M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Sueur. Notre groupe votera l’amendement de la commission des finances pour les raisons de principes exposées par M. Jarlier et reprises par M. Arthuis.
Comme l’a indiqué M. Vasselle, nous connaissons bien le fonctionnement de ces commissions. Elles jouent un rôle positif, tant pour la DGE que pour la DDR.
Dans la mesure où l’on veut fusionner les deux fonds, il est à nous yeux de bon sens de fusionner également les deux commissions d’élus. Elles pourront ainsi continuer de s’exprimer comme elles le font actuellement. Les élus apprécient d’être associés aux décisions qui sont prises ; ils doivent continuer à l’être.
M. le président. La parole est à M. Jean Louis Masson, pour explication de vote.
M. Jean Louis Masson. Cette année, par un simple coup de crayon, le préfet de la Moselle a transféré à la DGE la moitié des crédits dont il disposait au titre de la DDR.
Je ne vois pas où réside l’innovation du nouveau système. Je ne vois pas davantage pourquoi nous nous posons des questions de nature métaphysique puisque, aujourd’hui, un préfet peut, indépendamment des votes de la commission d’élus, transférer de manière arbitraire des crédits de la DDR vers la DGE.
Au Parlement, on nous explique que la DGE et la DDR sont deux dotations distinctes, dont les finalités et les contextes sont différents ! J’ai donc été très surpris par la décision du préfet de la Moselle.
On s’achemine maintenant vers un nouveau système, mais le problème essentiel demeure : les arbitrages rendus par les préfets quant aux attributions de la DGE et de la DDR sont-ils purement techniques, ou bien tiennent-ils compte du contexte politique ? En Moselle, on peut parfois s’interroger sur ce point !
M. le président. L'amendement n° II-17, présenté par M. Jarlier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 44
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
... - Pour 2011, la commission instituée par l’article L. 2334-37 du code général des collectivités territoriales est constituée des commissions mentionnées aux articles L. 2334-35 et L. 2334-40 du même code dans leur rédaction antérieure à la loi n° …du … de finances pour 2011.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Pierre Jarlier, rapporteur spécial. Afin de ne pas retarder les attributions de subventions en 2011, le présent amendement prévoit que la commission d’élus compétente pour la dotation de développement rural, la DDR, soit constituée en 2011 de la fusion des deux commissions existantes, celle chargée de la dotation globale d’équipement, la DGE, et celle chargée de la DDR.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Philippe Richert, ministre. Avis favorable.
M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle, pour explication de vote.
M. Alain Vasselle. J’approuve bien évidemment cet amendement, mais il faudra nous expliquer, monsieur le ministre, comment va fonctionner cette commission.
En effet, les modalités de fonctionnement des commissions en charge de la DGE et de la DDR étaient fort différentes. Ainsi, pour la DGE, on distinguait selon que cette dotation concernait les communes de moins de 2000 habitants ou de plus de 2000 habitants. Cette distinction va-t-elle subsister ? Aura-t-on encore une liberté d’appréciation pour définir les domaines d’intervention auprès de chaque collectivité ?
Je suis assez inquiet de la manière dont ce fonds va fonctionner. J’espère que les circulaires d’application permettront d’y voir un peu plus clair, car l’on ne peut pas se contenter de voter une fusion de deux fonds sans en mesurer pleinement les conséquences.
M. le président. Je mets aux voix l'article 82, modifié.
(L'article 82 est adopté.)
Article 83
Le montant du fonds de soutien aux communes touchées par le redéploiement territorial des armées prévu à l’article L. 2335-2-1 du code général des collectivités territoriales est fixé à 10 millions d’euros en 2011. – (Adopté.)
Article 84
Au 3° de l’article L. 3334-6-1 du code général des collectivités territoriales, les mots : « revenu minimum d’insertion » sont remplacés par les mots : « montant forfaitaire mentionné au 2° de l’article L. 262-2 du code de l’action sociale et des familles ». – (Adopté.)
Article 85
Le 1° du II de l’article L. 5211-33 du même code est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« À compter de 2011, cette garantie s’applique lorsque leur coefficient d’intégration fiscale est supérieur à 0,6. » ;
2° Le second alinéa est ainsi modifié :
a) Dans la première phrase, les mots : « en 2005 » sont supprimés ;
b) La seconde phrase est supprimée. – (Adopté.)
Article 86
I. – L’article L. 2334-4 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L. 2334-4. – I. – Pour l’année 2011, le potentiel fiscal d’une commune est déterminé par application aux bases communales des quatre taxes directes locales du taux moyen national d’imposition de chacune de ces taxes. Pour la taxe foncière sur les propriétés bâties, la taxe foncière sur les propriétés non bâties et la taxe d’habitation, les bases retenues sont les bases brutes de la dernière année dont les résultats sont connus servant à l’assiette des impositions communales. Les taux moyens nationaux sont ceux constatés lors de la dernière année dont les résultats sont connus. Pour la taxe professionnelle, les bases et le taux moyen sont ceux utilisés pour le calcul du potentiel fiscal en 2010.
« Le potentiel fiscal est majoré du montant perçu l’année précédente au titre de la part de la dotation forfaitaire correspondant aux montants antérieurement perçus au titre du I du D de l’article 44 de la loi de finances pour 1999 (n° 98-1266 du 30 décembre 1998).
« Pour les communes appartenant à un établissement public faisant application du régime fiscal mentionné à l’article 1609 nonies C ou de celui mentionné à l’article 1609 quinquies C, le potentiel fiscal est majoré de la part de la dotation de compensation prévue au premier alinéa de l’article L. 5211-28-1 perçue par l’établissement public de coopération intercommunale l’année précédente, correspondant aux montants antérieurement perçus au titre du I du D de l’article 44 de la loi de finances pour 1999 précitée avant prélèvement effectué en application du 1 du III de l’article 29 de la loi de finances pour 2003 (n° 2002-1575 du 30 décembre 2002). Cette part est répartie entre les communes membres de l’établissement public de coopération intercommunale au prorata des diminutions de base de taxe professionnelle, dans chacune de ces communes, ayant servi au calcul de la compensation prévue au I du D de l’article 44 de la loi de finances pour 1999 précitée. Le montant ainsi obtenu est minoré du prélèvement subi par l’établissement public de coopération intercommunale en application du 1 du III de l’article 29 de la loi de finances pour 2003 précitée, réparti entre les communes au prorata de leur population.
« II. – À compter de 2012, le potentiel fiscal d’une commune est déterminé par application aux bases communales des impositions directes locales du taux moyen national d’imposition de chacune de ces impositions. Les impositions prises en compte sont celles mentionnées au I de l’article 1379 du code général des impôts, à l’exception des impositions prévues aux 6°, 7° et 8° de cet article.
« Il comprend en outre les montants prévus aux deuxième et troisième alinéas du I.
« Les bases retenues sont les bases brutes de la dernière année dont les résultats sont connus servant à l’assiette des impositions communales.
« Le potentiel fiscal est majoré des montants prévus aux 1.1 et 2.1 de l’article 78 de la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 de finances pour 2010.
« Le potentiel financier d’une commune est égal à son potentiel fiscal, majoré du montant de la dotation forfaitaire perçu par la commune l’année précédente, hors la part prévue au premier alinéa du 3° de l’article L. 2334-7. Il est minoré le cas échéant des prélèvements sur le produit des impôts directs locaux mentionnés aux deux derniers alinéas de l’article L. 2334-7 subis l’année précédente. Pour la commune de Paris, il est minoré du montant de sa participation obligatoire aux dépenses d’aide et de santé du département constaté dans le dernier compte administratif, dans la limite du montant constaté dans le compte administratif de 2007.
« Le potentiel financier par habitant est égal au potentiel financier de la commune divisé par le nombre d’habitants constituant la population de cette commune, tel que défini à l’article L. 2334-2. »
II. – Le III de l’article L. 2531-13 du même code est par un alinéa ainsi rédigé :
« En 2011, les bases et les taux de taxe professionnelle retenus sont ceux utilisés pour l’application du II en 2010. »
III. – L’article L. 3334-6 du même code est complété par trois alinéas ainsi rédigés :
« Pour l’année 2011, les bases et le taux moyen de taxe professionnelle retenus sont ceux utilisés pour le calcul du potentiel fiscal en 2010.
« À compter de 2012, les impositions prises en compte pour le calcul du potentiel fiscal sont celles mentionnées au I de l’article 1586 du code général des impôts, à l’exception des impositions prévues au 2° de cet article. Le potentiel fiscal d’un département est déterminé par application aux bases départementales des impositions directes locales du taux moyen national d’imposition de chacune de ces impositions.
« Le potentiel fiscal est majoré des montants prévus aux 1.2 et 2.2 de l’article 78 de la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 de finances pour 2010. »
IV. – L’article L. 4332-5 du même code est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Pour l’année 2011, les bases et le taux moyen de taxe professionnelle retenus sont ceux utilisés pour le calcul du potentiel fiscal 2010 ; »
2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« À compter de 2012, les impositions prises en compte pour le calcul du potentiel fiscal sont celles prévues à l’article 1599 bis du code général des impôts. Le potentiel fiscal d’une région est déterminé par application aux bases brutes servant à l’assiette des impositions régionales du taux moyen national d’imposition de chacune de ces impositions. Il est majoré des montants prévus aux 1.3 et 2.3 de l’article 78 de la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 de finances pour 2010. »
V. – Le II de l’article L. 5211-30 du même code est complété par cinq alinéas ainsi rédigés :
« Pour l’année 2011, les bases et les taux moyens de taxe professionnelle retenus pour l’application du présent article sont ceux utilisés pour le calcul du potentiel fiscal en 2010. Pour les établissements publics de coopération intercommunale créés ou ayant connu des changements de périmètre après le 1er janvier 2010, les bases de taxe professionnelle retenues sont égales à la somme des bases de taxe professionnelle des communes membres de l’établissement au 31 décembre 2010 utilisées pour le calcul de leur potentiel fiscal 2010.
« À compter de 2012, le potentiel fiscal d’un établissement public de coopération intercommunale est déterminé par application aux bases d’imposition des taxes directes locales de l’établissement du taux moyen national d’imposition de chacune de ces impositions. Les impositions prises en compte sont celles mentionnées à l’article 1379-0 bis du code général des impôts, à l’exception du premier alinéa du V et du VI.
« À compter de 2012, le potentiel fiscal de chaque établissement public de coopération intercommunale est calculé par adjonction au potentiel fiscal, tel que défini à l’alinéa précédent, des potentiels fiscaux de chacune de leurs communes membres appartenant à l’établissement au 31 décembre de l’année précédente, tels que définis à l’article L. 2334-4, hors la part prévue au troisième alinéa.
« Les bases retenues sont les bases brutes de la dernière année dont les résultats sont connus servant à l’assiette des impositions intercommunales.
« Le potentiel fiscal est majoré des montants prévus aux 1.1 et 2.1 de l’article 78 de la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 de finances pour 2010. »
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° II-18 rectifié est présenté par M. Jarlier, au nom de la commission des finances.
L'amendement n° II-195 est présenté par MM. Bel, Sueur et Patriat, Mme Bricq, MM. Rebsamen et Percheron, Mme Alquier, M. Hervé et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. Alinéas 5 à 8
Supprimer ces alinéas.
II. Alinéas 15 et 16
Supprimer ces alinéas.
III. Alinéas 20 et 21
Supprimer ces alinéas.
IV. Alinéas 24 à 27
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. le rapporteur spécial, pour présenter l’amendement n° II-18 rectifié.
M. Pierre Jarlier, rapporteur spécial. La commission considère que la méthode retenue par l’article 86 pour définir le potentiel fiscal en 2011 est très satisfaisante. Elle écarte en effet la compensation-relais qui fausserait les calculs de richesse des communes.
En revanche, aucune simulation précise ne permet d’analyser les effets de la nouvelle définition du potentiel financier et fiscal proposée pour 2012.
Étant donné que plusieurs modifications de la fiscalité économique locale figurent dans le projet de loi de finances, il nous semble judicieux d’attendre de connaître les effets de ces ajustements pour redéfinir les critères de potentiel fiscal et financier. Il faudra pour cela engager une concertation avec les assemblées parlementaires et le Comité des finances locales, le CFL, avant de figer un dispositif dans le marbre de la loi.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour présenter l'amendement n° II-195.
M. Jean-Pierre Sueur. La suppression de la taxe professionnelle, dans la loi de finances pour 2010, entrera pleinement en application pour les collectivités territoriales à compter du 1er janvier 2011, avec la perception par celles-ci des nouveaux impôts créés ou transférés par l’État.
Cette réforme a bouleversé l’architecture des finances locales et, depuis lors, nous n’arrêtons pas de corriger et d’adapter les dispositions votées l’année dernière, souvent de manière précipitée et improvisée.
Au nombre de ces modifications indispensables à effectuer, il y a celle concernant le potentiel fiscal et financier. Ces deux notions, essentielles pour la répartition de très nombreuses dotations dites de péréquation, prennent en compte, pour leur calcul, les bases de fiscalité locale directe de l’année précédente.
S’il a été possible de calculer le potentiel fiscal en 2010, en prenant pour référence les bases de fiscalité existantes en 2009, le calcul du potentiel fiscal 2011 est plus difficile puisqu’il n’existe plus de base de taxe professionnelle depuis le 1er janvier 2010.
Les collectivités territoriales ont donc perçu cette année une compensation-relais.
L’article 86 vise à prendre en compte les bases de taxe professionnelle 2009, déjà retenues pour le calcul du potentiel fiscal en 2010. Cette solution présente l’inconvénient de geler la mesure des inégalités à celles de 2009.
L’article prévoit également dès maintenant les modalités de calcul du potentiel fiscal à compter de 2012, en prenant pour référence et pour chaque collectivité territoriale, le panier de ressources fiscales et budgétaires attribuées en remplacement de la taxe professionnelle ainsi que les dotations de compensation et du Fonds national de garantie individuelle des ressources, le FNGIR.
Or, sur ce point, nous ne pouvons vous suivre. Que savons-nous de l’application réelle des nouveaux impôts et de leur perception par les différentes collectivités territoriales ? Nous n’y voyons pas clair du tout. En effet, l’administration ne dispose d’aucune donnée post-réforme de la taxe professionnelle autre que celles utilisées par la mission Durieux-Subremon pour la réalisation du rapport remis au Gouvernement en juin dernier. Ce sont donc des données provisoires établies sur des périmètres 2009.
De même, les aménagements à la réforme sont encore nombreux dans le projet de loi de finances pour 2011. Il suffit de lire les 378 alinéas, soit 37 pages, de l’article 59, dont nous aurons l’honneur de discuter la semaine prochaine.
Il apparaît donc dangereux de fixer dès aujourd’hui les modalités de définition du potentiel fiscal à compter de 2012. De toute façon, à quoi rime encore la définition d’un potentiel fiscal quand les collectivités concernées ont perdu toute autonomie fiscale ? M. Patriat, qui connaît bien ces sujets, nous dirait que c’est le cas des régions pour l’ensemble des ressources qu’il est proposé de prendre en compte.
Nous souhaitons protéger les collectivités territoriales de toutes mauvaises surprises. C’est la raison pour laquelle nous proposons par notre amendement de supprimer les dispositions fixant le potentiel fiscal à compter de 2012 et demandons au Gouvernement de fournir au plus vite les simulations nécessaires à son établissement dans les meilleures conditions possibles afin de pouvoir apporter des réponses sérieuses à l’ensemble des collectivités territoriales. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Philippe Richert, ministre. J’ai sans doute le tort d’être trop succinct dans mes exposés, mais je pense qu’il n’est pas toujours nécessaire d’utiliser tout le temps de parole qui nous est imparti…
Vous avez bien compris que, pour évaluer le potentiel financier ou fiscal de nos collectivités, nous ne disposons plus des mêmes bases que par le passé, puisque celles-ci ont disparu.
M. Jean-Pierre Sueur. C’est clair !
M. Philippe Richert, ministre. Dès lors, nous devons mettre en place à compter de 2012 de nouvelles bases de calcul pour définir ce potentiel fiscal. Préalablement, les services de l’État devront se livrer à un travail d’évaluation afin que nous disposions, en 2012, des outils qui nous permettront d’appliquer ou, le cas échéant, de modifier les orientations que nous avons prises.
Nous sommes trop souvent contraints de réaliser des simulations dans l’urgence, deux ou trois mois avant l’application d’une mesure. Pour une fois que nous avons la chance de disposer d’une année complète pour réaliser ce travail, il serait opportun de la mettre à profit !
C’est la raison pour laquelle je demande à M. le rapporteur de bien vouloir retirer cet amendement. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Monsieur le ministre, sur le fond, la convergence est totale entre la commission des finances et le Gouvernement.
Toutefois, nous n’avons pas eu accès aux documents faisant apparaître le fruit de ces simulations. Par ailleurs, il est évident que les clauses de revoyure qui étaient prévues dans le courant de l’année 2010 n’ont pas pu opérer, parce qu’il faut attendre la constatation effective des mises en recouvrement et le redéploiement de ces ressources dans les différentes collectivités territoriales.
Par conséquent, il y a peut-être là un peu de précipitation législative de la part du Gouvernement. Nous savons que nous débattrons d’un projet de loi de finances rectificative au printemps 2011 : à cette date, nous aurons une connaissance précise des recouvrements et nous pourrons alors procéder aux ajustements qui s’avéreraient nécessaires.
M. Philippe Richert, ministre. Il s’agit de fixer dès à présent dans la loi des principes, des orientations.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Je pense qu’il serait opportun de prendre quelques mois supplémentaires pour porter un regard plus lucide sur les conséquences de la réforme que nous avons votée voilà un an.
C’est la raison pour laquelle la commission des finances fait cette proposition par voie d’amendement.
M. le président. La parole est à M. Jean Louis Masson, pour explication de vote.
M. Jean Louis Masson. Je suis contre la suppression de la taxe professionnelle, aussi bien sur le fond que sur la forme !
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. C’est un peu tard ! (Sourires.)
M. Charles Pasqua. Elle a été supprimée !
M. Jean Louis Masson. Le débat que nous avons aujourd’hui illustre parfaitement les tares de la procédure qui a été suivie pour supprimer la taxe professionnelle.
Un jour, en se levant, le Président de la République a décidé qu’il fallait supprimer la taxe professionnelle. Alors, sans réfléchir, on a lancé la réforme et, aujourd’hui, un an après son adoption, on ne sait toujours pas où l’on va.
La suppression de la taxe professionnelle comme la méthode utilisée pour y parvenir sont des scandales !
Franchement, le Président de la République aurait mieux fait de réfléchir à deux fois avant de lancer cette réforme improvisée.
M. Roland Courteau. Très bien !
M. Jean Louis Masson. Après le psychodrame des transferts de taxe d’habitation, voilà un nouveau psychodrame ! Et ce n’est sans doute pas le dernier… On a le sentiment que ceux qui nous dirigent font un peu n’importe quoi. (Protestations sur les travées de l’UMP. –Applaudissements sur certaines travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. François Patriat, pour explication de vote.
M. François Patriat. Je me tourne vers vous, monsieur le ministre, vous qui êtes aussi président de région.
J’ai organisé hier le débat d’orientation budgétaire au sein de la collectivité que je préside, et je constate les effets pervers dans les territoires de cette loi de suppression de la taxe professionnelle, adoptée à la hussarde.
Cette réforme a été faite à la hâte, sans concertation et sans simulation préalable. Les collectivités, en particulier les régions, qui n’auront plus d’autonomie fiscale – ou peut-être 10 % avec les cartes grises et une part de la taxe intérieure sur les produits pétroliers –, vont perdre d’abord l’effet base et l’effet taux. Ainsi, la région que j’ai l’honneur de présider perdra 1,2 % de ses ressources.
Vous dites que vous allez maintenir le niveau de soutien financier aux collectivités locales, monsieur le ministre, mais vous n’avez pas encore réalisé les simulations. Ce manque de projection montre bien que l’engagement que vous avez pris ne sera pas tenu, et que les collectivités locales, à qui l’on demande toujours plus, ne pourront pas faire face.
Vous mettez en avant une hypothétique cagnotte qui découlerait d’un retour de la croissance, que vous avez d’ailleurs tendance à surestimer. Au final, vous savez fort bien que les collectivités vont perdre de l’argent.
De surcroît, j’ai appris hier avec stupéfaction que l’imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux, l’IFER, que nous devions percevoir de la SNCF, allait être refacturée par l’entreprise publique dans le cadre de la convention que nous avons avec elle.
Je vous laisse imaginer l’état dans lequel vont se trouver les collectivités locales !
C’est la raison pour laquelle je voterai l’amendement de mon collègue et ami Jean-Pierre Sueur. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Philippe Richert, ministre. J’ai bien compris que certains membres de cette assemblée étaient opposés à la suppression de la taxe professionnelle. Pourtant, à droite comme à gauche, il était fréquent de la qualifier d’ « impôt « imbécile ».
M. Didier Guillaume. Son remplacement l’est aussi !
M. Philippe Richert, ministre. Le Parlement – et non le Président de la République – a décidé de supprimer la taxe professionnelle. Il m’arrive de rencontrer des chefs d’entreprises qui sont heureux de cette décision, en particulier ceux qui dirigent des sociétés qui investissent et qui sont en concurrence avec des entreprises étrangères pour exporter.
M. Didier Guillaume. Je connais des chefs d’entreprise qui sont moins heureux !
M. Philippe Richert, ministre. Aujourd’hui, je n’ai pas peur de dire que je suis fier d’avoir été de ceux qui ont voté la suppression de la taxe professionnelle.
Il nous faut maintenant réfléchir à la manière dont nous pouvons, à la suite de cette suppression, redéfinir les nouvelles bases de l’évaluation de la richesse des collectivités, c’est-à-dire leur potentiel financier.
Mme Christiane Demontès. Il aurait fallu y penser avant !
M. Philippe Richert, ministre. Il est clair que nous n’aurons plus les mêmes bases.
Il est arrivé dans le passé que nous prenions des décisions sans disposer d’évaluations suffisamment fines. Je vous propose donc aujourd’hui d’inscrire dans ce projet de loi de finances les orientations qui devront présider à cette évaluation pour 2012, afin de disposer de tous les éléments nécessaires permettant à nos services, pendant l’année à venir, de travailler dans le sens souhaité.
Vous nous avez reproché de ne pas avoir pris suffisamment notre temps. Prenons-le maintenant ! Réalisons ce travail d’évaluation en amont. Telle est la raison pour laquelle j’ai demandé tout à l’heure le rejet des amendements. Je comprends très bien que certains d’entre vous reviennent sur la suppression de la taxe professionnelle. C’est comme un leitmotiv, mais moi, je continue à dire que c’était une bonne chose de la supprimer.
M. Didier Guillaume. Il fallait la remplacer par quelque chose !
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Monsieur le ministre, il n’y a pas, me semble-t-il, matière à se crisper de part et d’autre.
M. Philippe Richert, ministre. Je ne me crispe pas !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Rien ne s’oppose à ce que vos services procèdent à ces simulations sur la base du texte que vous nous soumettez. À ce moment-là, lorsque nous devrons voter, nous aurons une vision exacte des conséquences de ces dispositions.
Vos services peuvent tout à fait, me semble-t-il, sans que l’on ait voté ces dispositions, procéder aux simulations prévues, éventuellement à d’autres si elles apparaissent plus justifiées, car je suis convaincu que, dans les prochains mois, nous aurons quelques correctifs à apporter à la législation.
Si nous fixons dès aujourd'hui les éléments déterminants du potentiel fiscal et financier, nous risquons d’être dans l’obligation de revoir notre copie.
Dès lors, oui aux simulations, et nous nous prononcerons en pleine connaissance de cause lorsque vous nous les présenterez ! Voilà pourquoi nous maintenons notre amendement.
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Mirassou, pour explication de vote.
M. Jean-Jacques Mirassou. Nous comprenons que le nouveau ministre veuille étrenner ses galons en justifiant un certain nombre de positions prises par le Gouvernement dans la précipitation, mais on ne peut pas laisser dire qu’il y aurait les modernistes, d’une part, qui seraient pour la suppression de la taxe professionnelle, et les rétrogrades, d’autre part, qui s’arc-bouteraient sur une forme d’imposition obsolète.