M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Ces amendements prévoient la consultation des membres des conseils généraux et des conseils régionaux préalablement au vote ou à la promulgation de la présente loi.
D’abord, rien n’oblige le législateur à organiser une telle consultation. Ensuite, si une telle consultation était organisée, elle n’aurait que peu d’intérêt. Le législateur, compétent pour fixer le régime électoral des assemblées locales en vertu de l’article 34 de la Constitution, ne pourra en effet s’estimer lié par le résultat de cette consultation, sous peine d’encourir la censure du Conseil constitutionnel pour incompétence négative.
Les membres actuels des conseils généraux et des conseils régionaux ne sont pas directement touchés par cette mesure, qui concerne les élus désignés respectivement en mars 2011 et en mars 2010.
Enfin, si cette consultation était mise en place, elle forcerait probablement le législateur à repousser l’adoption de la loi à une date postérieure à mars 2010. Celui-ci serait donc obligé de réduire des mandats en cours alors même que la constitutionnalité de ce procédé est douteuse.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Michel Mercier, ministre. Ces deux amendements m’amènent à préciser les conditions dans lesquelles la réforme a pris corps, et je remercie donc Mme Borvo Cohen-Seat de les avoir présentés, même si, sur le fond, je n’y suis pas favorable.
D’abord, cette réforme a pris forme dans un très vaste mouvement de consultation. Des échanges nombreux ont eu lieu avec les associations d’élus, les partis politiques et les parlementaires.
Une réunion de la conférence nationale des exécutifs locaux s’est tenue le 26 mars 2009, sous la présidence du Premier ministre. Des ateliers consacrés aux différents aspects de la réforme ont été constitués ; ces ateliers se sont réunis et ont travaillé.
Le ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales, le secrétaire d'État à l’intérieur et aux collectivités territoriales et moi-même avons participé à de nombreuses assemblées générales ou à des réunions départementales tenues par les associations d’élus.
Une seconde conférence nationale des exécutifs locaux a eu lieu, sous la présidence du Premier ministre, toujours sur le thème de la réforme, le 15 octobre 2009.
Les partis politiques représentés à l’Assemblée nationale, au Sénat ou au Parlement européen ont tous été reçus individuellement au ministère de l’intérieur pour donner leur point de vue sur la réforme.
Le projet de réforme a par ailleurs été évoqué au Parlement lors des questions d’actualité, à l’Assemblée nationale comme au Sénat. Des débats sur la réforme ont été organisés au Sénat, de même que des auditions de membres du Gouvernement dans le cadre de réunions élargies de la commission des lois. Enfin, les membres de l’Assemblée de Corse ont été appelés à donner leur avis.
Il y a donc eu une vaste consultation sur la réforme et, très naturellement, au terme de celle-ci, le Gouvernement a déposé les projets de loi qui sont aujourd'hui sur les bureaux des assemblées.
Je rappelle après M. le rapporteur que, comme le Conseil constitutionnel l’a précisé, le législateur est seul compétent pour fixer les règles concernant le régime électoral des assemblées locales. Il appartient donc maintenant au Parlement, constitutionnellement compétent pour le faire, de prendre ses responsabilités.
C’est ce qui me conduit à émettre un double avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard, pour explication de vote.
M. Jacques Mézard. Monsieur le ministre, vous venez de nous rappeler ce qui figure dans le document accompagnant le projet de loi, à savoir qu’une vaste consultation a eu lieu. Mais je n’ai pas eu le sentiment que celle-ci avait conclu à la nécessité de créer des conseillers territoriaux ou de recourir à un scrutin uninominal à un tour. J’ai même eu le sentiment inverse.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Très bien !
M. Jacques Mézard. Voilà la réalité et, tout à l’heure, vous m’avez un peu inquiété en indiquant que, finalement, cette réforme était sous-tendue par les mêmes motifs que celle qui avait donné lieu à l’élection au scrutin proportionnel en 1986.
M. Jacques Mézard. C’est une comparaison qui ne me paraît pas très heureuse.
M. Jacques Mézard. Je vous en prie, monsieur le ministre !
M. le président. La parole est à M. le ministre, avec l’autorisation de l’orateur.
M. Jacques Mézard. Alors, je vous ai mal compris !
M. Michel Mercier, ministre. J’ai simplement rappelé que les motifs qui avaient inspiré le législateur en 1986 étaient connus de tout le monde.
M. le président. Veuillez poursuivre, monsieur Mézard.
M. Jacques Mézard. Ce ne sont donc pas les mêmes motifs !
Votre réponse me rassure, car les motifs de 1986 n’étaient pas exemplaires, et on peut tout à fait ne pas approuver la démarche de l’époque.
Pour en revenir à la consultation, je note que vous n’avez tenu aucun compte de ses conclusions.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Absolument !
M. le président. La parole est à M. Yves Krattinger, pour explication de vote.
M. Yves Krattinger. Le Parlement n’est pas lié par les résultats d’une éventuelle consultation des élus locaux, mais cette consultation n’en fournit pas moins des informations qui nous permettent de nous positionner et de formuler des propositions.
S’il y a bien eu concertation, il n’y a pas eu de véritable discussion sur le fond. Les personnes de toutes sensibilités politiques, spécialistes ou non de ces sujets, que le Gouvernement a auditionnées, et que j’ai également eu le plaisir d’entendre avec notre collègue Claude Belot en tant que rapporteur de la mission sénatoriale, n’ont jamais évoqué les mesures dont nous débattons aujourd’hui, qu’il s’agisse de la création d’un élu unique pour le département et la région, du changement de mode de scrutin ou du choix d’un mode de scrutin majoritaire à un seul tour. Ces mesures ne sont donc pas le fruit de la concertation.
Quant à la Conférence nationale des exécutifs, si l’on en croit les commentaires que nous avons pu lire dans la presse, nombre de ceux qui y ont participé ont exprimé leur déception. Tout au plus ont-ils été informés des intentions du Gouvernement ; ils ont regretté d’autant plus amèrement l’absence de discussion sur le fond qu’ils s’attendaient à une véritable concertation.
Permettez-moi de vous livrer un point de vue personnel. Le Gouvernement construit actuellement, avec le soutien de sa majorité, une réforme territoriale contre l’avis du plus grand nombre des élus locaux ; j’y vois une marque de défiance. Les élus ont d’ailleurs été blessés par certains termes ou propos tels que ceux de gabegie, d’irresponsabilité, d’élus trop nombreux. Ceux-ci ont été très mal reçus par l’ensemble des élus des collectivités locales.
Pour ma part, j’ai toujours tenu des propos courtois et respectueux sur les élus locaux, de droite comme de gauche, et j’ai toujours affirmé qu’il fallait faire confiance à leur intelligence. Puisque vous aimez les sondages – après tout, moi aussi, j’ai le droit d’en consulter ! –, je vais vous en citer un, publié voilà quelque temps : à une question portant sur l’efficacité des diverses institutions, les Français interrogés ont répondu à 76 % qu’ils faisaient confiance à la commune – un résultat très positif ! –, à 70 % au conseil général, à 69 % au conseil régional. Quant à la note qu’ils attribuent à l’État, donc à celui qui a l’intention de réformer ces collectivités qu’ils jugent favorablement, elle est nettement plus décevante : 35 % seulement des personnes consultées estiment qu’il est efficace. Et le résultat est pire pour l’Europe, puisque seuls 31 % de ces Français considèrent que ses institutions sont satisfaisantes. Ces chiffres doivent nous faire réfléchir !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il faut faire attention !
M. Yves Krattinger. Vous justifiez cette réforme en invoquant le mauvais fonctionnement des collectivités locales. Or les Français ne partagent pas votre point de vue ! En effet, à quelques points près, ce sondage reflète leur opinion réelle sur nos institutions.
Le Gouvernement aurait tout intérêt à entendre les messages qui lui sont adressés, les nôtres comme ceux du pays tout entier. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. le président. L’amendement n° 24, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le droit de vote et d'éligibilité aux élections locales est accordé aux étrangers ressortissants de l'Union européenne résidant en France et aux étrangers non ressortissants de l'Union européenne résidant régulièrement en France depuis au moins cinq ans.
La parole est à Mme Évelyne Didier.
Mme Évelyne Didier. Le droit de vote et d’éligibilité aux élections locales est accordé aux étrangers ressortissants de l’Union européenne résidant en France et aux étrangers non ressortissants résidant régulièrement en France depuis au moins cinq ans. Une étude de l’état du droit en vigueur en matière de vote des étrangers, réalisée sur tous les continents, montre que cette pratique est loin d’être isolée ou exceptionnelle : elle est non pas cantonnée au continent européen, mais existe, sous de multiples modalités, sur l’ensemble des continents. Ainsi, sur 192 États membres de l’Organisation des Nations unies, 64 États au moins, soit un pays sur trois dans le monde, accordent le droit de vote aux étrangers. Si l’on songe que bon nombre des autres pays ne sont pas vraiment des « démocraties », au sens courant du terme, cette proportion est d’autant plus importante.
Contrairement à ce qui est souvent avancé dans le débat en France, il ne s’agit donc pas du tout d’une utopie. Au contraire, cette pratique, parfois ancienne, a tendance à s’étendre et sera sans doute en voie de généralisation au début du XXIe siècle. C’est l’Amérique du Sud, avec dix pays sur douze accordant le droit de vote aux étrangers, qui constitue sans doute le continent de référence, suivie de l’Europe, avec vingt-neuf pays sur quarante-quatre, et de l’Amérique du Nord et du Centre, avec douze pays sur vingt-trois.
Les modalités de l’ouverture du droit de vote aux étrangers sont multiples. Parfois, le droit de vote n’est accordé qu’à certaines catégories d’étrangers, au nom, par exemple, d’anciens liens coloniaux, comme dans le Commonwealth, de l’existence d’une communauté linguistique, ou encore en raison d’une proximité géographique et d’unions historiques.
Le principe de réciprocité entre États – à l’intérieur de l’Union européenne, ou entre certains pays européens et africains, notamment – est également l’une des modalités possibles de l’ouverture. Toutefois, dans trente-six pays, le droit de vote est ouvert à tous les étrangers résidents, sans restriction de ce type.
Enfin, si le vote est souvent limité aux scrutins locaux ou intermédiaires, au moins vingt-cinq pays accordent le droit de vote à des étrangers dans des scrutins nationaux.
Ce panorama permet de montrer combien le paradigme selon lequel le droit de vote serait une prérogative réservée aux ressortissants de l’État est ébranlé dans les faits. Contrairement aux représentations courantes, le droit de vote des étrangers est aujourd’hui une réalité finalement assez banale.
Refuser le droit de vote aux étrangers, c’est définir de façon fermée la communauté politique. Par conséquent, c’est bien la souveraineté de l’État qui est affirmée, au détriment du principe démocratique selon lequel le peuple doit décider de ce qui le concerne. Il est donc temps d’accorder le droit de vote aux étrangers, afin que les femmes et les hommes qui participent pleinement au développement économique et social du pays prennent part à la vie politique locale en exerçant leur droit de vote.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Cet amendement tend à octroyer le droit de vote et d’éligibilité aux élections locales aux ressortissants communautaires et aux ressortissants extracommunautaires régulièrement établis en France depuis plus de cinq ans.
Cet amendement est sans rapport avec le présent texte, qui concerne la concomitance de l’élection des conseillers régionaux et de celle des conseillers généraux. (Protestations sur les travées du groupe CRC-SPG.) En outre, il s’agit d’un sujet fondamental qui ne saurait être traité ni par voie d’amendement ni dans le cadre d’une procédure accélérée.
J’émets donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Robert del Picchia, pour explication de vote.
M. Robert del Picchia. Si j’ai bien compris, cet amendement est un cavalier. Mais je vous ai entendu parler du droit de vote des étrangers : à ce moment-là, en tant que sénateur représentant les Français de l’étranger, je demande la réciprocité dans les pays d’accueil !
Mme Odette Terrade. Vous n’avez pas écouté, Mme Didier en a parlé !
M. le président. L’amendement n° 25, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement dépose chaque année un rapport au Parlement retraçant le comparatif au sein des pays de l'Union européenne du droit de vote et d'éligibilité pour les élections aux conseils des collectivités territoriales des citoyens étrangers non ressortissants de l'Union européenne majeurs des deux sexes régulièrement établis dans chacun des pays de l'Union européenne.
La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Depuis combien de temps se pose la question du droit de vote des étrangers aux élections locales ?
Mme Odette Terrade. Des promesses ...
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. De façon pressante, depuis au moins dix ans !
M. Yannick Bodin. Un peu moins ...
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. La Belgique, le Danemark, le Luxembourg, les Pays-Bas, la Suède et certains cantons suisses accordent le droit de vote à tous les étrangers qui résident sur leur territoire depuis quelques années. Ces pays ont respectivement élargi le droit de vote aux élections locales à tous les étrangers en 1975, 1981, 1983, 2003 et 2004. Ce droit est subordonné à une durée minimale de résidence comprise entre trois et cinq ans ; ce que nous proposons n’en est pas très éloigné !
L’Irlande, quant à elle, ne subordonne pas le droit de vote des étrangers à une durée minimale de résidence. En effet, depuis 1963, la loi électorale accorde le droit de vote aux élections locales aux étrangers. Initialement, l’exercice de ce droit était subordonné à une condition de résidence d’au moins six mois dans le pays. La loi électorale de 1992 a supprimé cette condition, propre aux étrangers, de sorte que ces derniers doivent désormais remplir les mêmes conditions de résidence dans la circonscription et d’inscription sur les listes électorales que les nationaux.
Outre la France, trois pays, l’Allemagne, l’Autriche et l’Italie, limitent le droit de vote aux élections locales aux seuls ressortissants d’un État membre de l’Union européenne. Pourtant, l’exemple des pays européens cités précédemment montre que l’accès au droit de vote des étrangers non ressortissants de l’Union européenne ne crée pas de bouleversements majeurs, si ce n’est l’émergence d’une conception plus large et plus universelle de la démocratie.
J’ajoute qu’en ces temps troublés d’interrogation sur l’identité nationale, au lieu d’opposer les Français « de souche », comme il vous plaît de les appeler, et les autres, le droit de vote serait un facteur d’intégration des étrangers et de leurs familles – enfants, petits-enfants, etc. – à la communauté de vie, la communauté politique, la communauté des droits et des devoirs, la communauté fiscale et la communauté de travail. Cette question est importante pour toutes ces personnes,
La disposition accordant le droit de vote aux étrangers lors des élections locales a été adoptée à l’Assemblée nationale. Vous refusez absolument d’avancer en ce sens ; c’est une grave erreur !
Vous dites que cette proposition n’a pas de lien avec le texte. Bien sûr que si ! Nous parlons bien des élections locales aux conseils généraux et régionaux, que je sache !
Vous devriez poser cet acte du droit de vote des étrangers, tout au moins aux élections locales, un droit dont le principe, je le rappelle encore une fois, a été adopté à l’Assemblée nationale.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Comme le précédent, cet amendement n’a aucun rapport avec le texte. J’émets donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 26, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement présente une étude d'impact sur les conséquences de la réforme des collectivités territoriales notamment en matière de parité, de pluralisme et de coût financier et social.
La parole est à Mme Odette Terrade.
Mme Odette Terrade. En prévision du prochain débat sur la réforme des collectivités territoriales, il nous paraît nécessaire de bénéficier de la meilleure information possible. Nous demandons donc au Gouvernement de nous présenter une étude d’impact détaillée sur les conséquences d’une telle réforme.
Nous redoutons la remise en cause de la parité et du pluralisme, qui représenterait une régression sans précédent. Le présent projet de loi instaure en effet, en lieu et place des conseillers généraux et régionaux, des conseillers territoriaux qui seront élus, selon un mode de scrutin mixte, pour 80 % au scrutin uninominal à un tour et pour 20 % à la proportionnelle.
Alors que le combat pour la parité est loin d’être gagné, vous instaurez un mode de scrutin qui remettra en question non seulement la participation des femmes à la vie politique, mais aussi le pluralisme ; c’est en effet l’outil idéal pour laminer les petites formations politiques. Nous souhaitons donc que soit portée à la connaissance des assemblées une analyse détaillée des conséquences de ce mode de scrutin.
Nous souhaitons aussi avoir une parfaite connaissance du véritable coût de cette réforme. En effet, alors que vous êtes si prompts à nous parler de réduction des dépenses publiques, nous sommes assez curieux de savoir combien va coûter une telle réforme, qui vise non seulement à supprimer la moitié des élus, ce qui s’apparente à un licenciement pur et simple, mais aussi à créer des conseillers territoriaux qui devront siéger dans deux assemblées. Or il faudra bien prévoir la construction de nouvelles assemblées, ce qui n’est pas le cas pour le moment.
Pour toutes ces raisons, nous demandons la réalisation d’une véritable étude d’impact, précise, sur tous ces thèmes ô combien ! importants, et ce dans le respect de la Constitution.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Cet amendement sort de la procédure prévue par l’article 39 de la Constitution. En effet, aux termes de la loi organique du 15 avril 2009 relative à l’application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution, les études d’impact sont déposées en même temps que le texte et leur insuffisance ne peut être constatée que par la conférence des présidents, puis par le Conseil constitutionnel, en cas de désaccord entre le Gouvernement et le Parlement. De ce fait, cet amendement pourrait être considéré comme inconstitutionnel.
La commission émet donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Michel Mercier, ministre. Bien qu’ayant déjà répondu tout à l’heure à cette question, je répète bien volontiers qu’un certain nombre de préalables doivent être remplis avant de pouvoir vous donner tous ces renseignements. Ces derniers vous seront naturellement fournis lors de la première réunion de la commission des lois du Sénat qui examinera le projet de loi électorale.
Le Gouvernement émet également un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Yves Krattinger, pour explication de vote.
M. Yves Krattinger. Je regrette la position du Gouvernement sur ce sujet. La parité suscite une réelle préoccupation. Tous les orateurs qui sont intervenus dans cet hémicycle ne partagent pas la même analyse. Les conséquences du mode de scrutin à un tour sur le pluralisme soulèvent de nombreuses questions.
J’ai déduit de vos propos, monsieur le ministre, que votre lecture était complètement différente de la nôtre : alors que vous pensez que ce mode de scrutin favorise le pluralisme, nous estimons qu’il le lamine. Une étude devrait être réalisée par des personnes plus neutres.
Une réelle préoccupation apparaît également au sujet du coût financier. Voilà quelques semaines, je participais avec le président du groupe UMP du Sénat, Gérard Longuet, à une réunion regroupant plus de trois cents élus. Nous expliquions chacun notre vision de la réforme, dans un débat démocratique positif. Gérard Longuet a indiqué que les nouveaux conseillers territoriaux deviendraient assez rapidement des élus professionnels ; ces propos ont inquiété un certain nombre de participants à cette réunion. Si tel est le cas, je suppose que ces élus percevront non pas une indemnité, mais une sorte de salaire, qui sera soumis à cotisations sociales, à cotisations de retraite.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. C’est déjà le cas !
M. Yves Krattinger. Ces élus auront un statut, contrairement aux actuels élus locaux.
J’attache une certaine importance aux propos du président du groupe UMP. Si tel n’est pas votre cas, mes chers collègues, je vous conseille de vous accorder entre vous !
L’argumentaire de M. Longuet, auquel je ne m’oppose pas a priori, n’était pas dépourvu d’intérêt ; mais des dépenses découleront de ce dispositif.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Il y aura aussi des économies !
M. Yves Krattinger. On nous dit que la réforme aura pour effet de faire disparaître 3 000 élus, économie suprême qui sauverait la République. Mais si les 3 000 élus restants ont ce statut d’élus professionnels, à l’évidence, ils coûteront plus cher que les 6 000 qui existent actuellement. N’oublions pas non plus les frais de déplacement, l’indemnisation des remplaçants, etc.
Pour toutes ces raisons, une étude d’impact approfondie doit être réalisée. Nous pourrons alors confronter nos points de vue, en nous appuyant sur une expertise qui devra être neutre.
Même si la proposition, de bon sens, qui est faite ne peut pas être retenue aujourd’hui, le Gouvernement pourrait fort à propos ajouter une étude d’impact aux documents qui nous ont été communiqués. Celle dont nous disposons actuellement, qui ne correspond visiblement pas aux attentes, pourrait être complétée, de sorte que des réponses soient apportées aux questions qui, à l’évidence, préoccupent un grand nombre d’entre nous. Nous souhaitons obtenir des réponses crédibles étayées d’une analyse approfondie.
M. le président. L'amendement n° 27, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les différents seuils, maintien au second tour, possibilité de fusion, accès à la répartition des sièges, doivent être abaissés afin de permettre le renforcement du pluralisme dans les conseils généraux et régionaux.
La parole est à Mme Évelyne Didier.
Mme Évelyne Didier. Il s’agit d’un amendement d’appel, afin que s’instaure un large débat sur la représentativité de nos assemblées élues et sur le pluralisme dans nos institutions.
À quelques semaines de l’ouverture de nos travaux portant sur des textes de destruction massive de nos institutions locales, ce débat nous paraît essentiel.
Par cet amendement, nous lançons, en quelque sorte, une pétition de principe. Nous sommes en effet toujours aussi favorables à la représentation, dans toutes nos assemblées, de l’ensemble des sensibilités politiques présentes dans notre pays. En permanence nous avons dit que nous soutenions le scrutin proportionnel, qui seul, selon nous, permet cette diversité. Ces principes nous conduisent à réaffirmer aujourd’hui la nécessité de réduire les seuils permettant à des candidats d’être présents à un deuxième tour ou de participer à la répartition des sièges.
Nous souhaitons qu’un débat soit organisé sur ce sujet dans les prochains jours.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Cet amendement n’a pas de lien avec le présent texte. Il est dénué de toute valeur normative.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Michel Mercier, ministre. Mme Didier elle-même nous a indiqué qu’il s’agissait d’un amendement d’appel – appel que nous avons entendu –, qui n’a donc pas de caractère normatif.
Le Gouvernement ne peut qu’émettre un avis défavorable.
M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.