M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Marie Payet, rapporteur. Cet amendement de repli vise à mettre en place une présidence alternée à titre expérimental.
Sur la forme, l’absence de durée fixée à l’expérimentation ferait courir un risque d’inconstitutionnalité à la mesure, si elle était adoptée.
Sur le fond, cette expérimentation présente en effet un intérêt, mais je préfère que nous adoptions ce texte conforme pour que la réforme entre en vigueur rapidement. J’estime que la question de la présidence alternée n’est pas le cœur de cette réforme.
Mme Annie David. Si, elle l’est !
Mme Anne-Marie Payet, rapporteur. Nous pourrons adopter l’expérimentation dans un second temps, une fois le paritarisme bien installé.
La commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Le Gouvernement émet lui aussi un avis défavorable.
Le texte adopté par la commission permet, à mon avis, de trouver en toute transparence un juste équilibre entre les exigences du dialogue au sein du conseil d’administration et celles de l’efficacité opérationnelle.
D’ores et déjà, la gouvernance de certains services déroge à cette règle générale, notamment à Nice. Ces conditions dérogatoires seront précisées dans le décret d’application de la présente loi, qui renverra sur ce point au règlement intérieur du service.
Je tenais à préciser l’état d’esprit du législateur, de façon que les futurs décrets d’application de ce texte y restent fidèles.
M. Jean-Pierre Fourcade. Très bien !
M. le président. Monsieur Godefroy, allez-vous exprimer votre satisfaction en retirant cet amendement ? (Sourires.)
M. Jean-Pierre Godefroy. Satisfaction, c’est peut-être un grand mot, monsieur le président ! (Nouveaux sourires.)
Cela étant, je remercie M. le ministre de cette précision et, comme je sais qu’il tiendra parole, je retire mon amendement. (Très bien ! sur les travées de l’UMP.)
Mme Muguette Dini, présidente de la commission des affaires sociales. Bravo !
M. le président. L'amendement n° 43 est retiré.
L'amendement n° 44, présenté par M. Godefroy, Mmes Alquier, Blandin, Le Texier, Jarraud-Vergnolle, Campion, Demontès, Ghali, Printz, Schillinger et San Vicente-Baudrin, MM. Cazeau, Daudigny, Desessard, Gillot, Jeannerot, Kerdraon, S. Larcher, Le Menn, Teulade et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Les représentants des salariés bénéficient des dispositions de l’article L. 2411-1 du code du travail. »
La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy.
M. Jean-Pierre Godefroy. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 44 est retiré.
Je mets aux voix l'article 3.
(L'article 3 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 3
M. le président. L'amendement n° 21, présenté par Mme David, M. Fischer, Mme Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :
Après l'article 3
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le dernier alinéa de l’article L. 4121-2 du code du travail est ainsi rédigé :
« 9° Réaliser un livret d’information sur les risques auxquels les salariés peuvent être exposés, les droits et les procédures en matière de santé au travail et donner les instructions appropriées aux travailleurs ainsi que les coordonnées du service de santé au travail. »
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. L’article L. 4121–2 du code du travail est celui qui pose les principes généraux de la prévention et, plus précisément, les engagements des employeurs en la matière.
Nous proposons d’y ajouter un alinéa imposant à l’employeur de remettre à chaque salarié, lors de son embauche, un livret d’information recensant les risques auxquels les salariés peuvent être exposés.
Il s’agit naturellement des risques connus et prévisibles, à l’image des maladies respiratoires pour les salariés des boulangeries industrielles ou encore des troubles musculo-squelettiques pour les travailleurs contraints de travailler dans des postures d’ores et déjà identifiées comme causes potentielles de pathologies.
Nous proposons également que ce livret informe les salariés des procédures en matière de santé. En effet, ceux-ci méconnaissent trop souvent les possibilités légales leur permettant de faire valoir leurs droits en ce domaine, notamment dans les petites entreprises où les implantions syndicales sont quasi inexistantes.
Cet amendement nous semble d’autant plus important que cette proposition de loi, si elle devait être adoptée, modifierait considérablement le cadre actuel. La disposition que nous proposons d’y ajouter nous apparaît comme un outil complémentaire confié aux salariés.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Marie Payet, rapporteur. Cet amendement est satisfait.
Prévoir que tout employeur, quelle que soit la taille de l’entreprise, doit réaliser un « livret d’information » constitue une contrainte très importante, alors même que le droit actuel, plus souple, satisfait à cet objectif. En effet, l’article L. 4121–2 prévoit que l’employeur donne les instructions appropriées aux travailleurs.
La commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.
Mme Annie David. Madame la rapporteur, je n’ai pas en tête les termes exacts de cet article, mais celui-ci ne précise pas que l’employeur donne les instructions en question par écrit. C’est bien pourquoi notre proposition visant à ce que soit réalisé un livret d’information à l’intention des salariés nous paraît compléter utilement cet article. Nous maintenons donc notre amendement.
M. Jean-Pierre Fourcade. Mais nous, nous souhaitons voter conforme cette proposition de loi !
M. le président. L'amendement n° 22, présenté par Mme David, M. Fischer, Mme Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :
Après l'article 3,
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 4622-3 du code du travail, il est inséré un article L. 4622-3-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 4622-3-1. – Au titre des objectifs de prévention tels que définis à l’article L. 4622-3, la consultation médicale professionnelle constitue une activité clinique individuelle qui renseigne sur les objectifs, la nature et les conditions d’exercice du travailleur, notamment les risques professionnels et psychosociaux, auxquels il est susceptible d’être exposé.
« Chaque salarié bénéficie obligatoirement, au moins tous les douze mois, d’une consultation médicale.
« Lors de cet entretien individuel, le salarié est informé sur l’influence du travail sur sa santé, sur les risques qu’il encourt et les moyens de les prévenir.
« La consultation médicale professionnelle répond aux obligations déontologiques et légales en matière d’aide à l’accès aux droits sociaux, en particulier en ce qui concerne la rédaction de certificats médicaux constatant les atteintes à la santé dues au travail.
« Conformément aux articles L. 1111-2 du code de la santé publique et L. 4624-1 du présent code, la consultation médicale professionnelle s’exerce dans l’intérêt premier de la santé du travailleur et de son maintien ou retour dans l’emploi.
« Le volet “santé au travail” du dossier mentionné aux articles L. 1111-14 et suivants du code de la santé publique constitue le support permettant le plein exercice des missions dévolues au médecin du travail. »
La parole est à Mme Isabelle Pasquet.
Mme Isabelle Pasquet. Par cet amendement, nous entendons renforcer la place des consultations médicales, qui sont, pour bon nombre de salariés, la seule visite médicale de l’année.
Le rôle du médecin du travail est extrêmement important puisqu’il a une fonction préventive qui consiste à éviter l’altération de la santé des travailleurs du fait de leur travail.
À cet effet, les visites périodiques des médecins du travail sont censées lui permettre de vérifier que les recommandations formulées par le CHSCT ont bien été respectées et, en outre, de contrôler régulièrement la santé des salariés.
De très nombreux rapports, à l’image du rapport Gosselin, ont mis en évidence l’importance de ces visites médicales. Or celles-ci sont beaucoup trop espacées, notamment en raison du manque criant de médecins du travail.
Le déficit médical actuel, qui ne cesse de s’accroître en raison de la pénurie grandissante de médecins du travail, nuit à cette notion de prévention. Celle-ci ne peut que reposer sur un double objectif : le constat clinique et la régularité des consultations médicales.
C’est ce qui justifie cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Marie Payet, rapporteur. Cet amendement vise à inscrire, de manière très détaillée, dans la partie législative du code du travail, le principe et les modalités de la « consultation médicale professionnelle ». Il prévoit notamment qu’une telle consultation doit avoir lieu au moins tous les douze mois.
Il pose en fait la question de la périodicité de la visite médicale. Depuis 2004, elle est censée avoir lieu au moins tous les vingt-quatre mois ; or nous savons très bien que cette obligation n’est déjà pas respectée.
Surtout, sa fréquence ne doit pas forcément être uniforme pour tous les postes de travail.
C’est pourquoi la proposition de loi prévoit une période de transition et d’évaluation pour fixer les nouvelles modalités de la visite médicale du travail pour les salariés.
La commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 22.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 3 bis
(Non modifié)
La même section 2 est complétée par un article L. 4622-11-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 4622-11-1. – L’organisation et la gestion du service de santé au travail sont placées sous la surveillance :
« 1° Soit d’un comité interentreprises constitué par les comités d’entreprise intéressés ;
« 2° Soit d’une commission de contrôle composée pour un tiers de représentants des employeurs et pour deux tiers de représentants des salariés. Son président est élu parmi les représentants des salariés. » – (Adopté.)
Article 4
(Non modifié)
La même section 2 est complétée par des articles L. 4622-11-2 et L. 4622-12 ainsi rédigés :
« Art. L. 4622-11-2. – Dans le service de santé au travail interentreprises, une commission médico-technique a pour mission de formuler des propositions relatives aux priorités du service et aux actions à caractère pluridisciplinaire conduites par ses membres.
« Art. L. 4622-12. – (Non modifié) »
M. le président. L'amendement n° 23, présenté par Mme David, M. Fischer, Mme Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Remplacer les mots :
aux priorités du service et aux actions à caractère pluridisciplinaire conduites par ses membres
par les mots :
aux missions qui leur sont confiées dans le cadre de l’article L. 4622–2
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Même si beaucoup, ici, souhaitent un vote conforme, nous continuerons de défendre nos amendements. Chacun est dans son rôle !
Mme Muguette Dini, présidente de la commission des affaires sociales. Bien sûr !
Mme Annie David. L’article 4 de cette proposition de loi prévoit l’élaboration d’un projet de service pluriannuel par les services de santé au travail interentreprises et confère une valeur législative, et non plus réglementaire, à la commission médico-technique.
Nous estimons, pour notre part, qu’il n’est pas acceptable de réduire le champ de compétence des commissions médico-techniques aux priorités du service, alors que l’objectif de préservation et de prévention en santé au travail est un objectif général.
Si nous ne sommes pas opposés à ce qu’un plan pluriannuel définisse les missions des services de santé au travail, il faut cependant que cette définition soit l’œuvre d’une direction réellement paritaire et que ce plan soit de nature à intégrer la totalité des missions dévolues aux services de santé au travail.
Sur le fond, nous craignons fort que la limitation de l’action de ces derniers à des priorités de service ne soit en réalité qu’une mesure comptable destinée à gérer la pénurie de médecins en concentrant leurs missions ou à réduire les coûts de cette médecine, que certains employeurs estiment trop importants.
Par cohérence avec nos positions et avec les amendements que nous avons déjà présentés, nous préconisons donc de confier à la commission médico-technique le soin de formuler des propositions quant aux actions à mener dans les entreprises pour éviter toute altération de la santé des travailleurs du fait de leur travail.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Marie Payet, rapporteur. Là encore, la rédaction de l’objet de cet amendement laisse perplexe. Sur mon initiative, la commission et le Sénat ont conforté l’existence et la place de la commission médico-technique au sein des services de santé au travail et, si vous lisez bien cet article, vous verrez que celle-ci a aussi pour mission de formuler des propositions relatives aux actions à caractère pluridisciplinaire conduites dans le service. Elle n’est donc pas cantonnée aux priorités du service.
Notre formulation est à la fois souple et ambitieuse ; il reviendra aux différents partenaires de faire vivre cette commission.
La commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.
Mme Annie David. Permettez-moi de relire toute la phrase en cause : « Dans le service de santé au travail interentreprises, une commission médico-technique a pour mission de formuler des propositions relatives aux priorités du service et aux actions à caractère pluridisciplinaire conduites par ses membres ».
Comme je vous l’ai déjà dit tout à l’heure, nous ne sommes pas favorables à ce que les services de santé au travail se voient assigner des objectifs prioritaires pour la simple raison que leur conseil d’administration sera présidé par un représentant des employeurs, lequel disposera d’une voix prépondérante. Or, si l’on continue à laisser faire les employeurs, nous ne sommes pas près de voir diminuer le nombre des morts dans les entreprises, et je pèse mes mots ! Le cas de l’amiante en porte témoignage.
M. le président. Je mets aux voix l'article 4.
(L'article 4 est adopté.)
Article 5 bis
(Non modifié)
L’article L. 1237-15 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour les médecins du travail, la rupture conventionnelle est soumise à l’autorisation de l’inspecteur du travail, après avis du médecin inspecteur du travail. »
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 45, présenté par M. Godefroy, Mmes Alquier, Blandin, Le Texier, Jarraud-Vergnolle, Campion, Demontès, Ghali, Printz, Schillinger et San Vicente-Baudrin, MM. Cazeau, Daudigny, Desessard, Gillot, Jeannerot, Kerdraon, S. Larcher, Le Menn, Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 2
Après les mots :
Pour les médecins du travail
insérer les mots :
et les professionnels membres d’une équipe pluridisciplinaire de santé
II. – Compléter cet article par deux alinéas ainsi rédigés :
« Pour les intervenants en prévention des risques professionnels et les infirmiers, le licenciement est soumis à l’autorisation de l’inspecteur du travail dans les conditions prévues à l’article L. 4623-5.
« De même, la rupture avant l’échéance du terme du contrat de travail à durée déterminée en raison d’une faute grave ou à l’arrivée du terme lorsque l’employeur n’envisage pas de renouveler un contrat comportant une clause de renouvellement, ne peut intervenir qu’après autorisation de l’inspecteur du travail dont dépend le service de santé au travail. »
La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy.
M. Jean-Pierre Godefroy. En vertu de la pluridisciplinarité, les personnels infirmiers seront de plus en plus souvent amenés à réaliser des actes paramédicaux. Il est donc nécessaire que ces personnels bénéficient d’une protection contre tout licenciement abusif.
Cette proposition figure en toutes lettres dans le rapport de MM. Dellacherie, Frimat et Leclercq, La santé au travail. Vision nouvelle et professions d’avenir : « L’indépendance technique des infirmières “santé travail”, qui, pour deux tiers d’entre elles, travaillent dans les entreprises et ne dépendent pas d’un service de santé au travail, serait en outre garantie par l’attribution du statut de salariées protégées. »
Ce même rapport précise que cette garantie statutaire devrait d’abord bénéficier à « celles qui réalisent des actes médicaux sur délégation expresse du médecin du travail ».
M. le président. L'amendement n° 24, présenté par Mme David, M. Fischer, Mme Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Après les mots :
médecins du travail
insérer les mots :
et les personnels concourant aux services de santé au travail
La parole est à Mme Pasquet.
Mme Isabelle Pasquet. L’article 5 bis tend à renforcer la garantie accordée aux médecins du travail en cas de rupture conventionnelle du contrat de travail.
Nous nous réjouissons que les médecins du travail puissent bénéficier d’une telle protection en cas de rupture conventionnelle. Toutefois, nous considérons que l’ensemble des personnels concourant aux services de santé au travail devrait jouir d’une protection identique.
Nous aurions certes préféré étendre cette protection à l’ensemble des causes de rupture de contrat de travail, mais la règle de l’entonnoir nous en empêche et nous ne pouvons qu’amender cet article 5 bis, c'est-à-dire prévoir des protections en cas de rupture conventionnelle, procédure qui, ce n’est un secret pour personne, permet de contourner les règles applicables aux licenciements.
Sans revenir sur ce que nous avons dit précédemment, je rappelle que, à nos yeux, seule la garantie effective de l’indépendance et de l’autonomie de tous les acteurs des services de santé au travail peut assurer la protection réelle de la santé des salariés.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Marie Payet, rapporteur. L’amendement n° 45 vise à étendre la protection statutaire à tous les membres de l’équipe pluridisciplinaire. Le Sénat a déjà examiné et rejeté plusieurs amendements de ce type. La commission émet donc un avis défavorable.
L’amendement n° 24 tend à élargir la protection statutaire aux personnels concourant aux services de santé au travail. Sa rédaction englobe ainsi des personnes sans lien direct avec la santé au travail mais qui, par exemple, effectuent des tâches administratives. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 5 bis.
(L'article 5 bis est adopté.)
Article 6
(Non modifié)
I. – Au chapitre V du titre II du livre VI de la quatrième partie du même code, il est inséré un article L. 4625-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 4625-2. – Un accord collectif de branche étendu peut prévoir des dérogations aux règles relatives à l’organisation et au choix du service de santé au travail ainsi qu’aux modalités de surveillance de l’état de santé des travailleurs dès lors que ces dérogations n’ont pas pour effet de modifier la périodicité des examens médicaux définie par le présent code.
« Ces dérogations concernent les catégories de travailleurs suivantes :
« 1° Artistes et techniciens intermittents du spectacle ;
« 2° Mannequins ;
« 3° Salariés du particulier employeur ;
« 4° Voyageurs, représentants et placiers.
« L’accord collectif de branche étendu après avis du Conseil national de l’ordre des médecins peut prévoir que le suivi médical des salariés du particulier employeur et des mannequins soit effectué par des médecins non spécialisés en médecine du travail qui signent un protocole avec un service de santé au travail interentreprises. Ces protocoles prévoient les garanties en termes de formation des médecins non spécialistes, les modalités de leur exercice au sein du service de santé au travail ainsi que l’incompatibilité entre la fonction de médecin de soin du travailleur ou de l’employeur et le suivi médical du travailleur prévu par le protocole. Ces dispositions ne font pas obstacle à l’application de l’article L. 1133-3.
« En cas de difficulté ou de désaccord avec les avis délivrés par les médecins mentionnés au septième alinéa du présent article, l’employeur ou le travailleur peut solliciter un examen médical auprès d’un médecin du travail appartenant au service de santé au travail interentreprises ayant signé le protocole. »
I bis. – En l’absence d’accord étendu dans un délai de douze mois à compter de la date de promulgation de la présente loi, un décret en Conseil d’État pris après avis du Conseil national de l’ordre des médecins détermine les règles applicables à ces catégories de travailleurs.
II. – Le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l’évaluation du recours à des médecins non spécialisés en médecine du travail prévu à l’article L. 4625-2 du code du travail, dans un délai de trois ans après l’entrée en vigueur de la présente loi.
M. le président. La parole est à Mme Annie David, sur l'article.
Mme Annie David. L’article 6 prend prétexte d’une situation réellement alarmante pour apporter des réponses qui le sont tout autant.
Nous partageons le constat selon lequel certaines catégories professionnelles sont peu couvertes par la médecine du travail, voire ne le sont pas du tout, du fait de la multiplicité des employeurs ou des conditions d’exercice de leur activité. Quoi qu'il en soit, l’absence ou la quasi-absence d’accès à la médecine du travail peut constituer des facteurs aggravants dans l’apparition de maladies professionnelles.
Je ne prendrai qu’un exemple, celui des VRP – voyageurs représentants et placiers –, qui sont appelés à se déplacer beaucoup, à dormir à l’hôtel, et sont peu présents au siège même de leur entreprise. Ces déplacements, souvent effectués en voiture, provoquent les souffrances physiques consécutives à la posture assise prolongée, mais aussi des souffrances psychiques résultant à la fois des pressions économiques qui pèsent sur les VRP et des phases répétées d’éloignement de leurs proches.
Pour nous, il serait inadmissible que, prenant prétexte de ce que leur suivi médical est trop difficile ou trop espacé, on en vienne à renoncer purement et simplement à l’accès de ces salariés à la médecine du travail. Or c’est précisément ce qui nous est proposé avec l’article 6, celui-ci prévoyant que les médecins généralistes se substituent aux médecins du travail.
Ce n’est pas être désobligeant à l’égard des médecins de ville que de dire que leur formation ne leur donne pas les compétences suffisantes pour diagnostiquer des maladies professionnelles, pour établir le lien entre une pathologie et une activité professionnelle ou encore pour proposer à l’employeur des mesures de protection telles celles qui sont visées à l’article 2 de cette proposition de loi.
Par ailleurs, cet article donne à croire que la médecine du travail pourrait être pratiquée indistinctement par des médecins expressément formés à l’exercice de cette spécialité et par d’autres qui n’auraient pas suivi ce parcours spécifique.
On peut d’ailleurs se demander si cette expérimentation ne porte pas en germe la disparition pure et simple de la médecine du travail : s’opérant progressivement, cette disparition suivrait le rythme de l’extinction programmée du corps des médecins du travail. En effet, il ne faut pas perdre de vue que 55 % d’entre eux ont plus de cinquante-cinq ans et que, du fait d’une revalorisation insuffisante de la profession, les nouvelles vocations sont rares.
D’autres pistes devraient être explorées à l’issue de cette expérimentation. Pourquoi ne pas offrir à ces salariés de dépendre, à titre exceptionnel, de services de santé au travail d’autres entreprises du même secteur professionnel ? Pourquoi ne pas créer, à l’échelle départementale, des unités mobiles qui seraient susceptibles d’accueillir ces professionnels au gré de leurs déplacements ?
En tout état de cause, ces dispositions ne nous satisfont pas et nous voterons contre cet article.
Monsieur le président, cette intervention vaudra défense de notre amendement n° 28.
M. le président. L'amendement n° 28, présenté par Mme David, M. Fischer, Mme Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
Cet amendement a été défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Marie Payet, rapporteur. Cet amendement de suppression de l’article 6 a déjà été présenté en première lecture et rejeté par le Sénat.
Aujourd’hui, certaines professions sont très mal suivies par la médecine du travail. Cet article entend remédier à cette situation, notamment en prévoyant un suivi spécifique par un médecin d’une autre spécialité ayant reçu une formation adaptée, dans le cadre d’un protocole.
La France est l’un des rares pays à attribuer une sorte de monopole aux médecins du travail. C’est peut-être l’héritage de notre histoire économique et de l’essor pris par les médecins d’usine au cours du XIXe siècle.
Mme Anne-Marie Payet, rapporteur. Or ce modèle atteint ses limites face aux nouvelles formes d’emplois. Je ne crois pas que les pays dotés d’une autre organisation soient dans une situation catastrophique en termes d’accidents du travail et de prévention des risques professionnels, bien au contraire.
En conséquence, cet article permet d’expérimenter de nouvelles méthodes et constitue une des solutions à mettre en œuvre face à la crise actuelle de la médecine du travail.
La commission émet donc un avis défavorable.