M. Jean Boyer. Au terme de cette discussion, certes fort intéressante, certains points importants me semblent cependant avoir été omis. En effet, pour moi, parler d’indépendance implique d’évoquer aussi les moyens financiers, la contribution à l’audiovisuel public, la décentralisation, le contenu… sans oublier la place occupée par le Sénat ; n’oublions pas que tout le monde ne peut bénéficier de Public Sénat !
Oui, un élu est un généraliste ! Si mon sentiment est partagé par de nombreux compatriotes, c’est sans doute parce qu’il est dans le vrai.
Mon impression, madame la ministre, est que les médias détiennent aujourd’hui un pouvoir considérable au détriment des élus. Sur certaines chaînes, l’information consiste en une recherche de scoops qui se focalisent malheureusement sur le désordre, la violence, les révoltes ou les guerres dans le monde. Ce n’est plus de l’information ; ce sont des répétitions successives qui imprègnent certainement les plus fragiles, et ce dans tous les milieux.
Oui, le projet de loi évoque la forme, mais il n’offre rien sur le fond.
En 2013, les élus ont-ils encore le pouvoir ? Je crois très sincèrement que l’on peut répondre par la négative à cette question. En effet, celui-ci est trop souvent dénaturé par certains médias – non par tous, mais par certains d’entre eux qui, en recherchant le sensationnel, font oublier l’essentiel. Ce projet de loi me donne l’occasion d’adresser parallèlement ce message.
Reconnaissons ensemble, chers collègues, que ce texte est proche d’un règlement intérieur : il est architectural, mais ignore beaucoup trop le but recherché, à savoir une information plus objective, plus saine, plus constructive.
Oui, l’information porte souvent sur le négatif, les désordres du monde, mais très rarement sur la richesse de notre France, celle d’en haut comme celle d’en bas. En haut, on radiographie les élus : bientôt on va nous demander la pointure de nos chaussures ou notre tour de col ! On nous oppose même à l’intérieur de nos familles politiques, car on cherche davantage à nous diviser qu’à nous rassembler.
Mme Catherine Génisson. C’est vrai !
M. Jean Boyer. Si j’ouvre une parenthèse avant de conclure, monsieur le président, c’est aussi pour dire qu’il me semble que nous, sénateurs, qui siégeons pourtant dans une assemblée de la République, jouons en Ligue 2 par rapport à l’Assemblée nationale ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Jean-Pierre Plancade. On ne peut pas dire cela !
M. Jean Boyer. Conclure, c’est dire aussi que, sans la solidarité des médias, il ne pourra jamais exister une entente nationale véritable, utile à l’esprit d’une unité nationale, dont l’essentiel serait pris en compte. Je suis certain que le pouvoir médiatique pourrait contribuer à bâtir une société plus proche de celle que nous souhaitons tous finalement, car ce qui nous divise parfois devrait nous rassembler dans les moments difficiles.
Compte tenu de ces observations, je m’abstiendrai sur ce projet de loi.
M. le président. La parole est à M. Jacques Legendre.
M. Jacques Legendre. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, madame la présidente de la commission, mes chers collègues, nous voici au terme de la discussion du projet de loi qui, quand il sera voté, partira directement en CMP. Ainsi donc, des dispositions qui ne sont pas anecdotiques auront été adoptées par notre Haute Assemblée et n’auront pas été examinées par l’Assemblée nationale.
L’aspect technique de ces dispositions législatives ne doit pas faire oublier l’importance qu’elles revêtent pour les acteurs de l’audiovisuel. Ainsi, soumettre les SMAD nationaux ou les sociétés de production à de nouvelles contraintes n’est pas neutre pour ce secteur. Je cite plus particulièrement les SMAD car, nous l’avons dit, ils font l’objet d’une consultation en ce moment même. Était-il si urgent de légiférer que nous n’attendions pas les résultats de cette consultation ?
De plus, madame la ministre, votre majorité semble oublier que les mutations du secteur audiovisuel doivent être étudiées dans leur ensemble. La loi annoncée pour l’année prochaine ne devait-elle pas remplir cet objectif ?
Je regrette donc le caractère dispersé de ce projet de loi et l’impréparation qui l’a entouré.
Fort heureusement, la question du démantèlement de la Hadopi, qui n’avait pas grand-chose à voir avec ce texte, n’aura finalement pas été abordée, malgré les auditions précoces sur ce sujet. Souhaitons que le débat soit engagé sur cette question essentielle pour la protection de la création, sans jamais oublier qu’ici, au Sénat, nous avons toujours voulu protéger la création et les droits des créateurs !
Notre groupe regrette également le discours politique qui accompagne ce texte dédié à l’indépendance de l’audiovisuel public. Comme nous l’avons souligné lors des débats, ainsi que nos collègues centristes d’ailleurs, quel décalage entre l’objectif annoncé et les dispositions proposées !
Vous prétendez accomplir une révolution en termes d’indépendance. Vous rendez la nomination des présidents de chaîne aux membres du CSA, mais vous trouvez tout à fait naturel que le président du CSA soit, lui, nommé par le Président de la République ! Je me souviens de ce travail que nous avions fait en commun, monsieur le rapporteur, vous et moi, qui montrait qu’il pouvait y avoir dans l’esprit des présidents de chaîne, et surtout de leurs collaborateurs, une certaine suspicion contre des personnes nommées directement par le président de la République… Or, les mêmes causes ayant les mêmes effets, ce qui vaut dans un cas ne peut pas être nié pour l’autre.
Quant à l’avis conforme aux trois cinquièmes des commissions parlementaires pour la désignation des membres du CSA, la mesure, d’apparence technique, ne règle cependant en rien le problème d’un éventuel blocage, les personnalités à désigner étant proposées par la majorité. Quelle sera alors la solution ? Vous ne le dites pas dans ce projet de loi.
Pas de solution miracle donc, ni pour garantir l’indépendance des membres du CSA, ni pour garantir celle des présidents des sociétés de l’audiovisuel public.
L’indépendance dans ce domaine est-elle alors préservée ? Non. Reconnaissez que, depuis l’avènement de l’audiovisuel public, l’indépendance des présidents de chaîne n’est due qu’à la force de leurs convictions et que ce n’est pas demain qu’ils seront nommés de façon indépendante.
Aucune majorité ne peut prétendre avoir eu une politique totalement vertueuse à cet égard. Malheureusement, les nominations ont toujours été soumises au jeu de l’alternance, et ce ne sont pas les nominations récentes, avec la mise à l’écart de personnalités reconnues pour leurs qualités professionnelles, qui nous démontreront le contraire.
Quant à nous prémunir contre le risque de la soudaine folie d’un président de chaîne – il s’agirait alors de remplacer la personne dans l’urgence -, vous me permettrez de vous dire, madame la ministre, sans esprit caustique, surtout à une heure du matin, que le prétexte est bien mince. Au demeurant, nous ne souhaitons pas à nos présidents de chaîne un destin à la Deschanel !
Vraiment, ce projet de loi, c’est, pour nous, beaucoup de vocabulaire pour peu de résultat !
Pour l’ensemble de ces raisons, le groupe UMP votera contre ce texte.
M. le président. La parole est à Mme Françoise Cartron.
Mme Françoise Cartron. M. Legendre, en linguiste qu’il est, m’étonne par la formulation qu’il a choisie : beaucoup de vocabulaire pour peu de résultat ? Vous en conviendrez, monsieur Legendre, les mots ont un sens et une importance. Dans notre langue française, il est précisément important de bien insister sur les symboles portés par les mots.
Dans ce projet de loi, les mots « indépendance » et « transparence » sont porteurs de sens pour l’audiovisuel public, mais, au-delà, pour notre démocratie. Cette loi s’inscrit pleinement dans notre projet, celui de faire advenir une démocratie adulte qui n’a pas peur de partager les pouvoirs, mais une démocratie apaisée, aussi.
Le texte sur lequel nous allons nous prononcer dans quelques instants est une loi forte pour les valeurs que nous portons, et une loi à l’élaboration de laquelle le Parlement aura pris toute sa part. Même si nos délibérations ont pu paraître rapides à certains, les nombreux amendements que nous avons défendus donnent la mesure de l’engagement des sénateurs dans l’aboutissement de cette loi.
C’est aussi un texte d’espérance pour les parlementaires, car nous serons pleinement associés, au travers tant des nominations que des groupes de travail évoqués par Mme la ministre, à l’accompagnement et à la progression de cet audiovisuel public, dans un monde en mutation qui est toujours plus complexe.
Le groupe socialiste va voter avec enthousiasme ce projet de loi : nous le voyons, le changement, c’est maintenant ! (Sourires et applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – Mme Cécile Cukierman s’exclame.)
M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.
Mme Catherine Morin-Desailly. Ce projet de loi, qui consacre l’évolution des missions et des compétences du CSA, comporte trois points positifs : la désignation des membres du CSA après avis conforme d’au moins trois cinquièmes des suffrages exprimés au sein des commissions chargées des affaires culturelles de l’Assemblée nationale et du Sénat ; la réduction du nombre des membres désignés par le Président de la République au sein du CSA, de trois à un, à savoir le président du CSA lui-même, ainsi que la réduction du nombre de conseillers.
En outre, toutes ces mesures s’inscrivent dans une recherche d’économie des deniers publics, mais aussi d’efficacité, avec la création d’une fonction indépendante d’enquêteur au sein du CSA.
J’émettrai une réserve : les assemblées ne sont plus consultées pour la désignation des présidents des sociétés publiques de l’audiovisuel.
Si donc nous reconnaissons quelques progrès introduits par ce texte, qui s’inscrit, rappelons-le, dans des logiques institutionnelles et politiques actuelles, nous estimons cependant qu’il aurait fallu aller plus loin dans le sens de l’indépendance, de la responsabilité et de la légitimité des responsables de l’audiovisuel tant au CSA qu’à la tête des sociétés publiques. Tel était le sens des amendements que nous avons voulu vous faire partager. J’avais expliqué d’emblée, lors de la discussion générale, que notre vote dépendrait du sort réservé à ces amendements. Ils n’ont pas eu le succès escompté, mais ils ont eu en tout cas le mérite d’ouvrir le débat.
En tout état de cause, nous nous abstiendrons sur ce texte, tout en souhaitant qu’un vrai travail de fond puisse rapidement être entamé sur l’ensemble des enjeux liés à la révolution et à la convergence numériques, ainsi qu’aux transformations profondes qui sont en cours, afin de répondre rapidement aux différentes questions à ce sujet. Nous sommes déçus, nous l’avons dit lors de la discussion générale, car les réponses tardent à venir. Nous espérions davantage d’un rendez-vous tel que celui de ce soir.
M. le président. La parole est à M. André Gattolin.
M. André Gattolin. Mon propos sera bref et synthétique.
Le groupe écologiste est particulièrement satisfait de ce texte et de son évolution ; il se réjouit que tous les amendements adoptés tendent vers plus de responsabilité et d’indépendance de l’audiovisuel public en France.
De nombreux apports ont effectivement été retenus, et nous ne pouvons que féliciter Mme la ministre de l’état d’esprit qui a présidé à nos débats et du dialogue permanent qui a prévalu en vue d’une plus grande indépendance. Sans parler de révolution, un mouvement tranquille s’amorce afin de couper le cordon ombilical qui n’a cessé, depuis la Seconde Guerre mondiale, en dépit de quelques progrès constatés au fil du temps, comme je l’ai rappelé au cours de la discussion générale, d’unir d’un lien étroit pouvoir exécutif et audiovisuel.
Tous les débats d’après-guerre portaient sur cette question. C’est la raison pour laquelle, mais on ne s’en est pas assez rendu compte, il faut voir dans le fait que le Président de la République ne nomme plus qu’un seul membre - au lieu de trois - une véritable révolution. Dans un système de quinquennat avec une majorité parlementaire, en tout cas à l’Assemblée nationale, dont la sensibilité correspond à celle du Président de la République, cela fait à peine quatre voix.
En outre, avec un renouvellement progressif par tiers tous les deux ans, ce ne serait plus un lien direct entre le président nouvellement élu et une majorité qui s’imposerait au CSA. Nous le verrons à la pratique, cette évolution révolutionnera les rapports que l’audiovisuel public, et surtout l’autorité de régulation censée assurer son contrôle et participer à la gestion du secteur, instaurera au fil du temps avec l’exécutif. (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste et du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Pierre Laurent.
M. Pierre Laurent. Je formulerai quelques brèves remarques pour expliquer le sens de notre vote.
Ce vote positif sera motivé principalement par la volonté de saluer le changement du mode de nomination des PDG de l’audiovisuel public. Nous ne sommes probablement pas au bout du chemin vers l’indépendance. Évitons les envolées trop enthousiastes sur ce point, mais c’est un progrès qu’il faut saluer.
Pour le reste, nous avons pu porter ici des débats auxquels nous tenons et qui nous paraissent essentiels pour progresser réellement vers l’indépendance de l’audiovisuel public. Mais, même s’ils ont permis un dialogue souvent intéressant, nous regrettons qu’ils n’aient pas été traduits pour le moment par des avancées concrètes. Notre vote sera donc non un vote de satisfaction, mais un vote d’exigence pour que ces débats se poursuivent et se concrétisent. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC, du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur les travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Plancade.
M. Jean-Pierre Plancade. Ce texte est une vraie avancée : le matériau était bon, et le texte est encore meilleur. Le Sénat dans son ensemble y aura contribué, car, en réalité, ceux qui vont s’abstenir ou qui vont voter contre, ou ceux qui ont critiqué le texte ont tout de même participé à son examen, débattu sur les points essentiels et présenté des amendements qui ont été adoptés sans aucun état d’âme.
Pour le groupe du RDSE, ce projet de loi constitue une réelle avancée démocratique, un texte d’apaisement, je l’ai dit dans mon intervention liminaire. C’est la première pierre fondatrice d’un élan qui doit aller plus loin dans la transformation nécessaire de l’audiovisuel public, et c’est la raison pour laquelle nous le voterons, nous aussi, sans aucun état d’âme et avec beaucoup de conviction. (Applaudissements sur les travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe écologiste, du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi dans le texte de la commission, modifié.
(Le projet de loi est adopté.) – (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur les travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Marie-Christine Blandin, présidente de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication. Je voudrais tout d’abord remercier M. le rapporteur et tous nos collaborateurs pour le travail accompli.
Nous étions face à un texte qui n’avait pas vocation à tout résoudre, évidemment, mais qui était et reste inédit, inédit non par la procédure choisie, car l’engagement de la procédure accélérée est bien trop fréquent, nous sommes tous d’accord pour le constater et le déplorer, mais inédit par le nombre des auditions du rapporteur, ouvertes à tous les membres de la commission. C’est un acte démocratique qu’il faut tout de même souligner.
Inédit, ce texte l’est aussi parce que chaque groupe a été entendu sur un ou plusieurs points et a contribué à l’enrichissement du texte.
Inédit encore, contrairement à ce que nous avons entendu, ce texte l’est par sa grande anticipation : il y a plus d’un an que la commission a décidé de fouiller le sujet des droits entre les chaînes et les producteurs.
Ce travail anticipé, qui a pu paraître décalé à un moment donné, revient dans l’actualité et rend le Sénat précurseur. Nous pouvons en être fiers. Merci, madame la ministre, de nous avoir accompagnés sur ce sujet ; il est à risque, mais nous l’assumons ! (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste, du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
16
Indépendance de l'audiovisuel public
Suite de la discussion en procédure accélérée et adoption d’un projet de loi organique dans le texte de la commission
M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi organique, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à l'indépendance de l'audiovisuel public.
Nous en sommes parvenus à la discussion des articles du texte de la commission.
Article 1er
(Non modifié)
La loi organique n° 2009-257 du 5 mars 2009 relative à la nomination des présidents des sociétés France Télévisions et Radio France et de la société en charge de l’audiovisuel extérieur de la France est abrogée.
M. le président. Je mets aux voix l'article 1er.
(L'article 1er est adopté.)
Article 2
(Non modifié)
Les trente et unième, quarante-troisième et quarante-sixième lignes du tableau annexé à la loi organique n° 2010-837 du 23 juillet 2010 relative à l’application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution sont supprimées. – (Adopté.)
Article 3 (nouveau)
Après la trente-troisième ligne du tableau annexé à la loi organique n° 2010-837 du 23 juillet 2010 relative à l’application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution, il est ainsi inséré une ligne ainsi rédigée :
Institut national de l’audiovisuel |
Président |
– (Adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi organique dans le texte de la commission.
En application de l’article 59 du règlement, le scrutin public est de droit.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 2 :
Nombre de votants | 346 |
Nombre de suffrages exprimés | 311 |
Pour l’adoption | 174 |
Contre | 137 |
Le Sénat a adopté le projet de loi organique. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur les travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. David Assouline, rapporteur de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, tout d’abord, à l’instar de Mme la présidente de la commission, je tiens à saluer ces deux projets de loi qui, comme tous les textes examinés par la commission de la culture, ont été enrichis par la Haute Assemblée.
On a pu prétendre qu’en doublant le nombre des articles du projet de loi ordinaire, l’Assemblée nationale avait épuisé tous les sujets, et que le Sénat ne ferait dès lors qu’avaliser sa rédaction. Tel n’a pas été le cas : nous avons modifié ce texte, via des amendements provenant de sénateurs siégeant sur l’ensemble de ces travées. J’en suis très satisfait et je remercie toutes celles et tous ceux qui ont contribué à ce travail.
Si je soutiens le Gouvernement, je n’oublie pas que je suis un parlementaire et, à ce titre, je regrette moi aussi que nous ayons dû examiner ces textes dans des conditions trop rapides à mon goût.
Pour aboutir aujourd’hui, il nous a fallu mener les auditions très rapidement, avant même l’ouverture de la session extraordinaire. Toutefois, vous le savez, cette réforme était attendue depuis longtemps, et on nous aurait reproché de retarder encore son adoption si nous n’avions pas fait diligence.
Ce texte consacre la volonté de tous, malgré quelques controverses – elles n’auront plus lieu d’être demain – de frapper l’audiovisuel public du sceau de l’indépendance. Jusqu’à présent, peut-être se sentait-on obligé d’accepter le système de nomination par le Président de la République. Reste que cette procédure n’était pas saine et qu’elle envoyait un mauvais signal, tant aux téléspectateurs qu’aux professionnels de l’audiovisuel. Nous sommes revenus sur cette disposition, et le nouveau dispositif est bon.
En outre, le Sénat a apporté sa contribution dans divers domaines très importants.
Au sujet de la convergence numérique, nous avons ouvert une nouvelle perspective concernant les SMAD. Ce n’est qu’un début, mais nous avons lancé le mouvement. Si nous souhaitons que le CSA soit rénové, c’est y compris dans ses propres compétences, dans ses propres champs d’action. À cet égard, la convergence numérique manquait cruellement.
Nous avons par ailleurs avancé en matière de parité : désormais, les nominations assurées par le CSA au sein de divers conseils d’administration respecteront ce principe. Par les amendements de MM. Pierre Laurent et André Gattolin, nous avons de surcroît permis aux téléspectateurs d’« entrer » dans ces conseils d’administration, par l’intermédiaire des associations de consommateurs. Ces dispositions constituent autant d’innovations.
Sur les deux sujets lourds et controversés dont nous avions en quelque sorte hérité, nous avons adopté une nouvelle rédaction.
Premièrement, concernant le passage des chaînes de la TNT payante à la TNT gratuite, notre réécriture permet de sécuriser, de borner et de prévenir. Nous pourrons continuer à réfléchir dans la perspective de la commission mixte paritaire. Sans remettre en cause ce nouveau droit introduit par l’Assemblée nationale, nous avons, à mon sens, apporté les garanties nécessaires pour qu’il soit aussi encadré que possible.
Deuxièmement, sur les relations entre les producteurs et les chaînes de télévision, nous avons travaillé tous ensemble. Certains souhaitaient aller plus vite que d’autres, mais il fallait avant tout avancer en préservant l’équilibre, en maintenant le « donnant, donnant » dont j’ai parlé. Cette logique est au fondement de la doctrine que j’ai tenu à défendre, sur ce sujet auquel je suis fortement attaché. Le sous-amendement et l’amendement adoptés à ce titre sont de nature, je suppose, à satisfaire tout le monde.
Cette disposition ne préjuge pas des conclusions de la mission Vallet, qui seront rendues à la fin du mois de novembre. Nous aurons encore à avancer, mais, nous avons d’ores et déjà envoyé un signal. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, c’est bien du Sénat qu’est parti ce débat et c’est du Sénat qu’est adressé ce signal ! (M. Jean-Pierre Plancade acquiesce.)
Je ne peux pas citer tous les apports de la Haute Assemblée. Quoi qu’il en soit, je remercie sincèrement Mme la ministre de sa qualité d’écoute.
Mme Marie-Christine Blandin, présidente de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication. Oh oui !
M. David Assouline, rapporteur. En effet, son esprit on ne peut plus collaboratif a facilité ce travail, en amont de l’examen en séance publique comme au cours des débats de ce jour.
Si nous avons pu aller au fond des problèmes, apporter notre contribution et achever dès ce soir l’examen de cette réforme, c’est grâce à l’efficacité des sénateurs et, je le répète, à la collaboration de Mme la ministre. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur les travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Aurélie Filippetti, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je suis heureuse de ce travail que nous avons accompli ensemble, eu égard à sa hauteur de vues, aux échanges que nous lui avons consacrés et à l’enrichissement, très fort et très net, à mettre au compte du Sénat. L’Assemblée nationale avait pris sa part mais, aujourd’hui, nous avons avancé d’un pas supplémentaire.
Nous avons évidemment progressé dans la modernisation de notre système de régulation de l’audiovisuel. Nous avons également avancé sur la convergence numérique, avec les SMAD, et dans la définition d’un paysage audiovisuel plus sécurisé, plus stable, plus moderne et plus adapté aux grands enjeux économiques de notre temps. En effet, la constante évolution de ce domaine se révèle très déstabilisante pour certains acteurs.
Nous avons avancé sans tabou, avec pragmatisme mais en sachant où nous voulions aller.
Au demeurant, nous en sommes conscients, certains débats vont se poursuivre et déboucheront sur d’autres supports législatifs.
Contrairement à ce que j’ai pu lire ou entendre ici ou là, le texte dont nous venons d’achever l’examen n’est pas une « petite » loi audiovisuelle. Certes, pour tous les sujets techniques ou de régulation que nous avons évoqués, un second temps législatif viendra. Mais, à mon sens, le texte qui restera, ce sera cette loi renforçant l’indépendance de l’audiovisuel ! (M. Jacques Legendre manifeste sa circonspection.) Je songe, bien sûr, au mode de nomination des présidents des entreprises de l’audiovisuel public. Du reste, personne sur ces travées ne souhaitait conserver l’ancien système. Chacun a reconnu qu’il fallait revenir sur un mode de nomination qui n’était pas juste.
Nous avons franchi une autre étape, accompli un autre progrès, qui constitue une première : la majorité et l’opposition seront associées, dans une relation de responsabilité, à la nomination des futurs membres du CSA. Cette grande réforme suscitera une profonde évolution, tant des mentalités que du fonctionnement même du CSA : nous avons modernisé les attributions du Conseil supérieur de l’audiovisuel et ses compétences, mais il fallait également moderniser le mode de nomination de ses membres !
Je remercie chacune et chacun des sénateurs, quel que soit leur groupe, d’avoir participé à ce débat et d’avoir, par leurs amendements, enrichi le présent texte. Je suis heureuse d’avoir pu satisfaire un certain nombre de propositions, car elles allaient dans le bon sens. Quant aux dispositions qui, à ce jour, n’ont pas encore pu trouver de traduction législative, j’invite leurs auteurs à poursuivre le dialogue et la concertation, en vue de compléter le beau travail que nous avons engagé aujourd’hui ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur les travées du RDSE.)