M. le président. Madame la ministre, je suis très embarrassé et au regret de vous contredire, mais l’article 40 de la Constitution ne peut s’appliquer à des amendements de suppression !
M. Alain Vasselle. Très bien !
M. le président. La parole est à M. François Autain, pour explication de vote.
M. François Autain. Comme vous le savez, madame la ministre, mes chers collègues, les sénatrices et sénateurs du groupe CRC-SPG sont opposés à la contribution exceptionnelle des complémentaires santé au titre de ce que le Gouvernement présente comme une participation des organismes d’assurance complémentaire à la pandémie de grippe A et que nous considérons quant à nous comme la continuation cette année de la contribution exceptionnelle imposée l’année dernière à l’occasion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009.
Cela nous donne une nouvelle fois l’occasion de souligner à quel point il est tout de même étonnant – à moins que ce ne soit simplement révélateur – que la première mesure contenue dans la partie recettes du PLFSS pour 2010 soit précisément une mesure prétendument temporaire et correspondant à une dépense ciblée : la politique vaccinale contre la grippe A.
Autre curiosité : bien qu’il s’agisse d’une contribution théoriquement très ciblée, les financements qui en résultent sont orientés vers l’assurance maladie, alors que, on y a insisté, c’est l’EPRUS qui a acheté les doses de vaccins. Le faisceau d’indices tend à conforter notre conviction : la contribution vise à financer moins l’EPRUS que l’assurance maladie elle-même ! C’est ce qui lui donne un tout autre sens.
Madame la ministre, les membres de l’UNOCAM, en particulier les assurances complémentaires privées – je le tiens du président de la Fédération française des sociétés d'assurances –, indiquent avoir été, pour cette contribution, « mis au pied du mur ». Contrairement à ce que vous affirmez, elle n’est pas le résultat de la volonté des organismes d’assurance complémentaire, elle leur a bien été imposée !
Enfin, je ne voudrais pas embarrasser le Gouvernement, mais il me semble que la rédaction de cet article 59 ter témoigne d’un léger flottement, à moins que ce ne soit un manque de concertation entre les différents ministres. Car, au moment où M. Woerth, ministre chargé du budget, demandait à l’Assemblée nationale d’adopter le principe de cette contribution en précisant qu’elle serait destinée à l’EPRUS, Mme Bachelot-Narquin, ministre chargée de la santé, faisait voter de son côté contre les amendements qui allaient dans ce sens. Tout cela nous semble être le signe d’une mauvaise coordination, peut-être même d’une mauvaise gestion. C’est à l’image de la politique du Gouvernement en matière de financement de la protection sociale.
On comprendra, compte tenu de cette situation, que nous préférions laisser le Gouvernement et la majorité régler entre eux leur désaccord quant à l’affectation d’une taxe que nous dénonçons par ailleurs, notamment au regard du risque de répercussions sur les mutualistes. Nous ne participerons donc pas au vote de ces amendements identiques et, le cas échéant, nous nous abstiendrons sur l’article 59 ter.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour explication de vote.
Mme Catherine Procaccia. Madame la ministre, je continue, comme lors de l’examen du PLFSS, à soutenir votre proposition de verser la contribution en question à l’EPRUS.
La logique de la situation m’échappe : pourquoi avoir voté la création de l’EPRUS si c’est pour ne pas donner à celui-ci les moyens dont il a besoin ? Sa vocation est pourtant, me semble-t-il, de faire face au risque de pandémie par l’achat de vaccins ! Malgré toutes les explications du rapporteur spécial, je ne comprends toujours pas. En revanche, j’ai bien compris que le rapporteur général de la commission des affaires sociales voulait essayer de combler le trou de la Sécu ! C’est la seule explication que je vois au fait que l’on nie l’existence de l’EPRUS. Mais alors, pourquoi l’avoir instauré ?
Par ailleurs, si nous adoptons les amendements de suppression de l’article, l’amendement de la ministre ne sera pas soumis au vote, non plus que le mien, qui va dans le même sens bien qu’étant légèrement différent. L’UNOCAM, c’est-à-dire les assurances complémentaires, devra alors verser 280 millions d’euros alors que sa contribution aurait dû s’établir, selon ses calculs, entre 231 millions et, aux termes de l’amendement de Mme la ministre, 240 millions d’euros. M. Autain s’est à juste titre interrogé : qui paiera ces 40 millions d’euros supplémentaires ? Croyez-vous vraiment que ce seront les assureurs ? Vous allez voir vos cotisations d’assurance maladie !
De plus, le procédé est malhonnête puisqu’un engagement avait été pris. Moi aussi j’ai consulté les représentants de l’UNOCAM et d’un certain nombre d’assurances complémentaires. Ils sont d’accord pour payer, mais sur les bases qui ont été fixées. Or, supprimer l’article 59 ter, ce serait revenir sur cet engagement. Je le répète : si nous votons ces amendements de suppression, comme d’habitude, ce sont les assurés qui paieront. Je ne vois pas comment on peut vouloir mener de grands combats contre les pandémies et faire payer toujours les mêmes, c’est-à-dire les assurés.
Enfin, M. Jégou a mentionné le ticket modérateur. Certes, mais il porte sur 35 % des frais, quand 93 % de la population a une complémentaire maladie : d’habitude, ce n’est pas 93 % de la population qui se fait vacciner ! Or, dans le cas qui nous occupe, ce sont 94 millions de doses de vaccin qui doivent être financées. Cela représente donc beaucoup plus de 40 millions d’euros, et c’est nous, les assurés, qui allons les payer à travers la contribution de l’UNOCAM.
M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle, pour explication de vote.
M. Alain Vasselle. Je commencerai par un petit point d’histoire à l’intention de notre collègue Catherine Procaccia.
La demande qu’elle formule en ce qui concerne la juste contribution des complémentaires est légitime. Sur cette question, j’adhère tout à fait à son argumentation, qui, à mon avis, mérite d’être prise en considération.
Pour ce qui est du transfert de la dépense à l’EPRUS, en revanche, je ne la suivrai pas. Mme Procaccia ne siégeait pas encore parmi nous à l’époque où le Gouvernement a mis en place le plan Biotox. Le Sénat avait alors dénoncé cette initiative, parce qu’elle tendait en réalité à faire supporter en totalité à la CNAM le financement de ce plan, qui relevait de la compétence régalienne de l’État. Le Gouvernement avait passé outre, nous donnant à comprendre qu’il n’avait pas d’autre solution dans le moment où nous en débattions.
Lorsque nous avons eu, par la suite, à débattre de la création de l’EPRUS, le Sénat a obtenu qu’il y ait au minimum une parité de financement entre la CNAM et l’État, et ce exclusivement pour les produits de santé. Mais la réquisition des personnels et toute la logistique relative aux menaces sanitaires devaient relever du budget de l’État et non pas de l’assurance maladie.
Nous sommes toujours sur cette ligne et nous demandons ni plus ni moins que le respect d’une décision du Parlement confirmée par l’Assemblée nationale et par le Sénat lors de l’examen des différents PLFSS. Nous ne demandons rien d’autre.
Aujourd’hui, nous constatons que le Gouvernement, qui au moment de la discussion des conclusions de la commission mixte paritaire sur le PLFSS pour 2010 en séance publique, a admis l’argumentation puisqu’il n’a pas déposé d’amendement, a changé d’avis. La dotation de la CNAM à l’EPRUS n’a été modifiée que pour tenir compte du changement de taux de TVA sur l’achat des vaccins et du don à l’OMS d’une partie de ces vaccins.
Autre élément : lors de l’examen du PLFSS, le Gouvernement avait également justifié le dépôt de son amendement en prétendant vouloir donner une meilleure traçabilité à la contribution des complémentaires en transférant celle-ci à l’EPRUS plutôt qu’à la CNAM. C’est effectivement une demande exprimée par les complémentaires – elle est tout à fait justifiée – mais ce n’est pas en transférant cette somme à l’EPRUS que l’on obtiendra une meilleure traçabilité. C’est une question de clairvoyance et de suivi de la part de la Haute Assemblée, de l’Assemblée nationale et du Gouvernement sur la part exceptionnelle des complémentaires au financement de la pandémie.
En fait, cette opération est un tour de passe-passe qui consiste à permettre à l’État de faire l’économie d’une partie de sa contribution en la faisant financer par les complémentaires, alors que la contribution de celles-ci doit s’imputer sur la part de la CNAM. Ce n’est rien d’autre que cela.
Il me paraissait donc utile de faire ce point d’histoire à l’intention de notre collègue Catherine Procaccia, dont je partage les préoccupations, mais il ne faut pas mélanger, d’une part, la juste contribution des complémentaires et, d’autre part, les modalités de financement du dispositif entre la CNAM et l’EPRUS.
Le Gouvernement avait proposé de créer une contribution exceptionnelle. Je rappelle qu’aucun amendement n’a été déposé à l’Assemblée nationale et au Sénat, et le Parlement dans son ensemble a approuvé l’affectation à la CNAM de la contribution des complémentaires. Pour nous, ce débat était clos.
Mais, alors que l’encre du PLFSS est encore à peine sèche et que le texte est soumis au Conseil constitutionnel, le Gouvernement veut revenir dessus une semaine après son adoption pour prévoir l’affectation de la contribution à l’EPRUS.
Après avoir fait voter à l’Assemblée nationale un amendement en ce sens, alors même que le Sénat adoptait sans modification l’article du PLFSS qui affectait la taxe à la CNAM, le Gouvernement se rend compte maintenant que le résultat de ses manœuvres risque d’aboutir à la création de deux taxes, l’une dans le PLFSS et l’autre dans le projet de loi de finances. Il vient donc nous demander de nous déjuger en effaçant nos décisions de la semaine dernière.
M. le président. Je vous prie de conclure, monsieur Vasselle.
M. Alain Vasselle. Ces méthodes ne sont pas acceptables. Le Parlement s’est prononcé sur ce sujet de manière particulièrement claire et nous ne pouvons pas y revenir sous le simple prétexte que notre vote ne convient pas au Gouvernement. Je rappelle que le Gouvernement a fait adopter quatre amendements lors de l’examen des conclusions de la commission mixte paritaire sur le PLFSS, amendements qui remettaient en cause les équilibres de la CMP.
M. le président. Monsieur Vasselle, je vous demande de respecter la règle : il faut conclure !
M. Alain Vasselle. Monsieur le président, je suis désolé, mais ce sujet est suffisamment important pour que vous me permettiez de terminer. J’ai dépassé mon temps de vingt-neuf secondes, j’en ai encore pour trente secondes.
Le Gouvernement veut parachever son œuvre en revenant aujourd’hui sur l’une des rares modifications que le Parlement a apportées à son texte. Accepter cela, c’est admettre que nous ne servons à rien et que les budgets de l’État et de la sécurité sociale pourraient aussi bien être adoptés par ordonnances.
Je soutiens donc sans réserve les amendements de suppression de l’article 59 ter présentés par nos collègues Jean-Jacques Jégou et Alain Milon.
J’ajoute qu’une modification de l’affectation de la taxe en loi de finances risquerait de se révéler inconstitutionnelle, comme l’a rappelé notre collègue Alain Milon.
En effet, l’article L.O. 111-3 du code de la sécurité sociale donne un monopole aux lois de financement pour l’affectation des recettes de la sécurité sociale. Il n’est pas possible de revenir en loi de finances sur une telle affectation.
J’ajoute que le PLFSS est en cours d’examen par le Conseil constitutionnel et que si nous supprimons aujourd’hui une recette très importante à la CNAM, nous porterons atteinte à l’équilibre du PLFSS, ce qui pourrait entraîner sa non-conformité à la Constitution.
Je vous prie de m’excuser d’avoir été un peu long, monsieur le président, mais ne nous ridiculisons pas en ne suivant pas la position de nos collègues. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, à ce stade du débat, il doit être possible de concilier toutes les préoccupations.
Madame la ministre, chronologiquement, nos collègues députés ont d’abord voté l’article 59 ter. La commission mixte paritaire s’est ensuite réunie et elle a confirmé le vote du Sénat visant à affecter cette contribution exceptionnelle à la CNAM.
Cette contribution est remise en cause ce soir, parce que nous devons nous prononcer sur l’article 59 ter.
S’agissant de la dévolution du produit de cette contribution exceptionnelle à la CNAM ou à l’EPRUS, je pense franchement, madame la ministre, que la cause est entendue, en tout cas ici au Sénat. D’ailleurs, lorsque vous avez donné l’avis du Gouvernement, vous avez semblé exprimer un doute sur la possibilité de défendre votre amendement n° II-177, parce que vous aviez sans doute l’intuition que les amendements de suppression de nos collègues Jean-Jacques Jégou et Alain Milon seraient votés par notre assemblée.
Donc, si tel est le cas et pour ce qui est du solde des finances publiques – je parle sous le contrôle d’Alain Vasselle –que l’argent aille à l’EPRUS ou à la CNAM, c’est parfaitement équivalent : il n’y a en aucune façon une aggravation du déficit public.
M. Alain Vasselle. C’est exact !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. On peut toujours discuter sur le point de savoir s’il faut améliorer la situation de la protection sociale…
M. Guy Fischer. Surtout en ce moment !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. … en aggravant celle de l’État, mais c’est toujours le contribuable qui paie, d’une manière ou d’une autre.
Reste le niveau de la cotisation. Mme Catherine Procaccia nous dit qu’il n’est pas question de payer plus parce que c’est un prélèvement excessif. La commission des finances est, bien sûr, solidaire de cette préoccupation.
Par conséquent, sur le plan constitutionnel, rien ne s’oppose, me semble-t-il, à ce que nous puissions dans une loi de finances – fût-ce une loi de finances rectificative – modifier un taux qui a été fixé en projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Donc, je propose que, lors de l’examen du projet de loi de finances rectificative les 17 et 18 décembre, nous déposions un amendement visant à porter le taux que vous aviez fixé de 0,94 % à 0,77 %. Il me semble alors que nous aurons satisfait aux préoccupations des uns et des autres. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l’Union centriste et de l’UMP.)
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-24 et II-76.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, l'article 59 ter est supprimé et les amendements nos II-177, II-97 rectifié et II-96 rectifié n’ont plus d’objet.
Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Santé ».
Modification du calendrier budgétaire
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Monsieur le président, mes chers collègues, l’ordre du jour prévoyait que nous examinions, ce soir, les crédits de la mission « Plan de relance de l’économie ».
Malheureusement, nous avons terminé nos travaux cette nuit à une heure trente, et ce matin nous avons dû décaler la reprise de la séance à dix heures trente. Or, nous ne pourrons manifestement pas commencer l’examen des crédits de la mission « Plan de relance de l’économie » avant minuit.
Dans ces conditions, l’examen des crédits de cette mission sera reporté soit demain soit vendredi. J’étudie les différentes possibilités avec M. le ministre chargé du plan de relance.
M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Travail et emploi » (et articles 61, 62 et 63).
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Serge Dassault, rapporteur spécial de la commission des finances. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la mission « Travail et emploi » présente des crédits de 11,4 milliards d’euros destinés en principe à réduire le chômage en créant des emplois.
En réalité, le montant total des crédits affectés par le Gouvernement à la réduction du chômage s’élève à 55 milliards d’euros, ce qui est considérable. Ils sont répartis dans différents budgets.
Premièrement, 25 milliards d’euros sont destinés à payer les allègements de charges des entreprises jusqu’à 1,6 SMIC. Il est à noter qu’ils sont récurrents, sans limite de durée, et que personne apparemment ne veut commencer à les réduire. Ces crédits sont plutôt destinés à des maintiens qu’à des créations d’emploi, ils ne créent aucun emploi nouveau. Ainsi, depuis 2003, l’État aura dépensé pour cette opération 160 milliards d’euros, sans créer un seul emploi, ce qui n’est pas extrêmement efficace,…
M. Guy Fischer. La vérité sort enfin !
M. Serge Dassault, rapporteur spécial. … et cela va continuer encore longtemps si on n’arrête pas cette opération.
Deuxièmement, 10,9 milliards d’euros sont prévus pour des dépenses fiscales, dont 3,2 milliards d’euros de prime pour l’emploi, que l’on ne veut pas réduire. Ils servent, dit-on, à motiver les chômeurs pour qu’ils veuillent bien travailler. D’ailleurs, on ne sait pas combien de chômeurs ont repris le travail avec cette subvention, mais c’est un chiffre considérable.
Troisièmement, 6,45 milliards d’euros sont consacrés aux allégements ciblés de charges, en particulier sur les heures supplémentaires des 35 heures dont le coût global avoisine 3 milliards d’euros. Nous ne savons pas non plus combien d’heures supplémentaires ont été engendrées, mais aucun emploi nouveau n’a été créé.
Quatrièmement, 1,8 milliard d’euros sont prévus au titre du plan de relance pour les contrats aidés et l’apprentissage. J’aimerais bien savoir de quoi il s’agit exactement.
Enfin, à ces crédits, viennent s’ajouter les 11,4 milliards d’euros de notre mission.
En tout, cela représente donc 55 milliards d’euros. C’est quasiment le montant du budget total de l’éducation nationale, qui s’élève à 60 milliards d’euros, et 1,5 fois et demi le budget de la défense, qui s’élève à 37 milliards d’euros.
Je regrette de constater que ce budget considérable comporte beaucoup d’allégements de charges sans créer d’emplois.
Le financement de création d’entreprises n’existe pas, ni la modernisation des outils de production, ni la réalisation de produits nouveaux, ni le développement des exportations. Rien de tel n’est prévu dans le budget de l’emploi alors qu’il s’agit de la seule façon de créer réellement de nouveaux emplois et d’aboutir à la croissance tant attendue !
Je constate aussi que ce budget est financé par des emprunts récurrents et sans limite de durée. Combien de temps cela va-t-il durer ? Ils concernent uniquement des dépenses de fonctionnement et pas d’investissement. Ils ne préparent donc pas l’avenir.
Ce budget aggrave ainsi considérablement les déficits budgétaires et la dette sans limite de durée. On ne reviendra jamais à l’équilibre budgétaire tant que l’on ne se résoudra pas à réduire ces allégements et ces aides. Il serait préférable de faciliter les investissements des entreprises plutôt que de les aider à financer leur personnel.
J’en viens à mon budget, qui se décompose en quatre programmes.
Le programme 102 « Accès et retour à l’emploi » s’élève à 5,9 milliards d’euros.
Sur cette somme, 1,36 milliard d’euros sont versés à Pôle emploi au titre d’une subvention pour charge de service public, et 1,5 milliard d’euros au Fonds de solidarité pour indemniser les demandeurs d’emploi en fin de droit. Nous constatons que ces 2,8 milliards d’euros n’ont rien à voir avec des créations d’emploi.
Par ailleurs, 1,7 milliard d’euros sont consacrés aux contrats aidés, seuls créateurs d’emploi, dont 156 millions d’euros seulement iront aux contrats marchands et 1,4 milliard d’euros aux contrats non marchands. Il serait préférable que les budgets soient un peu mieux répartis vers les contrats marchands, qui créent de véritables emplois, même si les contrats non marchands permettent tout de même aux chômeurs de retrouver un travail.
Notons, également, le financement des missions locales pour 175 millions d’euros et des maisons de l’emploi pour 90 millions d’euros, ce qui est dérisoire par rapport à l’excellent travail qu’elles font à l’égard des jeunes en difficulté.
C'est la raison pour laquelle je souhaite vous proposer une augmentation de crédits de 150 millions d’euros pour les missions locales et peut-être pour les maisons de l’emploi.
Nous pourrions les financer en supprimant les aides pour les repas du personnel des restaurants, qui bénéficient de la baisse de la TVA, soit 2 milliards d’euros, ou par tout autre moyen. Le principal est que nous trouvions 150 millions ou 200 millions d’euros sur 55 milliards d’euros.
Je rappelle que les missions locales ont permis l’accès au CIVIS à 830 000 personnes et à des emplois classiques à 220 000 personnes en cinq ans.
Nous constatons que le plus grand nombre d’emplois a finalement été obtenu en dépensant 175 millions d’euros sur les 55 milliards d’euros affectés à l’emploi. À quoi ont servi tous ces crédits ? N’y a-t-il pas du gâchis ?
Nous ne connaissons pas, en revanche, le rendement de Pôle emploi, qui coûte 5 milliards d’euros, ce qui me paraît très élevé. Ne pourrions-nous réaliser ici des économies ?
Voilà pourquoi je tiens absolument à augmenter les subventions pour les missions locales, quel que soit le financement. Si le financement par la restauration est refusé, le programme 103 pourrait y subvenir.
Le programme 103 « Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi » absorbera 4,6 milliards d’euros dont l’utilisation principale sera, une fois de plus, des dispositifs d’exonération de charges, associés aux contrats en alternance pour faciliter l’apprentissage – 1 milliard d’euros – et à la compensation aux régions du coût financier des compétences qui leur ont été transférées en matière de formation professionnelle et d’apprentissage. En quoi cela concerne la création d’emplois ? Ces allégements de charges sont encore une fois sans emplois à la clef !
Par ailleurs, 900 millions d’euros seront utilisés pour les zones de revitalisation rurale et les services à la personne. Peut-être pourrions-nous prélever un peu d’argent dans les crédits consacrés aux services à la personne pour financer les missions locales et les maisons de l’emploi ?
Le programme 111 « Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail » est doté de 80 millions d’euros destinés à l’amélioration des conditions de travail et à l’application du droit du travail par l’administration. Ici aussi, il n’y a aucune création d’emploi en vue !
Le programme 155 « Conception, gestion et évaluation des politiques de l’emploi et du travail » comprend 810 millions d’euros dévolus à l’ensemble des moyens humains et matériels mis en œuvre par les autres programmes de la mission « Travail et emploi ». Celle-ci emploie 10 680 équivalents temps pleins travaillés au sein de l’administration. Ne pourrait-on pas réaliser dans ce secteur également des économies ?
En outre, près de 60 000 personnes sont employées par les opérateurs chargés de la politique de l’emploi, principalement Pôle emploi, qui regroupe 46 000 personnes. Cette opération de grande ampleur fera l’objet d’un bilan d’étape que je souhaite mener en 2010, un an après la création de cette institution. Il s’agira de savoir quel est le véritable coût de la fusion et quelle est son efficacité dans la lutte contre le chômage.
Ainsi, en baisse de 6 % par rapport à 2009, le périmètre budgétaire de la mission « Travail et emploi » de 11 ,4 milliards d’euros ne représente, en réalité, qu’un peu plus d’un cinquième des dépenses globales de l’État au titre de la politique de l’emploi, qui se monte, je le répète, à 55 milliards d’euros, le tout pour ne pas créer d’emplois !
C’est pourquoi l’évaluation de l’efficacité au regard de la lutte contre le chômage de l’ensemble de la politique de l’emploi demeure le vrai problème et nécessite de profondes modifications.
J’ai, dès leur création, considéré que la prime pour l’emploi, qui représente 3,3 milliards d’euros, et l’exonération d’impôt sur le revenu d’heures supplémentaires, qui représente 1,2 milliard d’euros, s’apparentaient davantage à des dépenses d’ordre social qu’à une politique de l’emploi.
À cet égard, je suis frappé qu’année après année l’indicateur de performance relatif à la prime pour l’emploi ne soit toujours pas renseigné et que nous ignorons l’effet de cette dépense sur la situation du chômage. Nous continuons quand même à l’appliquer.
Quelle est l’efficacité des allégements de charges sociales ?
J’avais proposé dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances pour 2009 un amendement pour que le Gouvernement remette au Parlement un rapport d’évaluation de l’efficacité au regard de l’emploi des allégements généraux de charges et des cotisations sociales avant le 15 juin 2009.
Je constate que, malgré mes demandes, ce rapport n’a toujours pas été remis. Or il convient que les parlementaires, qui votent le budget, soient informés de l’emploi des crédits adoptés et de leur efficacité.
Je proposerai dans d’autres débats que le Gouvernement allège les salaires des charges de financement de la sécurité sociale. En les faisant payer autrement par les entreprises, notamment en les asseyant sur le chiffre d’affaires ou sur la TVA, il n’aurait plus à les rembourser et économiserait une dizaine de milliards d’euros.
Par ailleurs, une telle mesure diminuerait les coûts de production et faciliterait les ventes et la croissance.
Les charges sur salaires sont si importantes que le Gouvernement dépense beaucoup d’argent pour les réduire. Pourquoi ne pas les supprimer et les faire porter sur le chiffre d’affaires ou la TVA ? Cela ferait gagner beaucoup d’argent à l’État et limiterait les conséquences des emprunts et de la dette.
Dans l’immédiat, je vous proposerai, comme je l’ai annoncé, un amendement de suppression de l’exonération ciblée de cotisations sociales sur l’avantage en nature dans les hôtels, cafés et restaurants, dont le coût est de 150 millions d’euros.
Cet avantage consenti en 1998 ne se justifie plus depuis l’abaissement à 5,5 % du taux de TVA dans la restauration.
S’agissant de l’évaluation des crédits budgétaires de la mission « Travail et emploi », plusieurs sujets me tiennent à cœur comme la formation et l’accès à l’emploi des jeunes.
Les dispositifs de formation en alternance – contrats d’apprentissage ou de professionnalisation – offrent les meilleurs taux d’insertion dans l’emploi, soit plus de 60 %.
C’est pourquoi la formation professionnelle des jeunes, en particulier l’apprentissage, doit devenir une priorité nationale afin que les jeunes ne sortent pas du système éducatif sans aucune qualification. Il faudrait donc supprimer le collège unique, source principale du chômage des jeunes et de la délinquance.
Au lieu de dépenser des sommes énormes de l’ordre de 20 milliards d’euros pour remettre les jeunes au travail après formation, il serait préférable de bien les former dès le collège à des métiers. Ce débat concerne d’autres budgets.
Je vous proposerai donc que les 150 millions d’euros de crédits de l’exonération de l’aide en nature dans la restauration soient redirigés vers les missions locales pour un montant de 100 millions d’euros et vers le Fonds d’insertion professionnelle des jeunes, qui finance les actions de prise en charges des jeunes – aide au permis de conduire, prospection d’entreprises, prêt de scooter –, pour un montant de 50 millions d’euros. Il s’agit d’une des actions les plus efficaces pour remettre les jeunes au travail. C’est fondamental et très apprécié. J’en sais quelque chose à titre personnel.
Il faut absolument que vous acceptiez, monsieur le ministre, chers collègues, d’augmenter les crédits des missions locales et des maisons de l’emploi pour favoriser l’insertion des jeunes, car le manque d’intégration est source d’insécurité et de délinquance ! Ça ne coûterait que 150 millions d’euros sur un budget de 55 milliards d’euros …