Article 5
I. - Il est créé un établissement public à caractère industriel et commercial, dénommé « Agence française pour l’expertise et la mobilité internationale », placé sous la tutelle du ministre des affaires étrangères et soumis aux dispositions du chapitre Ier.
II. – L’Agence française pour l’expertise et la mobilité internationales a notamment pour missions :
1° Le développement de la mobilité internationale ;
2° La valorisation à l’étranger du système d’enseignement supérieur et de formation professionnelle français ;
3° La promotion de l’assistance technique et de l’expertise internationale françaises à l’étranger.
Elle contribue notamment :
1° À la promotion à l’étranger des études en France et à l’accueil des étudiants, chercheurs et experts étrangers, en appui des universités, des écoles et des autres établissements d’enseignement supérieur et de recherche ;
2° À la gestion de bourses, de stages et d’autres programmes de la mobilité internationale ;
3° Au développement de l’expertise technique internationale et à la maîtrise d’œuvre de projets sur financements bilatéraux et multilatéraux dans le cadre des orientations stratégiques définies par l’État.
L’agence exerce ses missions selon les orientations définies conjointement par le ministère des affaires étrangères et le ministère chargé de l’enseignement supérieur.
Elle opère sans préjudice des missions des organismes compétents en matière d’expertise et de mobilité internationales. Elle intervient en concertation étroite avec tous les opérateurs, qu’ils soient publics ou privés. Elle veille à répondre aux besoins exprimés par le réseau diplomatique à l’étranger.
L’agence collabore avec les organisations internationales et européennes, les collectivités territoriales, les universités, les écoles et les autres établissements d’enseignement supérieur et de recherche et les organisations concernées, ainsi qu’avec des partenaires publics et privés.
Pour l’accomplissement de ses missions, elle fait appel au réseau diplomatique à l’étranger, sous l’autorité des chefs de mission diplomatique, et aux établissements placés sous leur autorité ou qui leur sont liés par convention.
III. (nouveau) – L’Agence française pour l’expertise et la mobilité internationales se substitue, à la date d’effet de leur dissolution, à l’association « Egide » et aux groupements d’intérêt public « Campus France » et « France Coopération Internationale » dans tous les contrats et conventions passés pour l’accomplissement de leurs missions.
À la date d’effet de la dissolution de l’association « Egide » et des groupements d’intérêt public « Campus France » et « France Coopération Internationale », leurs biens, droits et obligations sont transférés de plein droit et en pleine propriété à l’Agence française pour l’expertise et la mobilité internationales.
Ces transferts sont effectués à titre gratuit et ne donnent lieu ni à indemnité, ni à perception d’impôts, de droits ou taxes, ni au versement de salaires ou honoraires au profit de l’État, de ses agents ou de toute autre personne publique.
IV. (nouveau) – L’Agence française pour l’expertise et la mobilité internationales est substituée à l’association « Egide » et aux groupements d’intérêt public « Campus France » et « France Coopération Internationale » à la date d’effet de leur dissolution pour les personnels titulaires d’un contrat de droit public ou de droit privé conclu avec l’un de ces organismes en vigueur à cette date. Elle leur propose un contrat régi par le code du travail. Ce contrat reprend les clauses substantielles du contrat dont les agents sont titulaires antérieurement au transfert, en particulier celles qui concernent la rémunération.
Les agents concernés disposent d’un délai de trois mois pour accepter les modifications de leur contrat proposées à la suite du transfert d’activité. En cas de refus de ces agents, l’Agence française pour l’expertise et la mobilité internationales procède à leur licenciement dans les conditions prévues par les textes qui leur sont applicables.
Les salariés dont le contrat de travail est transféré demeurent à titre transitoire régis par la convention ou l’accord collectif qui leur est applicable. La convention nationale applicable à l’établissement public mentionné au présent article leur devient applicable dès que les adaptations nécessaires ont fait l’objet d’un accord ou, au plus tard, quinze mois après leur transfert.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, sur l’article.
Mme Marie-Christine Blandin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, Parmi les missions assignées à l’article 5 à l’Agence française pour l’expertise et la mobilité internationales, l’accent est mis sur la « valorisation à l’étranger du système d’enseignement supérieur et de formation professionnelle français » ; l’assistance technique requise doit prendre en compte la diversité et la richesse de l’expertise française.
Depuis la loi de décentralisation et l’émergence de solides politiques de coopération décentralisée, nous avons acquis – la Haute Assemblée a pour mission de le rappeler – une expérience riche et multiforme dans l’accompagnement des coopérations en matière d’aménagement du territoire, de formation, d’environnement ou de recherche.
Par exemple, les deux premières phases du vaccin contre la bilharziose ont été financées par ma région, le Nord-Pas de Calais, et l’Union européenne, tandis que l’État a mis six ans pour s’impliquer !
Les partenariats ouverts ont mobilisé des services techniques, des cadres, des ingénieurs territoriaux qui, in situ, auprès de cultures et de peuples tiers, ont transmis leur savoir-faire et ont aussi beaucoup acquis.
Cependant, faute de facilités offertes aux acteurs de la diplomatie française, la mise en œuvre de cette politique tient souvent de la prouesse. Comment rémunérer un permanent salarié régional durant un an hors de France ? Comment faire payer son loyer par un payeur régional ? Comment convaincre la chambre régionale des comptes que le fax adressé à l’autre bout du monde n’a pas été dérobé ? Paradoxalement, il est plus facile de faire rembourser une facture en dollars d’un hôtel quatre étoiles qu’un justificatif en dongs pour un modeste hébergement local ou l’envoi d’un simple fax.
Il serait dommage de ne pas aider et valoriser les compétences de mise en œuvre et de suivi des pôles d’enseignement supérieur ou des dispositifs de formation professionnelle, qui correspondent à des compétences majeures des collectivités.
Monsieur le ministre, il s’agit d’un vivier humain d’expertise, construit au fur et à mesure des partenariats internationaux, avec des formations que le CNFPT, le Centre national de la fonction publique territoriale, pourrait d’ailleurs accompagner. Cela devrait être pris en compte dans les grilles de la fonction publique territoriale.
Vous savez que le dialogue bilatéral ne suffit pas à nouer des liens durables et que le maillage d’échelle à échelle est indispensable. Votre ministère n’hésite pas à solliciter l’action des collectivités pour accueillir telle ou telle délégation étrangère au pied levé ou pour cofinancer tel ou tel projet extérieur.
Je souhaite simplement attirer votre attention sur l’impérieuse nécessité d’assurer également, par les missions déclinées dans cet article, l’aide aux ressources humaines des collectivités territoriales qui sont actives à l’étranger, un portage juridique plus sécurisé pour leurs permanents et, enfin, la possibilité de régies publiques, indispensables à leur action.
Je n’encombrerai pas ce texte avec des amendements, car je fais confiance à l’intelligence de vos services et de ceux de vos collègues pour remédier à la profonde carence dans ce domaine, qui nous empêche de travailler correctement.
M. le président. La parole est à M. Richard Yung, sur l’article.
M. Richard Yung. Je le répète, la création de l’Agence pour l’expertise et la mobilité internationales va dans le bon sens. Nous en ressentons tous l’impérieuse nécessité. Depuis des années, en effet, nous avons conscience que, dans ce contexte de compétition internationale, la très grande expertise dont dispose notre pays et qui couvre de nombreux domaines, même si elle a tendance à s’évaporer quelque peu, devrait être mieux valorisée.
En revanche, je suis plus réservé ou plus hésitant sur le périmètre de ce nouvel opérateur, c’est-à-dire sur les métiers qu’il recoupe. Il est proposé de fusionner des activités de nature très différente, entre lesquelles il n’existe aucune synergie, pour reprendre un terme à la mode.
Ainsi, l’expertise technique internationale, c’est-à-dire le savoir-faire de tous nos assistants techniques dans les différents domaines que sont, notamment, la santé, l’urbanisme ou les travaux publics, n’a pas grand-chose à voir avec l’accueil des étudiants et des boursiers étrangers en France ; il s’agit là d’un métier de prestation de service et de valorisation de notre politique d’accueil des étudiants. Il en est de même pour la mobilité universitaire, sauf à la considérer comme un sous-produit de l’expertise internationale.
En outre, et cela rejoint le débat que nous avons eu tout à l’heure, la mise à l’écart de l’Agence française de développement, l’AFD, pose problème.
De mon point de vue, il aurait été préférable de s’inspirer du modèle allemand et de la GTZ, cette agence fédérale de coopération que certains d’entre vous connaissent : regroupant à la fois l’activité financière, qu’il s’agisse des dons ou des prêts, et l’activité ingénierie, elle est extrêmement puissante et donne une importante force de frappe aux Allemands, en particulier à Bruxelles. Or, nous le savons, c’est là qu’il faut aller chercher l’argent pour financer les projets.
Par ailleurs, intégrer l’AFD aurait eu le mérite de la cohérence. En 2006, France Coopération Internationale s’est vu confier le recrutement, la formation et la gestion des experts techniques internationaux intervenant dans les secteurs transférés à l’Agence française de développement. Il aurait donc été logique de rapprocher ce volet d’activités de l’Agence.
Monsieur le ministre, au regard des différents éléments constitutifs de cette nouvelle structure, avez-vous une idée du budget qui lui sera dévolu ?
J’évoquerai, en conclusion, la situation des personnels, qui constitue le principal problème de la réforme, comme M. le rapporteur l’a bien souligné. Certes, les contractuels de droit privé seront repris par la nouvelle agence. Toutefois, l’avenir des contractuels de droit public semble plus incertain. Monsieur le ministre, comment l’intégration de ces derniers est-elle envisagée ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Bernard Kouchner, ministre. Grosso modo, le budget de l’Agence pour l’expertise et la mobilité internationales devrait osciller entre 18 et 20 millions d’euros.
M. le président. Je mets aux voix l’article 5.
(L’article 5 est adopté.)
Article 5 bis (nouveau)
Sont créés, auprès de l’Agence française pour l’expertise et la mobilité internationales :
1° Un conseil d’orientation relatif aux modalités d’accueil des étudiants et chercheurs étrangers en France, comprenant notamment des représentants des étudiants ;
2° Un conseil d’orientation relatif au développement de l’expertise technique publique et privée, comprenant notamment des représentants des entreprises qualifiées dans le domaine de l’expertise technique internationale.
Ces deux conseils comprennent également des représentants des collectivités territoriales. Leur composition et leurs règles d’organisation et de fonctionnement sont fixées par décret.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, sur l’article.
Mme Marie-Christine Blandin. Cet article porte notamment sur les possibilités d’accueil d’étudiants et de chercheurs étrangers en France.
Dans un contexte où certains conjuguent identité nationale, coopération internationale et rayonnement sous un angle plus répressif qu’amical, les écologistes, pour qui la diversité est une richesse, tiennent à rappeler que, si les collectivités locales sont prêtes à accueillir et à accompagner des étudiants, des chercheurs et des artistes étrangers sur notre territoire, il est au préalable nécessaire, pour éviter tout frein à cette belle dynamique, de fournir des messages clairs auprès des consulats pour permettre la délivrance des visas en temps et en heure.
Les parlementaires sont régulièrement sollicités pour débloquer des situations pathétiques et absurdes, qui salissent l’image de notre pays. J’ai souvenir d’un sextuor à cordes qui devait se produire à Lille et dont deux musiciens polonais n’avaient pu venir. Le préfet, présent dans la salle, les attendait, alors qu’un simple coup de téléphone à son collègue consul lui aurait permis de passer une meilleure soirée ! (Sourires.)
Dans le domaine des échanges culturels et universitaires, combien de stress, de frustrations, d’études interrompues, de concerts annulés, de festivals et de programmes compromis auraient été épargnés si le visa, indispensable sésame, avait été délivré en temps et en heure !
La rigidité de certains consuls, confortés dans leur vision d’une France cadenassée par des discours frileux, voire hostiles à ceux qui viennent d’ailleurs, a ainsi abouti à l’annulation des concerts du festival organisé par Point-Afrique en 2008. Belle image pour la France !
L’échange culturel international ne saurait se satisfaire d’incantations. Il nous faut une logistique claire et efficace pour servir notre ambition. Il ne doit plus y avoir de place pour l’a priori suspicieux et l’arbitraire.
M. le président. L’amendement n° 16, présenté par MM. Hue et Billout, Mme Demessine et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 4, première phrase
Compléter cette phrase par les mots :
et des représentants des organisations syndicales étudiantes et de salariés des entreprises concernées
La parole est à M. Michel Billout.
M. Michel Billout. Les deux instances consultatives qui sont créées par cet article ont vocation à être des lieux de débats et de propositions. Dans les deux cas, il sera nécessaire de recueillir l’avis de tous les acteurs concernés. Il nous semble donc indispensable de prévoir que siégeront des représentants des organisations syndicales des étudiants au sein du conseil d’orientation relatif aux modalités d’accueil des étudiants et chercheurs étrangers en France et des représentants d’organisations syndicales des salariés au sein du conseil d’orientation relatif au développement de l’expertise technique publique et privée.
Si cet amendement de bon sens devait être adopté, il conviendrait d’en revoir la rédaction afin de mieux l’articuler avec les alinéas 2 et 3 de l’article 5 bis.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Joseph Kergueris, rapporteur. Cet amendement porte sur la création de conseils d’orientation dont la composition et les règles d’organisation et de fonctionnement sont fixées par décret.
Prévoir au sein de ces instances des représentants des organisations syndicales étudiantes et des représentants des organisations syndicales des entreprises concernées serait source d’une rare complexité. Or ces conseils d’orientation ont seulement vocation à rassembler un certain nombre d’avis.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, ministre. Le Gouvernement émet également un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l’article 5 bis.
(L’article 5 bis est adopté.)
Article 5 ter (nouveau)
Le Gouvernement remet au Parlement, au plus tard trois ans après l’entrée en vigueur de la présente loi, un rapport comportant une évaluation des modalités et des conséquences du transfert éventuel à l’Agence française pour l’expertise et la mobilité internationales de la gestion des bourses destinées aux élèves étrangers du Centre national des œuvres universitaires et sociales.
M. le président. L’amendement n° 23, présenté par Mmes Cerisier-ben Guiga, Lepage, Tasca, Blandin, Durrieu et Blondin, MM. Carrère, Boulaud, Yung, Dauge, Vantomme, Badinter, Lagauche, Percheron, Guérini, Berthou, Mazuir et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Remplacer le mot :
remet
par le mot :
soumet
La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Aux termes de l’article 5 ter, le Gouvernement remet un rapport aux commissions compétentes de l’Assemblée nationale et du Sénat. Celles-ci peuvent formuler un avis dans un délai de six semaines.
Dans la mesure où l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger, l’AEFE, « soumet » un rapport et ne le « remet » pas, il semble opportun, dans un souci de parallélisme des formes, qu’il en soit de même pour les autres établissements publics, notamment pour l’Agence française pour l’expertise et la mobilité internationales.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Joseph Kergueris, rapporteur. Il ne s’agit pas, ici, d’engager un débat sémantique, mais, puisque l’AEFE constitue un précédent en la matière, la commission émet un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, ministre. N’étant pas non plus très enthousiaste à l’idée de lancer un débat sémantique, j’émets un avis favorable sur cet amendement ! (Sourires.)
M. le président. Je constate que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents.
L’amendement n° 8 rectifié, présenté par Mmes Mélot et Malovry, est ainsi libellé :
Après le mot :
conséquences
rédiger ainsi la fin de cet article :
de la mise en place d’un opérateur unique pour la gestion des bourses destinées aux étudiants étrangers en France.
La parole est à Mme Lucienne Malovry.
Mme Lucienne Malovry. Dans un souci de cohérence globale de notre politique d’attractivité, l’ensemble des bourses destinées aux étudiants étrangers ont vocation à être gérées par un seul et même opérateur.
Aujourd’hui, les bourses du gouvernement français destinées aux étudiants étrangers sont gérées par deux opérateurs : l’association Égide et la sous-direction des affaires internationales du Centre national des œuvres universitaires et scolaires, le CNOUS.
Dans le cadre de la révision générale des politiques publiques, il convient donc de réfléchir à la mise en place d’un opérateur unique chargé de la gestion de ces bourses, en évaluant les avantages que pourrait présenter le transfert de la gestion des bourses destinées aux étudiants étrangers du CNOUS à la future Agence française pour l’expertise et la mobilité internationales. Cela aurait le mérite de faciliter un dialogue fructueux sans a priori avec les personnels concernés, tant ceux de l’Égide que ceux du CNOUS.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Joseph Kergueris, rapporteur. Il faut mesurer la portée de cet article, introduit sur l’initiative de la commission des affaires étrangères : il prévoit seulement l’élaboration par le Gouvernement d’un rapport comportant une évaluation des modalités et des conséquences du transfert éventuel à l’Agence française pour l’expertise et la mobilité internationales. En d’autres termes, la commission a retenu sa plume !
Monsieur le ministre, pour les raisons que nous avons développées tout au long de la discussion, nous souhaitons vous laisser suffisamment de temps pour permettre aux différents acteurs, ainsi qu’eux-mêmes l’ont souligné lors des auditions, de poursuivre la concertation et de parvenir à une solution que nous appelons de nos vœux.
C’est la raison pour laquelle, madame Malovry, la commission préfère la rédaction qu’elle a adoptée et qu’elle juge un peu moins timide. Elle vous demande donc de bien vouloir retirer cet amendement ; à défaut, elle y sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, ministre. Je vais faire montre d’une extrême hardiesse et m’en remettre à la sagesse de la Haute Assemblée sur cet amendement ! (Exclamations amusées.)
M. Robert del Picchia. Bravo !
M. le président. La parole est à M. le président de la commission de la culture.
M. Jacques Legendre, président de la commission de la culture. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous le savons tous, l’accueil des étudiants étrangers en France ne se réduit pas à la qualité, souvent incontestable, de l’enseignement qui leur est dispensé, mais doit également tenir compte du soin que l’on prend à leur faciliter la vie sur notre territoire.
C’est pourquoi la multiplication des opérateurs chargés de leur accueil est sans doute contreproductive et parfois source de déboires.
Nous avons entendu des étudiants nous dire qu’ils avaient reçu une bonne formation en France, mais qu’ils n’y avaient pas reçu autant d’aide pour leur vie quotidienne, pour se loger, pour trouver des activités culturelles, sportives, que dans d’autres pays.
Il nous paraît donc nécessaire de donner aujourd’hui un signal fort en offrant aux étudiants étrangers sur notre territoire une qualité d’enseignement, mais aussi une qualité d’accueil avec un suivi de bout en bout, dans le cadre d’une présentation intégrée, comme le font nos principaux concurrents.
Tel est l’objet de l’amendement défendu par Mme Malovry, et voilà pourquoi je souhaite vivement que nous puissions l’adopter.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Joseph Kergueris, rapporteur. À la lumière de ce que nous venons d’entendre, nous pouvons tous constater que les sentiments qui nous animent et les objectifs que nous visons les uns et les autres sont les mêmes. Certains craignent que l’évocation systématique du CNOUS ne soulève des difficultés et ne crée des tensions.
Puisque M. le ministre n’est pas en désaccord avec l’amendement et que M. le président de la commission de la culture souhaite qu’il soit voté, la commission des affaires étrangères se rallie à leurs arguments.
En effet, l’adoption de cet amendement ne changera pas fondamentalement le texte, qui vise, en tout état de cause, à l’établissement d’un rapport. En outre, je le répète, notre souhait commun est d’atteindre l’objectif recherché, ce qui ne peut se faire qu’avec la bonne volonté de tous, et ce de manière progressive et consensuelle.
M. le président. La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga, pour explication de vote.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. En fait, ce qui bloque, c’est l’absence d’accord interministériel,…
MM. René Beaumont et Robert del Picchia. Il n’y a rien qui bloque!
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. … comme nous l’avons souligné lors de la discussion générale. Il en résulte une faiblesse véritablement congénitale de l’Agence française pour l’expertise et la mobilité internationales dans le domaine de l’accueil des étudiants étrangers.
Certes, avec l’article 5 ter, le Gouvernement dispose d’une période de trois ans pour améliorer le dispositif et faire en sorte qu’il n’y ait plus qu’un seul opérateur.
Cependant, un tel objectif nous semble difficilement réalisable sans réelle négociation entre les deux ministères concernés. En effet, jusqu’ici, en dépit d’années d’efforts et de réunions multiples, nous n’y sommes pas parvenus.
Nous souhaitons, monsieur le ministre, que ce délai de trois ans vous permette d’aboutir, bien que l’expérience des années précédentes ne nous rende pas très confiants à cet égard.
M. le président. La parole est à M. Yves Pozzo di Borgo, pour explication de vote.
M. Yves Pozzo di Borgo. Il s’agit là d’un problème majeur, qui traîne depuis très longtemps, alors que nous continuons, nous, à discuter en envisageant un délai de trois ans pour lui trouver une solution.
Mes chers collègues, j’attire votre attention sur le fait que l’éducation des élites, notamment celle des étudiants étrangers, est devenue un marché : certains pays, comme Singapour, en ont fait une affaire économique.
À l’heure actuelle, le combat pour la formation des élites est extraordinaire. Dans la compétition des grandes écoles, la position de la France est affaiblie. Sciences Po a beau accueillir mille étudiants étrangers, quand un étudiant a le choix, il est de notoriété à l’étranger qu’il préfère aller à Harvard.
La connaissance est l’enjeu d’une compétition économique intense.
M. Richard Yung. Ce n’est pas à nous qu’il faut le dire !
M. Yves Pozzo di Borgo. Je vous le dis parce que, à gauche, vous considérez que ce n’est pas un marché !
Monsieur le ministre, dans un tel environnement, il faut aller très vite. Trois ans pour régler le problème, c’est trop long ! Permettez-moi, d’ailleurs, de m’étonner de la participation insuffisante de Mme la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche dans ce débat fondamental pour la France.
Encore une fois, je regrette que trois ans soient nécessaires pour régler le problème. Il faut faire preuve d’autorité dans cette affaire, se montrer compétitifs afin de récupérer la formation des élites européennes, nord-américaines, de Chine ou d’ailleurs.
Pardonnez-moi, mes chers collègues, d’être un peu vif, mais je suis inquiet de constater que l’on traîne autant dans cette affaire.
Pour toutes ces raisons, je voterai l’amendement n° 8 rectifié soutenu par la commission de la culture. Je remercie son président d’avoir été aussi directif, et je l’accompagne dans sa démarche.
M. le président. Je constate que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents.
Je mets aux voix l’article 5 ter, modifié.
(L’article 5 ter est adopté.)
Chapitre III
L’Institut Victor Hugo
M. le président. L’amendement n° 6 rectifié, présenté par Mmes Mélot et Malovry, est ainsi libellé :
I. - Rédiger ainsi l’intitulé de ce chapitre :
L’Institut français
II. - En conséquence, dans l’ensemble du projet de loi, remplacer les mots :
Institut Victor Hugo
par les mots :
Institut français
La parole est à Mme Lucienne Malovry.
Mme Lucienne Malovry. Je suis au regret de contrarier M. le ministre en proposant, par cet amendement, de substituer à la dénomination « Institut Victor Hugo » celle d’« Institut français ».
Lors de sa réunion du 28 janvier dernier, la commission de la culture a adopté un amendement tendant à attribuer à l’agence chargée de l’action culturelle extérieure le nom « Institut français ». Cette appellation avait recueilli une majorité de votes lors de la consultation des missions diplomatiques conduites par le Quai d’Orsay.
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Eh oui !
Mme Lucienne Malovry. Il paraît capital, en effet, que la marque « France » figure dans le libellé de la future agence culturelle, dans la mesure où cela aura un impact considérable en termes de labellisation de notre action culturelle à l’étranger, et ce dans un contexte de mondialisation marqué par l’activisme déployé par nos concurrents étrangers, comme le British Council, dont la dénomination signifie, du reste, « Institut britannique ». De plus, il ne semble pas raisonnable de privilégier un écrivain, certes de renom, au détriment d’autres.
Il convient d’adopter un nom susceptible de résonner auprès de tous nos publics étrangers, y compris de ceux qui ne disposent pas encore d’une connaissance approfondie de la littérature française.
En outre, un très grand nombre de nos centres culturels à l’étranger, parmi les plus prestigieux comme l’Institut français Léopold Sédar Senghor de Dakar, s’appellent déjà « Institut français ». Une telle appellation devrait donc faciliter la cohérence du rattachement à l’opérateur culturel du réseau des instituts et centres culturels français à l’étranger.
Le nom du futur établissement se doit avant tout de transcrire son objet premier : incarner la culture de la France à l’étranger afin de répondre aux attentes de tous les publics étrangers.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Joseph Kergueris, rapporteur. C’est un débat qui a été, pour le moins, déjà entamé lors de la discussion générale.
D’une part, les établissements de notre réseau culturel ont besoin d’un label unique propre à renforcer leur image à l’étranger. La commission des affaires étrangères a donc souhaité inscrire dans le texte la dénomination de la nouvelle agence – jusque-là, il n’y a pas de divergence entre nous – en reprenant d’ailleurs l’exemple d’Ubifrance, l’agence française pour le développement international des entreprises.
D’autre part, si nous ne dénommons pas l’agence, je crains que nos collègues députés ne se chargent de le faire. Ce n’est certes pas un argument décisif, mais ce peut être un élément nous incitant à faire un choix.
Par ailleurs, comme vous le savez, outre « Institut français », plusieurs noms ont été évoqués pour cette agence, notamment des noms d’auteurs comme Voltaire, Descartes, Diderot ou Camus. D’après ce qu’il ressort d’un questionnaire adressé aux agents du ministère, si une majorité se dessine en faveur de l’appellation « Institut français », Victor Hugo apparaît comme l’écrivain le plus connu à l’étranger.
La commission de la culture avait proposé d’appeler la nouvelle agence « Institut français ».
La commission des affaires étrangères, elle, a opté, à une très large majorité, en faveur de l’appellation « Institut Victor Hugo », à l’instar des choix des noms de Goethe en Allemagne, de Cervantes en Espagne ou de Confucius en Chine.
Nous avons considéré que l’appellation « Institut français » présentait moins d’avantages.
D’abord, elle peut être source de confusion avec l’Institut de France.
Ensuite, si un institut culturel doit mettre en valeur la culture française, il doit aussi être un lieu d’échanges avec la culture du pays d’accueil. (M. le ministre acquiesce.) C’est là un argument qui a été évoqué à maintes reprises au cours de nos échanges.
Enfin, Victor Hugo est l’écrivain le plus connu hors de nos frontières. Sa figure ne peut être contestée dans cette enceinte, quelles que soient les travées sur lesquelles nous siégions. Elle est représentative non seulement de la culture française, mais aussi d’une certaine conception des valeurs universelles dont notre pays est porteur.
Telles sont les raisons pour lesquelles la commission a préféré le nom « Institut Victor Hugo ». Je souhaite donc le retrait de cet amendement ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.