Mme Raymonde Le Texier. Monsieur le rapporteur, il s’agit de modifier les règles de majorité, que vous avez maintenant bien comprises, dans le cas de la fusion de syndicats de communes.

Pour ce faire, l’amendement n° 431 vise à remplacer dans l’alinéa 17 les mots « la moitié » par les mots « les deux tiers ».

Cet alinéa prévoit que « la fusion des syndicats est prononcée par arrêté du ou des représentants de l’État dans le ou les départements concernés, après accord des organes délibérants des membres des syndicats intéressés ».

Étant donné l’importance de l’enjeu que représente la fusion des syndicats, il me semble insuffisant de n’exiger l’accord que de la moitié au moins des organes délibérants des membres de tous les syndicats inclus dans le projet du périmètre. Si une telle disposition était adoptée, elle ne permettrait pas d’instaurer un climat propice au débat, et risquerait d’entraîner des fusions précipitées qui ne conviendraient pas à tous les membres concernés.

En revanche, l’accord par les deux tiers au moins des organes délibérants permet de représenter réellement le plus grand nombre des intérêts des membres des syndicats et de ne pas imposer à la moitié de ces membres la fusion.

Notre amendement est donc motivé par des considérations démocratiques ; il est conduit par le bon sens et l’expérience.

M. Jean-Pierre Sueur. Très bien !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. La commission émet un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Michel Mercier, ministre. Avis défavorable, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 431.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote sur l'article 30.

M. Jean-Pierre Sueur. Monsieur le ministre, mes chers collègues, je crains, malheureusement, que cette explication de vote ne soit pas aussi consensuelle que certains pourraient le souhaiter.

L’article 30, que nous n’allons pas voter, vient clore une longue semaine de travail. Nous avons en effet eu le bonheur de siéger depuis lundi.

Mme Catherine Procaccia. C’est juste !

M. Jean-Pierre Sueur. En définitive, que s’est-il passé au cours des cinq derniers jours ?

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Rien ! (Sourires.)

M. Jean-Pierre Sueur. D’abord, l'examen de l'article 3 a donné lieu à un accord sur un certain nombre de dispositions techniques, sur lesquelles les positions s’étaient déjà rapprochées en première lecture.

Puis, nous avons entamé le débat sur le conseiller territorial.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Gardez vos forces pour la semaine prochaine !

M. Jean-Pierre Sueur. Nous avons alors pu constater, une fois de plus, combien la création de cet être hybride, cumulard, confus, indistinct ne passait pas. Vous-même, monsieur le ministre, vous n’avez pas pu nous cacher votre grand embarras à ce sujet. J’ai en effet cru comprendre que la réserve d’un certain nombre d’amendements n’avait pour seul objet que de vous permettre de prolonger le temps de la pêche aux voix et de la chasse aux suffrages.

Il s’agit de petites, toutes petites actions, dans le but, un peu désespéré, de sauver le soldat « conseiller territorial ». Depuis cinq jours, vous avez visiblement tellement de peine à le défendre que vous vous demandez vous-même pourquoi vous êtes là. Tout le monde l’a compris, vous ne faites que respecter la volonté de M. Nicolas Sarkozy, déterminé à créer ce nouveau type d’élu pour que les régions et les départements puissent changer de bord politique.

Peut-être une telle situation vous agrée-t-elle. Mais, au fond de vous-même, vous le savez bien, et cela se voit, un tel projet ne correspond vraiment pas à ce dont la France a besoin. La seule question est de savoir si vous allez en tirer les conséquences.

Nous avons également abordé la question des compétences.

Le vote qui a eu lieu mercredi soir a été d’une importance considérable. Quelle satisfaction de voir la majorité du Sénat réaffirmer la clause générale de compétences, autrement dit la liberté locale dans son essence la plus forte ! Et pourquoi donc ? Non pas parce que nous refusons de parler des compétences, des prérogatives, car, nous en avons bien conscience, un certain nombre d’évolutions sont à envisager. Mais le dispositif que vous nous proposez est incroyablement tarabiscoté et totalement incompréhensible ; il prend tellement à rebrousse-poil les élus locaux que nous avons jugé, et la majorité du Sénat avec nous, qu’il valait mieux rétablir cette clause.

Je passe rapidement sur l’épisode assez pitoyable qui s’est produit le lendemain matin. Il n’est que le reflet du climat actuel, pollué par cette recherche à tout prix du passage en force.

Je terminerai en évoquant l’extension des pouvoirs de l’État. Le débat d’hier, et surtout d’aujourd'hui, nous a confirmé ce que nous avions déjà perçu en première lecture et qui a malheureusement été conforté par l’Assemblée nationale, nos collègues députés étant allés très loin en ce domaine.

Nous ne sommes naturellement pas opposés à l’intervention de l’État. Nous pensons simplement que l’État républicain va de pair avec la décentralisation.

MM. Michel Mercier, ministre, et Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Nous aussi !

M. Jean-Pierre Sueur. Mais à la condition de donner tout son souffle à la décentralisation.

Or le dénominateur commun à l'ensemble des articles que nous avons examinés, qu’ils concernent la fusion de syndicats, de communautés, de départements ou de régions, la création de métropoles ou de communes nouvelles, l’élaboration de la carte départementale de l'intercommunalité, c’est le préfet, le représentant de l’État : on le retrouve partout, monsieur le ministre, encore et toujours !

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. C’est normal : il faut bien un arbitre !

M. Jean-Pierre Sueur. Pour résumer, votre conseiller territorial est mal en point, votre conception du partage des compétences est mal barrée, si je puis m’exprimer ainsi, et votre volonté de recentralisation est bel et bien là. Sous-jacente, elle affleure désormais, devenant de plus en plus explicite, gagnant du terrain, d’article en article.

Monsieur le ministre, vous connaissez ma conclusion. Puisque le week-end arrive, pourquoi le Gouvernement ne profiterait-il pas des deux prochains jours pour nourrir sa réflexion ? Finalement, à quoi cela sert-il de continuer quand le navire est si mal embarqué ?

Ne serait-il pas plus sage de s’arrêter là, de préparer la célébration du 14 juillet dans la sérénité, et de remettre tout à plat, en attendant que la concertation ait vraiment produit d’autres fruits ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.

M. Marc Laménie. Monsieur le ministre, mes chers collègues, contrairement à M. Sueur, je limiterai mon propos à l'article 30, sur lequel il y a déjà beaucoup à dire, même s’il n’était pas inutile de rappeler ce qui a été évoqué au cours des séances précédentes, tant il est vrai que nous avons abordé de nombreux sujets s’agissant des différents niveaux de collectivités locales.

C’est vrai qu’il a souvent été question du rôle des représentants de l’État dans le département que sont les préfets et sous-préfets. Mais, reconnaissons-le, ceux-ci sont, comme nous, les interlocuteurs des élus locaux, des élus de base, des élus de proximité, que nous sommes aussi parfois. Nous les rencontrons souvent et travaillons en étroite concertation.

De tout temps, les préfets de département ont eu un certain pouvoir. Rappelons qu’entre 1982 et 1988 ils ont même de nouveau porté le titre de « commissaires de la République ».

Cela étant, je ne suis pas sûr, pour en revenir à l'article 30 et aux syndicats intercommunaux – SIVU ou SIVOM – que le préfet puisse imposer son point de vue sur d’éventuelles dissolutions ou fusions.

Comme certains de nos collègues de l’opposition l’ont souligné, les élus locaux, notamment les maires, sont très attachés à leurs syndicats de communes. Le Gouvernement comme la commission l’ont rappelé, tous ne disparaîtront pas.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Bien sûr que non !

M. Marc Laménie. Là n’est pas du tout le problème.

Parmi l'ensemble des SIVU et des SIVOM, nombreux sont ceux qui existent depuis de nombreuses années, intervenant dans divers domaines de compétences, la voirie ou les structures scolaires, par exemple. Ils ont prouvé leur utilité, leur légitimité, et il n’est absolument pas question de tous les supprimer.

À cet article 30 figurent des mesures de simplification ou de réorganisation. Mais n’est-ce pas l'objectif recherché dans les différents niveaux de collectivités ? Toutes et tous, autant que nous sommes, nous tenons beaucoup à l’échelon de proximité que représente la commune. Je ne suis pas le premier à le dire, nous n’avons aucunement l’intention de limiter en quoi que ce soit les quelque 36 700 communes que compte notre pays.

Par conséquent, il faut savoir relativiser et rester objectif, car aucun système n’est parfait. Les propositions qui nous sont faites ici me semblent intéressantes ; en tout cas, elles vont dans le bon sens. Et au-delà de la loi, M. le ministre l’a rappelé, il y aura les circulaires et les textes d’application.

Sur le terrain, la concertation existe toujours entre les services de l’État, représentés par les préfets et les sous-préfets, et l'ensemble des élus, regroupés notamment dans des instances de coopération intercommunale. Comptant maintenant plusieurs années d’existence, se réunissant plus ou moins souvent selon les départements, ces structures, composées d’élus de proximité, ont elles aussi leur légitimité. Là encore, tout est affaire de bonne volonté et de travail en commun.

Pour toutes ces raisons, monsieur le ministre, mes chers collègues, le groupe UMP votera cet article 30. (Applaudissements sur certaines travées de lUMP.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 30, modifié.

(L'article 30 est adopté.)

M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Article 30 (Texte non modifié par la commission) (début)
Dossier législatif : projet de loi de réforme des collectivités territoriales
Discussion générale

5

Décisions du Conseil constitutionnel sur des questions prioritaires de constitutionnalité

M. le président. M. le président du Conseil constitutionnel a communiqué au Sénat, par courriers en date du 2 juillet 2010, trois décisions du Conseil constitutionnel sur des questions prioritaires de constitutionnalité (n° 2010-9 QPC, 2010-10 QPC et 2010-12 QPC).

Acte est donné de ces communications.

6

Communication du Conseil constitutionnel

M. le président. M. le président du Conseil constitutionnel a informé le Sénat, le 30 juin, le 1er et le 2 juillet 2010, que, en application de l’article 61-1 de la Constitution, la Cour de cassation a adressé au Conseil constitutionnel trois décisions de renvoi d’une question prioritaire de constitutionnalité (2010-30 QPC, 2010-31 QPC et 2010-33 QPC).

Le texte de ces décisions de renvoi est disponible au bureau de la distribution.

Acte est donné de cette communication.

7

Ordre du jour

M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au lundi 5 juillet 2010, à quatorze heures trente et le soir :

Suite de la deuxième lecture du projet de loi, modifié par l’Assemblée nationale, de réforme des collectivités territoriales (n° 527, 2009-2010).

Rapport de M. Jean-Patrick Courtois, fait au nom de la commission des lois (n° 559, 2009-2010).

Texte de la commission (n° 560, 2009-2010).

Avis de M. Jacques Legendre, fait au nom de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication (n° 573, 2009-2010).

Avis de M. Charles Guené, fait au nom de la commission des finances (n° 574, 2009-2010).

Rapport d’information de Mme Michèle André, fait au nom de la délégation aux droits des femmes (n° 552, 2009-2010).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-neuf heures cinquante-cinq.)

Le Directeur adjoint

du service du compte rendu intégral,

FRANÇOISE WIART