M. Jean-Étienne Antoinette. Madame la présidente, je défendrai en même temps l’amendement n° 39 rectifié ter.
L’exception introduite à l’interdiction des droits exclusifs d’importation me paraît inadaptée compte tenu de l’objectif visé, et ce pour deux raisons.
La première est qu’elle ne prend en compte que le seul bénéfice du consommateur. Je remarque à cet égard qu’il serait préférable d’utiliser le terme d’« utilisateur final » dans le code de commerce.
Dans le cadre d’une comparaison avec l’exception admissible pour les pratiques d’entente et de position dominante, on constate que le profit de l’utilisateur final n’est qu’un des éléments pouvant entraîner l’application de l’exception. Deux autres conditions sont nécessaires : le progrès économique, qui s’appuie sur un bilan économique positif de l’entente, notamment en termes de développement technique ou d’emploi, et l’absence d’élimination de la concurrence.
L’article L. 420-4 du code de commerce dispose ainsi que la pratique autorisée exceptionnellement ne doit pas donner aux entreprises intéressées la possibilité d’éliminer la concurrence pour une partie substantielle des produits en cause. Dans l’objectif d’un renforcement du jeu de la concurrence, conformément à l’esprit qui anime ce texte, on ne devrait pas écarter cette condition si facilement. Car, en ne prenant en compte que le seul bénéfice de l’utilisateur final, la concurrence risque d’être sacrifiée.
Je propose de remédier à cette lacune en rattachant l’exception de l’article L. 420-2-1 aux exceptions du droit commun de la concurrence.
Sachez, mes chers collègues, que l’exception que je viens d’évoquer soulève un second problème, à savoir la détermination du bénéfice du consommateur.
La jurisprudence communautaire relative à l’application de cette exception et celle de l’Autorité de la concurrence défendent une conception trop large du profit de l’utilisateur du produit. Il peut s’agir en effet « d’assurer un approvisionnement continu et une offre plus large de marchandises de la part des détaillants ». Ainsi, le profit n’est pas nécessairement de nature pécuniaire. Pis, la Commission européenne va même jusqu’à justifier une entente par l’approvisionnement amélioré, alors même qu’elle est certaine que les prix ne baisseront pas.
Il existe donc un risque pour que « les motifs objectifs tirés de l’efficacité économique au bénéfice des consommateurs » se voient appliquer la jurisprudence concernant le profit de l’utilisateur final. Il est certain que les droits exclusifs d’importation pourront toujours se justifier par les garanties d’un approvisionnement plus régulier et plus fourni.
Je propose donc un meilleur encadrement pour atteindre notre but, en introduisant la notion d’un bénéfice pécuniaire des consommateurs. Il faut dès lors indiquer clairement dans le texte que le profit qui résulte du droit exclusif d’importation doit contribuer au pouvoir d’achat du consommateur ultramarin.
Mme la présidente. L’amendement n° 39 rectifié ter, présenté par MM. Antoinette et Antiste, Mme Claireaux et MM. Cornano, Desplan, J. Gillot, Patient, Tuheiava et Vergoz, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Rédiger ainsi cet alinéa :
« III. — Ne sont pas soumis aux dispositions de l’article L. 420-2-1 les accords dont les auteurs peuvent justifier qu’ils réservent aux consommateurs une partie équitable du profit qui en résulte, en particulier par une baisse du prix des produits. »
Cet amendement a déjà été défendu.
Quel est l’avis de la commission sur les amendements nos 38 rectifié ter et 39 rectifié ter ?
M. Serge Larcher, rapporteur. L’amendement n° 38 rectifié ter vise à étendre à l’interdiction des clauses exclusives d’importation prévue par l’article 2 des exceptions prévues par le code de commerce pour les autres pratiques anticoncurrentielles, à savoir les ententes illicites et les abus de position dominante. Pour l’heure, la seule exception prévue par le projet de loi à l’interdiction des clauses d’exclusivité, c’est l’intérêt du consommateur.
L’adoption de cet amendement conduirait à supprimer cette exception, pour lui substituer notamment une exception liée au progrès économique et au maintien de l’emploi.
Je ne suis pas favorable à cette disposition, car elle permettrait à une entreprise de s’exonérer de l’interdiction des clauses exclusives d’importation en arguant d’un éventuel risque pour l’emploi.
L’adoption de l’amendement n°39 rectifié ter permettrait de s’exonérer de l’interdiction des clauses d’exclusivité en apportant simplement la preuve que celles-ci permettent de réserver aux consommateurs une part équitable du profit qui en résulte, notamment par une baisse de prix des produits.
Le texte du projet de loi tel qu’il est issu des travaux de la commission me paraît préférable. Au reste, comment une clause d’exclusivité pourrait-elle permettre une baisse des prix ? Et par rapport à quoi ?
La commission demande donc le retrait de ces deux amendements. À défaut, elle émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Victorin Lurel, ministre. L’amendement n° 38 rectifié ter vise à étendre le bénéfice des dispositions de l’article L. 420-4 du code de commerce, c’est-à-dire les exemptions, aux pratiques visées par le nouvel article L. 420-2-1 du même code.
Cette proposition n’est pas incohérente en apparence, puisque les articles du code de commerce L. 420-1, qui vise les ententes illicites, et L. 420-2, qui vise les abus de position dominante, bénéficient d’ores et déjà de la possibilité offerte au législateur ou au pouvoir réglementaire de créer des exemptions pour des cas particuliers.
Toutefois, la nouvelle infraction créée par l’article L. 420-2-1 relatif aux droits exclusifs ne s’applique qu’en outre-mer. De plus, elle est d’une nature différente des deux infractions de base du droit de la concurrence, à savoir les ententes illicites et les abus de position dominante. Il convient donc de prévoir des conditions d’exemption spécifiques.
Monsieur le sénateur, le Gouvernement vous demande de bien vouloir retirer vos deux amendements. Sachez cependant que je retiens une référence intéressante au pouvoir d’achat des consommateurs, qui pourrait inspirer une modification du texte à l’Assemblée nationale.
Mme la présidente. Les amendements nos 38 rectifié ter et 39 rectifié ter sont-ils maintenus, monsieur Antoinette ?
M. Jean-Étienne Antoinette. Je retiens l’ouverture faite par M. le ministre, et je demande donc que le Gouvernement défende une proposition en ce sens lors de l’examen du texte par l’Assemblée nationale. Dans ces conditions, je retire ces deux amendements.
Mme la présidente. Les amendements nos 38 rectifié ter et 39 rectifié ter sont retirés.
Je mets aux voix l’article 2.
(L’article 2 est adopté.)
Article 2 bis (nouveau)
Le code de commerce est ainsi modifié :
1° À la fin du premier alinéa de l’article L. 420-6, les références : « L. 420-1 et L. 420-2 » sont remplacées par les références : « L. 420-1, L. 420-2 et L. 420-2-1 » ;
2° Au premier alinéa de l’article L. 450-5, la référence : « et L. 420-5 » est remplacée par les mots : «, L. 420-2-1 et L. 420-5 ou d’être contraires aux mesures prises en application de l’article L. 410-3 » ;
3° À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 462-3, la référence : « et L. 420-5 » est remplacée par les références : «, L. 420-2-1 et L. 420-5 » ;
4° À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 462-6, la référence : « ou L. 420-5 » est remplacée par les mots : «, L. 420-2-1 ou L. 420-5, sont contraires aux mesures prises en application de l’article L. 410-3 » ;
5° À la fin de la seconde phrase du premier alinéa du I de l’article L. 464-2, la référence : « et L. 420-5 » est remplacée par les mots : «, L. 420-2-1 et L. 420-5 ou contraires aux mesures prises en application de l’article L. 410-3 » ;
6° Au premier alinéa de l’article L. 464-9, la référence : « et L. 420-5 » est remplacée par les mots : «, L. 420-2-1 et L. 420-5 ou contraires aux mesures prises en application de l’article L. 410-3 ».
Mme la présidente. L’amendement n° 61, présenté par M. Mohamed Soilihi, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Thani Mohamed Soilihi, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale. La commission des affaires économiques a adopté un amendement visant à appliquer aux cas de pratiques prohibées relatives aux droits exclusifs d’importation outre-mer les sanctions pénales prévues en cas d’entente ou d’abus de position dominante. Aux termes de l’article L. 420-6 du code de commerce, sont punies d’un emprisonnement de quatre ans et d’une amende de 75 000 euros les personnes physiques responsables d’entente ou d’abus de position dominante. Ces sanctions pénales s’ajoutent aux sanctions financières qui peuvent être prononcées par l’Autorité de la concurrence à l’encontre des entreprises responsables de ces infractions.
Selon la commission des lois, une telle disposition est contestable au regard du principe constitutionnel de proportionnalité des peines, qui doit trouver à s’appliquer dans la répression des infractions aux règles de la concurrence.
En premier lieu, la pratique des clauses d’exclusivité est licite, dans les conditions prévues par les articles L. 330-1 et suivants du code de commerce. Il s’agit, avec ce projet de loi, de déroger à cette licéité encadrée, eu égard aux contraintes particulières des outre-mer.
En deuxième lieu, la pratique de droits exclusifs d’importation outre-mer ne saurait présenter la même gravité que les cartels et abus de position dominante, car les atteintes aux règles de la concurrence, au fonctionnement normal des marchés et à l’ordre public économique sont moindres. Dès lors, il n’est pas justifié de prévoir des sanctions pénales similaires pour les personnes physiques responsables de ces pratiques.
En troisième lieu, ces sanctions pénales ne sont pas applicables en cas de pratique de prix abusivement bas, autre pratique anticoncurrentielle pourtant interdite par le code de commerce.
Pour respecter le principe constitutionnel de proportionnalité des délits et des peines, il faut prévoir des sanctions proportionnées à l’infraction et conformes à l’échelle des peines déjà prévue en matière de pratiques anticoncurrentielles Or les sanctions pénales définies dans le texte ne sont pas proportionnées en cas de droits exclusifs. Les sanctions financières prononcées par l’Autorité de la concurrence sont suffisantes.
Pour ces motifs, je vous invite, mes chers collègues, à adopter cet amendement, qui vise à supprimer l’extension aux droits exclusifs d’importation des sanctions pénales s’appliquant en cas d’entente ou d’abus de position dominante.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Serge Larcher, rapporteur. Il faut rendre à César ce qui appartient à César ! Cet amendement vise à revenir sur une modification introduite hier dans le projet de loi, sur l’initiative de notre collègue Jean-Etienne Antoinette. Celle-ci concerne l’application des peines pénales en cas de clauses d’exclusivité.
M. le ministre a soulevé hier le problème de la proportionnalité des peines et la commission des lois a jugé utile de revenir sur cette disposition.
La commission des affaires économiques est favorable à cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je constate que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents.
Je mets aux voix l’article 2 bis, modifié.
(L’article 2 bis est adopté.)
Article 3
L’article L. 462-5 du code de commerce est ainsi modifié :
1° Au I, la référence : « et L. 420-5 » est remplacée par les mots : «, L. 420-2-1 et L. 420-5 ou contraire aux mesures prises en application de l’article L. 410-3 » ;
2° Au II, la référence : « et L. 402-5 » est remplacée par les mots : «, L. 420-2-1 et L. 420-5 ou contraires aux mesures prises en application de l’article L. 410-3 » ;
3° Il est ajouté un IV ainsi rédigé :
« IV. – L’Autorité de la concurrence peut être saisie par les régions d’outre-mer, le département de Mayotte, la collectivité de Saint-Barthélemy, la collectivité de Saint-Martin et la collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon de toute pratique mentionnée aux articles L. 420-1, L. 420-2, L. 420-2-1 et L. 420-5 ou contraire aux mesures prises en application de l’article L. 410-3, ou de faits susceptibles de constituer une telle pratique, concernant leurs territoires respectifs. »
Mme la présidente. L’amendement n° 19, présenté par M. Fleming et Mme Farreyrol, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Supprimer les mots :
, la collectivité de Saint-Martin
La parole est à M. Louis-Constant Fleming.
M. Louis-Constant Fleming. Il est défendu.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Serge Larcher, rapporteur. Défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 3.
(L’article 3 est adopté.)
Article 4
Au troisième alinéa du III de l’article L. 430-2 du code de commerce, le nombre : « 7,5 » est remplacé par le nombre : « 5 ». – (Adopté.)
Article 5
I. – Le chapitre II du titre V du livre VII du code de commerce est complété par une section 4 intitulée : « Du contrôle de l’Autorité de la concurrence en cas de position dominante », qui comprend l’article L. 752-26 ainsi qu’un article L. 752-27 ainsi rédigé :
« Art. L. 752-27. – Dans les collectivités relevant de l’article 73 de la Constitution, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon, en cas d’existence d’une position dominante, détenue par une entreprise ou un groupe d’entreprises exploitant un ou plusieurs magasins de commerce de détail, qui soulève des préoccupations de concurrence du fait de prix abusifs ou de marges élevées en comparaison des moyennes observées pour les entreprises comparables du secteur que l’entreprise ou le groupe d’entreprises pratique, l’Autorité de la concurrence peut, eu égard aux contraintes particulières de ces territoires découlant notamment de leurs caractéristiques géographiques et économiques, faire connaître ses préoccupations de concurrence à l’entreprise ou au groupe d’entreprises en cause, qui peuvent dans un délai de deux mois lui proposer des engagements dans les conditions prévues pour ceux de l’article L. 464-2.
« Si l’entreprise ne propose pas d’engagements ou si les engagements proposés ne lui paraissent pas de nature à mettre un terme à ses préoccupations de concurrence, elle peut, par une décision motivée prise après réception des observations de l’entreprise ou du groupe d’entreprises concernées et à l’issue d’une séance devant le collège, leur enjoindre de modifier, de compléter ou de résilier, dans un délai déterminé, tous accords et tous actes par lesquels s’est constituée la puissance économique qui permet les pratiques constatées en matière de prix ou de marges. Elle peut, dans les mêmes conditions, leur enjoindre de procéder à la cession d’actifs, si cette cession constitue le seul moyen permettant de garantir la cessation des pratiques constatées. L’Autorité peut sanctionner l’inexécution de ces injonctions dans les conditions prévues à l’article L. 464-2.
« Dans le cadre des procédures définies aux premier et deuxième alinéas, l’Autorité peut demander communication de toute information dans les conditions prévues à l’article L. 450-3 et entendre tout tiers intéressé. »
II. – (nouveau) Au premier alinéa de l’article L. 464-8 du même code, la référence : « et L. 464-6-1 » est remplacée par les références : «, L. 464-6-1 et L. 752-27 ».
Mme la présidente. L’amendement n° 20, présenté par M. Fleming et Mme Farreyrol, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Supprimer les mots :
, à Saint-Martin
La parole est à M. Louis-Constant Fleming.
M. Louis-Constant Fleming. Il est défendu.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Serge Larcher, rapporteur. Défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L’amendement n° 66, présenté par M. S. Larcher, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
1° Alinéa 2
Remplacer les mots :
prix abusifs ou de marges élevées en comparaison des moyennes observées pour les entreprises comparables du secteur que l’entreprise ou le groupe d’entreprises pratique
par les mots :
prix ou de marges élevés, que l’entreprise ou le groupe d’entreprises pratique, en comparaison des moyennes du secteur
2° Alinéa 3, deuxième phrase
Remplacer les mots :
la cessation des pratiques constatées
par les mots :
une concurrence effective
La parole est à M. le rapporteur.
M. Serge Larcher, rapporteur. Cet amendement vise notamment à clarifier la rédaction de l’alinéa 2 de l’article 5.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 5, modifié.
(L’article 5 est adopté.)
Article additionnel après l’article 5
Mme la présidente. L’amendement n° 2 rectifié, présenté par MM. Antiste et Antoinette, Mme Claireaux et MM. Cornano, Desplan, J. Gillot, Patient, Tuheiava et Vergoz, est ainsi libellé :
Après l’article 5
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement présente au Parlement avant le 1er janvier 2014 un rapport examinant dans les départements d’outre-mer les modalités de création et de fonctionnement de centrales d’approvisionnement et de stockage régionales, qui, par mutualisation des moyens, réduiraient les coûts et permettraient aux distributeurs de mieux faire jouer la concurrence entre fabricants et intermédiaires.
La parole est à M. Maurice Antiste.
M. Maurice Antiste. Le fonctionnement de l’approvisionnement et du stockage dans les régions d’outre-mer se caractérise par une forte segmentation.
Un rapport sur ce thème permettrait de réfléchir aux obstacles à la réalisation d’économies d’échelle, lesquels contribuent à la cherté des prix. En outre, ce serait l’occasion de mettre en œuvre une recommandation de l’Autorité de la concurrence, qui préconise la mise en place d’une mission d’étude dans chaque département d’outre mer, réunissant l’État et les collectivités territoriales, pour réfléchir à ce sujet. Le Gouvernement pourrait ainsi s’appuyer sur le résultat de ces missions pour la rédaction de ce rapport.
Cet amendement vise donc à permettre au Parlement de demander un rapport sur les modalités de création et de fonctionnement des centrales régionales d’approvisionnement et de stockage dans les DOM.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Serge Larcher, rapporteur. L’auteur de cet amendement reprend une recommandation de l’Autorité de la concurrence ; il s’agit en outre d’un engagement du Président de la République. Aussi la commission émet-elle un avis favorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Victorin Lurel, ministre. Je suis au regret de dire que le Gouvernement n’est pas du même avis que la commission…
Je comprends parfaitement les raisons qui motivent cette demande de création de centrales d’approvisionnement et de stockage régionales. Il est vrai que cette proposition figurait en lettres de feu dans un rapport de l’Autorité de la concurrence. Cela étant dit, les collectivités territoriales disposent déjà du pouvoir de créer de telles centrales.
Pardonnez-moi de prendre cet exemple, mais, lorsque j’étais président de région, j’ai non seulement créé une centrale d’achat, mais j’ai également acheté du foncier et de l’immobilier commercial afin de faire baisser les prix sur la base d’un cahier des charges.
De fait, il n’est pas nécessaire de surcharger la loi en y inscrivant une faculté dont disposent déjà les collectivités territoriales. Celle-ci relève de leur initiative et de leur liberté d’administration.
J’ai déjà pris langue avec plusieurs présidents d’exécutif local pour les inciter à soutenir des initiatives allant dans ce sens. Une étude a été menée, montrant que 380 commerces de proximité étaient d’accord pour s’engager dans une telle démarche. Maintenant, il faut simplement leur en donner les moyens. Ainsi, la chambre de commerce et d’industrie de la Martinique a récemment pris l’initiative de créer une centrale d’achat.
Le Président de la République s’est effectivement engagé à créer des centrales d’approvisionnement non seulement pour les commerces alimentaires, mais aussi pour les artisans. Je prends l’engagement de soutenir toutes les initiatives qui iront dans ce sens et de prendre l’attache des exécutifs locaux à cette fin.
Pour l’ensemble de ces raisons, monsieur Antiste, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement.
Mme la présidente. Monsieur Antiste, compte tenu de l’engagement du Gouvernement, maintenez-vous l’amendement n° 2 rectifié ?
M. Maurice Antiste. Je serais tenté de dire à M. le ministre que ce qui est écrit deux fois vaut mieux que ce qui ne l’est pas du tout… C’est bien pourquoi j’ai insisté pour inscrire cette disposition dans la loi.
Cela étant, je fais confiance au ministre, et je retire donc mon amendement. Je resterai toutefois très vigilant.
Mme la présidente. L’amendement n° 2 rectifié est retiré.
Article 6
À l’article L. 34-10 du code des postes et des communications électroniques, les mots : « règlement (CE) n° 717/2007 du Parlement européen et du Conseil du 27 juin 2007 concernant l’itinérance sur les réseaux publics de communications mobiles à l’intérieur de la Communauté » sont remplacés par les mots : « règlement (UE) n° 531/2012 du Parlement européen et du Conseil du 13 juin 2012 concernant l’itinérance sur les réseaux publics de communications mobiles à l’intérieur de l’Union ». – (Adopté.)
Article 6 bis (nouveau)
L’article 1er de la loi n° 2009-594 du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer est ainsi rédigé :
« Article 1er. – I. – Un décret en Conseil d’État peut réglementer, après consultation de l’Autorité de la concurrence et en conformité avec l’article 349 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, le prix de vente, dans toutes les collectivités territoriales d’outre-mer pour lesquelles l’État a compétence en matière de réglementation des prix, de produits ou de familles de produits de première nécessité qu’il détermine pour chaque collectivité territoriale d’outre-mer en fonction de ses particularités.
« II. – Dans le cadre des observatoires des prix et des revenus dans les outre-mer prévus à l’article L. 910-1 A du code de commerce, le représentant de l’État négocie, chaque année, avec les organisations professionnelles du secteur du commerce de détail, un accord de modération du prix global d’une liste limitative de produits de consommation courante.
« Compte tenu d’une situation structurellement et anormalement élevée des prix, en l’absence d’accord un mois après l’ouverture des discussions, le représentant de l’État arrête les modalités d’encadrement du prix global de la liste des produits visés au premier alinéa du présent II, sur la base des prix les plus bas constatés dans les différentes enseignes pour chacun des produits de la liste, ainsi que des acquis de la négociation au moment de son interruption.
« L’affichage du prix global de la liste de produits prévu aux précédents alinéas est effectué selon les modalités prévues à l’article L. 113-3 du code de la consommation.
« III. – Les manquements aux dispositions du II du présent article sont recherchés et constatés par les agents mentionnés au II de l’article L. 450-1 du code de commerce, dans les conditions fixées par les articles L. 450-2, L. 450-3, L. 450-7, L. 450-8 et L. 470-5 du même code.
« IV. – Les modalités d’application du II du présent article sont précisées, en tant que de besoin, par décret. »
Mme la présidente. L’amendement n° 46, présenté par M. Antoinette, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Après le mot :
nécessité
insérer les mots :
et en matière de santé
La parole est à M. Jean-Étienne Antoinette.
M. Jean-Étienne Antoinette. Le Gouvernement a fait adopter en commission un amendement visant à offrir la possibilité de réglementer le prix des produits ou des familles de produits de première nécessité. Je propose d’ajouter à cet ensemble de produits la famille des produits destinés aux établissements de santé.
Si la santé est une nécessité première, pour autant, elle ne fait pas partie des biens consommables auxquels ce projet de loi fait référence. Or les établissements de santé doivent s’approvisionner en divers produits consommables, et ces marchés subissent autant des prix exorbitants que les marchés des produits de consommation courante destinés aux particuliers.
La viabilité financière de ces établissements étant régulièrement en péril, il convient de prendre en compte leurs difficultés de s’approvisionner au meilleur prix afin qu’ils puissent rendre leurs services de santé dans les meilleures conditions.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Serge Larcher, rapporteur. Cet amendement vise à étendre le dispositif de l’article 1er de la LODEOM, la loi pour le développement économique des outre-mer, introduit sur l’initiative de notre collègue Jean Arthuis, alors président de la commission des finances. Ce dispositif permet de réglementer par décret le prix des produits de première nécessité.
Notre collègue Jean-Étienne Antoinette souhaite qu’il soit précisé que ce dispositif s’applique également aux produits de santé. Je m’interroge. Aussi, je souhaite entendre l’avis du Gouvernement sur cette question.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Victorin Lurel, ministre. Ce type de produits fait déjà l’objet d’une réglementation spécifique et, pour cette raison, je suis tenté de dire que cet amendement est satisfait.
L’article 1er du présent projet de loi, revu et corrigé par votre commission des affaires économiques, fait en effet référence aux « marchés de gros », ce qui permettra de s’attaquer à ce problème. Sachez en outre, monsieur le sénateur, que les discussions qui auront lieu à la suite de l’adoption de la loi porteront non seulement sur le carburant, mais aussi sur les produits pharmaceutiques. En règle générale, la plupart des départements ultramarins comptent deux centrales d’achat pour ce type de produits.
Pour ces raisons, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, le Gouvernement émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. Monsieur Antoinette, l’amendement n° 46 est-il maintenu ?
M. Jean-Étienne Antoinette. Au cours de la discussion générale, j’ai cité l’exemple de l’approvisionnement en oxygène.
Vous étiez à mes côtés, monsieur le ministre, lorsque le directeur de l’hôpital de Cayenne nous expliquait que chaque mètre cube d’oxygène lui revenait à 9 800 euros, contre 300 euros en métropole. Cet oxygène lui est fourni par une entreprise locale, qui occupe une position dominante sur le marché. Voilà pourquoi je souhaite que les produits pharmaceutiques à destination des établissements de santé puissent également faire l’objet d’une réglementation.
En outre, vous savez très bien que c’est l’État qui finance tant les coefficients correcteurs pour les hôpitaux publics que les subventions que perçoivent ces derniers en compensation du passage à la tarification à l’activité. Par conséquent, ma proposition est d’autant plus intéressante.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Victorin Lurel, ministre. Je veux encore une fois rassurer M. Antoinette. En effet, nous étions ensemble à la préfecture de Cayenne lorsque le directeur du centre hospitalo-universitaire a cité devant nous l’exemple de l’oxygène, nous expliquant que le mètre cube coûtait 9 800 euros en Guyane contre 300 euros en métropole. Mais, je le répète, il s’agit là d’un marché de gros qui est inclus dans le champ de l’article 1er du projet de loi adopté par votre commission. Il n’est pas nécessaire d’être redondant.
Mme la présidente. Monsieur Antoinette, que décidez-vous en définitive ?
M. Jean-Étienne Antoinette. Je souhaite simplement introduire une faculté et non pas créer une obligation. Toujours est-il que je retire mon amendement, madame la présidente.