Article 9
L’article 32 de la même loi est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est précédé de la mention : « I. – » et les mots : « des articles L. 441-1 à L. 441-7 » sont remplacés par les mots : « du titre Ier du livre III de la troisième partie » ;
2° Le troisième alinéa est précédé de la mention : « III. – », les mots : « Chaque établissement ou groupe d'établissements de l'exploitant public » sont remplacés par les mots : « Chaque établissement ou groupe d'établissements de La Poste » et les mots : « contrat de plan de l’exploitant public » sont remplacés par les mots : « contrat mentionné à l’article 9 » ;
3° Le quatrième alinéa est remplacé par quatre alinéas ainsi rédigés :
« Les autres dispositions du livre III, de la troisième partie du code du travail, à l’exception du titre II, sont applicables à l’ensemble des personnels de La Poste, y compris ceux mentionnés aux articles 29 et 44 de la présente loi. Des augmentations de capital ou des cessions d’actions réservées peuvent être réalisées, dans le cadre d’un ou plusieurs fonds communs de placement d’entreprise, conformément aux articles L. 3332-18 et suivants du code du travail, sous réserve des dispositions qui suivent.
« La valeur de la société est fixée par la Commission des participations et des transferts dans un délai maximum d’un mois à compter de sa saisine par le ministre chargé de l’économie. Cette évaluation est conduite selon les méthodes objectives couramment pratiquées en matière de cession totale ou partielle d’actifs de sociétés en tenant compte, selon une pondération appropriée à chaque cas, de la valeur des actifs, des bénéfices réalisés, de l’existence des filiales et des perspectives d’avenir. Elle est rendue publique. Le prix de cession est déterminé sur la base de la valeur de la société ainsi déterminée. Le prix de souscription est fixé conformément au dernier alinéa de l’article L. 3332-20 du code du travail au plus tard soixante jours après la date de cette évaluation.
« Les personnels de La Poste et de ses filiales ainsi que leurs ayants droit ne peuvent détenir qu’une part minoritaire du capital de La Poste.
« Le titre II du livre III de la troisième partie du code du travail peut être étendu à l’ensemble des personnels de La Poste dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État. » ;
4° Le dernier alinéa devient le troisième alinéa et est précédé de la mention : « II. – ».
La parole est à Mme Mireille Schurch, sur l’article.
Mme Mireille Schurch. M. Nicolas Sarkozy, en mai 2006, défendait en ces termes l’intéressement : « Il n’est pas normal que, dans une entreprise, les salariés qui se donnent du mal et qui en assurent le succès ne soient pas associés aux fruits de la croissance ».
Comment ne pas souscrire à ces propos ? Qui pourrait être opposé à ce que les salariés profitent financièrement des fruits de leurs efforts ? Ce que ne dit pas le Président de la République, et ce sur quoi nous sommes en total désaccord avec lui, c’est que cette « reconnaissance » passe à notre avis prioritairement par le salaire et, naturellement, par le réinvestissement dans l’entreprise afin de lui permettre de se moderniser, d’améliorer la productivité et les conditions de travail des hommes et des femmes qui assurent la réussite des entreprises de notre pays.
Pour nous, l’intéressement, parce qu’il est aléatoire et individualisé, est injuste et n’est pas de nature à répondre à l’exigence d’augmentation des salaires et de revalorisation du pouvoir d’achat. Aléatoire, destinée aux seuls salariés stables des entreprises, inégale selon le type d’entreprise et la stratégie de gestion des directions, cette forme de rémunération va se développer au détriment des autres formes de rémunération, et notamment des salaires. Cette forme de rémunération, non soumise aux cotisations sociales, conduit à aggraver la situation des ressources de la protection sociale et des retraites et à fragiliser la constitution des droits sociaux des salariés.
Par ailleurs, nous contestons l’argument selon lequel l’intéressement constitue un renforcement du pouvoir d’achat. Il suffit pour s’en convaincre de lire l’article publié par La Tribune le 12 octobre dernier.
On y apprend que, selon une étude réalisée par Hay Group, le « montant des bonus et de l’intéressement 2009 est en baisse par rapport à 2008 », et l’année 2010 s’annonce être, pour l’intéressement, celle des plus faibles bénéfices. « Néanmoins, depuis un an, le poids de la part variable a fait un bond spectaculaire pour toutes les catégories de salariés : elle atteint désormais 12 % de la rémunération de l’ensemble des salariés, contre 8 % de la rémunération cadre il y a un an et 6 % il y a… dix ans. »
Ce même article précise que « au vu du retournement de la conjoncture, les entreprises pourraient mettre un frein à cette évolution, considérant que cette forme de rémunération expose trop fortement les salariés aux fluctuations conjoncturelles ».
C’est, vous le reconnaîtrez, un curieux paradoxe que de vouloir étendre l’intéressement dans ce projet de loi relatif à l’entreprise publique La Poste quand, par ailleurs, de très nombreux acteurs entendent, dans l’intérêt des salariés, y renoncer.
Nous devons donc observer la plus grande prudence sur ce sujet.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L'amendement n° 69 est présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.
L'amendement n° 303 est présenté par MM. Desessard et Muller et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.
L'amendement n° 503 rectifié est présenté par MM. Teston, Botrel, Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste et apparentés.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Gérard Le Cam, pour présenter l’amendement n° 69.
M. Gérard Le Cam. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme à l’accoutumée, pour rendre acceptable une privatisation, un gouvernement met l’accent sur l’intéressement, la délivrance d’actions aux salariés en leur disant : « N’ayez pas peur de la privatisation, vous deviendrez propriétaires de votre entreprise ! ». Mais ce mirage, tant vanté, est un leurre !
C’est bien une question de société qui est abordée au travers de ce procédé qui joue sur les difficultés financières des salariés et la nécessité pour les uns et les autres de tenter à tout prix d’améliorer les fins de mois.
C’est aussi une question idéologique. En effet, en distribuant une part de capital aux salariés, le Gouvernement et la direction de l’entreprise tentent de masquer une réalité économique incontestable : l’actionnariat tire son profit du travail de ces mêmes salariés. La valeur ajoutée produite par le travail n’ira pas exclusivement au développement de l’entreprise ou au bien-être de l’assemblée des postiers ; elle ira pour l’essentiel, quand La Poste sera privatisée, dans le portefeuille des vrais financiers, ceux qui agissent aujourd’hui pour accélérer le processus en cours.
Combien de salariés de France Télécom disposent encore des actions obtenues au moment du changement de statut et des étapes nécessaires de privatisations ? Ce chiffre serait intéressant à connaître tant il est évident que les salariés les plus modestes, l’immense majorité en somme, ont très rapidement revendu leurs actions.
Une chose est certaine, comme l’actualité le prouve tragiquement, l’intéressement des salariés de France Télécom n’a en rien contribué à leur épanouissement, bien au contraire !
L’intéressement, la vente d’actions aux salariés est un cheval de Troie de la privatisation.
D'ailleurs, le fait de proposer à des fonctionnaires d’acquérir des actions d’une entreprise publique pour laquelle ils travaillent montre bien la direction prise. La destruction des valeurs de solidarité, de générosité, d’égalité du service public est aussi organisée au profit de l’individualisme le plus mercantile.
Nous proposons donc résolument de supprimer cet article 9 qui constitue un premier pas évident vers la privatisation de La Poste.
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour présenter l'amendement n° 303.
M. Jean Desessard. Vous me permettrez d’être bref, monsieur le président, Mme Schurch ayant déjà développé l’essentiel de notre argumentation. (Sourires.)
Étant cohérents avec notre position de refus de changement de statut de La Poste, nous sommes opposés à l’ensemble des dispositions de cet article, dont nous proposons la suppression.
Observées de plus près, ces dispositions ne nous paraissent pas satisfaisantes.
Tout d’abord, nous sommes opposés au recours systématique à l’épargne salariale. Cette tendance qui s’installe présente des effets néfastes sur les conditions de travail et de rémunération des salariés.
En effet, l’intensification du recours à l’épargne salariale est un subterfuge pour ne pas augmenter les salaires du personnel. On fait miroiter la possibilité d’un complément de rémunération au lieu de faire progresser la rémunération elle-même.
Cela revient également à effectuer un double transfert de risque sur les épaules des salariés.
Premièrement, ils risquent tous les jours de voir leurs postes supprimés au nom de je ne sais quelle politique de baisse des coûts.
Deuxièmement, comme de nombreux petits actionnaires, ils pourraient voir, s’ils en possèdent, leurs actions fondre comme neige au soleil par la simple volonté de dirigeants d’entreprise ou à la suite de tel ou tel retournement de la Bourse.
Nous ne voulons pas d’une logique de rentabilité à La Poste. Par conséquent, nous refusons une logique d’objectifs financiers appliquée à l’ensemble du personnel.
Une poste publique, des rémunérations décentes et justes, un service public de qualité, voilà la seule chose que demandent la majorité des Français et les salariés de La Poste.
M. le président. La parole est à M. Jacques Berthou, pour présenter l'amendement n° 503 rectifié.
M. Jacques Berthou. L’article 9 vise à mettre en place les dispositions relatives à l’intéressement et à l’épargne salariale.
Par cet amendement, nous souhaitons nous exprimer sur ces questions.
Nous ne sommes pas forcément opposés aux mécanismes de l’intéressement et de l’épargne salariale. L’intéressement est, par définition, une rémunération collective facultative liée aux résultats de l’entreprise. Basée sur la réalisation d’objectifs, cette prime est utilisée pour motiver les salariés.
On se situe donc ici pleinement sur le terrain des sociétés anonymes et des différents mécanismes de rémunération qui y sont pratiqués. De ce point de vue, cet article est aussi, dans une certaine mesure, une conséquence du changement du statut de La Poste. C’est la raison pour laquelle, dans la continuité de ce que nous avons défendu jusqu’à maintenant, nous souhaitons sa suppression.
Par ailleurs, nous tenons à rappeler certains des doutes que suscitent en nous ces dispositifs.
Certes, il paraît séduisant que les salariés profitent du succès de leur entreprise ; il n’en reste pas moins que, à d’autres égards, ce mécanisme peut avoir des effets pervers.
En effet, la prime d’intéressement est, nous l’avons dit, directement liée à la réalisation d’objectifs chiffrés. Force est donc de constater que l’objectif chiffré va primer, que la course à la rentabilité pourrait être de mise. De ce point de vue, les dispositions de l’article 9 ne manquent pas de nous inquiéter en ce qui concerne tant le service rendu que la situation des salariés. Il ne serait pas acceptable que les conditions de travail se dégradent au nom de cette rentabilité. Les agents de La Poste doivent avant tout rendre un service au public.
En outre, se pose la question du lien entre la politique salariale et les rémunérations complémentaires.
L’intéressement est une prime qui peut apporter un complément de revenu substantiel aux salariés, mais il ne saurait remplacer les augmentations « normales » de salaire.
On peut craindre, en effet, que la mise en place de mécanismes complémentaires de rémunération n’ait pour conséquence de bloquer durablement toute négociation et toute évolution en matière de salaires.
Peut-être dira-t-on aux salariés de La Poste qu’ils n’ont pas à demander d’augmentation, cette dernière étant remplacée par la prime d’intéressement (M. Martial Bourquin opine), prime qui reste, rappelons-le, tributaire des résultats de l’entreprise.
La mise en place de ce mécanisme est donc, à nos yeux, une source d’inquiétude. Nous estimons qu’il est susceptible d’avoir des répercussions négatives sur les conditions de travail et les négociations salariales, notamment dans le contexte actuel.
Nous tenions, monsieur le président, monsieur le ministre, à faire ces remarques à propos de cet article dont nous souhaitons la suppression. (Mme Christiane Demontès ainsi que MM. Martial Bourquin et David Assouline applaudissent.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces trois amendements identiques ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. La commission ne peut qu’être défavorable à ces trois amendements de suppression de l’article 9 du projet de loi. Celui-ci tend à appliquer aux salariés de La Poste, selon des modalités pertinentes, les dispositions du code du travail relatives à l’intéressement et à l’épargne salariale. Il est même prévu, dans le cadre de l’ouverture du capital, que des actions gratuites puissent être distribuées aux salariés.
Les dispositions de cet article seront bénéfiques pour tous, en particulier pour les salariés de La Poste.
MM. Gérard Longuet et M. Alain Gournac. Très bien !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Estrosi, ministre. L’article 9 traite des dispositifs d’épargne salariale. Ce n’est pas rien !
M. Gérard Longuet. Eh oui !
M. Christian Estrosi, ministre. Pour ma part, je suis favorable à ces dispositifs tels que la participation, l’actionnariat salarié ou l’intéressement, lequel existe déjà à La Poste, qui permettent de mieux associer les salariés au développement de l’entreprise.
Par ailleurs, je souligne que le dispositif d’actionnariat salarié est optionnel et qu’il appartiendra à chaque agent de La Poste de décider, en toute liberté, s’il veut ou non devenir actionnaire de son entreprise.
Supprimer l’article 9 du projet de loi reviendrait à retirer un droit aux agents de La Poste, à leur interdire de pouvoir librement devenir actionnaires de leur entreprise.
Enfin, je vous rappelle que l’une des lois importantes sur l’actionnariat salarié a été adoptée sur l’initiative de M. Fabius, en 2001.
MM. Alain Gournac et André Dulait. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Isabelle Debré, pour explication de vote.
Mme Isabelle Debré. Je voudrais rassurer notre collègue Jacques Berthou. En tant que membre du COPIESAS, le Conseil d’orientation de la participation, de l’intéressement, de l’épargne salariale et de l’actionnariat salarié, qui a succédé au Conseil supérieur de la participation, je ne peux que me féliciter de cette disposition.
Mes chers collègues, vous savez très bien que, dans les entreprises où un dispositif de participation ou d’intéressement a été mis en place, les résultats n’en sont que meilleurs.
M. Alain Gournac. C’est exact !
M. Jean Desessard. Où donc ?
Mme Isabelle Debré. Quasiment dans toutes ! Voyez les statistiques ! Ces dispositifs sont bénéfiques pour les entreprises, car ils facilitent le dialogue social. Par conséquent, personne ne peut être contre !
La participation et les augmentations de salaire sont deux mécanismes totalement distincts et complémentaires,…
M. Gérard Longuet. Tout à fait !
Mme Isabelle Debré. … et en aucun cas l’une ne peut remplacer les autres. Cela n’arrive jamais.
Mme Isabelle Debré. Pour toutes ces raisons, nous voterons bien évidemment contre ces amendements de suppression. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. Gérard Longuet. Très bien !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 69, 303 et 503 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L'amendement n° 250, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :
Alinéas 1 et 2
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Mme Éliane Assassi. Comme nous venons de l’indiquer, nous sommes opposés au développement d’un dispositif d’intéressement et d’un dispositif d’actionnariat salarié au sein de La Poste SA.
La mise en œuvre de tels dispositifs participe, depuis plus de quarante ans qu’ils existent, de l’effort continu d’intégration des salariés aux logiques patronales qui animent, depuis le milieu des années soixante, les milieux dirigeants de nos entreprises.
L’article 9 comporte d’ailleurs une série de dispositions que nous proposons de supprimer, les unes après les autres, pour les motifs que je viens rapidement d’évoquer devant vous.
Les deux premiers alinéas de cet article, que notre amendement vise à supprimer, ont, en apparence, un caractère purement formel, se contentant en effet de coordonner les dispositions de l’article 32 de la loi du 2 juillet 1990 relative à l’organisation du service public de la poste et des télécommunications, dite « loi Quilès », et la nouvelle numérotation du code du travail, issue de la loi du 21 janvier 2008 ratifiant l’ordonnance n° 2007-329 du 12 mars 2007 relative au code du travail – partie législative. À l’époque, nous avions d’ailleurs déploré que cette réécriture ne se fasse pas à droit constant.
Mais cette situation laisse toutefois subsister un étrange objet juridique : la possibilité pour des fonctionnaires d’être actionnaires de la société anonyme qui les emploie.
On peut presque se demander s’il n’y a pas là, au-delà de l’apparente égalité de traitement entre fonctionnaires et autres salariés de La Poste, une rupture d’égalité entre les fonctionnaires de la Poste et les autres fonctionnaires.
On doit surtout se demander ce que la « carotte » de l’intéressement et de l’épargne salariale peut bien donner aux agents de La Poste, attendu que c’est plutôt sur leur fiche de paie que portent leurs préoccupations pour un meilleur pouvoir d’achat.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Je ne comprends pas les intentions des auteurs de cet amendement, car les deux alinéas visés reprennent fidèlement le contenu de la loi de 1990 sur le thème de l’intéressement et n’apportent que des modifications rédactionnelles et d’ordre juridique.
Aussi, la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Estrosi, ministre. Je ne résiste pas au plaisir de signaler à Mme Assassi que l’intéressement existe depuis 2007 à La Poste. Cette année-là, ce sont 26 millions d’euros qui ont été distribués à 300 000 agents. (Mme Éliane Assassi s’exclame.) Peut-être voudriez-vous les en priver ?
M. Alain Gournac. Ils ne vont pas être contents !
M. Christian Estrosi, ministre. Toujours est-il que telle n’est pas notre position. Les salariés de La Poste sont demandeurs de cet intéressement.
Mme Isabelle Debré. Exactement ! Voyez ce qui s’est passé à la SNCF !
M. Dominique Braye. Tout à fait ! Soyez sérieux !
Mme Éliane Assassi. Cela fait 80 euros par salarié !
M. Dominique Braye. Il est vrai que vous n’êtes pas à 80 euros près !
Mme Éliane Assassi. Vous ne savez même pas combien gagne un postier !
M. le président. Respectez-vous les uns les autres !
Je mets aux voix l'amendement n° 250.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 251 est présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche.
L'amendement n° 509 est présenté par MM. Teston, Botrel, Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 3
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Mireille Schurch, pour présenter l’amendement n° 251.
Mme Mireille Schurch. Cet amendement vise à supprimer, par cohérence avec la position que ma collègue vient de défendre, le troisième alinéa de l’article 9.
Cet alinéa est tout simplement une pure escroquerie, qu’il convient de dénoncer immédiatement.
En effet, si l’on suit bien la logique du texte, l’intéressement n’aura pas la même teneur dans tous les établissements de La Poste.
On nous propose de mettre en place un intéressement dans chaque site de La Poste, à concurrence d’un certain effectif de personnel, alors même que toutes ces activités n’ont pas nécessairement le même niveau de rentabilité. Cela ne manquera pas de créer de profondes différences de montant entre les primes d’intéressement, selon les sites et les métiers.
Une telle démarche caractérise clairement le marché de dupes que constitue, depuis quarante-deux ans, l’intéressement.
Pour obtenir une prime suffisamment élevée, les agents des centres courrier seront contraints de forcer la productivité sur leur site, tandis que les conseillers financiers de La Banque Postale pourront récupérer bien plus.
La course permanente à la rentabilité, à la productivité, ne créera pas nécessairement les conditions de la qualité de service et de produit, ce qui ne manquera pas d’avoir un effet négatif sur le résultat de l’entreprise.
Enfin, si l’on souhaite, en instaurant ce type de procédure, installer un climat social aussi détérioré que chez France Télécom, nul doute que l’outil ici décrit y pourvoira avantageusement.
Nous ne pouvons évidemment encourager le développement d’une telle inégalité de traitement entre les agents de La Poste, inégalité qui s’ajoute aux autres.
Nous vous invitons donc à adopter cet amendement,…
M. Dominique Braye. Eh bien non !
Mme Mireille Schurch. … qui n’est pas anodin.
M. le président. La parole est à M. Roland Courteau, pour présenter l'amendement n° 509.
M. Roland Courteau. Cet amendement a pour objet de supprimer l’alinéa 3 de cet article.
Cet alinéa vise à remplacer les mots « Chaque établissement ou groupe d’établissements de l’exploitant public » par les mots « Chaque établissement ou groupe d’établissements de La Poste », et les mots « contrat de plan de l’exploitant public » par les mots « contrat mentionné à l’article 9 », c’est-à-dire le contrat d’entreprise.
Ces dispositions, on le comprend aisément, sont la conséquence directe de la transformation de La Poste en société anonyme.
Dans la continuité de la position que nous défendons depuis le début de l’examen de ce projet de loi, à savoir notre opposition à l’abandon du statut d’EPIC, nous vous proposons donc de supprimer cet alinéa.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. L’article 9 gêne les membres du groupe CRC-SPG, car il prend acte de la disparition de la notion d’établissement public de La Poste.
Je comprends que vous restiez dans votre logique, mais comprenez aussi que nous ne puissions pas souscrire à la suppression de l’alinéa 3 de cet article dans lequel on ne fait que prendre acte de la disparition de la notion d’établissement public.
La commission a donc émis un avis défavorable sur ces deux amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Estrosi, ministre. Je suis bien évidemment défavorable à ces deux amendements.
Madame Schurch, je vous demande, lorsque vous vous exprimez, de le faire avec plus de respect par rapport au débat public.
Vous avez dit que cet alinéa était une « pure escroquerie ».
M. Alain Gournac. C’est honteux !
M. Christian Estrosi, ministre. Franchement, ce ne sont pas des propos que l’on peut utiliser dans une assemblée comme le Sénat. (Protestations sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste – Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Il y a déjà eu un débordement hier, que j’ai laissé passer, de la part d’un sénateur socialiste : M. Assouline m’a traité de menteur et j’aurais donc pu demander l’application de l’article 95 du règlement du Sénat.
Je ne laisserai pas dire que le Gouvernement a proposé un texte dont un article comporte un alinéa qui est une « pure escroquerie ».
M. Dominique Braye. Très bien !
M. Roland Courteau. On dit ce que l’on pense !
Mme Mireille Schurch. Alors, on ne peut plus rien dire !
M. le président. La parole est à Mme Isabelle Debré, pour explication de vote.
Mme Isabelle Debré. M. le ministre m’a devancée, puisqu’il a dit exactement ce que j’avais l’intention de dire.
Madame Schurch, vous considérez que l’intéressement est une course à la productivité. Pour ma part, je la conçois bien différemment !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Allez-voir sur place !
Mme Isabelle Debré. Je la vois comme un facteur de cohésion sociale, de motivation, comme une satisfaction de se sentir pleinement acteur dans sa société, d’être associé à ses résultats.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Allez-voir sur place !
Mme Isabelle Debré. Ce n’est pas forcément la course à la productivité. C’est aussi se sentir acteur et pleinement acteur dans sa société. Voilà, pour moi, ce qu’est la participation ! (Mmes Christiane Hummel et Marie-Thérèse Hermange applaudissent.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Expliquez cela à France Télécom !
M. Dominique Braye. Vous ne savez pas ce que c’est, la participation !
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. Dans cet hémicycle, on n’a pas le droit de parler d’escroquerie : d’accord, et vous avez rétabli les choses, monsieur le ministre ! Alors parlons d’exploitation de l’homme par l’homme ! (Exclamations sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Très bien !
M. Jean Desessard. Parlons de ceux qui font des profits de plus en importants et de ceux qui sombrent dans la précarité et la pauvreté.
Disons les choses clairement : aujourd’hui, en France, en Europe, dans le monde, le système fait que certains deviennent toujours plus riches et que d’autres, de plus en plus pauvres, ne peuvent plus payer leur loyer, assurer les fins de mois, envoyer leurs enfants à l’école, et tombent dans la précarité et la pauvreté. Voilà le régime que vous nous proposez !
Mme Isabelle Debré. L’intéressement n’est pas fait pour les riches !
M. le président. La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. M. le ministre me fournit l’occasion d’apporter une précision. Hier, après mon intervention, il a dit, et c’est dans l’enregistrement de la séance, que je l’avais traité de menteur.