M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à M. Claude Domeizel, pour présenter l'amendement n° 476.
M. Claude Domeizel. Je me suis déjà exprimé sur ce sujet dans mon intervention sur l’article. Le III de l’article 34 vise à permettre la création, par délibérations concordantes des organes délibérants d’un EPCI et d’une ou plusieurs de ses communes membres, d’une commission administrative paritaire commune compétente à l’égard des fonctionnaires desdites collectivités.
Dans l’exposé sommaire de l’amendement par l'Assemblée nationale qui a conduit à insérer ce III, il est indiqué que « cette mutualisation permettrait également de favoriser la promotion des agents concernés puisqu’elle augmenterait les chances d’ouverture de postes ». Je demande qu’on me le démontre ! Moins il y a d’agents, plus les chances de promotion diminuent. C'est la raison pour laquelle il vaut mieux avoir une CAP départementale qu’une CAP locale.
L’utilité d’une telle création ne semble donc pas évidente. Pourquoi permettre la création de commissions compétentes en matière de gestion des personnels territoriaux alors que les centres de gestion remplissent parfaitement depuis de nombreuses années cette mission ? Je suis président d’un centre de gestion qui fonctionne, je peux vous l’assurer, à la grande satisfaction de tous les maires de mon département.
Ces dispositions, si elles étaient adoptées, affaibliraient les centres de gestion, dont la compétence et l’efficacité sont largement reconnues. Pour toutes ces raisons, nous proposons la suppression des alinéas 11 à 13 de l’article 34 du projet de loi.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Ces amendements tendent à supprimer la possibilité, introduite par l’Assemblée nationale, de créer une commission administrative paritaire unique pour un EPCI et une ou plusieurs de ses communes membres lorsque l’effectif global de leurs agents atteint le seuil au-dessus duquel l’affiliation au centre de gestion n’est plus obligatoire.
Ces dispositions risquent, en effet, de bouleverser l’organisation des centres de gestion. En outre, elles impliqueraient une certaine tutelle des EPCI sur les communes concernées.
La commission est donc favorable à ces deux amendements identiques.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Braye, pour explication de vote.
M. Dominique Braye. Je voterai avec plaisir ces deux amendements. De par mon expérience, je sais que, dans les communes qui ne sont pas assujetties au centre de gestion, les décisions sont prises de façon différente. En matière de gestion de la fonction publique territoriale – je pense aux promotions internes –, on s’aperçoit qu’il y a une différence d’appréciation notable dans les grosses municipalités. Il ne faudrait pas que ces différences de gestion soient étendues aux établissements publics.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 6 rectifié et 476.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme la présidente. Je constate que ces amendements ont été adoptés à l’unanimité des présents.
La parole est à M. Adrien Gouteyron, pour explication de vote sur l’article 34.
M. Adrien Gouteyron. Madame la présidente, avant le vote de cet article, je voudrais poser une question au Gouvernement et à la commission.
Si j’ai bien compris, cet article tend à introduire plus de souplesse dans la gestion et à permettre une mutualisation des moyens. (M. le président de la commission des lois et M. le rapporteur acquiescent.)
À la lecture du texte, il semble que ce soit l’EPCI qui gère les personnels « mutualisés ». Mais, dans certains cas, cela pourra donner lieu à des situations bizarres ! Je connais au moins une communauté d’agglomération dans laquelle l’essentiel des moyens techniques dépend des communes qui, de temps en temps, mettent ces moyens, par voie conventionnelle, comme le permet l’article, à la disposition de l’agglomération. N’y aurait-il pas quelque paradoxe à ce que ces personnels qui sont, pour l’essentiel de leurs tâches, dépendants des communes adhérentes à la communauté d’agglomération, soient forcément gérés par la communauté d’agglomération ? Mais peut-être ai-je mal compris le dispositif ?
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Monsieur Gouteyron, l’EPCI n’a autorité que pendant le temps où le personnel est mis à sa disposition, deux heures par exemple ! Dans le cas que vous avez cité, le reste du temps, il est sous l’autorité de la commune.
La disposition est très claire : « En fonction de la mission réalisée, le personnel des services communs est placé sous l’autorité fonctionnelle du maire ou celle du président de l’établissement public », c'est-à-dire que pour la partie de la mission réalisée.
M. Adrien Gouteyron. Merci !
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 34, modifié.
(L'article 34 est adopté.)
Article additionnel après l'article 34
Mme la présidente. L'amendement n° 435, présenté par MM. Domeizel, Sueur, Peyronnet, Bel, Anziani, Bérit-Débat et Berthou, Mme Blondin, MM. Botrel et Boutant, Mmes Bonnefoy, Bourzai et Bricq, M. Caffet, Mme Cartron, MM. Collombat, Daunis et Daudigny, Mme Durrieu, MM. Fichet, Frimat, Guillaume et Jeannerot, Mmes Khiari et Klès, MM. Krattinger, Le Menn, Lozach, Marc, Mauroy, Mazuir, Miquel et Mirassou, Mme Nicoux, MM. Patriat, Povinelli, Rebsamen, Repentin, Ries, Signé, Teston, Teulade et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Après l'article 34, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La deuxième phrase du premier alinéa de l'article 15 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale est ainsi rédigée :
« Dans le cadre des communautés d'agglomération et des communautés de communes à taxe professionnelle unique, le seuil d'affiliation au centre de gestion de trois cent cinquante agents est calculé sur la base de la moyenne arithmétique du nombre de fonctionnaires titulaires et stagiaires à temps complet employés par l'établissement public par rapport au nombre de communes adhérentes. »
La parole est à M. Claude Domeizel.
M. Claude Domeizel. L'amendement n° 435 se situe dans le droit fil de l’article 34 que nous venons de voter.
Je le rappelle, adhèrent au centre de gestion les communes comptant moins de 350 agents. Or, en cas de mutualisation, par détachement ou mise à disposition du personnel, il peut arriver que l’ensemble des personnels gérés par la communauté de communes ou d’agglomération dépassent ce seuil. Dans ce cas, la collectivité n’adhérera plus au centre de gestion. Dans certains départements, pratiquement toutes les communautés de communes auront plus de 350 agents : le centre de gestion n’aura alors plus aucun adhérent.
Mon amendement propose une solution pour sortir de cette impasse : l’effectif de 350 agents doit être calculé sur la base de la moyenne arithmétique du nombre de fonctionnaires de l’ensemble divisée par le nombre de communes. C’est seulement si le résultat est supérieur à 350 personnes que la communauté de communes ou d’agglomération n’est pas obligée d’adhérer au centre de gestion.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. L’amendement de M. Domeizel tend à ce que l’effectif soit calculé sur la base de la moyenne arithmétique du nombre de fonctionnaires titulaires et stagiaires à temps complet employés par l’EPCI rapporté au nombre de communes adhérentes. De ce fait, il abaisse drastiquement le seuil d’affiliation. Du coup l’adhésion des EPCI à un centre de gestion dépendrait du nombre de leurs communes membres.
Cet amendement avait déjà été discuté en première lecture et retiré à la demande du Gouvernement. Il empêcherait les communautés d’agglomération d’être un jour indépendantes du centre de gestion
Quant à la question du seuil, elle pourra être examinée dans une loi sur la fonction publique territoriale.
La commission est donc défavorable à cet amendement, qui va trop loin.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à M. Claude Domeizel, pour explication de vote.
M. Claude Domeizel. Monsieur le rapporteur, je voudrais revenir sur ma démonstration.
Prenons l’hypothèse où, dans un département, toutes les communautés de communes et d’agglomération compteraient plus de 350 agents : le centre de gestion n’aurait plus de ressources. Si tel était le cas, comment gérer la prise en charge du personnel de ce centre ?
La règle veut que le personnel licencié soit pris en charge par le centre de gestion. Dès lors, si un centre de gestion licenciait tout son personnel, celui-ci serait remis à la disposition du centre de gestion, lequel n’existerait plus… c’est la quadrature du cercle !
M. Roland Courteau. Eh oui, comment on fait ?
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.
M. Pierre-Yves Collombat. N’oublions pas le cas où le personnel refuserait ce transfert.
Le problème s’est posé il y a une vingtaine d’années lorsqu’un certain nombre de services de grandes communes, je pense à Toulon par exemple, ont été concédés. Les personnels ont refusé de passer à la concession. Tous ces personnels – il y a eu jusqu’à 80 agents – ont été mis à disposition du centre de gestion Qui devait payer ? Bien sûr, la commune de Toulon a participé.
Tout cela a donné lieu à un abominable micmac. Plusieurs textes se sont succédé pour régler le problème.
Avant d’aller dans la direction proposée par le projet de loi, on ferait bien d’examiner toutes les implications d’une telle disposition. Car, mes chers collègues, ce n’est pas un problème théorique. Rappelez-vous, il a fallu des années pour trouver une solution !
Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des lois.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Lorsque nous avons abordé le seuil d’affiliation aux centres de gestion dans le cadre de différents projets de loi, il a été proposé de porter celui-ci à 250, puis à 500. Comme cette mesure avait déplu à certaines associations d’élus, nous avons trouvé une cote mal taillée à 350.
Il peut très bien arriver qu’une commune ou une communauté de communes passe de 340 à 360 fonctionnaires. À ce moment-là, elle a le droit de gérer ses propres agents.
M. Pierre-Yves Collombat. Mais là, c’est systématique !
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Mon cher collègue, vous parlez de mutualisation, dans ce cas, les agents s’ajoutent, et une collectivité ou un établissement public qui atteint 350 fonctionnaires a le droit de gérer ses agents. C’est la loi ! Or en faisant la moyenne arithmétique des communes, comme vous le proposez dans votre amendement, monsieur Domeizel, on fait descendre le seuil d’affiliation de manière excessive.
M. Claude Domeizel. Mais non !
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Mais si ! Cela veut dire qu’il ne sera plus jamais possible à un EPCI de plus de 350 fonctionnaires de gérer ses propres agents.
Autant j’étais d’accord avec les amendements précédents, autant je suis défavorable à celui-ci qui aura l’effet inverse de ce que vous souhaitez.
M. Collombat a cité l’exemple de Toulon, mais des solutions ont été trouvées. Et je rappelle qu’il y a mutualisation quand les agents sont mis à disposition du centre de gestion ou du CNFPT. Mais ce sont les collectivités qui paient.
Si l’on a mis ce cliquet, c’est parce que cela commençait à bien faire ! On se débarrassait des agents pour tout un tas de raisons. On a donc estimé qu’il fallait responsabiliser les collectivités. Certains trouvent que ce n’est pas bien. Ce n’est pas mon avis, car, centre de gestion ou pas, c’étaient toutes les autres collectivités qui payaient.
Monsieur Domeizel, nous soutenons tous les deux les centres de gestion, mais je pense que là vous allez trop loin.
Je rappelle que cet amendement tendant à insérer un article additionnel avait déjà été déposé et rejeté en première lecture. Je le répète encore une fois : ne recommençons pas les mêmes débats en deuxième lecture et ne faisons pas comme si rien ne s’était passé avant. Mais je sais qu’on aime bien débattre au Sénat… C’est pour cela que nous sommes très libéraux ! (Sourires.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 435.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 34 bis AA
(Non modifié)
Après l’article L. 5211-39 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un article L. 5211-39-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 5211-39-1. – Afin d’assurer une meilleure organisation des services, dans l’année qui suit chaque renouvellement général des conseils municipaux, le président de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre établit un rapport relatif aux mutualisations de services entre les services de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre et ceux des communes membres. Ce rapport comporte un projet de schéma de mutualisation des services à mettre en œuvre pendant la durée du mandat. Le projet de schéma prévoit notamment l’impact prévisionnel de la mutualisation sur les effectifs de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre et des communes concernées et sur leurs dépenses de fonctionnement.
« Le rapport est transmis pour avis à chacun des conseils municipaux des communes membres. Le conseil municipal de chaque commune dispose d’un délai de trois mois pour se prononcer. À défaut de délibération dans ce délai, son avis est réputé favorable.
« Le projet de schéma est approuvé par délibération de l’organe délibérant de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre.
« Le schéma de mutualisation est adressé à chacun des conseils municipaux des communes membres de l’établissement public de coopération intercommunale.
« Chaque année, lors du débat d’orientation budgétaire ou, à défaut, lors du vote du budget, l’avancement du schéma de mutualisation fait l’objet d’une communication du président de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre à son organe délibérant. »
Mme la présidente. L'amendement n° 162, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et Beaufils, M. Voguet et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il est défendu.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 34 bis AA.
(L'article 34 bis AA est adopté.)
Article 34 bis A
(Non modifié)
I. – Le second alinéa de l’article L. 5111-1 du code général des collectivités territoriales est ainsi rédigé :
« Les collectivités territoriales peuvent conclure entre elles ou avec leurs groupements des conventions qui ont pour objet la réalisation de prestations de services. Ces conventions sont passées dans les conditions prévues par le code des marchés publics ou par l’ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics. »
II. – Après l’article L. 5111-1 du même code, il est inséré un article L. 5111-1-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 5111-1-1. – I. – Les départements et les régions, leurs établissements publics et les syndicats mixtes visés à l’article L. 5721-2 auxquels ils appartiennent peuvent conclure entre eux des conventions ayant pour objet d’assurer l’exercice en commun d’une compétence qui leur est reconnue par la loi ou transférée. Ces conventions ne sont pas soumises aux règles prévues par le code des marchés publics ou par l’ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 précitée.
« Sans préjudice du mode de gestion ou d’exécution retenu, ces conventions prévoient :
« – soit la mise à disposition du service et des équipements d’un des cocontractants à la convention au profit d’un autre de ces cocontractants ;
« – soit le regroupement des services et équipements existants de chaque cocontractant à la convention au sein d’un service unifié relevant d’un seul de ces cocontractants.
« Dans le cas mentionné au troisième alinéa du présent I, la convention fixe les conditions de remboursement, par le bénéficiaire de la mise à disposition du service, des frais de fonctionnement lui incombant.
« Dans le cas mentionné au quatrième alinéa du présent I, la convention précise les modalités de remboursement des dépenses engagées par le service unifié pour le compte des cocontractants de la convention. Elle prévoit également, après avis des comités techniques compétents, les effets sur le personnel concerné.
« Le personnel du service mis à disposition ou du service unifié est placé sous l’autorité fonctionnelle de l’autorité administrative pour laquelle il exerce sa mission.
« II. – Les départements et les régions, leurs établissements publics et les syndicats mixtes visés à l’article L. 5721-2 auxquels ils appartiennent peuvent, notamment par la création d’un syndicat mixte, se doter d’un service unifié ayant pour objet d’assurer en commun des services fonctionnels. Les services fonctionnels se définissent comme des services administratifs ou techniques concourant à l’exercice des compétences des collectivités intéressées sans être directement rattachés auxdites compétences.
« III. – Un décret en Conseil d’État fixe les conditions d’application du présent article. »
Mme la présidente. L'amendement n° 163, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et Beaufils, M. Voguet et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Odette Terrade.
Mme Odette Terrade. Plusieurs articles contiennent de nombreuses dispositions permettant le transfert ou la mise en commun de personnels dans le cadre des missions en partage ou des compétences transférées.
Dans cette perspective, l’article 34 bis A dans sa rédaction actuelle, qui fait suite à un amendement déposé par le Gouvernement, approuvé par l’Assemblée nationale et confirmé par la commission des lois du Sénat, semble vouloir permettre la réalisation commune de prestations de service. Dans son rapport, la commission des lois tient à souligner que ce dispositif renforce les possibilités ainsi offertes aux collectivités locales d’exercer en commun une compétence ou de mettre en place un même service pour assurer en commun un service fonctionnel.
Outre ce dernier point, qui nous semblait déjà être traité dans d’autres articles, le rapport ne met pas en lumière l’autre versant de cet article.
Dorénavant, les conventions de coopération conclues entre des collectivités ou avec leur groupement, dont l’objet est la simple réalisation de prestations de services, devront être passées dans les conditions de publicité et de mise en concurrence de droit commun. Ainsi, ces coopérations ne pourront se mettre en place qu’après consultation de la concurrence privée, c’est-à-dire que, pour la mise en œuvre de ces missions communes, sans passer par des syndicats, ce sera peut-être demain une société privée qui s’en chargera et non pas un service public. Or, tout au long de ce texte, il a souvent été question de ce type de convention.
Cet article permet donc la privatisation de services communs des collectivités locales.
Nous vous avons alertés plusieurs fois sur le risque d’« évaporation » de nos communes à partir du transfert de leurs compétences, de leur personnel, des services mis en œuvre. Mais ici, outre l’organisation de cette évaporation de la commune au profit d’une autre structure publique, on la rend possible au profit de sociétés privées.
Dans ces conditions, mes chers collègues, vous comprendrez que nous vous demandions de supprimer cet article.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Cet amendement vise à supprimer un article qui a été adopté par la commission des lois. L’avis est donc défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 46, présenté par MM. Lambert, Détraigne, Mézard et Sido, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Des conventions qui ont pour objet la réalisation de prestations de services peuvent être conclues entre les collectivités territoriales, leurs établissements publics, leurs groupements et les syndicats mixtes. Lorsque les prestations qu'elles visent à accomplir portent sur des services non économiques d'intérêt général au sens du droit de l'Union européenne ou lorsque, portant sur d'autres tâches d'intérêt public, les prestations sont appelées à s'effectuer en coopération entre les personnes signataires, ces conventions ne sont pas soumises aux règles prévues par le code des marchés publics ou par l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics. La participation au financement d'une prestation ne saurait, à elle seule, être assimilée à une coopération au sens du présent alinéa. »
La parole est à M. Jacques Mézard.
M. Jacques Mézard. En modifiant l’alinéa 2 de cet article, nous souhaitons faciliter la mutualisation. Tel est également l’objectif que poursuit la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation.
Le dispositif relatif à la mutualisation ne peut rester en l’état, sauf à admettre que la mutualisation serait rendue encore plus difficile qu’elle ne l’est aujourd’hui. En effet, aux termes du second alinéa de l’article L. 5111-1 du code général des collectivités territoriales, « les collectivités territoriales peuvent conclure entre elles des conventions par lesquelles l’une d’elles s’engage à mettre à la disposition d’une autre collectivité ses services et moyens afin de lui faciliter l’exercice de ses compétences ».
Or le texte qui nous est soumis vise à ajouter la phrase suivante : « Ces conventions sont passées dans les conditions prévues par le code des marchés publics ou par l’ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics ».
Le projet de loi soumet donc expressément toutes les mutualisations au droit de la commande publique. Il en résulte que des mutualisations qui, aujourd’hui, peuvent échapper au droit de la commande publique y seront soumises demain. Cette nouvelle législation serait plus contraignante que le droit en vigueur.
Nous souhaitons donc élargir le champ de la mutualisation en respectant la jurisprudence européenne – je pense notamment aux arrêts Teckal et Coditel Brabant SA –, qui est beaucoup plus large. Nous savons en effet que les mutualisations conventionnelles entre collectivités publiques sont admises par le droit communautaire.
En outre, vous le savez, le dispositif que propose la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation s’inscrit dans le droit fil de la proposition de loi pour le développement des sociétés publiques locales, qui a été adoptée à l’unanimité par le Sénat.
Voilà pourquoi l’adoption de cet amendement nous semble tout à fait nécessaire.
Mme la présidente. L'amendement n° 29 rectifié, présenté par M. Revet et Mme Henneron, est ainsi libellé :
Alinéa 2, première phrase
Supprimer les mots :
ou avec leurs groupements
Cet amendement n'est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 46 ?
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Cet amendement tend à préciser les cas dans lesquels la collaboration par mutualisation entre les collectivités territoriales en vue de remplir leurs missions de service public peut être réalisée en dehors des règles prévues par le code des marchés publics.
En effet, la rédaction issue de l’Assemblée nationale ne tire pas toutes les conséquences de l’évolution du droit et de la jurisprudence communautaires dans ce domaine. Je pense en particulier à l’arrêt Coditel Brabant SA de 2008 et au protocole n° 26 annexé au traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, qui définit les services non économiques d’intérêt général.
Ces nouvelles sources juridiques permettent de considérer que les mutualisations peuvent être réalisées dans deux cas : lorsqu’elles s’appliquent à des services non économiques d’intérêt général ; lorsqu’elles portent sur une activité d’intérêt public tout en intervenant entre des personnes morales de droit public, à condition que cette activité ait le caractère d’une véritable coopération et non d’une simple prestation de services.
Le présent amendement, issu de la réflexion menée par la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation, qui s’est traduite par un rapport d’information sur la mutualisation des moyens de MM. Lambert, Détraigne, Mézard et Sido, reprend l’ensemble de ces conditions.
Ces nouvelles dispositions permettront d’aller plus loin dans les nécessaires mutualisations entre les collectivités.
La commission a donc émis un avis favorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Alain Marleix, secrétaire d'État. Lors du débat sur l’optimisation des moyens des collectivités territoriales, qui s’est déroulé ici même le 17 juin dernier, à la demande de la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation, le Gouvernement a eu l’occasion d’exprimer sa très large communauté de vue avec MM. Lambert, Mézard, Sido et Détraigne, auteurs du rapport intitulé « Un nouvel atout pour les collectivités territoriales : la mutualisation des moyens ».
Le Gouvernement est notamment favorable à toute initiative permettant de favoriser les mutualisations de moyens au-delà du bloc communal, à la fois pour offrir à la population des services plus nombreux et de meilleure qualité et pour concourir à une meilleure maîtrise de la dépense publique locale. C’est donc avec intérêt qu’il a pris connaissance de l’amendement n° 46.
Monsieur Mézard, vous proposez de modifier cet article pour y distinguer expressément deux types de conventions de prestations de services hors droit de la commande publique, celles dont les prestations portent sur des services non économiques d’intérêt général et celles portant sur d’autres tâches d’intérêt public appelées à s’effectuer en coopération entre les personnes publiques signataires.
Je saisis tout à fait la motivation de cette démarche, mais la construction proposée, je me permets de le souligner, me paraît présenter quelques incertitudes juridiques.
Pour ces raisons, je m’en remets à la sagesse de la Haute Assemblée.