M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée, pour présenter l’amendement n° 7.
Mme Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée. Le Gouvernement décide de lever le gage prévu par la proposition de loi.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Ronan Kerdraon, rapporteur. La commission, constatant que le Gouvernement et le groupe CRC proposent de lever le gage, ne souhaite pas faire durer plus longtemps le suspense : elle a émis un avis favorable.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 3 et 7.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. L'amendement n° 4, présenté par Mme Pasquet, M. Watrin, Mmes Cohen et David, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans les six mois qui suivent l’adoption de la présente loi, le Gouvernement engage une campagne médiatique à destination du grand public, portant sur l’utilisation frauduleuse des cartes de stationnement visées à l’article L. 241-3-2 du code de l’action sociale et des familles ainsi que sur l’utilisation illégale des places réservées aux titulaires de cette carte.
La parole est à Mme Isabelle Pasquet.
Mme Isabelle Pasquet. Les associations qui accompagnent les personnes en situation de handicap observent une augmentation importante des cas d’usage frauduleux de la carte de stationnement pour les personnes à mobilité réduite. Ce sujet a également fait l’objet d’un débat important en commission, et beaucoup de nos collègues, toutes sensibilités confondues, se sont émus des conséquences concrètes que ces comportements inciviques pouvaient avoir dans la vie des personnes en situation de handicap.
Ces comportements sont sanctionnés, qu’il s’agisse de l’utilisation indue de places réservées ou de l’utilisation frauduleuse d’une carte de stationnement, punie d’une amende de cinquième catégorie pouvant être majorée en cas de récidive.
Par ailleurs, certaines personnes en situation de handicap, soupçonnées de frauder en utilisant une carte de stationnement, sont verbalisées et doivent elles-mêmes apporter la preuve de leur handicap par lettre recommandée, ce qui créé une difficulté supplémentaire pour elles.
Face à cette situation, plutôt que de renforcer notre arsenal répressif, comme cela a déjà été fait voilà six ou sept ans, le groupe CRC est convaincu que des mesures de sensibilisation doivent être prises. Or celles-ci relèvent plus souvent du travail des associations que des pouvoirs publics, alors que les comportements inciviques dont il est question ici brident le droit fondamental des personnes en situation de handicap à se déplacer librement.
C’est pourquoi nous proposons, par le biais de cet amendement, que les pouvoirs publics initient une campagne nationale de sensibilisation sur l’usage frauduleux de la carte de stationnement, comme de l’utilisation irrégulière des places réservées aux titulaires de cette carte.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Ronan Kerdraon, rapporteur. Cet amendement fait référence à un débat que nous tenons régulièrement sur l’utilisation frauduleuse de la carte de stationnement et l’occupation illégale des places réservées.
On peut comprendre la demande formulée, dans la mesure où les associations constatent toutes – elles l’ont déclaré lors de leur audition par la commission – une recrudescence des pratiques abusives et frauduleuses. Le Gouvernement en est d’ailleurs bien conscient, puisqu’il a lancé, dans le cadre de la modernisation de l’action publique, une réflexion sur les moyens de sécuriser l’utilisation des cartes de stationnement et de mieux contrôler l’identité des bénéficiaires ; Mme la ministre l’a évoqué tout à l’heure.
Parallèlement à ces travaux, il serait effectivement important de sensibiliser nos concitoyens à l’importance d’un comportement civique en la matière. Reste que le débat que nous avons eu hier en commission, qui a été particulièrement riche même s’il a parfois été un peu long, a fait apparaître deux effets contre-productifs : le premier est qu’une campagne de sensibilisation pourrait donner de mauvaises idées à des personnes mal intentionnées, à savoir qu’il est possible d’utiliser frauduleusement ces places ; le second est l’aspect stigmatisant d’une telle campagne pour les titulaires de la carte de stationnement.
Après ces échanges, la commission se tourne donc vers le Gouvernement pour connaître son avis, qu’elle attend impatiemment.
M. le président. Quel est donc l’avis du Gouvernement ?
Mme Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée. Le Gouvernement émet un avis défavorable. En effet, le lancement d’une campagne de communication ne relève pas de la loi. De plus, vous le savez, l’État, les départements et les MDPH financent déjà de nombreuses campagnes menées par les associations.
Dans le cadre de la concertation engagée par Mme Claire-Lise Campion, nous voulons maintenir le rendez-vous de 2015, sans toutefois transformer 2014 en année blanche. C’est pourquoi nous avons prévu une campagne de communication sur l’accessibilité en général.
Je le répète, des instructions précises ont été données aux forces de police pour agir. J’ai déjà indiqué le nombre de contraventions ; je n’y reviens donc pas. J’ai également évoqué le travail que nous réalisions dans le cadre de la modernisation de l’action publique et du comité interministériel du handicap sur les cartes de stationnement pour faire progresser la transparence et lutter contre la fraude.
Je suis tout à fait d’accord avec les auteurs de cet amendement pour dire que les comportements que nous dénonçons ne prendront fin qu’à la suite d’un vrai changement de mentalité sur les questions liées à l’accessibilité, lesquelles dépassent bien entendu largement ce débat sur le stationnement, même si celui-ci demeure utile dans la perspective d’un changement de regard de la société sur les personnes en situation de handicap.
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. Parmi les campagnes d’information, l’une d’elle me semble très efficace : « Si tu prends ma place, prends aussi mon handicap ! » Ce slogan est particulièrement percutant.
Cela dit, madame la ministre, vous avez déclaré avoir donné des chiffres sur l’efficacité de l’action menée par la police. En réalité, vous avez simplement chiffré l’utilisation abusive des places de parking, à moins que, dans l’état souffreteux qui est le mien ce matin, je n’aie pas bien entendu.
Or l’amendement porte sur l’utilisation frauduleuse des cartes de stationnement, celle qu’on emprunte à un voisin ou à un parent. Dans ce cas, quelle est l’efficacité de la police ? C’est bien la question qui est posée ! Pour ma part, je ne peux voter un amendement visant à lancer une campagne publicitaire, sans connaître plus précisément l’action de la police en la matière.
Bien évidemment, nous n’ouvrirons pas maintenant le débat sur l’action menée par la police pour ce qui concerne le respect des règles relatives au stationnement des personnes handicapées. Certes, on verbalise ceux qui garent leur voiture sur une place de parking réservée. Mais, aujourd'hui, certains vont jusqu’à endosser l’identité d’autres personnes pour s’attribuer des places réservées. Il s’agit d’un phénomène nouveau très compliqué à traiter. Il nécessite une intervention différenciée et continue de la police.
Il aurait donc été intéressant, mais sans doute cette question est-elle non pas de votre ressort mais de celui du ministère de l’intérieur, de connaître l’action entreprise par la police concernant ces abus. Ils exigent une action spécifique, à propos de laquelle vous ne nous avez pas apporté de réponse.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. L’amendement n° 4 prévoit la mise en œuvre d’une campagne de sensibilisation, ce qui est tout à fait dans l’esprit prôné par Mme la ministre. Je ne vois donc pas d’antagonisme entre nos deux positions.
On peut ne pas être d’accord avec notre amendement, mais nous constatons tous la nécessité d’un changement de regard et de mentalité. C’est pourquoi nous souhaitons que l'État s’engage plus fortement auprès des associations qui mènent ces campagnes de sensibilisation, car elles souffrent d’un manque de moyens criant. Elles se tournent d’ailleurs souvent vers nous pour qu’on vienne à leur secours. Il n’est donc pas possible de tout faire reposer sur elles.
Monsieur le rapporteur, je vous le dis en toute cordialité, votre argument ne tient pas. Mais peut-être n’avez-vous pas tout à fait mesuré la portée de ce que vous disiez. Car si l’on suit votre raisonnement, il ne faudrait plus mener aucune campagne de sensibilisation dans quelque domaine que ce soit ! Ainsi, quand on se bat contre l’alcool pris en trop grande quantité, on encouragerait l’alcoolisme ! Quand on se bat contre les violences faites aux femmes, on contribuerait à ce phénomène ! Ne grossissez donc pas le trait.
Dernière chose, il convient d’être très attentif à l’intervention policière, la situation étant assez compliquée. Nous avons tous dénoncé l’usage frauduleux de cartes, mais certaines personnes en situation de handicap moteur, j’en ai reçu le témoignage, sont verbalisées et doivent prouver, en envoyant une lettre recommandée, qu’elles sont bien en situation de handicap. Je ne sais pas si de telles situations, qui intensifient la pression que peuvent supporter ces personnes, se rencontrent sur l’ensemble du territoire ou uniquement à Paris. En tout cas, je m’étais engagée à évoquer ce problème devant le Sénat. Je ferai également un courrier à Mme la ministre, pour qu’elle puisse intervenir sur cette question, peut-être très circonscrite, mais extrêmement discriminante.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Ronan Kerdraon, rapporteur. Madame Cohen, je vous rappelle, en toute cordialité également, que je ne fais que rapporter les propos tenus par certains de nos collègues en commission, sans donner mon avis personnel. Je ne prends donc pas pour moi votre observation, que je transmettrai à qui de droit.
M. Jean Desessard. Rapporteur ! (Sourires.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée. Je voudrais dire aux auteurs de cet amendement ainsi qu’à tous les sénateurs et à toutes les sénatrices que nous partageons la même approche. Si la communication est importante pour dire aux citoyens français notre volonté d’une société inclusive, il ne relève pas d’une loi de la République d’instaurer un tel dispositif. Sachez cependant que je reste ouverte à toutes les propositions, mais pas nécessairement dans un cadre législatif.
Rassurez-vous, monsieur Desessard, vous ne m’avez pas mal entendue : je n’ai pas indiqué les chiffres de la fraude, tout simplement parce que nous ne les connaissons pas – les fraudeurs ne se manifestent pas à nous, évidemment. (Sourires.) J’ai simplement signalé que des instructions ont été données aux forces de l’ordre pour que celles-ci vérifient que ces places de stationnement restent accessibles à ceux qui y ont droit.
Une foule d’informations nous remontent du terrain et de la part des associations, que nous utiliserons pour remettre à plat cette question de la carte de stationnement, sur laquelle nous travaillons actuellement, en prenant le mal à la racine.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 4.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Vote sur l'ensemble
M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble de la proposition de loi, je donne la parole à Mme Catherine Deroche, pour explication de vote.
Mme Catherine Deroche. Pour les raisons que j’ai données au cours de la discussion générale et lors de l’examen des articles, le groupe UMP s’abstiendra sur cette proposition de loi.
M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Alquier.
Mme Jacqueline Alquier. Au-delà des appréciations techniques et des nombreux sujets connexes qu’elle sous-tend, la proposition de loi de notre collègue Didier Guillaume a une ambition claire, univoque : éviter aux personnes dont la mobilité est rendue difficile ou contrainte de devoir multiplier les déplacements pour s’acquitter du paiement de la redevance de stationnement. Il ne s’agit pas d’accorder un avantage financier aux personnes en situation de handicap, qui d’ailleurs ne le demandent pas. Le principe de gratuité qui est mis en place n’est pas à visée compensatrice. Ce n’est que le moyen de parvenir à l’objectif, non pas la finalité.
Ne perdons pas de vue que nous travaillons avant tout sur l’accessibilité. D’évidence, cet objectif participe pleinement de la politique d’inclusion menée au Gouvernement par Marie-Arlette Carlotti, dans la droite ligne des positions du Président Hollande. Nous pensons que l’accessibilité relève non pas de la discrimination positive, à laquelle notre tradition républicaine s’oppose en tout point, mais de mesures adaptées qui dépassent largement le cadre du handicap, car chacun peut rencontrer des problèmes de mobilité selon les périodes de la vie.
Lors des débats, des interrogations ont pu s’exprimer, s’agissant du calendrier, quant à l’opportunité de voter ce texte, alors que notre collègue Claire-Lise Campion négocie, avec l’ensemble des acteurs du secteur, le cadre national des agendas d’adaptabilité programmée, dont elle est l’instigatrice inspirée et efficace. C’est précisément parce que nous entendons laisser ce travail essentiel s’accomplir dans le processus de concertation, que notre majorité défend depuis longtemps, que nous n’avons pas souhaité étendre le périmètre de ce texte.
La question des quotas de places réservées ou encore celle de la refonte de l’attribution et de la fabrication des cartes européennes de stationnement pour les personnes handicapées, sujet sur lequel travaille le comité interministériel pour la modernisation de l’action publique, restent sur le métier. L’auteur de cette proposition de loi, son rapporteur et le groupe socialiste se sont attachés à ce que le texte conserve son caractère ciblé et s’inscrive en synergie avec la réflexion en cours.
Je veux rendre hommage ici au travail de notre rapporteur, qui a su faire évoluer le texte initial tout en en respectant l’esprit. L’extension de la gratuité attribuée aux personnes détentrices de la carte de stationnement à l’ensemble des places de stationnement, et non plus seulement aux places réservées, s’est faite sur la base d’un large consensus au sein de notre commission. Il est bon de le saluer. De même, des compromis ont pu être trouvés sur d’autres aspects tels que le report de l’application de la gratuité pour les parkings gérés dans le cadre d’une délégation de service public au renouvellement des contrats ou l’application du dispositif dans les parkings dotés de bornes d’entrée et de sortie.
Sans nul doute, mes chers collègues, nous partageons, sur presque toutes les travées de cet hémicycle, l’objectif de ce texte : faciliter le quotidien de ceux de nos concitoyens pour qui les petites choses de la vie courante frôlent souvent l’insurmontable. Pour la représentation nationale, les occasions de se retrouver unanimement ne sont que trop rares. Aussi appelons-nous tous les groupes à ne pas manquer celle qui s’offre à nous aujourd’hui.
Le groupe socialiste, quant à lui, votera sans réserve la proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard.
M. Jean Desessard. Les sénatrices et sénateurs du groupe écologiste voteront la proposition de loi.
Au cours de ce débat, j’ai apprécié la convergence de vues sur la question de l’accessibilité pour tous. Surtout, on a beaucoup insisté, sur l’ensemble des travées, sur l’indispensable autonomie des personnes en situation de handicap et, partant, sur la nécessité de favoriser en ville les voies de circulation de telle manière que les gens, quelle que soit leur situation, puisse se déplacer en toute autonomie et avoir accès à tous les lieux.
Mme la ministre nous a dit que le calendrier fixé par le Gouvernement s’en trouvait quelque peu bousculé. Pour ma part, je conçois cette proposition de loi comme la manifestation d’un état d’esprit – on a beaucoup parlé d’esprit –, comme une anticipation sur la suite et le programme complet que vous allez nous présenter, madame la ministre, et que nous attendons avec impatience.
M. le président. La parole est à Mme Muguette Dini.
Mme Muguette Dini. Bien entendu, je voterai cette proposition de loi, d’autant qu’elle est extrêmement raisonnable. Elle permettra aux handicapés d’occuper n’importe quelle place de stationnement, gratuitement pour celles d’entre elles qui sont difficiles d’accès, à titre onéreux pour les autres, comme tout un chacun. En tout cas, l’ensemble des parcs de stationnement leur seront accessibles. Je le répète, c’est un bon texte.
M. le président. La parole est à M. Yvon Collin.
M. Yvon Collin. Je remercie à mon tour Didier Guillaume d’avoir pris cette initiative très heureuse, qui a suscité un très beau débat et qui a permis à différents points de vue de se confronter, voire de s’opposer. Nous faisons ce matin œuvre utile.
Madame la ministre, nous avons bien noté que vous allez nous présenter très rapidement des propositions. Cette proposition de loi a le mérite de nous permettre de faire un grand pas en avant. Le groupe du RDSE, unanime, la votera.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi dans le texte de la commission, modifié.
(La proposition de loi est adoptée.)
M. le président. La parole est à M. Didier Guillaume, auteur de la proposition de loi initiale.
M. Didier Guillaume. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la lutte pour le vivre ensemble, la lutte contre les discriminations, la lutte pour une meilleure intégration des personnes handicapées ne sont ni de droite ni de gauche ; il s’agit d’un combat pour la République, un combat pour une société inclusive, à l’issue duquel, pas après pas, marche après marche, étape après étape, difficulté après difficulté, nous parvenons à rendre notre pays, nos régions, nos départements, nos villes accessibles à tous, jeunes ou âgées, quel que soit leur niveau social.
Comme je l’ai indiqué précédemment, j’ai conscience que nous aurions pu examiner cette proposition de loi à un autre moment, eu égard au rapport rédigé par nos collègues Claire-Lise Campion et Isabelle Debré. Simplement, j’ai voulu répondre à une question prégnante qui m’a été posée maintes fois, celle du stationnement : comment faire lorsque la place réservée aux handicapés – Jean Desessard nous a expliqué combien il pouvait être difficile de quitter son véhicule lorsqu’on stationne sur un emplacement étroit – n’est pas disponible ? Comment faire lorsqu’une activité n’est pas terminée et qu’on doit remettre une pièce dans le parcmètre ?
Peut-être serons-nous amenés à examiner prochainement une grande loi sur le handicap et peut-être même est-ce Mme Carlotti qui la défendra. Peut-être faudra-t-il que la société aille encore plus loin dans cette direction. Il n’en demeure pas moins que la réponse que le Sénat apporte ce matin va dans le bon sens. C’est pourquoi je remercie l’ensemble des orateurs, de tous les groupes, qui ont soutenu ce texte. Je salue également l’excellent rapport de Ronan Kerdraon ainsi que la présence de Mme la ministre, que j’apprécie à sa juste valeur, car je sais qu’il n’a pas été très simple d’arriver là où nous sommes parvenus.
Je le redis, il ne s’agit aucunement pour nous de discrimination, ce n’est ni une faveur ni de la compassion ; il s’agit simplement d’un acte d’intégration et de répondre à une question précise : je suis handicapé, je suis au volant de mon véhicule, comment je fais pour me garer ? Comment je fais pour me déplacer comme les autres ? Voilà tout simplement l’objectif de cette proposition de loi !
Je suis très heureux que nous l’ayons examinée ce matin. Pour en avoir discuté avec Mme Campion, je sais que nous n’en resterons pas là, mais l’acte que nous avons accompli ce matin – en espérant que l’Assemblée nationale se saisira à son tour de ce texte – n’a d’autre but que d’aider nos concitoyens dans leurs démarches quotidiennes.
Cela a été dit par plusieurs orateurs, nous devons encore avancer sur cette question. Lorsqu’on voit les difficultés auxquelles sont confrontées les MDPH, lorsqu’on mesure le temps que mettent les commissions pour traiter les dossiers des personnes en souffrance, il paraît évident qu’il faudra simplifier les normes, voire en supprimer. Il n’est pas normal qu’une personne très handicapée doive chaque année repasser les mêmes examens devant la commission pour dire : « Eh bien oui, je suis toujours handicapé, je ne suis pas allé à Lourdes et, par conséquent, je me déplace toujours en fauteuil roulant ! »
Madame la ministre, je vous en conjure, allons vers une société dans laquelle les handicapés ne seraient pas assaillis, assommés par les tracasseries ou les contraintes. Faisons en sorte que les personnes en situation de handicap aient vraiment le sentiment que celles et ceux qui dirigent le pays, qui sont à la tête de nos institutions, font tout en faveur de leur totale intégration, font tout pour qu’elles vivent comme les autres.
Dans mon département, à Valence-le-Haut, dans un quartier difficile classé en zone de sécurité prioritaire, nous avons ouvert dans un collège une section d’éducation motrice. Quand nous mettons dans les mêmes classes des enfants valides et des enfants handicapés, parfois, on se demande qui est handicapé. Cette intégration est essentielle : faisons en sorte que tout le monde se rassemble. J’invite tous nos collègues à tenter des expériences, à aller le plus loin possible, afin de mieux prendre en compte le handicap.
Jean Desessard le disait, il existe de très nombreux obstacles, de très nombreuses difficultés dans nos villes. Hier encore, j’ai vu à la télévision un reportage réalisé à Paris montrant une personne en fauteuil qui ne pouvait accéder pratiquement à aucun lieu. Pour ces personnes, la ville est un obstacle, la ville peut être un danger.
Avec cette proposition de loi, nous apportons notre pierre à l’édifice en répondant à un problème : celui du stationnement des personnes handicapées titulaires de la carte. Je remercie le Sénat de l’avoir votée. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Ronan Kerdraon, rapporteur. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je voudrais remercier l’auteur de la proposition de loi, Didier Guillaume. Cette pierre à l’édifice dont il parle, il l’apporte avec modestie et humilité : il sait que son texte ne répondra pas à toutes les attentes des personnes en situation de handicap.
En tout cas, l’examen de cette proposition de loi aura permis à la commission des affaires sociales d’auditionner plusieurs associations liées au monde du handicap et de mesurer l’immensité de leurs attentes. Je me tourne donc vers vous, madame la ministre, car je ne sais pas s’il y aura un texte, mais, vous le savez, il existe des rapports sur le sujet et une mission a été confiée à Claire-Lise Campion.
La proposition de loi qui vient d’être adoptée va contribuer au bien vivre ensemble et va permettre aux personnes en situation de handicap d’exercer une partie de leur citoyenneté, laquelle passe par l’autonomie. Les débats ont été riches, aussi bien en commission qu’en séance publique. C’est très bien ainsi, car cela a permis d’élargir le débat, en espérant que celui-ci portera au-delà de notre hémicycle.
Didier Guillaume s’inscrit dans le cadre du travail réalisé à la fois par Claire-Lise Campion et Isabelle Debré. Le Sénat n’est donc pas seulement la chambre des collectivités territoriales, il se préoccupe également de l’égalité et de l’équité.
Pour terminer, j’aimerais remercier les membres du cabinet de Mme la ministre pour leurs apports et les échanges fructueux que la commission des affaires sociales a pu avoir avec eux. La qualité de ces échanges ne m’étonne pas, car c’est déjà une longue pratique – en tout cas, depuis que Mme la ministre est au Gouvernement. Je tiens donc à la remercier particulièrement, car ce n’est pas toujours le cas avec d’autres ministères.
Maintenant que cette proposition de loi a été adoptée, ce dont je me félicite, donnons-nous rendez-vous pour la publication du rapport de Claire-Lise Campion et pour l’examen d’un futur texte ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE. – Mme Muguette Dini applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée. Je souhaite moi aussi remercier celui qui a été l’initiateur de cette proposition de loi, Didier Guillaume, ainsi que le rapporteur, Ronan Kerdraon, et les féliciter de tout le travail accompli. Avec cette proposition de loi, mesdames, messieurs les sénateurs, vous faites un pas – je ne sais pas s’il est grand ou petit – vers la société inclusive, la société de l’accessibilité universelle, que nous voulons tous, celle qui accepte toutes les différences dans le cadre des valeurs de la République.
Je ne sais pas s’il faut faire une loi ou non. En tout cas, je sais qu’il existe une grande loi de la République : la loi de 2005. Or quand un texte est voté, il doit être appliqué ! Ce qui m’agace le plus, c’est qu’on vote des lois sans regarder, le lendemain, si elles sont réellement effectives sur le terrain. Je m’attache donc à rendre effective cette loi, qui couvre l’ensemble des champs du handicap. C’est mon premier chantier.
Oui à l’accessibilité universelle ! Mais quand la date du 1er janvier 2015 a été annoncée, on disait : « Dix ans pour avancer ! ». En fait, il s’agissait même de plus de dix ans, puisque la mobilisation avait commencé avant. Or il n’y a eu aucun suivi. Cette loi n’a pas été assez portée politiquement. Il ne suffit pas de dire qu’une loi existe, encore faut-il montrer une volonté politique pour qu’elle aboutisse sur le terrain. Pourtant je sais que, sur le terrain, il y a des volontés politiques, que ce soit de la part des associations, des maires, des présidents de conseil général.
Je m’attache donc à faire en sorte que ce grand rendez-vous de 2015 soit le plus beau rendez-vous qui soit, sans tordre le bras aux collectivités territoriales, en respectant les petits commerces de proximité, tous ceux qui, dans cette société, doivent faire des efforts.
Mon deuxième chantier, c’est celui des MDPH. Bien sûr que c’est un sujet sur lequel je dois travailler ! Avec le président de l’Assemblée des départements de France, nous avons d’ailleurs mis ce chantier sur la table. Nous avons travaillé à ce qu’on appelle les MDPH du futur – il paraît que le terme ne doit plus être utilisé. En tout cas, nous devons faire en sorte que l’organisation des MDPH soit plus efficace, plus transparente, et leur donner des moyens d’agir.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous remercie d’avoir porté haut le débat sur le handicap. (Applaudissements.)