M. René-Paul Savary. Bien sûr !
M. Didier Guillaume. Il existe beaucoup de politiques innovantes en matière de handicap ; vous avez eu raison de le souligner, monsieur Savary. Dans ma région, Grenoble, Valence ou encore Bourg-de-Péage, dont j’ai été le modeste maire il y a quelques années, ont mis en place des systèmes de gratuité.
Cette proposition de loi n’est pas discriminatoire. Elle vise seulement à favoriser le stationnement des personnes handicapées. Vous avez raison de préciser, madame Dini, qu’il n’y a pas de raison que les personnes handicapées ne paient pas le stationnement dans les parkings disposant de bornes d’entrée et de sortie accessibles du véhicule. Je sais que certaines personnes handicapées qui conduisent ont des difficultés à tendre le bras, mais, quand on peut entrer dans un parking, on peut aussi en ressortir. Je suis d'accord avec vous : si on conduit, on doit pouvoir y arriver. Il est donc normal que ces parkings soient payants pour tout le monde.
Les deux amendements vont dans le même sens : ils visent à refuser les discriminations et à promouvoir une société inclusive. L’objectif de cette proposition de loi n’est pas d’imposer la gratuité du stationnement pour les personnes handicapées ; il s’agit de favoriser la conduite et de faciliter le stationnement des personnes handicapées. Or, madame Deroche, votre amendement vise à imposer une règle aux maires, alors que celui de Mme Dini prévoit de leur laisser le choix. Il me semble donc que l’amendement n° 5 rectifié bis correspond mieux à ce que nous souhaitons.
Je partage totalement l’argumentation de notre collègue Savary. Comme nous sommes tous deux présidents de conseil général, nous avons souvent la même vision sur ces sujets. Ce n’est évidemment pas parce que nous autoriserions la gratuité des parkings pour les véhicules des personnes handicapées qu’il faudrait ne rien faire ailleurs. La ville lente dont parlait avec la gouaille qu’on lui connaît notre ami Desessard doit continuer à exister. Il faut d’ailleurs poursuivre le travail sur un urbanisme ouvert à tous. Le vivre ensemble dans la République et dans la cité vaut pour tout le monde, personnes valides comme personnes non valides.
La proposition de loi, qui aborde un point précis avant une future grande loi sur le handicap, madame la ministre, n’a pas pour objectif d’instaurer la gratuité. Elle vise seulement à écarter toute discrimination, tout en évitant d’ajouter un handicap au handicap, ce qui serait en quelque sorte vécu comme une double peine. Dans ce cadre, il me semble que l’amendement de Mme Dini, plus précis, permet toute liberté et toute latitude aux maires, comme le souhaite M. Savary.
Je le répète, j’aurais pu être totalement favorable à l’amendement de Mme Deroche, dont j’avais d’ailleurs retenu les termes dans ma proposition de loi initiale, mais, à partir du moment où l’on veut laisser plus de liberté aux maires, je pense qu’il faut voter l’amendement n° 5 rectifié bis. Il va en effet dans le bon sens, même si je ne suis pas opposé à celui de Mme Deroche, comme je l’ai déjà dit, puisqu’il s’inspire du même principe. En outre, il me semble que l’amendement n° 5 rectifié bis, qui s’insère à l’alinéa 5, est mieux placé que l’amendement n° 6 rectifié bis, qui tend à compléter l’alinéa 3.
M. Yvon Collin. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Isabelle Pasquet, pour explication de vote.
Mme Isabelle Pasquet. Je veux bien que l’objectif principal de la proposition de loi ne soit pas d’instaurer la gratuité du stationnement, mais c’est pourtant bien ce dont nous parlons depuis le début de la matinée. Or il est très compliqué d’aborder l’accessibilité par un seul bout, car nous avons besoin de voir le sujet dans sa globalité.
La proposition de loi que nous examinons nous amène à réfléchir à la question de l’accessibilité, ce qui nous donne envie d’améliorer le système, de pousser un peu plus loin les choses en adoptant des amendements, même si nous ne voterons pas l’amendement de Mme Deroche, ni même celui de Mme Dini. Nous sommes d’accord pour que les personnes en situation de handicap n’aient pas à descendre de leur voiture pour mettre une pièce dans un parcmètre. Reste que, comme je l’ai dit au cours de la discussion générale, ce dispositif vient compenser les difficultés d’accès aux transports en commun. Du coup, la voiture devient un moyen de remplacement, et la gratuité des parkings pour les personnes handicapées un plus.
Ces amendements, s’ils étaient adoptés, reviendraient à créer une injustice : dans une même commune, certains parkings seraient gratuits pour les personnes en situation de handicap et d’autres pas. Certes, les maires seraient libres de prendre les décisions qu’ils jugent nécessaires, mais j’ai envie de dire que c’est déjà le cas aujourd’hui.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Deroche, pour explication de vote.
Mme Catherine Deroche. J’ai bien entendu les propos de Didier Guillaume, mais nous sommes en train d’examiner un texte tendant à rendre gratuits les espaces de stationnement pour les personnes handicapées sur tout le territoire. Or c’est justement ce que reprochait Mme Lebranchu à Philippe Bas lorsque nous avions présenté un amendement allant dans ce sens.
On nous objecte maintenant que le fait de ne réserver la gratuité qu’aux espaces autres que les parkings porterait atteinte à la liberté des collectivités. Je trouve le raisonnement un peu tiré par les cheveux. Vous ne pouvez pas, d’un côté, imposer une règle à toutes les communes et, de l’autre, laisser toute latitude aux collectivités territoriales pour certains espaces.
J’admets tout à fait qu’on puisse être hostile à notre amendement, mais je récuse les arguments qui lui sont opposés. Dans ces conditions, je le maintiens.
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. Mon état souffreteux de ce matin ne me permettant pas de comprendre avec la rapidité habituelle,…
M. Antoine Lefèvre. La fulgurance, même ! (Sourires.)
M. Jean Desessard. … quelque chose m’aura peut-être échappé. En tout cas, j’ai apprécié l’intervention de M. Guillaume, qui privilégie l’accessibilité, la gratuité n’étant qu’un outil au service de cet objectif.
M. Didier Guillaume. Voilà !
M. Jean Desessard. C’est un peu différent de ce que vous dites, madame Pasquet. Pour vous, la gratuité est primordiale.
Lorsque modifier le système de paiement coûte plus cher que d’accorder la gratuité, on privilégie donc cette dernière solution pour favoriser l’accessibilité. On peut penser que, dans quelques années, ce débat n’aura plus lieu d’être : on aura tous des badges magnétiques, des petits bips-bips qui nous permettront de franchir les barrières, quelle que soit la hauteur des bornes. En attendant, je voterai, comme nous y invite M. Guillaume, l’amendement de Mme Dini, qui laisse à la commune le choix de décider quelle est la solution la plus souhaitable.
Puisqu’on parle des parkings, j’ai moi-même parfois du mal à sortir de la voiture, vu l’étroitesse des places à Paris. (Exclamations amusées sur de nombreuses travées.) D’accord, je sais ce que ce n’est pas tout à fait le sujet, mais j’élargis la question. Il faut que le grand projet de loi sur le handicap que vous être en train de préparer, madame la ministre, prenne en compte l’accessibilité pour tous. Si, en tant que personnes valides, nous devons faire des efforts pour sortir de notre véhicule, imaginez ce qu’il en est pour les personnes en situation de handicap qui ont besoin d’ouvrir en grand la portière pour sortir leur fauteuil. Il faut à l’évidence prévoir des places de parking plus grandes.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Ronan Kerdraon, rapporteur. La discussion que nous avons à l’instant montre bien que le texte vient « percuter » nos réflexions, comme le disait Mme la ministre, selon que l’on considère le verre à moitié vide ou à moitié plein.
En écoutant M. Savary, j’étais, comme M. Guillaume, tout à fait d’accord avec son argumentation. J’attendais donc avec une certaine impatience sa conclusion en faveur du retrait de l’amendement de Mme Deroche. Au final, il a fait une pirouette digne du Cirque d’hiver.
M. René-Paul Savary. Je ne suis pas le seul à en faire dans cet hémicycle !
M. Ronan Kerdraon, rapporteur. C’est exact ! (Sourires.)
M. Antoine Lefèvre. Question de souplesse…
M. Ronan Kerdraon, rapporteur. Madame Deroche, pour en avoir discuté avec Mme Dini, je crois pouvoir dire que la rédaction proposée par notre collègue ne retire rien à l’esprit de votre amendement. Je dirais même au contraire : elle donne un caractère optimiste et non pas restrictif au texte. Je note un argument supplémentaire : elle tend à mettre au centre du dispositif les collectivités en leur offrant la possibilité de donner un avis. Son amendement va donc dans le bon sens en permettant de préserver la libre administration des collectivités, ce qui est une bonne chose.
Mes chers collègues, soyons également attentifs au nombre de villes qui sont concernées et à leur typologie. La ville de Saint-Étienne dans la Loire, par exemple, n’a pas les mêmes caractéristiques que Saint-Brieuc.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée. À ce stade du débat, permettez-moi de clarifier la position du Gouvernement, bien que je pense avoir été extrêmement claire précédemment. (Sourires.)
Je suis moi aussi particulièrement attachée à préserver les compétences des maires. C’est essentiellement pour cette raison que je ne me suis pas retrouvée dans l’amendement de Mme Deroche.
Je pense que le problème de l’accessibilité se pose davantage avec les bornes qu’avec les parcmètres. En tout cas, à Marseille, puisque chacun cite sa ville, c’est le cas. Il faudra donc fixer des critères, et donc des normes nouvelles, pour permettre aux maires de décider.
M. Didier Guillaume. Pas de normes !
Mme Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée. Aussi, je le répète, je préfère m’en remettre à la sagesse du Sénat sur l’amendement n° 5 rectifié bis.
M. le président. La parole est à M. Jacky Le Menn, pour explication de vote.
M. Jacky Le Menn. Je ne parlerai pas de Saint-Malo… (Sourires.)
Comme notre collègue Guillaume, nous pensons que l’esprit est là, tant dans l’amendement de Mme Deroche que dans celui de Mme Dini, mais la lettre de ce dernier nous incite à nous y rallier. L’amendement n° 5 rectifié bis présente en effet les mêmes vertus que l’amendement n° 6 rectifié bis, mais il permet de préserver les compétences des collectivités territoriales, principe sur lequel il faut toujours être attentif.
Après de longues discussions et de nombreux rebondissements en commission des affaires sociales, le groupe socialiste soutient donc l’amendement de Mme Dini, tout en rendant hommage à celui de Mme Deroche.
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 6 rectifié bis n'a plus d'objet.
Je mets aux voix l'article 1er, modifié.
(L'article 1er est adopté.)
Article additionnel après l'article 1er
M. le président. L'amendement n° 2, présenté par Mme Pasquet, M. Watrin, Mmes Cohen et David, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le dernier alinéa de l’article L. 2213-2 du code général des collectivités territoriales est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Le nombre d’emplacements réservés aux titulaires de la carte mentionnée à l’article L. 241-3-2 du code de l’action sociale et des familles ne doit pas être inférieur à un ratio d’une place pour cinq cartes délivrées sans pour autant être inférieur au pourcentage visé au dixième alinéa de l’article 1er du décret n° 2006-1658 du 21 décembre 2006 relatif aux prescriptions techniques pour l’accessibilité de la voirie et des espaces publics. »
II. – Le I entre en vigueur deux ans après la date de promulgation de la présente loi.
La parole est à Mme Isabelle Pasquet.
Mme Isabelle Pasquet. Je profite de l’occasion, comme je le fais à chaque fois que le Sénat aborde la question du handicap et de l’accessibilité, pour rappeler que les enceintes mêmes du Sénat, et plus particulièrement les tribunes, doivent être rendues accessibles aux personnes à mobilité réduite. À cet égard, j’ai adressé un courrier à M. Bel dès son élection afin de lui demander les mesures qu’il entendait prendre pour que le Sénat traite enfin dignement les personnes en situation de handicap. Malgré une réponse encourageante de sa part, je regrette la lenteur de la mise en œuvre des aménagements nécessaires, alors que l’Assemblée nationale, elle, les a réalisés pour que les personnes en fauteuil puissent accéder aux tribunes.
Je rappelle, pour celles et ceux qui l’ignoreraient, que nos visiteurs en situation de handicap moteur qui voudraient suivre nos travaux sont invités à s’installer devant l’un des postes de télévision placés dans la salle des conférences, ce qui ne me semble pas convenable.
J’en reviens à la proposition de loi qui, bien que courte, suscite un intérêt certain. J’y vois l’attachement que portent la Haute Assemblée et l’ensemble de nos collègues à prendre les mesures nécessaires pour favoriser le déplacement des personnes en situation de handicap, ce dont je me félicite.
En commission, nous avons été plusieurs à rappeler que le nombre de places réservées aux titulaires de la carte de stationnement était sans doute insuffisant pour répondre à tous les besoins. C’est pourquoi les auteurs de l’amendement proposent d’instaurer un nouveau mode de calcul du nombre d’emplacements du domaine public réservés aux titulaires de cette carte.
La réglementation actuelle prévoit que ce nombre ne doit pas être inférieur à 2 % du nombre total d’emplacements dans chaque zone de stationnement. Ce seuil est important, dans la mesure où il garantit la présence d’un quota minimal de places réservées aux personnes à mobilité réduite, mais il nous semble opportun de tenir compte également du nombre de cartes délivrées par l’autorité compétente.
Plus précisément, nous proposons que, dans chaque commune, une place soit réservée aux personnes à mobilité réduite pour cinq cartes délivrées. Afin que ce nouveau mode de calcul n’ait pas pour effet de réduire, dans certains cas, le nombre de places réservées, l’amendement prévoit un mécanisme de double plancher, la référence au seuil de 2 % étant conservée.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Ronan Kerdraon, rapporteur. Nos collègues du groupe CRC proposent que le nombre de places réservées tienne compte du nombre de cartes de stationnement délivrées, dans un rapport de 1 pour 5. Nous en comprenons la philosophie et votre intention est louable, madame Pasquet ; je ne puis pourtant y souscrire, pour plusieurs raisons.
D’abord, le décret du 21 décembre 2006 relatif aux prescriptions techniques pour l’accessibilité de la voirie et des espaces publics permet déjà aux communes qui le souhaitent de fixer un quota de places supérieur à 2 %.
Ensuite, quand on aborde cette question avec les associations liées au monde du handicap – dans ma commune de Plérin, dans les Côtes-d’Armor, l’AIDAPHI et l’APF sont représentées et la MDPH est installée –, elles expriment plutôt la demande que le quota réglementaire soit porté à 4 %. Cette demande sera sans doute prise en compte dans les travaux de Claire-Lise Campion. Aussi me semble-t-il un peu prématuré, voire inopportun, de trancher dès à présent la question.
Enfin, l’adoption de cet amendement introduirait une complexité significative à l’échelle communale, sans apporter pour autant une réponse concrète aux besoins des personnes en situation de handicap. Madame Pasquet, nous pourrions accéder à votre demande dans une société idéale, mais nous ne vivons malheureusement pas dans cette société.
C’est ainsi que, dans nos centres-villes, une place est souvent réservée aux handicapés, mais pas aux résidents. Imaginez la complexité qu’entraînerait l’adoption d’un quota de 1 pour 5 !
M. Didier Guillaume. C’est vrai !
M. Ronan Kerdraon, rapporteur. Sans compter que se pose aussi la question de la connaissance du nombre de cartes de stationnement dans nos communes.
Pour ces raisons, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement ; s’il est maintenu, la commission y sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée. Je souscris aux propos de M. le rapporteur.
Dans la lettre et l’esprit – nous y revenons (Sourires.) – du décret de 2006, qui fixe le quota de 2 %, je vous confirme, madame Pasquet, que ce texte laisse aux communes la liberté d’aller au-delà du seuil prévu. Par conséquent, les outils existent. Or, je le répète, le Gouvernement fait confiance aux élus de proximité pour évaluer les besoins de places adaptées sur leur territoire, même si je n’ai pas de nouveau nom de communes à vous citer pour poursuivre le tour de France que nous avons entrepris. (Nouveaux sourires.)
J’ajoute que votre amendement présente l’inconvénient de ne pas préciser sur quel périmètre le nouveau plancher serait défini : celui de la commune, du département ? C’est pourquoi j’en sollicite le retrait ; si vous le maintenez, le Gouvernement y sera défavorable.
M. le président. Madame Pasquet, l'amendement n° 2 est-il maintenu ?
Mme Isabelle Pasquet. Je le maintiens, car ce n’est pas tout que les outils existent pour évaluer le nombre de places ; les outils sont aussi faits pour que les maires puissent décider si les places de stationnement doivent être gratuites ou non.
De nombreuses associations signalent que le nombre de places réservées aux personnes en situation de handicap est insuffisant. C’est pourquoi nous proposons d’inscrire dans la loi le principe d’un seuil proportionnel au nombre de cartes délivrées. À nos yeux, en effet, il est toujours préférable que le législateur énonce fermement les règles, car il en résulte ainsi des obligations.
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. Madame Pasquet, je ne voterai pas votre amendement, pour la raison que Mme la ministre a exposée. Je considère que cette question doit être gérée au plus près du terrain, avec la connaissance des situations locales.
Vous proposez de fixer un nombre minimal de places de stationnement en fonction du nombre de cartes, mais ces places seront-elles utilisées ? On peut le penser, mais il faut aussi tenir compte des circuits de circulation des personnes concernées, ce qui suppose une décision de proximité. En énonçant un principe général, la loi pourrait taper complètement à côté !
Pis, si nous prenions ce risque, nous pourrions obtenir le résultat inverse de celui que nous souhaitons. Imaginons, mes chers collègues, que des personnes aient l’habitude de voir plusieurs places inutilisées. Elles finiront par penser : je peux m’y mettre, puisqu’elles sont toujours libres ! Ainsi, le tabou lié à l’occupation d’une place réservée, quand on n’y a pas droit, serait brisé. (M. Didier Guillaume acquiesce.)
En d’autres termes, en l’absence de prise en compte par le maire des schémas de circulation, des places réservées pourraient rester inoccupées et des personnes valides pourraient avoir tendance à les utiliser.
Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Je ne le crois pas !
M. Jean Desessard. Le tabou étant brisé, l’habitude pourrait se répandre de se garer sur les places réservées aux personnes handicapées, ce qui serait grave. Il vaut donc mieux que cette question soit gérée au plus près du terrain, par les élus de proximité, en tenant compte des besoins et des schémas de circulation.
Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Actuellement, il y a un seuil de 2 % : ce n’est pas une gestion au plus près des besoins !
M. le président. La parole est à Mme Catherine Deroche, pour explication de vote.
Mme Catherine Deroche. Les sénateurs du groupe UMP ne voteront pas cet amendement. Si nous comprenons l’esprit qui anime ses auteurs, nous estimons que la mise en œuvre du système proposé serait très compliquée.
Comme Mme la ministre l’a rappelé, le taux de 2 % est un seuil minimal ; toute commune, en fonction des caractéristiques de sa population et de sa politique à l’égard des personnes handicapées, peut prévoir un plus grand nombre de places.
Au demeurant, les handicapés ne restent pas dans leur commune : Dieu merci, ils se déplacent ! Le mode de calcul proposé ne nous paraît donc pas pertinent.
De façon générale, notre débat fait ressortir la difficulté posée par l’examen de cette proposition de loi très en amont du rapport préparé par Mme Campion, et alors que Mme la ministre, comme elle vient de l’indiquer, commence seulement ses déplacements sur le terrain.
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Je remercie Didier Guillaume d’avoir soulevé tous ces problèmes, mais je tiens à souligner qu’il faut aussi s’interroger sur le regard porté par la société sur la personne handicapée.
Prévoir des places de stationnement spécifiques, c’est, en somme, une discrimination. La meilleure réponse que la société puisse apporter à ce problème, comme l’a signalé M. Desessard, c’est de rendre toutes les places accessibles. Ainsi, il n’y aura plus de logo désignant les personnes handicapées. Pour cela, il faut construire des places de parking plus larges et, éventuellement, modifier le code de la route pour qu’on puisse se garer de manière à sortir avec un fauteuil roulant du côté du trottoir, comme on le fait avec les cars. Voilà les questions auxquelles nous devons réfléchir si nous voulons améliorer l’accessibilité !
Je prends un exemple, qui n'a rien de péjoratif : on a construit des toilettes pour personnes handicapées, des sanitaires larges signalés par un beau logo. Est-ce le regard que la société doit porter sur les personnes handicapées ? Non, il faudrait que tous les sanitaires aient les dimensions requises pour que ces personnes puissent les utiliser ! De cette façon, il n’y aurait plus d’espace spécifique indiqué par un logo.
Mes chers collègues, il faudra bien, un jour, arriver à ce résultat. C’était d’ailleurs l’esprit de la loi de 2005.
Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Quels financements aviez-vous prévus ?
M. René-Paul Savary. Sans doute n’avancera-t-on que petit à petit, mais le législateur a fixé cet idéal. Je pousse volontairement le bouchon un peu loin, madame la ministre pour vous dire que, une fois la loi votée, il faut que ceux qui sont chargés de sa mise en œuvre puissent exécuter les décisions. Or l’application de la loi de 2005 se heurte à de nombreuses difficultés ; les présidents de conseil général qui siègent sur ces travées peuvent en témoigner.
Il faut toujours avoir à l’esprit les questions du regard que la société porte sur le handicap et de la soutenabilité budgétaire des mesures.
Madame la ministre, je tiens aussi à appeler votre attention sur le fonctionnement des MDPH – je suis sûr que M. Guillaume sera d’accord avec moi à ce propos. Ce sont elles, et non plus les préfets, qui délivrent les cartes, lesquelles sont au nombre de 1,5 million. En vertu de la loi de 2005, une personne titulaire d’une carte a le droit de voir l’ensemble de ses problèmes examinés. On doit entrer en discussion avec elle pour lui proposer une amélioration de sa vie, non seulement par l’octroi d’une carte qui règle le problème du stationnement, mais aussi par la mobilisation d’une équipe pluridisciplinaire si une aide humaine est nécessaire ou si des adaptations doivent être apportées à son logement ou à sa voiture.
Bref, toute la réponse de la société est confiée aux MDPH et à leurs équipes pluridisciplinaires. Seulement, ces structures ont un coût de fonctionnement important, et il n’a pas été prévu que les conseils généraux en soient les principaux financeurs ! Or, aujourd’hui, dans le budget des MDPH, la subvention de fonctionnement versée par les conseils généraux devient plus importante que celle allouée par la CNSA. En d’autres termes, le fonctionnement de ces maisons dépend de décisions d’assemblées, alors qu’il devrait être assuré par un financement national.
Je me suis permis de vous rappeler cette réalité, madame la ministre, parce que le jour viendra peut-être – même si j’espère que cela ne se produira pas – où certains conseils généraux rogneront sur la subvention de fonctionnement, de sorte que les MDPH n’auront pas les moyens de faire face à leurs responsabilités.
Mes chers collègues, nous devons réfléchir dès à présent à la façon de résoudre le problème du financement des MDPH. Peut-être faudra-t-il nous pencher, à l’occasion de la discussion du projet de loi sur la dépendance, sur l’intégration de ces maisons, afin de tirer les leçons de la loi de 2005.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour explication de vote.
M. Jean-Claude Requier. Cet amendement est généreux, mais très difficilement applicable, surtout dans le monde rural. Dans les petites communes comme la mienne, il y a de nombreuses personnes âgées, surtout là où il y a une maison de retraite ; elles ne conduisent plus souvent, mais elles sont titulaires de la carte. Dans ces conditions, prévoir une place réservée pour cinq cartes entraînerait des contraintes terribles.
Je ne voterai pas cet amendement : on ne peut pas se plaindre tout le temps des normes et des contraintes et créer sans arrêt de nouvelles obligations !
Mme Colette Mélot. En effet, soyons pragmatiques !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 2.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 2
(Non modifié)
La perte de recettes résultant pour l’État de l’article 1er est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 3 est présenté par Mme Pasquet, M. Watrin, Mmes Cohen et David, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 7 est présenté par le Gouvernement.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Isabelle Pasquet, pour présenter l’amendement n° 3.
Mme Isabelle Pasquet. Il s’agit d’un amendement d’appel. Je suis consciente, en le présentant, qu’il ne répond qu’à une partie de l’objet de l’article 2. Celui-ci tend en effet à gager la proposition de loi, de telle sorte que les pertes de recettes que pourraient supporter les communes en raison de la gratuité soient compensées par l’État. Il s’agit là d’une procédure banale, utilisée par les parlementaires souhaitant voir adopter une proposition de loi entraînant des incidences financières. Naturellement, nous ne voulons pas y faire obstacle. Au demeurant, le Gouvernement lèvera sans doute le gage, ce dont je me réjouis.
Pour autant, si une telle disposition peut sembler logique pour ce qui concerne les communes gérant directement des parcs de stationnement, le groupe CRC est opposé à ce que les établissements privés bénéficiant d’une délégation de service public puissent obtenir de la part des pouvoirs publics une quelconque compensation liée à la perte de recettes. En effet, la compensation sera supportée par les communes, et donc mécaniquement par les impôts locaux, que certaines personnes en situation de handicap auront à acquitter. Or l’esprit de la loi de 2005 est tout autre et ne prévoit pas que les personnes en situation de handicap soient contraintes de financer elles-mêmes les mesures permettant leur accessibilité.
Il nous semble donc que les entreprises gestionnaires de parcs de stationnement, lesquels représentent une rente importante, peuvent garantir, sans contrepartie financière, l’application de cette proposition de loi. Il serait d’ailleurs illogique qu’il n’en soit pas ainsi, surtout si les communes ne percevaient aucune compensation. Les maires faisant le choix de gérer eux-mêmes leurs parcs de stationnement seraient financièrement désavantagés par rapport aux gestionnaires privés bénéficiaires d’une délégation de service public, qui pourraient obtenir des contreparties financières.