M. Jean-Pierre Plancade. Très bien !
M. Serge Dassault, rapporteur spécial. … où il y a tout de même un certain nombre d’économies à réaliser ! Ces sommes seraient beaucoup mieux utilisées si elles étaient investies dans les missions locales et les maisons de l’emploi.
Enfin, au lieu de maintenir le cloisonnement entre l’éducation nationale et le monde de l’entreprise, il conviendrait de renforcer les filières de formation en alternance.
Je vous proposerai donc un amendement tendant à inciter les entreprises à partir de 50 salariés à embaucher 4 % d’apprentis parmi leurs effectifs, à condition, évidemment, qu’elles aient reçu les demandes correspondantes. Il faut absolument que les apprentis trouvent les moyens d’avoir un patron d’apprentissage.
M. le président. Monsieur Dassault, vous avez largement dépassé votre temps de parole. Veuillez conclure !
M. Serge Dassault, rapporteur spécial. Ainsi, mes chers collègues, après vous avoir exposé mon point de vue de chef d’entreprise sur ce budget et regretté son manque d’efficacité au regard des sommes dépensées pour créer des emplois, je vous invite, pour ne pas retarder sa mise en œuvre et en espérant une profonde modification pour 2011, à voter les crédits de la mission « Travail et emploi », assortis des amendements que j’ai déposés. (Applaudissements sur certaines travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia, rapporteur pour avis.
Mme Catherine Procaccia, en remplacement de M. Alain Gournac, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je m’exprime en remplacement d’Alain Gournac, rapporteur pour avis de cette mission, qui est en déplacement à l’étranger. Je présenterai donc en son nom la position de la commission des affaires sociales sur les crédits du travail et de l’emploi.
L’année 2009 a été marquée par une augmentation du chômage de 25 % dont nous avons tous pu mesurer les conséquences dans nos départements : de nombreux contrats d’intérim n’ont pas été renouvelés, les plans sociaux se sont succédé, ce qui a plongé des familles dans la peur du lendemain.
Face à cette situation difficile, qui s’explique naturellement par la grave crise que traverse l’économie mondiale, le Gouvernement a su mobiliser tous les outils de la politique de l’emploi pour atténuer la hausse du chômage.
Le recours au chômage partiel a ainsi été facilité, permettant d’éviter de nombreux licenciements. Les contrats aidés ont été multipliés, avec pour effet de maintenir dans l’emploi des personnes qui s’en seraient, autrement, éloignées. Un plan d’urgence pour l’emploi des jeunes a été lancé dès le mois d’avril, dans le but, notamment, de soutenir les formations en alternance. Le recours au contrat de transition professionnelle a été élargi : ce contrat peut désormais être signé dans quarante bassins d’emploi durement touchés par la crise, alors qu’il ne s’appliquait initialement que dans six d’entre eux. Je ne veux pas oublier non plus la loi relative à l’orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie, qui contribuera, dès l’an prochain, à lutter contre le chômage en permettant de former les personnes les plus éloignées de l’emploi.
Toutes ces mesures ont produit des résultats : les comparaisons internationales montrent que la France a été l’un des pays les plus volontaristes et que la hausse du chômage a été moins forte chez nous que dans la plupart des pays voisins.
Mme Raymonde Le Texier. Grâce à la protection sociale !
Mme Catherine Procaccia, rapporteur pour avis. Nous n’y voyons aucun motif de triomphalisme, mais simplement la confirmation que les pouvoirs publics ont trouvé des réponses appropriées à une crise économique particulièrement violente.
M. Guy Fischer. Ce n’est pas ce qu’a dit M. Dassault !
Mme Catherine Procaccia, rapporteur pour avis. À l’avenir, M. Gournac souhaite que de nouvelles pistes soient explorées, par exemple, dans le domaine du télétravail, …
Mme Raymonde Le Texier. C’est bon pour les entreprises !
Mme Catherine Procaccia, rapporteur pour avis. … des groupements d’employeurs ou du prêt de main-d’œuvre, afin qu’aucun gisement d’emplois ne soit négligé. Pour ma part, j’estime que le droit du travail devra être adapté pour accompagner ces nouveaux dispositifs.
Pour l’année 2010, la commission des affaires sociales a deux convictions.
Tout d’abord, il lui paraît indispensable de maintenir des politiques vigoureuses de soutien à l’emploi : même si l’on observe quelques signes encourageants de reprise, nous savons que le chômage risque d’augmenter encore pendant plusieurs trimestres. Il serait donc imprudent de baisser la garde !
Ensuite, la mise en œuvre de mesures d’urgence contre le chômage ne doit pas nous conduire à négliger la préparation de l’après-crise : les réformes de structure doivent se poursuivre et nous devons éviter d’adopter des mesures qui paraîtraient bénéfiques dans l’immédiat, mais nous pénaliseraient à moyen terme – je pense en particulier aux préretraites, fidèle en cela à la position constante de notre commission.
La commission des affaires sociales estime que le projet de budget pour 2010 répond à ces deux exigences.
Les crédits de la mission « Travail et emploi » se maintiennent en effet à un niveau élevé, surtout si l’on intègre ceux qui figurent dans la mission « Plan de relance de l’économie ». Ils permettront de prolonger plusieurs mesures qui ont porté leurs fruits, par exemple, l’aide à l’embauche dans les très petites entreprises ou le dispositif « zéro charge » pour le recrutement d’un apprenti.
Notre commission s’interroge cependant sur le montant de la dotation prévue pour le chômage partiel, très en retrait par rapport aux dépenses constatées en 2009 : monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, pourriez-vous nous indiquer comment cette dotation a été évaluée et ce que fera le Gouvernement si elle devait se révéler insuffisante dans le courant de l’année prochaine ?
Par ailleurs, la volonté de réforme du Gouvernement ne se dément pas. Ainsi, la fusion des anciens services de l’ANPE et des ASSEDIC dans Pôle emploi se poursuit à un rythme soutenu – nous sommes un certain nombre, dans cet hémicycle, à avoir suivi cette réforme. Par ailleurs, les psychologues de l’Association nationale pour la formation professionnelle des adultes, l’AFPA, chargés de l’orientation des demandeurs d’emploi, vont être rattachés à Pôle emploi, conformément aux préconisations de la première mission d’information sénatoriale sur la formation professionnelle – le Conseil constitutionnel a d’ailleurs validé ce transfert récemment. Le nouveau contrat unique d’insertion va également entrer en vigueur le 1er janvier 2010. Enfin, le régime des aides à la création d’entreprise a été modernisé.
Ce projet de budget répond donc, selon nous, aux deux critères qui permettent de définir un bon budget, à savoir la poursuite du soutien à l’emploi et la préparation de l’avenir.
Pour conclure, j’évoquerai brièvement la baisse de la TVA dans la restauration, en indiquant que notre commission s’inquiète des créations d’emploi effectives qui résulteront de cette mesure.
Au total, la commission des affaires sociales s’est déclarée favorable à l’adoption des crédits de la mission « Travail et emploi », ainsi qu’à celle des articles rattachés, sous réserve de l’adoption d’un amendement qui sera présenté dans la suite des débats.
Mme Nathalie Goulet. Très bien !
M. le président. Je rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.
Je rappelle qu’en application des décisions de la conférence des présidents, aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de vingt minutes pour intervenir.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Jean-Paul Alduy.
M. Jean-Paul Alduy. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, notre pays va devoir prendre en compte 600 000 chômeurs supplémentaires cette année.
Ce choc social est la conséquence de la crise économique mondiale et, il faut le rappeler, sans la mobilisation du chef de l’État et du Gouvernement en faveur du soutien à l’économie, exprimée notamment par le plan de relance, l’augmentation du nombre de chômeurs constatée n’aurait pas été de 20 %, mais sans doute du double ou du triple ! Il m’est facile, en tant que sénateur d’un département limitrophe de l’Espagne, de rappeler que notre voisin du sud, hier cité en modèle, fait face à un choc sans commune mesure avec le nôtre : le chômage y a augmenté de 150 % !
M. Guy Fischer. C’est le résultat de la spéculation immobilière !
M. Jean-Paul Alduy. L’Espagne approche des 5 millions de chômeurs, pour une population de 46 millions d’habitants ! Nous ne devons donc pas relâcher notre effort, car le pire pourrait être encore devant nous si notre mobilisation faiblissait.
Les crédits qui nous sont présentés s’élèvent à 11,4 milliards d’euros, auxquels il faudrait sans doute ajouter 1,4 milliard d’euros inscrits, pour 2010, dans la mission « Plan de relance de l’économie », ce qui porte le total à 12,8 milliards d’euros, soit deux milliards d’euros de plus que le plafond prévu l’an dernier dans le cadre de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012. Voilà une nouvelle illustration de la volonté du Gouvernement de faire face !
Pour ne pas reprendre les interventions très complètes des rapporteurs, je centrerai mon intervention sur les jeunes.
La jeunesse française, c’est-à-dire la tranche d’âge de 16 à 25 ans, connaît un des taux d’activité les plus faibles d’Europe, soit 30 %, alors que la moyenne européenne s’élève à 60 %, et elle est en outre frappée par un chômage massif. Nous devons donc agir sur ces deux plans : relever le taux d’activité et réduire le taux de chômage. En outre, les dispositifs d’aide et d’accompagnement doivent continuer à s’appliquer au-delà de 25 ans, car leur rupture a des effets souvent dramatiques à cet âge.
Le plan d’urgence pour l’emploi des jeunes, présenté par le Président de la République en avril dernier, s’attaque au sujet. J’en rappelle les principales mesures : une prime de 3 000 euros pour l’embauche en contrat à durée indéterminée, le dispositif « zéro charge » pour les embauches d’apprentis dans les entreprises de onze salariés et plus, ou encore les contrats d’autonomie, dont l’objectif est d’insérer 45 000 jeunes dans l’emploi dans les trois prochaines années.
Le développement de l’apprentissage, comme l’a rappelé M. le rapporteur spécial, est assurément une voie à privilégier et je voterai l’amendement qu’il a déposé, tendant à inciter toutes les entreprises de 50 salariés et plus à accueillir au moins 5 % d’apprentis parmi leurs effectifs.
De même, je crois nécessaire de développer les formations en alternance et je souhaite vous poser une question, monsieur le ministre : parmi les nombreuses mesures d’urgence qui seront applicables jusqu’à la mi-2010, le Gouvernement envisage-t-il d’étendre la formation en alternance chez les employeurs publics ? Des mesures d’urgence en faveur des collectivités locales ont déjà été étudiées par votre ministère, me semble-t-il, pour donner suite aux conclusions d’un rapport de l’Assemblée nationale, mais qu’en est-il exactement aujourd’hui ?
J’évoquerai maintenant les missions locales « jeunes » et les maisons de l’emploi.
La « boîte à outils » des aides directes et incitations fiscales est, aujourd’hui, diversifiée et renforcée. Encore faut-il que nous disposions de services publics associant tous les acteurs de terrain pour conférer à ces outils leur pleine efficacité !
Les missions locales « jeunes » constituent un service de proximité associant les collectivités locales pour faciliter l’insertion sociale et professionnelle des jeunes. Ces organismes, après quinze années d’existence, ont prouvé leur efficacité et, en 2009, Pôle emploi leur a confié l’accompagnement de 230 000 jeunes. Comme M. le rapporteur spécial, je crois nécessaire d’accroître le soutien financier de l’État à ces missions, car, je le rappelle, les collectivités locales assument aujourd’hui l’essentiel de la charge du développement de leurs activités.
M. Guy Fischer. C’est vrai ! (M. Jean-Pierre Plancade renchérit.)
M. Jean-Paul Alduy. Concernant les maisons de l’emploi, je me permettrai d’être un peu plus long, car je sais que les avis sont partagés. Les premières ont été créées, il y a tout juste quatre ans, par Jean-Louis Borloo, dans le cadre du plan de cohésion sociale. Elles prouvent leur pertinence territoriale dans les actions mobilisant les secteurs professionnels et les entreprises en faveur de l’emploi local ou de la lutte contre les exclusions.
Dans les secteurs émergents, elles ont par exemple contribué à l’organisation, à la professionnalisation et au développement des services à la personne. Plus récemment, elles ont engagé une réflexion avec les secteurs professionnels concernés par les nouvelles lois liées au développement durable, comme par exemple le secteur du bâtiment. Je rappelle que les maisons de l’emploi sont les premières structures locales à s’emparer nationalement de la problématique des emplois liés au « plan climat », en partenariat avec l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, l’ADEME. Ce type d’actions illustre l’un des rôles des maisons de l’emploi : innover dans l’action, créer des synergies entre les acteurs locaux pour participer au développement de l’emploi sur nos territoires.
Les maisons de l’emploi ont su aussi répondre à l’une des demandes du plan de cohésion sociale, consistant à permettre à certaines populations en rupture de renouer avec le service public de l’emploi pour favoriser leur insertion, en proposant, notamment dans les quartiers sensibles ou en zone rurale, des services de proximité, sans condition d’accès, adaptés à chacun. Je citerai également la gestion des clauses d’insertion des marchés publics, qui exige un vrai travail de proximité et une vraie capacité à coordonner entreprises et maître d’ouvrage public, pour encourager l’embauche durable des demandeurs d’emploi des quartiers fragile. Permettez-moi de citer l’exemple de Perpignan : 300 jeunes ont pu bénéficier d’une expérience professionnelle significative, grâce aux clauses d’insertion prévues pour les marchés publics. Citons enfin les dispositifs permettant de créer son propre emploi, ou encore les cyber-bases emploi qui, en luttant contre la fracture numérique, travaillent à l’accès de tous à la même information et donc à la lutte contre les exclusions.
Je ne développerai pas davantage l’utilité sociale, que je crois démontrée, des maisons de l’emploi : en effet, elles mettent en mouvement la responsabilité sociale des entreprises sur leur territoire.
Mais si missions locales et maisons de l’emploi ont prouvé leur utilité, je crois devoir insister sur la nécessité d’une meilleure coordination de leurs actions. La qualité de l’action des maisons de l’emploi dépend, pour beaucoup, de la qualité des relations et de la synergie qu’elles ont su – qu’elles ont pu – instaurer, d’une part, avec les services de l’État et Pôle emploi et, d’autre part, avec les différents échelons territoriaux, conseil régional, conseil général, groupements de communes et communes.
Monsieur le ministre, vous avez élaboré un cahier des charges de ces maisons de l’emploi qui permettra de continuer, dans les cinq années à venir, le travail accompli dans les bassins d’emplois concernés. Je crois, pour ma part, que la fusion des outils territoriaux – missions locales pour l’insertion sociale et professionnelle des jeunes, maisons de l’emploi mobilisant la responsabilité sociale des entreprises pour l’emploi local et luttant contre l’exclusion, mais aussi permanences d’accueil, d’information et d’orientation et plans locaux d’insertion par l’économie –, déjà réalisée sur certains territoires, doit être aujourd’hui clairement demandée par l’État. Cette fusion se heurte souvent à des particularismes locaux qui n’ont pas lieu d’être, tant le rassemblement de tous les partenaires de la formation, de l’emploi et de la création d’entreprises est une ardente obligation dans nos territoires.
Je souhaite, monsieur le ministre, qu’une action vigoureuse de l’État permette cette fusion, par exemple au sein d’une agence partenariale réunissant l’État, les collectivités locales, Pôle emploi, les partenaires privés, les chambres consulaires et les syndicats professionnels. Après la réforme qui a créé Pôle emploi, le temps est venu de simplifier et de rassembler les différents outils territoriaux créés et additionnés au fil des années. L’efficacité de Pôle emploi et des collectivités locales en serait renforcée, pour le plus grand bénéfice de nos politiques de la ville et de lutte contre les exclusions. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à Mme Annie David. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.)
Mme Annie David. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je voudrais tout d’abord vous faire part de notre mécontentement face au manque, cette année, d’auditions préparatoires en commission.
Pour ses travaux, M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales – je regrette qu’il ne soit pas présent ce soir – a peut-être entendu à huis clos certains des acteurs concernés, mais nous déplorons l’absence d’auditions en commission, notamment celle des ministres.
Ce n’est pas reconnaître, loin s’en faut, le rôle accru du Parlement, ambition pourtant affichée dans la dernière réforme constitutionnelle ! À ce titre, mes chers collègues de la commission des affaires sociales, je vous rappelle la parodie d’audition à laquelle nous avons assisté pour le projet de loi de financement de la sécurité sociale…
M. Guy Fischer. C’est bien vrai !
Mme Annie David. La campagne de communication sur le renforcement de nos institutions n’est en réalité qu’un leurre qui cache mal le mépris du Gouvernement envers le parlement. Il y a les discours et il y a la réalité ! Cette précipitation est une illustration supplémentaire de la marche forcée dans laquelle ce gouvernement veut nous faire travailler.
J’en viens au budget de la mission « Travail et emploi ».
Nous ne pouvons que constater qu’il n’est vraiment pas à la hauteur des besoins. Alors que notre économie connaît une grave crise et que les destructions d’emplois se chiffrent par milliers chaque jour, sans signe d’amélioration avant le second semestre de 2010, il affiche des crédits en baisse de 6 %. Ce ne sont pas les quelques hausses sur tel ou tel programme, ni le « raccrochage » du plan de relance, ni les exonérations de cotisations sociales, ni certaines dépenses fiscales qui pourront nous tromper !
Je rejoins, une fois n’est pas coutume, M. le rapporteur spécial de la commission des finances : ce budget ne contient aucune mesure forte en faveur de la création ou du maintien d’emplois sur notre territoire. Tout au plus est-il constitué d’un catalogue de mesures « rustines », posées ici et là pour cacher l’ampleur des dégâts.
Ainsi, le travail précaire et le travail à temps partiel subi sont institutionnalisés par l’entrée en vigueur du contrat unique d’insertion. Les destructions d’emplois non seulement ne sont pas combattues, mais ne coûtent pratiquement rien aux employeurs, grâce aux contrats de transition professionnelle, les CTP, et aux conventions de reclassement personnalisé, les CRP, alors que seule une minorité des titulaires d’une CRP parvient à se réinsérer dans l’emploi au terme de la convention – M. le rapporteur pour avis l’écrit lui-même dans son rapport. Enfin, les exonérations de cotisations sociales en tout genre, qui sont offertes aux employeurs, semblent être la seule réponse du Gouvernement aux énormes problèmes à résoudre.
Ce budget permet, au mieux, un simple accompagnement social du chômage et il banalise une triste réalité, celle des travailleurs pauvres. D’après l’Institut national de la statistique et des études économiques, l’INSEE, 9,9 % des travailleurs salariés ont aujourd’hui un revenu mensuel inférieur au seuil de pauvreté, soit 910 euros.
Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, je pourrais résumer en quelques mots votre politique : casse des droits des salariés et cadeaux fiscaux aux patrons !
Un autre fait marquant, non jugulé avec ce budget, est la forte hausse du chômage qui touche les jeunes, en particulier les jeunes peu qualifiés. Entre mai 2008 et mai 2009, le nombre de jeunes de moins de 25 ans inscrits à Pôle emploi a augmenté de 32,6 %, alors que la hausse générale du chômage était de 18,4 %.
Par ailleurs, on peut s’alarmer de la situation des 120 000 jeunes sortis en 2009 du système scolaire sans diplôme et sans qualification, lorsque l’on sait que, parmi celles et ceux qui sont sortis de l’école en 2004 dans la même situation, 32 % n’ont toujours pas trouvé d’emploi en 2009, soit cinq ans plus tard ! Il est donc urgent de mettre en place de vraies mesures destinées à leur permettre de trouver un emploi dans des conditions acceptables.
C’est pourquoi nous soutiendrons – de nouveau, c’est inhabituel ! – les amendements proposés par M. le rapporteur spécial Serge Dassault, quant à la suppression de l’exonération dont bénéficient les restaurateurs sur les paniers repas de leurs salariés et, surtout, quant à l’affectation des fonds ainsi économisés.
En effet, cette exonération de charges, justifiée par le taux de TVA appliqué jusqu’ici dans ce secteur – 19,6 % –, n’a plus lieu d’être après le passage à 5,5 % de ce taux et son maintien à ce niveau, malgré les nombreux effets d’annonce sur un éventuel retour à 19,6 %. Je vous rappelle, mes chers collègues, que cette baisse engendre un manque à gagner pour le budget de 2,8 milliards d’euros.
Cette suppression rapporterait 150 millions d’euros de recettes nouvelles. Toujours dans l’idée de donner un emploi à nos jeunes et pour ne citer qu’un exemple, je pense que les missions locales, qui ont déjà prouvé leur efficacité, seraient ravies – c’est le moins qu’on puisse dire ! – de voir leur budget augmenter d’autant.
S’agissant de l’amendement sur l’apprentissage, nous ne sommes pas convaincus qu’il permettra une amélioration de la situation des jeunes. Dans ce domaine, nous savons que tout dépend du contenu de l’apprentissage et de l’état d’esprit de l’employeur. Nous en reparlerons lors de l’examen de cet amendement.
Dans la même logique, nous souhaitions la reconduction de l’allocation équivalent retraite, l’AER, pour l’année 2010. Cette mesure, qui permet à des personnes proches de la retraite de partir dans des conditions dignes, après une vie salariée bien remplie, libère, par la même occasion, des emplois pour les jeunes arrivant sur le marché du travail.
Face aux très mauvais chiffres du chômage d’octobre, monsieur Wauquiez, vous aviez annoncé des « mesures plus offensives » à partir de 2010. Pourquoi ne pas les inscrire dès aujourd’hui dans le présent budget ? À moins que ce ne soit qu’une déclaration de plus…
À propos, justement, de distorsion entre les déclarations et la réalité du terrain, je souhaite m’attarder sur la situation extrêmement préoccupante de Pôle emploi, qui illustre parfaitement cette distorsion. Non, contrairement à la communication gouvernementale, que semble relayer M. le rapporteur pour avis, Alain Gournac, Pôle emploi n’a pas surmonté ses difficultés !
Certes, la fusion entre l’Agence nationale pour l’emploi et les ASSEDIC fut concomitante à l’arrivée de la crise et cette donnée ne peut être niée. Néanmoins, au vu de la manière dont cette réforme a été engagée, avec un total manque d’anticipation – résultat du caprice idéologique d’un gouvernement décrétant une priorité, sans se soucier de l’intendance qui n’avait qu’à suivre, mais qui ne le pouvait pas tant les difficultés à régler étaient énormes –, tout laissait présager qu’elle serait très douloureuse.
Ainsi nous sommes allés de renoncements en renoncements en termes de suivi des demandeurs d’emploi, le contingent suivi par un conseiller passant de 30 à 60, puis aujourd’hui, en moyenne, à 94 demandeurs d’emplois, sachant que, dans certaines agences, ce ratio peut monter jusqu’à 130, voire 180 demandeurs d’emplois !
M. Guy Fischer. On se moque des chômeurs !
Mme Annie David. Ces changements ne sont pas des détails. Ils modifient l’essence même de ce travail.
Ainsi, la personnalisation des prestations et le renforcement de l’accompagnement, principal objectif de la fusion, sont tout simplement impossibles à réaliser. Et ne parlons même pas de l’activité de prospection des entreprises, que les salariés de Pôle emploi devaient aussi prendre en charge...
M. Guy Fischer. Elle n’existe plus !
Mme Annie David. D’un prétendu service personnalisé, on en est arrivé à un véritable travail à la chaîne. Ni le transfert à la hâte de 320 000 dossiers vers de coûteuses structures privées ni les recrutements opérés ne vont suffire à remédier à cette situation, d’autant qu’on nous annonce déjà, avec le reflux du chômage, une diminution des effectifs de Pôle emploi. Donnons-lui déjà le personnel qu’il faut, avant de penser à le réduire !
Le plus grave est que cette fusion, bâclée et encore inachevée, va créer deux types de sacrifiés : les salariés de Pôle emploi, confrontés à des conditions difficiles de travail, et les demandeurs d’emploi eux-mêmes, encore plus mal accompagnés.
Prétendre que les difficultés sont derrière Pôle emploi est faux ! Vos discours, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, se heurtent, là encore, aux réalités.
Évidemment, comme M. le rapporteur pour avis le dit, nous ne prétendons pas avoir la solution miracle pour faire refluer le chômage. Mais, sachant que l’argent est le nerf de la guerre, nous déplorons que le Gouvernement refuse d’aller le chercher là où il est, en abrogeant le bouclier fiscal et en taxant les stock-options, les jetons de présence et les parachutes dorés.
Il préfère au contraire mettre en place la fiscalisation des indemnités journalières en cas d’accident du travail ou de maladie professionnelle. Nous voterons évidemment contre cette mesure particulièrement choquante et indécente, mais nous y reviendrons le moment venu.
La situation de l’emploi est aujourd’hui très préoccupante et elle est loin de s’améliorer. Comment, dans un tel contexte, justifier une politique drastique de réduction de fonctionnaires, quand, entre 2008 et 2009, les conseillers ministériels ont vu leur nombre augmenter de 17 % et leurs salaires progresser très substantiellement ? Comment imposer la rigueur salariale à toutes et à tous quand le Gouvernement ne cesse d’augmenter son train de vie ?
Nous estimons donc que le budget de la mission « Travail et emploi » n’est pas à la hauteur des besoins de notre pays. J’aurais souhaité aborder d’autres thèmes, par exemple le travail au noir ou l’égalité professionnelle, tous ces dossiers que le Gouvernement prétend vouloir ouvrir, mais qui sont tout juste évoqués et ne font même pas l’ombre d’une mesure dans ce budget !
Ce dernier répond à un « plan com », un plan de communication, qui est un véritable écran de fumée, mais ne permettra en rien d’apporter les réponses concrètes dont notre pays a besoin pour combattre la crise et ses conséquences en matière d’emploi.
C’est la raison pour laquelle nous voterons contre. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)