la tribune, qu’il ne s'agit pas d’un problème nouveau, qui daterait de deux ans et demi !
M. Roland Courteau. En effet !
M. Martial Bourquin. Depuis des dizaines d’années on empile les textes !
M. Roland Courteau. Eh oui !
M. Martial Bourquin. Mais, aujourd'hui, ce gouvernement prend le problème à bras-le-corps ! (Vives exclamations sur les travées de l'UMP.)
M. André Reichardt, rapporteur. Vous allez voir ce que vous allez voir ! (Sourires.)
M. Martial Bourquin. Et, sur ces questions, le Gouvernement montre une volonté d’avancer et, surtout, il met en avant une ligne de conduite, une vision pour parvenir à ce que chacun souhaite, c'est-à-dire ce choc de simplification.
Je constate que la nature même de nos débats a changé. Nous ne sommes plus seulement en lutte contre l’inflation des normes, même si je concède bien volontiers que notre place dans le classement mondial, rappelée à deux reprises, est loin d’être satisfaisant. Quoi qu’il en soit, ce classement, c'est le nôtre ! Il nous concerne, des deux côtés de l’hémicycle !
Il serait donc injuste, au bout de deux ans et demi, de ne mettre en accusation que le gouvernement en place.
M. Roland Courteau. Très bien !
M. Martial Bourquin. Oui, le quotidien des entreprises se transforme en un casse-tête administratif…
M. Jean-François Husson. Et fiscal !
M. Martial Bourquin. … qui gêne leur vie et leur occasionne des dépenses importantes – dépenses qui seraient bien plus utiles si les sommes correspondantes étaient mobilisées au bénéfice des processus de production.
Simplifier, chers collègues, cela ne signifie pas que l’on jette aux orties, par exemple, les conventions de l’Organisation internationale du travail, ou tous les codes, code du travail, de l’urbanisme, de la santé publique, de l’environnement, sans oublier le code général des impôts ! Simplifier, ce n’est pas déréglementer !
M. Jean-François Husson. Ah bon !
M. Martial Bourquin. C'est faire un tri entre les normes utiles – parce qu'il faut des normes – et les normes inutiles – parce que ces dernières constituent autant d’obstacles au développement économique.
J’écoutais un collègue critiquer le compte personnel de prévention de la pénibilité. Mais si, dans cette enceinte, on en arrivait à le supprimer, imaginez-vous les conséquences ? Pour les salariés victimes de troubles musculo-squelettiques – les TMS – ou de maladies du travail, pour ceux qui effectuent des travaux pénibles, si l’on abandonnait l’idée de la pénibilité, ce serait dramatique !
Bien entendu, le mode de mesure de cette pénibilité peut être revu et simplifié. Mais nous ne devons en aucun cas supprimer ce compte pénibilité ! Ce serait un affront fait à celles et ceux qui travaillent très dur, dans des conditions difficiles !
M. Jean-Claude Frécon. Très bien !
M. Martial Bourquin. Non, cela n’est pas possible. (Marques d’agacement sur certaines travées de l'UMP.)
La simplification qui nous est proposée aujourd’hui doit s’entendre et s’évaluer dans un contexte macroéconomique dont il faut reconnaître qu’il est difficile. La croissance européenne est en panne. Le soutien à la mise en œuvre d’un meilleur environnement pour les entreprises est donc très important.
Nos PME et nos TPE ont besoin de se redresser, d’améliorer leurs marges. On l’a dit ici, le temps de l’administration est devenu un obstacle au développement économique, et nous devons nous engager à mettre un terme à cette situation. Il faut obtenir des résultats le plus rapidement possible.
Je pense notamment aux PME les plus fragiles, qui doivent dégager des marges grâce à cette simplification. Il faut le savoir, les entreprises petites et moyennes n’ont pas les moyens de s'attacher les services de conseillers juridiques et fiscaux à temps plein pour les aider à répondre à des appels d’offres exigeants où à sécuriser leur activité.
L’urgence est là, et il faut donc agir vite et fort pour diminuer cette complexité et créer un environnement plus favorable au développement de nos entreprises petites et moyennes.
La date butoir – le 1er janvier 2015 – est proche. Les deux rapports de la médiation du crédit rendus au printemps dernier et qui ont été présentés devant notre commission des affaires économiques constituent des alertes sévères. Les TPE peinent à pérenniser leurs activités et, plus inquiétant encore, les PME continuent de demander des lignes de trésorerie, non pour investir, mais pour essayer de boucler leurs fins de mois.
Le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi, le crédit d'impôt recherche – fortement augmenté –, le crédit d’impôt innovation, le crédit export et les mesures en faveur de la réduction des délais de paiement dans la loi relative à la consommation constituent autant d’outils que le Gouvernement a promus pour faire évoluer l’encadrement des entreprises et améliorer leurs marges et leur compétitivité.
Dans cette perspective, mes chers collègues, nous devons nous réjouir des dispositions prévues dans ce projet de loi qui visent à renforcer le panel d’outils proposé aux entreprises pour qu’elles puissent se concentrer sur leur cœur de métier, la production de richesse, l'investissement, l’innovation, la commercialisation, les stratégies d’exportation et l’emploi.
Concernant la méthode utilisée pour prendre ces dispositions, j’ai bien sûr entendu, ici et là, à droite comme à gauche, que l’on trouvait à redire. C'est que le législateur, par essence, n’aime pas les ordonnances. Mais reconnaissons que le problème est complexe et qu’il nécessite une action résolue et rapide.
Un parlementaire de terrain, en prise constante avec les réalités locales – donc au fait de la situation du tissu économique – sait combien il est nécessaire d’apporter des réponses rapides pour opérer ces indispensables réformes de structure. Le recours aux ordonnances n’est évidemment pas un blanc-seing donné au Gouvernement ni une habitude à prendre. Mais, dans ce cas précis, nous disposons, selon moi, de garanties suffisantes pour procéder ainsi.
La première garantie résulte assurément de l’exemple de la précédente loi d’habilitation, celle du 2 janvier 2014, dont les ordonnances sont aujourd’hui effectives. Cela méritait d’être relevé.
Pour mémoire, je vous rappelle que la mission parlementaire de simplification de l’environnement réglementaire, administratif et fiscal des entreprises, que vous présidiez à l’époque, monsieur le secrétaire d'État, avait établi que 29 % seulement des 348 dispositions de simplification prises en 2009 – la date a son importance, chers collègues de l’UMP - étaient concrétisées en 2013. Des leçons ont donc été tirées.
M. Yannick Vaugrenard. Voilà ! Que l’opposition balaye devant sa porte !
M. Marc Daunis. Quel silence, à droite !
M. Martial Bourquin. Mais ne nous rejetons pas la faute, et prenons plutôt le problème à bras-le-corps pour essayer de le régler.
La deuxième garantie, c’est évidemment la méthode utilisée. Les propositions sont en grande part issues du travail du Conseil de la simplification pour les entreprises qui, installé depuis le début de l’année, s’est déjà réuni en huit sessions. Il a ainsi dégagé des priorités d’action qui, loin d’être « hors-sol », sont bien des dispositions concrètes, couvrant des secteurs très différents de la vie économique.
Bien sûr, on pourrait aller plus vite, plus loin et plus fort, mais attention de ne pas complexifier en voulant simplifier. À cet égard, les travaux du Conseil de la simplification pour les entreprises nous donnent le recul nécessaire.
L’expérience nous montre en effet que la qualité de la mise en œuvre est tout aussi essentielle que la simplification elle-même. Sans doute, monsieur le secrétaire d’État, pourrez-vous nous éclairer sur la manière dont vous comptez promouvoir, parmi les entreprises, les textes qui seront issus de nos discussions.
Je dirai enfin quelques mots des amendements, peu nombreux, déposés par le groupe socialiste. Je souhaite, à ce stade du débat, insister sur certaines dispositions, qui concernent la commission des affaires économiques.
Je pense notamment à l’article 10, relatif au régime des certificats d’énergie. Nous proposons de transférer l’obligation d’économie d’énergie à un groupement professionnel privé permettant à des distributeurs indépendants, en majorité de très petites entreprises, de se regrouper, ce afin d’éviter que de grands donneurs d’ordre ne s’emparent du marché de ces petites entreprises, qui avaient la possibilité de décerner des certificats d’économie d’énergie.
S’agissant de l’article 12, nous souhaitons maintenir l’obligation d’information préalable des salariés en cas de cession d’entreprise, obligation introduite par la loi du 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire. (Très bien ! sur certaines travées du RDSE.)
Cette obligation a malheureusement été supprimée par la commission des lois. Mais nous y tenons ! Rendez-vous compte, mes chers collègues, du nombre d’entreprises qui n’ont pas de repreneur et dont la transmission s’avère difficile ! Parfois, un travail en réseau peut être la solution. Ne négligeons pas, y compris pour les très petites entreprises ou même les entreprises moyennes, la possibilité de mettre en place des coopératives. Sur ces questions, le comité d’entreprise a un rôle évident à jouer.
Un autre de nos amendements tend à revenir sur la nécessaire fusion d’UBIFrance et de l’AFII, l’Agence française pour les investissements. À nos yeux, ce serait bien plus utile que la création d’un GIE, un « machin » supplémentaire ! Il faut un dispositif efficace, donc plus fluide, donc plus simple. Cette fusion nous paraît indispensable.
Enfin, nous proposerons – c’est un débat qui a agité l’ensemble de notre assemblée – la simplification des procédures des plans d’occupation des sols, pour les communes ayant fait le choix d’un plan local d’urbanisme intercommunal.
Cette simplification est un souhait partagé par beaucoup d’élus. J’émettrai un autre vœu, plus personnel : que l’on simplifie les obligations d’enquêtes nécessaires aux plans locaux d’urbanisme ! En effet, pour des communes rurales qui ont une carte communale ou un POS, quel est l’intérêt de tout ce déploiement d’énergie ? Ne pensez-vous pas qu’une simple étude environnementale serait suffisante pour passer de la carte communale ou du POS au PLU ?