M. Benoît Hamon, ministre délégué. Voilà quelques jours, à l’occasion de la célébration de son dixième anniversaire, cette SCOP a accueilli la vice-présidente du Pérou, pays producteur de cacao avec lequel elle a tissé des liens extrêmement forts, allant au-delà des aspects économiques et commerciaux.
Il nous semble extrêmement important de valoriser de telles démarches, y compris en les étendant au commerce Nord-Nord. La SCOP Ethiquable a d’ailleurs développé un label « Paysans d’ici », sur le même principe : mise en place de circuits courts, attention aux conditions de production et rémunération équitable des paysans au regard de la richesse créée.
Le Gouvernement émet un avis favorable sur votre amendement, monsieur Vall, qui procède d’une initiative très intéressante.
M. le président. La parole est à M. Raymond Vall, pour explication de vote.
M. Raymond Vall. Je remercie M. le rapporteur et M. le ministre de leurs propos.
La SCOP Ethiquable est implantée dans la ville dont je suis maire. Voilà sept ans, son fondateur est venu m’annoncer son intention de créer une société de commerce équitable. À l’époque, j’ignorais de quoi il s’agissait…
Il m’a assuré que, dans cinq ans, son entreprise occuperait 7 000 mètres carrés de locaux et emploierait cinquante personnes. Je lui ai alors répondu que, s’il en était ainsi, je lui ferais ériger une statue. (Exclamations amusées.)
M. Marc Daunis, rapporteur. En chocolat ! (Sourires.)
M. Raymond Vall. Mal m’en a pris : cinq ans après, sa société employait effectivement cinquante salariés ! Aujourd'hui, leur nombre fluctue entre quatre-vingts et cent-vingt.
Le modeste maire que je suis n’ayant pas les moyens de payer une statue, j’ai décidé, pour sortir du piège dans lequel j’étais moi-même entré, que Fleurance aurait une allée du commerce équitable, qui mène à l’entreprise en question. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Marc Daunis, rapporteur. Je souligne que cette entreprise exporte jusque dans des contrées lointaines… Ainsi, on consomme du chocolat Ethiquable dans les Alpes-Maritimes, en particulier dans la première technopole d’Europe.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 50.
Section 2
Dispositions finales
Article 51
(Non modifié)
I. – Dans les conditions prévues par l'article 38 de la Constitution et dans un délai de neuf mois après la publication de la présente loi, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d'ordonnance, dans les matières relevant du domaine de la loi, les mesures permettant, d'une part, de rendre applicables, avec les adaptations nécessaires, les dispositions de la présente loi dans les îles Wallis et Futuna, en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française pour celles qui relèvent de la compétence de l'État, ainsi que de procéder aux adaptations nécessaires en ce qui concerne les collectivités de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon et, d'autre part, de procéder aux adaptations tenant aux caractéristiques et contraintes particulières des départements et régions d’outre-mer et du Département de Mayotte dans les conditions prévues à l’article 73 de la Constitution.
Le projet de loi de ratification de cette ordonnance est déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de ladite ordonnance.
II. – Le I de l’article 21 bis de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association est ainsi modifié :
1° Au 2°, les mots : « de la collectivité » sont remplacés par les mots : « du Département » ;
2° Le 3° est abrogé.
M. le président. La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi, rapporteur pour avis.
M. Thani Mohamed Soilihi, rapporteur pour avis de la commission des lois. L’article 51 vise à autoriser le Gouvernement à prendre des mesures pour étendre et adapter les dispositions du présent projet de loi aux outre-mer. En général, quand on en arrive, dans l’examen d’un texte, aux dispositions relatives aux outre-mer, c’est que l’on s’approche de la fin… (Sourires.)
Plus sérieusement, monsieur le ministre, je voudrais insister sur la situation de nos territoires lointains. Comme je l’ai indiqué lors de la discussion de l’article 1er, ce texte peut contribuer à répondre aux problématiques des outre-mer, notamment en matière d’emploi. J’espère que vous penserez à nous et à nos îles reculées lorsque viendra le temps de rédiger les ordonnances.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Monsieur Mohamed Soilihi, l’économie sociale et solidaire a de toute évidence vocation à contribuer à la croissance et au développement de nos territoires et de nos régions.
Il existe à cet égard des potentialités considérables dans les outre-mer, singulièrement à Mayotte. Comme vous l’avez rappelé hier, nous avons pris des dispositions pour que les services de l’État soient en mesure de mettre en place, aux côtés des collectivités locales, les politiques nécessaires au développement de l’économie sociale et solidaire outre-mer. Nous aurons l’occasion d’en reparler chez vous, puisque je me rendrai bientôt à Mayotte pour faire le point sur le projet de pôle territorial de coopération économique.
En tout état de cause, je m’engage à transposer rapidement les mesures du présent projet de loi aux outre-mer. Elles viendront se conjuguer aux dispositions relatives aux fonds d’amorçage que mon collègue Victorin Lurel a déjà prises. Il y a donc une volonté transversale des pouvoirs publics de faire en sorte que l’économie sociale et solidaire, en particulier, accompagne le développement et la croissance dans les outre-mer.
M. le président. Je mets aux voix l'article 51.
(L'article 51 est adopté.)
Article 52
Les entreprises bénéficiant, à la date de promulgation de la présente loi, de l’agrément « entreprise solidaire » délivré en application de l’article L. 3332-17-1 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la présente loi, sont réputées bénéficier de l’agrément « entreprises solidaires d’utilité sociale » prévu par ce même article, dans sa rédaction issue de la présente loi, pour la durée restante de validité de l’agrément lorsque celle-ci dépasse deux ans et pour une durée de deux ans dans le cas contraire. – (Adopté.)
Article 53
(Non modifié)
Les articles 11 et 12 s'appliquent aux cessions conclues trois mois au moins après la date de publication de la présente loi.
M. le président. L'amendement n° 64 rectifié, présenté par M. Anziani, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Remplacer les mots :
s’appliquent aux cessions conclues trois mois au moins après
par les mots :
entrent en vigueur à compter du premier jour du quatrième mois suivant
La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi, rapporteur pour avis.
M. Thani Mohamed Soilihi, rapporteur pour avis de la commission des lois. Cet amendement vise à simplifier et à améliorer la lisibilité des conditions d’entrée en vigueur de l’obligation d’information préalable des salariés en cas de cession de l’entreprise.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Marc Daunis, rapporteur. La commission sollicite le retrait de cet amendement. À défaut, l’avis serait défavorable.
La rédaction actuelle du texte est très claire. Les cessions survenues trois mois au moins après la publication de la loi devront avoir été précédées d’un délai d’information d’au moins deux mois. Par exemple, si la loi est publiée le 1er juin prochain, un chef d’entreprise devra procéder à une notification avant le 1er juillet s’il compte céder son entreprise le 1er septembre.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur le rapporteur pour avis, l'amendement n° 64 rectifié est-il maintenu ?
M. Thani Mohamed Soilihi, rapporteur pour avis de la commission des lois. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 64 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l'article 53.
(L'article 53 est adopté.)
Vote sur l'ensemble
M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Henri Tandonnet, pour explication de vote.
M. Henri Tandonnet. Nous voici parvenus au terme de l’examen du projet de loi relatif à l’économie sociale et solidaire. Ce débat nous a permis d’aborder un certain nombre de sujets rarement traités dans les nombreux textes qui nous sont soumis.
L’économie sociale et solidaire ouvre de nombreuses perspectives pour notre économie en général, pour la vitalité de nos territoires et pour des secteurs qui ne répondent pas aux règles classiques de l’économie de marché. C’est une formidable source d’emplois et de créations d’entreprises, que nous ne devons pas négliger, surtout ici au Sénat, chambre représentant les territoires. Nous devons prendre en compte l’économie sociale et solidaire dans l’animation de ceux-ci et la considérer comme une voie de renouveau pour notre jeunesse.
Monsieur le ministre, c’est dans cet esprit positif et bienveillant que nous avions abordé l’examen du projet de loi. Malheureusement, nous avons ensuite déchanté… Il est à souligner que la commission et le Gouvernement n’ont émis d’avis favorable sur aucune de nos propositions, et qu’aucun de nos amendements n’a été adopté. Nos collègues de l’opposition sont quasiment logés à la même enseigne. Je ne peux que regretter cet état de fait, suffisamment rare pour être souligné.
Nous avons essayé de proposer des modifications qui nous semblaient aller dans le bon sens ; nous n’avons pas été entendus. Je pense aux amendements que nous avons déposés après l’article 2, à l’article 3 ou après l’article 44.
Concernant les fameux articles 11 et 12, je dirai d’abord qu’ils auraient pu ne pas figurer dans ce texte. Pour ma part, je pense que les dispositions relatives à l’information des salariés en cas de cession d’entreprise ne relèvent pas du domaine de l’ESS : il s’agit de mesures d’organisation de l’économie générale. C’est dommage, car, sans ces articles, je suis sûr que notre vote final aurait été différent.
Sur ces deux articles, nous avons formulé des propositions mesurées visant non pas à annihiler les effets de leurs dispositifs, mais à bien adapter ces derniers à la réalité des entreprises. Là non plus, vous n’avez pas voulu nous entendre. Je le regrette, car cela transforme ce texte d’espérance économique en un simple projet de loi politique. Finalement, l’attitude de la majorité dans cette discussion a été très fermée, contrairement à ce que l’on aurait pu espérer. Les prises de position ont été fortement clivées ; c’est dommage.
En ce qui concerne la transmission des entreprises, contrairement à ce qui a été dit, nous ne sommes pas archaïques : nous faisons confiance aux salariés. Néanmoins, vous ne pouvez pas faire comme si les chefs de TPE et de PME n’avaient pas exprimé de craintes. Loin de les rassurer, la mise en œuvre de ce dispositif supplémentaire d’information préalable des salariés peut aller à l’encontre de l’effet recherché, en instaurant un climat incertain, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de l’entreprise.
En effet, dans les TPE et les PME, le dirigeant tient une place très importante. L’information selon laquelle ce dernier quitte la tête de son entreprise peut être, dans certains cas, un réel facteur de déstabilisation et fragiliser les relations de l’entreprise avec ses partenaires commerciaux et financiers, ainsi qu’avec ses concurrents. Plus la période de transition est longue, plus l’instabilité peut gagner du terrain.
Par ailleurs, nous sommes très sensibles à la question de l’insertion par l’activité économique et nous sommes favorables à la mise en place de ce que vous appelez un Social Business Act, monsieur le ministre. Toutefois, nous aimerions qu’il soit associé à un Small Business Act qui permette à toutes les PME françaises de bénéficier de parts de marchés publics. Nous craignons que les PME et TPE du secteur de l’économie classique ne se trouvent pénalisées face aux entreprises de l’ESS et aux plus grosses entreprises, plus solides et mieux armées qu’elles.
En conséquence, la quasi-totalité du groupe UDI-UC votera contre ce projet de loi.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Nous avons apprécié le climat de dialogue constructif dans lequel nous avons pu travailler, grâce à l’activité débordante de M. le ministre et des rapporteurs ! Sur bon nombre de points, nous avons pu aboutir, après des échanges fructueux, à des avancées qui contribuent à consolider et à renforcer le texte.
Nous sommes heureux que l’ensemble des forces de gauche se soient rassemblées autour de ce projet de loi. Je remercie en particulier nos collègues du RDSE, dont la contribution a permis de consolider le droit d’information préalable des salariés. C’était important. Je salue également l’apport de nos collègues du groupe CRC, visant à une meilleure prise en compte des salariés dans l’économie sociale et solidaire.
Nous éprouvons néanmoins quelques regrets : je pense au rejet de l’amendement n° 35 rectifié de notre collègue Anziani et aux conditions du contrôle de l’immatriculation, même si nous admettons que le dispositif ne doit pas être trop bureaucratique ni trop pénalisant.
Par ailleurs, nous avons ouvert des pistes d’avenir sur la question des banques coopératives.
À titre personnel, moi qui suis une défenseur acharnée de la cause de la reprise des entreprises par les salariés, j’ai apprécié le climat positif dans lequel nous avons travaillé. Ce texte sera une grande et bonne loi. Le Sénat y a beaucoup contribué par son expérience, notamment en faisant le lien avec les territoires. J’espère que ce texte sera encore amélioré à l’Assemblée nationale et ici en deuxième lecture, en en conservant l’esprit. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Robert del Picchia.
M. Robert del Picchia. Je m’exprimerai au nom du groupe UMP.
Comme mes collègues Élisabeth Lamure et Gérard César l’avaient annoncé lors de la discussion générale, deux dispositions de ce projet de loi ont retenu notre attention.
Je ferai l’impasse sur les dispositions des titres III à VIII, sur les mesures relatives à la modernisation du régime des coopératives, aux associations, aux fondations ou aux sociétés d’assurance, qui pour beaucoup d’entre elles recueillent notre adhésion.
Je ne m’arrêterai pas non plus sur l’article 9 et sur la création d’un schéma de promotion des achats publics socialement responsables, et donc sur la création des clauses dites « sociales » dans les contrats, nouvelles procédures qui nous apparaissent comme de nouvelles charges administratives, disproportionnées au regard du bénéfice escompté.
Notre critique du projet de loi portera sur deux points : la détermination du champ de l’ESS, à l’article 1er, et des conditions de l’obtention de l’agrément « entreprise solidaire », prévu à l’article 7, et, bien sûr, l’information anticipée des salariés, afin de leur permettre de formuler une offre de rachat.
Pour la détermination du champ de l’économie sociale et solidaire, vous avez fait le choix d’un dispositif restrictif, qui écarte la plupart des sociétés commerciales. Nous ne reviendrons pas sur la démonstration de nos collègues, la rédaction des articles 1er et 7 ne laissant que peu de doutes sur la place des entreprises dans l’ESS.
Devant l’entêtement du Gouvernement, nous avons essayé d’entrevoir le raisonnement qui a conduit à la rédaction de ces articles et à l’exclusion des sociétés commerciales du champ de l’ESS.
Pour beaucoup, le développement d’entreprises à but lucratif dans le secteur des services à la personne, en concurrence avec les associations, participe d’une sorte d’écrémage de la partie la plus rentable de ce marché, ce qui limite la politique de mutualisation permettant d’offrir des services de qualité à des personnes ne disposant pas de moyens suffisants.
Chacun peut comprendre ce raisonnement. Les entreprises commerciales se tournent en effet prioritairement vers les secteurs permettant les taux de rentabilité les plus élevés.
Partant de constat, je formulerai deux remarques.
Premièrement, pourquoi empêcher le développement des entreprises commerciales vers ces secteurs ? Pourquoi exclure le secteur privé de ce qui est rentable ? C’est un parti pris pour le moins étrange !
Deuxièmement, lorsque l’offre de services à la personne arrive à saturation en ce qui concerne les services les plus rentables, les entreprises commerciales se reportent alors automatiquement sur les activités offrant des taux de rentabilité inférieurs.
La question est de savoir comment permettre aujourd’hui le développement d’une offre satisfaisant la demande pour les secteurs les moins rentables. Inévitablement, l’instrument fiscal apparaît comme étant le levier le plus approprié.
C’est l’option que vous avez choisie en rendant les entreprises de l’ESS ou bénéficiant de l’agrément « entreprise solidaire » éligibles à certaines aides ou exonérations, sauf qu’ici l’application des dispositions fiscales sera déterminée non pas par la faible rentabilité de l’activité, mais par le statut juridique de l’offreur. Si ce dernier est une association, il sera aidé ; s’il s’agit d’une entreprise, vous le taxerez !
Il convient de rappeler la politique gouvernementale en matière d’aide à la personne, en insistant notamment sur son absence de cohérence.
En effet, à la suite de la mise en demeure adressée à la France par l’Europe, vous avez fait passer le taux de TVA pour certains services à la personne de 7 % à 19,6 %, seulement quelques mois après un premier relèvement de la TVA de 5,5 % à 7 %, et le Gouvernement a publié, le 19 juin 2013, un décret exonérant les associations sans but lucratif du secteur de cette hausse de taux. Cela commence à faire beaucoup pour les entreprises commerciales ! Même si nous admettons que les structures non commerciales soient aidées, tout cela nous semble relever du dogmatisme.
Nous sommes donc bien loin de Lionel Jospin, qui avait justement considéré que, à activité équivalente développée dans des conditions similaires, les associations du secteur non lucratif et les entreprises commerciales devaient être soumises aux mêmes impositions.
En ce qui concerne maintenant l’information prioritaire des salariés afin de leur accorder une situation privilégiée dans les négociations, peut-être facilitera-t-elle, dans certains cas, la transmission de l’entreprise aux salariés sous forme de SCOP. Mais ce combat pour quelques symboles nous semble être mené au détriment de l’intérêt bien compris de l’immense majorité des propriétaires d’entreprise et des salariés.
L’information des salariés existe déjà dans les entreprises de plus de cinquante salariés. Dans les entreprises plus petites, la réalité des relations entre propriétaires et salariés conduit inévitablement à la transmission de l’information. Une fois de plus, nous allons rendre la loi encore un peu plus verbeuse, comme l’a souligné hier Gérard Larcher.
Quant au risque de divulgation de cette information, vous ne pouvez faire semblant de l’ignorer. Vous semblez ne pas croire au danger qu’il représente pour la conduite des négociations. Comment pouvez-vous imaginer que les mouvements sociaux déclenchés préventivement ne retarderont pas les négociations, lorsqu’ils ne les arrêteront pas ? Comment ne pas penser aux fournisseurs et aux clients dont le sort est lié à celui de ces entreprises ? Enfin, pourquoi permettre aux salariés de présenter une offre au moment même où le prix de vente est le plus élevé ?
Pour ces raisons, nous nous opposons à l’information préalable des salariés dans les conditions énoncées par le Gouvernement. Cette disposition, comme la plupart de celles qu’il nous a été donné d’examiner, témoigne que le Gouvernement cherche à se rassurer, sinon à se faire plaisir…
Pour conclure, ce texte constitue tout simplement, à nos yeux, une attaque en règle contre le monde de l’entreprise et contre l’idée même d’initiative privée. (Protestations sur les travées du groupe socialiste et au banc des commissions.) Ce projet de loi ne servira qu’à contenter certains ego. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Je voudrais tout d’abord saluer l’esprit constructif qui a prévalu, au cours de la préparation de ce texte, dans nos échanges tant avec le ministère qu’avec le rapporteur. Le fait est assez rare pour être souligné.
Je me félicite de l’adoption de nombre de nos amendements, portant notamment sur la gouvernance démocratique, l’augmentation des réserves statutaires, l’instauration de la parité au sein du Conseil supérieur de l’ESS, la participation des salariés, la prise en compte des primes dans les écarts de rémunération, la limitation de la recherche du lucre au sein du secteur de l’ESS…
A contrario, la suppression de l’article 2 bis nous a bien sûr quelque peu déçus. Envolés les objectifs d’exemplarité sociale et de parité dans les instances décisionnelles, ainsi que l’information des salariés sur le contenu de la déclaration de principe ! Néanmoins, nous ne doutons pas que ces valeurs sorties par la porte reviendront par la fenêtre au cours des débats à l’Assemblée nationale ! Nous restons confiants.
Nous voterons ce texte pour deux raisons.
Premièrement, l’économie sociale et solidaire fait partie des fondamentaux du parti auquel j’appartiens depuis toujours. Elle permet la participation des salariés à la vie de « leur » entreprise. L’emploi de cet adjectif possessif se justifie d’ailleurs que l’entreprise leur appartienne ou non, car les salariés qui travaillent depuis dix, vingt ou trente ans, voire plus, dans une entreprise considèrent qu’elle est aussi leur. On le voit bien, notamment, lorsqu’ils sont licenciés, souvent après avoir consenti des efforts particuliers pour sauver l’entreprise.
Deuxièmement, il me semble qu’un vote positif du Sénat donnera plus de poids au texte avant son examen à l’Assemblée nationale. Je ne doute pas que les députés contribueront également à améliorer et à renforcer ce projet de loi porteur d’avenir pour l’ensemble des salariés. Cela n’ôtera rien aux mérites de beaucoup de patrons, qu’ils dirigent une PME ou une grande entreprise.
M. le président. La parole est à M. Raymond Vall.
M. Raymond Vall. Bien que n’ayant pu participer à la totalité des débats sur ce projet de loi relatif à l’économie sociale et solidaire, je suis convaincu de son importance. Le rapporteur a tout à l'heure qualifié à bon droit ce texte d’« historique ». Il est d’autant plus bienvenu que, dans la période très difficile que nous traversons, l’économie sociale et solidaire a toute sa place.
Le groupe RDSE a fortement contribué à améliorer ce projet de loi. Je pense en particulier aux amendements défendus par Jacques Mézard aux articles 11 et 12, qui ont reçu un soutien quasiment unanime et visaient à sécuriser le dispositif d’information des salariés en amont de la cession de l’entreprise. Ces mesures ont pour objectif le maintien de l’activité et de l’emploi : c'est pourquoi nous y sommes très attachés. Elles mériteront cependant, comme nous l’avons souligné, d’être complétées par des mesures de formation et d’accompagnement des salariés, afin de les mettre en situation de pouvoir reprendre leur entreprise.
Je me réjouis également de l’adoption de notre amendement sur les titres associatifs, qui permettra d’améliorer le financement des associations, tout en évitant de possibles dérives ou détournements de ce dispositif.
Enfin, je viens de défendre un amendement qui constitue une innovation majeure, en proposant une définition légale du commerce équitable. Je suis très heureux qu’il ait été adopté, même s’il nécessitera sans doute, au cours de la navette parlementaire, des précisions et des améliorations.
Ce texte est très attendu par les acteurs de l’économie sociale et solidaire, qu’il s’agisse des « familles traditionnelles » de ce secteur que sont les coopératives, les associations, les mutuelles, les fondations, ou des nouveaux acteurs, à savoir les entreprises de l’économie sociale et solidaire, sociétés commerciales qui respectent les conditions définies à l’article 1er du présent projet de loi. Cet article comporte une définition inclusive de l’économie sociale et solidaire qui doit permettre son développement. Nous avons cherché, par nos amendements, à en préciser et à en sécuriser la rédaction, mais nous sommes, dans l’ensemble, très satisfaits de la logique qui le sous-tend.
Je tiens à remercier l’ensemble de nos collègues pour ce débat à la fois constructif et instructif, ainsi que le rapporteur et les trois rapporteurs pour avis, qui ont effectué un excellent travail. Je veux aussi, à mon tour, remercier le ministre de son écoute et de ses réponses à nos interrogations et à nos préoccupations.
Confortés par l’excellent travail qui a été réalisé au cours de ces deux jours de débat et convaincus de l’importance des avancées que représentent les dispositions que nous avons adoptées, l’ensemble des membres du RDSE voteront ce projet de loi.
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé.
M. Joël Labbé. Ma collègue Aline Archimbaud l’a indiqué hier, lors de la discussion générale – je ne pouvais être présent, en raison de la tourmente qui affecte actuellement le climat breton ! –, le groupe écologiste est très satisfait de ce texte, qui marque une grande avancée pour le secteur de l’économie sociale et solidaire. Cette loi est attendue par les acteurs de terrain depuis de nombreuses années.
Les débats ont été riches et fructueux. Je tiens à saluer une nouvelle fois l’ouverture au dialogue et l’excellent travail du rapporteur, Marc Daunis. Il est fort agréable de pouvoir travailler dans de telles conditions ! Je plaisantais ce matin au sujet du mauvais sort réservé à mes amendements, mais, en fait, la commission avait intégré un grand nombre de nos propositions en amont.
Nous regrettons, nous aussi, la disparition de l’article 2 bis, qui avait pour objet de mettre en place une déclaration de principe pour l’économie sociale et solidaire.
Nous sommes néanmoins très satisfaits du texte final, notamment de l’adoption des articles 11 et 12, instaurant un droit d’information des salariés.
Enfin, j’ai également apprécié les pépites que représentent les dispositions relatives au commerce équitable, qui trouve enfin une définition dans la loi.
Le groupe écologiste votera ce texte avec enthousiasme !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l’ensemble du projet de loi dans le texte de la commission, modifié.
(Le projet de loi est adopté.) – (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.