M. Xavier Bertrand, ministre. Si je me permettais de poser une question à un parlementaire, je vous demanderais bien dans quel autre pays que la France vous aimeriez vous faire soigner ou faire soigner vos enfants, monsieur Daudigny. Pour ma part, je choisirais la France, car nous avons le meilleur système de santé ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UCR.)

M. le président. Nous en avons terminé avec les questions d’actualité au Gouvernement.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures quinze, sous la présidence de M. Jean-Patrick Courtois.)

PRÉSIDENCE DE M. Jean-Patrick Courtois

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

7

Nomination de membres d'une commission mixte paritaire

M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre la demande de constitution d’une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de mobilisation du foncier en faveur du logement.

La liste des candidats établie par la commission de l’économie a été affichée conformément à l’article 12 du règlement.

Je n’ai reçu aucune opposition.

En conséquence, cette liste est ratifiée et je proclame représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire :

Titulaires : MM. Daniel Raoul, Thierry Repentin, René Vandierendonck, Gérard Le Cam, Mme Esther Benbassa, MM. Charles Revet et Vincent Capo-Canellas ;

Suppléants : Mme Marie-Noëlle Lienemann, MM. Jean-Jacques Filleul, Joël Labbé, Robert Tropeano, Michel Houel, Gérard César, Mme Élisabeth Lamure.

8

Communication du Conseil constitutionnel

M. le président. M. le président du Conseil constitutionnel a informé le Sénat, le jeudi 1er mars 2012, qu’en application de l’article 61-1 de la Constitution la Cour de cassation a adressé au Conseil constitutionnel une décision de renvoi d’une question prioritaire de constitutionnalité (2012-240 QPC).

Le texte de cette décision de renvoi est disponible au bureau de la distribution.

Acte est donné de cette communication.

9

 
Dossier législatif : proposition de loi tendant à faciliter l'organisation des manifestations sportives et culturelles
Discussion générale (suite)

Organisation des manifestations sportives et culturelles

Adoption des conclusions d'une commission mixte paritaire

M. le président. L’ordre du jour appelle l’examen des conclusions de la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi tendant à faciliter l’organisation des manifestations sportives et culturelles (texte de la commission n° 419, rapport n° 418).

Dans la discussion générale, la parole est à Mme la présidente de la commission de la culture, en remplacement de M. Jean-Jacques Lozach, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire

Discussion générale (début)
Dossier législatif : proposition de loi tendant à faciliter l'organisation des manifestations sportives et culturelles
Article 1er

Mme Marie-Christine Blandin, présidente de la commission de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication, en remplacement de M. Jean-Jacques Lozach, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le texte qui nous est présenté aujourd’hui est sur le point d’être adopté, un peu plus d’un mois seulement après son dépôt à l’Assemblée nationale.

C’est le signe que le Sénat a été coopératif.

C’est le signe que les différents groupes politiques peuvent travailler en bonne intelligence pour améliorer notre législation chaque fois que l’intérêt général est en jeu.

C’est aussi le signe que le sport et la culture peuvent rassembler ceux qui croient en l’importance de leurs valeurs et de leur promotion.

En un mois, le travail parlementaire a été à la fois intense et productif, et je tiens à cet égard à féliciter tous les membres de la commission, qui se sont investis sur le sujet dans des délais très brefs.

Je salue également le rapporteur de la proposition de loi, M. Lozach : la pertinence de ses propositions a été unanimement reconnue. Retenu par son conseil général, il lui est malheureusement impossible de se joindre à nous aujourd’hui.

Je tiens à dire d’emblée que la commission de la culture est favorable à l’adoption des conclusions de la commission mixte paritaire, tout simplement parce que le travail du Sénat a été reconnu.

Nous sommes passés d’un article unique relatif à la responsabilité civile des pratiquants sportifs à un texte de six articles ayant pour objet de faciliter l’organisation des manifestations sportives et culturelles. La plupart des dispositions ont été introduites par le Sénat ; elles n’ont pas été modifiées, sinon de manière marginale.

L’article 1er, qui était l’objet initial de la proposition de loi, a été amélioré à l’Assemblée nationale et au Sénat dans le sens d’un retour à la situation antérieure à l’arrêt de la Cour de cassation du 4 novembre 2010.

Selon le texte de la commission mixte paritaire, que celle-ci a repris du Sénat, l’exonération de responsabilité civile du fait des choses concernera les pratiquants sportifs exerçant leur activité au cours d’une manifestation sportive ou d’un entraînement en vue de cette manifestation, et lorsque cette manifestation ou cet entraînement a lieu sur un terrain dédié au sport de manière temporaire ou permanente.

La responsabilité civile sera donc reconnue dans de nombreux cas au bénéfice des victimes de dommages, mais ne sera pas appliquée dans les situations où les sportifs assument en connaissance de cause les risques de leur activité.

L’intérêt du sport et l’intérêt général devraient ainsi être tous deux préservés.

L’article 1er bis, légèrement modifié par la commission mixte paritaire, prévoit dorénavant une large concertation avant le dépôt du rapport relatif aux perspectives d’évolution du régime de responsabilité civile en matière sportive.

L’article 2 avait été voté conforme par le Sénat dans la mesure où l’Assemblée nationale élargissait aux manifestations culturelles et au spectacle vivant une disposition relative à la revente illicite de billets que le Sénat avait déjà introduite dans le code du sport.

Les pré-ventes sauvages et la spéculation sur la rareté des billets, laquelle se traduit par des tarifs supérieurs de 150 % ou 200 %, voire de 400 % et plus au tarif initial, spolient les artistes, les financeurs et organisateurs de spectacles, et entament de façon significative l’accès à la culture.

La présente proposition de loi devrait permettre de mettre fin aux pratiques agressives de certains sites Internet qui devenaient de véritables entraves au bon déroulement des manifestations culturelles et sportives.

L’article 3, relatif à la mise en place du passeport biologique des sportifs, introduit sur l’initiative de notre commission, a fait l’unanimité dans cet hémicycle. Il n’a pas été modifié par la commission mixte paritaire, qui a considéré qu’il s’agissait d’un outil novateur et efficace dans le cadre de la lutte contre le dopage. C’est un petit pas pour le législateur, mais un grand pas pour le sport.

L’article 4, issu d’un amendement du Gouvernement adopté au Sénat, prévoit que les modalités d’instauration du passeport biologique feront l’objet d’un rapport établi par un comité de préfiguration et remis au Gouvernement et au Parlement. Rappelons en effet que l’article 3 prévoit l’entrée en vigueur du passeport le 1er juillet 2013. La commission mixte paritaire a amélioré la rédaction du dispositif sans le remettre en cause. Le cadre très précis de son application, limité au domaine sportif et conforme aux exigences de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, le rend garant du respect des libertés individuelles, ce qui est fondamental quand il peut y avoir fichier.

L’article 5 concerne les sanctions qui pourront être prises sur la base des éléments recueillis dans le cadre du passeport biologique. Le respect de la procédure contradictoire et du droit des sportifs est assuré. La rédaction de la disposition avait fait l’objet d’un débat au Sénat. Les deux rapporteurs ont donc proposé aux membres de la commission mixte paritaire un nouveau texte reprenant parfaitement l’esprit de la disposition adoptée au Sénat, tout en en modifiant la lettre.

L’article 6, introduit par le Sénat, a en revanche été supprimé. Il avait pour objet d’interdire aux clubs professionnels de rémunérer les agents de joueurs. La majorité sénatoriale considérait que cette nouvelle possibilité, introduite en 2010, était contre-productive, voire dangereuse pour l’éthique du sport. Soyons francs : nous n’avons pas changé d’avis. Il reste que, dans un esprit consensuel et parce que nous considérions que d’autres dispositions du texte devaient aboutir rapidement, nous avons choisi d’accepter le retrait de cette disposition.

C’est donc dans un esprit constructif que la commission mixte paritaire est parvenue à un accord unanime, et je viens d’apprendre que l’Assemblée nationale avait adopté ses conclusions.

Mes chers collègues, c’est au nom de l’intérêt général et de l’ambition que l’on peut avoir en matière d’éducation par le sport et la culture que la commission de la culture, de l’éducation et de la communication vous invite à adopter ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur plusieurs travées du RDSE et de l’UCR.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. David Douillet, ministre des sports. Monsieur le président, madame la présidente de la commission, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens à vous remercier d’avoir permis l’adoption de la proposition de loi tendant à faciliter l’organisation des manifestations sportives et culturelles, laquelle portait à l’origine uniquement sur la responsabilité des sportifs.

Je salue en particulier le travail constructif mené par le sénateur Jean-Jacques Lozach avec le député Éric Berdoati en commission mixte paritaire. Je me réjouis qu’un consensus ait pu être trouvé sur des questions aussi importantes pour le sport français.

La future loi va permettre de régler une grande partie des problèmes d’assurance liés à l’arrêt de la Cour de cassation du 4 novembre 2010. Il faut rappeler que c’était l’objet premier de cette proposition de loi, qui répondait ainsi à une difficulté réelle pour le mouvement sportif. De nombreux sports, comme le cyclisme, la voile ou les sports mécaniques, étaient menacés du fait de l’explosion des primes d’assurance. Grâce à cette loi, l’avenir de ces sports, comme de tous les emplois qui y sont associés, est désormais assuré.

La proposition de loi a été enrichie au Sénat d’une disposition relative à l’instauration du passeport biologique. Le Gouvernement y a été favorable. J’ai, au demeurant, toujours été très clair sur ma volonté de mener une lutte acharnée contre le dopage et j’avais d’ailleurs déjà demandé au député Éric Berdoati de mener un travail de concertation sur la mise en place du passeport biologique, en lien avec tous les acteurs concernés.

Il était important que la loi ne donne pas qu’une valeur juridique au passeport biologique et qu’elle permette aussi d’infliger des sanctions. Je suis donc très heureux que la commission mixte paritaire ait abouti à une rédaction précise sur la possibilité d’ouvrir une procédure disciplinaire.

Par ailleurs, le Gouvernement a tenu à compléter cette disposition en proposant la rédaction d’un rapport définissant les modalités de contrôle en lien avec le mouvement sportif. Sur un sujet aussi important, on ne peut pas avancer sans se concerter avec le monde du sport, qui est le premier concerné. Je suis très satisfait que cet amendement, que j’avais défendu devant vous, mesdames, messieurs les sénateurs, ait également été retenu en commission mixte paritaire.

Enfin, la loi tendant à faciliter l’organisation des manifestations sportives et culturelles permettra aussi d’interdire la revente illégale de billets. Cette disposition a, dès le début, fait l’unanimité tant à l’Assemblée nationale qu’au Sénat. Je peux vous dire qu’avec le ministre de la culture, Frédéric Mitterrand, nous avons reçu beaucoup de témoignages de satisfaction de la part non seulement du monde du sport, évidemment, mais aussi et surtout du monde de la culture.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je me félicite que, depuis mon arrivée au ministère des sports, deux propositions de loi sur le sport aient pu être adoptées. L’une, très attendue par le mouvement sportif, a été déposée à l’Assemblée nationale, l’autre, au Sénat. Cela montre l’intérêt du Parlement pour les questions sportives et je tiens à vous en remercier très sincèrement. J’espère qu’ensemble nous aurons encore d’autres occasions de défendre le sport français. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l’UCR.)

M. le président. La parole est à Mme Dominique Gillot.

Mme Dominique Gillot. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, selon un calendrier de débat un peu étonnant et tellement inattendu qu’il nous vaut l’absence du rapporteur de la commission mixte paritaire et de celui qui devait être le principal orateur, que je vais m’efforcer de remplacer, nous arrivons au terme de l’examen de cette proposition de loi.

Celle-ci a, contre toute attente, fait l’objet de discussions nourries et d’échanges d’arguments propices à l’amélioration du texte initial. Nous avons le sentiment que les débats, tant à l’Assemblée qu’au Sénat, ont permis de l’enrichir considérablement.

Partis du simple article initial sur la responsabilité civile des pratiquants sportifs, nous sommes parvenus à y inclure, de façon équilibrée et responsable, d’autres sujets d’importance. Ainsi, le passeport biologique et la revente de billets figurent dans le texte final. Ce sont des avancées très intéressantes, qui n’ont été possibles que grâce à un travail constructif entre le Gouvernement et les deux assemblées. Je salue à cet égard le travail opiniâtre et approfondi de Jean-Jacques Lozach, qui a rapporté ce texte au nom de la commission de la culture.

Bien que n’ayant pas participé à la commission mixte paritaire – du fait d’une autre incongruité du calendrier ! –, je me félicite que celle-ci ait pu aboutir, même si je regrette que les dispositions relatives aux agents sportifs aient dû être retirées. L’article 6 est en effet le seul article sur lequel la commission mixte paritaire n’a pu trouver de compromis. Sur ce point, nous nous en tiendrons donc à la législation de 2010, mais une nouvelle réflexion devra être engagée, car chacun s’accorde à dire que le système actuel de paiement des agents est loin d’être parfait.

D’ailleurs, plus globalement, comme ce texte traite de sujets très mouvants, nous devrons rester vigilants, de manière à faire évoluer cette législation, tout en en respectant l’esprit.

Quoi qu'il en soit, le désaccord sur l’article 6 ne doit pas masquer le travail constructif qui a été mené sur l’ensemble des autres articles.

L’article 1er porte sur la responsabilité du fait des choses dans le domaine sportif. Il vient répondre aux conséquences d’un revirement jurisprudentiel opéré par la Cour de cassation en novembre 2010. Cette jurisprudence permet une indemnisation plus facile de la victime d’un préjudice corporel ou matériel du fait d’une chose. En cela, elle revient complètement sur la théorie de l’acceptation des risques qui, depuis longtemps, voulait que le sportif mesure ceux-ci et en accepte les éventuelles conséquences, plus ou moins négatives.

Concrètement, depuis cette jurisprudence, ce sont les fédérations ou les organisateurs qui doivent recourir à leurs assurances pour dédommager les victimes.

S’agissant du dédommagement corporel, le Sénat a pensé que cela allait dans le bon sens, et nous en restons donc à la jurisprudence de 2010 qui est satisfaisante sur ce point.

En revanche, le dédommagement par les fédérations des dégâts matériels posait problème. Souvent et lourdement sollicitées, les assurances des fédérations ont bien évidemment augmenté leurs tarifs, d’où un surcoût pour les organisateurs d’événements sportifs. Il était donc devenu urgent d’agir. Il fallait exclure le matériel du champ de la responsabilité de plein droit, toutes les fédérations subissant les répercussions financières de la jurisprudence de 2010 et les juges eux-mêmes étant réticents à appliquer un tel droit.

La portée exacte de cet article aurait mérité une plus ample expertise. La procédure accélérée ne l’a pas permis et nous ne sommes pas à l’abri de devoir, demain, reprendre notre ouvrage.

En outre, reste en suspens la mise en place d’un fonds d’indemnisation des dommages corporels. Vous aviez, monsieur le ministre, évoqué ce sujet en première lecture, lors de la discussion générale, en indiquant que nous y reviendrions dans la discussion des articles. Mais il n’en a finalement plus été question et le flou subsiste donc.

Malgré tout, la commission mixte paritaire a choisi de retenir la rédaction du Sénat pour l’article 1er, suivant en cela la recommandation des rapporteurs des deux assemblées.

Par l’article 1er bis, introduit sur l’initiative de Jean-Jacques Lozach, il est demandé au Gouvernement de rédiger un rapport sur les enjeux et perspectives d’évolution du régime de responsabilité civile en matière sportive, avec l’appui du Comité national olympique et sportif français.

Les deux rapporteurs ont proposé en CMP de préciser les modalités de la concertation devant être menée par le Gouvernement pour l’écriture de ce rapport, de manière qu’y soit associé plus largement le mouvement sportif.

L’article 2 ayant été voté conforme par le Sénat, il n’a pas été examiné par la CMP.

La revente illégale de billets avait déjà fait l’objet de nombreuses tentatives législatives infructueuses. Cette fois, elle a abouti, sur l’initiative de l’Assemblée nationale. Claude Domeizel évoquera ce sujet tout à l’heure.

L’article 3 s’attaque à un domaine qui fait, lui aussi, l’unanimité, à savoir la lutte contre dopage.

C’est un sujet grave, car il touche à l’esprit même du sport et il est chargé d’enjeux de santé publique. Le dopage est aussi le symbole d’un monde où certains sont prêts à passer au-dessus de toute règle, de tout principe, de toute prudence pour sortir vainqueur et être, de manière généralement très éphémère, le meilleur.

Cela ne correspond évidemment pas à notre conception du sport. Nous avons toujours été en pointe contre le dopage. C’est un combat qui n’est jamais fini, qui doit se renouveler sans cesse, contre un adversaire qui cherche toujours à avoir un temps d’avance.

Suivant une suggestion fort judicieuse de notre rapporteur, le Sénat a introduit des dispositions sur le passeport biologique, permettant sa mise en place à compter du 1er juillet 2013.

Le passeport biologique est un moyen très dissuasif et, en même temps, très respectueux des athlètes, car il est fondé non sur un contrôle ponctuel, mais sur un suivi de long terme. Avec des indications biologiques, il est beaucoup plus difficile pour les tricheurs de recourir au dopage, notamment lors des phases de préparation.

Nous avons, en France, un vrai retard sur ce sujet, alors même que les connaissances scientifiques sont disponibles. Il faut dire qu’il n’y avait pas eu, jusqu’ici, de volonté gouvernementale forte de faire avancer ce dossier.

D’ailleurs, monsieur le ministre, les parlementaires socialistes ont rappelé en CMP que, récemment encore, vous n’étiez pas favorable au passeport biologique. Lors de la discussion de la proposition de loi visant à renforcer l’éthique du sport et les droits des sportifs, vous aviez prétendu que le passeport biologique n’était techniquement et scientifiquement pas au point. Pourtant, des pays comme l’Allemagne ou la Suisse, des fédérations comme l’Union cycliste internationale l’avaient déjà adopté. J’ajoute que le tribunal arbitral du sport, instance sportive de référence, en a fait une preuve reconnue pour l’établissement de sanctions contre le sportif dopé.

Vous vous êtes donc converti à la mise en place du profilage de paramètres biologiques des sportifs, et nous saluons votre évolution sur le sujet.

En tout état de cause, en instituant le passeport biologique, cette proposition de loi vient combler une partie du retard de la France. La CMP a donc logiquement adopté cet article dans le texte du Sénat.

Dans un échange constructif avec vous, monsieur le ministre, le Sénat a souhaité l’instauration d’un comité de préfiguration du passeport biologique, qui devra remettre un rapport au Gouvernement et au Parlement sur les modalités de mise en place du profil biologique des sportifs. Ce comité de préfiguration permettra de procéder à la concertation qui est apparue nécessaire pour ne pas laisser subsister des failles dans lesquelles pourraient s’engouffrer les tricheurs.

Il a été observé en CMP que ce comité, dans sa composition, ne saurait en aucun cas porter atteinte à l’indépendance de l’Agence française de lutte contre le dopage. Son indépendance est en effet la garantie de sa crédibilité. Sous le bénéfice de cette remarque, l’article 4 a été adopté dans la rédaction du Sénat.

Si ce passeport est mis en place, c’est pour permettre d’aller plus loin dans la lutte contre le dopage. Il doit protéger les sportifs, garantir que ceux-ci restent sains et mieux cibler les tricheurs, avec, à terme, un effet dissuasif et préventif. Aussi, il nous est apparu indispensable de lier le passeport à la possibilité d’engager une procédure disciplinaire en cas d’anomalies avérées, détectées dans les paramètres biologiques. Nous avons voulu encadrer solidement cette procédure disciplinaire.

Ainsi, au-delà du juste avertissement sur les conséquences légales, mais aussi éthiques et sanitaires du dopage, un comité d’experts se réunira et son unanimité sera requise pour engager la procédure.

C’est un dispositif responsable, unanimement demandé. L’article 5 a donc été adopté en CMP dans une rédaction élaborée par les deux rapporteurs.

Tout comme la question du dopage, celle des agents sportifs renvoie à une éthique sportive. Cette profession a fait l’objet, en 2010, d’une loi qui présente certes des qualités, mais également bien des défauts. Le Sénat a donc voulu revenir sur cette loi imparfaite en introduisant un nouvel article – l’article 6 – dans la proposition de loi. Celui-ci visait à mettre fin à la possibilité pour les clubs de rémunérer eux-mêmes les agents de leurs sportifs et entraîneurs. Vous vous étiez, monsieur le ministre, publiquement prononcé en faveur de cette disposition. Mais, jugeant que le dispositif était incomplet, c’est « à contrecœur », nous avez-vous dit, que vous avez appelé à rejeter l’article. Pourtant, il est clair qu’il permettrait d’éviter bien des conflits d’intérêts.

Sur ce point, la CMP a révélé un vrai clivage, certains craignant peut-être qu’une plus grande transparence ne nuise aux clubs et n’encourage la fuite des talents. Ce raisonnement ne nous paraît pas juste. Nous sommes persuadés qu’une transparence accrue servira toutes les parties prenantes. En tout cas, le milieu sportif en sortirait grandi.

La commission mixte paritaire dans son ensemble a néanmoins pointé le besoin de rouvrir la réflexion sur les agents de sportifs et leur mode de rémunération. Nous pourrons ainsi appréhender le sujet de manière globale et proposer, à l’avenir, un texte qui prévoie bien tous les cas de figures, puisqu’il est patent que les intervenants prennent des formes diverses pour jouer le rôle d’agent. Il ne s’agit pas de stigmatiser la profession ; il s’agit simplement de repérer les dérives et de les limiter.

Le consensus n’ayant pu se faire en CMP, nous avons sagement écarté l’article 6, avec l’idée d’y revenir bientôt.

Malgré cette renonciation, le texte conserve une grande portée et améliore, comme nous le souhaitions, des aspects spécifiques de la vie sportive et culturelle auxquels nous sommes attachés : reconnaissance des droits des victimes, sécurisation des dédommagements et indemnités, encadrement de la responsabilité civile, moralisation de la vente de billets, éthique et sécurité sanitaire des sportifs grâce à une nouvelle étape de contrôle et de lutte contre le dopage.

La commission mixte paritaire a d’ailleurs adopté le nouvel intitulé proposé par le Sénat pour mieux englober ces aspects et donner sens à cet acte législatif auquel nous avons affecté notre détermination et nos valeurs.

En conclusion, je pense que nous pouvons largement nous réjouir des résultats de la commission mixte paritaire et adopter ses conclusions, comme l’a fait l’Assemblée nationale. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

Mme Nathalie Goulet. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Michel Le Scouarnec.

M. Michel Le Scouarnec. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission, mes chers collègues, je voudrais rappeler les raisons de fond qui ont conduit le groupe CRC à s’abstenir sur ce texte, à défaut de voter contre, car le texte issu de la CMP n’est pas de nature à nous faire changer d’avis.

Le texte déposé à l’Assemblée nationale ne comportait originellement qu’un article qui concernait le régime de responsabilité sans faute du fait des choses dans le cadre de la pratique normale d’une activité sportive.

La proposition de loi visait alors uniquement à revenir sur un arrêt de la Cour de cassation du 4 novembre 2010. Cette décision a en effet modifié les règles de responsabilité sans faute, faisant porter cette dernière sur les fédérations, que ce soit lors des compétitions sportives, comme cela était déjà le cas, mais aussi pendant les entraînements, et c’était là une nouveauté.

Ce n’est donc plus le sportif gardien de la chose qui doit indemniser la victime, mais la fédération, que le dommage soit corporel ou matériel. En conséquence, les fédérations ont vu leurs primes d’assurance augmenter. L’enjeu est donc quasi exclusivement financier.

L’article 1er vise à établir une nouvelle distinction en prévoyant que les fédérations sont responsables, et donc que leurs assurances indemnisent les éventuels préjudices corporels des victimes, mais non ceux qui sont causés sur des biens : la victime en a alors la responsabilité et son assurance, la charge.

Nous restons donc formellement opposés à cet article, n’y voyant pas de justifications théoriques et juridiques valables. Il est le fruit d’un bon travail de lobbying de la part des fédérations de sports mécaniques, qui ne sont pourtant pas, à nos yeux, celles qui connaissent les plus grandes difficultés. C’est sur ce point que nous divergeons.

En revanche, nous ne nous opposons pas totalement à ce texte, car il comporte de nouveaux articles auxquels nous sommes très favorables.

Il en est notamment ainsi de l’encadrement de la revente illicite de billets, qui permettra de lutter contre la prolifération de sociétés commerciales dont l’activité consiste en la revente de billets de manifestations culturelles ou sportives à des prix dépassant largement la valeur initiale du titre d’accès. Cette mesure est donc parfaitement morale.

Il s’agit non de pénaliser les personnes qui, de manière exceptionnelle, revendent leurs billets à cause d’un quelconque empêchement, mais bien de condamner ceux qui font commerce de l’achat et de la revente de billets de manière régulière, spéculant sur la valeur du billet en créant une pénurie factice au détriment du consommateur et en nuisant à l’accès du plus grand nombre à la culture.

De même, les dispositions visant à lutter contre le dopage ont été introduites avec le suivi du profil biologique des sportifs, sous la responsabilité de l’Agence française de lutte contre le dopage. Il s’agit là d’un point très positif.

Pour conclure, je regrette que, sur la forme, nous ayons aujourd’hui un texte qui traite de sujets qui n’ont pas vraiment de liens entre eux. Cette méthode de travail fondée sur des cavaliers législatifs nuit à la clarté des débats puisque nous devons in fine nous prononcer par un vote unique sur des dispositions diverses : c’est ce qui nous conduit à nous abstenir.