M. Michel Sapin, ministre. … en prenant l’accord national interprofessionnel comme le support de tous les sujets, ceux qui nous occupent aujourd'hui et ceux dont nous débattrons dans les mois à venir (Sourires.), je puis vous indiquer que les régions sont des parties prenantes décisives.
Je suis actuellement en train de travailler sur le dispositif qui sera présenté. Outre les dispositions législatives nécessaires pour renforcer, conforter et amplifier les compétences des régions dans ces domaines, nous engagerons une négociation entre les partenaires sociaux – c’est absolument nécessaire, compte tenu des sommes en jeu – et une concertation entre l’État, les régions et les partenaires sociaux pour associer dans les meilleures conditions possibles les régions.
Mme la présidente. La parole est à Mme Isabelle Pasquet, pour explication de vote.
Mme Isabelle Pasquet. Certes, on anticipe sur les débats à venir, monsieur le ministre, mais ce projet de loi, qui est relatif à la sécurisation de l’emploi, appelle cette réflexion.
Aujourd’hui, nous mesurons le rôle important que les régions peuvent jouer dans l’accès à la formation professionnelle des salariés privés d’emploi. Il nous paraît important que la région, compétente en ce domaine, participe de façon active au comité assurant le suivi de l’emploi des ressources du Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels, et ce même si elle ne participe pas à son financement.
L’acte III de la décentralisation a été évoqué. Peut-être, pourriez-vous nous faire part, monsieur le ministre, des premiers éléments de réflexion du Gouvernement sur le sujet qui nous occupe ce soir ?
M. Claude Jeannerot, rapporteur. Il n’est pas compétent ! (Sourires.)
Mme Isabelle Pasquet. Depuis de nombreuses années, les grands enjeux tels que la gestion locale, territoriale et nationale, paritaire et financière de la formation, ainsi que la place et le rôle de l’État, se sont trouvés propulsés au cœur de l’activité revendicative. Il est apparu nécessaire d’œuvrer en faveur de l’implication pleine et entière, individuelle et collective, des salariés-citoyens dans un système de formation-qualification-certification qui in fine leur appartienne réellement. Celui-ci devrait être émancipé de la tutelle économique et idéologique du patronat ainsi que de la primauté de l’offre marchande, ce qui nous a conduits à déposer de nombreux amendements visant à renforcer, par exemple, la portabilité du DIF.
Pour notre part, nous souhaitons que ce droit renforcé et rénové puisse s’appuyer sur un service public alliant sécurité et liberté, proximité et garantie du cadre juridique national, territorialité et démocratie.
Même si le financement demeure national, il faut permettre aux territoires et à leurs représentants d’être impliqués. C’est la notion de gestion prévisionnelle et territoriale des emplois et des compétences.
Dès lors que les collectivités locales supportent une partie des dépenses liées aux pertes d’emploi, elles doivent pouvoir, comme d’autres acteurs, se placer dans une situation de prévention, et non de réaction.
Cette intervention, sur ressources publiques du budget de l’État et de celui des régions, se traduit sous la forme de divers dispositifs. C’est la raison pour laquelle nous souhaitons voir les régions intégrer les comités assurant le suivi de l’emploi des ressources du fonds et en évaluant l’impact, afin qu’elles puissent collaborer avec tous les niveaux concernés.
À terme, nous souhaiterions assister au développement d’un secteur public de la formation, du contrôle et du soutien des associations et entreprises de formation avec la participation des élus régionaux, des syndicats de salariés et des représentants du patronat.
6
Retrait de l’engagement de la procédure accélérée pour l’examen d’un projet de loi
Mme la présidente. Par courrier en date de ce jour, M. le Premier ministre a confirmé à M. le président du Sénat, conformément à la position prise par le ministre chargé des relations avec le Parlement au cours de la dernière réunion de la conférence des présidents, que le Gouvernement renonçait à engager la procédure accélérée pour l’examen du projet de loi relatif à l’élection des sénateurs.
Mme Nathalie Goulet. Ah !
Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-huit heures cinquante-cinq, est reprise à vingt et une heures cinq, sous la présidence de M. Didier Guillaume.)
PRÉSIDENCE DE M. Didier Guillaume
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
7
Sécurisation de l'emploi
Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à la sécurisation de l’emploi.
Nous poursuivons la discussion des articles.
Chapitre Ier (suite)
Créer de nouveaux droits pour les salariés
Section 1 (suite)
De nouveaux droits individuels pour la sécurisation des parcours
Article 2 (suite)
M. le président. Dans la suite de la discussion de l’article 2, nous en sommes parvenus à l'amendement n° 60.
Cet amendement, présenté par M. Watrin, Mmes David, Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – L’article L. 6351-1 A du code du travail est ainsi rédigé :
« Art. L. 6351-1 A. – L’employeur choisit, après consultation des institutions représentatives du personnel visées aux articles L. 2312-1 et L. 2312-4 et, à défaut, aux institutions représentatives du personnel au niveau de la branche, l’organisme de formation, enregistré conformément aux dispositions de la section 2 ou en cours d’enregistrement, auquel il confie la formation de ses salariés. »
La parole est à Mme Isabelle Pasquet.
Mme Isabelle Pasquet. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la rédaction actuelle de l’article L. 6351-1 A du code du code du travail est limpide : l’employeur est le seul décideur lorsqu’il s’agit de choisir l’organisme de formation habilité à mettre en œuvre les actions de formation du personnel de l’entreprise. Cette procédure est contradictoire avec la démarche, qualifiée de démocratie sociale et de dialogue social, qui anime depuis quelque temps les politiques nationales en matière de droit du travail.
Pour tout dire, il serait contradictoire d’adopter un projet de loi reprenant les principales clauses d’un accord national interprofessionnel tout en laissant subsister, au cœur de notre législation sociale, une forme de pouvoir quasi monarchique : le pouvoir du chef d’entreprise en matière de formation professionnelle.
Plus précisément, l’article L. 6351-1 A du code du code du travail prévoit que « l’employeur est libre de choisir l’organisme de formation, enregistré conformément aux dispositions de la section 2 ou en cours d’enregistrement, auquel il confie la formation de ses salariés ».
Cette disposition pose évidemment le problème d’une juste utilisation de l’argent de la formation permanente et continue des salariés des entreprises. En effet, la ressource est suffisamment rare et chère pour ne pas être utilisée de manière aveugle ; à tout le moins, elle doit faire l’objet d’une élémentaire concertation. En outre, le choix d’un organisme de formation doit s’inscrire dans le cadre d’une stratégie générale, issue notamment d’une négociation sur la formation permanente ; cette stratégie doit intégrer autant les impératifs de la production et du développement de l’entreprise que les attentes des salariés désireux de s’épanouir dans leur activité.
Sans que la qualité des organismes de formation des chambres de commerce et des chambres de métiers et de l’artisanat soit en cause, la formation purement utilitariste visant uniquement, dans le cadre d’une convention conclue avec l’un de ces organismes, à favoriser l’adaptation du salarié aux nouvelles méthodes de fonctionnement ou aux nouveaux process de son entreprise ne peut constituer l’alpha et l’oméga de toute démarche de formation permanente.
La négociation paritaire est donc essentielle dans l’ensemble de la démarche, ne serait-ce que parce que l’on décide toujours mieux et de façon plus juste quand on écoute des avis divers, souvent différents et parfois divergents.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Claude Jeannerot, rapporteur de la commission des affaires sociales. Cet amendement vise à conduire l’employeur à consulter les représentants du personnel avant de choisir définitivement l’organisme de formation auquel il souhaite avoir recours : ses auteurs étant en avance sur la réforme de la formation professionnelle, il convient de le réserver pour le moment où cette réforme sera examinée.
Dans cette attente, l’avis de la commission est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Michel Sapin, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social. L’avis du Gouvernement est évidemment identique.
M. le président. L'amendement n° 61, présenté par M. Watrin, Mmes David, Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Le premier alinéa du I de l’article L. 214-13 du code de l’éducation est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Ce plan comporte un volet concernant les actions de formation professionnelle des personnes handicapées, élaboré en lien avec les politiques concertées visées à l’article L. 5211-2 du code du travail. »
La parole est à M. Dominique Watrin.
M. Dominique Watrin. Le contrat de plan régional de développement des formations professionnelles a pour objet de définir une programmation à moyen terme des actions de formation professionnelle des jeunes et des adultes et d’assurer un développement cohérent de l’ensemble des filières de formation en favorisant un accès équilibré des femmes et des hommes à chacune de ces filières de formation. Il comporte des actions d’information et de formation. Il définit également les priorités relatives à l’information, à l’orientation et à la validation des acquis de l’expérience.
Ce contrat de plan détermine les objectifs communs aux différents acteurs sur le territoire régional, notamment en termes de filières de formation professionnelle initiale et continue, sur la base d’une analyse des besoins. Il porte sur l’ensemble du territoire régional.
Le contrat de plan régional est élaboré par la région au sein du comité de coordination régional de l’emploi et de la formation professionnelle, qui en assure le suivi et l’évaluation. Il est établi après chaque renouvellement du conseil régional.
Mes chers collègues, si j’ai tenu à vous rappeler ces règles, c’est pour insister sur un aspect très important du contrat de plan régional de développement des formations professionnelles : celui-ci ne saurait laisser de côté la question du handicap, physique, mental ou psychomoteur, qui est un véritable obstacle à l’insertion professionnelle pour une part importante de la population.
Parmi les 5 millions de chômeurs que compte aujourd’hui notre pays, il y a un certain nombre d’adultes handicapés. Or il est depuis longtemps notoire que ceux-ci subissent de plein fouet les effets du sous-emploi ; ils sont touchés plus durement encore que les autres catégories, singulièrement si l’on compare les demandeurs d’emploi à raison de leur qualification initiale.
La montée en charge continue des dépenses liées au versement de l’allocation aux adultes handicapés et du revenu de solidarité active va de pair avec la dégradation générale de la situation de l’emploi des handicapés. De fait, les moyens de plus en plus réduits dont bénéficient les entreprises d’insertion pour fournir de l’emploi aux handicapés ne peuvent faire pièce au comportement d’entreprises qui préfèrent s’acquitter d’une contribution plutôt que de respecter leurs obligations en matière d’emploi des travailleurs handicapés.
Selon l’AFP, le taux de chômage des travailleurs handicapés s’élève actuellement à 22 %. Cette proportion résulte en particulier de la qualification des travailleurs handicapés, qui est en moyenne inférieure à celle des travailleurs valides.
C’est pourquoi il faut aujourd’hui qu’une priorité soit clairement affirmée en faveur de la formation professionnelle des travailleurs handicapés dans le cadre des contrats de plan régionaux de développement des formations professionnelles.
Nul doute qu’une telle démarche anime d’ores et déjà nombre d’élus régionaux attentifs aux besoins de la population. Reste qu’il est préférable d’inscrire cette priorité dans la loi. C’est la raison pour laquelle nous vous proposons de compléter le code de l’éducation en adoptant l’amendement n° 61, et ce d’autant plus qu’il correspond à un engagement du Président de la République.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Claude Jeannerot, rapporteur. Monsieur Watrin, vous souhaitez qu’une plus large place soit réservée aux personnes handicapées dans les contrats de plan régionaux de développement des formations professionnelles.
Sur le fond, nous ne pouvons évidemment que partager votre préoccupation, même s’il faut souligner que les régions intègrent déjà dans leurs plans la situation des personnes en situation de handicap.
Il s’agit typiquement d’une question qu’il conviendra de réexaminer, à l’aune des engagements du Président de la République, comme vous avez eu raison de le rappeler, et ce à deux occasions : lorsque la réforme de la formation professionnelle sera examinée et lorsque le rôle et la place des régions seront abordés, s’agissant notamment de la formation professionnelle.
Dans cette attente, je suis au regret de devoir émettre un avis défavorable sur l’amendement n° 61.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Michel Sapin, ministre. Cet amendement, qui avait été présenté à l’Assemblée nationale, avait ensuite été retiré, après l’adoption d’une autre disposition, qui correspond aujourd’hui au paragraphe 10 de l’article 2.
Nous partageons bien entendu l’orientation qui est la vôtre, monsieur le sénateur. Elle devra à la fois faire l’objet d’une stratégie nationale puis, dans le cadre des négociations et des concertations à venir, être déclinée au niveau régional.
M. le président. L'amendement n° 62, présenté par M. Watrin, Mmes David, Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Au premier alinéa de l’article L. 313-7 du code de l’éducation, après le mot : « organismes », sont insérés les mots : « de droit public ou de droit privé ne poursuivant pas d’intérêt lucratif ».
La parole est à M. Michel Le Scouarnec.
M. Michel Le Scouarnec. Cet amendement a été présenté pour la première fois au cours de l’examen, en octobre 2009, du projet de loi relatif à l’orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie, qui avait introduit l’article L. 313-7 dans le code de l’éducation.
Cet article oblige les établissements de l’enseignement secondaire, ainsi que les centres de formation des apprentis à communiquer à des organismes désignés par le préfet les coordonnées des élèves qui ne sont plus inscrits dans aucune formation.
À l’époque, nous avions interrogé le rapporteur et le secrétaire d’État chargé de l’emploi sur la nature des organismes mentionnés dans cet article, redoutant que la notion ne puisse regrouper, outre Pôle emploi, des opérateurs privés de placement, dont des sociétés d’intérim. Nous n’avions pas reçu de réponse claire et je m’adresse donc à vous, monsieur le ministre, pour savoir, alors que nous bénéficions d’un certain recul, ce qu’il en est aujourd’hui.
S’il existe des cas où les coordonnées d’élèves « décrocheurs » ont été confiées à ce type d’opérateurs privés, qui réalisent du profit tout en étant les premiers pourvoyeurs d’emplois précaires, il me semble qu’il serait bon d’adopter cet amendement, afin de préciser que seuls les opérateurs publics ou privés à but non lucratif peuvent se voir confier les coordonnées de ces milliers de jeunes.
Il s’agit bien ici d’éviter de fragiliser les parcours de jeunes déjà en rupture avec le milieu scolaire, qui n’ont pas besoin d’être en plus précarisés.
Je sais bien que le terme d’« agences d’emploi » tend à remplacer celle d’« agences d’intérim », en référence au fait que certains contrats proposés par ces agences peuvent relever du CDI ou du CDD. Mais cela se vérifie plus pour des emplois relativement qualifiés que pour ceux auxquels aura accès le public concerné par cet article du code de l’éducation. Ainsi, le secteur des « agences d’emploi privées » reste avant tout pourvoyeur de contrats d’intérim, c’est-à-dire de contrats précaires. À cet égard, la prime de précarité qui y est associée est évocatrice.
Par ailleurs, les intérimaires sont plus fréquemment sujets à des accidents du travail, et on peut aisément penser que les jeunes intérimaires, qui ne disposent ni de l’expérience ni de l’application de leurs aînés, peuvent être plus touchés encore.
Plus fondamentalement, la possibilité de recours aux opérateurs privés de placement doit nous inciter à nous interroger sur l’opportunité de confier au privé le suivi des publics les plus difficiles à insérer ou réinsérer. Elle pose aussi la question de leur efficacité, qui est loin d’être démontrée, bien au contraire.
La montée conjoncturelle du chômage fragilise à l’évidence le service public de l’emploi et rend toujours plus délicat l’accompagnement et le suivi des dossiers des publics les plus éloignés de l’emploi. Nous ne souhaitons pas que ces difficultés entraînent un transfert vers des opérateurs privés qui privilégieraient la recherche de profits au détriment de l’accompagnement, comme c’est parfois le cas.
Enfin, l’argument mettant en avant la capacité de discernement du préfet du département, chargé de désigner les organismes en question, ne nous satisfait pas. Il serait facile en réalité de retenir tel opérateur privé, qui pourrait être privilégié tel un « ami », sans qu’une telle pratique puisse être facilement mise en cause.
S’il peut parfois être pertinent de ne pas concevoir des lois trop bavardes, la précision, en l’espèce, nous semble plus que justifiée.
Pour que la tentative de remettre aux jeunes décrocheurs le pied à l’étrier soit efficace, elle doit leur apporter un minimum de stabilité et de sécurité, en évitant de les placer au cœur d’un marché fortement concurrentiel et lucratif, faute de quoi nous passerons à côté d’une grande partie du problème. C’est pourquoi je vous invite, mes chers collègues, à adopter cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Claude Jeannerot, rapporteur. Monsieur le sénateur, vous évoquez un enjeu important, qui est celui de l’insertion sociale et professionnelle des jeunes issus du système scolaire sans formation ni qualification. En particulier, vous faites un gros plan justifié sur la situation des « décrocheurs ».
Nous avons déjà abordé cette question du droit à la formation initiale différée, qui devra en effet être intégrée dans le compte personnel de formation que permet de créer le texte soumis aujourd’hui à votre approbation. Nous aurons à en construire les modalités dans le cadre du dialogue qui s’organisera entre les partenaires sociaux, l’État et les régions et à définir plus concrètement et plus précisément celles-ci, au moment où nous examinerons le texte portant réforme de la formation professionnelle.
La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement, ce qui ne remet pas en cause, vous l’avez compris, tout l’enjeu qui s’attache à cette question, que vous avez eu raison d’évoquer.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Michel Sapin, ministre. Bien évidemment, le sujet est important. Toutefois, je me vois obligé de redire une fois encore que ce texte n’est pas destiné à traiter tous les problèmes et toutes les difficultés auxquels nous avons à nous attaquer.
Ces questions seront posées, certes, dans le cadre de la réforme de la formation professionnelle, mais elles seront surtout prises en compte au moment de la réforme du service public local de l’emploi, qui précisera le rôle des régions et des missions, dans le cadre de la future loi sur la décentralisation.
Il ne s’agit pas, monsieur le sénateur, de vous renvoyer encore à un autre texte, simplement, nous légiférons aujourd’hui sur les relations entre salariés et employeurs. Les autres domaines devront être abordés de la même manière, avec ordre et méthode.
L’avis du Gouvernement est donc défavorable.
M. le président. L'amendement n° 64, présenté par M. Watrin, Mmes David, Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – En cas de procédure collective de licenciement, les conventions de formation professionnelle continue conclues entre un employeur et un organisme de formation au profit des salariés poursuivent leurs effets de plein droit. Les créances consécutives de l’organisme de formation sont prises en compte parmi les créances de privilège à charge pour le mandataire judiciaire d’en solliciter la couverture auprès de l’organisme collecteur paritaire agréé par l’entreprise.
La parole est à Mme Isabelle Pasquet.
Mme Isabelle Pasquet. Cet amendement vise à garantir, d’une part, au salarié dont l’entreprise serait contrainte de déposer son bilan la poursuite de sa formation et, d’autre part, à l’organisme de formation la garantie du recouvrement de sa créance.
C’est une mesure de bon sens : quitte à ce qu’un salarié débute une formation, autant qu’il aille au bout de celle-ci, afin d’acquérir des compétences dont il pourra avoir besoin pour se reclasser. C’est particulièrement utile pour les seniors victimes de licenciements collectifs, dont on sait parfaitement que le reclassement constitue souvent une épreuve difficile. La mise à jour de leurs connaissances et de leurs compétences est particulièrement déterminante si l’on veut leur éviter un déclassement, souvent perçu comme une fatalité.
L’intérêt du salarié licencié et l’amélioration de sa capacité de reclassement sont donc les principaux objets de cet amendement.
Mais son adoption aurait un avantage secondaire : elle accroîtrait la stabilité à laquelle aspirent légitimement les organismes de formation. Si les salariés victimes de licenciements collectifs pouvaient poursuivre leur formation, cela permettrait de ne pas trop désorganiser le service des formateurs.
Pour ce faire, la poursuite de la formation doit être financée. C’est pourquoi nous proposons de mobiliser l’organisme paritaire collecteur agréé, l’OPCA, structure associative collectant les contributions financières des entreprises dans le cadre du financement de la formation professionnelle continue, pour assurer le recouvrement de la créance.
C’est donc bien dans un double souci de sécurisation des parcours professionnels des salariés victimes de licenciements collectifs et, secondairement, de stabilité des organismes de formation que je vous invite, mes chers collèges, à adopter cet amendement de bon sens.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Claude Jeannerot, rapporteur. Chère collègue, vouloir permettre aux salariés licenciés de poursuivre un cycle de formation entamé est sans doute une idée juste, que la prochaine réforme de la formation professionnelle devra retenir.
Au demeurant, cette proposition devra sans doute être travaillée. En effet, dans l’état actuel de la législation, je ne suis pas sûr qu’il soit possible de la mettre en œuvre.
Cette question étant très éloignée de l’ANI, la commission vous demande, chère collègue, de bien vouloir retirer cet amendement. À défaut, elle se verra contrainte d’émettre un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Isabelle Pasquet, pour explication de vote sur l'article.
Mme Isabelle Pasquet. Cette explication de vote est importante, monsieur le président, dans la mesure où, au cours de nos différentes interventions, nous avions annoncé que nous ne voterions pas l’article 2. Toutefois, le débat nous a fait changer d’avis.
En effet, M. le ministre et M. le rapporteur ont laissé entendre que nos amendements pourraient trouver une issue favorable lors de prochains débats.
Dans cette attente, nous nous abstiendrons sur l’article 2.
M. le président. Je mets aux voix l'article 2.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 205 :
Nombre de votants | 196 |
Nombre de suffrages exprimés | 174 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 88 |
Pour l’adoption | 174 |
Le Sénat a adopté. (Exclamations de satisfaction sur quelques travées.)
Articles additionnels après l'article 2