Sommaire
Secrétaires :
Mme Christiane Demontès, M. Daniel Raoul.
MM. Didier Guillaume, le président.
3. Entreprise publique La Poste et activités postales. – Suite de la discussion d'un projet de loi en procédure accélérée (Texte de la commission)
Amendement n° 412 de M. Michel Teston. – MM. Yannick Botrel, Pierre Hérisson, rapporteur de la commission de l’économie ; Christian Estrosi, ministre chargé de l'industrie ; Mme Brigitte Gonthier-Maurin. – Adoption.
Amendement n° 243 de M. Jean-Claude Danglot. – MM. Jean-François Voguet, le rapporteur, le ministre. – Devenu sans objet.
Adoption de l'article modifié.
Mme Évelyne Didier.
Amendements identiques nos 67 de M. Jean-Claude Danglot, 299 de M. Jean Desessard et 496 rectifié de M. Michel Teston. – M. Jean-François Voguet, Mme Marie-Christine Blandin, MM. Claude Jeannerot, le rapporteur, le ministre, Martial Bourquin, Mme Évelyne Didier. – Retrait des trois amendements.
Amendements nos 228 à 234, 558, 244, 559, 245, 562 de M. Jean-Claude Danglot, 497 rectifié, 498 de M. Michel Teston, 593 et 621 rectifié de M. François Fortassin. – Mme Brigitte Gonthier-Maurin, M. Jean-François Voguet, Mme Évelyne Didier, M. Roland Courteau, Mme Mireille Schurch, M. Serge Lagauche, Mme Françoise Laborde, MM. le rapporteur, le ministre. – Rectification de l’amendement no 562 ; retrait de l’amendement no 593 ; rejet des amendements nos 234, 229, 230, 558, 497 rectifié, 244, 231, 559, 498, 233, 232, 228 et 245 ; adoption de l’amendement no 621 rectifié.
Articles additionnels après l'article 7
Amendements nos 372 à 374 de M. Michel Teston. – MM. Michel Teston, le rapporteur, le ministre, Martial Bourquin, Daniel Dubois, Nicolas About, Gérard Longuet, Mme Mireille Schurch. – Adoption de l'amendement no 372 insérant un article additionnel ; retrait des amendements nos 373 et 374.
Amendement n° 375 de M. Michel Teston. – MM. Yannick Botrel, le rapporteur, le ministre. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement no 376 de M. Michel Teston. – MM. Yannick Botrel, le rapporteur, le ministre, Gérard Longuet, Jean-Paul Emorine, président de la commission de l’économie. – Rejet.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, MM. Michel Teston, Jean Desessard.
Amendements identiques nos 68 de M. Jean-Claude Danglot et 499 de M. Michel Teston. – Mme Brigitte Gonthier-Maurin, MM. Claude Jeannerot, le rapporteur, le ministre, Daniel Raoul. – Rejet des deux amendements.
Amendements nos 246, 235, 255 de M. Jean-Claude Danglot, 500, 413 de M. Michel Teston et 301 de M. Jean Desessard ; amendements identiques nos 300 de M. Jean Desessard, 502 rectifié de M. Michel Teston et 560 de M. Jean-Claude Danglot ; amendements nos 260, 562 rectifié, 261, 561 de M. Jean-Claude Danglot, 325 rectifié bis de Mme Colette Giudicelli, 501 rectifié de M. Michel Teston et 595 de M. François Fortassin. – M. Jean-François Voguet, Mme Mireille Schurch, MM. Didier Guillaume, Martial Bourquin, Jean Desessard, Daniel Raoul, Mmes Brigitte Gonthier-Maurin, Évelyne Didier, MM. le président, le ministre, Daniel Raoul, Mme Catherine Procaccia ; MM. Michel Teston, Yvon Collin, le rapporteur, le président de la commission.
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE M. Roland du Luart
Mme Mireille Schurch, MM. Michel Teston, le ministre, Martial Bourquin, Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, M. Daniel Raoul, Jean Desessard. – Rejet des amendements nos 246, 235, 255, 500, 413, 301, 261 et 561 ; adoption de l’amendement no 325 rectifié bis, les amendements nos 501 rectifié, 562 rectifié et 595 devenant sans objet ; adoption des amendements nos 300, 502 rectifié et 560, l’amendement no 260 devenant sans objet.
M. Michel Teston, Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, MM. Daniel Raoul, Jean-Pierre Fourcade, Martial Bourquin.
Adoption de l'article modifié.
Mme Mireille Schurch.
Amendements identiques nos 69 de M. Jean-Claude Danglot, 303 de M. Jean Desessard et 503 rectifié de M. Michel Teston. – MM. Gérard Le Cam, Jean Desessard, Jacques Berthou, le rapporteur, le ministre, Mme Isabelle Debré. – Rejet des trois amendements.
Amendement no 250 de M. Jean-Claude Danglot. – Mme Éliane Assassi, le rapporteur, le ministre. – Rejet.
Amendements identiques nos 251 de M. Jean-Claude Danglot et 509 de M. Michel Teston. – Mme Mireille Schurch, MM. Roland Courteau, le rapporteur, le ministre, Mme Isabelle Debré, MM. Jean Desessard, David Assouline. – Rejet, par scrutin public, des deux amendements.
Amendements identiques nos 504, 394, 341, 505, 393 de M. Michel Teston, 252, 247 à 249, 253, 254 de M. Jean-Claude Danglot, 306, 307 de M. Jean Desessard et 598 de M. François Fortassin. – MM. Claude Jeannerot, Gérard Le Cam, Jean Desessard, Bernard Vera, Mmes Éliane Assassi, Mireille Schurch, MM. Yannick Botrel, Richard Yung, Daniel Raoul, David Assouline, le rapporteur, le ministre. – Rejet des treize amendements.
MM. Bernard Vera, Daniel Raoul, le ministre, Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, M. Michel Teston.
Adoption de l'article.
Mme Mireille Schurch.
Amendements identiques nos 70 de M. Jean-Claude Danglot, 308 de M. Jean Desessard et 510 rectifié de M. Michel Teston. – MM. Gérard Le Cam, Jean Desessard, Daniel Raoul, le rapporteur, le ministre, Mme Isabelle Debré. – Rejet des trois amendements.
Amendements nos 414, 511 et 512 rectifié de M. Michel Teston. – MM. Richard Yung, Michel Teston, le rapporteur, le ministre, Daniel Raoul. – Rejet des trois amendements.
Amendement no 513 de M. Michel Teston. – MM. Roland Courteau, le rapporteur, le ministre. – Rejet.
Amendement n° 395 de M. Michel Teston. – Mme Bariza Khiari, MM. le rapporteur, le ministre, Michel Teston. – Retrait.
Amendement n° 396 de M. Michel Teston. – MM. Richard Yung, le rapporteur, le ministre. – Rejet.
Mme Bariza Khiari.
Adoption de l'article.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.
Amendements identiques nos 71 de M. Jean-Claude Danglot, 310 de M. Jean Desessard et 514 rectifié de M. Michel Teston. – Mme Éliane Assassi, MM. Jean Desessard, Michel Teston, le rapporteur, le ministre. – Rejet des trois amendements.
Amendement no 256 de M. Jean-Claude Danglot. – MM. Bernard Vera, le rapporteur, le ministre. – Rejet.
Amendement no 257 de M. Jean-Claude Danglot. – Mme Mireille Schurch, le rapporteur, le ministre. – Rejet.
Amendement no 258 de M. Jean-Claude Danglot. – MM. Bernard Vera, le rapporteur, le ministre. – Rejet.
Amendements identiques nos 259 de M. Jean-Claude Danglot et 311 de M. Jean Desessard. – MM. Gérard Le Cam, Jean Desessard, le rapporteur, le ministre, Adrien Giraud, Marc Laménie. – Rejet des deux amendements.
Adoption de l'article.
Mme Mireille Schurch.
Amendements identiques nos 72 de M. Jean-Claude Danglot, 312 de M. Jean Desessard et 515 rectifié de M. Michel Teston. – MM. Bernard Vera, Jean Desessard, Michel Teston, le rapporteur, le ministre, Mme Évelyne Didier. – Rejet des trois amendements.
Amendement no 73 de M. Jean-Claude Danglot. – MM. Gérard Le Cam, le rapporteur, le ministre. – Rejet.
Amendement n° 74 de M. Jean-Claude Danglot. – Mme Mireille Schurch, M. le rapporteur, le ministre. – Rejet.
Amendement n° 75 de M. Jean-Claude Danglot. – Mme Évelyne Didier, MM. le rapporteur, le ministre, Mme Éliane Assassi. – Rejet.
Amendement n° 76 de M. Jean-Claude Danglot. – MM. Gérard Le Cam, le rapporteur, le ministre. – Rejet.
Amendements identiques nos 77 de M. Jean-Claude Danglot et 313 de M. Jean Desessard. – Mme Mireille Schurch, MM. Jean Desessard, le rapporteur, le ministre. – Rejet des deux amendements.
Amendement n° 78 de M. Jean-Claude Danglot. – Mme Évelyne Didier, le rapporteur, le ministre. – Rejet.
Amendement n° 79 de M. Jean-Claude Danglot. – MM. Bernard Vera, le rapporteur, le ministre. – Rejet.
Amendement n° 81 de M. Jean-Claude Danglot. – MM. Gérard Le Cam, le rapporteur, le ministre. – Rejet.
Amendement n° 82 de M. Jean-Claude Danglot. – Mme Éliane Assassi, MM. le rapporteur, le ministre. – Rejet.
Amendement n° 83 de M. Jean-Claude Danglot. – Mme Évelyne Didier, MM. le rapporteur, le ministre. – Rejet.
Amendement n° 84 de M. Jean-Claude Danglot. – MM. Bernard Vera, le rapporteur, le ministre. – Rejet.
Amendement n° 564 de M. Jean-Claude Danglot. – MM. Gérard Le Cam, le rapporteur, le ministre. – Rejet.
Amendement n° 565 de M. Jean-Claude Danglot. – Mme Évelyne Didier, MM. le rapporteur, le ministre. – Rejet.
Amendement n° 85 de M. Jean-Claude Danglot. – MM. Gérard Le Cam, le rapporteur, le ministre. – Rejet.
Amendement n° 563 de M. Jean-Claude Danglot. – Mme Mireille Schurch, MM. le rapporteur, le ministre. – Rejet.
Amendement n° 86 de M. Jean-Claude Danglot. – Mme Mireille Schurch, MM. le rapporteur, le ministre. – Rejet.
Amendement n° 87 de M. Jean-Claude Danglot. – MM. Bernard Vera, le rapporteur, le ministre. – Rejet.
Amendement n° 88 de M. Jean-Claude Danglot. – Mme Évelyne Didier, MM. le rapporteur, le ministre. – Rejet.
Amendement n° 89 de M. Jean-Claude Danglot. – MM. Gérard Le Cam, le rapporteur, le ministre. – Rejet.
Amendement n° 90 de M. Jean-Claude Danglot. – Mme Mireille Schurch, MM. le rapporteur, le ministre. – Rejet.
Adoption de l’article.
Amendement n° 91 de M. Jean-Claude Danglot. – MM. Bernard Vera, le rapporteur, le ministre. – Rejet.
Adoption de l’article.
Article additionnel après l’article 12 bis
Amendement n° 188 de M. Louis Nègre. – MM. Christian Cambon, le rapporteur, le ministre. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 321 de M. Jean-Claude Danglot. – Mme Mireille Schurch, MM. le rapporteur, le ministre. – Rejet.
Articles additionnels avant l'article 13
Amendement n° 92 de M. Jean-Claude Danglot. – MM. Bernard Vera, le rapporteur, le ministre. – Rejet.
Amendement n° 100 de M. Jean-Claude Danglot. – MM. Gérard Le Cam, le rapporteur, le ministre. – Rejet.
Amendement n° 354 rectifié de M. Michel Teston. – MM. Michel Teston, le rapporteur, le ministre. – Rejet par scrutin public.
Amendement n° 355 de M. Michel Teston. – MM. Jean-Pierre Caffet, le rapporteur, le ministre, Jean Desessard. – Rejet par scrutin public.
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE M. Gérard Larcher
Articles additionnels avant l'article 13 (suite)
Amendement n° 360 de M. Michel Teston. – MM. Roland Courteau, le rapporteur, le ministre. – Rejet.
M. Gérard Le Cam, Mme Dominique Voynet, M. Michel Teston.
Amendement no 93 de M. Jean-Claude Danglot. – MM. Thierry Foucaud, le rapporteur, le ministre. – Rejet.
Amendements nos 99 rectifié, 122 et 94 de M. Jean-Claude Danglot ; amendements identiques nos 95 de M. Jean-Claude Danglot et 520 de M. Michel Teston ; amendements nos 314 de M. Jean Desessard, 521, 326 à 331, 333 à 335, 337, 365, 522, 516 à 519, 397 à 399 de M. Michel Teston, 421, 422 de M. Jean-Etienne Antoinette, 96 à 98 de M. Jean-Claude Danglot et 193 de M. Denis Detcheverry. – MM. Gérard Le Cam, Thierry Foucaud, Mme Mireille Schurch, M. Michel Teston, Mme Dominique Voynet, MM. Jean-Pierre Caffet, Marc Daunis, David Assouline, Roland Courteau, Mmes Bariza Khiari, Nicole Bricq, M. Richard Yung, Mme Lucienne Malovry, MM. le rapporteur, le ministre, Jacques Blanc. – Rejet des amendements nos 99 rectifié, 122, 94, 95, 520, 314, 521 et 326.
Renvoi de la suite de la discussion.
compte rendu intégral
Présidence de M. Roger Romani
vice-président
Secrétaires :
Mme Christiane Demontès,
M. Daniel Raoul.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Rappel au règlement
M. le président. La parole est à M. Didier Guillaume, pour un rappel au règlement.
M. Didier Guillaume. En ce dimanche matin, nous mesurerons tout l’intérêt que portent nos collègues au projet de loi relatif à La Poste, en particulier Jean-Pierre Caffet, sénateur de Paris, dont c’est l’anniversaire aujourd’hui. (Sourires et applaudissements.)
M. le président. La présidence de séance adresse tous ses compliments à notre collègue Jean-Pierre Caffet !
3
Entreprise publique La Poste et activités postales
Suite de la discussion d'un projet de loi en procédure accelérée
(Texte de la commission)
M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi relatif à l’entreprise publique La Poste et aux activités postales (procédure accélérée) (projet n° 599 rectifié, 2008-2009 ; texte de la commission n° 51 ; rapport n° 50).
Dans la discussion des articles, le Sénat va poursuivre l’examen de l’article 6.
Article 6 (suite)
L’article 11 de la même loi est ainsi rédigé :
« Art. 11. – Le président du conseil d’administration de La Poste est nommé par décret en Conseil des ministres après avis des commissions compétentes de chacune des assemblées. Il assure la direction générale de La Poste. »
M. le président. Au sein de l’article 6, nous en étions parvenus à l’amendement n° 412, qui, présenté par MM. Teston, Bourquin, Botrel, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Le président du conseil d'administration de La Poste ne peut détenir en parallèle aucune autre responsabilité dans une entreprise. »
La parole est à M. Yannick Botrel.
M. Yannick Botrel. Nous sommes tout à fait opposés au système des administrateurs croisés, par lequel des dirigeants de conseil d’administration peuvent être des mandataires sociaux dans une autre société et vice-versa.
Vous comprendrez bien que cet amendement résulte aussi de notre indignation lorsque nous apprenons que le nouveau président de GDF, M. Proglio, continue d’exercer la présidence du conseil de surveillance de Veolia en parallèle.
Ce n’est pas en nommant un vice-président de ce même conseil de surveillance que les choses vont changer.
M. Roland Courteau. C’est sûr !
M. Yannick Botrel. Il est nécessaire que le président du conseil d’administration de La Poste soit pleinement impliqué dans son mandat et qu’il ne soit pas distrait par d’autres activités que nous qualifierons poliment d’annexes.
M. Roland Courteau. Effectivement !
M. Yannick Botrel. Il s’agit d’une fonction exigeante, exigeante en temps, exigeante en énergie et en convictions.
Nous demandons que La Poste ait un mode de gouvernance irréprochable, moderne et transparent.
Bien entendu cet amendement pourrait être rectifié, car nous pourrions étendre cette proposition à l’ensemble des membres du conseil d’administration.
M. Nicolas About. Ça, c’est violent ! (Sourires.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur de la commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire. Ma réponse sera identique à celle que j’ai faite hier soir. Ce débat, extérieur à La Poste, même s’il peut la concerner, a vocation à être réglé dans un autre cadre.
Il est souhaitable que le président de La Poste se consacre entièrement à sa tâche. Pour autant, cette question ne concerne pas seulement cette entreprise – vous le savez bien, mes chers collègues du groupe socialiste, puisque vous avez abordé à plusieurs reprises ce sujet – et n’a pas vocation à être réglée exclusivement pour le président de La Poste.
La commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour explication de vote.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. En France, aujourd’hui, une entreprise publique peut bel et bien, même si les trois quarts de son capital demeurent détenus par l’État, être confiée à un P-DG issu du secteur privé alors même que celui-ci continue d’y exercer des responsabilités.
De plus, La Poste compte également quatre directeurs généraux des secteurs courrier, colis, banque et enseigne, parfois nantis d’une autre fonction.
Ainsi, les directeurs du courrier, des colis et de la banque sont également à la tête de chacune des holdings Sofipost, GeoPost et La Banque Postale, qui chapeautent les filiales dédiées.
Cela leur donne naturellement deux éléments de rémunération : un traitement de haut fonctionnaire et un salaire de dirigeant d’entreprise.
Nous considérons que cette situation n’est pas admissible. C’est la raison pour laquelle nous voterons cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Yannick Botrel, pour explication de vote.
M. Yannick Botrel. À plusieurs reprises, au cours des débats, M. le ministre et M. le rapporteur ont affirmé que La Poste conservera un caractère public, y compris lorsqu’elle sera devenue une société anonyme. Pour notre part, nous avons eu maintes fois l’occasion de dire que nous ne partagions pas ce point de vue.
Se pose alors la question de la gouvernance de La Poste, qui est centrale. Les précédents dont nous avons fait état voilà un instant apparaissent pour le moins fâcheux. C’est pourquoi nous tenons instamment à ce que, compte tenu du caractère public de La Poste, il n’y ait aucune confusion des genres dans son mode de gouvernance.
Quelle sera la crédibilité, tant auprès des personnels que des partenaires de La Poste, d’un président qui exercerait des mandats dans d’autres établissements ? Pour nous, quelles que soient les explications, quelque peu succinctes, de M. le rapporteur, il n’y a pas de doute, le futur président de La Poste devra consacrer tout son temps à son seul mandat, qui ne manquera pas de l’accaparer dans la période qui vient.
Je le répète, puisque le Gouvernement soutient que La Poste conservera son statut public, nous devons aller jusqu’au bout de ce raisonnement et contraindre son président à n’exercer que ce mandat.
M. Roland Courteau. Très bien !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 412.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le Bureau, le Sénat, par assis et levé, adopte l'amendement.)
M. Nicolas About. EDF et Veolia, cela commence à faire beaucoup ! Même si, finalement, cet amendement n’est pas retenu par la commission mixte paritaire, nous aurons au moins adressé un signal !
M. le président. L'amendement n° 243, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :
Compléter cet article par deux alinéas ainsi rédigés :
Après l'article 11 de la même loi, il est inséré un article 11-1 ainsi rédigé :
« Art. 11-1. - Les fonctions définies à l'article 11 ci-dessus sont exclusives de toute autre fonction de direction d'une entreprise publique ou d'un établissement public. »
La parole est à M. Jean-François Voguet.
M. Jean-François Voguet. Monsieur le ministre, vous vous êtes senti obligé de rédiger un article, l’article 6 du projet de loi, disposant que le président du conseil d’administration de La Poste est nommé par décret en Conseil des ministres, dans la mesure où il reste encore des fonctionnaires dans cette société anonyme. Ce ne sera d’ailleurs plus le cas très longtemps puisque vous avez décidé de ne plus en recruter, sauf, donc, le président, dont l’embauche sera la première à caractère public pour l’entreprise depuis 2001.
Pour éviter ces dérives, grâce auxquelles certains grands patrons réussissent parfois à doubler et même à tripler leurs rémunérations, cependant que l’ensemble des salariés voit les leurs stagner, nous proposons d’amender cet article 6 afin d’imposer le respect d’un minimum de règles déontologiques. À l’heure où certains souhaitent moraliser la vie économique et politique, il est temps de poser un acte concret.
C’est la raison pour laquelle nous vous appelons à voter cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement, comme elle l’avait fait sur le précédent.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Martial Bourquin. Il tombe !
M. le président. En effet, l’amendement n° 243 n’a plus d’objet.
Je mets aux voix l'article 6, modifié.
(L'article 6 est adopté.)
Article 7
L’article 29-4 de la même loi est ainsi rédigé :
« Art. 29-4. – À compter du 1er janvier 2010, les corps de fonctionnaires de La Poste sont rattachés à la société anonyme La Poste et placés sous l’autorité de son président qui dispose des pouvoirs de nomination et de gestion à leur égard. Ce dernier peut déléguer ses pouvoirs de nomination et de gestion et en autoriser la subdélégation dans les conditions de forme, de procédure et de délai déterminées par décret en Conseil d’État.
« Le président de La Poste peut instituer des primes et indemnités propres aux fonctionnaires de La Poste, qui peuvent être modulées pour tenir compte de l’évolution des autres éléments de la rémunération des fonctionnaires tels qu’ils résultent de l’article 20 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires.
« Les personnels fonctionnaires de La Poste demeurent soumis aux articles 29 et 30 de la présente loi. »
M. le président. La parole est à Mme Évelyne Didier, sur l'article.
Mme Évelyne Didier. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, la transformation de La Poste, d’un établissement public industriel et commercial en une société anonyme, aurait, nous en sommes persuadés, des conséquences très négatives sur le travail au sens large au sein de l’entreprise et ses répercussions toucheraient le quotidien de ses salariés dans tous ses aspects.
Qu’il s’agisse du maintien des emplois actuels, des futures embauches ou des conditions de travail des salariés, tout nous porte à croire que la casse en matière salariale serait particulièrement lourde, profonde et durable.
Pour nous en convaincre, il n’est qu’à voir ce qui se passe en matière salariale dans d’autres sociétés qui furent également publiques, et qui furent également des EPIC. Le premier exemple qui vient à l’esprit est celui de France Télécom, entreprise avec laquelle il nous paraît inévitable de faire un parallèle.
Pour mémoire, en 1996, France Télécom passe du statut d’EPIC à celui de société anonyme, avec l’État français comme seul actionnaire. En 1997, l’entreprise ouvre son capital et devient une société cotée sur les marchés boursiers. En 2004, l’État français cède une grande partie de ses actions et l’entreprise France Télécom devient une entreprise privée. Il aura suffi de huit ans pour assister à la privatisation de France Télécom. Je vous épargne l’historique d’EDF, puisqu’il est sensiblement le même.
Pour nous, une question nous intéresse ici : les actuels salariés de La Poste verront-ils leur situation s’améliorer du fait de ce passage en société anonyme ? Plus concrètement, que faut-il penser des facultés de délégation et de subdélégation accordées par cet article au président de La Poste et du pouvoir qui lui serait donné d’instituer des primes et indemnités individuelles ?
Qui pourrait sérieusement soutenir que ce passage en société anonyme se traduira par un mieux-être au travail pour les salariés ? Ce n’est pas l’attribution de quelques actions aux personnels de La Poste qui y changera quoi que ce soit.
Une réforme structurelle s’accompagne nécessairement de changements dans les conditions de travail. Pour le personnel de La Poste, ce sera un pas de plus vers le règne sans partage de la sélection, de l’évaluation individuelle, de la pression quotidienne, de la sacro-sainte compétitivité, de la mobilité forcée, du stress au travail, et la liste n’est pas exhaustive.
Mais revenons brièvement sur l’état des lieux actuel de la situation salariale au sein de La Poste.
La Poste représente aujourd’hui, tous métiers confondus, 287 000 salariés, dont 142 000 fonctionnaires et 145 000 salariés de droit privé dits « contractuels », embauchés en CDI ou en CDD. La Poste, c’est aussi plus de 200 filiales en France et à l’étranger. Il existe donc une très grande diversité : diversité des métiers, mais aussi disparité des situations juridiques des salariés.
Cette hétérogénéité s’explique certes par l’histoire de l’entreprise, mais elle est aussi la conséquence de choix délibérés des pouvoirs publics et des dirigeants de La Poste : aller lentement mais sûrement vers des sociétés commerciales éclatées.
Pour réformer, il fallait démanteler. Aujourd’hui, La Poste compte des agents fonctionnaires, mais c’est une espèce en « voie de disparition », si je puis m’exprimer ainsi. Ceux qui, en 1993, ont fait le choix de demeurer fonctionnaires en paient tous les jours le prix, notamment dans leur carrière qui, pour certains, est entièrement bloquée depuis plus de seize ans. Ces agents sont, selon la terminologie officielle, des « reclassés ». Ils ne sont plus tout à fait des fonctionnaires, ils sont plutôt fonctionnaires uniquement attachés à cette entreprise.
Certains salariés ayant choisi de devenir des salariés de droit privé ont été « reclassifiés ». D’autres, enfin, ont été directement engagés comme contractuels de droit privé. Les salariés de ces deux dernières catégories ne sont pas tout à fait des salariés de droit privé, car ils n’en ont pas tous les droits : pas de représentants du personnel, pas de comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail, de CHSCT.
Ce qui est incontestable, c’est que, toutes catégories confondues, aucun d’entre eux ne bénéficie de l’ensemble des garanties dont jouissent soit les agents de droit public, soit les salariés de droit privé. Ce ne sont pas des salariés à part entière, ce sont des salariés entièrement à part.
Le passage de La Poste en société anonyme ne fera qu’aggraver ces inégalités. On ajoutera un étage supplémentaire au sommet de cet escalier juridique. Le pouvoir de délégation et de subdélégation accordé au président de La Poste en est un très bon exemple. N’oublions pas que, sur le papier, La Poste peut encore recruter des fonctionnaires. Aussi, de délégation en délégation, un simple responsable d’unité, salarié de droit privé, va se voir accorder le droit, le pouvoir de nommer des fonctionnaires et d’accorder primes et indemnités. On voit bien qu’il s’agit d’une usine à gaz.
Aujourd’hui, sous le prétexte d’ouvrir son capital et d’assurer sa pérennité, on veut nous faire accepter l’idée d’une société anonyme de droit public. Cependant, le but réellement recherché est la suppression d’emplois : compression de personnels et rentabilité maximale.
Pour toutes ces raisons, nous ne voterons pas l’article 7 du projet de loi sur le changement de statut de La Poste.
M. le président. Sur l’article 7, je suis saisi de trois amendements identiques.
L'amendement n° 67 est présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.
L'amendement n° 299 est présenté par MM. Desessard et Muller et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.
L'amendement n° 496 rectifié est présenté par MM. Teston, Botrel, Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste et apparentés.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Jean-François Voguet, pour présenter l’amendement n° 67.
M. Jean-François Voguet. Par cet amendement, nous nous opposons fermement au changement de statut juridique de La Poste en raison des conséquences qu’il aurait sur ses personnels.
La transformation de La Poste, d’un établissement public industriel et commercial en une société anonyme, aurait, n’en doutons pas, des conséquences très graves sur le travail au sens large au sein de l’entreprise.
Une réforme structurelle s’accompagne nécessairement de changements dans les conditions de travail des salariés. Les dispositions contenues dans l’article 7 se traduiraient inéluctablement par une aggravation de la situation des personnels de La Poste.
Concrètement, le passage en société anonyme, c’est la concentration des pouvoirs entre les mains d’un homme, à savoir son président. Les directeurs généraux sont totalement évincés. Cet homme pourra, comme il le veut, nommer, révoquer, sanctionner, muter, accorder des primes sans aucun contre-pouvoir. C’est la logique de la société commerciale.
Concrètement, l’article 7 vise à conférer au président de La Poste des facultés de délégation et de subdélégation. Comme nous l’avons déjà dit, cela pourrait avoir pour conséquence de permettre à un salarié de droit privé de nommer un fonctionnaire. Une telle pratique est juridiquement contestable et nécessite que soient réunies des conditions précises et cumulatives, comme l’a rappelé l’avis du Conseil d’État du 18 novembre 1993, lorsque cette question s’est posée chez France Télécom.
Or, l’article 7 dispose simplement que cette délégation et la subdélégation seront autorisées « dans des conditions de forme, de procédure et de délai déterminées par décret en Conseil d’État ».
Concrètement, le présent projet de loi ne contient, en lui-même, aucune garantie ni aucune limitation quant à cette faculté de délégation, de fait infinie. Quand on connaît le temps mis par le Gouvernement pour adopter les décrets susvisés, on peut légitimement craindre que cette pratique ne reste longtemps hors cadre juridique.
Ce sont ces craintes et celles que nous avons déjà exposées qui nous conduisent à vous proposer le rejet de l’article 7.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour présenter l'amendement n° 299.
Mme Marie-Christine Blandin. L’article 7 prévoit qu’à compter du 1er janvier 2010 les fonctionnaires de La Poste soient rattachés à la nouvelle société anonyme tout en conservant leur statut de fonctionnaire.
Cette proposition est complètement bancale. Je souhaite donc la suppression d’une disposition qui signifie une programmation de l’extinction des fonctionnaires.
Ce déclin de la fonction publique à La Poste a commencé il y a longtemps. Depuis 2003, on ne recrute plus de fonctionnaires. En 2002, ils représentaient les deux tiers de l’effectif de La Poste. Ils ne sont plus que 56 % aujourd’hui. Dans les filiales, la situation est encore pire : seulement 1,5 % des agents sont des fonctionnaires. C’est donc bien un modèle social que l’on veut liquider.
L’esprit du service public qui anime les fonctionnaires est empreint d’un sentiment d’appartenance, d’une culture forte, de la fierté de relever des défis dans le cadre d’une mission de service public affirmée. Je ne crois pas à la taylorisation des services. Le service public à la française, c’est notre identité, notre fierté nationale !
En France, travailler, c’est avant tout choisir sa place, participer à une histoire : l’histoire de son entreprise, d’un métier, d’une région. La Poste est une aventure humaine et collective ; c’est un fleuron du service public. Les valeurs républicaines doivent être compatibles avec les valeurs du travail dans nos grandes entreprises. Plutôt que de mettre en péril la fonction publique, réfléchissons ensemble à la construction d’entreprises publiques modernes, respectueuses des conditions de travail de leurs salariés, attentives à la qualité, soucieuses des conséquences de leurs activités sur l’environnement, à l’écoute aussi de la parole des usagers.
Ce n’est pas la multiplication des emplois précaires à La Poste qui permettra de construire de telles entreprises. C’est pourquoi nous proposons la suppression de l’article 7.
M. le président. La parole est à M. Claude Jeannerot, pour présenter l'amendement n° 496 rectifié.
M. Claude Jeannerot. Mon intervention sera de la même tonalité et s’inspirera des mêmes analyses que celles des orateurs qui m’ont précédé.
L’article 7 prévoit qu’à compter du 1er janvier 2010 les fonctionnaires de La Poste seront rattachés à la nouvelle société anonyme tout en conservant leur statut de fonctionnaire.
Cet article est cohérent avec votre démarche, monsieur le rapporteur. Si le changement de statut ne semble pas avoir de conséquence directe sur le statut des fonctionnaires, nous savons que ce projet de loi accélérera les risques de pertes d’emploi.
Depuis 2003, je le rappelle, La Poste a déjà perdu plus de 20 000 emplois. La part des fonctionnaires décroît de manière continue et régulière avec le non-remplacement d’un départ sur deux, en moyenne, dans les autres corps.
En outre, les syndicats avancent la suppression d’environ 6 000 emplois par an au sein du groupe. Il suffit de regarder ce qui se passe en Europe, à l’extérieur de nos frontières, pour constater que le mouvement de libéralisation du marché postal a eu partout de lourdes conséquences en termes d’emploi. En Allemagne, entre 1999 et 2006, la Deutsche Post a supprimé 21 000 emplois à temps plein et 12 000 emplois à temps partiel, aux Pays-Bas, ce sont 16 000 équivalents temps plein qui ont disparu à la suite de la libéralisation du marché postal.
Ce mouvement s’accompagne par ailleurs pour les personnels, fonctionnaires ou non, d’une dégradation importante des conditions de travail, les salariés des opérateurs historiques privatisés ou des opérateurs nouveaux ne bénéficiant plus d’une protection suffisante. C’est selon cette logique, par exemple, que 27 000 facteurs et factrices hollandais sont employés sur un contrat dit de service professionnel. Ce ne sont pas des salariés. Ce sont, en quelque sorte, des prestataires de service qui sont payés uniquement en fonction du nombre d’articles délivrés.
C’est selon cette même logique que 58 % des postiers allemands exercent ce qu’on appelle des mini-emplois, dont le salaire n’excède pas, écoutez-moi bien, 500 euros par mois !
M. Roland Courteau. C’est un chiffre à méditer !
M. Claude Jeannerot. Compte tenu de ces éléments, vous le comprendrez, il est cohérent avec la position que nous défendons depuis le début de cette discussion de demander la suppression de l’article 7.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Chacun de nous est cohérent avec les principes qu’il défend.
Il est bien écrit dans le rapport que les fonctionnaires « conservent donc leurs garanties d’emploi et de retraite et leur statut n’est pas remis en cause par la transformation de La Poste en société anonyme ».
La Poste étant transformée en société anonyme, il est nécessaire de prévoir le maintien du statut des fonctionnaires. C’est l’objet de l’article 7 et c’est pourquoi la commission ne peut qu’être défavorable à sa suppression.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Estrosi, ministre. L’article 7 précise que les fonctionnaires restent fonctionnaires. Je comprends difficilement que l’on veuille le supprimer.
Vous avez souligné que La Poste avait perdu des emplois. C’est bien parce que nous ne souhaitons pas que La Poste en perde encore que nous voulons à la fois moderniser son statut et diversifier ses activités.
Vous savez pertinemment que, si nous ne faisons rien, le 1er janvier 2011, La Poste sera confrontée à l’ouverture à la concurrence. L’activité postale ne cessera de perdre des parts de marché, nous entraînant vers un processus catastrophique de disparition d’emplois.
Comme je l’ai précisé hier à M. Desessard, le seul fait de donner aujourd’hui à La Poste les moyens de se moderniser et de diversifier ses activités, loin de lui faire perdre des emplois, lui permettra au contraire d’en créer de nouveaux. (M. Roland Courteau s’exclame.)
En prenant position sur cet article, vous avez le choix entre une grande entreprise d’avenir créant des emplois ou un établissement menacé à cause de l’ouverture à la concurrence.
M. Jean-Paul Emorine, président de la commission de l'économie. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Martial Bourquin, pour explication de vote.
M. Martial Bourquin. Nous venons d’avoir un débat solide sur l’avenir du personnel de La Poste. Je ne pense pas que le changement de statut de La Poste s’imposait. Nos opinions divergent sur ce point.
M. Jean-Paul Emorine, président de la commission de l’économie. C’est sûr !
M. Martial Bourquin. Ce changement a été voté, et nous le regrettons, car il ne permettra pas, d’un coup de baguette magique, de faire face à la nouvelle situation concurrentielle.
Des questions ont été posées à maintes reprises par Michel Teston, plusieurs sénateurs de gauche et nos collègues écologistes. Il faut maintenant s’interroger sur d’autres points, notamment le financement du service public. Inévitablement, EPIC ou SA, les choses ne se régleront pas toutes seules et nous aboutirons à une accélération du processus.
La situation de l’emploi de La Poste se dégrade très fortement depuis deux ans, car on a tendance à rogner sur les coûts et à précariser le personnel pour faire face à la concurrence, comme l’ont fait toutes les postes européennes.
M. Roland Courteau. Évidemment !
M. Martial Bourquin. Avec Michel Teston, je propose que l’État prenne toute sa part dans le financement du service public et que La Poste se serve du maillage territorial pour affronter la concurrence, au lieu de le percevoir comme un handicap.
M. Roland Courteau. Très bien !
M. Martial Bourquin. Nous ne sommes pas convaincus par votre projet. Dans quelques mois, nous ferons le point et comprendrons qu’une orientation néolibérale peut dégrader très fortement la situation de cette grande entreprise publique, chère à tous les Français. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote.
Mme Marie-Christine Blandin. Devant les dégâts d’une mondialisation sans règles autres que la concurrence, nous entendons chaque jour sur le terrain la détresse des licenciés, l’angoisse de ceux qui ont peur de perdre leur emploi, l’impossibilité de vivre normalement, de contracter un emprunt quand on n’a pas la sécurité de l’emploi, la crainte de ne pas avoir un niveau de vie décent, une fois la retraite arrivée.
Les colloques, les séminaires, les livres et les articles sont nombreux sur le sujet. Leurs auteurs ne manquent pas d’imagination pour jeter les pistes de futurs statuts où l’emploi serait associé à la sécurité quitte à ce que des rémunérations modestes soient acceptées et où, pour bénéficier de perspectives plus durables, il y aurait un droit à la formation et une possibilité de recours en cas d’abus de la hiérarchie. Ce statut existe, c’est celui des fonctionnaires !
Mon amendement ne vise pas à laisser de côté les fonctionnaires et à les écarter des futures missions de la société anonyme. Mais le choix que vous leur laissez entre une coquille en extinction sans moyens et un chaudron financé, mais prometteur de harcèlement et de perte de savoirs, est inacceptable.
Vous reprenez le schéma de la danse insupportable qu’a vécu France Télécom, celui où les impératifs de rentabilité s’imposent à un PDG soucieux de sa carrière, qui exige de ses managers des résultats plus en parts de marché qu’en qualité de service, et de ses salariés des cadences, non évaluées par des méthodes scientifiques et dont la seule variable d’ajustement est le point de rupture. Les employés « pètent les plombs ». Voilà ce qui va se produire à nouveau.
Notre amendement a pour objet de dénoncer le futur statut de La Poste et votre responsabilité en la matière Mais il est inutile de le soumettre au vote et je le retire. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – Mme Nicole Borvo Cohen-Seat applaudit également.)
M. le président. L’amendement n° 299 est retiré.
La parole est à M. Claude Jeannerot, pour explication de vote.
M. Claude Jeannerot. Parce que le changement de statut de La Poste semble désormais inéluctable et parce que nous avons, vous l’avez compris, le plus grand respect pour les fonctionnaires de La Poste, que nous ne voulons pas placer « hors sol » au 1er janvier prochain, nous retirons cet amendement.
J’attire votre attention, monsieur le ministre, sur l’analyse que nous avons présentée tout à l’heure. Nous serons attentifs, dans les mois et les années qui viennent, à l’évolution quantitative, mais aussi qualitative, des fonctionnaires employés par La Poste. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. Christian Estrosi, ministre. Monsieur le sénateur, j’apprécie la décision que vous avez prise au nom du groupe socialiste.
Certains d’entre vous ont suivi les débats depuis le début de la semaine,…
M. Jean Desessard. Et avant, en commission !
M. Christian Estrosi, ministre. … avec une grande assiduité, et je respecte les positions qu’ils ont prises avec conviction et vérité.
Il y a peut-être une ligne de fracture, mais personne ne pourra se voir reprocher ici de ne pas se battre, chacun selon ses idées, pour la grande entreprise qu’est La Poste. C’est la responsabilité de l’État et du Parlement de préserver la qualité et le nombre des emplois.
Nous en parlions récemment avec Martial Bourquin, depuis 1985, les effectifs de La Poste ont toujours été d’environ 300 000 salariés, avec des hauts et des bas : ce chiffre est descendu à 285 000, puis remonté à 310 000 lorsque des emplois ont été créés. Malgré toutes les difficultés qu’a connues La Poste, notamment à cause de la concurrence à laquelle elle a commencé à être confrontée, ce niveau a très peu varié, car elle a essayé de se remettre en cause.
Nous avons tous des reproches à faire à La Poste – vous vous en êtes fait l’écho sur ces travées – sur la qualité du service public, qui est excellente à certains endroits et moins satisfaisante à d’autres, et sur sa présence territoriale, variable en fonction de données géographiques et démographiques.
En tout cas, si La Poste a un endettement de 6 milliards d’euros, c’est qu’elle a réalisé des investissements considérables pour être une grande entreprise moderne. À cet égard, je citerai en exemple le centre de tri de Wissous pour l’ensemble de l’Île-de-France ou le centre logistique d’envoi de colis de Moissy, en Seine-et-Marne. Elle est aujourd’hui en difficulté et n’a plus de marges pour investir, car elle a consenti des efforts importants pour « limiter la casse » en matière de pertes d’emplois.
Je comprends que vous réagissiez ainsi sur cet amendement et que vous ne soyez pas d’accord sur le changement de statut de La Poste. Puisque maintenant l’article 1er est voté et que la modification figure dans la loi, accentuons nos efforts afin de lui donner ses chances ainsi que les moyens de préserver les emplois existants et d’en créer de nouveaux, en diversifiant ses activités.
Je tiens à vous dire, au nom du Gouvernement, que j’apprécie cette attitude et qu’elle nous engage les uns et les autres pour accompagner La Poste dans cette direction.
M. le président. La parole est à Mme Évelyne Didier, pour explication de vote.
Mme Évelyne Didier. Monsieur le président, comme nos collègues, nous retirons l’amendement n° 67, non pas pour accompagner le grand mouvement indiqué par M. le ministre, mais tout simplement parce qu’il est hors de question de porter préjudice au personnel.
M. le président. L’amendement n°67 est retiré.
Je suis saisi de seize amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 234, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
L'article 29-4 de la même loi est ainsi rédigé :
« Art. 29-4. - Le montant des primes et indemnités proposées aux fonctionnaires de La Poste est fixé par décision du Conseil d'administration. »
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Cet amendement revient sur la question des conditions de rémunération des agents de la Poste, en tout cas de ceux qui sont sous le régime du droit public.
Nous sommes donc en présence, avec cet article 7, d’un objet hybride, d’une étrangeté juridique, qui consiste à confier à un président d’entreprise la responsabilité de fixer le niveau des primes des agents fonctionnaires placés sous sa responsabilité.
Que se passera-t-il le jour où la Poste aura été privatisée en tout ou partie, et où le président nommé par le conseil d’administration devra décider du régime indemnitaire des fonctionnaires restant sous ses ordres ?
Ces primes, éléments variables de rémunération, sont donc, dans l’article 7, strictement attribuées sous décision unilatérale du président.
Cet article prévoit de procéder à la généralisation de la rémunération au mérite dans une entreprise publique.
Selon nous, il s’agit d’un véritable démantèlement du statut des agents de La Poste, où l’on va moduler, à raison des augmentations générales, le régime indemnitaire des agents.
En fait, si les négociations annuelles dans la fonction publique se traduisent par des hausses de traitement d’un niveau relativement élevé, le président de La Poste pourra, de son propre chef et sans en référer à quiconque, décider de diminuer le régime indemnitaire de ses agents à concurrence de la masse salariale supplémentaire déjà consommée par la hausse générale !
A contrario, en l’absence d’une augmentation générale, il sera autorisé à attribuer, dans la limite d’une enveloppe quasiment fixée par avance, des primes et indemnités diverses d’un montant plus important, ce qui lui permettra éventuellement de récompenser les bons éléments, ceux qui font le plus d’efforts au regard des exigences de productivité imposées par le management intérieur.
Si tant est qu’il existe un régime indemnitaire, autant en donner la responsabilité au conseil d’administration, où toutes les parties en présence sont représentées.
Une telle démarche est la porte ouverte à tous les abus, toutes les pressions, toute perversion des valeurs et du rôle des services publics.
Elle est un facteur d’opposition entre les agents, induisant une compétition exténuante entre les fonctionnaires eux-mêmes.
Qui peut penser, l’espace d’un instant, qu’il s’agisse là d’un management responsable et vertueux ?
Nous vous proposons donc de choisir notre rédaction.
M. le président. L'amendement n° 229, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Jean-François Voguet.
M. Jean-François Voguet. L’article 7 du projet de loi tire les conséquences du passage au statut de société anonyme. Il dispose que, « à compter du 1er janvier 2010, les corps de fonctionnaires de La Poste sont rattachés à la société anonyme La Poste » et que le président de La Poste bénéficie de pouvoirs de gestion concernant ces personnels. Il peut néanmoins « déléguer ses pouvoirs de nomination et de gestion et en autoriser la subdélégation ».
Nous estimons pour notre part que ces dispositions sont pernicieuses. Dans son rapport, notre collègue M. Hérisson estime que « la désignation du président de La Poste par décret lui permet d'exercer ce pouvoir à l'égard des fonctionnaires ». Nous considérons quant à nous qu’une telle interprétation est limitée et frise l’inconstitutionnalité. Nous ne comprenons pas que le président d’une société anonyme puisse disposer d’un pouvoir non seulement de nomination, mais surtout de sanction à l’encontre de fonctionnaires d’État. Cela nous semble incompatible avec les caractéristiques de la fonction publique, a fortiori si ce pouvoir de nomination est subdélégable sans qu’aucune condition soit posée.
Une telle situation est source de contentieux. Ainsi, on peut citer le cas dont a eu récemment à connaître le tribunal administratif de Strasbourg : le responsable du centre financier de Strasbourg s’est vu contester son autorité hiérarchique par une fonctionnaire au motif qu’elle était salariée de La Banque Postale et n’avait plus de lien de subordination avec lui, agent des services financiers de La Poste.
Pour ces raisons, mes chers collègues, nous vous demandons de supprimer cet alinéa.
M. le président. L'amendement n° 230, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Jean-François Voguet.
M. Jean-François Voguet. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 558, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 2, seconde phrase
Supprimer cette phrase.
La parole est à Mme Évelyne Didier.
Mme Évelyne Didier. La seconde phrase du deuxième alinéa de cet article 7 prévoit que le président de La Poste dispose de la possibilité de déléguer une partie de son pouvoir hiérarchique sur les fonctionnaires, mais également, et cela nous inquiète particulièrement, de le subdéléguer.
Il s’agit d’instaurer dans la société anonyme La Poste un mécanisme de responsabilité en cascade, mécanisme courant dans les entreprises privées. Nous nous interrogeons toutefois sur l’opportunité de cette subdélégation dès lors qu’il s’agit de confier des pouvoirs hiérarchiques sur des fonctionnaires.
Cette subdélégation risque de ne pas être sans conséquences sur les salariés. Si la jurisprudence reconnaît la possibilité de subdéléguer, elle précise également que le bénéficiaire de cette subdélégation doit disposer des moyens techniques et financiers lui permettant d’exercer pleinement cette compétence.
Pour notre part, nous y sommes opposés, car cela pèsera sur les fonctionnaires de La Poste. Là encore, il suffit, avec le recul, d’observer les tristes événements survenus à France Télécom pour mesurer à quel point cette subdélégation, parce qu’elle aura pour effet d’imposer aux fonctionnaires des règles de rentabilité incompatibles avec les missions qui sont les leurs et qui font leur fierté, parce qu’elle participera à l’émiettement de l’autorité hiérarchique, pèsera sur les salariés.
En réalité, il s’agit là d’un outil supplémentaire de privatisation, outil que nous ne pouvons accepter. C’est pourquoi nous en proposons la suppression.
M. le président. L'amendement n° 497 rectifié, présenté par MM. Teston, Botrel, Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 2, seconde phrase
Compléter ainsi cette phrase :
Toutefois, le pouvoir de prononcer les sanctions disciplinaires du quatrième groupe, prévues à l'article 66 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État, appartient au ministre chargé des postes et communications électroniques qui l'exerce sur proposition du président de La Poste et après avis de la commission administrative paritaire siégeant au conseil de discipline.
La parole est à M. Roland Courteau.
M. Roland Courteau. En présentant l’amendement no 496 rectifié, mon collègue rappelait, à juste titre, notre refus du changement de statut de La Poste et des conséquences qui en découleraient en matière de gestion du personnel. Dans la même perspective, je vous propose d’examiner avec attention cet amendement n°497 rectifié, qui vise à compléter l’alinéa 2 de l’article 7.
Dans son rapport, M. Hérisson nous assure que « cet article maintient le statut des fonctionnaires de La Poste ». Aussi, je vous invite à confirmer cet engagement en apportant les garanties nécessaires en matière de procédures et de sanctions disciplinaires.
Je rappelle qu’en 2003, lors de l’examen du projet de loi relatif aux obligations de service public des télécommunications et à France Télécom, il avait été proposé et retenu à l’article 4 la disposition suivante : « Toutefois, le pouvoir de prononcer les sanctions disciplinaires du quatrième groupe, prévues à l'article 66 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précitée, appartient au ministre chargé des télécommunications qui l'exerce sur proposition du président de France Télécom et après avis de la commission administrative paritaire siégeant en conseil de discipline. »
Il s’agissait, à l’époque, de ne pas déroger aux règles statutaires de la fonction publique et de maintenir dans le giron de l’autorité administrative naturelle qu’est le ministre les pouvoirs de « mise à la retraite d’office » et de « révocation », sanctions qui appartiennent à ce quatrième groupe précédemment mentionné.
Avec les articles 19 et 29 de la loi Le Pors du 13 juillet 1983, l’article 66 de la loi du 11 janvier 1984 est protecteur des droits du fonctionnaire et de son administration en la matière. C’est pourquoi, constatant l’absence de toute référence à cet article 66 dans le projet de loi qui est aujourd’hui soumis à notre examen, nous proposons de reprendre la mention relative à ce « pouvoir de prononcer les sanctions disciplinaires du quatrième groupe ». Il appartiendrait, j’y insiste, au « ministre chargé des postes et communications électroniques », qui l’exercerait « sur proposition du président de La Poste et après avis de la commission administrative paritaire siégeant en conseil de discipline ».
Aussi, afin d’assurer le plein maintien du statut des fonctionnaires, pour reprendre les termes de M. le rapporteur, je vous invite, mes chers collègues, à voter cet amendement, qui complète utilement, j’en suis convaincu, le deuxième alinéa de l’article 7 du projet de loi.
M. le président. L'amendement n° 244, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
« Cette subdélégation ne peut porter sur les sanctions disciplinaires prises à l'encontre de ces agents. »
La parole est à M. Jean-François Voguet.
M. Jean-François Voguet. Cet amendement porte sur le pouvoir de subdélégation créé par cet article au profit du président de La Poste.
Ainsi, le président pourra déléguer des pouvoirs de nomination et de gestion du personnel à un agent qui pourra lui-même les déléguer à son tour !
Ainsi, un pouvoir de nomination des fonctionnaires de La Poste et de sanction à leur encontre peut être confié à des agents qui seraient eux-mêmes contractuels et n’auraient donc pas reçu directement de délégation de ce pouvoir réglementaire et de sanction !
Nous avons déjà expliqué que nous trouvions ces dispositions contestables au regard des spécificités de la fonction publique. Nous les trouvons également contestables d’un autre point de vue. En effet, si une délégation est instituée, les moyens de son exercice ne sont pas mentionnés et sont, je présume, renvoyés au décret en Conseil d’État. Il s’agit là, à notre avis, d’une lacune importante, au demeurant déjà sanctionnée par les tribunaux.
Nous souhaitons donc, à travers cet amendement, que la subdélégation ne puisse porter sur les sanctions disciplinaires prises à l’encontre des agents.
M. le président. L'amendement n° 231, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Cet amendement, qui s’inscrit dans la continuité des précédents, vise à la suppression de l’alinéa 3 de cet article.
Nous sommes opposés au principe, inscrit dans la loi du 2 février 2007 de modernisation de la fonction publique, de la modulation des primes et indemnités.
Cette « modernisation » de la fonction publique se place dans une logique de poursuite du démantèlement du statut et des services publics. Du point de vue gouvernemental, moderniser la fonction publique signifie, sous couvert de la rendre plus efficace, appliquer purement et simplement les principes de bonne gestion du secteur privé en gommant progressivement la spécificité et la qualité des services publics. Nous en avons une illustration avec la mise en œuvre de la loi organique relative aux lois de finances, la LOLF, l’introduction des primes à la performance, ou encore les diminutions drastiques du nombre de postes depuis 2003. Modernisation rime ici avec précarité des agents, pour lesquels une véritable revalorisation du point d’indice se fait toujours attendre.
Comment ne pas faire le parallèle entre l'introduction de la prime à la performance dans la fonction publique et la suppression de la notation ? Outre le fait que, dans les deux cas, les relations de travail risquent fort de se dégrader, ce sont l’arbitraire et les pratiques discrétionnaires qui, de plus en plus, vont devenir la règle dans l’avancement de carrière des fonctionnaires.
Le Gouvernement, comme il s’y emploie depuis cinq ans dans le privé, favorise l’individualisation des relations entre les agents et leur autorité hiérarchique. Le statut n’est plus, dans ce cas précis, la norme de référence. Ne plus avoir une telle référence est inquiétant lorsqu’il s’agit de l’organisation administrative de l’État et des services publics.
Pour toutes ces raisons, nous sommes opposés à une telle évolution, qui vise à démanteler le statut des salariés de La Poste en même temps que l’entreprise publique.
M. le président. L'amendement n° 559, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Le montant des primes et indemnités propres aux fonctionnaires de La Poste ne peut être modulé que par décision générale du conseil d'administration de La Poste.
La parole est à Mme Mireille Schurch.
Mme Mireille Schurch. Comme vient de l’exposer ma collègue, nous sommes hostiles aux notions de « prime » ou d’« intéressement », car nous savons combien ces outils sont des dispositifs qui permettent aux employeurs, fussent-ils publics, de peser sur les salaires et d’imposer à ceux qui les perçoivent une forme d’individualisation des relations de travail.
Les récents drames survenus à France Télécom, les témoignages de nombreux salariés sur les pressions dont ils s’estiment victimes, le sentiment d’isolement dans l’accomplissement du travail, dont la rémunération au sens large est l’aboutissement, doivent nous inviter à repenser la manière dont les fonctionnaires de La Poste doivent être rémunérés.
En raison des irrecevabilités fondées sur l’article 40 de la Constitution et sur la délimitation du domaine réglementaire, nous ne pouvons revenir sur l’instauration même de ces primes, que nous préférerions voir intégrées aux salaires. Pour les postiers, le salaire est en moyenne de 1 400 euros nets : nous sommes loin de l’image d’Épinal, véhiculée par certains, de fonctionnaires qui seraient des rentiers, des nantis ou des privilégiés ! C’est pourquoi nous proposons, à travers cet amendement n° 559, de revenir à la rédaction actuelle de l’article 29-4 de la loi du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et des télécommunications, qui prévoit que « le montant des primes et indemnités propres aux fonctionnaires de La Poste » ne peut être modulé que « par décision générale du président du conseil d’administration de La Poste ».
En d’autres termes, nous proposons de réintégrer une dimension collective dans une mode d’attribution des primes que vous entendez individualiser. Nous proposons de supprimer une disposition qui pèse sur les salariés, fait naître entre eux le doute, la suspicion et la concurrence, pour la remplacer par une mesure de transparence, plus propice à la solidarité et au développement d’une dynamique de groupe.
M. Roland Courteau. Très bien !
Mme Mireille Schurch. Vous l’aurez compris, monsieur le ministre, notre amendement s’inscrit à contre-courant de votre logique d’individualisation des salariés : les récents événements ont témoigné les conséquences dramatiques que ce renvoi individuel au travail pouvait avoir.
M. le président. L'amendement n° 498, présenté par MM. Teston, Botrel, Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Rédiger ainsi le début de cet alinéa :
Le montant des primes et indemnités propres aux fonctionnaires de La Poste peut être modulé par décision générale du président du conseil d'administration de La Poste pour tenir compte...
La parole est à M. Serge Lagauche.
M. Serge Lagauche. Il est précisé à l’alinéa 3 de l’article 7 : « Le président de La Poste peut instituer des primes et indemnités propres aux fonctionnaires de La Poste, qui peuvent être modulées pour tenir compte de l’évolution des autres éléments de la rémunération des fonctionnaires tels qu’ils résultent de l’article 20 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires. »
Selon le rapporteur, cet alinéa reprendrait une disposition déjà présente dans l’article 29-4 de la loi du 2 juillet 1990. Certes ! Mais à une nuance près, et qui n’est pas mince à nos yeux !
Voici la rédaction actuelle de l’article 29-4 de la loi de 1990 : « Le montant des primes et indemnités propres aux fonctionnaires de La Poste peut être modulé, par décision générale du président du conseil d'administration de La Poste, pour tenir compte de l'évolution des autres éléments de la rémunération des fonctionnaires tels qu'ils résultent de l'article 20 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires. » Il n’est pas précisé qu’il revient au président de La Poste d’instituer des primes ! Il est simplement indiqué que le montant des primes et indemnités – sous-entendu : celles qui existent aujourd’hui, par exemple – propres aux fonctionnaires peut être modulé.
Le système des primes tel qu’il existe aujourd’hui n’est pas soumis au pouvoir discrétionnaire du président de La Poste. Le président de la nouvelle société anonyme aurait-il l’intention de bouleverser ce système, et au bénéfice de qui ?
Pour qu’il n’y ait aucune ambigüité, autant revenir à la rédaction du texte de 1990 !
M. le président. L'amendement n° 233, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Après les mots :
peut instituer
insérer les mots :
après avis conforme du conseil d'administration
La parole est à Mme Évelyne Didier.
Mme Évelyne Didier. L’alinéa 3 de l’article 7 du projet de loi reprend l’article 29-4 de la loi de 1990.
En réalité, il est un peu différent puisque désormais le président de La Poste peut instituer des primes alors que la législation de 1990 se contentait d’énoncer : « Le montant des primes et indemnités propres aux fonctionnaires de La Poste peut être modulé, par décision générale du président du conseil d’administration de La Poste, pour tenir compte de l’évolution des autres éléments de la rémunération des fonctionnaires tels qu’ils résultent de l’article 20 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ».
On ajoute, dans le projet de loi, une précision importante qui renforce les pouvoirs du président de La Poste. Ce dernier peut non seulement moduler les primes mais également les instituer. Et tout cela sans aucune transparence…
De plus, le principe d’une telle modulation, proposé par ce gouvernement en 2007 et voté par la majorité parlementaire, constitue une véritable privatisation des statuts des agents fonctionnaires, qui ne respecte pas l’esprit de la loi de 1990.
Nous pensons que les évaluations salariales ne peuvent faire l’objet d’une décision isolée du président du conseil d’administration.
C’est pourquoi par notre amendement, qui est une position de repli, nous souhaitons que ce pouvoir discrétionnaire d’instituer des primes soit mieux encadré afin de garantir au mieux les droits des personnels et qu’il n’y ait pas de conflit d’intérêt.
Pour ce faire, nous demandons que la décision du président de La Poste soit rendue après avis conforme du conseil d’administration.
En effet, la collégialité reste la meilleure solution pour garantir la neutralité dans la prise de telles décisions touchant des éléments importants de la carrière des personnels visés.
Au nom de la démocratie sociale, nous pensons qu’il est essentiel que de telles décisions soient encadrées et rendues plus transparentes.
Pour toutes ces raisons, nous vous demandons d’adopter notre amendement.
M. le président. L'amendement n° 232, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Évelyne Didier.
Mme Évelyne Didier. Il est défendu.
M. le président. L'amendement n° 228, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« À compter de la promulgation de la présente loi, un plan de résorption de l'emploi précaire est mis en place dans le groupe La Poste. »
La parole est à M. Jean-François Voguet.
M. Jean-François Voguet. Nous souhaitons que soit instauré un plan de résorption de l’emploi précaire à La Poste.
En effet, la déréglementation, la concurrence forte dans ce secteur professionnel et les différentes privatisations des activités postales et de télécommunications ont conduit à une gestion de type privé de l’emploi public tandis que les deux opérateurs historiques La Poste et France Télécom travaillaient à l’évolution de la structuration interne de l’emploi par l’embauche de contractuels de droit privé et l’arrêt du recrutement de fonctionnaires.
Je vous rappelle que la Poste n’embauche déjà plus de fonctionnaires sous statut depuis 2001.
C’est dans ce cadre que fut créée, en 1991, la convention commune La Poste-France Télécom, les luttes ayant cependant permis qu’une partie des droits des contractuels se rapprochent de ceux des fonctionnaires.
En 1993, la mise en œuvre de nouvelles règles de gestion dans ces deux entreprises s’est traduite par la réduction des applications réglementaires du statut de la fonction publique et l’alignement des fonctionnaires et des contractuels sur les mêmes règles de gestion.
L’objectif central de cette réorganisation entreprise depuis de nombreuses années est de mettre en concurrence les salariés et, à l’évidence, de tirer les droits et garanties vers le bas.
C’est dans ce contexte qu’a été créée la convention collective nationale des télécommunications, sous l’impulsion de la direction de France Télécom en 2000 avec pour conséquences : une baisse des droits des salariés de France Télécom, une avancée pour ceux des entreprises des télécommunications sans convention collective et donc soumises jusqu’alors aux seules règles du code du travail, enfin, une convention « commune » réduite aux seuls salariés de La Poste
La même volonté d’amoindrir encore les droits et garanties collectifs a conduit La Poste à travailler à une convention collective des activités postales, couvrant tout ou partie des salariés de droit privé des activités postales, ce qui n’est pas sans créer des contradictions, voire des oppositions entre les opérateurs postaux.
La déréglementation s’est également traduite par une baisse importante de l’emploi « stable » avec un développement de l’emploi précaire – CDI à temps partiel, CDD, apprentis, contrats de qualification, intérimaires, sous-traitants.
Parce que cette précarité nuit, à l’évidence, à la qualité du service rendu, nous souhaitons que La Poste s’engage dans un plan de résorption de l’emploi précaire.
M. le président. L'amendement n° 245, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
I. - Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
Le quatrième alinéa de l'article 29 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant disposition statutaire relative à la fonction publique de l'État est abrogé.
II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - La perte de recettes résultant pour l'État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jean-François Voguet.
M. Jean-François Voguet. Il est défendu.
M. le président. L'amendement n° 562, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Compléter cet article par deux alinéas ainsi rédigés :
« Les agents contractuels et salariés de droit privé de la Poste demeurent soumis aux dispositions du décret n° 70-1277 du 23 décembre 1970 portant création d'un régime de retraite complémentaire des ressources sociales en faveur des agents non titulaires de l'État et des collectivités publiques.
« Les conditions d'application de l'alinéa ci-dessus sont précisées par décret en Conseil d'État. »
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Nous souhaitons compléter l’article 7 en précisant que les agents contractuels et les salariés de droit privé de La Poste restent affiliés au régime de retraite complémentaire institué par le décret du 23 décembre 1970, à savoir l’Institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l'État et des collectivités publiques, l’IRCANTEC.
L’IRCANTEC connaît aujourd’hui des difficultés financières qui ne sont pas sans conséquences pour les salariés concernés qui craignent, à raison, une diminution notable de leur pension.
Le 30 septembre dernier, le conseil d’administration de l’IRCANTEC adoptait une motion mettant en garde le Gouvernement sur les conséquences négatives pour l’IRCANTEC de la modification des statuts de La Poste.
Cette motion est claire, permettez-moi de la rappeler pour que les sénateurs de la majorité prennent pleinement conscience de la décision qu’ils auront à prendre sur cet amendement : « Le conseil d’administration de l’IRCANTEC tient à rappeler que la réforme paramétrique de 2008 vise à garantir la pérennité financière du régime, les choix qui seront effectués dans le cadre des évolutions affectant certaines structures publiques en matière de retraite complémentaire ne doivent pas conduire à une remise en cause des équilibres fondamentaux du régime. »
En clair et pour faire simple, le non-assujettissement des personnels contractuels et non fonctionnaires de La Poste à l’IRCANTEC, c’est-à-dire la non-cotisation de La Poste à ce régime de retraite, alors qu’il en est le premier contributeur, bouleversera profondément l’IRCANTEC et risquera de provoquer pour l’ensemble des salariés bénéficiaires de ce régime complémentaire une importante diminution de leurs pensions.
Cette situation est particulièrement inadmissible dans le contexte de la crise actuelle. Depuis vingt ans, les retraites n’ont cessé de fondre, plongeant les retraités de notre pays dans une véritable misère économique qui n’est pas acceptable dans un pays comme le nôtre où les normes législatives les plus importantes prétendent encore garantir aux travailleurs un niveau de retraite décent.
M. le président. L'amendement n° 593, présenté par MM. Fortassin, Tropeano, Collin et Charasse, Mmes Escoffier et Laborde et MM. Mézard et Milhau, est ainsi libellé :
Compléter cet article par deux alinéas ainsi rédigés :
« La Poste assurera à ses agents, fonctionnaires ou contractuels un accompagnement dans la transformation de l'entreprise publique vers un système intégralement concurrentiel.
« Les modalités de cet accompagnement, formation, conférences, suivi personnalisé seront définies par un décret en Conseil d'État. »
La parole est à Mme Françoise Laborde.
Mme Françoise Laborde. Le sort du personnel doit être au cœur des préoccupations.
La Poste a, en effet, pendant longtemps incarné l’État. Ses salariés, en majorité issus des classes populaires et moyennes, ont pu symboliser une certaine forme d’ascension sociale, notamment grâce aux différents dispositifs de formation interne garantie par la sécurité de l’emploi dont ils ont pu bénéficier.
Fort de cet esprit et du sentiment d’appartenance à un corps public, le personnel a accompagné La Poste, « son entreprise », dans toutes ses transformations.
Dès lors, la dimension humaine est plus que jamais essentielle dans cette transformation.
Dans quatre à cinq ans, la baisse d’activité du courrier se situera entre 30 % et 50 %. C’est un choc rapide et violent sur le cœur de métier historique de La Poste !
Les membres du groupe du RDSE souhaitent participer au mieux-être de ces agents pour faire face aux deux chocs majeurs que sont la disparition totale du monopole et l’essor du courrier électronique. La transformation de l’entreprise publique et l’ouverture totale au marché doivent être accompagnées.
La Poste devra assurer à ses agents, fonctionnaires ou contractuels, un accompagnement vers la transformation de l’entreprise publique vers un système intégralement concurrentiel.
Les modalités de cet accompagnement – formations, conférences, suivis personnalisés – seront définies par un décret en Conseil d’État.
M. le président. L'amendement n° 621, présenté par MM. Fortassin, Tropeano, Charasse et Collin, Mmes Escoffier et Laborde et MM. Mézard et Milhau, est ainsi libellé :
I. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - Après le premier alinéa de l'article 30 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 précitée, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« La Poste peut instaurer un régime collectif obligatoire de protection sociale complémentaire au bénéfice de ses personnels visés aux articles 29 et 44 de la présente loi, selon les dispositions de l'article L. 911-1 du code de la sécurité sociale et dans des conditions précisées par décret. Les contributions de La Poste destinées au financement des prestations prévues par ce régime sont exclues de l'assiette des cotisations et contributions sociales à la charge de l'employeur en ce qui concerne les personnels visés aux articles 29 et 44 de la présente loi dans les conditions prévues par l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale. Pour le calcul du montant net du revenu imposable des personnels visés aux articles 29 et 44 de la présente loi, les cotisations versées en application du présent alinéa sont assimilées aux cotisations et primes visées au 1° quater de l'article 83 du code général des impôts. »
II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :
... - La perte de recettes résultant pour l'État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
... - La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Françoise Laborde.
Mme Françoise Laborde. C’est au nom du principe d’équité que le RDSE a présenté cet amendement, équité entre les catégories de personnels de La Poste, les contractuels et les fonctionnaires.
Demain réunis dans la même société anonyme, ils doivent pouvoir bénéficier des mêmes dispositifs en matière d’action sociale, et plus particulièrement ici en matière de protection sociale complémentaire.
Or que se passe-t-il aujourd’hui ?
On distingue deux dispositifs.
Le premier est applicable aux fonctionnaires en application du statut de la fonction publique du 13 juillet 1983. Ceux-ci, pour leur complémentaire santé, doivent adhérer à titre individuel à une mutuelle dont le coût est important, même si la fonction publique met en place progressivement un plan d’aide aux mutuelles pour limiter le coût de cette assurance pour les fonctionnaires postiers.
Le second est applicable aux salariés qui bénéficient, depuis 2006, du régime de droit commun du code de la sécurité sociale, régime plus protecteur et moins couteux.
C’est donc dans un souci d’équité qu’il est proposé de faire bénéficier les fonctionnaires du même régime que les salariés.
On pourrait m’opposer que ce nouveau dispositif introduirait une distorsion entre les actifs et les retraités, mais il n’en est rien puisque l’amendement prévoit que les conditions de la mise en œuvre de ce nouveau régime soient fixées par voie réglementaire.
Il reviendra à La Poste et à la mutualité – cela va de soi – de veiller au principe essentiel de solidarité intergénérationnelle qui a toujours prévalu, la part prévoyance restant volontaire.
Avec l’instauration de ce régime de protection complémentaire en matière de santé pour ses fonctionnaires, mais qui se calque sur celui des salariés, notamment s’agissant du régime fiscal, La Poste affirmera, sans détour, et avec détermination, sa volonté d’avoir pour objectif prioritaire, dans la grande mutation qu’elle vit, l’intérêt de ses personnels et la garantie de leur mieux-être, au-delà de toutes les querelles intestines et clivages susceptibles de vouloir ternir une mesure éminemment sociale.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. La commission est défavorable à l’amendement n° 234. Le montant des primes et indemnités des fonctionnaires de La Poste relève du président du conseil d’administration lui-même et non du conseil d’administration. Ce principe résulte de l’article 29–4 de la loi du 2 juillet 1990 et est reconduit à l’identique dans le présent projet de loi.
Même avis sur l’amendement n° 229 : l’alinéa 1 est un alinéa « chapeau » qu’il n’y a pas de raison de supprimer.
Idem pour l’amendement n° 230 : le deuxième alinéa est indispensable pour régler le statut des fonctionnaires de La Poste ; il faut absolument préserver le statut des fonctionnaires.
La commission est également défavorable à l’amendement n° 558. Les pouvoirs de nomination et de gestion font partie des pouvoirs qu’un président ou un directeur général peut classiquement déléguer. Cette délégation sera, de surcroît, encadrée par un décret en Conseil d’État.
La commission demande le rejet de l’amendement n° 497 rectifié. Le changement de statut de La Poste n’a pas d’effet sur le statut des fonctionnaires et le président de La Poste reste nommé par décret. Je ne vois pas de raison de modifier les dispositions actuelles et de transférer au ministre le pouvoir de prononcer des sanctions disciplinaires.
Le même avis s’applique, pour les mêmes raisons, à l’amendement n° 244.
Pour les motifs invoqués à propos de l’amendement n° 234, la commission demande le rejet de l’amendement n° 231 ainsi que de l’amendement n° 559.
Je préciserai, s’agissant de l’amendement n° 498, que le pouvoir d’instituer des primes et indemnités constitue pour le président d’une société un moyen privilégié de motiver et de récompenser les salariés. Il permet d’améliorer les services rendus et in fine profite aux usagers. Avis défavorable.
Idem en ce qui concerne l’amendement n° 233. Il n’y a pas de raison particulière de modifier l’état du droit, l’avis conforme du conseil d’administration n’étant pas requis actuellement.
Pour ce qui est de l’amendement n° 232, je rappelle que les articles 29 et 30 de la loi du 2 juillet 1990 précisent certaines dispositions spécifiques du statut des personnels fonctionnaires de La Poste, et ce dans leur propre intérêt. Il n’y a pas lieu de supprimer la référence à ces articles. Avis défavorable
Même avis sur l’amendement n° 228. La gestion des emplois au sein d’une société anonyme, fût-elle à capitaux publics, ne relève que de celle-ci. Il n’y a pas lieu de l’orienter par la loi en prévoyant la mise en place d’un plan dont ni la justification ni le contenu ne sont précisés.
On voit mal quel quatrième alinéa de l’article 29 de la loi du 11 janvier 1984 l’amendement n° 245 vise à supprimer puisque cet article n’en compte que trois. Avis défavorable.
Le problème de la retraite complémentaire des contractuels et salariés de La Poste sera traité et – je l’espère – réglé à l’article 8 du texte. Néanmoins, nous aimerions connaître l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 562.
La commission est défavorable à l’amendement n° 593. Prévoir les modalités par le biais desquelles les employés seront accompagnés dans le changement de statut de La Poste ne relève pas de la loi.
L’amendement n° 621, qui est particulièrement important, a été déposé après l’examen du texte par la commission.
En première analyse, l’objectif de cet amendement paraît tout à fait louable dans la mesure où il permet aux personnels fonctionnaires de bénéficier d’un régime collectif de protection sociale complémentaire avec la participation de l’employeur. Il s’agit d’ailleurs d’une demande de certaines organisations syndicales.
Toutefois, je souhaiterais connaître l’avis du Gouvernement sur cet amendement, car la Mutualité française assure déjà la couverture sociale complémentaire.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Estrosi, ministre. À l’instar de la commission, le Gouvernement est défavorable aux amendements nos 234, 229, 230 et 558.
Concernant l’amendement n° 497 rectifié, dans le prolongement des propos que j’ai tenus et qui ont d’ailleurs conduit tout à l'heure le groupe socialiste à retirer un amendement – une initiative que j’ai saluée –, j’en reviens au caractère « imprivatisable », selon le néologisme qui m’a valu quelques railleries, de La Poste. Certains aspects de cet amendement ont pu vous échapper…
Comme je l’ai déjà indiqué, le président de La Poste est nommé par décret. Dès lors, le Gouvernement lui donne tout pouvoir pour gérer les fonctionnaires, y compris en matière de sanctions. Si, comme vous le proposez, monsieur Courteau, le pouvoir de prononcer des sanctions disciplinaires du quatrième groupe est attribué au ministre chargé des postes et communications électroniques, cela signifie que l’État ne sera plus l’actionnaire majoritaire de La Poste – le parallèle a été fait tout à l'heure avec France Télécom – et ne pourra donc plus exercer ses pouvoirs sur les fonctionnaires par le biais du président de cette institution.
Autrement dit, votre amendement sous-tend l’idée selon laquelle l’État ne détiendra plus une part majoritaire du capital et engage ainsi La Poste dans une voie que vous et nous refusons de la voir emprunter ! (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s’esclaffe.)
M. Roland Courteau. Ça, c’est très fort, monsieur le ministre !
M. Daniel Raoul. Nous sommes obligés de vous retenir ! (Sourires.)
M. Christian Estrosi, ministre. Soit ce pouvoir appartient au président de La Poste, parce que c’est lui qui est le patron des fonctionnaires, soit vous craignez que l’État ne soit plus l’actionnaire majoritaire de La Poste et vous décidez de confier ce pouvoir au ministre. Mais je tiens à vous faire mesurer combien votre vision est contre-productive par rapport au caractère 100 % public de La Poste, caractère que nous défendons avec vous.
Dans ces conditions, je ne puis que vous inciter, monsieur Courteau, à retirer votre amendement.
M. Roland Courteau. Que de contorsions pour en arriver là !
M. Christian Estrosi, ministre. Si vous décidez de le maintenir, le Gouvernement y sera évidemment opposé, car nous voulons, je le répète, que La Poste conserve son caractère 100 % public.
Sur les amendements nos 244, 231, 559, 498, 233, 232, 228 et 245, le Gouvernement émet un avis défavorable.
Quant à l’amendement n° 562, il est intéressant, mais il n’a pas sa place ici. Je confirme que nous aborderons la question du régime de l’IRCANTEC, sous cette forme ou sous une autre plus ou moins différente, lors de l’examen de l’article 8 du projet de loi. C'est la raison pour laquelle je vous demande, madame Gonthier-Maurin, de bien vouloir le retirer, car il devrait être satisfait à l’issue de la discussion que nous aurons sur l’article 8.
Le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 593.
En revanche, le Gouvernement est très favorable à l’amendement n° 621 du groupe du RDSE, car il permettra à La Poste de mettre en place, dans le cadre d’un contrat collectif, un dispositif de prévoyance santé pour les fonctionnaires de La Poste, comme c’est le cas pour les salariés. Il s’agit ici de contribuer au financement des garanties de protection sociale complémentaire des fonctionnaires. C’est une demande très forte de la part de l’ensemble des organisations syndicales.
Je l’avais déjà indiqué lors de la discussion générale, cette mesure est importante, et je vous remercie, madame Laborde, de contribuer à cette avancée sociale majeure pour les fonctionnaires de La Poste.
Par ailleurs, je tiens à rassurer ceux qui ont émis quelques inquiétudes sur les modalités pratiques : La Poste devra naturellement prendre le temps d’engager une concertation avec les syndicats pour mettre en place ce dispositif dans les meilleures conditions possibles.
M. le président. Monsieur le ministre, cela signifie-t-il que vous levez le gage ?
M. le président. Il s’agit donc de l’amendement n° 621 rectifié, qui est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - Après le premier alinéa de l'article 30 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 précitée, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« La Poste peut instaurer un régime collectif obligatoire de protection sociale complémentaire au bénéfice de ses personnels visés aux articles 29 et 44 de la présente loi, selon les dispositions de l'article L. 911-1 du code de la sécurité sociale et dans des conditions précisées par décret. Les contributions de La Poste destinées au financement des prestations prévues par ce régime sont exclues de l'assiette des cotisations et contributions sociales à la charge de l'employeur en ce qui concerne les personnels visés aux articles 29 et 44 de la présente loi dans les conditions prévues par l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale. Pour le calcul du montant net du revenu imposable des personnels visés aux articles 29 et 44 de la présente loi, les cotisations versées en application du présent alinéa sont assimilées aux cotisations et primes visées au 1° quater de l'article 83 du code général des impôts. »
Je mets aux voix l'amendement n° 234.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Monsieur Courteau, l'amendement n° 497 rectifié est-il maintenu ?
M. Roland Courteau. Monsieur le ministre, vous avez souligné qu’il fallait tout faire pour conforter l’emploi, pour renforcer l’entreprise, etc. Or, par cet amendement, nous ne proposons rien d’autre que de renforcer la protection à l’égard des fonctionnaires de La Poste !
En l’absence de référence à une telle protection dans le texte, et faute d’explications plus convaincantes de votre part, monsieur le ministre, – car votre démonstration était quelque peu alambiquée –,…
M. Nicolas About. Non !
M. Roland Courteau. … nous maintenons notre amendement, car nous tenons à ce que le statut des fonctionnaires soit pleinement préservé.
M. le président. Madame Gonthier-Maurin, l'amendement n° 562 est-il maintenu ?
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Monsieur le ministre, j’aimerais être certaine de vous avoir bien compris. Nous proposez-vous d’examiner cet amendement dans le cadre de l’article 8, et ce sans en modifier ni l’esprit ni la rédaction, hormis la référence de l’article auquel il s’applique ?
Il s’agit de savoir si les agents contractuels et les salariés du droit privé de La Poste vont demeurer affiliés au régime de l’IRCANTEC. Cette question est donc particulièrement importante.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Christian Estrosi, ministre. Madame la sénatrice, je vous le confirme : je vous demande de bien vouloir accepter de présenter de nouveau cet amendement à l’article 8. Nous aurons ainsi la possibilité de reprendre ce débat dans le cadre de l’examen d’autres amendements portant sur ce sujet. Bien entendu, je ne vous garantis pas que la solution qui sera finalement retenue sera celle que vous proposez.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Je rectifie donc cet amendement, monsieur le président, de manière à le représenter à l’article 8.
M. le président. L'amendement n° 562 rectifié sera donc examiné dans le cadre de la discussion de l’article 8.
Madame Laborde, l'amendement n° 593 est-il maintenu ?
Mme Françoise Laborde. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 593 est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 621 rectifié.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je constate que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents.
Je mets aux voix l'article 7, modifié.
(L'article 7 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 7
M. le président. L'amendement n° 372, présenté par MM. Teston, Chastan, Botrel, Bourquin, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 7, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Il est procédé à la reconstitution de la carrière des fonctionnaires de La Poste ayant opté pour le maintien sur leur grade de reclassement et privés, depuis 1993, de leur droit à la promotion interne. Un décret en Conseil d'État détermine les modalités d'application du présent article.
La parole est à M. Michel Teston.
M. Michel Teston. Si vous me permettez, monsieur le président, je présenterai également les amendements nos 373 et 374.
M. le président. J’appelle donc également en discussion deux autres amendements présentés par MM. Teston, Chastan, Botrel, Bourquin, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L’amendement n° 373 est ainsi libellé :
Après l'article 7, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Il est procédé à l'indemnisation des fonctionnaires de La Poste ayant opté pour le maintien sur leur grade de reclassement et privés, depuis 1993, de leur droit à la promotion interne. Un décret en Conseil d'État détermine les modalités d'application du présent article.
L'amendement n° 374 est ainsi libellé :
Après l'article 7, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les fonctionnaires de La Poste ayant opté pour le maintien sur leur grade de reclassement et privés, depuis 1993, de leur droit à la promotion interne, peuvent être placés dans les dispositions de l'article 7 de la loi n° 2009-972 du 3 août 2009 relative à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique. Un décret en Conseil d'État détermine les modalités d'application du présent article.
Veuillez poursuivre, mon cher collègue.
M. Michel Teston. Par ces amendements, je souhaite mettre fin à quinze ans d’incertitudes juridiques et professionnelles pour les « reclassés sans reclassification » de La Poste.
Un autre membre de notre groupe rappellera tout à l'heure, lors de la présentation de l’amendement n° 376, les ressorts historiques et juridiques de ce problème, mais je veux dès à présent souligner l’importance de ces trois amendements.
Les fonctionnaires de La Poste ayant conservé leur grade de « reclassement » – décrets de 1991 – sans opter pour l’intégration dans les nouveaux corps et grades de « classification » – décrets de 1993 – ont malheureusement connu un gel complet de leur carrière.
Le Conseil d’État a récemment reconnu l’illégalité de ce blocage et demandé au Premier ministre de bien vouloir « prendre les décrets introduisant les dispositions nécessaires permettant la promotion interne à l’intérieur des corps de “reclassement” de La Poste »
Au regard d’un projet de décret présenté très récemment aux partenaires sociaux à l’occasion du dernier comité technique paritaire de La Poste le 6 octobre 2009, je constate que celui-ci se contente, en la matière, du « service minimum ». En effet, s’il est prévu de lever les derniers obstacles réglementaires à la promotion interne sur les grades de « reclassement », rien n’est proposé pour indemniser ces fonctionnaires qui, de 1993 à 2009, ont été victimes de discrimination, de décisions manifestement « entachées d’illégalité », pour reprendre les termes de l’arrêt du Conseil d’État du 7 mai 2008.
De même, comment ne pas regretter que ce décret, dont l’application ne vaudrait que pour l’avenir, n’apporte aucune réponse aux 30 000 fonctionnaires qui n’ont connu, depuis 1993, aucune promotion, aucun changement, aucune amélioration, aucune chance d’obtenir un grade supérieur, à « n+1 », comme on dit de nos jours ?
Le préjudice subi, illustré par ce statu quo, a directement résulté d’un irrespect des règles contenues dans le statut général de la fonction publique. S’il y a eu préjudice, s’il y a eu dommage, il doit y avoir dédommagement et indemnisation.
C’est pourquoi nous voulons aujourd’hui que La Poste corrige cette situation en indemnisant les fonctionnaires en question et, surtout, en procédant à la reconstitution de la carrière de ces derniers, qui a été injustement et illégalement bloquée.
Par ailleurs, afin de compléter ces dispositions, je souhaite, au travers de l’amendement n° 374, que soit offerte aux « reclassés sans reclassification » la possibilité de se réorienter vers d’autres administrations, corps ou cadres d’emploi de niveau au moins équivalent, voire d’accéder à un emploi dans le secteur privé ou de pouvoir créer ou reprendre une entreprise.
La meilleure façon de créer ces passerelles est d’autoriser ces « reclassés sans reclassification » qui le souhaitent à bénéficier d’un projet personnel d’évolution professionnelle dans le cadre de l’article 7 de la loi 2009-972 du 3 août 2009 relative à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique.
Certains soutiendront sans doute que cette disposition concerne déjà l’ensemble des fonctionnaires, donc des reclassés. Mais ne leur a-t-on pas dit, pendant plus de quinze ans, la même chose concernant la promotion interne ?
Ces amendements ne sont pas inspirés par une idéologie partisane ; ce sont tout simplement des amendements de justice destinés à engager la réparation des erreurs du passé.
Monsieur le président, j’ai présenté ces trois amendements en quatre minutes ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. le président. Je vous remercie. C’est un exemple qui va finir par être suivi ! (Sourires.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Nous avons reçu les représentants des fonctionnaires de La Poste et de France Télécom. Ils nous ont exposé leur point de vue à plusieurs reprises, et cela dès avant le début de la préparation du rapport.
Je me demande si la réponse passe nécessairement par la présente loi, qui ne modifie pas le statut des personnels de La Poste, y compris, donc, de ses fonctionnaires.
S’agissant d’agents de la fonction publique, le Gouvernement doit, de toute manière, apporter une réponse claire à ce sujet, monsieur le ministre.
En conséquence, je souhaite connaître l’avis du Gouvernement sur ces trois amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Estrosi, ministre. Dans son arrêt du 11 décembre 2008, le Conseil d’État a demandé au Gouvernement de prendre des dispositions permettant la promotion interne au sein des corps de reclassement de La Poste.
Un projet de décret visant à prendre en compte cette demande du Conseil d’État est actuellement soumis à l’examen du Conseil d’État lui-même. Ce décret devrait être publié avant la fin de l’année, permettant ainsi de nouveau la promotion interne dans les corps de reclassement de La Poste. C’est donc une véritable avancée pour les fonctionnaires dits « reclassés ».
Dès lors, il n’est pas souhaitable d’aller au-delà et de procéder à des reconstitutions de carrières ou autres qui n’étaient pas davantage prévues dans le décret similaire du 26 novembre 2004 adopté pour les fonctionnaires dits « reclassés » de France Télécom.
Voilà les raisons qui m’amènent à vous demander, monsieur Teston, d’accepter de retirer vos amendements.
M. le président. La parole est à M. Martial Bourquin, pour explication de vote sur l'amendement n° 372.
M. Martial Bourquin. Nous allons maintenir l’amendement n° 372. Il serait, en effet, profondément injuste que les fonctionnaires qui ont été lésés financièrement et surtout dans leur déroulement de carrière ne connaissent pas une reconstitution de celle-ci.
Je prendrai un exemple qui me paraît d’autant plus significatif qu’il concerne le secteur privé.
Des syndicalistes salariés de PSA n’avaient bénéficié d’aucune promotion pendant des années. Avant même qu’un jugement ne soit rendu sur cette affaire, la direction a accepté de négocier et a reconstitué entièrement les carrières.
Dans le cas présent, un arrêt ayant été rendu par le Conseil d’État, il serait tout à fait anormal qu’il n’y ait pas reconstitution de carrière. C’est même bien le moins que nous devons à ces fonctionnaires !
M. le président. La parole est à M. Daniel Dubois, pour explication de vote.
M. Daniel Dubois. Au sein du groupe Union centriste, nous considérons – nous nous sommes d’ailleurs exprimés plusieurs fois sur le sujet – que ce n’est pas la forme juridique d’un service public qui fait de celui-ci un excellent prestataire de services pour ses clients et pour ses salariés. Ce qui est déterminant pour la réussite de l’entreprise, quelle que soit la forme de celle-ci, c’est le management, le management « humain ». Nous en sommes absolument convaincus !
Selon nous, ne pas résoudre le problème qui se pose pour environ 200 salariés sur 300 000 salariés de La Poste serait non seulement une erreur stratégique,...
Mme Évelyne Didier. Tout à fait !
M. Daniel Dubois. ... mais un bien mauvais signe donné en termes de management.
Mme Évelyne Didier. Très bien !
M. Daniel Dubois. C’est la raison pour laquelle le groupe centriste soutiendra cet amendement. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. Martial Bourquin. Merci !
M. le président. La parole est à M. Nicolas About, pour explication de vote.
M. Nicolas About. Mon collègue Daniel Dubois a parfaitement présenté la position du groupe Union centriste.
Effectivement, l’annonce d’un décret faite par M. le ministre ne répond pas pleinement à notre attente.
M. Daniel Raoul. Exact !
M. Nicolas About. Ce décret ouvrira uniquement le droit de prétendre à la promotion ; il ne résoudra pas le problème de la reconstitution de carrière ni les autres points. Nous estimons qu’il ne faut pas trop en demander, mais nous soutiendrons le premier amendement de cette série.
M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote.
M. Gérard Longuet. Nous sommes manifestement dans un domaine réglementaire, et je comprends très bien l’intervention du rapporteur.
Il reste, monsieur le ministre, que votre réponse n’est pas complètement apaisante.
M. Daniel Raoul. Ah ça non !
M. Gérard Longuet. Les effectifs concernés sont peu nombreux et, sur ce décret, nous aurions aimé obtenir un engagement ou au moins une intention.
À cet instant, et bien que le groupe UMP ne se soit pas réuni, je ne crois pas trahir sa vision des choses en demandant à mes collègues de s’abstenir, car nous ne voulons pas empêcher le vote de cet amendement.
Attendons la commission mixte paritaire. Peut-être le décret sera-t-il publié dans l’intervalle. Nous interviendrons alors de façon plus active.
M. Nicolas About. Nous sommes dans le même état d’esprit !
M. le président. La parole est à Mme Mireille Schurch, pour explication de vote.
Mme Mireille Schurch. Nous soutiendrons, bien sûr, ces trois amendements.
Lors des auditions conduites par M. le rapporteur, nous avons rencontré ces personnels ; nous les avons trouvés bien désemparés. Leur situation nécessite vraiment d’être clarifiée.
Par un arrêt du 11 décembre 2008, complétant un arrêt du 7 mai 2008, le Conseil d’État reconnaissait le droit à la promotion interne des fonctionnaires reclassés vers les grades de reclassement et la faute de l’État, qui n’avait pas modifié les décrets.
La plus haute juridiction donnait un délai de neuf mois à l’État et à La Poste pour se mettre en conformité avec le droit. L’arrêt précise en effet : « Il est ordonné au Premier ministre de prendre les décrets introduisant les dispositions nécessaires permettant la promotion interne à l’intérieur des corps “de reclassement” de La Poste et au président du conseil d’administration de La Poste de prendre les mesures d’application nécessaires à cette promotion interne dans un délai de neuf mois à compter de la lecture de cette présente décision. »
Or, pour le moment, il ne semble pas question – peut-être y aura-t-il ultérieurement des avancées – d’accorder les échelons exceptionnels, pourtant promis en 1990, sur certains grades, bien que cela ait été le cas à France Télécom, où une situation identique s’était produite. Pour l’heure, donc, rien de bien tangible, monsieur le ministre, alors que des agents nous ont dit attendre de savoir s’ils pourront être promus avant de fixer la date de leur départ en retraite.
Le comité technique paritaire, pleinement habilité à statuer sur le sujet, n’a toujours pas été consulté et le projet de décret tarde quelque peu, même si vous nous annoncez aujourd’hui quelques progrès.
La direction de La Poste et le Gouvernement seraient-ils plus prompts à préparer le projet de privatisation qu’à régler l’injustice faite à ces « reclassés » depuis de nombreuses années ?
M. Nicolas About. Il ne faut pas dire cela !
Mme Mireille Schurch. C’est ainsi que l’on peut résumer la situation des fonctionnaires de La Poste ayant refusé de quitter le statut de fonctionnaire et qui ont été « reclassés sans reclassification ».
Cette situation ubuesque touche plusieurs milliers de fonctionnaires qui souffrent d’une perte de salaire importante. D’où la nécessité d’adopter ces trois amendements qui vise à demander réparation.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Christian Estrosi, ministre. Je voudrais dire à chacun d’entre vous, notamment au président du groupe UMP, Gérard Longuet, que, depuis 1991, tous les ministres qui sont venus devant vous ont dit des choses, mais n’ont rien fait !
M. Gérard Longuet. Exact !
M. Christian Estrosi, ministre. Je suis le premier à prendre un engagement.
J’ai déjà pris des initiatives puisque j’ai transmis un projet de décret au Conseil d’État. Je vais plus loin en vous disant que je suis prêt à recevoir les délégations des représentants des 200 salariés qui demeurent dans l’incertitude et à compléter le décret en Conseil d’État.
Dans la mesure où cette question relève du domaine réglementaire,...
M. Gérard Longuet. Certainement !
M. Christian Estrosi, ministre. ... les éminents juristes qui siègent dans cette assemblée le savent pertinemment, je m’engage à régler définitivement par décret le problème de ces fonctionnaires. Il est évident que, après les remarques que j’ai entendues, je ne veux pas laisser sur le bord du chemin les 200 et quelques salariés concernés.
M. Bruno Sido. Très bien !
M. Christian Estrosi, ministre. Je recevrai personnellement leurs représentants et, à la lumière de ce qu’ils m’auront dit, je compléterai le décret que j’ai déjà adressé au Conseil d’État.
Cela étant, si la Haute Assemblée souhaite malgré tout légiférer sur ce sujet, c’est à vous d’apprécier : je m’en remets à votre sagesse. Mais que chacun soit bien conscient que cela reste d’ordre réglementaire.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 7.
La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote sur l'amendement n° 373.
M. Daniel Raoul. Puis-je me permettre de dire d’emblée à M. le ministre que les explications qu’il nous a données ne nous satisfont que partiellement ? En effet, d’après vos propos, monsieur le ministre, vous ne remédiez qu’au problème de la promotion. Les autres points ne sont pas abordés, en particulier la question de la reconstitution.
Cela dit, je suis très heureux que cette assemblée ait pris conscience de la lésion des intérêts d’environ 200 fonctionnaires et ait eu la sagesse de voter l’amendement n° 372.
S’il y a reconstitution de carrière, il y a bien évidemment indemnisation. Par conséquent, je retire l’amendement subséquent n° 373, ainsi que l’amendement n° 374, qui est également un amendement de repli.
M. le président. Les amendements nos 373 et 374 sont retirés.
M. le président. L'amendement n° 375, présenté par MM. Teston, Chastan, Botrel, Bourquin, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 7, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La personne morale de droit public La Poste, mentionnée à l'article 1 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de La Poste et à France Télécom, a l'obligation de présenter, en fin d'année, un bilan des promotions des fonctionnaires ayant opté pour le maintien sur leur grade de reclassement et privés, jusque là, de leur droit à la promotion interne. Un décret en Conseil d'État détermine les modalités d'application du présent article.
La parole est à M. Yannick Botrel.
M. Yannick Botrel. Cet amendement porte également sur les « reclassés sans reclassification » de La Poste, ces fonctionnaires qui, comme le soulignait en 2003 le sénateur Gérard Larcher, ont été placés dans une situation largement « mal vécue […] source de démotivation, de gâchis humain et de perturbations pour l’entreprise ».
La direction de La Poste a présenté, en comité technique paritaire, un projet de décret supposé répondre aux demandes formulées par le Conseil d’État les 7 mai et 11 décembre 2008. Je vous rappelle que le juge administratif a en effet arrêté qu’il appartenait « aux autorités compétentes de veiller à ce que les procédures statutaires applicables aux personnels de La Poste permettent le maintien des voies de promotion interne malgré l’arrêt de titularisations consécutives à des recrutements externes ».
En d’autres termes, la direction de La Poste va devoir débloquer la carrière des fonctionnaires susmentionnés.
Si le projet de décret présenté le 6 octobre 2009 résout certaines difficultés, il ne garantit pas pour autant que le nombre des fonctionnaires promus dans les grades de « reclassement » sera suffisant. Une certaine opacité risque donc de régner de nouveau quant aux modalités de cette promotion des « reclassés » et à son effectivité.
Au moment où l’exigence de transparence dans les décisions et les actions devient l’une des composantes même de l’exercice démocratique, il nous faut assurer à ces personnels les moyens leur permettant de mieux comprendre la procédure de promotion dans les grades de « reclassement ».
Aussi, outre la demande d’un rapport parlementaire sur cette question, qui fait l’objet de l’amendement n° 376, je souhaite que, à l’image de l’obligation faite à la direction de France Télécom de présenter l’état des promotions de « reclassés » dans des grades de « reclassement », la direction de La Poste élabore chaque année un bilan similaire.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. La commission souhaite entendre l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est, donc, l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Estrosi, ministre. L’examen de cet amendement me permet d’apporter de nouvelles précisions sur cette question.
Je le rappelle, sur l’amendement n° 372, qui vient d’être adopté, le Gouvernement a choisi de s’en remettre à la sagesse du Sénat. Pour la première fois depuis 1991, un décret sera publié de façon que soient pris en compte ceux qui, aujourd'hui, ne le sont pas, comme vous le considérez à juste titre. J’ai d’ailleurs l’intention de prendre dès cette semaine les mesures nécessaires afin que ce décret, qui doit encore être complété, soit publié sous quinzaine, c'est-à-dire avant que le présent projet de loi, qui doit encore être examiné par l’Assemblée nationale, ne soit définitivement adopté.
Dans cette perspective, je ne peux qu’être favorable à l’amendement n° 375. Le compte rendu annuel prévu permettra de vérifier, monsieur Botrel, que votre souhait, qui est également celui du Gouvernement, est bien pris en compte par la direction de La Poste. Une telle disposition est propre à apporter à l’ensemble du personnel de l’entreprise des garanties supplémentaires.
M. le président. Quel est, maintenant, l’avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Favorable.
M. le président. Je constate que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 7.
L'amendement n° 376, présenté par MM. Teston, Chastan, Botrel, Bourquin, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 7, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Un rapport parlementaire est présenté avant la fin de l'année 2010 sur la situation et la carrière des personnels reclassés de La Poste.
La parole est à M. Yannick Botrel.
M. Yannick Botrel. L’examen de cet amendement aurait dû intervenir avant celui de l’amendement n° 375. Toutefois, je souhaite de nouveau attirer votre attention, mes chers collègues, sur la situation de ceux que notre collègue Michel Delebarre, député du Nord, nomme les « reclassés sans reclassification ».
En 1990, le gouvernement de Michel Rocard transforme l’administration des PTT en deux « exploitants autonomes de droit public », France Télécom et La Poste. Si nous connaissons tous les destins respectifs de ces deux services publics, il nous faut nous arrêter un instant sur le sort méconnu d’un grand nombre de fonctionnaires de l’ancienne administration des PTT.
Une série de décrets pris entre 1991 et 1992 a transposé les corps et grades des fonctionnaires des PTT dans la nouvelle entité ainsi créée. On a alors nommé ces fonctionnaires de La Poste les « reclassés ».
Puis, en 1993, ces corps et grades de « reclassement » ont été remplacés par de nouveaux corps et grades dits de « classification », afin de mieux valoriser les tâches effectuées par les agents. On a alors parlé de « reclassification » et, donc, de fonctionnaires « reclassifiés ».
Si une grande partie du personnel a suivi ces évolutions, 10 % d’entre eux environ, soit 30 000 personnes à l’époque et près de 7 000 aujourd’hui, ont accepté le « reclassement », mais sans opter, comme cela était autorisé, pour la « reclassification ».
Or ces « reclassés sans reclassification », comme on les a alors appelés, se sont rapidement aperçus qu’ils étaient, à l’évidence, victimes d’une forme de discrimination par rapport à leurs collègues « reclassifiés » : leur carrière était gelée puisqu’ils n’avaient plus droit à aucune promotion interne.
Les gouvernements successifs et la direction de La Poste ont justifié ce gel en arguant que l’avancement dans les grades de « reclassement » était impossible puisque le corps des fonctionnaires « reclassés » était en voie d’extinction depuis la « reclassification » de 1993. En effet, La Poste ne recrutant plus dans les grades de « reclassement » et le nombre de postes ouverts à la promotion interne étant directement conditionné par le nombre de recrutements externes, toute carrière dans les grades de « reclassement » était de fait impossible.
Fort heureusement, dans deux arrêts, en date du 7 mai et du 11 décembre 2008, le Conseil d’État a réaffirmé non seulement le droit à la promotion interne de tous les agents fonctionnaires, y compris dans les corps sans recrutement externe, mais aussi l’obligation, pour le Premier ministre, « de prendre les décrets introduisant les dispositions nécessaires permettant la promotion interne à l’intérieur des corps de "reclassement" de La Poste ».
J’ai ici une copie du projet de décret : les améliorations sont prévues a minima et… sans mea culpa.
C’est pourquoi je vous propose aujourd’hui, mes chers collègues, grâce à la remise d’un rapport parlementaire d’ici à la fin 2010, de faire la lumière sur ces quinze années d’« apesanteur juridique, administrative et humaine », pour reprendre l’expression du sénateur Gérard Larcher.
Il est en effet de notre devoir de parlementaires d’identifier les difficultés qui subsistent, notamment au regard des modalités de promotion dans les grades de « reclassement », et d’émettre des propositions concrètes pour y remédier définitivement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. La commission a bien noté les observations qui viennent d’être formulées. Toutefois, l’adoption de cet amendement, chacun le comprend, aboutirait à la rédaction d’un rapport supplémentaire.
La commission a émis un avis défavorable, mais elle souhaite connaître l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Yannick Botrel, pour explication de vote.
M. Yannick Botrel. Monsieur le rapporteur, vous nous dites qu’il s’agit d’un rapport de plus. Certes, mais ce n’est qu’un rapport de plus ! Il permettrait de préciser la situation de façon tout à fait claire, ce qui paraît absolument nécessaire pour apaiser le climat social de l’entreprise.
M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote.
M. Gérard Longuet. Ce débat est passionnant, car il montre que notre pays est un État de droit.
Dans cette difficile affaire de La Poste, qui retient notre attention depuis plusieurs jours, un point mérite d’être relevé plus particulièrement. Depuis 1991, c'est-à-dire depuis dix-huit ans, se sont succédé des gouvernements d’orientation différente, à la suite de basculements de majorité. Dans cet intervalle, qui a dirigé La Poste ? La Poste ! Et c’est la même politique qui s’est poursuivie d’année en année, tendant vers une gestion plus autonome et plus responsable, sous l’autorité des cadres de l’entreprise. Bien sûr, ces derniers ont néanmoins mené leur politique interne en fonction des contraintes, parfois dictées par Bercy, qui s’imposaient à eux.
Par ce rappel, je veux simplement vous rendre conscients, mes chers collègues, du fait que ce projet de loi n’opère pas un saut dans l’inconnu. Il s’agit simplement de la prolongation d’une évolution parfaitement continue, qu’aucune majorité, à ce jour, n’a remise en cause.
L’exploitant est bien La Poste. Sa volonté d’évolution nous a conduits à ce débat, qui nous retient matin, après-midi, soir, peut-être jusque tard dans la nuit. Mais nous faisons œuvre utile en soutenant le projet de ceux dont nous devons reconnaître qu’ils font leur métier avec compétence.
Monsieur Botrel, le groupe UMP ne comprend pas très bien l’utilité d’un second rapport sur cette question puisque nous venons d’adopter l’amendement n° 375, qui prévoit l’établissement d’un « bilan » annuel, ce qui revient un peu au même.
De plus, nous sommes ici dans le domaine réglementaire, ainsi que M. le ministre l’a rappelé, tout en nous faisant part de la volonté politique qui est la sienne en la matière, et dont nous nous réjouissons. Or, dans un État de droit comme le nôtre, lorsqu’un texte réglementaire ne satisfait pas les personnes concernées, celles-ci ont à leur disposition des voies de recours, qui sont placées sous l’autorité du Conseil d’État, lequel a manifesté, c’est le moins qu’on puisse dire, un remarquable sens de la continuité puisqu’il a rendu en 2008 deux arrêts dont l’esprit est conforme à une décision remontant à 1991.
Certes, un nouveau rapport peut être prévu. Cependant, l’expérience prouve que les rapports ne sont pas toujours faits, que, s’ils le sont, ils ne sont pas toujours lus et que, s’ils sont lus, ils ne sont pas toujours suivis de conséquences. (Sourires.)
Bien entendu, nous ne nous opposons pas par principe à la remise d’un rapport. Nous nous posons simplement deux questions.
Premièrement, en quoi ce rapport sera-t-il différent de celui que nous venons d’inscrire dans le texte ?
Deuxièmement, l’adoption de cet amendement serait-elle une preuve de confiance dans la maturité et la responsabilité du Conseil d’État, voie de recours normale des agents qui estimeraient que le décret n’a pas été satisfaisant ?
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean-Paul Emorine, président de la commission de l'économie. Je me félicite que, à l’occasion de l’examen de ce projet de loi qui vise à transformer l’EPIC La Poste en une société anonyme, nous puissions régler le sort de certains fonctionnaires.
L’adoption de l’amendement n° 372 aura, je l’espère, rassuré l’ensemble des fonctionnaires concernés. Dans ces conditions, évitons, mes chers collègues, d’avoir un rapport supplémentaire à faire !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Des rapports, vous en faites tous les jours !
M. Jean-Paul Emorine, président de la commission de l'économie. Nous avons des missions plus importantes à accomplir !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 376.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 8
L’article 31 de la même loi est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est ainsi rédigé :
« La Poste emploie des agents contractuels sous le régime des conventions collectives. » ;
2° À la première phrase du troisième alinéa, les mots : «, de conditions de travail » sont supprimés.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, sur l'article.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Nous pouvons à bon droit nous étonner à juste titre des propos lénifiants tenus tout à l’heure par M. le ministre sur les fonctionnaires de La Poste. Mais sans doute une telle attitude s’inscrit-elle dans sa défense de l’« imprivatisabilité » de La Poste !
En la matière, l’exploitant public est en phase avec le Gouvernement, qui ne cesse de diminuer le nombre de fonctionnaires – il se vante d’avoir supprimé 250 000 postes depuis cinq ans ! –, les accusant au passage de tous les maux, y compris dans des secteurs où nos concitoyens les trouvent particulièrement utiles.
La Poste, service public, enregistre une diminution de ses effectifs publics, tandis que ses autres personnels subissent, de manière corollaire, une précarisation de plus en plus marquée. En revanche, les bénéfices de La Poste, eux, ne cessent d’augmenter.
Au fond, la direction du groupe a déjà préparé la privatisation, au détriment des métiers, de la transmission des savoir-faire, des personnels et des usagers.
Aujourd’hui, on constate une très grande disparité statutaire. Les salariés de droit privé, qui tendent à devenir plus nombreux que les fonctionnaires, sont soumis à une grande précarité et à une forte pression en termes de salaires et de conditions de travail, lesquelles ont, à leur tour, des conséquences néfastes sur les personnels sous statut. Il est évident que l’inversion du rapport numérique pèse terriblement sur l’ensemble des personnels de La Poste. L’année dernière, M. Jean-Paul Bailly s’est d’ailleurs félicité du fait qu’en 2012 il y aurait autant de salariés de droit privé que de fonctionnaires… Il faut probablement y voir une avancée du service public !
Un postier sur trois perçoit un salaire mensuel net inférieur à 1 400 euros, ce que vous estimez sans doute suffisant pour se nourrir, se loger, etc., et deux sur trois, inférieur à 1 800 euros, ce que vous jugez certainement très confortable ! Vous avez probablement ces chiffres en tête lorsque vous proposez de substituer l’actionnariat salarial aux augmentations de salaires. Or, ce que veulent les personnels, c’est surtout de meilleurs salaires.
De surcroît, le manque de transparence permet à la direction de proposer aux contractuels des salaires inférieurs en moyenne de 20 % à 30 % au traitement des fonctionnaires occupant les mêmes postes.
Quant à la situation dans les filiales déjà privatisées, elle est tout simplement inadmissible, les salaires variant du simple au double par rapport à ceux qui sont pratiqués dans l’entreprise publique.
Le processus est donc déjà très engagé, mais le projet de loi, dont l’objectif est de préparer la privatisation du groupe, va encore accentuer cette précarité. On a vu quelles pouvaient être les conséquences humaines de ces méthodes : ce sont celles qui produisent de si brillants résultats chez France Télécom, et qui sont aujourd’hui justement dénoncées. Pourtant, elles sont progressivement mises en œuvre à La Poste, notamment à travers la dénaturation des missions des fonctionnaires, à qui l’on demande, avant même de répondre à leur mission de service public, de vendre quatre ou cinq produits commerciaux par jour aux usagers devenus des « clients ».
J’en ai d’ailleurs moi-même fait récemment l’expérience. À l’occasion d’un déménagement, je me suis rendue dans un bureau de poste pour effectuer mon transfert d’adresse. L’agent à qui je me suis adressée m’a tout d’abord proposé d’acheter un joli pack rose à 39 euros… Devant mon refus, il m’a finalement orientée vers les anciens imprimés, à 19 euros. En fin de compte, j’ai payé 22 euros.
M. Christian Cambon. Vos problèmes de déménagement ne nous intéressent pas !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. On demande donc aux employés d’être des commerciaux. Et gare à ceux qui n’arrivent pas à vendre les packs, enveloppes prétimbrées et autres produits en tout genre !
M. le président. Vous avez dépassé votre temps de parole, ma chère collègue !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. À cette dénaturation des missions s’ajoutent des mutations d’office avec changement de résidence. (Manifestations d’impatience sur les travées de l’UMP.)
M. Christian Cambon. Respectez le règlement !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Enfin, j’ajoute que le projet de loi organise,…
M. Jean-Paul Emorine, président de la commission de l'économie. Arrêtez ! On a compris !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. … au travers de l’article 8, la non-protection de la représentation individuelle des agents de droit privé, en les soumettant à l’article 31 de la loi du 2 juillet 1990. Or cette disposition, qui prévoit que le code du travail ne s’applique pas, renvoie à un décret en Conseil d’État pour définir les conditions dans lesquelles les agents de La Poste sont représentés dans les instances de concertation…
M. le président. Maintenant, je vous demande de conclure !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. …chargées d’assurer l’expression collective de leurs intérêts, notamment en matière d’organisation des services, de conditions de travail et de formation professionnelle.
Ce décret n’a toujours pas été pris, et je souhaiterais obtenir des précisions sur ce point. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG. – M. Jean Desessard applaudit également.)
M. Christian Cambon. Sept minutes pour nous raconter son déménagement !
M. le président. La parole est à M. Michel Teston.
M. Michel Teston. L’article 8 du projet de loi concerne les agents contractuels et modifie deux dispositions de l’article 31 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990.
La première partie de cet article tire une conséquence du basculement de La Poste dans le droit commun des sociétés anonymes. Selon la législation en vigueur, La Poste « peut employer » des agents contractuels ; aux termes de ce projet de loi, elle « emploie » des agents contractuels. Ce qui était une possibilité devient la norme...
Actuellement, le constat peut être fait d’un équilibre entre salariés fonctionnaires, dont le nombre baisse régulièrement, et salariés contractuels, dont le nombre augmente régulièrement. Ainsi, au sein du groupe, des salariés qui effectuent des tâches identiques sont placés sous des régimes différents, certains relevant du statut de la fonction publique, les autres étant soumis aux dispositions de la convention commune. Quant aux salariés de La Banque postale, ils sont soumis aux règles de la convention collective de la banque.
Le projet de loi fait référence à des conventions collectives, mais, pour l’instant, hormis la convention commune, qui ne concerne que les salariés de La Poste, il n’existe aucune convention collective des activités postales. Cette situation ne manque pas de nous inquiéter. En effet, il aurait été préférable de définir une convention collective des activités postales avant l’ouverture totale à la concurrence,…
M. Jean Desessard. Absolument !
M. Michel Teston. … les mouvements de libéralisation postale à l’étranger ayant, pour la plupart, eu des conséquences très lourdes sur l’emploi et les conditions de travail.
L’éventualité d’une négociation entre représentants des salariés et opérateurs est susceptible d’avoir pour conséquence une moindre protection des salariés, y compris pour ceux de La Poste. En l’absence d’une convention collective des activités postales, les opérateurs concurrents, qui ne sont pas soumis aux obligations de la convention commune, risquent de pratiquer une politique de dumping social, dangereuse pour leurs salariés et, à terme, pour ceux de La Poste, cette dernière pouvant être tentée de s’aligner sur ses concurrents.
En outre, le texte ne prévoyant pas de dispositif idoine, les agents de La Poste vont automatiquement basculer du régime complémentaire de retraite de l’IRCANTEC vers celui de l’AGIRC-ARRCO, ce qui se traduira, pour les agents, par un régime beaucoup moins favorable et, pour l’IRCANTEC, par un grave risque de déséquilibre, La Poste étant l’un des employeurs qui cotise le plus à ce régime.
Le Gouvernement s’est engagé à trouver une solution. En attendant, nous présentons un amendement d’appel qui vise, tout à la fois, à conserver un bon niveau de protection aux salariés et à sauvegarder le régime complémentaire de retraite de l’IRCANTEC.
J’évoquerai enfin la suppression de la référence aux conditions de travail dans les questions qui peuvent être discutées par les instances représentatives du personnel chargées de la concertation. Le rapporteur soutient cette initiative au motif que la société anonyme La Poste sera obligatoirement dotée d’un comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail. Certes, mais l’actualité ne manque pas de nous rappeler les conséquences dramatiques que peuvent avoir de mauvaises conditions de travail. Il ne nous paraît donc pas opportun de limiter les occasions d’échanger sur un sujet aussi essentiel.
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard.
M. Jean Desessard. L’article 8 comprend des dispositions relatives aux conditions de travail des agents contractuels.
Lors de la discussion générale, vous avez affirmé, monsieur le ministre, que la dimension humaine était déterminante.
Ce que j’appelle l’humain, ce sont les valeurs et le sens que chaque agent de La Poste apporte à l’exercice de son métier, à l’accomplissement de son travail. Ce sont des valeurs de service public : qualité du service rendu, attention accordée aux usagers, fierté de participer à un projet contribuant au bien commun.
J’espère sincèrement que les dirigeants de La Poste prendront en compte ces éléments, qui sont la preuve que la réussite d’une entreprise ne peut se fonder sur un calcul purement économique.
Monsieur le ministre, vous avez également ajouté : « La Poste doit garantir des conditions exemplaires de travail et de bien-être. »
Merci pour ces belles déclarations d’intention !
Je comprends donc que l’État, en tant qu’actionnaire majoritaire, assumera ses responsabilités et fera en sorte que le bien-être au travail devienne une réalité à La Poste, pour les contractuels comme pour les fonctionnaires. Car, pour l’instant, la réalité est tout autre.
À l’heure actuelle, ce qui préoccupe les dirigeants et les futurs actionnaires, ce n’est pas tant le niveau de stress et de souffrance du personnel que le ratio entre les charges de personnel et le chiffre d’affaires, c’est-à-dire la compétitivité de l’entreprise. La Poste tend de plus en plus à imiter le modèle managérial de France Télécom : mobilité forcée, mise en concurrence des salariés, harcèlement, « placardisation », etc. Il est tout à fait pertinent d’établir ici un parallèle entre ces deux entreprises, car cette violence moderne a précisément vu le jour lorsque France Télécom a changé de statut.
Je vous mets donc en garde, monsieur le ministre : parce qu’un service public postal de qualité doit obligatoirement s’appuyer sur son personnel, les Verts attendent d’un vrai projet de modernisation du service postal qu’il prête attention aux besoins, aux souhaits et aux particularités du salarié dans l’entreprise. Or il est difficile de concilier le service public, une concurrence féroce et l’intérêt des usagers.
Malheureusement, les dispositions du projet de loi relatives aux conditions de travail des agents de La Poste ne sont pas à la hauteur de cet enjeu. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 68 est présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.
L'amendement n° 499 est présenté par MM. Teston, Botrel, Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour présenter l’amendement n° 68.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. L’article 8, qui a trait aux agents contractuels de La Poste, nous fait pénétrer au cœur de la précarisation du statut de postier. À propos de cette disposition, le rapport de la commission se contente, de manière lapidaire, de constater que, « de même que pour les fonctionnaires, la transformation de La Poste en société anonyme ne remet pas en cause le statut des agents salariés de droit privé ».
Nous reprochons justement au Gouvernement et à la commission de n’améliorer en rien la situation détériorée de ces agents.
Aujourd’hui, ces 145 000 salariés – sur les 297 000 que comprend aujourd’hui le groupe – sont liés par des contrats à durée indéterminée ou par des contrats à durée déterminée, dont le renouvellement a souvent donné lieu à des abus de la part de La Poste.
La filialisation, instaurée comme méthode de destruction de l’institution postale, porte aussi, depuis des années, un coup rude au statut des postiers.
Après la séparation des PTT en deux entités, France Télécom et La Poste, une catégorie particulière de salariés est apparue, salariés que ma collègue Annie David a qualifiés de « ni-ni ». Ils ne sont en effet ni tout à fait des salariés de droit privé, ni tout à fait des fonctionnaires.
La Poste comprend donc aujourd'hui une multitude de situations salariales, des régimes juridiques hétérogènes et, bien sûr, inégalitaires.
Le projet de loi prévoit simplement le passage d’un régime de droit privé géré par un établissement public à une entreprise privée dont les capitaux seront – mais pour combien de temps ? – publics.
Qui peut croire un instant que le statu quo perdurera pour les 147 000 salariés de La Poste ? La pression libérale, celle que subissent aujourd'hui les personnels de France Télécom, va demain s’exercer de manière implacable. Nous refusons cette situation et nous exigeons un traitement digne et respectueux des postiers.
C’est donc en toute logique que nous vous proposons de supprimer l’article 8 du projet de loi.
M. le président. La parole est à M. Claude Jeannerot, pour présenter l’amendement n° 499.
M. Claude Jeannerot. Nous demandons la suppression de l’article 8, pour deux raisons de nature différente mais qui nous semblent complémentaires.
Tout d’abord, cet article nous paraît superfétatoire. Si nous avons bien compris, le statut de société anonyme ayant été adopté, le droit commun s’applique. Dès lors, à quoi bon en dire davantage ?
Ensuite, et cette raison est la plus décisive, supprimer les références aux conditions de travail dans le contexte actuel suscite inévitablement des interrogations. Ne convient-il pas au contraire, comme l’a dit tout à l’heure Michel Teston, dans un contexte où le mal-vivre au travail devient endémique – on le vérifie chaque jour – de maintenir une telle référence ? Le trop n’est pas l’ennemi du bien ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Chacun est ici dans sa logique ! Les auteurs de ces amendements s’opposent au changement de statut de La Poste et à ses conséquences sur la situation de ses agents contractuels. La commission émet donc un avis défavorable sur ces deux amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Estrosi, ministre. Même avis : le Gouvernement est défavorable à la suppression de l’article 8.
M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote.
M. Daniel Raoul. L’argumentation de M. le rapporteur me paraît bien légère !
Nous prenons acte du changement de statut de La Poste, même si cela se fait contre notre volonté. Nos remarques, en particulier celles de notre collègue Claude Jeannerot, s’inscrivent dans le cadre de ce changement de statut. Je suis donc très étonné, monsieur le rapporteur, que vous rameniez le problème que nous soulevons au débat qui a eu lieu à propos de l’article 1er. C’est un peu court ! (MM. Jean Desessard et Martial Bourquin applaudissent.)
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 68 et 499.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de seize amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 246, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
I. - L'article 31 de la même loi est ainsi rédigé :
« Art. 31. - Lorsque les exigences particulières de l'organisation de certains services ou la spécificité de certaines fonctions le justifient, les exploitants publics peuvent employer, sous le régime des conventions collectives, des agents contractuels, dans le cadre des orientations fixées par le contrat de plan.
« L'emploi des agents mentionnés à l'alinéa précédent n'a pas pour effet de rendre applicables à La Poste et à France Télécom les dispositions du code du travail relatives aux comités d'entreprise. Un décret en Conseil d'État détermine les conditions dans lesquelles les agents mentionnés à l'alinéa précédent sont représentés dans des instances de concertation chargées d'assurer l'expression collective de leurs intérêts, notamment en matière d'organisation des services, de conditions de travail et de formation professionnelle. »
II. - La perte de recettes résultant pour l'État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jean-François Voguet.
M. Jean-François Voguet. En 2005, M. Pierre Hérisson, en qualité de rapporteur du projet de loi relatif à la régulation des activités postales, avait déposé un amendement visant « à lever une ambiguïté persistante sur le recours par La Poste à des agents de droit privé ».
La loi de 1990, en son article 31, faisait de l’emploi de personnel sous statut privé l’exception. De votre propre aveu, monsieur le rapporteur, cette possibilité devait rester à la marge : « À l’heure de l’ouverture des marchés postaux à la concurrence, cette souplesse relative se révèle contraignante et décalée pour le groupe La Poste, qui compte déjà un tiers de contractuels, notamment dans les fonctions d’encadrement et au sein des services financiers. »
Vous aviez néanmoins déposé un amendement visant à permettre à La Poste de mener une libre politique de recrutement, en justifiant ce recul par la concurrence croissante à laquelle l’entreprise devait faire face. Cette disposition visait à banaliser le recrutement des contractuels. Comme on le voit, elle a bien fonctionné ! Depuis 2001, l’entreprise n’a en effet recruté aucun fonctionnaire.
L’amendement n° 246 vise à réinscrire dans le projet de loi que le recrutement de contractuels par La Poste doit demeurer exceptionnel.
En banalisant le recrutement de contractuels par La Poste, la loi de 2005 a organisé la disparition à terme d’un corps de fonctionnaires. Le scénario prévu pour La Poste pourrait bien être identique à celui de France Télécom !
L’opposition avait fait à l’époque l’analyse suivant laquelle, au fil du temps, l’établissement public employant majoritairement des fonctionnaires et chargé de missions de service public allait se transformer en une société anonyme rechignant à remplir lesdites missions.
Le projet de loi qui nous est aujourd'hui soumis tend à mettre en œuvre ce scénario.
Parce que nous considérons que l’exercice des missions de service public par une entreprise publique composée essentiellement de fonctionnaires est une garantie pour les usagers de la qualité du service rendu, parce que nous considérons que les personnels doivent bénéficier du statut de fonctionnaire, qui offre les meilleures garanties, et que l’État doit donner l’exemple dans ce domaine, nous vous demandons d’adopter cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 235, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Supprimer cet alinéa.
M. Jean-François Voguet. Cet amendement est défendu, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 255, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Rédiger ainsi cet alinéa :
« La Poste emploie des agents contractuels dans le cadre d'une convention collective unique. » ;
La parole est à Mme Mireille Schurch.
Mme Mireille Schurch. Aujourd’hui, la maison mère de La Poste emploie des contractuels sous le régime d’une convention unique. Il en est tout autrement dans ses filiales « banque », « publicité non adressée », « routage », « messagerie » et « courrier express ».
À cette constellation d’activités correspond une myriade de conventions collectives. Après sa transformation en société anonyme, La Poste va connaître une modification profonde de sa structure. La séparation entre la maison mère et les filiales va disparaître et laisser place à trois holdings : « courrier », « banque » et « colis express ».
Prenons l’exemple des 5 000 contractuels travaillant chez Colis Poste. Alors qu’ils sont aujourd’hui protégés par la convention de la maison mère, ils seront soumis, après la transformation de La Poste en société anonyme, à la convention applicable chez Chronopost ou Exapaq, celle du transport. Or cette convention est nettement moins favorable que ne l’est actuellement celle de l’EPIC.
Par ailleurs, comme cela vient d’être dit, La Poste ne cesse de rechercher le moins-disant social dans un rapport de force inéquitable. Elle est aidée en cela par le Gouvernement, qui n’a jamais publié les décrets organisant la représentation individuelle des salariés.
Lors de son audition par la commission de l'économie, le président de La Poste a déclaré : « Les institutions représentatives du personnel, telles qu’elles résultent de la loi de 2005, donnent satisfaction et aucune évolution n’est envisagée pour l’instant en ce qui les concerne. » Il a apparemment changé d’avis depuis, car il a très récemment convoqué les organisations syndicales de La Poste et prévu l’organisation, le 12 novembre prochain, une réunion plénière portant sur le dialogue social. Il propose de supprimer 1 200 des 1 363 CHSCT, comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail, en portant de 50 à 300 le nombre d’agents requis pour constituer un tel comité.
Cette mesure, vous le comprendrez, nous inquiète au plus haut point. Elle confirme que la transformation de La Poste en société anonyme aura des effets catastrophiques pour les personnels du groupe public.
Nous souhaitons donc le maintien d’une convention collective unique qui protège les droits de tous les personnels contractuels de La Poste. En outre, nous souhaitons que ces personnels bénéficient de toutes les protections du droit du travail qui ne seraient pas appliquées aujourd’hui.
M. le président. L'amendement n° 500, présenté par MM. Teston, Botrel, Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Remplacer le mot :
emploie
par les mots :
peut employer
La parole est à M. Didier Guillaume.
M. Didier Guillaume. Aux termes de l’article 31 de la loi du 2 juillet 1990, « La Poste peut employer, sous le régime des conventions collectives, des agents contractuels, dans le cadre des orientations fixées par le contrat de plan ».
M. Gérard Longuet. Qui était le ministre des postes et des télécommunications en 1990 ?
M. Didier Guillaume. Je ne m’en souviens plus, mais je sais qu’un grand gouvernement de gauche gérait alors le pays. Nous ne sommes malheureusement pas assez souvent et pas assez longtemps au gouvernement. J’espère que nous y reviendrons un jour ! (Sourires.)
L’article 8 du projet de loi prévoit que : « La Poste emploie des contractuels ». Avec cet article, ce qui était une éventualité devient la règle, …
M. Gérard Longuet. Eh oui !
M. Didier Guillaume. … comme l’a déjà dit notre collègue Michel Teston lors de son intervention sur l’article. Nous nous opposons à cette disposition.
Le nombre de fonctionnaires actuellement attachés à La Poste s’élève à 160 000, sur un total d’environ 300 000 salariés. Cette part décroît régulièrement. À terme, donc, plus aucun fonctionnaire ne travaillera à La Poste ! Cependant, même si leur nombre baisse, celui-ci reste relativement élevé. Il nous semble donc important de veiller à ce que cette catégorie soit prise en compte.
La responsabilité de l’État envers les fonctionnaires est posée, comme l’affirmait en octobre 1997 Gérard Larcher dans son rapport intitulé : La Poste, opérateur public de service public face à l’évolution technique et à la transformation du paysage postal européen. Il y soulignait en effet que « l’État ne peut se soustraire aux obligations qu’il a souscrites ».
Compte tenu de ces éléments, nous demandons que la rédaction actuelle de l’article 31 de la loi de 1990 soit maintenue afin que toutes les catégories de salariés du groupe La Poste soient convenablement prises en considération. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. L'amendement n° 413, présenté par MM. Teston, Bourquin, Botrel, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 3
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
...° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« La Poste met en place un comité paritaire sur l'amélioration des conditions de vie et de travail des personnels de La Poste et de ses filiales. » ;
La parole est à M. Martial Bourquin.
M. Martial Bourquin. Les personnels de La Poste craignent que, à la suite de l’adoption du présent projet de loi et du changement de statut de leur entreprise, leurs conditions de travail ne soient mises à mal. Ils redoutent en fait d’être mis en danger sur le plan physique comme sur le plan psychologique.
Malheureusement, ce qui se passe actuellement dans une entreprise qu’ils connaissent bien, France Télécom, leur donne raison. Une ouverture à la concurrence mal préparée, un changement de priorités, la course au moins-disant social et à la rentabilité à court terme et, surtout, la baisse constante des effectifs ont parfois des conséquences dévastatrices sur les personnels. Certains d’entre eux ne parviennent plus à faire face à la montée en pression et à satisfaire les objectifs difficilement atteignables qui leur sont imposés en termes de résultats.
Monsieur le ministre, pourriez-vous nous éclairer sur la volonté de La Poste de diminuer de façon drastique le nombre de CHSCT ? Vous connaissez l’importance de ces comités, qui peuvent contribuer à empêcher certains excès. Une diminution radicale de leur nombre ne serait vraiment pas de bon augure. Confirmez-vous cette information ? L’État-actionnaire, que vous représentez ici, monsieur le ministre, ne peut-il rien contre ce projet de la direction de La Poste ?
Permettez-nous également de vous rappeler vos obligations en tant qu’employeur : « L’employeur est tenu, à l’égard de son personnel, d’une obligation de sécurité de résultat qui lui impose de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé des salariés. » Par ailleurs, il lui est interdit d’avoir des pratiques managériales « qui auraient pour objet ou pour effet de compromettre la santé et la sécurité des salariés ».
Nous souhaitons, monsieur le ministre, que vous fassiez de ces obligations – respect des salariés, conditions de travail décentes et normales – une réelle priorité. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. L'amendement n° 301, présenté par MM. Desessard et Muller et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 3
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
...° Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :
« Les agents contractuels sont soumis aux au code du travail, et aux conventions collectives propres à leur activité. » ;
La parole est à M. Jean Desessard.
M. Jean Desessard. Pourquoi priver certains agents de La Poste du bénéfice des garanties apportées par le code du travail ? En effet, la loi du 2 juillet 1990 relative à l’organisation du service public de la poste et des télécommunications ne prévoit pas que les agents contractuels y sont intégralement soumis.
Aujourd'hui, les contractuels représentent près de 40 % des effectifs de la maison mère et de 98 % des effectifs des filiales, soit 45 % dans l’ensemble du groupe.
La Poste est le premier employeur de France après l’État. Mais ses 136 713 contractuels ne connaissent pas les garanties du code du travail en matière de comités d’entreprise, de délégués du personnel et de délégués syndicaux.
Après le drame que connaît France Telecom, dont les salariés se sentent muselés, il est préférable de prendre toutes les mesures possibles pour éviter de reproduire les mêmes logiques de souffrance au travail.
C’est pourquoi je souhaite, à travers cet amendement, apporter au personnel toutes les garanties pour que des conditions de travail dignes lui soient assurées et qu’il puisse se faire représenter dans des instances ad hoc.
M. le président. Les amendements nos 300, 502 rectifié et 560 sont identiques.
L'amendement n° 300 est présenté par MM. Desessard et Muller et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.
L'amendement n° 502 rectifié est présenté par MM. Teston, Botrel, Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste et apparentés.
L'amendement n° 560 est présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 4
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Jean Desessard, pour présenter l'amendement n° 300.
M. Jean Desessard. L’article 31 de la loi du 2 juillet 1990 relative à l’organisation du service public de la poste et des télécommunications dispose : « Un décret en Conseil d’État détermine les conditions dans lesquelles les agents de La Poste sont représentés dans des instances de concertation chargées d’assurer l’expression collective de leurs intérêts, notamment en matière d’organisation des services, de conditions de travail et de formation professionnelle. »
Or le quatrième alinéa de l’article 8 du projet de loi vise à supprimer, dans l’article dont je viens de rappeler les termes, les mots : « de conditions de travail », donc à interdire aux agents de La Poste de s’exprimer sur leurs conditions de travail dans les instances de concertation chargées d’assurer l’expression collective de leurs intérêts. Notre amendement vise, par conséquent, à maintenir la référence aux conditions de travail dans le texte de la loi de 1990, car nous souhaitons que les salariés puissent s’exprimer sur le sujet.
« Vous arrive-t-il ou vous est-il arrivé, au cours des douze derniers mois, de vous sentir très fatigué ou stressé par votre travail ?» Cette question ne vous est pas adressée, mes chers collègues ! (Sourires) C’est l’une des 177 questions posées aux salariés de France Télécom le 19 octobre dernier. En effet, France Télécom figure parmi les grandes entreprises où se produisent le plus de gestes désespérés au travail.
D’ailleurs, je vous recommande la lecture de cet excellent ouvrage sur les mutations et les souffrances à France Télécom. (L’orateur brandit un livre.) Il s’intitule Orange stressée. (Marques d’ironie sur les travées de l’UMP.) C’est son titre, mes chers collègues, et je vous invite à le lire. Comme vous le savez, Orange est le nom sous lequel France Télécom mène certaines de ses activités. Personnellement, j’aurais tendance à préférer le nom « France Télécom ».
Il aura fallu attendre vingt-cinq suicides – et bien davantage de tentatives et de manifestations de détresse – depuis 2008 pour que l’avis des agents sur leurs conditions de travail soit enfin pris en compte, ce qui s’est traduit par l’envoi de ce long questionnaire dont j’ai cité un extrait.
On constate une surmortalité due aux suicides chez les salariés de cette entreprise.
M. Nicolas About. Ce n’est pas exact !
M. Jean Desessard. D’une manière générale, en France, on dénombre entre 11 000 et 12 000 suicides par an, dont 300 à 400 seraient directement liés aux conditions de travail. Les dirigeants des entreprises concernées sont responsables d’avoir pratiqué un management par le stress.
Le problème n’est pas strictement français : un salarié européen sur cinq déclare souffrir de troubles de santé liés au stress au travail.
Mais revenons à cet alinéa 4. Ce qui me dérange, c’est qu’il vise à supprimer discrètement l’expression collective des agents de La Poste sur leurs conditions de travail.
M. Nicolas About. Mais non ! Ce n’est pas fait pour ça !
M. Jean Desessard. Monsieur About, même avec les meilleures intentions du monde, on aboutit parfois à des résultats non désirés…
M. Nicolas About. Cette disposition est réintroduite un peu plus loin dans le texte !
M. Jean Desessard. Je ne souhaite pas que La Poste soit un jour obligée de mettre en place des numéros verts ou de créer des cellules psychologiques pour ses salariés victimes de troubles psychosociaux.
Vous arguerez que les agents de La Poste pourront de toute manière s’exprimer dans le cadre des comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail. Mais l’un n’empêche pas l’autre ! Deux instances de dialogue ne sont pas de trop, surtout quand on mesure l’étendue du mal-être au travail.
M. le président. Il faut conclure, mon cher collègue.
M. Jean Desessard. Je me dépêche, monsieur le président.
À mon sens, le Gouvernement et le rapporteur n’ont pas pris la mesure de la gravité de cette modification de la loi du 2 juillet 1990 relative à l’organisation du service public de la poste et des télécommunications.
Permettre la libre expression des salariés, y compris en matière de conditions de travail, au sein des instances de concertation est une disposition essentielle pour éviter d’en arriver aux extrémités que je viens d’évoquer.
M. le président. Concluez, monsieur Desessard !
M. Jean Desessard. Je conclus, monsieur le président !
Mieux vaut prévenir que guérir. Ce n’est pas en muselant l’expression des agents de La Poste que l’atmosphère de travail sera plus sereine.
M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour présenter l'amendement n° 502 rectifié.
M. Daniel Raoul. L’article 31 de la loi de la loi du 2 juillet 1990 relative à l’organisation du service public de la poste et des télécommunications prévoit qu’un « décret en Conseil d’État détermine les conditions dans lesquelles les agents de La Poste sont représentés dans des instances de concertation chargées d’assurer l’expression collective de leurs intérêts, notamment en matière d’organisation des services, de conditions de travail et de formation professionnelle. » Or l’alinéa 4 de l’article 8 du présent projet de loi vise à supprimer les mots : « de conditions de travail ».
Vous le comprendrez, une telle disposition nous paraît pour le moins maladroite, surtout après ce qui vient d’être évoqué par notre collègue Jean Desessard.
On constate un véritable malaise dans toutes les entreprises. Et, quoi qu’on en dise, cela ne concerne pas seulement les entreprises publiques. C’est également le cas, par exemple, dans les usines de construction automobile, chez Renault et ailleurs. En vérité, ce problème concerne toutes les grandes entreprises.
De mon point de vue, avec cet alinéa, vous ne faites qu’agiter un chiffon rouge, car cela ne pas changer grand-chose sur le fond. En effet, c’est au CHSCT qu’il appartient d’évoquer les conditions de travail. Mais il semble que le nombre de ces comités doive subir, dans le groupe La Poste, une réduction drastique !
Le moment est-il vraiment bien choisi, alors que le malaise grandit dans la société face aux exigences toujours plus importantes de productivité et de rendement, pour agiter ce chiffon rouge ?
Mes chers collègues, soyons un peu cohérents et évitons de rouvrir des plaies quand les salariés souffrent déjà beaucoup des conditions de travail qu’ils subissent au quotidien !
M. le président. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour présenter l'amendement n° 560.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Selon nous, ce projet de loi ne doit pas permettre à la direction de La Poste de créer une nouvelle exception aux obligations que le droit du travail met à la charge de tout employeur.
Cet amendement vise donc à retarder la suppression d’une garantie pour les salariés et à porter l’exigence de la création d’une autre garantie au moins équivalente.
La simple étude de l’état du droit du travail qui s’applique actuellement aux salariés de La Poste et l’observation de ses carences nous font craindre que la suppression envisagée des conditions de travail du champ de la compétence des comités techniques paritaires, les CTP, ne soit de nouveau l’abandon d’un droit et que celui-ci ne soit remplacé par aucun autre, ou seulement à terme.
Dans les entreprises de droit privé de plus de cinquante salariés, pour traiter des questions d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail, il y a les CHSCT. Les entreprises de droit public sont dotées d’organes équivalents, comme les comités d’hygiène et de sécurité, les CHS, ou les CTP, qui sont censés remplir les mêmes missions. Aujourd’hui, de telles structures existent au sein de La Poste. Elles fonctionnent de manière inégale et connaissent des difficultés pour accomplir véritablement les missions qui devraient être les leurs.
Cela tient à plusieurs facteurs : absence de volonté politique de donner un véritable rôle à ces instances ; noyautage de leur composition ; surtout, morcellement des régimes juridiques applicables au sein de La Poste.
Cependant, même si ces structures ne sont pas parfaites, elles ont le mérite d’exister et de représenter une garantie pour les salariés en matière d’hygiène, de sécurité et de conditions de travail, ce qui est tout simplement indispensable.
Or le présent article du projet de loi vise à exclure les conditions de travail des compétences des CTP ou des CHS pour l’attribuer à l’avenir à de futurs CHSCT de droit privé. Et nous n’avons aucune garantie quant à la date de la mise en place de ces CHSCT.
Par conséquent, il ne faut pas, nous semble-t-il, prendre le risque de renoncer à des instances sans avoir au préalable créé celles qui vont leur succéder.
À l’heure où les conditions de travail sont enfin l’objet d’attentions, au moment où le stress et la souffrance au travail commencent à être reconnus et étudiés, même par ce gouvernement, comment pourrait-on prendre un tel risque et abandonner ces droits au bon vouloir de la direction d’une société anonyme, qui aurait tout pouvoir de faire traîner la mise en place d’organes équivalents ?
C’est la raison pour laquelle nous ne pouvons pas accepter que les conditions de travail ne relèvent plus de la compétence des instances existant au sein de La Poste, et ce tant que de véritables CHSCT n’auront pas été crées.
M. le président. L'amendement n° 260, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Remplacer cet alinéa par trois alinéas ainsi rédigés :
2° Le troisième alinéa est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« Aux fins des négociations et de promulgation de cette convention collective unique, un décret en Conseil d'État détermine son champ d'application.
« Celui-ci veille notamment à assurer la représentation des agents de droit privé de La Poste dans des instances de concertation chargées d'assurer l'expression collective de leurs intérêts, notamment en matière d'organisation des services, de conditions de travail, de formation professionnelle, de dispositifs et de moyens d'action sociale. Il précise en outre, les conditions dans lesquelles la représentation individuelle des agents de droit privé est assurée, et établit les règles de protection, dont bénéficient leurs représentants. »
La parole est à Mme Évelyne Didier.
Mme Évelyne Didier. L’article 31 de loi du 2 juillet 1990 relative à l’organisation du service public de la poste et des télécommunications permettait l’emploi d’agents sous contrat à durée déterminée ou contrat à durée indéterminée à titre exceptionnel.
En quelques années, les recrutements relevant de « circonstances particulières » se sont banalisés, à tel point que les dirigeants de La Poste ont cessé, en 2002, d’organiser des concours d’accès à la fonction publique. Cette stratégie a provoqué un effet de ciseaux entre l’attribution du nombre de fonctionnaires et l’augmentation du nombre des salariés, avec des conséquences directes sur l’équilibre du régime de pension des postiers, qui fut réformé en 2006 avec les résultats que nous connaissons sur l’endettement du groupe La Poste.
Les salariés de la maison mère La Poste dépendent aujourd’hui de l’ancienne convention commune entre La Poste et France Télécom, qui est bien sûr perfectible, mais qui représente tout de même un léger mieux par rapport au droit du travail.
À la fin de l’année 2008, La Poste maison mère comptait 117 378 salariés et 154 699 fonctionnaires.
Malgré cela, bien des éléments restent à améliorer. Le différentiel de rémunération est significatif entre salariés et fonctionnaires, avec une rémunération nette moyenne de 1 394 euros pour premiers contre 1 747 euros pour les seconds, soit pratiquement 25 % de différence.
Entre les hommes et les femmes, la différence est de 10 %, au détriment de ces dernières. Vous en conviendrez, pour La Poste, qui se targue d’avoir reçu le label « égalité professionnelle », c’est peu glorieux !
Nous parlons ici des agents couverts par la convention de La Poste, mais il faut également évoquer les 10 000 salariés de la filiale Médiapost, qui est spécialisée dans la distribution de plis non adressés. Ces personnels, employés sur des postes à temps partiel imposé, sous-indemnisés pour leurs frais de transport et de déplacement, sont exclus du champ de la convention de La Poste et les discussions en cours sur la convention des agents du courrier ne les incluent pas.
En ce qui concerne la représentativité des salariés, je rappelle que, selon l’article 8 de la loi du 20 mai 2005 relative à la régulation des activités postales, un décret devait déterminer « les conditions dans lesquelles la représentation individuelle des agents de droit privé est assurée » et établir « les règles de protection, au moins équivalentes à celles prévues par le code du travail pour les délégués du personnel, dont bénéficient leurs représentants ». À ce jour, point de décret. Et pour cause ! En instaurant une zone de non-droit social pour les salariés, La Poste a créé un régime inégalitaire où l’entretien préalable au licenciement est souvent la seule suite donnée à des fautes qui entraîneraient une observation pour le collègue fonctionnaire.
Ainsi, le titre d’« employeur responsable » dont se réclame La Poste est bien un argument de communication, juste bon à récupérer des labels et des prix du manager de l’année…
Telles sont les raisons pour lesquelles nous avons déposé cet amendement.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Je demande la parole pour un rappel au règlement.
M. le président. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Je viens d’apprendre, monsieur le président, que l’amendement que nous avons accepté de déplacer de l’article 7 à l’article 8 à la demande M. le ministre, et qui porte maintenant le n° 562 rectifié, ne sera examiné qu’après l’amendement n° 325 rectifié, déposé par Mme Colette Giudicelli.
De ce fait, notre amendement n’aura plus d’objet et nous serons privés d’un débat qui nous semble déterminant.
M. Nicolas About. Mais votre amendement sera de toute façon présenté !
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Bien sûr, que je le présenterai !
Nous ne sommes pas responsables de la place qui avait été assignée à notre amendement et c’est dans un souci de cohérence ainsi que pour permettre un débat constructif que nous avons accepté de le déplacer.
M. Jean-Paul Emorine, président de la commission de l'économie. Il est en discussion commune avec les autres amendements !
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. S’il s’avérait que le débat n’est pas aussi approfondi que nous le souhaitons sur la question des organismes de retraite complémentaire, ce serait d’autant plus regrettable que le régime et les conditions de retraite sont en train de se dégrader gravement dans notre pays.
M. le président. Chère collègue, cet amendement sera, bien entendu, présenté et discuté de la même manière que tous ceux qui font partie de la discussion commune ; par ailleurs, si celui de Mme Giudicelli vient avant le vôtre dans cette discussion, c’est tout simplement qu’il a été déposé le 30 octobre, c'est-à-dire avant le vôtre.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Nous avions déposé le nôtre avant ! La prochaine fois, nous refuserons de déplacer un de nos amendements !
M. le président. Si votre amendement a été déplacé, c’est qu’il n’était pas placé au bon endroit !
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Tout cela n’honore pas la démocratie !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Christian Estrosi, ministre. Permettez-moi d’apporter une précision.
Le Gouvernement souhaite que les quatre amendements qui traitent de la question de l’affiliation des agents de La Poste à des organismes de retraite complémentaire soient, évidemment, tous présentés et, surtout, qu’ils puissent être discutés ensemble. Vous n’avez, madame Gonthier-Maurin, aucune inquiétude à vous faire à ce sujet.
Votre amendement sera examiné et le débat sera le plus approfondi possible. C’est un sujet suffisamment grave et important pour que tous les amendements soient confrontés les uns aux autres dans le cadre d’une discussion commune.
M. Jean-Paul Emorine, président de la commission de l'économie. Très bien !
M. le président. Ces quatre amendements sont en discussion commune avec douze autres amendements, mais nous ferons en sorte qu’ils fassent l’objet d’un débat spécifique.
M. Daniel Raoul. C’est exactement la solution que, en tant que secrétaire du Sénat, je voulais vous proposer, monsieur le président !
M. le président. Je vous remercie de votre soutien, mon cher collègue !
Pour le moment, nous poursuivons la présentation des amendements dans l’ordre qui est indiqué sur le « dérouleur ».
M. le président. L'amendement n° 325 rectifié, présenté par Mme Giudicelli et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Compléter cet article par cinq alinéas ainsi rédigés :
... ° Sont ajoutés quatre alinéas ainsi rédigés :
« Les salariés affiliés à l'Institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l'État et des collectivités publiques à la date d'adhésion de l'entreprise La Poste à des institutions de retraite complémentaire visées à l'article L. 922-1 du code de la sécurité sociale, y demeurent jusqu'à la rupture du contrat qui les lie à leur employeur ou à leur transfert vers une entreprise adhérente d'une institution visée audit article.
« Les droits acquis par ces affiliés, les adhérents antérieurs, ainsi que leurs ayants droit sont maintenus à l'Institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l'État et des collectivités publiques.
« Une convention entre les fédérations d'institutions de retraite complémentaire visées à l'article L. 922-4 du code de la sécurité sociale et l'Institut de retraite complémentaire des agents non titulaires de l'État et des collectivités locales organise les transferts financiers entre ces organismes en tenant compte des charges et des recettes respectives.
« L'adhésion de l'entreprise La Poste à des institutions de retraite complémentaire visées à l'article L. 922-1 du code de la sécurité sociale intervient dans les six mois suivant la signature de la convention mentionnée au troisième alinéa du présent article et au plus tard au 31 décembre 2010. »
La parole est à Mme Catherine Procaccia.
Mme Catherine Procaccia. Monsieur le président, je souhaite rectifier cet amendement de manière que les alinéas que nous proposons d’insérer le soient au début de l’article 8 et qu’ils constituent un nouvel article de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990.
M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 325 rectifié bis, présenté par Mme Giudicelli et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, et ainsi libellé :
Au début de cet article insérer cinq alinéas ainsi rédigés :
I - Après l'article 29-5 de la même loi, il est inséré un article 29-6 ainsi rédigé :
« Art 29-6 - Les salariés affiliés à l'Institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l'État et des collectivités publiques à la date d'adhésion de l'entreprise La Poste à des institutions de retraite complémentaire visées à l'article L. 922-1 du code de la sécurité sociale, y demeurent jusqu'à la rupture du contrat qui les lie à leur employeur ou à leur transfert vers une entreprise adhérente d'une institution visée audit article.
« Les droits acquis par ces affiliés, les adhérents antérieurs, ainsi que leurs ayants droit sont maintenus à l'Institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l'État et des collectivités publiques.
« Une convention entre les fédérations d'institutions de retraite complémentaire visées à l'article L. 922-4 du code de la sécurité sociale et l'Institut de retraite complémentaire des agents non titulaires de l'État et des collectivités locales organise les transferts financiers entre ces organismes en tenant compte des charges et des recettes respectives.
« L'adhésion de l'entreprise La Poste à des institutions de retraite complémentaire visées à l'article L. 922-1 du code de la sécurité sociale intervient dans les six mois suivant la signature de la convention mentionnée au troisième alinéa du présent article et au plus tard au 31 décembre 2010. »
Veuillez poursuivre, Mme Procaccia.
Mme Catherine Procaccia. L’amendement que je vous présente au nom du groupe UMP vise à répondre à la forte attente dont les syndicats ont fait part lors des concertations menées par Christian Estrosi pour préparer le changement de statut de La Poste et à l’inquiétude que nos collègues ont exprimée jusqu’à présent sur cette question.
L’affiliation à l’IRCANTEC concerne les entreprises et les administrations publiques. Avec le passage au statut de société anonyme, les agents contractuels qui sont actuellement sous le régime de l’IRCANTEC devraient basculer dans un régime AGIRC-ARRCO de droit privé, moins protecteur que l’IRCANTEC et un peu plus coûteux.
Or le changement de statut de l’entreprise ne doit pas être préjudiciable aux salariés ni marquer un quelconque recul social. Il ne doit pas, non plus, inquiéter les personnels.
C’est pourquoi l’amendement 325 rectifié bis vise à introduire une disposition qui prévoit de garantir aux agents contractuels de La Poste actuellement en place – j’insiste bien sur ce dernier point – le maintien de leur intégration dans le régime de l’IRCANTEC.
Afin de respecter l’équilibre des régimes complémentaires retraite, mais également les impératifs communautaires, les salariés nouvellement embauchés à partir du 1er janvier 2010 se verront donc soumis, eux, à un régime de droit privé et affiliés à l’AGIRC-ARRCO. Il s’agit de dispositions que la commission des affaires sociales, en matière de vieillesse, a déjà proposées et fait voter à de nombreuses occasions.
Nous ne voulons pas déstabiliser l’IRCANTEC en la privant des 100 000 contractuels de La Poste qui sont actuellement affiliés à cette institution. Une convention entre les fédérations des complémentaires retraite et l’IRCANTEC précisera donc les modalités de mise en œuvre de ce dispositif, ainsi que le montant de la soulte qui devra être versée par l’AGIRC-ARRCO à l’IRCANTEC, afin de garantir à celle-ci un équilibre pérenne.
Cet amendement, que nous croyons juste et équilibré, respecte les conclusions du rapport de Pierre Hérisson, mais également l’esprit d’amendements déposés par d’autres groupes, car il s’agit bien d’une préoccupation commune. En adoptant une telle disposition, nous montrerions que nous savons dépasser les clivages politiques. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. L'amendement n° 501 rectifié, présenté par MM. Teston, Domeizel, Botrel, Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter cet article par quatre alinéas ainsi rédigés :
...° Sont ajoutés trois alinéas ainsi rédigés :
« Les affiliés et les bénéficiaires du régime complémentaire de retraite géré par l'Institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l'État et des collectivités publiques, ainsi que leurs ayants droit, continuent de relever de ce régime à la date de transformation de La Poste en société anonyme. Les droits acquis par les personnels partis à cette même date et ceux de leurs ayants droit sont maintenus au régime précité.
« Les cotisations relatives aux salariés de La Poste versées aux différents régimes de retraite complémentaire obligatoire sont réparties chaque année dans chacun de ces régimes au prorata des charges de retraite qui leur incombent.
« Les modalités de mise en œuvre du présent article font l'objet d'une convention à conclure avant le 30 juin 2010 entre les fédérations d'institutions de retraite complémentaire visées à l'article L. 922-4 du code de la sécurité sociale et l'Institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l'État et des collectivités publiques. La Poste intervient à cette convention en qualité d'employeur détenteur des informations nécessaires à la répartition annuelle mentionnée à l'alinéa précédent. Cette convention organise les transferts financiers entre ces organismes. Un décret fixe les modalités de ces transferts financiers, à défaut de conclusion d'une convention dans le délai fixé ci-dessus. »
La parole est à M. Michel Teston.
M. Michel Teston. Le changement de statut de la Poste n’a pas que des conséquences sur l’entreprise et sur le service public. Il pose de sérieuses questions relatives au régime de retraite, questions que le rapporteur a soulevées sans pour autant proposer de solution.
Il est tout de même préoccupant de constater que le Gouvernement veut faire passer une loi à la va-vite, sans se soucier des conséquences pour le régime complémentaire de retraite de l’IRCANTEC.
Nous ne pouvons que nous interroger sur le niveau de préparation d’un projet de loi qui laisse aux deux assemblées le soin de régler une question qui, pour être technique, n’en est pas moins essentielle.
Nous sommes inquiets devant la multiplication de projets de loi insuffisamment préparés. L’affichage permanent de la réforme conduit de plus en plus le Gouvernement à l’imprécision.
Les agents contractuels de La Poste, soit 155 000 personnes, qui cotisent pour l’heure à l’IRCANTEC seront affiliés au régime AGIRC-ARRCO après le changement de statut, ce qui représente pour l’IRCANTEC une perte de recettes considérable. Il importe donc de trouver une solution viable qui ne fragilise pas cet établissement à court, à moyen et à long terme. La sortie des cotisations des contractuels de La Poste se traduirait par une perte nette pour l’IRCANTEC annulant les effets de la réforme de cette institution qui est intervenue en 2008.
Cependant le maintien des salariés sans mesure compensatoire à l’avenir est tout aussi préoccupant : les nouveaux salariés de La Poste iront dans le régime AGIRC-ARRCO et ne cotiseront pas à l’IRCANTEC, qui verra ainsi ses recettes diminuer faute de cotisants nouveaux tandis que les dépenses augmenteront avec l’arrivée progressive à la retraite des anciens cotisants.
Il nous importe donc de trouver une réelle solution pour ce problème financier de poids.
Le versement d’une soulte par l’AGIRC-ARRCO est-il envisageable ? Quel pourrait en être le montant ? Outre les immanquables contestations qui se produiront sur les montants, cette opération ne contribuera-t-elle pas à affaiblir les deux organismes de retraite ?
En tout état de cause, il faut tenter de préserver les droits acquis des salariés. Nous proposons donc de maintenir aux retraités et aux salariés actuels contractuels de droit privé de La Poste le bénéfice de leur retraite complémentaire lié à leur affiliation au régime de l’IRCANTEC.
Cet amendement vise également à préserver l’équilibre financier du régime de l’IRCANTEC, ce qui nous paraît être la moindre des choses.
M. le président. L'amendement n° 562 rectifié, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Compléter cet article par trois alinéas ainsi rédigés :
...° Sont ajoutés deux alinéas ainsi rédigés:
« Les agents contractuels et salariés de droit privé de la Poste demeurent soumis aux dispositions du décret n° 70-1277 du 23 décembre 1970 portant création d'un régime de retraite complémentaire des ressources sociales en faveur des agents non titulaires de l'État et des collectivités publiques.
« Les conditions d'application de l'alinéa ci-dessus sont précisées par décret en Conseil d'État. »
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Je l’ai dit précédemment, nous craignons que les ressources de l’IRCANTEC ne soient complètement déstabilisées par le non-assujettissement de salariés.
M. le président. L'amendement n° 261, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - L'article 31-2 de la même loi est ainsi rédigé :
« Art. 31-2. - Les organisations syndicales représentatives peuvent être saisies et porter avis sur les projets d'organisation de portée nationale ou sur des questions d'actualité.
« Elles peuvent proposer toute démarche alternative aux dites orientations stratégiques.
« La négociation d'accords collectifs dans tous les domaines sociaux afférents à l'activité postale est soumise à des instances de concertation et de négociation établies au niveau national et au niveau territorial, après avis des organisations syndicales représentatives. »
La parole est à M. Jean-François Voguet.
M. Jean-François Voguet. En l’absence de comité d’entreprise, les organisations syndicales représentatives sont cantonnées à des commissions d’échange stratégique. Lorsque celles-ci se réunissent, les projets d’établissement public sont présentés, mais ne donnent lieu à aucun vote. Ces instances sont un lieu d’information souvent partielle et de concertation de façade. Il n’y a pas de négociation puisque le rapport de force possible dans une instance équitablement constituée entre représentants des travailleurs et de l’entreprise est exclu de ces commissions.
La stratégie du groupe La Poste est établie au niveau de son comité exécutif, avec l’aval de l’Agence des participations de l’État, devenue omniprésente depuis 2003. Avec ce contrôle de l’État actionnaire, et non pas propriétaire, rien d’étonnant à ce que les relations contractuelles entre l’employeur et les représentants du personnel de La Poste soient des plus réduites.
La Poste est le plus gros employeur de France après l’État. Ses employés salariés souffrent bien d’une situation préjudicielle chronique. L’entretien d’un secteur « hors droit du travail » représente une véritable discrimination pour près de 120 000 personnes. Plus que d’information et de concertation, ces salariés ont besoin de véritables instances de négociation. C’est en ce sens que nous proposons de réécrire l’article 31-2 de la loi du 2 juillet 1990.
M. le président. L’amendement n° 561, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - Les modifications introduites par le présent article ne prennent effet qu’après la mise en application effective des dispositions relatives aux institutions représentatives du personnel.
La parole est à Mme Évelyne Didier.
Mme Évelyne Didier. Avec l’article 8, nous nous trouvons au cœur de la spécificité de La Poste, à savoir la règle du « ni-ni » : les agents contractuels de La Poste ne sont ni protégés par les dispositions propres aux fonctionnaires, ni protégés par le code du travail.
M. Jean Desessard. Absolument !
Mme Évelyne Didier. Leur statut est, pour une grande part, conventionnel et la multiplication des conventions applicables à La Poste n’est pas pour nous rassurer. Les conventions sont, par nature, moins protectrices que la loi, particulièrement depuis que ce gouvernement a mis en place un mécanisme d’inversion de la hiérarchie des normes, plaçant les conventions au-dessus de la loi, quand bien même ces conventions seraient moins favorables que la loi !
Par ailleurs, ces conventions, lorsqu’elles existent, sont imparfaites. Et ce qui vaut pour les conventions vaut également pour les décrets. Vous ne pouvez pas l’ignorer, et les salariés de la Poste le savent bien, le décret prévu par l’article 31 de la loi du 2 juillet 1990 relative à l’organisation du service public de la poste et à France Télécom n’a pas encore été publié, notamment en ce qui concerne les dispositions propres à la représentation des agents dans les instances concernant l’hygiène et la sécurité du travail.
C’est pourquoi cet amendement n° 561 tend à subordonner l’entrée en vigueur de cet article 8 à la mise en application effective des dispositions relatives aux institutions représentatives du personnel.
Cette disposition est attendue par les salariés, qui ne supportent plus, et c’est légitime, d’être placés dans une sorte de no man’s land juridique. La Poste, parce qu’elle est chargée de missions de service public et parce que, pour quelque temps encore, son capital est détenu majoritairement par l’État ou des personnes publiques, doit être un employeur exemplaire !
M. le président. L’amendement n° 595, présenté par MM. Fortassin, Tropeano, Charasse et Collin, Mmes Escoffier et Laborde et MM. Mézard et Milhau, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - Le maintien des droits acquis sera assuré aux contractuels de droit public transférés, notamment au titre de leur affiliation au régime de l’Institut de retraite complémentaire des agents non titulaires de l’État et des collectivités locales.
La parole est à M. Yvon Collin.
M. Yvon Collin. En défendant cet amendement, je rejoins les préoccupations exprimées par certains des intervenants qui m’ont précédé.
Certes, le statut des agents de La Poste fonctionnaires d’État est conservé et les garanties associées à ce statut en termes d’emploi et de retraite seront maintenues. Mais quel sera le sort réservé aux agents contractuels, de plus en plus nombreux à La Poste ? Ils risquent de devoir subir le changement de statut puisque le projet de loi, en l’état, ne prévoit pas le maintien de leur régime d’affiliation à l’IRCANTEC.
Actuellement, plus de 100 000 salariés contractuels de droit privé bénéficient du régime d’affiliation à l’IRCANTEC, du fait du statut actuel d’EPIC de La Poste. Or, demain, les contractuels nouvellement embauchés relèveront des conventions collectives et de l’affiliation à l’AGIRC-ARRCO, alors que cette situation est moins avantageuse que celle dont jouissent les salariés actuellement employés.
Il convient d’ajouter que l’arrêt du flux de nouveaux entrants fragiliserait le régime de l’IRCANTEC, qui perdrait plus d’un tiers de ses cotisants, comme l’a expliqué notre collègue Michel Teston.
Notre amendement vise donc à maintenir les droits des contractuels, malgré la transformation et le changement de statut de La Poste prévus par ce projet de loi. Cet amendement, déjà présenté en commission par des collègues de mon groupe, avait donné lieu à un débat, compte tenu de l’enjeu pour les salariés contractuels de La Poste. M. le ministre s’était alors dit favorable à cette disposition, mais avait préféré attendre les réunions des deux caisses de retraite avant de se prononcer sur le dispositif qu’il souhaitait approuver. En commission, la solution du basculement de l’ARGIRC-ARRCO vers l’IRCANTEC avait été envisagée.
Avec plusieurs de mes collègues, nous maintenons notre proposition et attendons de connaître les positions et, plus encore, les propositions de M. le rapporteur et de M. le ministre en faveur des personnels contractuels de La Poste. Ces derniers ne doivent pas être victimes du changement de statut de leur entreprise.
M. le président. Quel est l’avis de la commission, dans un premier temps, sur les amendements nos 246, 325 rectifié bis et les trois autres amendements qui traitent du régime de retraite complémentaire ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Les auteurs de l’amendement n° 246 proposent de réintroduire une version de l’article 31 de la loi du 2 juillet 1990 antérieure à 1996. Autant dire que cette version, qui fait référence aux « exploitants publics », serait aujourd’hui parfaitement anachronique. Avis défavorable.
L’amendement n° 325 rectifié bis recueille un avis favorable.
Les auteurs de l’amendement n° 501 rectifié défendent une solution proche de celle de l’amendement nº 325 rectifié bis, mais qui me paraît toutefois moins adaptée et moins consensuelle. En effet, ils proposent que les cotisations soient réparties « au prorata des charges de retraite ». Je leur suggérerai donc de retirer leur amendement. À défaut, la commission émettrait un avis défavorable.
Comme je l’ai indiqué tout à l’heure en m’exprimant sur l’amendement n° 562, avant qu’il ne soit transféré à l’article 8, la commission partage la volonté de régler le problème de la retraite complémentaire des agents de La Poste. Cependant, ainsi que je viens de m’en expliquer, il nous semble que l’amendement n° 325 rectifié bis est plus complet. Aussi demandons-nous également le retrait de l’amendement n° 562 rectifié.
En ce qui concerne l’amendement n° 561…
M. le président. Monsieur le rapporteur, pourriez-vous d’abord nous exposer l’avis de la commission sur l’amendement n° 595, qui traite du même sujet que les précédents ?
Nous ne voulons pas donner à ceux de nos collègues à qui il a été demandé de déplacer un amendement le sentiment – sentiment au demeurant tout à fait infondé – d’avoir été abusés. C’est pourquoi j’ai indiqué que les quatre amendements qui ont trait au régime de retraite et qui émanent de quatre groupes politiques feraient en quelque sorte l’objet d’un « mini-débat » à l’intérieur d’une discussion commune qui concerne également douze autres amendements. Il ne faudrait pas, en effet, que le vote du premier de ces amendements prive, de fait, les uns ou les autres de la possibilité de s’expliquer pleinement sur leur position quant au problème en cause. Il s’agit de ne pas brimer les groupes qui, à juste titre, ont déposé des amendements quasi semblables.
Je demande à la commission de coopérer à la mise en œuvre de cette modalité un peu particulière de discussion.
La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean-Paul Emorine, président de la commission de l’économie. Monsieur le président, je me permets de faire observer que M. le rapporteur et moi-même sommes présents au banc de la commission, sans discontinuer, depuis le lundi 2 novembre, à seize heures : je vous demanderai donc de faire preuve d’indulgence à notre égard !
M. le rapporteur a fourni un énorme travail et, si des temps morts sont parfois à déplorer dans notre débat, ils ne sont pas imputables à la commission !
M. le président. Monsieur le président, je vous donne acte de votre déclaration. Je suis le premier à apprécier le travail du président de la commission et du rapporteur, mais j’ai pris soin d’informer tout le monde de ce très léger bouleversement par rapport aux modalités habituelles d’une discussion commune.
Si les changements de dernière minute qui sont intervenus à la suite du déplacement d’un amendement ont pu créer une impression de désorganisation du débat, croyez bien que je le regrette !
Monsieur le rapporteur, veuillez donc poursuivre la présentation des avis de la commission sur les amendements qui font l’objet de cette discussion commune, mais en la reprenant à l’amendement n° 595.
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Monsieur le président, cet amendement, qui a été présenté par M. Collin, appelle la même appréciation que les amendements nos 501 rectifié et 562 rectifié : l’amendement n° 325 rectifié bis, présenté par Mme Procaccia, est consensuel et complet, il répond à toutes les inquiétudes exprimées ce matin et synthétise toutes les propositions émises sur ce sujet très important. C’est pour cette raison que je propose à M. Teston, à Mme Gonthier-Maurin et à M. Collin de se rallier à l’amendement n° 325 rectifié bis, étant bien entendu qu’il ne s’agit pas d’une demande de rejet !
M. le président. Nous arrivons ainsi à une conclusion bénéfique pour tout le monde !
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Je reprends maintenant les amendements dans l’ordre initial.
L’amendement n° 235 tend à la suppression de l’alinéa 2 de l’article 8 et reçoit un avis défavorable.
En ce qui concerne l’amendement n° 255, compte tenu de la grande diversité des métiers exercés par les agents contractuels au sein de La Poste, il ne semble pas possible, ni même souhaitable, de réunir les conventions collectives actuelles en une seule convention. Avis défavorable.
L’amendement n° 500 recueille également un avis défavorable, pour les raisons que j’ai invoquées au sujet de l’amendement n° 246.
Même avis sur l’amendement n° 413.
En ce qui concerne l’amendement n° 301, je ne vois pas concrètement ce que l’ajout de l’expression « dispositions du code du travail » procurera comme avantage supplémentaire aux agents contractuels de La Poste. Avis défavorable.
Les amendements identiques nos 300, 502 rectifié et 560 tendent à la suppression de l’alinéa 4 de l’article 8. Les questions relatives aux conditions de travail ayant vocation à être discutées dans le cadre des comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail, nous n’avions pas émis d’objection à la suppression de cet alinéa. Néanmoins, la commission souhaiterait entendre l’avis du Gouvernement sur ce point.
L’amendement n° 260 recueille un avis défavorable car, de même que l’amendement n° 255, il tend à soumettre l’ensemble des contractuels de La Poste à une convention collective unique.
L’amendement n° 261 est déjà largement satisfait par le droit en vigueur. Avis défavorable.
Enfin, la commission est défavorable à l’amendement n° 561. Le dialogue social au sein de La Poste est satisfaisant et je ne vois pas pourquoi il faudrait retarder l’entrée en vigueur des dispositions de l’article 8.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Estrosi, ministre. Je veux d’abord rappeler que nous débattons depuis maintenant cinquante-deux heures. Je tiens d’ailleurs à saluer les nombreux sénateurs qui, sur toutes les travées, ont consacré presque tout leur temps à ce débat. Il n’est guère étonnant que, au bout de cinquante-deux heures, ils commencent à en ressentir quelques effets…
Je veux, bien sûr, saluer aussi les présidents qui se sont succédé, ainsi que l’ensemble des membres de la Haute Assemblée qui se sont relayés dans l’hémicycle tout au long de la semaine.
Enfin, je rends hommage au travail réalisé par la commission, son président, son rapporteur et tous les collaborateurs qui les accompagnent et les conseillent, ainsi que par mes propres collaborateurs. Depuis cinquante-deux heures, nous n’avons pas non plus fait défaut !
Nous avons abordé l’examen d’un article très sensible parce qu’il touche aux droits des salariés. Je considère que c’est un sujet trop important pour que nous nous dispensions de l’aborder vraiment à fond : nous sommes tous convaincus que nous n’avons pas droit à l’erreur vis-à-vis des droits sociaux de chacun de ces salariés et de leur avenir professionnel.
Je souhaite, pour commencer, répondre à l’intervention de M. Teston sur l’article 8. Selon lui, il n’y a pas de CHSCT à La Poste.
M. Michel Teston. Je n’ai pas dit cela !
M. Christian Estrosi, ministre. Il en existe bien ! On dénombre actuellement plus de mille CHSCT à La Poste, et ils traitent bien sûr des conditions de travail.
M. Martial Bourquin. Ils sont en voie de réduction drastique !
M. Christian Estrosi, ministre. Effectivement, monsieur Bourquin, vous avez fait part de votre inquiétude de voir leur nombre baisser de manière « drastique », pour reprendre vos termes. Nous veillerons, je veux le confirmer ici, à ce que tel ne soit pas le cas, car, tout comme vous, nous sommes très attentifs à ces sujets.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Nous sommes rassurés !
M. Christian Estrosi, ministre. Je voudrais aussi apporter une précision sur le décret prévu à l’article 31 de la loi du 2 juillet 1990. Le décret relatif à l’expression collective des agents a bien été pris. Il porte précisément sur les comités techniques paritaires. Je tiens à le signaler, afin que ce point figure bien au procès-verbal de nos débats.
Il y a quelques semaines, avant même que nous entamions cette discussion, j’ai souhaité rencontrer, en présence du président de La Poste, l’ensemble de la direction et des cadres dirigeants de l’entreprise, soit plus de 300 personnes. Je tenais à leur dire que, dans le débat qui allait s’ouvrir au Parlement – à la demande de La Poste elle-même, comme Gérard Longuet, notamment, l’a rappelé, en vue garantir son avenir, sa modernisation, les conditions dans lesquelles elle affronterait la concurrence –, nous avions l’intention de répondre à certaines de leurs demandes, mais que, pour autant, il ne saurait être question d’un chèque en blanc !
Dans cette optique, j’ai exposé les trois exigences du Gouvernement.
Premièrement, cette modernisation ne doit se faire à aucun moment sur le dos des fonctionnaires et des salariés de La Poste. Dans le cadre de cet investissement sur l’avenir, le personnel ne doit pas être la variable d’ajustement ! J’attache en effet une importance toute particulière au volet social de cette réforme.
Deuxièmement, il faut porter aux élus toute la considération à laquelle ils ont droit. Ainsi que certains d’entre vous, sur toutes les travées, l’ont rappelé hier, ces élus ne sont pas toujours consultés sur le fond des dossiers et ont souvent connaissance a posteriori de décisions qui ont été prises et qui, pourtant, concernent leur collectivité.
Troisièmement, nous devons nous tourner le plus possible vers les usagers, afin d’améliorer le service public, plutôt que de le faire régresser.
J’en viens maintenant aux différents amendements, que j’évoquerai, pardonnez-moi, monsieur le président, dans l’ordre qui me paraît le plus commode au regard des avis que j’ai à formuler.
Sur les amendements nos°246, 235, 255, 500, 413, 301, 260, 261 et 561, l’avis du Gouvernement est défavorable.
En revanche, il est favorable sur les amendements identiques nos 300, 502 rectifié et 560, qui émanent respectivement des sénateurs Verts, du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG. Voici pourquoi.
La Poste est particulièrement attentive aux conditions de travail. Elle a mis en place un observatoire de la santé au travail en 2008 et négocie actuellement avec les syndicats un accord sur la santé au travail.
Le quatrième alinéa de l’article 8 du présent projet de loi a été ajouté par le Conseil d’État pour des raisons juridiques : selon lui, l’expression « de conditions de travail » était, sur un plan formel, mal placée. Vous savez pertinemment, mesdames, messieurs les sénateurs, que le Gouvernement est tenu de présenter au Parlement les projets de loi tels qu’ils ressortent de leur examen par le Conseil d’État, même s’il n’est pas forcément en accord avec la formulation retenue dans ce cadre.
Or les positions défendues à travers ces amendements nos 300, 502 rectifié et 560 rejoignent complètement notre vision des choses : ce quatrième alinéa donne à penser que les salariés ne pourraient pas s’exprimer sur leurs conditions de travail. C’est pourquoi je suis favorable à sa suppression.
J’en arrive aux quatre amendements qui ont pour objet le régime de retraite complémentaire des agents contractuels de La Poste.
Lors de l’examen de l’article 7, j’ai demandé que l’amendement défendu au nom du groupe CRC-SPG par Mme Brigitte Gonthier-Maurin et qui porte sur ce sujet soit déplacé. Il n’y avait là, de ma part, aucune intention de fausser en quoi que ce soit le débat. Au contraire, je souhaitais que nous puissions avoir une discussion commune sur tous les amendements présentés sur ce point : ils visent en effet à atteindre le même objectif et à apporter les mêmes garanties.
Ces quatre amendements ont été défendus ; la suite de la discussion permettra à chacun de réagir sur ces propositions. Le débat aura donc lieu, et c’est tant mieux car, tout comme les salariés, les responsables de La Poste et l’ensemble des sénateurs, je souhaitais ce débat.
Sur les amendements n° 501 rectifié du groupe socialiste, n° 562 rectifié du groupe CRC-SPG, n° 595 du groupe RDSE et n° 325 rectifié bis de Mme Colette Giudicelli, défendu par Mme Catherine Procaccia au nom du groupe UMP, ma position est donc la suivante.
Il se trouve que le Gouvernement s’est engagé à ce que la situation des personnels employés actuellement par La Poste ne soit pas affectée par le changement de statut de l’entreprise. Il s’agit d’une revendication légitime des syndicats et des élus, comme en témoignent ces quatre amendements. Je vous remercie d’ailleurs de cette contribution.
Je suis donc très favorable à l’amendement n°325 rectifié bis, qui apporte une vraie garantie aux salariés de La Poste. Seuls les contractuels qui seront recrutés postérieurement à la date d’adhésion de La Poste au régime de l’AGIRC-ARRCO seront affiliés à ce régime. Les contractuels en place actuellement pourront continuer à être affiliés à l’IRCANTEC. Leurs droits acquis seront intégralement préservés. L’AGIRC-ARRCO versera une soulte financière à l’IRCANTEC.
Pourquoi demander le retrait des amendements nos 501 rectifié, 562 rectifié et 595 au profit de l’amendement n°325 rectifié bis, qui pourrait ainsi être adopté à l’unanimité ? Tout simplement parce qu’il me paraît être, sur le plan technique, le plus complet, et je suis sûr que tous ceux qui, parmi vous, sont de fins connaisseurs du sujet seront prêts à en convenir. Il précise en effet, dans le détail, la prise en compte des ayants droit, le principe de la soulte financière, l’échéance de mise en place du dispositif, les références exactes au code de la sécurité sociale.
Ces précisions permettent une plus grande efficacité, tout en soutenant la même vision, la même volonté au service des salariés qu’expriment les trois autres propositions.
À ce sujet, monsieur Teston, je veux tout de même vous apporter une précision sur le dispositif IRCANTEC. Vous avez estimé tout à l’heure – et, d’une certaine manière, cela me blesse – que ce texte était proposé dans la précipitation et comportait des imprécisions. Or j’ai annoncé le dispositif IRCANTEC dès le mois de juillet. Des dizaines de réunions de travail ont été organisées à Bercy, avec le ministère de l’économie, le ministère de l’industrie, le ministère du budget, le ministère du travail et des relations sociales, l’AGIRC-ARRCO, l’IRCANTEC et l’ensemble des organisations salariales, que j’ai eu l’occasion de recevoir à de nombreuses reprises.
Le principe d’une soulte a été acté et l’amendement soutenu par Mme Procaccia évoque bien des « transferts financiers », ce qui me paraît fondamental. L’AGIRC-ARRCO versera à l’IRCANTEC une soulte dont le montant n’est pas encore déterminé. Des travaux sont en cours sur le sujet, sachant que ces calculs sont toujours longs. En l’occurrence, il est question de milliards d’euros et de projections démographiques à cinquante ans. Nous ne prenons pas une décision pour les six mois ou les cinq ans qui viennent ! Nous parlons d’une échéance de cinquante ans !
Les engagements sont pris et le travail a débuté : nous vous demandons, en acceptant de voter l’amendement n° 325 rectifié bis, de prendre acte de ces garanties que nous apportons pour cinquante ans. C’est pourquoi, d’ailleurs, l’amendement fait apparaître une date butoir, au-delà de laquelle la situation sera définitivement arrêtée.
Je me permets donc de vous signaler, monsieur Teston, que votre amendement est beaucoup moins précis que celui qu’a déposé Mme Giudicelli et qu’a défendu Mme Procaccia.
En résumé, je demande aux auteurs des trois autres amendements tendant à aller dans une direction identique de se rallier à ce seul amendement n° 325 rectifié bis, pour qu’il puisse être adopté à l’unanimité.
M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à treize heures, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Roland du Luart.)
PRÉSIDENCE DE M. Roland du Luart
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
Nous reprenons la discussion du projet de loi relatif à l’entreprise publique La Poste et aux activités postales.
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus aux explications de vote à l’amendement n° 246 au sein de l’article 8.
La parole est à Mme Mireille Schurch.
Mme Mireille Schurch. La privatisation va provoquer une onde de choc déstabilisante pour les postiers. Le changement de statut aura des répercussions importantes sur leur régime de retraite, en entraînant l’extinction des droits précédemment acquis, qui étaient liés au statut public, et une baisse générale des garanties qui leur sont offertes.
Nous sommes inquiets des difficultés auxquelles va être confrontée l’IRCANTEC. Nous ne comprenons pas pourquoi les nouveaux arrivants ne pourraient pas bénéficier, eux aussi, de la protection de ce régime.
C'est la raison pour laquelle, même si nous avons prêté attention à votre proposition, monsieur le ministre, nous préférons nos amendements, qui apportent des précisions utiles.
M. le président. La parole est à M. Michel Teston, pour explication de vote sur l'amendement n° 325 rectifié bis.
M. Michel Teston. L’amendement n° 325 rectifié bis présenté par Mme Procaccia a été largement inspiré par le Gouvernement. (Protestations sur les travées de l’UMP.) Mes chers collègues, j’ai bien le droit de le faire remarquer !
Dans mon intervention lors de la discussion générale, j’ai souligné des conséquences importantes que pouvait entraîner l’adoption de ce projet de loi. L’article 8 en est la parfaite illustration, avec la question du régime complémentaire de retraite des 160 000 contractuels de La Poste.
L’amendement qui nous est proposé apporte une réponse pour les trois ou quatre prochaines années, avec un système de soulte que M. le ministre nous a décrit. Mais que se passera-t-il ensuite ? En toute vraisemblance, le régime de l’IRCANTEC sera déséquilibré…
M. Roland Courteau. C’est certain !
M. Michel Teston. … puisqu’il y aura beaucoup moins de cotisants pour un nombre croissant de retraités. Comment allons-nous assurer l’équilibre de ce régime qui, je le rappelle, couvre bien d’autres personnels, notamment des collectivités territoriales ?
Avec cet amendement, nous restons sur notre faim, même si nous prenons acte du fait qu’il apporte une réponse dans un premier temps. Nous préférerions que ce soient nos propres amendements qui soient adoptés.
Dans ces conditions, nous nous abstiendrons lors du vote sur l’amendement n° 525 rectifié bis. Nous souhaitons que les membres de notre assemblée puissent se prononcer sur les amendements de l’opposition, qu’il s’agisse des nôtres, de ceux du groupe CRC-SPG ou ceux des Verts. Lors des explications de vote sur l’article 8, j’aurai l’occasion de dire tout le « bien » que je pense de cet article.
M. Jean Desessard. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Christian Estrosi, ministre. Monsieur Teston, malgré tout le respect que je vous dois, je ne peux vous laisser dire que l'amendement n° 325 rectifié bis n’apporte qu’une solution pour les trois ou quatre années qui viennent.
M. Michel Teston. Mais si !
M. Christian Estrosi, ministre. Votre amendement va dans le même sens que l'amendement n° 325 rectifié bis, à une différence près : alors que ce dernier précise les engagements jusqu’à l’extinction des droits des salariés – c'est-à-dire, je l’espère, pour les trente, quarante ou cinquante prochaines années –, le vôtre reste très vague. Nous pourrions, comme nous l’avons fait sur d’autres sujets, nous retrouver sur ce sujet, si vous acceptiez de retirer votre amendement pour voter l’amendement n° 325 rectifié bis, qui est beaucoup plus précis et qui garantit l’avenir de tous les salariés actuels de La Poste.
M. le président. La parole est à M. Martial Bourquin, pour explication de vote.
M. Martial Bourquin. Nous avons bien entendu M. le ministre, mais nous maintenons notre amendement. Comme mon collègue Michel Teston, je comprends bien que les assurances apportées par l'amendement n° 325 rectifié bis par le système de la soulte garantissent le moyen terme, mais je crains que le régime de l’IRCANTEC, dont les salariés de La Poste représentent un tiers des adhérents, ne soit durablement fragilisé.
Pour un fonctionnaire, qui est parfois moins bien payé que dans le secteur privé, le système de retraite dont il bénéficie est un argument. Le système de la soulte apporte – je ne le conteste pas – une solution à court et à moyen terme. Mais, à plus long terme, l’IRCANTEC, avec la perte d’un tiers de ses cotisants – ce qui est énorme ! – n’aura d’autre choix, et là je ne lis pas dans le marc de café, que de lisser par le bas les avantages qu’il offre actuellement.
M. Michel Teston a raison de demander que notre assemblée puisse se prononcer sur nos amendements car nous n’avons pas la même conception pour aborder le problème de l’IRCANTEC. Or il s’agit de l’un des problèmes les plus importants parmi ceux que soulève l’article 8 qui nous est soumis aujourd’hui.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Monsieur le ministre, vous avez pris conscience, comme nos collègues de l’UMP, que les salariés concernés non seulement étaient très inquiets, mais refusaient que le régime de retraite de l’IRCANTEC leur soit supprimé. Dont acte !
Derrière l’amendement n° 325 rectifié bis, que vous avez accepté, nous nous rendons bien compte que ce qui est proposé n’est qu’une solution de court terme. (M. le ministre fait des signes de dénégation.) Vous voulez procéder à une refonte des régimes de retraite complémentaire qui risque de se traduire par une fusion notamment de l’AGIRC-ARRCO et de l’IRCANTEC. Une telle réforme pourrait intervenir en 2010, nous ne pouvons donc pas nous prononcer aujourd’hui sur ce qu’il en sera exactement.
Dans ce contexte, vous êtes vraiment malvenu de vous engager pour cinquante ans ! C’est comme pour la transformation en société anonyme : vous vous engagez, là aussi pour des décennies, à ce qu’elle ne soit pas privatisée. Vous le voyez, nous avons bien compris votre manège !
Chaque fois que vous vous êtes engagé dans la privatisation d’une entreprise publique, vous avez tenté de rassurer les personnels en activité. Vu l’évolution prévisible du nombre de personnes sous statut public ou privilégié, nul ne peut prédire l’avenir, surtout pas vous. Ou peut-être le pouvez-vous, mais vous préférez ne pas nous le dire.
Nous refusons de cautionner l’amendement de l’UMP qui a reçu le label du Gouvernement, car les différentes interventions ont clairement démontré qu’il s’agissait de prévoir un régime transitoire en attendant la refonte globale des régimes complémentaires de retraite, laquelle se fera, très vraisemblablement, par le bas.
On le voit bien, vous vous sentez obligé de répondre aux salariés, mais nous ne voulons pas cautionner votre démarche.
M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul.
M. Daniel Raoul. Monsieur le président, pour mieux comprendre en quoi consiste la rectification apportée à l’amendement présenté par Mme Procaccia, je serais heureux de disposer d’une version écrite de l’amendement n° 325 rectifié bis.
M. le président. L’amendement va vous être distribué, mon cher collègue. En attendant, je vous en donne lecture :
Au début de cet article insérer cinq alinéas ainsi rédigés :
I - Après l'article 29-5 de la même loi, il est inséré un article 29-6 ainsi rédigé :
« Art 29-6 - Les salariés affiliés à l'Institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l'État et des collectivités publiques à la date d'adhésion de l'entreprise La Poste à des institutions de retraite complémentaire visées à l'article L. 922-1 du code de la sécurité sociale, y demeurent jusqu'à la rupture du contrat qui les lie à leur employeur ou à leur transfert vers une entreprise adhérente d'une institution visée audit article.
« Les droits acquis par ces affiliés, les adhérents antérieurs, ainsi que leurs ayants droit sont maintenus à l'Institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l'État et des collectivités publiques.
« Une convention entre les fédérations d'institutions de retraite complémentaire visées à l'article L. 922-4 du code de la sécurité sociale et l'Institut de retraite complémentaire des agents non titulaires de l'État et des collectivités locales organise les transferts financiers entre ces organismes en tenant compte des charges et des recettes respectives.
« L'adhésion de l'entreprise La Poste à des institutions de retraite complémentaire visées à l'article L. 922-1 du code de la sécurité sociale intervient dans les six mois suivant la signature de la convention mentionnée au troisième alinéa du présent article et au plus tard au 31 décembre 2010. »
La parole est à M. le ministre.
M. Christian Estrosi, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, je veux que vous sachiez exactement sur quoi vous allez voter.
M. Gérard Longuet. Très bien !
M. Christian Estrosi, ministre. Il s’agit d’un point clé du texte, et je veux mettre chacun face à ses responsabilités. Le Gouvernement a effectivement fait preuve de suffisamment d’ouverture sur le sujet.
Vous avez trois amendements.
L’amendement du groupe CRC-SPG aux termes duquel « Les agents contractuels et salariés de droit privé de la Poste demeurent soumis aux dispositions du décret n° 70-1277 du 23 décembre 1970 portant création d'un régime de retraite complémentaire des ressources sociales en faveur des agents non titulaires de l'État et des collectivités publiques ».
L’amendement du groupe socialiste reprend sous une autre forme cette rédaction, mais ajoute deux alinéas ainsi rédigés :
« Les cotisations relatives aux salariés de La Poste versées aux différents régimes de retraite complémentaire obligatoire sont réparties chaque année dans chacun de ces régimes au prorata des charges de retraite qui leur incombent.
« Les modalités de mise en œuvre du présent article font l’objet d’une convention à conclure avant le 31 décembre 2010 entre les fédérations d’institutions de retraite complémentaire visées à l’article L. 922-4 du code de la sécurité sociale et l’Institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l’État et des collectivités publiques. La Poste intervient à cette convention en qualité d’employeur détenteur des informations nécessaires à la répartition annuelle mentionnée à l’alinéa précédent. […] ».
Si j’avais à choisir entre ces deux amendements, je vous inviterais à voter pour celui du groupe socialiste, qui est plus complet et va plus loin dans la garantie des droits à la retraite des salariés.
Enfin, l’amendement présenté par Mme Procaccia, au nom du groupe de l’UMP, reprend l’amendement le plus complet en ajoutant un alinéa, qui est fondamental : « Les droits acquis par ces affiliés, les adhérents antérieurs, ainsi que leurs ayants droit sont maintenus à l’Institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l’État et des collectivités publiques ».
L’amendement du groupe CRC-SPG, l’amendement du groupe socialiste et l’amendement du groupe de l’UMP ont tous le même objectif, si ce n’est que celui du groupe de l’UMP apporte le plus de garanties aux salariés de La Poste.
La soulte, qui pourra être versée en une fois en 2010 ou bien année après année, au niveau le plus élevé, visera à couvrir tous les besoins. Le seul amendement qui garantit les droits intégraux jusqu’au décès des salariés – je dis bien « jusqu’au décès » – à partir du moment où ils bénéficieront de leur droit à la retraite, c’est celui du groupe de l’UMP.
Il s’agit non pas de discours, mais de droit. C’est écrit noir sur blanc !
Je veux que les salariés de La Poste soient parfaitement éclairés sur le choix que chacun d’entre vous fera, soit un petit alinéa pour le groupe CRC-SPG, soit trois alinéas pour le groupe socialiste, soit quatre alinéas pour le groupe de l’UMP, qui apportent des éléments supplémentaires permettant de garantir tous les droits aux salariés.
Voilà pourquoi j’invite le groupe CRC-SPG et le groupe socialiste à retirer leurs amendements au profit de l’amendement n° 325 rectifié bis.
M. Dominique Braye. Très bien !
M. le président. Monsieur le ministre, j’imagine que vous pensiez également à l’amendement du groupe du RDSE,…
M. Yvon Collin. Merci de le rappeler, monsieur le président !
M. Christian Estrosi, ministre. … qui est assez proche de celui du groupe CRC-SPG. Cet amendement va dans le même sens que celui qui a été présenté par Mme Procaccia, mais il n’apporte pas autant de garanties.
M. le président. Par principe, le président de séance est neutre.
Je veux juste préciser que le deuxième alinéa de l’amendement n° 325 rectifié bis a le mérite d’assurer la pérennité de l’IRCANTEC, ce qui me paraît essentiel.
M. Dominique Braye. Qu’ils retirent leurs amendements !
M. le président. Je ne peux pas en dire davantage compte tenu des fonctions que j’occupe.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous en avez déjà dit beaucoup !
M. le président. En conséquence, les amendements nos 501 rectifié, 562 rectifié et 595 n'ont plus d'objet.
Je mets aux voix l'amendement n° 235.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à M. Martial Bourquin, pour explication de vote sur l'amendement n° 413.
M. Martial Bourquin. Nous sommes inquiets de la disparition programmée de nombreux CHSCT à La Poste. Nous n’avons pas eu de réponse précise sur leur nombre.
Le syndrome France Télécom nous fait dire qu’il vaut mieux prévenir que guérir. Prévenir, c’est justement faire en sorte de ne pas diminuer ces lieux d’expression où les questions d’hygiène, de sécurité et de conditions de travail sont le mieux maîtrisé.
En abaissant le nombre de CHSCT de façon drastique, on prend inévitablement de grands risques à l’égard des futurs modes de management de La Poste.
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote sur l'amendement n° 301.
M. Jean Desessard. Avant la suspension de séance, le Gouvernement, ainsi que la commission, a émis un avis favorable sur les amendements nos 300, 502 rectifié et 560. Merci, monsieur le ministre ! Mais pourquoi ne pas avoir fait de même sur l’amendement n° 301 ?
Vous savez pourtant que le problème n’est pas simple : La Poste emploie aussi bien des fonctionnaires que des contractuels. Je me suis donc encore fait confirmer par les syndicats que le régime le plus intéressant pour eux serait le maintien du statut ancien. Mais ne revenons pas sur cette question…
Pourquoi ne pas accorder à l’ensemble des salariés la possibilité d’être soumis à la règle générale, celle du code du travail ? En quoi l’amendement n° 301 gêne-t-il la commission et le Gouvernement ?
Les agents contractuels sont soumis au code du travail et aux conventions collectives propres à leur activité. À partir du moment où des salariés travaillent dans une entreprise qui a un statut de société anonyme, on pourrait penser que ceux-ci sont soumis au code du travail.
Je veux bien entendre que les conditions actuelles, garanties par le Gouvernement et par la loi, sont beaucoup plus intéressantes, cependant mes collègues du groupe CRC-SPG ont démontré le contraire tout à l’heure.
Lorsqu’il existe une convention collective plus intéressante que le code du travail, elle est de toute façon appliquée. Or celle qui concerne La Poste est aujourd’hui moins intéressante que les dispositions du code du travail.
Monsieur le ministre, vous nous avez indiqué que vous souhaitiez que La Poste devienne une société anonyme pour qu’elle puisse investir à l’étranger et diversifier son activité. Dans le même temps, vous nous avez précisé que vous vouliez le bien-être au travail de ses salariés. Dès lors, pourquoi refusez-vous que les personnels contractuels soient soumis au code du travail, ce qui leur garantirait pourtant certains droits. Pourquoi opposez-vous une fin de non-recevoir à l’amendement n° 301 ?
M. le président. Monsieur le ministre, souhaitez-vous répondre ?
M. Christian Estrosi, ministre. Non, monsieur le président. Je ne vais pas recommencer le débat que nous avons eu avant la suspension de séance,…
M. Dominique Braye. C’est ce qu’ils voudraient !
M. Jean Desessard. Quand ?
M. Christian Estrosi, ministre. J’ai d’ailleurs le sentiment que nous discutons d’amendements qui auraient dû tomber à la suite des votes qui viennent d’intervenir. (Mme Christiane Hummel ainsi que MM. Dominique Braye et André Dulait applaudissent.)
M. le président. Je me conforme rigoureusement aux instructions que je reçois au plateau. La commission n’a pas précisé que l’amendement n° 301 tombait.
Je mets aux voix l'amendement n° 301.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 300, 502 rectifié et 560.
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 260 n'a plus d'objet.
Je mets aux voix l'amendement n° 261.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à M. Michel Teston, pour explication de vote sur l'article 8.
M. Michel Teston. Malgré l’adoption d’un amendement, présenté par Mme Catherine Procaccia, qui apporte une réponse…
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Globale !
M. Michel Teston. … transitoire à la question de la retraite complémentaire des personnels contractuels de La Poste, nous ne voterons pas cet article, pas plus d’ailleurs que nous n’avions voté cet amendement.
Nous considérons que l’avenir du régime complémentaire de retraite IRCANTEC n’est pas réglé. Je puis vous assurer que, dans quatre ou cinq ans, la question se posera de nouveau. Il n’y aura pas assez de cotisants au regard du nombre de personnes qui demanderont à bénéficier de leurs droits à la retraite, et le Parlement sera une nouvelle fois amené à discuter de l’avenir de l’IRCANTEC.
Comme pour l’amendement défendu par Mme Procaccia, et sans aller jusqu’au rejet de l’article 8, nous voulons marquer notre mécontentement lié à l’absence de vraie réponse sur le maintien du régime de l’IRCANTEC. (MM. Martial Bourquin, Daniel Raoul et Claude Jeannerot applaudissent.)
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Je voudrais revenir très brièvement sur ce que nous avons dit concernant l’IRCANTEC. Cela nous est apparu au fur et à mesure de la discussion, monsieur le ministre, parce que nous avons la capacité de regarder ce qui se passe auprès des salariés de La Poste. Le sort de l’IRCANTEC étant suspendu jusqu’en 2010 et sachant que vous serez aux manettes d’ici à cette date, nous sommes très méfiants, car nous connaissons votre capacité à brouiller les pistes.
Plus généralement, vous ne cessez d’affirmer que la transformation de La Poste en société anonyme…
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. … avec des fonds 100 % publics est un simple tour de passe-passe pour permettre l’augmentation du capital de La Poste : à d’autres !
Nous voyons bien qu’il s’agit d’une déstructuration globale du service public national. Apparemment, vous êtes un peu ennuyés parce que les salariés se rendent compte – quelque peu échaudés, il faut bien le dire, par ce qui s’est passé dans d’autres entreprises – que petit à petit, au fur et à mesure des départs à la retraite, les salariés ne seront plus du tout sous statut public.
M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote.
M. Daniel Raoul. Je voudrais conforter l’analyse que vient de faire notre collègue Michel Teston. Même si la question dépasse sans doute le simple cadre de ce projet de loi, nous savons que la révision générale des politiques publiques, ou RGPP, va mettre à mal le régime de l’IRCANTEC.
Il faudrait, dans un véhicule législatif, prendre en compte l’avenir de ce régime. Le non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux ne sera pas sans conséquences. On voit bien, y compris dans l’éducation nationale, les conséquences des suppressions de postes. À moyen terme, la question de la survie de l’IRCANTEC est posée. C’est elle, monsieur le ministre, au-delà de cet article, que nous aurions souhaité voir en partie résolue.
C’est ce qui explique notre abstention. À court terme, avec l’affiliation des salariés nouvellement embauchés à l’AGIRC-ARCCO, une solution a été trouvée. À terme, cependant, l’avenir du régime de l’IRCANTEC n’est pas garanti. (M. Martial Bourquin opine.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Fourcade, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Fourcade. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous, nous voterons l’article 8, pour deux raisons.
D’une part, cet article répond à l’inquiétude d’un grand nombre de salariés de La Poste.
M. Gérard Longuet. Eh oui !
M. Jean-Pierre Fourcade. Ne pas le voter sous prétexte qu’il ne traite pas le problème plus général de l’IRCANTEC n’est pas une bonne solution.
D’autre part, je suis moi-même retraité de l’IRCANTEC,…
M. Jean Desessard. En complément de votre indemnité sénatoriale, mon cher collègue !
M. Jean-Pierre Fourcade. … puisque j’ai exercé des fonctions publiques en étant dans le privé.
L’IRCANTEC fonctionne très bien. Il est clair que, dans la discussion que nous aurons l’année prochaine sur l’ensemble des régimes de retraite, personne ne songera à abandonner ce régime.
M. Jean-Paul Emorine, président de la commission de l'économie. Bien sûr !
M. Jean-Pierre Fourcade. Le problème sera d’équilibrer l’ensemble des régimes privés et publics, l’IRCANTEC étant un régime public. C’est à ce moment-là que nous pourrons en délibérer.
En l’occurrence, je considère que le fait de mélanger le problème de l’avenir de l’IRCANTEC…
M. Alain Gournac. Ce n’est pas le moment !
M. Jean-Pierre Fourcade. … et la satisfaction de l’inquiétude actuelle des employés de La Poste est une mauvaise affaire.
M. Alain Gournac. Eh oui !
M. Jean-Pierre Fourcade. C’est la raison pour laquelle nous voterons cet article.
M. Dominique Braye. Très bien !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Hélas !
M. Dominique Braye. Enfin un peu de hauteur ! (Oh là là ! sur les travées du groupe socialiste.)
M. Jean-Pierre Fourcade. Je remercie M. le ministre d’avoir émis un avis favorable sur l’amendement n° 325 rectifié bis de Mme Giudicelli présenté par Mme Procaccia. Celui-ci complète utilement l’article 8 en donnant une profondeur au maintien du régime des postiers et, surtout, en incluant les ayants droit, ce qui me paraît tout à fait important.
C’est pourquoi, sans hésiter, je le répète, nous voterons l’article 8 ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP. – MM. Hervé Maurey et Adrien Giraud applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. Martial Bourquin, pour explication de vote.
M. Martial Bourquin. Pour prendre de la hauteur sur ce sujet, il ne faut pas oublier que La Poste représente un tiers des adhérents de l’IRCANTEC, que la nouvelle organisation territoriale réduira le nombre d’élus et que la RGPP prévoit de ne pas remplacer un fonctionnaire sur deux.
Vous dites que l’IRCANTEC se porte bien aujourd'hui, monsieur Fourcade, mais il ne faut pas seulement penser à ceux qui sont à la retraite aujourd’hui,…
M. Roland Courteau. C’est vrai !
M. Martial Bourquin. … il faut également songer à ceux qui prendront leur retraite demain.
M. Roland Courteau. Le problème, c’est demain !
M. Martial Bourquin. Demain, la situation des personnes qui travaillent à la SNCF, dans la fonction publique territoriale et à La Poste ne sera peut-être pas brillante.
M. Roland Courteau. Eh oui !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. M. Fourcade touche déjà sa retraite, alors ça va !
M. Martial Bourquin. Malheureusement, la transformation de La Poste en société anonyme fragilise globalement le système de retraite de l’IRCANTEC.
C’est la raison pour laquelle, monsieur Fourcade, nous ne devons pas réagir uniquement par rapport au présent. Gouverner, c’est prévoir ! Pensez aux salariés qui partiront à la retraite dans cinq, dix ou vingt ans !
M. Dominique Braye. Gouverner, c’est aussi savoir s’adapter !
M. le président. Je mets aux voix l'article 8, modifié.
(L'article 8 est adopté.)
Article 9
L’article 32 de la même loi est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est précédé de la mention : « I. – » et les mots : « des articles L. 441-1 à L. 441-7 » sont remplacés par les mots : « du titre Ier du livre III de la troisième partie » ;
2° Le troisième alinéa est précédé de la mention : « III. – », les mots : « Chaque établissement ou groupe d'établissements de l'exploitant public » sont remplacés par les mots : « Chaque établissement ou groupe d'établissements de La Poste » et les mots : « contrat de plan de l’exploitant public » sont remplacés par les mots : « contrat mentionné à l’article 9 » ;
3° Le quatrième alinéa est remplacé par quatre alinéas ainsi rédigés :
« Les autres dispositions du livre III, de la troisième partie du code du travail, à l’exception du titre II, sont applicables à l’ensemble des personnels de La Poste, y compris ceux mentionnés aux articles 29 et 44 de la présente loi. Des augmentations de capital ou des cessions d’actions réservées peuvent être réalisées, dans le cadre d’un ou plusieurs fonds communs de placement d’entreprise, conformément aux articles L. 3332-18 et suivants du code du travail, sous réserve des dispositions qui suivent.
« La valeur de la société est fixée par la Commission des participations et des transferts dans un délai maximum d’un mois à compter de sa saisine par le ministre chargé de l’économie. Cette évaluation est conduite selon les méthodes objectives couramment pratiquées en matière de cession totale ou partielle d’actifs de sociétés en tenant compte, selon une pondération appropriée à chaque cas, de la valeur des actifs, des bénéfices réalisés, de l’existence des filiales et des perspectives d’avenir. Elle est rendue publique. Le prix de cession est déterminé sur la base de la valeur de la société ainsi déterminée. Le prix de souscription est fixé conformément au dernier alinéa de l’article L. 3332-20 du code du travail au plus tard soixante jours après la date de cette évaluation.
« Les personnels de La Poste et de ses filiales ainsi que leurs ayants droit ne peuvent détenir qu’une part minoritaire du capital de La Poste.
« Le titre II du livre III de la troisième partie du code du travail peut être étendu à l’ensemble des personnels de La Poste dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État. » ;
4° Le dernier alinéa devient le troisième alinéa et est précédé de la mention : « II. – ».
La parole est à Mme Mireille Schurch, sur l’article.
Mme Mireille Schurch. M. Nicolas Sarkozy, en mai 2006, défendait en ces termes l’intéressement : « Il n’est pas normal que, dans une entreprise, les salariés qui se donnent du mal et qui en assurent le succès ne soient pas associés aux fruits de la croissance ».
Comment ne pas souscrire à ces propos ? Qui pourrait être opposé à ce que les salariés profitent financièrement des fruits de leurs efforts ? Ce que ne dit pas le Président de la République, et ce sur quoi nous sommes en total désaccord avec lui, c’est que cette « reconnaissance » passe à notre avis prioritairement par le salaire et, naturellement, par le réinvestissement dans l’entreprise afin de lui permettre de se moderniser, d’améliorer la productivité et les conditions de travail des hommes et des femmes qui assurent la réussite des entreprises de notre pays.
Pour nous, l’intéressement, parce qu’il est aléatoire et individualisé, est injuste et n’est pas de nature à répondre à l’exigence d’augmentation des salaires et de revalorisation du pouvoir d’achat. Aléatoire, destinée aux seuls salariés stables des entreprises, inégale selon le type d’entreprise et la stratégie de gestion des directions, cette forme de rémunération va se développer au détriment des autres formes de rémunération, et notamment des salaires. Cette forme de rémunération, non soumise aux cotisations sociales, conduit à aggraver la situation des ressources de la protection sociale et des retraites et à fragiliser la constitution des droits sociaux des salariés.
Par ailleurs, nous contestons l’argument selon lequel l’intéressement constitue un renforcement du pouvoir d’achat. Il suffit pour s’en convaincre de lire l’article publié par La Tribune le 12 octobre dernier.
On y apprend que, selon une étude réalisée par Hay Group, le « montant des bonus et de l’intéressement 2009 est en baisse par rapport à 2008 », et l’année 2010 s’annonce être, pour l’intéressement, celle des plus faibles bénéfices. « Néanmoins, depuis un an, le poids de la part variable a fait un bond spectaculaire pour toutes les catégories de salariés : elle atteint désormais 12 % de la rémunération de l’ensemble des salariés, contre 8 % de la rémunération cadre il y a un an et 6 % il y a… dix ans. »
Ce même article précise que « au vu du retournement de la conjoncture, les entreprises pourraient mettre un frein à cette évolution, considérant que cette forme de rémunération expose trop fortement les salariés aux fluctuations conjoncturelles ».
C’est, vous le reconnaîtrez, un curieux paradoxe que de vouloir étendre l’intéressement dans ce projet de loi relatif à l’entreprise publique La Poste quand, par ailleurs, de très nombreux acteurs entendent, dans l’intérêt des salariés, y renoncer.
Nous devons donc observer la plus grande prudence sur ce sujet.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L'amendement n° 69 est présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.
L'amendement n° 303 est présenté par MM. Desessard et Muller et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.
L'amendement n° 503 rectifié est présenté par MM. Teston, Botrel, Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste et apparentés.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Gérard Le Cam, pour présenter l’amendement n° 69.
M. Gérard Le Cam. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme à l’accoutumée, pour rendre acceptable une privatisation, un gouvernement met l’accent sur l’intéressement, la délivrance d’actions aux salariés en leur disant : « N’ayez pas peur de la privatisation, vous deviendrez propriétaires de votre entreprise ! ». Mais ce mirage, tant vanté, est un leurre !
C’est bien une question de société qui est abordée au travers de ce procédé qui joue sur les difficultés financières des salariés et la nécessité pour les uns et les autres de tenter à tout prix d’améliorer les fins de mois.
C’est aussi une question idéologique. En effet, en distribuant une part de capital aux salariés, le Gouvernement et la direction de l’entreprise tentent de masquer une réalité économique incontestable : l’actionnariat tire son profit du travail de ces mêmes salariés. La valeur ajoutée produite par le travail n’ira pas exclusivement au développement de l’entreprise ou au bien-être de l’assemblée des postiers ; elle ira pour l’essentiel, quand La Poste sera privatisée, dans le portefeuille des vrais financiers, ceux qui agissent aujourd’hui pour accélérer le processus en cours.
Combien de salariés de France Télécom disposent encore des actions obtenues au moment du changement de statut et des étapes nécessaires de privatisations ? Ce chiffre serait intéressant à connaître tant il est évident que les salariés les plus modestes, l’immense majorité en somme, ont très rapidement revendu leurs actions.
Une chose est certaine, comme l’actualité le prouve tragiquement, l’intéressement des salariés de France Télécom n’a en rien contribué à leur épanouissement, bien au contraire !
L’intéressement, la vente d’actions aux salariés est un cheval de Troie de la privatisation.
D'ailleurs, le fait de proposer à des fonctionnaires d’acquérir des actions d’une entreprise publique pour laquelle ils travaillent montre bien la direction prise. La destruction des valeurs de solidarité, de générosité, d’égalité du service public est aussi organisée au profit de l’individualisme le plus mercantile.
Nous proposons donc résolument de supprimer cet article 9 qui constitue un premier pas évident vers la privatisation de La Poste.
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour présenter l'amendement n° 303.
M. Jean Desessard. Vous me permettrez d’être bref, monsieur le président, Mme Schurch ayant déjà développé l’essentiel de notre argumentation. (Sourires.)
Étant cohérents avec notre position de refus de changement de statut de La Poste, nous sommes opposés à l’ensemble des dispositions de cet article, dont nous proposons la suppression.
Observées de plus près, ces dispositions ne nous paraissent pas satisfaisantes.
Tout d’abord, nous sommes opposés au recours systématique à l’épargne salariale. Cette tendance qui s’installe présente des effets néfastes sur les conditions de travail et de rémunération des salariés.
En effet, l’intensification du recours à l’épargne salariale est un subterfuge pour ne pas augmenter les salaires du personnel. On fait miroiter la possibilité d’un complément de rémunération au lieu de faire progresser la rémunération elle-même.
Cela revient également à effectuer un double transfert de risque sur les épaules des salariés.
Premièrement, ils risquent tous les jours de voir leurs postes supprimés au nom de je ne sais quelle politique de baisse des coûts.
Deuxièmement, comme de nombreux petits actionnaires, ils pourraient voir, s’ils en possèdent, leurs actions fondre comme neige au soleil par la simple volonté de dirigeants d’entreprise ou à la suite de tel ou tel retournement de la Bourse.
Nous ne voulons pas d’une logique de rentabilité à La Poste. Par conséquent, nous refusons une logique d’objectifs financiers appliquée à l’ensemble du personnel.
Une poste publique, des rémunérations décentes et justes, un service public de qualité, voilà la seule chose que demandent la majorité des Français et les salariés de La Poste.
M. le président. La parole est à M. Jacques Berthou, pour présenter l'amendement n° 503 rectifié.
M. Jacques Berthou. L’article 9 vise à mettre en place les dispositions relatives à l’intéressement et à l’épargne salariale.
Par cet amendement, nous souhaitons nous exprimer sur ces questions.
Nous ne sommes pas forcément opposés aux mécanismes de l’intéressement et de l’épargne salariale. L’intéressement est, par définition, une rémunération collective facultative liée aux résultats de l’entreprise. Basée sur la réalisation d’objectifs, cette prime est utilisée pour motiver les salariés.
On se situe donc ici pleinement sur le terrain des sociétés anonymes et des différents mécanismes de rémunération qui y sont pratiqués. De ce point de vue, cet article est aussi, dans une certaine mesure, une conséquence du changement du statut de La Poste. C’est la raison pour laquelle, dans la continuité de ce que nous avons défendu jusqu’à maintenant, nous souhaitons sa suppression.
Par ailleurs, nous tenons à rappeler certains des doutes que suscitent en nous ces dispositifs.
Certes, il paraît séduisant que les salariés profitent du succès de leur entreprise ; il n’en reste pas moins que, à d’autres égards, ce mécanisme peut avoir des effets pervers.
En effet, la prime d’intéressement est, nous l’avons dit, directement liée à la réalisation d’objectifs chiffrés. Force est donc de constater que l’objectif chiffré va primer, que la course à la rentabilité pourrait être de mise. De ce point de vue, les dispositions de l’article 9 ne manquent pas de nous inquiéter en ce qui concerne tant le service rendu que la situation des salariés. Il ne serait pas acceptable que les conditions de travail se dégradent au nom de cette rentabilité. Les agents de La Poste doivent avant tout rendre un service au public.
En outre, se pose la question du lien entre la politique salariale et les rémunérations complémentaires.
L’intéressement est une prime qui peut apporter un complément de revenu substantiel aux salariés, mais il ne saurait remplacer les augmentations « normales » de salaire.
On peut craindre, en effet, que la mise en place de mécanismes complémentaires de rémunération n’ait pour conséquence de bloquer durablement toute négociation et toute évolution en matière de salaires.
Peut-être dira-t-on aux salariés de La Poste qu’ils n’ont pas à demander d’augmentation, cette dernière étant remplacée par la prime d’intéressement (M. Martial Bourquin opine), prime qui reste, rappelons-le, tributaire des résultats de l’entreprise.
La mise en place de ce mécanisme est donc, à nos yeux, une source d’inquiétude. Nous estimons qu’il est susceptible d’avoir des répercussions négatives sur les conditions de travail et les négociations salariales, notamment dans le contexte actuel.
Nous tenions, monsieur le président, monsieur le ministre, à faire ces remarques à propos de cet article dont nous souhaitons la suppression. (Mme Christiane Demontès ainsi que MM. Martial Bourquin et David Assouline applaudissent.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces trois amendements identiques ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. La commission ne peut qu’être défavorable à ces trois amendements de suppression de l’article 9 du projet de loi. Celui-ci tend à appliquer aux salariés de La Poste, selon des modalités pertinentes, les dispositions du code du travail relatives à l’intéressement et à l’épargne salariale. Il est même prévu, dans le cadre de l’ouverture du capital, que des actions gratuites puissent être distribuées aux salariés.
Les dispositions de cet article seront bénéfiques pour tous, en particulier pour les salariés de La Poste.
MM. Gérard Longuet et M. Alain Gournac. Très bien !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Estrosi, ministre. L’article 9 traite des dispositifs d’épargne salariale. Ce n’est pas rien !
M. Gérard Longuet. Eh oui !
M. Christian Estrosi, ministre. Pour ma part, je suis favorable à ces dispositifs tels que la participation, l’actionnariat salarié ou l’intéressement, lequel existe déjà à La Poste, qui permettent de mieux associer les salariés au développement de l’entreprise.
Par ailleurs, je souligne que le dispositif d’actionnariat salarié est optionnel et qu’il appartiendra à chaque agent de La Poste de décider, en toute liberté, s’il veut ou non devenir actionnaire de son entreprise.
Supprimer l’article 9 du projet de loi reviendrait à retirer un droit aux agents de La Poste, à leur interdire de pouvoir librement devenir actionnaires de leur entreprise.
Enfin, je vous rappelle que l’une des lois importantes sur l’actionnariat salarié a été adoptée sur l’initiative de M. Fabius, en 2001.
MM. Alain Gournac et André Dulait. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Isabelle Debré, pour explication de vote.
Mme Isabelle Debré. Je voudrais rassurer notre collègue Jacques Berthou. En tant que membre du COPIESAS, le Conseil d’orientation de la participation, de l’intéressement, de l’épargne salariale et de l’actionnariat salarié, qui a succédé au Conseil supérieur de la participation, je ne peux que me féliciter de cette disposition.
Mes chers collègues, vous savez très bien que, dans les entreprises où un dispositif de participation ou d’intéressement a été mis en place, les résultats n’en sont que meilleurs.
M. Alain Gournac. C’est exact !
M. Jean Desessard. Où donc ?
Mme Isabelle Debré. Quasiment dans toutes ! Voyez les statistiques ! Ces dispositifs sont bénéfiques pour les entreprises, car ils facilitent le dialogue social. Par conséquent, personne ne peut être contre !
La participation et les augmentations de salaire sont deux mécanismes totalement distincts et complémentaires,…
M. Gérard Longuet. Tout à fait !
Mme Isabelle Debré. … et en aucun cas l’une ne peut remplacer les autres. Cela n’arrive jamais.
Mme Isabelle Debré. Pour toutes ces raisons, nous voterons bien évidemment contre ces amendements de suppression. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. Gérard Longuet. Très bien !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 69, 303 et 503 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L'amendement n° 250, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :
Alinéas 1 et 2
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Mme Éliane Assassi. Comme nous venons de l’indiquer, nous sommes opposés au développement d’un dispositif d’intéressement et d’un dispositif d’actionnariat salarié au sein de La Poste SA.
La mise en œuvre de tels dispositifs participe, depuis plus de quarante ans qu’ils existent, de l’effort continu d’intégration des salariés aux logiques patronales qui animent, depuis le milieu des années soixante, les milieux dirigeants de nos entreprises.
L’article 9 comporte d’ailleurs une série de dispositions que nous proposons de supprimer, les unes après les autres, pour les motifs que je viens rapidement d’évoquer devant vous.
Les deux premiers alinéas de cet article, que notre amendement vise à supprimer, ont, en apparence, un caractère purement formel, se contentant en effet de coordonner les dispositions de l’article 32 de la loi du 2 juillet 1990 relative à l’organisation du service public de la poste et des télécommunications, dite « loi Quilès », et la nouvelle numérotation du code du travail, issue de la loi du 21 janvier 2008 ratifiant l’ordonnance n° 2007-329 du 12 mars 2007 relative au code du travail – partie législative. À l’époque, nous avions d’ailleurs déploré que cette réécriture ne se fasse pas à droit constant.
Mais cette situation laisse toutefois subsister un étrange objet juridique : la possibilité pour des fonctionnaires d’être actionnaires de la société anonyme qui les emploie.
On peut presque se demander s’il n’y a pas là, au-delà de l’apparente égalité de traitement entre fonctionnaires et autres salariés de La Poste, une rupture d’égalité entre les fonctionnaires de la Poste et les autres fonctionnaires.
On doit surtout se demander ce que la « carotte » de l’intéressement et de l’épargne salariale peut bien donner aux agents de La Poste, attendu que c’est plutôt sur leur fiche de paie que portent leurs préoccupations pour un meilleur pouvoir d’achat.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Je ne comprends pas les intentions des auteurs de cet amendement, car les deux alinéas visés reprennent fidèlement le contenu de la loi de 1990 sur le thème de l’intéressement et n’apportent que des modifications rédactionnelles et d’ordre juridique.
Aussi, la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Estrosi, ministre. Je ne résiste pas au plaisir de signaler à Mme Assassi que l’intéressement existe depuis 2007 à La Poste. Cette année-là, ce sont 26 millions d’euros qui ont été distribués à 300 000 agents. (Mme Éliane Assassi s’exclame.) Peut-être voudriez-vous les en priver ?
M. Alain Gournac. Ils ne vont pas être contents !
M. Christian Estrosi, ministre. Toujours est-il que telle n’est pas notre position. Les salariés de La Poste sont demandeurs de cet intéressement.
Mme Isabelle Debré. Exactement ! Voyez ce qui s’est passé à la SNCF !
M. Dominique Braye. Tout à fait ! Soyez sérieux !
Mme Éliane Assassi. Cela fait 80 euros par salarié !
M. Dominique Braye. Il est vrai que vous n’êtes pas à 80 euros près !
Mme Éliane Assassi. Vous ne savez même pas combien gagne un postier !
M. le président. Respectez-vous les uns les autres !
Je mets aux voix l'amendement n° 250.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 251 est présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche.
L'amendement n° 509 est présenté par MM. Teston, Botrel, Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 3
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Mireille Schurch, pour présenter l’amendement n° 251.
Mme Mireille Schurch. Cet amendement vise à supprimer, par cohérence avec la position que ma collègue vient de défendre, le troisième alinéa de l’article 9.
Cet alinéa est tout simplement une pure escroquerie, qu’il convient de dénoncer immédiatement.
En effet, si l’on suit bien la logique du texte, l’intéressement n’aura pas la même teneur dans tous les établissements de La Poste.
On nous propose de mettre en place un intéressement dans chaque site de La Poste, à concurrence d’un certain effectif de personnel, alors même que toutes ces activités n’ont pas nécessairement le même niveau de rentabilité. Cela ne manquera pas de créer de profondes différences de montant entre les primes d’intéressement, selon les sites et les métiers.
Une telle démarche caractérise clairement le marché de dupes que constitue, depuis quarante-deux ans, l’intéressement.
Pour obtenir une prime suffisamment élevée, les agents des centres courrier seront contraints de forcer la productivité sur leur site, tandis que les conseillers financiers de La Banque Postale pourront récupérer bien plus.
La course permanente à la rentabilité, à la productivité, ne créera pas nécessairement les conditions de la qualité de service et de produit, ce qui ne manquera pas d’avoir un effet négatif sur le résultat de l’entreprise.
Enfin, si l’on souhaite, en instaurant ce type de procédure, installer un climat social aussi détérioré que chez France Télécom, nul doute que l’outil ici décrit y pourvoira avantageusement.
Nous ne pouvons évidemment encourager le développement d’une telle inégalité de traitement entre les agents de La Poste, inégalité qui s’ajoute aux autres.
Nous vous invitons donc à adopter cet amendement,…
M. Dominique Braye. Eh bien non !
Mme Mireille Schurch. … qui n’est pas anodin.
M. le président. La parole est à M. Roland Courteau, pour présenter l'amendement n° 509.
M. Roland Courteau. Cet amendement a pour objet de supprimer l’alinéa 3 de cet article.
Cet alinéa vise à remplacer les mots « Chaque établissement ou groupe d’établissements de l’exploitant public » par les mots « Chaque établissement ou groupe d’établissements de La Poste », et les mots « contrat de plan de l’exploitant public » par les mots « contrat mentionné à l’article 9 », c’est-à-dire le contrat d’entreprise.
Ces dispositions, on le comprend aisément, sont la conséquence directe de la transformation de La Poste en société anonyme.
Dans la continuité de la position que nous défendons depuis le début de l’examen de ce projet de loi, à savoir notre opposition à l’abandon du statut d’EPIC, nous vous proposons donc de supprimer cet alinéa.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. L’article 9 gêne les membres du groupe CRC-SPG, car il prend acte de la disparition de la notion d’établissement public de La Poste.
Je comprends que vous restiez dans votre logique, mais comprenez aussi que nous ne puissions pas souscrire à la suppression de l’alinéa 3 de cet article dans lequel on ne fait que prendre acte de la disparition de la notion d’établissement public.
La commission a donc émis un avis défavorable sur ces deux amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Estrosi, ministre. Je suis bien évidemment défavorable à ces deux amendements.
Madame Schurch, je vous demande, lorsque vous vous exprimez, de le faire avec plus de respect par rapport au débat public.
Vous avez dit que cet alinéa était une « pure escroquerie ».
M. Alain Gournac. C’est honteux !
M. Christian Estrosi, ministre. Franchement, ce ne sont pas des propos que l’on peut utiliser dans une assemblée comme le Sénat. (Protestations sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste – Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Il y a déjà eu un débordement hier, que j’ai laissé passer, de la part d’un sénateur socialiste : M. Assouline m’a traité de menteur et j’aurais donc pu demander l’application de l’article 95 du règlement du Sénat.
Je ne laisserai pas dire que le Gouvernement a proposé un texte dont un article comporte un alinéa qui est une « pure escroquerie ».
M. Dominique Braye. Très bien !
M. Roland Courteau. On dit ce que l’on pense !
Mme Mireille Schurch. Alors, on ne peut plus rien dire !
M. le président. La parole est à Mme Isabelle Debré, pour explication de vote.
Mme Isabelle Debré. M. le ministre m’a devancée, puisqu’il a dit exactement ce que j’avais l’intention de dire.
Madame Schurch, vous considérez que l’intéressement est une course à la productivité. Pour ma part, je la conçois bien différemment !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Allez-voir sur place !
Mme Isabelle Debré. Je la vois comme un facteur de cohésion sociale, de motivation, comme une satisfaction de se sentir pleinement acteur dans sa société, d’être associé à ses résultats.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Allez-voir sur place !
Mme Isabelle Debré. Ce n’est pas forcément la course à la productivité. C’est aussi se sentir acteur et pleinement acteur dans sa société. Voilà, pour moi, ce qu’est la participation ! (Mmes Christiane Hummel et Marie-Thérèse Hermange applaudissent.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Expliquez cela à France Télécom !
M. Dominique Braye. Vous ne savez pas ce que c’est, la participation !
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. Dans cet hémicycle, on n’a pas le droit de parler d’escroquerie : d’accord, et vous avez rétabli les choses, monsieur le ministre ! Alors parlons d’exploitation de l’homme par l’homme ! (Exclamations sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Très bien !
M. Jean Desessard. Parlons de ceux qui font des profits de plus en importants et de ceux qui sombrent dans la précarité et la pauvreté.
Disons les choses clairement : aujourd’hui, en France, en Europe, dans le monde, le système fait que certains deviennent toujours plus riches et que d’autres, de plus en plus pauvres, ne peuvent plus payer leur loyer, assurer les fins de mois, envoyer leurs enfants à l’école, et tombent dans la précarité et la pauvreté. Voilà le régime que vous nous proposez !
Mme Isabelle Debré. L’intéressement n’est pas fait pour les riches !
M. le président. La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. M. le ministre me fournit l’occasion d’apporter une précision. Hier, après mon intervention, il a dit, et c’est dans l’enregistrement de la séance, que je l’avais traité de menteur.
M. Dominique Braye. Il y a des témoins !
M. David Assouline. Je suis allé écouter l’enregistrement, parce que je sais encore ce que je dis et je contrôle mes paroles.
M. Dominique Braye. Ce serait bien la première fois !
M. David Assouline. La séance a rectifié. Vous pouvez vous référer à l’enregistrement, j’ai dit les mots très précis : « Vous avez menti là-dessus ! ».
M. Dominique Braye. Pas « là-dessus » !
M. David Assouline. Donc, cela n’a rien à voir ! (M. André Dulait s’exclame.) Je maintiens intégralement mes paroles. Personne ne passe l’éponge ici. Moi, je contrôle mes propos. Celui qui a déformé ces propos, c’est celui qui derrière moi a dit que je l’avais traité de menteur alors que cela ne figure pas au procès-verbal !
M. le président. Dont acte ! Je tiens à souligner que la séance n’apporte pas de rectification : le compte rendu analytique reflète ce qui s’est dit.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Christian Estrosi, ministre. Monsieur le président, j’attendais avec impatience le retour de M. Assouline parmi nous, car il était curieusement absent hier soir.
Bien évidemment, j’ai précieusement gardé le compte rendu de la séance. M. Assouline dit très clairement : monsieur Estrosi, « vous mentez ! »
M. David Assouline. Là-dessus !
M. Dominique Braye. Il n’y a pas « là-dessus » !
M. Christian Estrosi, ministre. « Vous mentez ! » Cela figure dans le compte rendu de la séance, que je tiens à votre disposition, monsieur Assouline.
M. Dominique Braye. Très bien !
M. Christian Estrosi, ministre. Je serais fondé à demander que l’article 95 du règlement du Sénat s’applique pleinement à votre encontre. Je ne le fais pas. Vous étiez venu me glisser à l’oreille, d’ailleurs quelque peu gêné : rassurez-vous, l’OGC Nice et le PSG sont à zéro-zéro. Le score final fut de zéro pour le PSG, 1 pour Nice. Nous sommes donc quittes. Un buteur de l’OGC Nice m’a donné raison. Cela me suffit pleinement, monsieur le sénateur du XXe arrondissement de Paris.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 251 et 509.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC-SPG.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 46 :
Nombre de votants | 336 |
Nombre de suffrages exprimés | 335 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 168 |
Pour l’adoption | 151 |
Contre | 184 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je suis saisi de treize amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 504, présenté par MM. Teston, Botrel, Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéas 4 à 9
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Claude Jeannerot.
M. Claude Jeannerot. Cet amendement n’a pas de caractère polémique, bien au contraire.
L’article 9 pose une question de principe et de cohérence. Il autorise en effet les salariés de La Poste et leurs ayants droit à détenir une part du capital. À moins de concevoir que le salarié de La Poste est également une personne morale de droit public, vous conviendrez avec moi que la constitution d’un capital 100 % public se trouve d’ores et déjà compromise.
Or, nous considérons que les missions de La Poste sont incompatibles avec les objectifs de rentabilité actionnariale et de profit qui caractérisent le secteur privé.
Pour tout dire, nous craignons que la constitution, certes minoritaire, mais réelle, d’un actionnariat privé ne conduise in fine à la privatisation de La Poste.
Vous faites semblant de fermer la porte aux investisseurs privés, tout en leur ouvrant la fenêtre. Qui contrôlera ce que le personnel fera de ses actions ? L’État ou la Caisse des dépôts et consignations ont-ils une quelconque obligation de rachat ? Le texte demeure silencieux sur ce sujet. Or, ce qui n’est pas dans la loi demeure du ressort de la volonté de chacun.
C’est pourquoi par ce biais, nous semble-t-il, la privatisation de La Poste sera à l’œuvre, puisque de facto, vous en conviendrez avec moi, le caractère public du capital se trouve entamé.
M. Daniel Raoul. Très bien !
M. le président. L'amendement n° 252, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéas 4 à 7
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Cet amendement porte sur la mise en place des accords d’intéressement et du plan d’épargne salariale après que La Poste aura été transformée en société anonyme.
Dans tous les cas de figure, il semble bel et bien que l’on se moque des postiers. Car enfin, monsieur le ministre, comment osez-vous proposer à 300 000 agents, préoccupés par l’avenir de leur entreprise et par leur emploi, par l’incertitude du lendemain, de devenir actionnaire et boursicoteur grâce à des véhicules juridiques qui ne leur offriront sans doute pas beaucoup de possibilité de dire leur mot.
Nous ne pensons donc pas que la première préoccupation des agents de La Poste, en ces temps où est évoquée la « sociétisation » de leur entreprise, soit forcément de bénéficier de quelques actions de la nouvelle société anonyme.
Non, leur première préoccupation, c’est bien plutôt la faiblesse de l’évolution des rémunérations. En huit ans, à La Poste maison mère, si la rémunération des salariés, en moyenne, a progressé de 34 %, celle des fonctionnaires a augmenté de 22 %.
A contrario, la rémunération moyenne des dix plus gros salaires a plus que doublé, passant de 14 809 euros par mois à 30 261 euros, soit une progression de 104 %. Je tiens à votre disposition le graphique qui montre cette évolution contrastée. (M. Gérard Le Cam exhibe ce graphique.)
Au vu de telles inégalités salariales, qui sont encore renforcées, faut-il le dire, par les profondes disparités observées dans les filiales, nous pouvons nous interroger sur l’absolue pertinence de l’intéressement et, a fortiori, du plan d’épargne salariale.
Car ce sont évidemment ceux qui pourront porter sans risque des actions qui tireront le meilleur parti de ces dispositifs et qui seront susceptibles de réaliser quelques plus-values.
Et de fait, les postiers n’ayant pas les moyens d’acquérir un nombre très élevé d’actions de La Poste se retrouveront in fine avec un tout petit revenu annuel, représentatif du cumul du faible dividende assuré par le travail de tous !
En outre, l’intéressement les conduira a priori à rechercher la réalisation d’économies sur leur site de production, ce qui incitera à mettre en cause la qualité du service public pour privilégier la productivité, parfois avec une notion de harcèlement, qui hante ces entreprises et défraie la chronique chaque jour.
Par conséquent, rien, dans l’article 9, ne semble mériter qu’on s’y intéresse vraiment. Il convient donc de supprimer le texte support de cette… Je ne prononcerai pas le mot. (Sourires.)
Tel est le sens de cet amendement que je vous invite à adopter, mes chers collègues.
M. le président. L'amendement n° 306, présenté par MM. Desessard et Muller et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :
Alinéa 5, seconde phrase
Après les mots :
placement d'entreprise
Insérer les mots :
éthiques et responsables socialement et environnementalement
La parole est à M. Jean Desessard.
M. Jean Desessard. La loi parlementaire nous impose de nous respecter – nous ne sommes pas obligés de nous aimer, il ne faut tout de même pas exagérer (Sourires) –, mais nous avons le droit, et même le devoir, de dénoncer un certain nombre de choses.
M. Alain Gournac. Pas en employant certains mots !
M. David Assouline. Ça va ! Il m’est arrivé plusieurs fois ici même de me faire insulter !
M. Jean Desessard. Nous avons tout de même le droit de défendre des faits de société, ou alors, on va loin.
M. Dominique Braye. Il y a des parlementaires qui disent n’importe quoi !
M. le président. Mes chers collègues, ne vous provoquez pas !
Veuillez poursuivre, monsieur Desessard.
M. Jean Desessard. Nous proposons que les fonds communs de placement d’entreprise chargés de gérer les actions issues de La Poste répondent à une certaine éthique et une responsabilité sociale et environnementale. Le contenu et la forme de mon propos me semblent corrects…
Il serait paradoxal que ces fonds communs de placement d’entreprise privilégient des placements qui ne respectent pas l’environnement ou qui incitent au dumping social, ou encore des placements qui soient – ai-je le droit d’employer ce mot, monsieur le ministre ? – toxiques.
M. Dominique Braye. En tout cas, vous, vous l’êtes !
M. Jean Desessard. Il convient que ces fonds communs de placement d’entreprise soient au moins labellisés ISR, c’est-à-dire – je crois que je ne risque rien en le précisant – investissement socialement responsable.
Vous me rétorquerez qu’il n’y a aucun problème, que, bien sûr, La Poste est éthique. Mais si vous êtes totalement convaincus qu’il n’existe que des placements éthiques et responsables sur le plan environnemental, pouvez-vous m’expliquer pourquoi Tocqueville Finances – avec laquelle, vous l’avez finalement dit vous-même, monsieur le ministre, La Poste envisageait un partenariat – a été sanctionnée en 2004 par l’Autorité des marchés financiers et soumise à 300 000 euros d’amende ? Moi, je vous propose de réaliser des investissements.
M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue !
M. Jean Desessard. Je souhaitais citer un second exemple, mais, tout en restant à votre disposition, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, j’y reviendrai lors des explications de vote.
M. le président. L'amendement n° 247, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 6, deuxième phrase
Remplacer les mots :
selon les méthodes objectives couramment pratiquées
par le mot :
comme
La parole est à M. Bernard Vera.
M. Bernard Vera. L’un des objets du plan d’épargne salariale de La Poste sera, a priori, de permettre aux postiers de devenir en partie propriétaire de leur entreprise, en disposant de quelques actions regroupées dans les écritures d’un fonds commun de placement.
Notons toutefois que, si la part de capital détenue restera minoritaire, rien n’est dit sur la quotité qu’elle pourrait atteindre. Grâce à son épargne salariale, le postier de base pourra acquérir dix, vingt actions, ou plus, de La Poste.
La seule inconnue pour le moment réside dans le prix de vente de l’action et les conditions de détermination de la valeur de La Poste. Le texte indique que cette évaluation est conduite, selon « des méthodes objectives couramment pratiquées », ce qui, à nos yeux, est en fait tout le contraire de la précision.
Qu’entend-t-on par « méthodes objectives couramment pratiquées » ? Il s’agit d’une évaluation fondée sur des situations antérieures, décrites dans le détail et qui tente de procéder à un inventaire suffisamment précis des biens dont dispose l’entreprise, mais aussi de sa valeur immatérielle – et c’est sans doute là que réside la difficulté.
Si La Poste n’a pas énormément de difficultés à définir la valeur de son patrimoine physique – locaux, matériels, outillages –, elle est, en revanche, bien en peine de donner un sens à la valeur immatérielle de l’entreprise, une valeur référence qui semble dépasser assez facilement les prévisions ou les estimations les plus pessimistes.
En tout cas, quand on sait que c’est la Commission des participations et des transferts qui fixera la valeur de la société, il y a de quoi être inquiet. En effet, cette émanation de l’Agence des participations de l’État n’a pas su repérer à temps les problèmes boursiers du groupe EADS, qui ont conduit à la condamnation de l’ancien P-DG.
Cette difficulté à évaluer le « fonds de commerce » de La Poste, la valorisation de l’enseigne et celle du nom commercial sont autant d’éléments qui ne peuvent apparaître dans l’évaluation prétendument objective que l’on va mettre en œuvre.
Le danger d’une sous-capitalisation de La Poste figure clairement à l’origine de ce texte, et c’est aussi en cela qu’il est porteur de privatisation larvée.
M. le président. L'amendement n° 248, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 6, deuxième phrase
Supprimer les mots :
, selon une pondération appropriée à chaque cas,
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Mme Éliane Assassi. Cet amendement participe à la nécessaire clarification sur les conditions de fixation de la valeur de l’action La Poste par l’Agence des participations de l’État, ou APE.
On se souviendra qu’appelée de leurs vœux par MM. Marini et Arthuis, l’Agence a quelque peu failli lors de la première affaire un peu importante à laquelle elle a été confrontée : l’affaire EADS.
Cette agence a un défaut, celui de ne pas disposer des moyens de gérer les actifs de l’État autrement qu’en produisant quelques arbitrages entre recherche de dividendes et recherche de plus-values de cession.
Ainsi, dans l’affaire EADS, nous avions souligné, dans le texte de notre contribution : « Il est en effet à peu près avéré que ni la Commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations – où siège pourtant le rapporteur général du Sénat –, ni l’Agence des participations de l’État n’ont été en mesure, à quelque moment que ce soit, de prévenir ce qui est devenu un sinistre boursier avant de prendre la forme d’une crise industrielle et sociale majeure.
« Au demeurant, l’actualité récente devrait, de notre point de vue, conduire à reconsidérer le plan Power 8, prévoyant plusieurs milliers de suppressions d’emplois en France, notamment avec la signature d’un important contrat entre EADS et l’armée nord-américaine.
« Une bonne partie des critiques semble devoir être dirigée sur l’Agence des participations de l’État qui, au lieu d’être l’outil de politique industrielle à disposition du ministère de l’économie et des finances qu’elle pourrait être, ne s’avère finalement constituer, à l’expérience, qu’une structure de gestion des participations de l’État avec l’apparence de l’administration de biens.
« Les recommandations formulées par l’APE, avant la crise boursière touchant le titre EADS, de cession partielle des parts de l’État illustrent cette conception de courte vue qui suscite des interrogations sur la stratégie et la politique patrimoniale de l’État en matière de participations industrielles. »
Nous accorderons donc a priori assez peu de vertu à l’évaluation de l’APE, d’autant que, après avoir évoqué des méthodes habituelles et objectives d’évaluation, l’article 9 nous invite à pondérer ces méthodes objectives au moyen de critères propres à la situation de La Poste.
En clair, la fixation de la valeur de La Poste par l’APE sera non pas une évaluation juste, mais simplement une évaluation « politique » fondée sur une évidente sous-capitalisation originelle destinée à laisser escompter rapidement aux salariés participant au plan d’épargne salariale la perspective, au terme de l’obligation de portage, d’une plus-value non négligeable.
Nous refusons ce type de construction adapté non pas à la réalité de l’entreprise concernée, mais uniquement aux souhaits des autorités politiques de pouvoir justifier d’une future ouverture de capital, par défaut originel de capitalisation.
M. le président. L'amendement n° 249, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 6, deuxième phrase
Remplacer les mots :
de l'existence des filiales et des perspectives d'avenir
par les mots :
et de l'existence de filiales
La parole est à Mme Mireille Schurch.
Mme Mireille Schurch. Cet amendement vise à compléter la démarche de clarification du texte de l’article 9.
Aux termes de ce membre de phrase de l’alinéa 6 : « de l’existence des filiales et des perspectives d’avenir », une nouvelle possibilité existe pour procéder à la sous-évaluation du capital de La Poste.
On nous parle en effet d’une évaluation qui pourrait être fondée sur la consolidation du groupe La Poste – à la fois les actifs financiers importants concentrés chez Poste Immo et les pertes récurrentes observées en Allemagne sur Geopost DPD – et sur ses perspectives d’avenir.
Eh bien, mes chers collègues, à force d’entendre M. le ministre et les parlementaires de la majorité nous parler de la disparition progressive du courrier, de l’accroissement de la concurrence et des nécessités d’alliance pour éviter de disparaître, on a l’impression que les perspectives d’avenir de La Poste sont plutôt sombres et risquent de peser sur l’évaluation de son capital.
Au demeurant, procéder notamment à l’évaluation de son patrimoine immobilier au moment où le marché manifeste une certaine déprime participe à la sous-capitalisation de La Poste.
En tout état de cause, cette notion de « perspectives d’avenir » n’est pas rassurante en soit et semble bel et bien instrumentalisée pour, en quelque sorte, anticiper la spéculation financière qui ne manquera pas de se produire sur le titre.
Du fait de l’hypothétique devenir de La Poste, on assistera à une décote de 5 %, 10 % voire 15 % de la valeur de l’entreprise.
Nous vous invitons donc à voter en faveur de cet amendement de clarification.
M. le président. L'amendement n° 394, présenté par MM. Teston, Bourquin, Botrel, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 6, deuxième phrase
Après les mots :
de l'existence des filiales
insérer les mots :
, de ses effectifs et de sa présence territoriale
La parole est à M. Yannick Botrel.
M. Yannick Botrel. Nous voilà face à l’une des nombreuses ambiguïtés de ce texte.
Vous avez affirmé, monsieur le ministre, que le Gouvernement et vous-même êtes les gardiens d’un capital de La Poste à 100 % public.
Quand à nous, nous ne perdons pas de vue qu’il s’agit désormais d’une société anonyme, avec ce qui en découle, même si, pour l’heure, son capital est public.
L’illustration de cette situation apparaît parfaitement à travers les conditions de fixation de la valeur de la société La Poste.
D’où cet amendement, par lequel nous vous interpellons à nouveau, toujours avec la même constance ; La Poste n’est pas une entreprise comme les autres et elle ne pourra pas l’être.
Dès lors, nous sommes inquiets de constater que la valeur de La Poste devra être déterminée, entre autres critères, sur ses bénéfices.
Or La Poste, au 1er janvier 2010, ne devrait pas annoncer de bénéfices, ce en quoi elle ne sera pas différente de nombreuses entreprises affectées par la crise et qui, aujourd’hui, sont en difficulté.
Nous demandons donc que soit considérée la spécificité de La Poste, dont le patrimoine, dans tous ses aspects, y compris immatériels, doit être pris en compte dans le calcul de sa valeur et en aucun cas bradé.
M. le président. L'amendement n° 341, présenté par MM. Teston, Botrel, Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 6
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Dans le même délai d'un mois à compter de sa saisine par le ministre chargé de l'économie, la Commission des participations et des transferts peut s'opposer à l'opération d'évaluation si les conditions de celle-ci ne sont pas conformes aux intérêts patrimoniaux des personnes publiques. L'opposition de la commission est rendue publique.
La parole est à M. Richard Yung.
M. Richard Yung. Il s’agit d’un amendement prudentiel, pour reprendre un terme qui est beaucoup utilisé, notamment dans le secteur bancaire. Ce qui est bon pour les banques doit aussi être bon pour La Poste.
Quelques mois avant juillet 2008, la direction de La Poste avait émis le souhait de procéder à une ouverture du capital du groupe. La tempête bancaire et boursière a poussé le Gouvernement et les dirigeants de La Poste à surseoir à leur projet de privatisation, notamment de peur que l’évaluation du groupe, en ce moment de crise, n’aboutisse à une sous-évaluation des avoir.
Je rappelle que La Poste, qui est une entreprise chargée de missions de service public, est, de surcroît, une entreprise largement bénéficiaire. En 2007, son bénéfice s’élevait à 1 milliard d’euros – ce ne sera pas le cas en 2010 –, soit une valorisation de 7 milliards d’euros, si l’on adopte l’une des clés souvent retenue en matière d’évaluation des entreprises.
Malheureusement, entre-temps, je l’ai dit, la crise est passée, et nous craignons que les perspectives pour 2009, 2010 et 2011 ne soient beaucoup moins souriantes pour La Poste et que, par conséquent, son bénéfice et sa valorisation soient largement en baisse.
C’est pourquoi nous voudrions introduire une mesure de prudence et donner à la Commission d’évaluation des participations et des transferts, qui est composée de hauts fonctionnaires tout à fait respectables auxquels on peut faire confiance, la possibilité de surseoir au prix de cession et à l’opération d’augmentation ou d’ouverture du capital si elle estime que la valeur de l’entreprise La Poste, pour des raisons tenant à la conjoncture économique, est très largement sous-évaluée.
M. le président. L'amendement n° 505, présenté par MM. Teston, Botrel, Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 7
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Daniel Raoul.
M. Daniel Raoul. L’article 9 concerne en réalité les modalités de l’application des dispositifs de l’intéressement et de l’épargne salariale à la désormais SA La Poste.
Il est hors de question pour nous de ne pas faire participer les salariés à l’intéressement d’une entreprise. Cependant, certains alinéas prévoient plus spécifiquement les modalités selon lesquelles des augmentations de capital ou des cessions d’actions réservées peuvent être réalisées dans le cadre d’un fonds commun de placement d’entreprise. Il est par ailleurs précisé que, dans le cadre d’une attribution gratuite d’actions comme il en est prévu à l’article 10 – nous y reviendrons, car je pense que c’est là le nœud du problème –, la Commission des participations et des transferts dispose en outre d’un droit d’opposition dans un délai d’un mois dans le cas où les intérêts patrimoniaux des personnes publiques, qui sont les actionnaires principaux, ne seraient pas préservés.
Nous sommes ici au cœur du problème que nous évoquons depuis le début de l’examen de ce projet de loi : l’entrée de capitaux privés dans La Poste pourrait bien se réaliser par le biais de ce qu’il faut bien appeler un cheval de Troie, à savoir par l’attribution d’actions au personnel.
M. Jean Desessard. Exactement !
M. Daniel Raoul. Il n’est absolument par certain que les salariés garderont ad vitam æternam leurs actions !
M. Jean Desessard. Absolument !
M. Daniel Raoul. Si vous permettez que je m’exprime, mon cher collègue…
M. Jean Desessard. Je ne fais que manifester mon enthousiasme ! (Rires.)
M. Daniel Raoul. Comment, dans ces conditions, affirmer que le capital de La Poste restera à 100 % public si dans le même temps est ménagée la possibilité que des capitaux privés entrent au capital ?
Le risque est donc bien réel, au point que l’article 9 du projet de loi dispose : « Les personnels de La Poste et de ses filiales ainsi que leurs ayants droit ne peuvent détenir qu'une part minoritaire du capital de La Poste. »
Si je me sentais autorisé à faire de l’humour à cet instant du débat, je trouverais le dispositif un peu curieux ! Le Gouvernement craint-il qu’un jour les personnels de La Poste ne détiennent une part majoritaire de leur entreprise et que l’on n’aboutisse à une forme d’autogestion à La Poste ? Il est vrai que ce serait original ! De qui se moque-t-on ? Aurait-il été prévu d’attribuer une part majoritaire d’actions aux personnels ? C’est impensable ! De plus, qui donc aurait pu être destinataire de ces actions gratuites ?
Quoi qu’il en soit, cette attribution d’actions laisse présager l’entrée de capitaux privés lorsque les personnels souhaiteront se séparer de leurs parts. Et, que je sache, les personnels de La Poste ne sont pas des personnes morales publiques ! En réalité, démonstration est faite que le risque de privatisation que nous évoquons depuis le début de l’examen de ce projet de loi est bien réel, et l’article 9 le confirme. Mais nous y reviendrons encore lors de la discussion de l’article 10 !
Cela met en tous les cas à nu le projet du Gouvernement : il est bien d’ouvrir, à terme, le capital de La Poste à des intérêts privés. Vous pouvez écrire l’histoire comme vous le voulez, monsieur le ministre, mes chers collègues, les faits sont là, et vous l’inscrivez même aux articles 9 et 10. (M. Michel Teston applaudit.)
M. le président. L'amendement n° 393, présenté par MM. Teston, Bourquin, Botrel, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 7
Supprimer les mots :
ainsi que leurs ayants droit
La parole est à M. David Assouline.
M. Jean Desessard. Attention ! (Sourires.)
M. le président. Monsieur Desessard, vous n’avez pas la parole !
M. David Assouline. Monsieur le ministre, mes chers collègues, il s’agit, vous l’avez compris, d’un amendement de repli.
Nous ne souhaitons pas étendre cette disposition à l’ensemble des « ayants droit », notion qui renvoie à une réalité extrêmement diverse et qu’il faudrait tout d’abord préciser.
En effet, la notion d’ayant droit fait référence à une personne physique ou morale bénéficiant de droits créés par un contrat ou imposés par la loi. Vous en conviendrez, tout cela est bien vague !
Je me permets également de rappeler qu’il est question depuis des années de permettre à des ressortissants communautaires de devenir fonctionnaire. Or, là encore, la notion d’ayants droit n’est pas la même dans tous les pays de l’Union.
Surtout, et ce n’est pas le moindre des arguments, l’ouverture aux ayants droit me paraît tout à fait incompatible avec la préservation d’un capital 100 % public de l’entreprise La Poste, et ce d’autant plus que la cession d’actions détenues par les personnels de la Poste n’est pas du tout encadrée : rien n’empêche aujourd’hui des personnes morales, légalement ayants droit de fonctionnaires de La Poste, de céder leurs actions à qui bon leur semble. Cela s’appelle une privatisation !
Vous pouvez constater, monsieur le président, que l’ensemble de mes propos étaient eux-mêmes absolument encadrés et que je n’ai pas saisi l’occasion pour répondre à un membre du Gouvernement qui oublie qu’il est ici en sa qualité de ministre et non de maire de Nice et qu’il a la responsabilité de tous les citoyens, même des supporters du PSG.
M. Dominique Braye. C’est vous qui le lui avez soufflé à l’oreille ! Vous n’avez rien compris !
M. Christian Cambon. On ne va pas recommencer ! C’est dingue ! Il ne comprend rien !
M. Dominique Braye. Il n’a jamais rien compris !
M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul.
M. Daniel Raoul. Monsieur le président, j’aimerais bien que vous appliquiez l’article 36 du règlement, en particulier ses alinéas 7 et 10. L’ambiance de nos débats ne serait que meilleure et leur clarté plus grande s’ils n’étaient pas perturbés par des interruptions, tout spécialement de collègues qui n’ont pas participé depuis le début à l’examen de ce projet de loi.
M. Michel Teston. Très bien !
M. le président. Monsieur Raoul, je vous donne acte de votre déclaration.
L'amendement n° 307, présenté par MM. Desessard et Muller et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :
Alinéa 7
Remplacer les mots :
qu'une part minoritaire
par les mots :
que 10 %
La parole est à M. Jean Desessard, mais uniquement pour défendre son amendement. (Sourires.)
M. Jean Desessard. Certainement, monsieur le président : personnellement, je n’aime pas ce genre de bagarres, savez-vous ! J’aime bien un climat apaisé, où l’on ne prononce pas des mots comme « exploitation de l’homme par l’homme »… Encore que… l’exploitation de l’homme par l’homme, cela existe !
Mme Isabelle Debré. Pas chez nous !
M. Jean Desessard. Je vous ai déjà fait part, mes chers collègues, de mes inquiétudes au sujet du possible transfert des droits de propriété vers le privé par le biais de la vente de leurs actions par les personnels, via les fonds de placement. Le risque, toujours le même, est celui d’une dilution du capital à moyen ou à long terme – non pas l’an prochain, évidemment ; non pas avant les élections législatives, évidemment ; non pas avant l’élection présidentielle, évidemment ; mais dès le lendemain des élections législatives, évidemment, et dès le lendemain de l’élection présidentielle, évidemment ! (Sourires) –, et donc d’une véritable privatisation de La Poste, par ce biais.
Le principe est posé dans le projet de loi que les personnels de l’entreprise ne peuvent détenir « qu’une part minoritaire du capital ». Cette formulation est par essence ambiguë. Qu’est-ce qu’une part minoritaire ? Cela signifie-t-il que les personnels du groupe devront détenir moins de 50 % des parts du capital ? Cela ferait d’eux une minorité dans l’absolu, mais ne les empêcherait pas d’être plus nombreux que d’autres actionnaires, comme l’État par exemple. Mais peut-être qu’être minoritaire signifie que l’on détient moins de parts que l’actionnaire principal ? Ce serait donc une part minoritaire relative. Ainsi, si l’actionnaire principal détient 40 % du capital, on peut imaginer que les personnels détiennent jusqu’à 39,99 % de celui-ci !
C’est un peu compliqué, je l’admets, mes chers collègues, mais vous m’avez compris : cette définition de « part minoritaire » est bien trop floue. Si l’idée est de limiter l’influence des personnels, alors, autant le dire franchement !
Mon amendement vise donc à limiter à 10 % la part du capital de La Poste détenue par ses personnels et leurs ayants droit. J’ai déjà indiqué, en défendant un amendement précédent, les réserves que suscite de ma part l’idée qu’une proportion variable des sources de revenus des postiers dépende de la rentabilité financière du service public. Alors autant limiter les… Excusez-moi de m’interrompre, mes chers collègues, mais j’ai peur d’utiliser, je ne sais pas si j’ai le droit d’utiliser le mot qui me vient à l’esprit… Et puis non, non ! Je ne crains rien, je suis un représentant élu par le peuple, j’assume, et je le dis : alors, autant limiter les dégâts. (Sourires.)
C’est pourquoi je vous invite, mes chers collègues, à voter cet amendement de précision.
M. le président. L'amendement n° 253, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 8
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. L’alinéa que cet amendement vise à supprimer est symbolique. Il donne en effet la possibilité d’étendre à l’ensemble des personnels de La Poste le dispositif de participation aux résultats de l’entreprise, et renvoie bien évidemment à un décret en Conseil d’État pour en préciser les modalités d’application.
Par principe, nous refusons, vous l’aurez compris, l’actionnariat salarié. En effet, nous estimons que l’intérêt financier de tout salarié est qu’il existe le moins de corrélation possible entre les risques qui pèsent sur son revenu et ceux qui affectent son épargne.
On se souvient d’Enron, dont les salariés avaient perdu en même temps leur emploi et leurs économies : à la fin de l’année 2000, leur plan de retraite était constitué à près de 60 % d’actions Enron ; un an plus tard, celles-ci n’avaient plus de valeur.
La faillite d’Enron était d’ailleurs l’un des tout premiers signes de la crise actuelle, qui reste avant tout une crise liée à la folie et à la boulimie des dividendes, maladie grave et chronique qui caractérise les grands actionnaires. Au demeurant, d’autres plans de retraite étaient à l’époque encore plus surpondérés en actions propres : je ne citerai que ceux de Coca-Cola – 81 % –, Pfizer – 85 % – ou Procter and Gamble – 95 %.
La participation, qui, vieux serpent de mer, revient périodiquement dans le débat, est donc un leurre pour les salariés, et ce à un double titre. D’une part, il met en danger les économies des salariés – au demeurant faibles, vu la dégradation de leur pouvoir d’achat – en les soumettant aux aléas du « casino de la Bourse ». D’autre part, contrairement à ce qui est parfois avancé, il ne confère évidemment aucun pouvoir aux salariés sur la gestion de leur entreprise.
De plus, cette possibilité confirme la perspective d’une privatisation de La Poste à court terme, puisque c’est le droit commun des sociétés qui s’applique.
Je ne vois en effet dans ce projet de loi aucune obligation, pour les dispositifs de participation des salariés qui ne seraient pas des actions à titre gratuit, que, à l’issue de la période d’acquisition, ces actions soient apportées à un fonds commun de placement d’entreprise ! Cela signifie-t-il que les salariés ne seront obligés de garder leurs actions que durant une période de deux années et qu’ensuite ils pourront les revendre sans contrainte ? Ce serait, pour le moins, la porte ouverte à une privatisation pure et simple !
M. le président. L'amendement n° 254, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 9
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Évelyne Didier.
Mme Évelyne Didier. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur cette série d’amendements ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Nous restons dans la logique de l’intéressement et de la participation, et, surtout, nous souhaitons prendre dans cette loi toutes les dispositions nécessaires pour assurer dans les meilleures conditions possibles les facultés de participation offertes aux salariés. La commission a donc émis un avis défavorable sur l’amendement no 504, qui tend à une suppression.
Pour les mêmes raisons, la commission a émis un avis défavorable sur l’amendement no 252, qui vise à supprimer les alinéas 4 à 7 de l’article 9.
Monsieur Desessard, il ne me paraît pas utile que la loi place La Poste dans une position particulière au regard des autres entreprises. En revanche, dans l’esprit du Grenelle de l’environnement, on ne peut qu’encourager l’entreprise à privilégier ce type de placements, nous avons déjà eu l’occasion d’examiner ce sujet à l’occasion de la discussion d’autres articles. J’émets donc le même avis défavorable sur votre amendement no 306.
Contrairement à ce qu’affirment les auteurs de l’amendement no 247, amendement d’ordre rédactionnel, l’expression « méthode objective couramment pratiquée » utilisée dans le texte du projet de loi est plus précise que celle qui est proposée dans l’amendement. Avis défavorable.
L’amendement no 248, également rédactionnel, vise à supprimer une expression dont la commission estime qu’elle doit être conservée. L’avis est donc défavorable.
Pour ce qui concerne l’amendement no 249, il est bien sûr de bon sens que l’évaluation prenne en compte les perspectives de développement de La Poste pour apprécier correctement le niveau de son capital. Accepter cet amendement reviendrait à figer La Poste dans un modèle de développement passéiste : ce serait finalement le meilleur moyen de causer sa perte, ce que naturellement ni les auteurs de l’amendement, j’en suis sûr, ni le Gouvernement, ni le Parlement ne souhaitent. La commission a émis un avis défavorable.
Sur l’amendement n° 394, il s’agit ici d’évaluer la valeur de la société en vue du calcul du prix de cession des actions. La formulation du projet de loi est celle qui est couramment utilisée et il n’y a pas lieu de la modifier. La croissance des effectifs est souhaitable sur le plan social, mais ne correspond pas à un critère de mesure de la valeur financière. Avis défavorable.
En ce qui concerne l’amendement n° 341, je suis comme vous très attaché aux intérêts patrimoniaux de l’État et je ne souhaite en aucun cas que l’on brade le capital de La Poste. Sur cette question, je fais entièrement confiance au ministre chargé de l’économie pour contrôler le bien-fondé des estimations de cette commission. Aussi, l’avis est défavorable.
S’agissant de l’amendement n° 505, l’article 1er du projet de loi indique, comme vous le savez, que le capital de La Poste est détenu par l’État et par d’autres personnes morales de droit public, à l’exception de la part de capital pouvant être détenue au titre de l’actionnariat des personnels dans les conditions prévues par le même texte. Par conséquent, le septième alinéa de l’article 9 ne fait effectivement que tirer les conséquences de ces dispositions. La commission émet un avis défavorable.
Je suis surpris par l’amendement n° 393, qui vise à supprimer une disposition très utile et éminemment sociale dans la mesure où on donne la possibilité aux ayants droit du personnel de La Poste de détenir une part minoritaire du capital de la société. Avis défavorable.
Sur l’amendement n° 307, le projet de loi prévoit que la part du capital détenue par le personnel ne peut être majoritaire. Je ne comprends pas les raisons qui conduiraient à choisir un pourcentage de 10 %. En tout état de cause, ce n’est pas à la loi de fixer une limite aussi précise. Avis défavorable
La disposition que vise à supprimer l’amendement n° 253 est actuellement absente de l’article 32 de la loi du 2 juillet 1990, seuls les salariés de France Télécom ayant accès au dispositif de participation de droit commun. Le projet de loi donne la possibilité d’étendre ce dispositif à tous les personnels de La Poste, ce qui est une bonne chose. Je suis d’ailleurs surpris que le groupe CRC-SPG présente tantôt des amendements demandant l’application intégrale des dispositions du code du travail pour le personnel de La Poste et tantôt des amendements réclamant et créant un traitement sur mesure pour certaines catégories de personnel. Il me semble qu’ils ont tous droit à cet accès. Avis défavorable.
Enfin, sur l’amendement n° 254, la commission émet un avis défavorable, car le dernier alinéa que vise à supprimer cet amendement est motivé uniquement par des considérations rédactionnelles.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Estrosi, ministre. Après les explications de M. le rapporteur, le Gouvernement émet un avis défavorable sur les amendements nos 504, 252, 306, 247, 248, 249, 394, 341, 505, 393, 307, 253 et 254.
Toutefois, je souhaite apporter une précision sur l’amendement n° 505, présenté par M. Daniel Raoul. En réponse à votre intervention sur l’actionnariat salarié, monsieur le sénateur, je tiens à indiquer qu’il n’y a que trois catégories d’actionnaires de La Poste : l’État, la Caisse des dépôts et consignations et les salariés. Ces derniers n’auront que trois possibilités pour revendre leurs actions : soit entre eux, dans le cadre d’une bourse qui sera organisée à cet effet, soit à l’État, soit à la Caisse des dépôts et consignations. Donc, à aucun moment, l’opportunité ne sera offerte aux salariés de pouvoir céder leurs parts à des actionnaires privés quels qu’ils soient.
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote sur l'amendement n° 306.
M. Jean Desessard. Tout à l’heure, j’avais demandé une explication puisque je souhaite, par cet amendement, que les fonds communs de placement d’entreprise chargés de gérer les actions issues de La Poste répondent à une certaine éthique et une responsabilité sociale et environnementale. Et comme je sais que La Poste veut passer des accords de partenariat avec Tocqueville Finance, société sanctionnée en 2004 par l’Autorité des marchés financiers qui lui a infligé une amende de 300 000 euros, je voulais savoir si nous pouvions avoir des précisions sur les conditions de ce partenariat entre La Poste et Tocqueville Finance ; je n’en ai pas entendu.
Comme j’avais évoqué 2004, vous auriez pu me répondre : « Monsieur Desessard, vous êtes archaïque, Tocqueville Finance s’est bien améliorée depuis ». Aussi, je veux signaler que La Poste envisage également un partenariat avec la société Oddo Finance, qui a elle aussi été condamnée à une amende de 50 000 euros, en 2009, par l’Autorité de contrôle des assurances et des mutuelles.
Cela commence à faire beaucoup. Par conséquent, je demande au ministère de tutelle de veiller à cette « situation ». J’ai employé le mot « situation », mais j’aurais pu employer un autre mot… (Sourires.)
Si M. le ministre de l’industrie chargé de La Poste pouvait veiller à ce que les partenariats entre La Poste et les autres sociétés avec lesquelles elle souhaite entretenir des activités de diversification puissent se faire selon les règles éthiques correspondant à notre souci du service public, j’en serais très satisfait.
M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote sur l'amendement n° 505.
M. Daniel Raoul. Mon explication de vote vaudra également pour l’amendement n° 393, présenté par M. Assouline et qui concerne, lui aussi, les ayants droit.
J’ai bien entendu ce que vous m’avez dit, monsieur le ministre, mais dans ce cas, il aurait été prudent de définir comment les actions des personnels peuvent s’échanger quand les salariés veulent, pour des raisons personnelles, familiales ou des accidents de la vie, se « séparer » de leurs actions.
Il aurait fallu organiser cette fameuse bourse que vous évoquez et dire dans la loi que ces transmissions d’actions doivent rester à l’intérieur d’un fonds commun de placement alimenté uniquement par les actions attribuées aux salariés et – je reviens sur l’amendement n° 393 – ne pas étendre le dispositif aux ayants droit, car il n’y a plus aucune relation entre les ayants droit et la SA La Poste.
À défaut, vous allez vous retrouver avec une dissémination d’actions dans la nature, exactement comme s’il s’agissait d’actions d’une société à capitaux privés, quoi que vous disiez et quoi que vous fassiez.
Je ne sais pas comment vous pouvez corriger ce manque d’organisation de transmission entre les salariés de leurs actions, mais faites au moins que lors d’un décès les ayants droit soient obligés de passer par ce fonds commun de placement interne à la SA La Poste. Si vous êtes cohérent et si vous voulez que cette SA demeure à capitaux publics et avec des personnes morales publiques, il faut organiser la transmission et supprimer la dissémination dans la nature.
M. le président. La parole est à Mme Mireille Schurch, pour explication de vote.
Mme Mireille Schurch. Nous sommes absolument d’accord avec ce qui vient d’être dit. Il est en fait inscrit dans la loi qu’il y aura des capitaux privés puisque la cession n’est pas clairement prévue dans ce projet de loi.
Comme mon collègue Daniel Raoul, je demande à M. le ministre pourquoi cette cession n’est pas clairement explicite, de façon à éviter l’écueil que l’on vient d’indiquer, sinon on aura, bien évidemment, tout de suite des capitaux privés qui seront disséminés, puis peut-être plus tard recomposés.
M. le président. La parole est à M. Bernard Vera, pour explication de vote sur l'article 9.
M. Bernard Vera. Nous pourrions nous interroger sur l’obstination de la majorité et du Gouvernement à vouloir transformer le statut de La Poste et à procéder à sa « sociétisation ».
Nous venons de montrer, dans la discussion de l’article 9, que tout allait manifestement être fait pour que la valeur de la société anonyme soit initialement la plus faible possible.
Il s’agit notamment d’offrir, dans un délai relativement bref, aux agents de La Poste, victimes depuis plusieurs années du gel des rémunérations dans la fonction publique, la perspective du bonheur de gagner un euro de plus sur chaque action dont ils seront détenteurs.
Mais il s’agit aussi à compter de 2011, année de l’ouverture à la concurrence du domaine réservé, et de 2012, année de clôture du contrat de plan en cours, de créer les conditions de l’ouverture du capital à d’autres investisseurs.
Car le véritable objectif de cette loi est de mettre La Poste – on peut dans cet esprit faire confiance à la gestion à court terme de l’Agence des participations de l’État – en situation de participer, par tranches successives de cession du capital, au redressement des comptes de l’État.
C’est ainsi que vous escomptez, monsieur le ministre, couvrir une partie des 20 milliards d’euros de ressources qui doivent être trouvées chaque année pour arriver en 2014 aux 3 % de déficit public, que vous avez promis à l’Europe en échange de sa mansuétude sur le dérapage actuel.
Comment ne pas faire le lien, d’ailleurs, entre les 126 milliards d’euros de déficit annoncé à la fin du mois de septembre 2009 et les 126 milliards d’euros d’actif net de La Poste à la fin de 2008, des actifs comptabilisés, rappelons-le, hors encours du Livret A ?
En réalité, il s’agit de faire en sorte qu’une partie de ces actifs vienne compenser le désastre budgétaire des réformes du paquet fiscal, de la suppression de la taxe professionnelle, de l’allégement continu de l’impôt sur les sociétés, des missions et structures des collectivités territoriales !
Eh bien, nous refusons clairement ce choix politique, meurtrier pour le service public, signe d’une soumission des politiques publiques aux dogmes de la Commission européenne, sans apport concret au développement équilibré du pays.
M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote.
M. Daniel Raoul. Je pensais que, à la suite de la présentation des amendements nos 505 et 393, nous aurions pu obtenir une réponse soit de M. le rapporteur, soit de M. le ministre concernant la dissémination de l’actionnariat. À nos yeux, cette dissémination est un cheval de Troie à l’égard de la privatisation.
Nous voulons avoir des garanties sur l’organisation de la transmission des actions attribuées aux salariés. Comprenez-moi bien, mes chers collègues, il ne s’agit absolument pas, contrairement à ce qui a été dit quelquefois, de nous mettre en porte-à-faux sur l’intéressement, créé par le général de Gaulle (M. Alain Gournac opine), puis modifié par Laurent Fabius, en particulier à destination des PME innovantes, si vous vous rappelez le contexte dans lequel cela s’était passé.
Mme Isabelle Debré. Tout à fait !
M. Daniel Raoul. Donc, nous sommes forcément favorables à l’intéressement.
Mme Isabelle Debré. Je suis heureuse de vous l’entendre dire !
M. Alain Gournac. C’est bien de le déclarer !
M. Daniel Raoul. Ne nous faites pas de procès d’intention, monsieur Gournac !
M. David Assouline. Nous n’avons pas à nous défendre sur ce point ! C’est nous qui avons modernisé l’économie !
M. Daniel Raoul. La seule question que je me pose, c’est de savoir quelles seront les conditions de la transmission des actions attribuées aux salariés, afin d’empêcher leur dissémination, en particulier si elles sont transmises aux ayants droit.
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Par décret !
M. Daniel Raoul. Or M. le rapporteur et M. le ministre n’ont toujours pas répondu à cette question de base.
M. Richard Yung. Parce qu’ils ont un problème !
M. Daniel Raoul. Par conséquent, si je n’obtiens pas des précisions, je voterai contre cet article.
M. Alain Gournac. Nous, nous sommes pour !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Christian Estrosi, ministre. Vraiment, j’ai le sentiment que…
Tout est écrit noir sur blanc dans le projet de loi, à l’alinéa 5 de l’article 9, et vous ne pouvez pas faire semblant de ne pas l’avoir lu ! Je vous en donne lecture : « Les autres dispositions du livre III, de la troisième partie du code du travail, à l’exception du titre II, sont applicables à l’ensemble des personnels de La Poste, y compris ceux mentionnés aux articles 29 et 44 de la présente loi. Des augmentations de capital ou des cessions d’actions réservées peuvent être réalisées, dans le cadre d’un ou plusieurs fonds communs de placement d’entreprise, conformément aux articles L. 3332-18 et suivants du code du travail, sous réserve des dispositions qui suivent. »
M. Daniel Raoul. Jusque-là il n’y a pas de problème !
M. Christian Estrosi, ministre. Pour le reste, cela relève du domaine réglementaire. Le Gouvernement prendra, par décret, les dispositions nécessaires…
M. David Assouline. Il faut vous faire confiance alors !
M. Christian Estrosi, ministre. … pour que les actions détenues par les salariés de l’entreprise ne puissent être cédées qu’à l’État, à la Caisse des dépôts et consignations ou aux salariés entre eux. L’engagement du ministre figurera au compte rendu intégral des débats publiés au Journal officiel de la République française. Que voulez-vous de plus ?
M. Jean-Patrick Courtois. Très bien !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. La loi devrait le prévoir !
M. David Assouline. Il s’agit d’un engagement alors ?
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Monsieur le ministre, si vous en êtes convaincu, pourquoi refuser d’inscrire dans la loi qu’un décret précisera les conditions dans lesquelles les actions détenues par les salariés, y compris celles qui seront transmises à leurs ayants droit, ne peuvent pas être cédées en dehors de l’échange entre les salariés ?
Pour notre part, nous préférons que la loi précise à l’exécutif ce qu’il faut faire.
M. le président. J’ai cru comprendre que c’était ce que le ministre venait de dire.
Vous avez la parole, monsieur le ministre.
M. Christian Estrosi, ministre. C’est inscrit dans la loi, madame Borvo Cohen-Seat ! Lisez l’article 1er du projet de loi : …
M. Dominique Braye. Que vous n’avez pas voté !
M. Christian Estrosi, ministre. … « Le capital de la société est détenu par l’État et par d’autres personnes morales de droit public, à l’exception de la part du capital pouvant être détenue au titre de l’actionnariat des personnels dans les conditions prévues par la présente loi. »
Votre demande est donc satisfaite. Je le répète : tout est inscrit noir sur blanc dans la loi !
M. Dominique Braye. C’est dans l’article 1er que vous auriez dû voter !
M. le président. La parole est à M. Michel Teston, pour explication de vote.
M. Michel Teston. Les précisions que vient de nous apporter M. le ministre figurent effectivement à l’article 1er du projet de loi. Mais nous vous demandons plus particulièrement, notamment Mme Borvo Cohen-Seat, qu’un décret d’application apporte les garanties que nous souhaitons quant à la non dissémination des actions, afin que cet article ne soit pas vidé de son contenu. Sinon, avec les articles 9 et 10, on risque de faire entrer le loup dans la bergerie...
M. le président. Je mets aux voix l'article 9.
(L'article 9 est adopté.)
Article 10
Après l’article 32-2 de la même loi, il est inséré un article 32-3 ainsi rédigé :
« Art. 32-3. – La Poste peut procéder à des attributions gratuites d’actions dans les conditions prévues par les articles L. 225-197-1 à L. 225-197-5 du code de commerce, sous réserve des dispositions du III. – de l’article 32 de la présente loi. Ces attributions peuvent bénéficier également aux personnels de La Poste mentionnés aux articles 29 et 44 de la présente loi. À l’expiration de la période d’acquisition mentionnée au cinquième alinéa du I de l’article L. 225-197-1 du code de commerce, les actions attribuées gratuitement sont apportées à un ou plusieurs fonds communs de placement d’entreprise. L’obligation de conservation prévue au même I est applicable aux parts du fonds commun de placement d’entreprise reçues en contrepartie de l’apport.
« Pour l'attribution gratuite d'actions mentionnée au premier alinéa, la valeur de la société est fixée et rendue publique dans les mêmes conditions que celles prévues au troisième alinéa du III de l’article 32 de la présente loi. En outre, dans le même délai d'un mois à compter de sa saisine par le ministre chargé de l'économie, la Commission des participations et des transferts peut s'opposer à l'opération si les conditions de celle-ci ne sont pas conformes aux intérêts patrimoniaux des personnes publiques. L'opposition de la Commission est rendue publique. Les actions gratuites doivent être attribuées au plus tard soixante jours après la date de l'évaluation. »
M. le président. La parole est à Mme Mireille Schurch, sur l'article.
Mme Mireille Schurch. L’article 10 du projet de loi prévoit la possibilité pour La Poste de procéder à des attributions gratuites d’actions au personnel fonctionnaire comme au personnel contractuel. Nous venons d’en débattre. Les précisions apportées par M. le ministre ne nous ont toujours pas convaincus.
Nous nous opposons à cette possibilité, non pas pour priver les salariés d’une source de revenus supplémentaires, mais parce que ce dispositif est pervers.
Ainsi, l’attribution gratuite d’actions au personnel d’une société anonyme est régie par les articles L. 225-197-1 et suivants du code de commerce. Ces articles instituent une « période d’acquisition », dont la durée est au moins égale à deux ans, au terme de laquelle l’attribution est définitive pour les bénéficiaires. L’assemblée générale extraordinaire fixe la durée minimale de l’obligation de conservation de ces actions, qui est au moins égale à deux ans, sauf si la période d’acquisition est supérieure à quatre ans. Ces actions sont ensuite apportées à un ou plusieurs fonds communs de placement d’entreprise. Ce fonds constitue un outil de gestion de l’épargne salariale.
Or, s’il est ici principalement question d’épargne salariale, nous préférons que celle-ci soit rendue possible par des augmentations de salaire et non par des dispositifs aléatoires – nous l’avons dit précédemment –, et ce pour deux raisons.
Tout d’abord, ces actions ouvrent la porte à la privatisation, car, à l’issue de ces périodes de « probation », rien n’empêche ces salariés de céder leurs actions à d’autres personnes, et nous n’éviterons pas alors l’arrivée de capitaux privés. C’est pour cette raison que je renouvelle la demande formulée par ma collègue Nicole Borvo Cohen-Seat d’inscrire dans la loi qu’un décret précisera les conditions dans lesquelles les cessions d’actions ne peuvent se faire que sous la forme d’échanges entre les salariés eux-mêmes, car, je le répète, nous n’avons pas été convaincus par les précisions qui nous ont été apportées par M. le ministre.
Ensuite, la situation salariale au sein de l’entreprise La Poste démontre la nécessité absolue d’augmenter les salaires, comme les syndicats le réclament régulièrement. Or l’actionnariat salarié justifie la plupart du temps une stagnation des salaires.
Dès lors, comment ne pas établir un lien entre actionnariat salarié et ouverture du capital ?
La question de l’actionnariat salarié suppose un préalable : l’ouverture du capital. Or, l’entrée d’intérêts privés dans une entreprise publique s’accompagne toujours de l’arrivée de nouveaux objectifs : rentabilité financière, retour rapide sur investissements, focalisation sur le court terme, hausse du cours de Bourse. Ces critères entraînent leur lot de suppressions d’emploi, d’externalisations, de délocalisations, de remise en cause des garanties sociales, de détérioration du service public, notamment en termes de continuité de fourniture et de sécurité. Les exemples sont très nombreux, ils vont de la dérive de France Télécom au retard du remplacement des canalisations de gaz en fonte pour GDF.
De plus, la possibilité ouverte par cet article de faire des salariés de petits actionnaires ne permettra pas de donner une dimension citoyenne à cette entreprise. Ceux-ci ne seront pas mieux associés à la politique de l’entreprise parce qu’ils deviendront, de manière minoritaire, actionnaires de l’entreprise.
Pour toutes ces raisons, nous demanderons la suppression de cet article.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L'amendement n° 70 est présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.
L'amendement n° 308 est présenté par MM. Desessard et Muller et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.
L'amendement n° 510 rectifié est présenté par MM. Teston, Botrel, Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste et apparentés.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Gérard Le Cam, pour présenter l’amendement n° 70.
M. Gérard Le Cam. Par cet amendement, nous entendons nous opposer à l’article 10, qui prévoit l’attribution d’actions de la société anonyme La Poste aux agents contractuels et aux fonctionnaires.
Quelle vieille lune que ce mécanisme d’intéressement – car c’est de cela qu’il s’agit ! – selon lequel on valoriserait le mérite des salariés en leur attribuant des actions, qui ont, par nature, une valeur fluctuante !
Agir ainsi, c’est, d’abord et avant tout, méconnaître les aspirations réelles des salariés, à commencer par la première d’entre elles : la reconnaissance du travail qu’ils effectuent à sa juste valeur au travers d’une revalorisation de leurs salaires.
Monsieur le ministre, les salariés ne sont pas dupes, ils savent que l’intéressement, au moyen de l’attribution d’actions gratuites, est synonyme, pour l’avenir, de gel des salaires. Ces mécanismes, très inspirés du secteur privé, attestent de votre volonté réelle de privatiser progressivement La Poste.
Par ailleurs, cette disposition nous semble incompatible avec l’engagement de préserver le caractère 100 % public du capital de la société anonyme La Poste.
Certes, nous nous en doutions, les salariés ne peuvent pas être titulaires de la majorité des actions de La Poste, mais je vous précise, monsieur le ministre, que cette disposition fait sourire ceux que nous avons rencontrés, quand elle ne les offense pas !
En réalité, vous ne prévoyez pas, et c’est significatif, ce qui se passera après la période de deux ans durant laquelle les salariés ne peuvent pas céder leurs actions. Pourtant, c’est une question importante. Pourront-ils céder leurs actions à des tiers non salariés ? Cette question vient d’ailleurs à l’instant d’être débattue. Pourront-ils les céder demain à des entreprises commerciales qui pourraient progressivement devenir majoritaires dans le capital de la société anonyme La Poste ?
Bref, au delà de notre opposition à l’attribution d’actions gratuites, qui va contre l’intérêt des comptes sociaux et celui des salariés, nous sommes hostiles à la privatisation complète de La Poste.
Vous auriez dû prévoir un mécanisme de rachat des actions par l’État ou par La Poste elle-même. En tout cas, il aurait été un peu plus rassurant de prévoir qu’il sera impossible de céder des actions à des personnes physiques autres que les salariés de La Poste. Certes, vous avez tenté tout à l'heure de nous apporter des garanties concernant le rachat d’actions, en nous renvoyant à un décret, mais, monsieur le ministre, il serait souhaitable de le mentionner clairement dans la loi.
L’ambiguïté de cette disposition n’est pas acceptable, et l’article 10 va à contre-courant des besoins de notre protection sociale, qui veut que l’ensemble des éléments directs ou indirects du travail soient soumis à l’ensemble des contributions sociales. C’est pourquoi nous demandons la suppression de l’article 10.
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour présenter l'amendement n° 308.
M. Jean Desessard. L’article 10 tel qu’il est rédigé permet à La Poste d’attribuer gratuitement des actions à ses personnels, conformément aux dispositions du code de commerce.
Pourtant, le capital de La Poste n’a pas vocation à faire l’objet de quelque ouverture que ce soit, tant la nature de sa mission est par essence publique.
En effet, comment concilier actionnariat – et donc rentabilité – avec les missions de service public de cet établissement ? À mon sens, c’est tout simplement impossible. En intégrant une notion de rentabilité, on supprime la dimension sociale et sociétale de La Poste.
Monsieur le ministre, votre proposition peut sembler louable, mais pensez-vous que les salariés de La Poste, dont le salaire moyen s’élève à environ 1 200 euros, auront à cœur de faire fructifier leurs actions ? Ils souhaiteraient plutôt avoir une augmentation de salaire et poursuivre leur mission de lien social en offrant aux usagers un service public digne de ce nom et efficace.
Avec l’adoption de cet article, les fonctionnaires employés par La Poste pourront bénéficier de l’attribution d’actions dans les mêmes conditions que les salariés.
À première vue, et dans un souci d’équité, cette disposition peut paraître positive, mais, comme je viens de l’indiquer, comment croire que des employés aux revenus modestes seront plus intéressés par des actions placées sur des fonds communs de placement d’entreprise, où les conditions de récupération des fonds sont plus que draconiennes, que par des augmentations de salaire ?
Sous couvert d’intentions louables, il ne faudrait pas que ces actions soient, pour le fonctionnaire ou le salarié, un motif de non-augmentation du salaire ou de négociation du salaire lors d’une embauche.
L’ensemble des obligations qui pèsent sur La Poste – un service continu, égal sur tout le territoire, sans distinction d’origine, d’appartenance sociale ou politique ou syndicale – impose un statut public et de fortes garanties déontologiques, incompatibles avec la notion de rentabilité.
M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour présenter l'amendement n° 510 rectifié.
M. Daniel Raoul. Conséquence directe de l’article 1er de ce projet de loi, l’article 10 prévoit les modalités relatives à l’actionnariat salarié.
Avec le dispositif proposé, La Poste pourra procéder à des attributions gratuites d’actions à ses salariés. Toutefois, la deuxième phrase de l’alinéa 2 mentionne que « ces attributions peuvent bénéficier également aux personnels de La Poste mentionnés aux articles 29 et 44 de la présente loi ». Quid de ces autres personnels ? Quelles sont les modalités d’attribution ? Selon quelles conditions ?
Nous nous opposons à cet article pour deux raisons principales.
Tout d’abord, le fait de réserver une part du montant du capital – dont nous n’avons aucune idée précise – aux salariés du groupe va à l’encontre du principe même du capital détenu à 100 % par des personnes morales publiques, mais je ne reviens pas sur cette question.
Vous reconnaîtrez avec moi, monsieur le ministre, que les salariés de La Poste ne sont ni l’État ni des personnes morales de droit public, et encore moins leurs ayants droit.
À l’issue de la période obligatoire de conservation, que se passe-t-il ? À qui ces titres vont-ils aller ? Quelle garantie avons-nous qu’ils appartiendront, de nouveau, à l’État ou à une personne morale de droit public ?
Monsieur le ministre, vous avez dit tout à l'heure que ces questions relèvent du domaine réglementaire. Alors, afin d’éviter la fameuse dissémination d’actions que j’ai évoquée tout à l'heure, inscrivons dans la loi qu’un décret fixera les conditions de transmission de ces actions.
Tel est le sens de l’amendement rectifié que nous déposons suite à l’engagement pris par M. le ministre de régler le problème par voie réglementaire.
Il nous semble que l’actionnariat salarié présente plus de danger que de sécurité, à la fois pour l’entreprise et pour les salariés concernés.
Pour toutes ces raisons, nous nous opposons à la mise en place de la cession gratuite d’actions, et cela quel que soit l’attributaire.
M. Jean Desessard. Eh oui !
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur les trois amendements identiques ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Ces trois amendements visent à supprimer l’article 10.
Je ne reviens pas sur les garanties que nous souhaitons apporter à l’intéressement.
Cet article a simplement pour objet de permettre à La Poste de procéder à des attributions gratuites d’actions. Pourquoi supprimer une telle possibilité, prévue pour le plus grand bénéfice des personnels et permettant à ces derniers de profiter du développement de l’entreprise ?
Par l’adverbe « également », monsieur Raoul, il faut peut-être comprendre que ces attributions gratuites d’actions peuvent bénéficier aussi aux fonctionnaires, ce qui n’est pas prévu par le code du commerce. Mais ces attributions visent exclusivement ces deux catégories de personnel. Les actions ne pourront bénéficier à d’autres. Je vous demande de nous faire confiance sur ce point. (M. Daniel Raoul fait un signe de dénégation.)
Il n’est pas possible de supprimer l’article 10, car cela reviendrait à supprimer l’actionnariat salarié par les attributions gratuites.
M. Daniel Raoul. Et alors ?
M. Jean-Paul Emorine, président de la commission de l'économie. C’est ce qui nous différencie, monsieur Raoul !
M. Daniel Raoul. C’est exact !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Estrosi, ministre. Par ces trois amendements, vous proposez de supprimer l’article 10, qui prévoit la possibilité pour La Poste de réaliser des attributions gratuites d’actions à ses salariés. Le qualificatif est important et j’insiste sur la gratuité à l’intention de ceux qui affirment qu’il vaut mieux améliorer la rémunération. Il s’agit de deux sujets qui ne sont pas comparables !
M. Alain Gournac. Évidemment !
M. Christian Estrosi, ministre. Ces actions gratuites seront attribuées gratuitement aux salariés, qui pourront, ensuite, en disposer librement.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ceux qui le pourront seulement ; c’est ce qui s’est passé à France Télécom !
M. Christian Estrosi, ministre. Je suis donc très surpris que vous proposiez de supprimer ce droit ouvert par le Gouvernement aux salariés et aux fonctionnaires de La Poste.
M. Alain Gournac. Moi aussi !
M. le président. La parole est à Mme Isabelle Debré, pour explication de vote.
Mme Isabelle Debré. Dans cette discussion, il est vrai que nos collègues communistes font preuve de cohérence !
M. Alain Gournac. C’est sûr !
Mme Isabelle Debré. Permettez-moi de vous lire l’objet de l’amendement n° 70 : « Les auteurs de cet amendement sont opposés à l’intéressement des personnels. » Allez dire cela aux salariés de La Poste ; je ne suis pas certaine qu’ils seront d’accord !
Monsieur Desessard, vous avez parlé d’exploitation de l’homme par l’homme.
M. Jean Desessard. Oui, madame !
Mme Isabelle Debré. Permettez-moi de m’insurger contre de pareils termes.
L’actionnariat salarié a été mis en place voilà très longtemps par un homme qui s’appelait le général de Gaulle et qui, à mon avis, n’a jamais voulu exploiter les hommes ! Très franchement, je ne peux imaginer un seul instant qu’il ait voulu exploiter les autres.
M. Dominique Braye. C’est demain que l’on va fêter le vingtième anniversaire de la fin de l’exploitation de l’homme par l’homme !
Mme Isabelle Debré. Monsieur Raoul, cela m’a fait chaud au cœur de vous entendre dans cet hémicycle dire que vous étiez pour l’intéressement. J’en prends acte et j’espère que nous travaillerons ensemble lorsque le Conseil d’orientation de la participation, de l’intéressement, de l’épargne salariale et de l’actionnariat salarié, COPIESAS, qui a succédé au Conseil supérieur de la participation, CSP, continuera ses travaux.
Bien évidemment, le groupe UMP, dans son ensemble, votera contre la suppression de cet article. Dans les grandes sociétés, qu’elles soient cotées ou non, l’intéressement n’a pas vocation à se substituer à l’augmentation de salaire. D’ailleurs, dans les très grandes sociétés, les salaires sont augmentés alors qu’intéressement, participation, plan d’épargne pour la retraite collectif, ou PERCO, sont mis en place.
M. Alain Gournac. Eh voilà !
Mme Isabelle Debré. Enfin, les salariés de La Poste sont très heureux de pouvoir profiter de l’attribution d’actions gratuites. Je ne vois donc pas vraiment pourquoi nous voterions contre cette possibilité que nous donne le Gouvernement aujourd’hui. (Applaudissements sur les travées de l’UMP. – MM. Hervé Maurey et Adrien Giraud applaudissent également.)
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. Merci, madame Debré, de nous écouter aussi attentivement et de répondre à chacune des expressions que nous avons employées.
En parlant d’exploitation de l’homme par l’homme, je pensais non pas spécialement à La Poste, mais plutôt à la société dans laquelle nous vivons. Je considère même, au risque d’être traité d’archaïque, que nous nous acheminons maintenant vers une exploitation de l’homme par l’homme beaucoup plus importante qu’il y a dix ou quinze ans !
En effet, la précarité et la pauvreté se développent dans notre pays. Il en va de même, mais sous une forme différente de la pénibilité industrielle, de la souffrance au travail qui prend la forme d’une taylorisation des services. Je crains vraiment une très grande souffrance et une très grande précarité pour les années à venir.
L’actionnariat salarié n’est pas pour tout le monde, chère collègue du banc opposé ; j’allais dire de l’opposition ! (Sourires.)
M. Daniel Raoul. Cela viendra !
M. Jean Desessard. Ce n’est pas pour tout le monde ! Des dirigeants d’entreprise tirent quand même leur épingle du jeu. Il existe bien un problème de redistribution dans notre pays.
J’ai beaucoup apprécié que vous ayez pris le temps de nous écouter et de nous répondre, madame Isabelle Debré, et j’en viens maintenant à l’objet de mon intervention.
Monsieur le rapporteur ou monsieur le ministre, peu importe… Non – car j’ai peur quand je dis « peu importe » (Sourires) –, monsieur le rapporteur et monsieur le ministre,...
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ensemble !
M. Jean Desessard. ... je serais content que vous répondiez à la question suivante : est-ce la première fois que l’on va donner des actions gratuites...
M. Gérard Longuet. Non !
M. Jean Desessard. ... à des personnels fonctionnaires ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. À des fonctionnaires, oui !
M. Jean Desessard. Si c’est la première fois,… c’est donc la première fois. (Rires.)
M. Alain Gournac. Ah bon ?
M. Jean Desessard. Cela paraît bête mais, si l’on y réfléchit, cela veut dire non seulement que l’on privatise La Poste,...
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Comme France Télécom !
M. Jean Desessard. ... mais que l’on met le doigt dans un engrenage très dangereux !
M. Alain Gournac. Mais non !
M. Jean Desessard. En effet, on va maintenant juger le fonctionnaire, garant du service public, en fonction de la rentabilité qu’il permettra à l’entreprise d’avoir,...
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Mais non !
M. André Dulait. N’importe quoi !
M. Jean Desessard. ... et non pas sur le service qu’il rendra !
En un mot, on ne lui demandera pas d’être socialement utile, même si ce n’est pas rentable financièrement, on lui demandera d’être rentable financièrement, même si ce n’est pas socialement utile !
Comme je l’ai indiqué, pour la première fois nous mettons le doigt dans un engrenage qui est très dangereux.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 70, 308 et 510 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 414, présenté par MM. Teston, Bourquin, Botrel, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Les personnels de La Poste et de ses filiales ne peuvent céder leurs participations au capital de La Poste qu'à l'État.
La parole est à M. Richard Yung.
M. Richard Yung. Par cet amendement, nous voulons préciser que les personnels de La Poste ne peuvent céder leur participation au capital de La Poste qu’à l’État. Nous en revenons au débat qui a été engagé tout à l’heure.
Monsieur le ministre, vous nous avez relu la partie concernée de l’article 1er, mais nous n’avons pas été entièrement convaincus par la lecture que vous en faites.
En effet, vous comprenez, vous, que l’ouverture à d’autres que l’État ou à des actionnaires publics ne sera pas possible. Pour nous, même si nous sommes favorables au développement de l’actionnariat salarié – j’appartiens moi-même à une génération qui a beaucoup milité en ce sens –, nous pensons, contrairement à vous, qu’il y aura des fuites dans le système, c’est-à-dire que l’ouverture sera possible, des actionnaires salariés de La Poste pouvant céder leurs actions, gratuites ou non d’ailleurs, peu importe, à des entités privées.
M. Jean-Paul Emorine, président de la commission de l’économie. J’ai déjà répondu sur ce point !
M. Richard Yung. Vous avez peut-être répondu, mais nous constatons que vous refusez d’insérer dans le texte la phrase qui permettrait de verrouiller le système. C’est la raison pour laquelle je demande que ce point soit spécifié dans la loi.
M. le président. L'amendement n° 511, présenté par MM. Teston, Andreoni, Botrel, Bourquin, Caffet, Chastan, Courteau, Daunis, Fauconnier et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Lise, Madec, Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Pastor, Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Ries, Collombat et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Au terme de la durée minimale d'obligation de conservation prévue par le I, les parts du fonds commun de placement ne sont cessibles qu'à l'État.
La parole est à M. Richard Yung.
M. Richard Yung. Même contenu ; il est défendu, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 512 rectifié, présenté par MM. Teston, Botrel, Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Au terme de la durée minimale d'obligation de conservation prévue par le I, les parts du fonds commun de placement ne peuvent être cédées qu'à l'État ou aux personnes morales de droit public détenant le capital de la société anonyme prévu à l'article 1er. Ces dispositions feront l'objet d'un décret en Conseil d'État.
La parole est à M. Michel Teston.
M. Michel Teston. Nous avons eu précédemment un débat sur les dispositions à prendre pour éviter la dissémination des actions détenues par du personnel.
L’amendement que nous proposions pour compléter l’alinéa 2 de l’article 10 par les mots « Au terme de la durée minimale d’obligation de conservation prévue par le I, les parts du fonds commun de placement ne peuvent être cédées qu’à l’État ou aux personnes morales de droit public détenant le capital de la société anonyme prévu à l’article 1er » a été rectifié afin d’ajouter que « Ces dispositions feront l’objet d’un décret en Conseil d’État ».
Cela permettra effectivement de s’assurer que l’engagement pris par le ministre et surtout la disposition de l’article 1er du texte seront respectés.
M. Daniel Raoul. Très bien !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Vous avez votre logique, nous avons la nôtre. La discussion pourrait donc être sans fin, les uns ajoutant des articles et les autres présentant des amendements de suppression de ces articles.
Notre logique est parfaitement encadrée et les différentes façons dont le capital peut être détenu sont explicitées notamment à l’article 1er.
L’amendement n° 414 porte sur l’interdiction pour les personnels de La Poste et de ses filiales de vendre leurs participations à un autre organisme que l’État. Pourquoi les salariés ne pourraient-ils pas vendre leurs actions, comme le prévoit la loi, à une personne morale de droit public ou à d’autres salariés ? C’est en ces termes que le problème est posé. La commission est défavorable à cet amendement.
Elle est également défavorable à l’amendement n° 511 pour les mêmes raisons.
Elle est encore défavorable à l’amendement n° 512 rectifié, qui prévoit l’interdiction, à l’issue d’une durée minimale, pour les personnels de La Poste et de ses filiales de vendre leurs actions à des organismes autres que les personnes publiques qui détiennent la majorité du capital de La Poste.
Pourquoi compliquer les choses ? Le projet de loi indique noir sur blanc que le capital est entièrement détenu par l’État et par d’autres personnes publiques, hors actionnariat du personnel. Cette disposition est donc inutile, car les personnels ne pourront pas revendre leurs actions à d’autres investisseurs privés.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote sur l'amendement n° 512 rectifié.
M. Daniel Raoul. La rectification apportée par mon collègue Michel Teston à l’amendement n° 512 ne fait que prendre en compte l’engagement pris par le ministre lors de la discussion de l’article 9. Autrement dit, nous demandons qu’un décret fixe les modes de transaction et de transmission des actions.
J’ai quelques capacités de raisonnement qui me permettent d’intégrer votre logique. Je la prends au pied de la lettre, tout comme l’engagement du ministre. C’est pourquoi je demande qu’un décret fixe les conditions de transmission, précisément pour éviter la dissémination.
Je ne comprends pas ce qui vous choque aussi profondément : je ne fais que reprendre des engagements qui ont été pris dans cet hémicycle voilà à peine une heure !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 512 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
(M. Roger Romani remplace M. Roland du Luart au fauteuil de la présidence.)
PRÉSIDENCE DE M. Roger Romani
vice-président
M. le président. L'amendement n° 513, présenté par MM. Teston, Andreoni, Botrel, Bourquin, Caffet, Chastan, Courteau, Daunis, Fauconnier et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Lise, Madec, Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Pastor, Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Ries, Collombat et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Roland Courteau.
M. Roland Courteau. L’article 10 prévoit la possibilité pour La Poste de procéder à des attributions gratuites d’actions aux personnels et son alinéa 3 traite de la valeur attribuée à la société.
Nous l’avons maintes fois répété, nous sommes opposés au changement de statut de La Poste visant à la transformer en société anonyme, au regard des risques d’une telle évolution pour l’avenir et la qualité du service public. Par conséquent, nous ne sommes pas favorables à des modalités d’actionnariat salarié, qui pourraient constituer un moyen d’ouvrir le capital à des intérêts privés.
Je le rappelle, La Poste a réalisé un milliard d’euros de chiffre d’affaires en 2008, mais moitié moins en 2009, en raison du contexte de crise. En l’état actuel de la situation des marchés financiers, et alors que ses bénéfices viennent d’être divisés par deux, comment entendez-vous déterminer la valeur d’une entreprise aussi importante ? La crise actuelle ne conduira-t-elle pas à une sous-estimation de sa valeur réelle ?
Par ailleurs, La Poste est un bien collectif, dont la valeur, en soi, peut difficilement être évaluée. C’est d’autant plus vrai lorsque les bénéfices se réduisent du fait d’une conjoncture économique dégradée.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous vous proposons, mes chers collègues, de supprimer l’alinéa 3 de cet article.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Cet amendement vise à supprimer le troisième alinéa de l’article 10, relatif au rôle de la commission des participations et des transferts lors des attributions gratuites d’actions.
Cette commission joue un rôle essentiel pour évaluer le montant des actions, afin que le prix de vente soit juste et ne lèse ni les intérêts des acheteurs ni ceux des actionnaires.
La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 395, présenté par MM. Teston, Bourquin, Botrel, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
Les membres du conseil d'administration de La Poste ne peuvent faire l'objet d'attributions gratuites.
La parole est à Mme Bariza Khiari.
Mme Bariza Khiari. Selon nous, La Poste doit être une entreprise publique exemplaire.
Il s’agit d’un amendement de repli, et ce à deux titres : d’une part, nous ne faisons qu’anticiper les conséquences possibles du mode de gouvernance de La Poste transformée en société anonyme ; d’autre part, nous sommes contraints de border les effets pervers de l’actionnariat salarié.
Nous sommes attentifs à ce que l’organisation et le mode de fonctionnement du conseil d’administration soient le plus transparents possible.
Ainsi, par cet amendement, nous demandons instamment de prévoir dans la loi que les membres du conseil d’administration ne puissent faire l’objet d’attributions gratuites d’action. Il s’agit d’une question d’éthique, valeur dont notre société a bien besoin, notamment en temps de crise.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Cet amendement tend à interdire aux membres du conseil d’administration de La Poste de bénéficier d’actions gratuites.
Nous l’avons vu lors de l’examen des articles précédents, la plupart des membres du conseil d’administration ne pourront pas bénéficier d’actions gratuites, car, pour l’essentiel d’entre eux, ce ne sont pas des salariés de l’entreprise. Cet amendement concerne donc principalement les représentants du personnel qui siègeront au conseil d’administration. Au nom de quoi les priverions-nous d’attributions gratuites d’actions, alors qu’ils font partie de cette instance en tant que membre du personnel ? Ce n’est pas possible !
M. Daniel Raoul. Le problème n’est pas là !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Estrosi, ministre. Le Gouvernement rejoint la commission sur ce point.
Les membres du conseil d’administration qui sont mandataires sociaux ne peuvent normalement recevoir d’actions. Cependant, par une telle disposition, vous proposez, madame la sénatrice, d’interdire aux salariés qui siégeront au conseil d’administration de pouvoir être actionnaires. Ce serait une totale injustice !
M. Dominique Braye. Absolument !
Mme Isabelle Debré. Il n’y a pas deux catégories de salariés !
M. le président. L’amendement n° 395 est-il maintenu ?
M. Michel Teston. Après avoir entendu les arguments exposés par M. le rapporteur et M. le ministre, nous le retirons.
M. le président. L’amendement n° 395 est retiré.
L'amendement n° 396, présenté par MM. Teston, Bourquin, Botrel, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
Ces attributions sont librement consenties et ne peuvent être assimilées à des rémunérations.
La parole est à M. Richard Yung.
M. Richard Yung. Cet amendement vise à encadrer davantage les attributions gratuites d’actions. En effet, nous craignons que celles-ci ne constituent un moyen subtil, habile, de bâillonner les revendications salariales et, éventuellement, les contestations sociales.
J’y vois également un biais pour l’État d’imposer le principe d’actions bloquées, en l’absence d’augmentation de salaire ou de salaire suffisant à l’embauche. Ce n’est évidemment pas acceptable, parce que ce n’est pas une bonne politique sociale.
Nous devons aussi penser à la retraite des fonctionnaires de La Poste. Ces derniers ont en effet le droit de choisir le mode d’investissement dans le plan retraite qui leur convient le mieux. Nous le répéterons dans quelques mois, au moment du débat sur les retraites : le fonds commun de placement entreprise, de même que l’investissement dans des fonds de pension, n’est pas obligatoire.
Les personnels de La Poste que nous avons auditionnés avant ce débat nous ont fait part de leur circonspection sur ce sujet.
Par conséquent, nous souhaitons limiter les effets éventuels des distributions gratuites d’actions sur le niveau des rémunérations.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Chacun garde sa propre logique ! Dans la jurisprudence traditionnelle de la Cour de cassation, en particulier de sa chambre sociale, le salaire est distingué de la rémunération, qui est une notion plus large.
En aucun cas un employeur qui distribue des actions gratuites ne peut prétendre échapper aux règles en matière de SMIC ni aux classifications fixées par les conventions collectives.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Cela, c’est sûr !
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Quant au partage de la valeur ajoutée, c'est-à-dire la répartition du bénéfice dégagé par l’entreprise, il revient aux négociations salariales entre employeurs et syndicats de déterminer la part revenant au facteur capital et celle qui est distribuée au facteur travail. (Sourires.)
Les craintes des auteurs de l’amendement étant largement infondées, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Bariza Khiari, pour explication de vote sur l'article.
Mme Bariza Khiari. Le 24 mars dernier, à Saint-Quentin, le Président de la République, Nicolas Sarkozy, s’exprimait ainsi : « Il ne peut pas y avoir d’économie sans morale. […] Alors il ne doit plus y avoir […] de distribution d’actions gratuites […] dans une entreprise qui reçoit une aide de l’État ».
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Dommage pour vous !
M. Daniel Raoul. Cela vous cloue le bec, non ?
Mme Bariza Khiari. À partir du moment où La Poste bénéficiera d’une dotation publique de près de 3,2 milliards d’euros provenant de la Caisse des dépôts et consignations, bras armé de l’État, et de l’État lui-même, nous estimons qu’il n’est pas concevable que ses cadres dirigeants, qu’ils soient méritants ou pas – là n’est pas la question ! –, perçoivent des actions gratuites.
Il n’est pas moral que les dirigeants de La Poste bénéficient indirectement, dans leur rémunération, des résultats positifs de l’intervention publique.
Il n’est pas normal que la société anonyme La Poste puisse déduire de ses résultats fiscaux les charges entraînées par ce dispositif, notamment les moins-values.
Chère collègue Isabelle Debré, je voudrais vous rassurer : nous ne sommes pas hostiles par principe à l’actionnariat salarié.
Mme Isabelle Debré. Je m’en félicite !
Mme Bariza Khiari. Monsieur le ministre, vous avez évoqué Laurent Fabius, à juste titre. Il insistait pour que l’actionnariat salarié soit un outil de croissance pour les jeunes entreprises, les start-up. C’est un moyen de capter les compétences et de permettre des traitements différés dans les entreprises faisant preuve de créativité et d’innovation.
Nous estimons que les attributions gratuites d’actions d’une société qui bénéficie de fonds publics ne peuvent pas être consenties à une personne rémunérée par cette même société. C’est la raison pour laquelle nous voterons contre l’article 10.
M. Jean-Paul Emorine, président de la commission de l'économie. Les salariés apprécieront !
M. Pierre Hérisson, rapporteur. On leur transmettra !
M. le président. Je mets aux voix l'article 10.
(L'article 10 est adopté.)
Article 11
Il est rétabli dans la même loi un article 48 ainsi rédigé :
« Art. 48. – I. – Les statuts initiaux de la société anonyme La Poste et les modalités transitoires de sa gestion jusqu’à l’installation des organes statutaires sont déterminés par un décret en Conseil d’État. Ce décret est publié au plus tard le 31 décembre 2009. À compter de l’installation des organes statutaires, ces statuts pourront être modifiés dans les conditions prévues par le code de commerce pour les sociétés anonymes.
« II. – Les comptes du dernier exercice de l’exploitant public La Poste sont approuvés dans les conditions du droit commun par l’assemblée générale de la société La Poste.
« III. – Les représentants du personnel élus en fonction à la date du 31 décembre 2009 restent en fonction jusqu’au terme de leur mandat et dans les conditions prévues par la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public.
« IV. – La transformation de La Poste en société anonyme n’affecte pas le mandat de ses commissaires aux comptes en cours à la date de cette transformation. »
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, sur l'article.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Monsieur ministre, vous avez indiqué à plusieurs reprises que, pour vous, La Poste était « imprivatisable ». Mais chaque fois que nous essayons de border, en quelque sorte, le projet de loi, ce qui permettrait de donner une certaine crédibilité à vos affirmations, vous rejetez nos propositions ! En réalité, nous nourrissons les plus grandes craintes.
L’article 11 prévoit les dispositions relatives à la transition entre l’exploitant public actuel et la nouvelle société anonyme. Nous avons de nombreuses raisons de croire que ce projet de loi est un premier pas vers la privatisation de La Poste. Pour l’instant, son capital reste entièrement public, mais nous ne doutons pas que, comme pour France Télécom et GDF, vous ferez bientôt adopter de nouvelles lois qui amèneront l’État à devenir un actionnaire minoritaire.
Par parenthèses, s’agissant de l’intéressement, je vous signale que jamais un patron ne reconnaîtra qu’il s’en sert pour ne pas augmenter les salaires ! Cela ne se dit pas, mais cela se fait !
L’introduction de capitaux privés entraîne des exigences de rentabilité qui sont contradictoires avec les missions de service public. Ces fonds ne placeront pas l’entreprise sur la voie de l’innovation et de l’amélioration qualitative des services rendus : ils lui permettront de participer au grand jeu de Monopoly consistant à racheter d’autres opérateurs européens ; cela apparaît en filigrane !
Si La Poste se consacrait plutôt à la modernisation de ses centres de tri, à la mise en place d’un réseau de distribution expresse par TGV ou, tout simplement, à la satisfaction des besoins des usagers, on pourrait alors parler d’un développement utile de l’entreprise. Ce n’est pourtant pas la voie qui a été choisie !
Toutes les missions de service public de La Poste se dégraderont, qu’il s’agisse de l’accessibilité bancaire, de la distribution de la presse, du service universel postal ou de l’aménagement du territoire.
Nous avons toutes les raisons de penser que la privatisation de l’exploitant public pourrait amener La Poste à abandonner purement et simplement, dans le futur, certaines missions. L’objectif sera la rentabilité et non plus le service. Cela apparaît également en filigrane, puisqu’il s’agit pour La Poste d’affronter la concurrence.
Si La Poste a besoin de fonds pour moderniser et améliorer le service public, pourquoi ne pas lancer, par exemple, un emprunt obligataire ? Si La Poste doit se restructurer pour se développer, pourquoi ne pas créer un grand pôle public des postes et télécommunications, activités complémentaires et non pas concurrentes ? Vous voyez, monsieur le ministre, nous vous faisons des propositions ! Mais, hélas ! vous ne pouvez nous répondre, et pour cause !
Encore une fois, nous sommes contre le changement de statut de la Poste. Votre attitude nous conforte dans notre opposition à la voie que vous voulez emprunter. Nous présenterons donc des amendements visant à supprimer l’article 11.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L'amendement n° 71 est présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.
L'amendement n° 310 est présenté par MM. Desessard et Muller et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.
L'amendement n° 514 rectifié est présenté par MM. Teston, Botrel, Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste et apparentés.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Éliane Assassi, pour défendre l’amendement n° 71.
Mme Éliane Assassi. En vous demandant la suppression de cet article 11, nous avons bien conscience de toucher à une disposition essentielle de ce projet de loi. Non seulement celle-ci tend à créer les conditions de la transition entre l’entreprise publique La Poste et la société anonyme du même nom, mais elle est également symptomatique des conditions de préparation de ce projet de loi, notamment de la précipitation de son examen et des dangers que cette urgence laisse planer sur les conditions de transfert.
Ainsi, vous prévoyez qu’un décret sera pris avant le 31 décembre pour déterminer les modalités transitoires de gestion de cette nouvelle entreprise privée, en attendant l’installation des organes prévus dans ses statuts. Comme nous l’avons déjà souligné, tout est prêt mais rien n’est dit, ou plutôt tout est caché.
Vous ne nous ferez pas croire qu’en moins de soixante jours il est possible, même en utilisant la procédure accélérée, de mener un débat ouvert avec le Parlement, dans des conditions d’écoute dignes de notre démocratie, et de préparer simultanément tous les décrets d’application à partir d’une concertation véritable menée avec l’ensemble des partenaires, actuels et futurs, de La Poste. Non, tout cela est impossible, et vous le savez bien, monsieur le ministre !
Pourriez-vous nous informer des modifications de statut qui sont d’ores et déjà envisagées dans le cadre de la mise en œuvre de la troisième phrase du deuxième alinéa de cet article ? La représentation nationale est en droit de connaître le contenu des statuts de cette nouvelle société créée par ce projet de loi, discutés et validés par elle, mais dont la modification est d’ores et déjà planifiée, au mépris de l’avis du Parlement.
Pourriez-vous également nous dire sur la base de quels arguments juridiques vous comptez faire approuver les comptes 2009 de l’entreprise nationale La Poste par l’assemblée générale des actionnaires de la future société privée La Poste ? Comment une assemblée d’actionnaires pourra-t-elle juger des résultats économiques, financiers et comptables d’une entreprise publique dont les résultats engagent directement la nation ?
En fait, cet article est révélateur de la précipitation dont vous avez fait preuve sur ce projet et, finalement, d’une certaine forme d’impréparation ou d’une volonté d’opacité sur les conditions réelles de mise en œuvre de ce changement de statut.
Toujours aussi farouchement attachés à combattre ce projet de loi, nous demandons tout naturellement la suppression de cet article, notamment en raison de tous les non-dits qu’il contient.
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour défendre l’amendement n° 310.
M. Jean Desessard. Avec cet amendement de suppression de l’article 11, je réaffirme ma vive opposition à toutes les dispositions transitoires relatives au passage d’un EPIC à une société anonyme en ce qui concerne La Poste.
Je souhaite dire de nouveau ma profonde consternation face à ce projet de loi qui, malgré les prétendus impératifs européens auxquels vous voulez nous faire croire, monsieur le ministre, est anachronique et complètement déconnecté du contexte de la crise financière.
Cette crise nous a montré la nécessité de nous recentrer sur l’humain et de privilégier les mesures protectrices – celles qui rendent les Français fiers de leurs services publics – à la toute puissance du marché.
D’autres gouvernements ont pourtant pris la mesure de ce qui se passe actuellement. Vendredi dernier, le gouvernement japonais récemment élu a approuvé un projet de loi ayant pour effet de geler toute vente de titres de la poste publique japonaise, empêchant donc la privatisation voulue par le gouvernement précédent. La poste japonaise était pourtant promise à une introduction en bourse graduelle, qui devait commencer en 2010 pour s’achever en 2017. L’objectif qui sous-tendait la volonté de privatiser était de doper les bénéfices de la poste japonaise, en l’orientant notamment vers les actions et les obligations, pour mieux financer les entreprises.
Le gouvernement de Yukio Hatoyama a souhaité préserver l’un des fondements des institutions japonaises et garantir la fonction sociale qu’occupe la poste dans l’archipel. Cette décision me semble sage, même si je n’y ai pris aucune part, en dépit de mon récent voyage au Japon avec des membres de la commission de l'économie, dont le président Jean-Paul Emorine, voyage au cours duquel nous avons d’ailleurs pu établir un parallèle entre l’économie française et l’économie japonaise.
Mettre l’économie au service de l’humain, et non l’inverse, ce n’est pas un aveu de faiblesse, monsieur le ministre. Offrir à nos concitoyens des services publics de qualité, qui remplissent une véritable mission sociale, c’est à mes yeux une nécessité absolue.
C’est pourquoi je vous demande de supprimer ces dispositions transitoires et de conserver le statut public de La Poste.
M. le président. La parole est à M. Michel Teston, pour défendre l’amendement n° 514 rectifié.
M. Michel Teston. L’article 11, relatif aux statuts initiaux de l’entreprise, et contenant par ailleurs des dispositions transitoires, entérine donc les conséquences du changement de statut de La Poste en une société anonyme.
Il prévoit, notamment, que les statuts initiaux de la société anonyme sont déterminés par décret en Conseil d'État, publié au plus tard le 31 décembre 2009. Comme pour toute société anonyme, ces statuts pourront être modifiés postérieurement, dans le respect du droit commun des sociétés.
Étant donné que nous nous opposons au changement de statut de La Poste et aux conséquences qui en découlent, nous sommes tout naturellement favorables à la suppression de l’article 11. Tel est le sens de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Si le texte est définitivement adopté et que La Poste change de statut, les dispositions transitoires prévues par l’article 11 seront nécessaires.
En conséquence, la commission émet un avis défavorable sur les amendements identiques n os71, 310 et 514 rectifié, qui tendent à supprimer cet article, indispensable à la mise en œuvre de notre projet commun.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. Monsieur le rapporteur, comme M. le président de la commission, comme M. Giraud et M. Braye, vous étiez avec moi au Japon ! Vous avez pu constater les similitudes de nos économies en termes de démographie, de vieillissement de la population et de services publics. Que pensez-vous donc de la décision du Gouvernement japonais, centriste qui plus est, d’opérer un retour en arrière, c'est-à-dire de renoncer à la privatisation et de conserver un service public postal ?
Je ne veux pas abuser de mon temps de parole, monsieur le président, mais il me semble intéressant de recueillir sur ce point l’avis du spécialiste de La Poste et de l’économie japonaise qu’est M. Hérisson !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 71, 310 et 514 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L'amendement n° 256, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéas 1 et 2
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Bernard Vera.
M. Bernard Vera. Le deuxième alinéa de l’article 11 organise le passage d’EPIC en société anonyme. Aujourd’hui, il s’agit de préparer le terrain sur le plan juridique pour que, demain, la nouvelle société anonyme se constitue autour de statuts privés. Le processus a déjà été utilisé pour Aéroports de Paris, un décret en Conseil d’État ayant reformulé les statuts pour que cette entreprise rejoigne le droit commun des sociétés commerciales. C’est le même processus qui est enclenché avec cet alinéa 2 de l’article 11.
Ce désengagement de l’État dans certains secteurs de notre économie, ceux qui participent à l’égalité entre les citoyens sur l’ensemble de notre territoire, ne sert qu’à engager toujours un peu plus la privatisation à outrance. Le statut d’EPIC ne vous convient pas et les entreprises publiques qui y sont soumises ne peuvent aujourd’hui que se poser des questions sur leur avenir.
Le passage en force pour le changement de statut de La Poste est la porte ouverte à d’autres changements futurs. La logique de rentabilité, la volonté de diviser le capital et l’obstination de privilégier l’intérêt privé, alors que l’intérêt général devrait être la règle, seront omniprésentes avec ces nouveaux statuts de société anonyme.
L’article 11 illustre la stratégie mise en œuvre pour déposséder la collectivité et offrir un service public à des intérêts privés. C’est bien la privatisation qui est en ligne de mire, et cet article participe à ce néfaste projet.
Ce sera un changement radical dans la gestion de l’entreprise puisque, comme dans toute société anonyme, les actionnaires et les profits financiers seront privilégiés ; à l’inverse, les usagers et les personnels, qui verront leur avenir se calquer sur celui des clients et des salariés de France Télécom, seront les grands perdants de cette transformation. Quelques exceptions seront faites, bien entendu, pour le président de cette nouvelle société, qui verra ses revenus augmenter substantiellement, et pour les nouveaux actionnaires.
Rien n’oblige pourtant à changer le statut de La Poste. Le statut d’EPIC n’a jamais empêché la modernisation de cette entreprise ; il n’a pas freiné sa rentabilité ; il ne remet pas en cause sa pérennité. Le nouveau statut aura des effets négatifs, y compris sur la présence postale sur notre territoire.
Certes, vous inscrivez dans le projet de loi les 17 000 points de contact. Mais vous ne dites pas qu’ils pourraient être réduits à des relais Poste chez les commerçants. La grande majorité des bureaux de plein exercice, qui représentent pourtant le seul format correspondant à la notion de service public, pourraient ainsi disparaître.
Pour toutes ces raisons, nous vous demandons la suppression de ces alinéas.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. L’alinéa 2 de l’article 11 prévoit qu’un décret en Conseil d'État, publié au plus tard le 31 décembre 2009, détermine les statuts de la société anonyme La Poste et les modalités transitoires de sa gestion jusqu’à l’installation des organes statutaires. Il n’y a pas lieu de supprimer cette disposition, qui nous semble efficace.
En conséquence, la commission est défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 257, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Mireille Schurch.
Mme Mireille Schurch. L’Assemblée générale de La Poste va pouvoir examiner les comptes du dernier exercice de La Poste. C’est donc une structure publique, liée à une mission d’intérêt général, qui va préparer le budget d’une société anonyme, car celui-ci s’appuiera sur l’analyse qui sera faite, entre autres éléments, des comptes du précédent exercice. Vous pouvez aller jusqu’à ce stade dans la mesure où la transformation de l’administration des PTT en EPIC a soumis La Poste, de fait, à des règles de fonctionnement privé.
La comptabilité, le management du personnel, mais aussi son recrutement suivent les règles du privé. Ce glissement progressif entre ces différentes structures juridiques peut aller jusqu’à la privatisation, et c’est le sort qui est aujourd’hui réservé à La Poste.
L’assemblée générale de La Poste va pouvoir transférer à un conseil d’administration ou de surveillance de société anonyme les comptes de cette structure publique, selon les seuls intérêts privés. Tout changement de statut n’est pas neutre, même s’il est motivé par des arguments tous orientés vers le même but.
Pour prouver que la privatisation est obligatoire, votre méthode est bien rôdée : vous vous appuyez sur des difficultés financières, réelles ou organisées, pour nous démontrer que le statut public est coûteux et qu’il est temps de retrouver un modèle de gestion rentable.
Après l’année 2007, où La Poste a réalisé un bénéfice de près de 1 milliard d’euros et versé 15 % de son bénéfice net à l’État, soit 141 millions d’euros, après l’année 2008, où elle a fait un bénéfice de 700 millions d’euros, La Poste a, comme par hasard, communiqué sur la chute de son chiffre d’affaires de 2,9 % par rapport à l’objectif, et ce à quelques jours de l’examen au Sénat du présent projet de loi ! Tout cela ne tient évidemment pas compte de l’absence de compensation par l’État de la mission de service public assurée par La Poste, pourtant décidée dans la loi relative à la régulation des activités postales.
Après le passage à l’EPIC, la transformation de La Poste en société anonyme est la deuxième marche vers la privatisation. Vous n’hésitez pas non plus à vous servir des directives européennes, même si elles n’apportent pas de précisions en la matière, pour modifier le statut des entreprises publiques. On le voit bien, vous n’hésitez pas à user d’arguties toutes aussi faibles les unes que les autres pour atteindre un seul objectif : la privatisation de La Poste.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous vous invitons, mes chers collègues, à supprimer l’alinéa 3 de l’article 11.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Tous les alinéas que vous voulez supprimer ont pour objet de tirer les conséquences de décisions qui ont déjà été prises.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 258, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Bernard Vera.
M. Bernard Vera. L’alinéa 4 concerne le maintien en fonction des représentants du personnel jusqu’au terme de leur mandat.
La Poste emploie encore une majorité de fonctionnaires, des salariés de droit public et des contractuels de droit privé, « lorsque les exigences particulières de l’organisation des services ou la spécificité de certaines fonctions l’exigent ».
Le fonctionnement de La Poste présente des spécificités. Ainsi, les dispositions du code du travail relatives aux comités d’entreprise ne leur sont pas applicables. La transformation de l’entreprise en société anonyme obligera La Poste à se conformer à de nouvelles règles, notamment s’agissant du conseil d’orientation et de gestion des activités sociales, le COGAS, qui regroupe des représentants de l’État, des syndicats et d’associations nationales. Cette situation ambiguë risque de paralyser les organes de représentation du personnel.
Les représentants du personnel sont présents dans diverses institutions sociales, où ils jouent un rôle déterminant : conseil d’administration, comités techniques paritaires et commissions consultatives paritaires. La véritable question est non pas de savoir si les représentants du personnel resteront en fonction, mais de s’assurer du fonctionnement des organismes dans lesquels ils sont élus, pour qu’ils continuent à y jouer leur rôle. Des représentants élus dans des organismes qui ne fonctionnent pas n’auraient pas de raison d’être.
Dans la mesure où nous sommes totalement opposés à cette transformation, nous souhaitons clarifier cet article. Le changement de statut que vous proposez a des conséquences importantes sur la vie démocratique de nos entreprises ; vous participez à leur désorganisation.
Nous pensons quant à nous que la voix des salariés est déterminante.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Nous sommes opposés à la suppression de l’alinéa 4 de l’article 11. Il s’agit de protéger les représentants du personnel et de les assurer qu’ils conserveront leur mandat.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 259 est présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.
L'amendement n° 311 est présenté par MM. Desessard et Muller et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 5
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Gérard Le Cam, pour présenter l’amendement n° 259.
M. Gérard Le Cam. L’alinéa 5 de l’article 11 dispose : « La transformation de La Poste en société anonyme n’affecte pas le mandat de ses commissaires aux comptes en cours à la date de la transformation ».
Je ne vous apprendrai rien en vous disant que les deux commissaires aux comptes aujourd’hui en activité ont été nommés conformément aux dispositions de la loi 2003-709 du 1er août 2003, lesquelles s’appliquent aux établissements publics à caractère industriel ou commercial depuis l’exercice 2006.
Pour La Poste, les commissaires aux comptes sont désignés par le ministre de l’économie et par le ministre chargé des postes et des télécommunications. Les commissaires aux comptes ont été désignés par l’arrêté du 20 juin 2003 et leur mandat a expiré à l’arrêté des comptes de l’exercice 2008. Cette information figure sur le site officiel de La Poste à la page « gouvernance ». Aucune information n’y figure, monsieur le ministre, sur un nouvel arrêté qui prolongerait le mandat des commissaires aux comptes pour les exercices suivants, comme cela avait été le cas en 2003. Je suis persuadé que vous allez nous rassurer !
Ces commissaires aux comptes ont été nommés dans le cadre d’une mission légale. Ils relèvent de la loi et des règlements, même s’il est nécessaire de formaliser le lien contractuel entre les parties par la suite.
La doctrine affirme que dès lors que « les relations entre le commissaire aux comptes et la société sont fixées par la loi, leurs relations prennent un aspect institutionnel ». Il en va différemment dans le cas d’une société anonyme. Il s’agit de relations dans le seul cadre contractuel et après accord des parties sur les conditions d’exécution de la mission et sur les obligations qui en découlent.
Il n’est donc pas possible de mettre sur le même plan une prestation contractuelle et une prestation légale. Même si les contenus sont de même nature, les conditions d’exécution d’une mission légale de commissaire aux comptes relèvent de la loi. Tel est bien le cas pour les commissaires désignés pour La Poste.
Nous pensons donc qu’il faut se poser la question de la compatibilité de la fonction des commissaires aux comptes désignés par arrêté ministériel avec le nouveau de statut : la société anonyme que vous souhaitez inscrire dans ce texte ne peut désigner ces commissaires aux comptes que par contrat.
Par conséquent, il nous semble difficile que ceux-ci puissent remplir cette nouvelle mission, qui ne s’inscrit pas dans le même cadre juridique.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous vous invitons, mes chers collègues, à supprimer l’alinéa 5 de l’article 11.
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour présenter l'amendement n° 311.
M. Jean Desessard. Cet amendement vise à supprimer l’alinéa 5 de l’article 11.
Je l’ai dit et je le répète : pour l’ensemble des Français, La Poste n’est pas une société anonyme. C’est une institution qui va chercher ses racines dans l’histoire de notre pays, c’est un groupe qui a un sens pour chacun de nos concitoyens.
Les relais de poste ont été créés par Louis XI en 1477 et les premiers bureaux de poste apparaissent à la fin du XVIe siècle. Au XVIIIe siècle, la distance moyenne entre deux relais postaux est de seize kilomètres. Une lettre expédiée de Paris met deux jours et huit heures pour atteindre Lyon, un peu plus de quatre jours pour Marseille.
La Poste ne peut être une société anonyme. Son évolution est liée à l’histoire de la Révolution. Après 1789, les directeurs des bureaux de poste qui existaient à cette époque sont élus au suffrage universel. La Révolution marque aussi la condamnation de la violation du secret de la correspondance, question que nous avons abordée à plusieurs reprises.
La desserte de nos campagnes s’organise à partir de 1830. L’utilisation du timbre, à l’effigie de Cérès, déesse des moissons, se répand à partir de 1849. Désormais, le prix de la lettre varie en fonction du poids de celle-ci et non plus de la distance. C’est donc la mise en place de la péréquation tarifaire, notion qu’un objectif de rentabilité financière remet aujourd’hui en cause.
La Poste, dans le quotidien des Français, ce sont aussi les cartes postales. La première carte postale est envoyée en 1870.
Le service public est également défendu par les résistants à l’issue de la Seconde Guerre mondiale. Pour le Conseil national de la Résistance, les intérêts particuliers doivent être subordonnés à l’intérêt général. C’est ce qu’a rappelé Raymond Aubrac lundi soir devant le Sénat, en déclarant que ce projet de loi était une injustice.
Plus proche de nous, chacun identifie l’Oiseau bleu, qui date de 1962 ; notre collègue M. Blanc en a parlé. En 2002, c’est aussi La Poste qui assure la transition du franc à l’euro.
Vous le voyez, depuis plus de quatre siècles, l’histoire de La Poste est intimement liée à l’histoire nationale. La Poste a accompagné le quotidien des Français en assurant l’égalité de tous sur le territoire.
Prétendre que l’on peut anéantir cette histoire pour faire de La Poste une société anonyme, sans personnalité, et ainsi dévoyer le service public, est, je le répète, une grave erreur.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Les amendements nos 259 et 311 visent à supprimer l’alinéa 5 de l’article 11, qui prévoit que le changement de statut de La Poste n’affecte pas le mandat de ses commissaires aux comptes.
La commission y est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Adrien Giraud, pour explication de vote sur les amendements identiques nos 259 et 311.
M. Adrien Giraud. Je tiens tout simplement à rappeler à mon cher collègue Jean Desessard que lorsque Mayotte est devenue française en 1841, le courrier y était acheminé par bateau tous les six mois. Depuis, la société a évolué, monsieur Desessard, et cette évolution, vous la refusez ! (Très bien ! sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.
M. Marc Laménie. Mon explication de vote vaudra à la fois pour les amendements identiques nos 259 et 311 et pour l’article 11.
On peut comprendre les positions défendues sur l’article 11. Notre collègue Jean Desessard a rappelé avec beaucoup de passion et de conviction l’histoire de La Poste. Cela étant, les technologies dans le domaine des communications ayant beaucoup évolué, une réforme est nécessaire. Supprimer ces dispositions, ce serait aller à contre-courant, comme l’ont fort justement indiqué M. le rapporteur et M. le ministre.
Notre collègue a évoqué l’aspect humain de cette question. Nous sommes tous, dans cet hémicycle, respectueux des personnels de La Poste et désireux de les défendre ; il y a un consensus sur cette question.
La Poste, nous en sommes convaincus, doit avancer et investir, que ce soit pour améliorer les bureaux, les conditions de travail, la qualité du service, le déplacement ou pour faire évoluer les centres de tri ; de nouveaux centres de tri sont construits très régulièrement.
Notre groupe votera cet article, qui est indispensable. (M. le rapporteur applaudit.)
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 259 et 311.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 11.
(L'article 11 est adopté.)
Article 12
La même loi est ainsi modifiée :
1° L’article 1er est abrogé ;
1° bis (nouveau) À chaque occurrence dans le premier alinéa de l’article 12, à l’article 27, au deuxième alinéa de l’article 30, à chaque occurrence dans l’article 33 et au premier alinéa de l’article 34, les mots : « l’exploitant public » sont remplacés par les mots : « La Poste » ;
1° ter (nouveau) À chaque occurrence dans le 3° du I de l’article 21, les mots : « cet exploitant » sont remplacés par les mots : « cette société » ;
1° quater (nouveau) Au premier alinéa de l’article 33-1, les mots : « l’exploitant public » sont remplacés par les mots : « la société » ;
2° (Supprimé)
3° La seconde phrase de l’article 4 est supprimée ;
4° L’article 8 est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est supprimé ;
b) Au second alinéa, le mot : « également » est supprimé et les mots : « l’exploitant public » sont remplacés par les mots : « La Poste » ;
4° bis (nouveau) Au second alinéa du 3° de l’article 21, la date : « 31 décembre 1996 » est remplacée par la date : « 31 décembre 2010 » ;
5° Les articles 7, 14, 15, 19, 24, 25, 26, 28, 36, 39 et 40 sont abrogés ;
6° À l’article 27, les mots : «, dans le cadre des dispositions réglementaires précisant ses droits et obligations et dans des conditions conformes aux principes édictés à l’article 25 » sont supprimés ;
6° bis (nouveau) Le I de l'article 29-1 est ainsi modifié :
a) Au quatrième alinéa, la référence : « aux titres II et III du livre IV du code du travail » est remplacée par la référence : « aux titres Ier à IV du livre III de la deuxième partie du code du travail » ;
b) À la seconde phrase du cinquième alinéa, les mots : « Les titres III et IV ainsi que les chapitres III et IV du titre VI du livre II du code du travail sont applicables » sont remplacés par les mots : « La quatrième partie du code du travail est applicable » ;
6° ter (nouveau) À l’article 31-3, les mots : « Les titres III et IV du livre II du code du travail s’appliquent » sont remplacés par les mots : « La quatrième partie du code du travail s’applique » ;
7° L’article 33 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, les mots : « et notamment des activités associatives communes » sont supprimés ;
b) Au troisième alinéa, les mots : « ne concernant pas des activités sociales » sont supprimés ;
c) Les quatrième, septième, neuvième et dixième alinéas sont supprimés ;
8° À la première phrase du second alinéa de l’article 34, les mots : « contrat de plan de l’exploitant public » sont remplacés par les mots : « contrat mentionné à l’article 9 » ;
9° (nouveau) Dans tous les textes législatifs autres que la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 précitée, les mots : « l’exploitant public La Poste » sont remplacés par les mots : « La Poste ».
M. le président. La parole est à Mme Mireille Schurch, sur l'article.
Mme Mireille Schurch. L’article 12 prévoit la suppression des références aux notions d’exploitant public, puisque vous transformez La Poste en société anonyme.
On pourrait donc facilement penser qu’il s’agit uniquement d’un article de conséquence. Pourtant, vous profitez de cet article pour supprimer la participation de La Poste à l’effort national d’enseignement supérieur dans les domaines de la communication et de l’électronique. Or, selon nous, cet effort fait partie intégrante des missions de service public que La Poste se doit d’assumer.
À ce titre, nous sommes stupéfaits que vous souhaitiez introduire une telle disposition, alors même que vous êtes les garants les plus zélés du respect du droit communautaire. Je m’explique : cette mesure apparaît comme contraire aux ambitions définies par la stratégie de Lisbonne, qui désigne l’axe majeur des politiques économiques et de développement de l’Union européenne entre 2000 et 2010.
En effet, selon les conclusions de la présidence du Conseil européen de Lisbonne des 23 et 24 mars 2000, la priorité des politiques communautaires est de faire de l’Union européenne « l’économie de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique du monde d’ici à 2010 ».
Permettez-moi de vous lire un extrait des déclarations de la Commission européenne : « Cela suppose la viabilité budgétaire, une meilleure réglementation et des systèmes fiscaux et sociaux adéquats. Nous devons améliorer l’éducation et la formation pour permettre à davantage de personnes de réaliser pleinement leur potentiel, dans leur propre intérêt et dans celui de l’ensemble de la société. Nous devons aussi investir dans la recherche pour conserver notre avantage comparatif par rapport aux régions avec lesquelles nous sommes en concurrence. »
Nous voyons donc bien que la stratégie de Lisbonne incite les États membres à réaliser un effort important dans les domaines de l’enseignement supérieur et de la recherche.
À l’heure où les outils de communication amorcent une révolution profonde de ce secteur, nous pensons que tous les acteurs concernés doivent participer à l’effort national en faveur de l’enseignement supérieur.
En outre, une telle disposition est également importante d’un point de vue symbolique. Elle démontre que la politique de ce gouvernement s’inscrit dans le court terme et ne se place pas dans une perspective d’avenir. Il s’agit simplement de permettre à La Poste de se dégager de toute mission de service public et de l’éloigner de toute conception de l’intérêt général.
Nous ne pouvons pas l’accepter. Au contraire, nous pensons que la présence de services publics investis d’une mission d’intérêt général favorise l’économie de la connaissance et qu’elle permet à tous d’avoir accès à des services fondamentaux, dont le droit à la communication fait partie.
Par ailleurs, cet article supprime la fixation du cadre général des activités de La Poste par décret en Conseil d’État. En effet, un établissement public est limité au sein de ses activités par son statut. À l’inverse, une société anonyme n’a aucune obligation.
Rien n’empêchera demain La Poste de vendre des téléphones ou des confiseries, d’être promoteur immobilier ou d’exercer toute autre activité que les actionnaires auront jugée rentable, quand bien même l’établissement ne remplirait plus ses obligations de service public. Voilà qui conduit, de fait, à pervertir la raison sociale de cette entreprise.
Lors de l’examen de ce projet de loi en commission, l’adoption d’un amendement déposé par notre collègue Hervé Maurey a permis de maintenir l’obligation pour le Gouvernement de remettre au Parlement un rapport sur la mission d’aménagement du territoire de La Poste avant le 31 décembre 2010. Nous saluons cette initiative.
Cependant, comme nous vous le démontrons depuis maintenant plusieurs jours, la présence postale risque de souffrir. Conjugué à l’ouverture totale à la concurrence, le changement de statut de La Poste augure mal de l’avenir de la mission d’aménagement du territoire, qui reste fondamentalement non rentable.
Ainsi, charger une société anonyme de missions de service public est un bricolage juridico-politique qui ne résistera pas au temps, comme nous l’avons montré à de multiples reprises au cours de ces derniers jours. La situation actuelle de France Télécom en est également une illustration.
La Poste est un service public. L’entreprise peut en toute légalité demeurer un EPIC et continuer de remplir des missions de service public, même de plus en plus nombreuses. Cette trajectoire, notamment au sein d’un pôle public des télécommunications, nous paraît plus en phase avec les enjeux du XXIe siècle.
Le libéralisme a échoué lamentablement, comme nous le prouve chaque jour de manière dramatique la crise que nous traversons. Il est temps de changer vos logiciels, au lieu de revenir sans cesse sur des schémas qui ne fonctionnent pas. Voyez donc la situation de France Télécom aujourd’hui !
La modernité consiste non pas à vendre notre patrimoine aux intérêts privés, mais à faire vivre de manière dynamique une cohésion sociale et territoriale dans notre pays, grâce à ces fabuleux outils que sont les services publics !
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L'amendement n° 72 est présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.
L'amendement n° 312 est présenté par MM. Desessard et Muller et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.
L'amendement n° 515 rectifié est présenté par MM. Teston, Botrel, Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste et apparentés.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Bernard Vera, pour présenter l'amendement n° 72.
M. Bernard Vera. En déposant cet amendement, nous avons écrit dans son objet qu’il était pour nous la conséquence de l’ensemble des amendements déposés sur le projet de loi. En effet, l’article 12 règle une bonne part des réécritures législatives nécessaires à la prise en compte du texte dont nous débattons.
C'est la raison pour laquelle, par cohérence avec ce que nous défendons depuis le début de nos débats, nous demandons la suppression de l’article 12, qui annule l’expression : « l’exploitant public » et la remplace par : « la société » ou « La Poste ».
Mais cet article contient également d’autres modifications que nous ne pouvons pas accepter.
Je mentionnerai tout particulièrement la suppression de la seconde phrase de l’article 4 de la loi du 2 juillet 1990 relative à l’organisation du service public de La Poste et à France Télécom. En effet, par cet alinéa, le projet de loi supprime la participation de La Poste à l’effort national d’enseignement supérieur dans le domaine de la communication électronique.
Ainsi, ce texte dégage la nouvelle société privée de la mission de service public concourant à la recherche dans un domaine pourtant essentiel à l’avenir de notre pays.
Nous ne saurions accepter une telle amputation des fonds nécessaires au développement de ce secteur de l’enseignement supérieur.
En outre, ce désengagement apparaît en totale contradiction avec les orientations affichées par le Gouvernement, qui prétend vouloir ouvrir le financement de l’enseignement supérieur aux entreprises privées, par l’intermédiaire de fondations rattachées aux universités.
Avec un tel changement de structure de La Poste, vous aviez la possibilité d’inscrire ce financement dans les missions même de cette nouvelle société. Or vous n’avez pas saisi l’occasion.
La preuve est ainsi faite que vos seuls objectifs sont bien, d’une part, de réduire les dépenses publiques d’enseignement supérieur et, d’autre part, de restreindre les missions de service public assumées par cette nouvelle société privée.
Finalement, votre vision est bien celle d’un service universel, compris comme un minimum socialement acceptable.
En revanche, votre intention est bien de laisser une marge considérable à la marchandisation d’un maximum de services postaux et de réduire les coûts de gestion de La Poste, afin d’augmenter la rentabilité de cette entreprise en vue de sa privatisation future.
Pour nous, c’est une justification supplémentaire à notre demande de suppression de l’article 12.
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour présenter l'amendement n° 312.
M. Jean Desessard. Cet amendement vise à supprimer l’article 12, qui procède à des adaptations juridiques liées au changement de statut.
Au-delà des dispositions obsolètes concernant la création de la société anonyme, cet article supprime des activités que je trouve intéressantes pour La Poste.
Par exemple, aux termes de l’alinéa 4 de cet article, La Poste ne participera plus à l’effort national d’enseignement supérieur dans les domaines de la communication et de l’électronique. Or je considère que La Poste est directement concernée par l’effort de développement de l’électronique, en particulier des échanges électroniques. Il me semble donc essentiel que La Poste puisse continuer de jouer son rôle en la matière, car son expérience est irremplaçable.
Je souhaite également attirer votre attention sur l’alinéa 6, qui modifie l’article 39 de la loi de 1990. Si ce texte est adopté, La Poste ne sera plus soumise au contrôle de la Cour des comptes, ni au contrôle économique et financier de l’État. Si je comprends bien, l’État va recapitaliser la société anonyme La Poste sans avoir voix au chapitre en matière économique et financière. Si l’argument de la transposition juridique apparaît valable, sa mise en œuvre concrète laisse perplexe.
Vous le voyez, sous couvert de coordination juridique, l’article 12 fragilise encore davantage La Poste et le rôle de l’État en tant que garant d’un service postal de qualité. C’est pourquoi je m’oppose à cet article.
M. le président. La parole est à M. Michel Teston, pour présenter l'amendement n° 515 rectifié.
M. Michel Teston. Cet article est une conséquence du changement de statut de La Poste. Il consiste à apporter des modifications à la loi de 1990. Nombre d’entre elles ont déjà été énumérées par les collègues qui se sont exprimés avant moi.
Je retiendrai principalement la suppression des mots : « l’exploitant public », de la référence au « contrat de plan » ou encore, d’une manière plus générale, de diverses dispositions de cette loi, qui seraient désormais rendues caduques du fait de l’application du droit commun des sociétés anonymes.
Je vous rappelle que nous sommes opposés au changement de statut de La Poste et aux conséquences qui en découlent. C'est la raison pour laquelle nous demandons la suppression de cet article.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur ces trois amendements identiques.
En effet, nous nous inscrivons toujours dans notre logique. L’article 12 est un article de coordination, rendu nécessaire par l’adoption des articles précédents. C’est simple à comprendre !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Michel Teston. Pas du tout !
M. Christian Estrosi, ministre. Si ! Je rappelle que l’article 12 regroupe des dispositions de coordination, comme le fait de remplacer les mots : « l’exploitant public » par les mots : « la société anonyme ».
Vous ne pouvez tout de même pas nous empêcher de procéder à une coordination avec les mesures que votre Haute Assemblée a largement adoptées !
En outre, l’article 12 supprime des mesures qui étaient devenues totalement obsolètes, comme le fait que La Poste devait participer à l’effort d’enseignement supérieur en matière de communication et d’électronique. En réalité, c’était une mission de France Télécom. Vous n’allez pas vous battre pour préserver une mission relevant du domaine de compétences non pas de La Poste, mais de France Télécom ! Il faut mettre un peu d’ordre.
M. le président. La parole est à M. Michel Teston, pour explication de vote.
M. Michel Teston. J’ai bien entendu l’argumentation de M. le rapporteur et de M. le ministre.
Nous n’avons pas dit que l’article 12 n’était pas cohérent avec l’article 1er. Nous avons simplement rappelé notre opposition à cet article 1er. Et comme nous sommes opposés à cet article, nous sommes naturellement opposés aux dispositions qui en découlent.
M. Daniel Raoul. Évidemment !
M. Michel Teston. Nous n’avons rien dit d’autre ! Cessez donc d’affirmer que nous n’avons rien compris : nous avons parfaitement compris quelles étaient vos intentions ! Je n’y reviendrai pas aujourd'hui ; nous en reparlerons lors des explications de vote sur l’ensemble du projet de loi, c'est-à-dire mardi, mercredi ou jeudi… (Exclamations ironiques.)
M. le président. La parole est à Mme Évelyne Didier, pour explication de vote.
Mme Évelyne Didier. Nous avons effectivement noté la cohérence des uns et des autres. Mais si la commission et la Gouvernement ont leur cohérence, qu’on ne nous reproche pas d’avoir la nôtre !
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Je ne vous le reproche pas ! J’ai simplement dit que nous n’étions pas d'accord avec vous !
Mme Évelyne Didier. Nous souhaitons effectivement souligner les effets néfastes des différentes mesures découlant de l’article 1er. Et comme nous ne sommes pas certains que tout le monde ait bien compris la signification et la portée de ces dispositions, nous nous permettons d’insister un peu…
Pour notre part, nous avons affirmé notre refus d’entériner le désengagement de La Poste d’un certain nombre de ses missions, notamment de son effort en faveur de l’enseignement supérieur dans le domaine de la communication électronique. En effet, cela nous semble important.
Force est de constater que nous n’avons obtenu aucune assurance de votre part. Au contraire, vous réaffirmez vos choix. Ne soyez donc pas étonnés que nous votions cet amendement !
Autre élément justifiant la suppression de l’article 12, le sixième et le dix-neuvième alinéas de cet article sonneront tout simplement le glas des activités sociales et associatives en faveur des personnels de la Poste.
Ainsi, le sixième alinéa supprime le Conseil d’orientation et de gestion des activités sociales de La Poste. Mais rien n’est prévu pour remplacer cet organisme, ni pendant la phase de transition ni après. Monsieur le ministre, peut-être allez-vous nous rassurer à cet égard.
Si cette question vaut, bien sûr, pour l’avenir, nous aimerions également que vous nous exposiez comment seront mises en œuvre ces prestations durant la période de transition. En un mot, dans l’attente de la mise en place des nouvelles structures, quelles seront les possibilités de soutien aux vacances et aux loisirs en faveur des personnels ?
Le dix-neuvième alinéa donne encore plus de poids à ces questions dans la mesure où il vise à supprimer la collaboration, prévue actuellement dans les textes, entre France Télécom et La Poste dans le domaine de la vie associative commune. Ainsi, le lien historique entre ces deux entreprises que vous aurez privatisées sera définitivement brisé, alors que rien ne vous y contraint.
Un tel acharnement montre bien votre volonté d’en finir avec le service public et de faire disparaître tous les vestiges d’un passé commun qui remonte à l’époque ou les deux entreprises étaient des administrations.
C’est aussi un nouveau cadeau que vous faites aux entreprises au détriment des personnels. C'est la raison pour laquelle nous voterons en faveur de ces amendements de suppression.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 72, 312 et 515 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L'amendement n° 73, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 2.
Supprimer cet alinéa
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Nous ne pouvions faire moins que de déposer un amendement de suppression du deuxième alinéa de l’article 12. En effet, en abrogeant l’article 1er de la loi du 2 juillet 1990, vous rayez d’un trait de plume une grande histoire. Vous prouvez également votre acharnement depuis le premier changement de statut de La Poste, mais aussi depuis celui de France Télécom.
Permettez-moi de vous donner lecture de l’article que vous souhaitez supprimer : « Il est créé, à compter du 1er janvier 1991, deux personnes morales de droit public placées sous la tutelle du ministre chargé des postes et télécommunications, qui prennent respectivement le nom de La Poste et de France Télécom et sont désignées ci-après sous l’appellation commune d’exploitant public. »
Dès cette époque, nous vous avions alerté au sujet des risques qu’il y avait à transformer une administration en deux sociétés publiques. Nous avions malheureusement raison.
Ce changement à ouvert la porte à toutes les évolutions négatives que nous avons connues depuis, et que vous amplifiez aujourd’hui.
Pour France Télécom, l’affaire est faite, et l’on mesure aujourd'hui l’ampleur des dégâts. Dix-huit ans après, c’est au tour de La Poste. Nous reconnaissons votre capacité d’attente et votre constance. Vous savez attendre et ne jamais oublier de poursuivre votre œuvre.
Or, si nous n’y mettons pas un frein, la logique de ces évolutions sera inéluctable. Elles conduiront immanquablement à la privatisation partielle, puis totale, de La Poste.
Ce retour sur un passé récent démontre, s’il en était encore besoin, que nous sommes bien engagés dans un processus de privatisation. Car transformer une société publique en une société privée, qu’est-ce sinon privatiser ?
Avec l’adoption de ce projet de loi, vous aurez fait l’essentiel : il ne vous restera plus qu’à ouvrir le capital de l’entreprise quand la situation le permettra.
C’est donc tout naturellement que je voterai en faveur de la suppression du deuxième alinéa de l’article 12, et je vous demande, chers collègues, d’en faire autant
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Nous avons affaire à une série d’amendements qui visent à supprimer un article de coordination prenant en compte les dispositions qui ont été adoptées.
La commission est défavorable à ces amendements pour les raisons que j’ai déjà évoquées.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Daniel Raoul. La messe est dite !
M. Christian Estrosi, ministre. Non, des points importants sont encore à examiner. Mais, en l’occurrence, il s’agit d’un article de coordination qui renvoie à des heures et des heures de débats, quelquefois constructifs puisqu’ils ont permis d’éclairer nombre d’entre vous.
En tout état de cause, le Gouvernement est globalement défavorable aux amendements déposés sur cet article.
M. le président. L'amendement n° 74, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Mireille Schurch.
Mme Mireille Schurch. Cet amendement tend à supprimer l’alinéa 3 de l’article 12 qui vise à remplacer les mots « l’exploitant public » par les mots « La Poste ».
Nous sommes opposés à cet article, car nous ne sommes pas favorables à la privatisation de La Poste, qui remet en cause les missions de service public de cette dernière.
La Poste doit demeurer un exploitant public et la loi ne peut pas supprimer cette mention dans le texte de 1990.
Une fois de plus, vous affirmerez que La Poste restera une entreprise publique et que ses missions de service public seront garanties. Mais un nouvel amendement prouve que cette affirmation est une contrevérité.
À quoi peut servir d’effacer la mention que La Poste est un exploitant public, sinon pour remettre en cause purement et simplement le caractère public de l’entreprise ? Pourquoi ne pas maintenir une telle mention si vous êtes attachés, comme vous ne cessez de l’affirmer depuis lundi, au caractère public de La Poste ?
Le projet de loi, dans un premier temps, opère le changement de statut de La Poste en société anonyme. Sous couvert de garantir les missions de service public, il prépare le terrain pour la mise en œuvre de la seconde étape de ce projet, à savoir la privatisation pure et simple, en supprimant, via l’article 12, tous les éléments qui pourraient constituer un obstacle.
La consultation populaire à laquelle ont participé 2,5 millions de Français a mis en évidence l’attachement de nos concitoyens à ce service public, ainsi que leur refus de votre projet.
Voilà plus de deux siècles que La Poste est un service public : en 1804, a été conçue pour la première fois une sorte de service public, lorsque Napoléon a rattaché la direction générale des postes au ministère des finances.
La Poste est porteuse de lien social : elle assure une mission essentielle de communication par l’acheminement du courrier et le passage du facteur. Le développement d’internet et de la messagerie numérique ne remplace en rien ses fonctions et ne peut être un argument pour remettre en cause ce service public.
M. le président. Veuillez conclure, chère collègue !
Mme Mireille Schurch. En effet, l’égal accès de tous à internet relève encore d’une utopie. Le phénomène que l’on appelle la fracture numérique recouvre un accès inégal à internet en fonction du milieu social, de la localisation, mais aussi de l’âge. La Poste est au contraire profondément égalitaire, elle applique un tarif unique pour le timbre et elle est accessible à tous. (Marques d’impatience sur les travées de l’UMP où l’on fait remarquer à l’oratrice qu’elle a dépassé son temps de parole.)
La Poste est un vecteur d’information par sa fonction d’acheminement de la presse.
M. le président. Veuillez conclure, madame Schurch !
Mme Mireille Schurch. Mais La Poste est beaucoup plus que cela : elle permet également l’accès de tous à un compte bancaire.
Pour toutes ces raisons, nous nous opposons à la suppression de la mention « l’exploitant public ».
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Pour toutes les raisons qui ont déjà été avancées, la commission est défavorable à la suppression du troisième alinéa de l’article 12.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 75, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Supprimer cet alinéa
La parole est à Mme Évelyne Didier.
Mme Évelyne Didier. Il y a un juste équilibre à trouver entre le temps que nous mettons à présenter nos amendements et la rapidité avec laquelle la commission et le Gouvernement donnent leur avis. Finalement, nous arrivons à une moyenne ! (Sourires.)
M. Pierre Hérisson, rapporteur. N’en abusez pas !
Mme Évelyne Didier. C’est promis !
Cet amendement a pour objet de supprimer l’alinéa 4 de l’article 12 du projet de loi, qui vise à remplacer les mots : « cet exploitant » par les mots : « cette société », dans la loi relative à l’organisation du service public de la Poste et des télécommunications.
La Poste serait alors une simple société, une entreprise comme une autre. Nous ne voulons pas de cette modification !
Nous ne souhaitons pas davantage que La Poste devienne une société. Vous l’aurez compris, nous sommes opposés à son changement de statut, nous sommes opposés à sa privatisation et nous voulons que La Poste demeure, comme elle l’est depuis plus de 200 ans, un exploitant public.
Pour étayer notre opposition à cette privatisation, je me référerai à un exemple concret, celui de la société ColiPoste.
La société ColiPoste est une branche d’activité du groupe La Poste qui est déjà privatisée et dont la mission est de livrer des colis postaux à domicile, avec des garanties de livraison en 48 heures, du moins en théorie. Car, dans les faits, non seulement la livraison ne se fait pas toujours, mais en plus les délais de livraison ne sont pas forcément respectés.
Certains colis ne sont jamais livrés à domicile, mais sont déposés directement au bureau de poste sous des prétextes totalement fallacieux, tels que l’absence de mention d’un étage de livraison. Étrangement, les colis non livrés sont systématiquement destinés à des particuliers. C’est sans doute un hasard si les colis destinés aux entreprises sont, eux, toujours livrés en main propre et en respectant les délais annoncés.
Pourquoi les colis des particuliers ne sont-ils pas livrés ? La réponse est claire : ColiPoste est une entreprise privée qui cherche à dégager des profits et à exercer une activité financièrement rentable. Entre la livraison chez les particuliers et celle dans les entreprises, elle choisit la livraison qui est la plus intéressante pour elle financièrement parlant.
Malgré une demande croissante, l’activité de livraison à domicile n’est pas rentable lorsqu’elle s’adresse aux particuliers. En revanche, les entreprises, nous le concevons bien, représentent un marché bien plus profitable.
Une entreprise privée fait le choix du profit et non celui du service rendu.
Une entreprise privée choisit de réduire ses activités a minima dans les zones qui ne lui rapportent pas assez. Les premières zones touchées sont les zones les plus enclavées, les plus pauvres, alors que ce sont celles qui ont peut-être le plus besoin de ce service.
Est-ce là un service postal ? Nous répondons : non !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Pour les mêmes raisons que précédemment, la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour explication de vote.
Mme Éliane Assassi. Dans les services publics qui fonctionnent en réseau, comme c’est le cas pour La Poste, et comme cela a également été le cas pour France Télécom, pour que le plus grand nombre de personnes aient accès au service, il faut que le tarif soit déconnecté de la prestation et qu’il y ait une compensation à l’arrivée, les services les plus rentables finançant ceux qui le sont moins, ce qui établit ainsi un équilibre.
Cela suppose un choix politique qui soit non pas celui du « tout profit », mais celui du bien-être collectif. Il s’agit en effet d’assurer le bien-être collectif pour tous, sans favoriser l’un par rapport à l’autre, d’œuvrer pour une société égalitaire et de favoriser le bien vivre ensemble. Mais, visiblement, tel n’est pas le choix du Gouvernement !
On peut affirmer dans la loi que les missions de service public de La Poste seront maintenues ; si l’on supprime toutes les conditions qui garantissent leur effectivité, ce n’est que pure incantation.
Le service public offre un accès au plus grand nombre et des tarifs identiques pour tous, sur tout le territoire. Au contraire, la libéralisation ne permet pas de sortir les régions les plus pauvres de la marginalisation.
M. le président. L'amendement n° 76, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Supprimer cet alinéa
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. L’alinéa 5 de l’article 12 de la loi vise à remplacer les mots : « l’exploitant public » par les mots : « la société ».
Nous souhaitons que cet alinéa soit supprimé, car il permet la privatisation du groupe public La Poste en instituant au préalable un changement de statut qui ne peut avoir d’autres visées que d’amoindrir les missions de service public de l’entreprise.
Pour notre part, nous voulons que soit conservés les missions de service public, ainsi que le statut d’exploitant public. Nous préférons donc que le service public soit garanti, assurant une qualité de service et une égalité d’accès pour tous.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 77 est présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche.
L’amendement n° 313 est présenté par MM. Desessard et Muller et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 7
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Mireille Schurch, pour présenter l’amendement n° 77.
Mme Mireille Schurch. Cet amendement tend à supprimer l’alinéa 7 de l’article 12. Cet alinéa abroge en effet la disposition mentionnant la participation de La Poste à l’effort national d’enseignement supérieur dans les domaines de la communication et de l’électronique.
Nous affirmons, pour notre part, la nécessité de maintenir cette participation du groupe public La Poste à des formations supérieures qui lui permettent de former des cadres spécialisés dans le secteur postal, œuvrant pour le bon fonctionnement du service postal français et permettant les avancées technologiques nécessaires.
La privatisation de France Télécom a porté un grand coup à l’École nationale supérieure des postes et télécommunications, l’ENSPT, qui formait des cadres supérieurs administratifs réservés à La Poste et à France Télécom. Cette privatisation a en effet tout d’abord supprimé l’obligation de participation de France Télécom à l’enseignement supérieur. Ensuite, l’ouverture à la concurrence a entraîné l’ouverture des postes de cadres de France Télécom et de La Poste, jusqu’alors réservés aux diplômés de l’ENSPT. Le résultat est implacable : l’ENSPT disparaît en 2001 et, avec elle, son corps d’ingénieurs spécialisés.
Nous souhaitons conserver cette participation financière à l’enseignement supérieur en rapport avec le champ d’action de La Poste. Il est essentiel que subsistent des écoles supérieures spécialisées, car elles assurent un rôle irremplaçable dans la recherche et le développement appliqués à ces entreprises publiques. Ces cadres qualifiés ont contribué à améliorer la qualité et les techniques de travail.
En supprimant cette obligation, on opère un désengagement de La Poste de l’enseignement supérieur, ce qui prouve bien, là encore, la volonté du législateur d’aligner La Poste sur le modèle des entreprises privées, en effaçant toutes les éléments qui pourraient être des entraves à la compétitivité du groupe.
L’objectif est non plus de contribuer à aider et à favoriser l’enseignement supérieur national dans un domaine en lien avec les activités postales, mais de supprimer toutes les obligations légales induisant des coûts pour la future entreprise privée, afin de dégager le maximum de profits. L’enseignement supérieur doit être l’une de nos priorités et nous souhaitons que la participation de la Poste à l’enseignement supérieur soit maintenue.
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour présenter l’amendement n° 313.
M. Jean Desessard. Tout d’abord, je remercie M. le ministre d’avoir pris le temps, dans son avis sur les amendements de suppression, de nous expliquer en quoi consistait l’alinéa 7 que nous voulons supprimer.
L’article 4 de la loi du 2 juillet 1990, que cet alinéa tend à modifier, est ainsi rédigé : « La Poste concourt à promouvoir et à développer l’innovation et la recherche dans son secteur d’activité. Elle participe à l’effort national d’enseignement supérieur dans les domaines de la communication et de l’électronique. » Aujourd’hui, vous nous proposez de supprimer la seconde phrase de cet article. Il est vrai que nous pourrions trouver une source de satisfaction dans le fait que vous conserviez la première phrase, mesure qui devrait d’ailleurs s’appliquer à de nombreuses entreprises !
Cette suppression appelle deux observations.
Si cette mission d’enseignement concernait principalement France Télécom, pourquoi cette phrase n’a-t-elle pas été supprimée lors de la privatisation de cette entreprise ? Le maintien de cette phrase signifiait-il que, lorsque La Poste était encore un service public, elle pouvait se voir confier des missions d’enseignement supérieur dans les domaines de la communication et de l’électronique ?
Si on nous dit que La Poste n’est pas armée pour intervenir dans ces domaines, nous pouvons comprendre cette suppression. Mais elle ne l’était pas plus lors de sa séparation de France Télécom ! Il aurait donc fallu effectuer cette suppression à cette époque, car La Poste n’avait déjà plus les moyens d’assumer l’effort national d’enseignement supérieur dans les domaines de la communication et de l’électronique, puisqu’elle ne disposait plus des connaissances ni du savoir-faire.
Mais on ne procède à cette suppression qu’aujourd’hui, lors de sa transformation en société anonyme. Comprenez que cette réaction tardive nous inquiète : nous nous demandons s’il s’agit de prendre acte du fait que La Poste ne dispose pas, effectivement, des moyens d’assumer sa mission d’enseignement supérieur, ou s’il s’agit tout simplement d’épargner à une société anonyme en voie de privatisation un effort en faveur de l’enseignement supérieur national.
Ce désengagement est d’autant plus étonnant que le Président de la République, Nicolas Sarkozy – je ne le considère pas comme une référence, certes, mais peut-être n’est-ce pas votre cas –, a déclaré à plusieurs reprises qu’il était important d’engager un effort national pour l’enseignement supérieur.
Dans l’attente d’explications de M. le ministre quant au fait que cette modification de l’article 4 de la loi du 2 juillet 1990 n’est pas intervenue lors de la scission de La Poste et de France Télécom, je maintiens mon amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. L’avis de la commission est défavorable, car elle souhaite respecter la logique de coordination de cet article avec les dispositions déjà adoptées.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 77 et 313.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L’amendement n° 78, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :
Alinéas 8, 9, 10
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Évelyne Didier.
Mme Évelyne Didier. Cet amendement, une fois de plus, s’oppose à la privatisation que prévoit le projet de loi du Gouvernement.
Nous souhaitons supprimer les alinéas qui précisent que le cadre général de gestion des activités de l’exploitant public est fixé par décret en Conseil d’État et qu’un autre décret en Conseil d’État fixe les garanties d’une juste rémunération des prestations de service public qu’assure La Poste – et non plus l’exploitant public La Poste –, notamment les prestations de transport et de transport de la presse.
Nous sommes opposés à ces trois alinéas qui remettent en cause le caractère public du groupe. Après EDF, après GDF, après France Télécom, nous franchissons aujourd’hui une nouvelle étape de la libéralisation des services publics, celle de La Poste, qu’entérinent ces alinéas et, avec eux, tous les autres articles du projet de loi.
Le Gouvernement effectue là le choix d’un type de société, et non, comme il tente de le faire croire, celui de la modernisation et du pragmatisme. Le pragmatisme, c’est une idéologie, idéologie qui sert à justifier celle du marché et du libéralisme, à l’accompagner, et qui met l’accent non pas sur l’importance de la qualité du service rendu à tous les usagers, afin de favoriser la cohésion sociale, mais sur l’équilibre financier et la rentabilité.
Les exemples de dégâts produits à l’échelle internationale ne manquent pas. Qu’il s’agisse de l’énergie, des télécommunications ou des transports, on constate partout les mêmes effets négatifs : réduction de l’emploi et baisse des coûts salariaux, sous prétexte d’une diminution des prix, dont les entreprises multinationales, essentiellement, bénéficient.
Le service public, dans le domaine postal comme dans les autres domaines, participe de la construction d’un véritable modèle social auquel on nous impose de renoncer aujourd’hui. Pourtant, le service public postal a contribué à l’accessibilité de tous à ce service, mais également à l’égalité de traitement des citoyens, à un aménagement du territoire plus équilibré, à la réalisation d’infrastructures et d’équipements importants, ainsi qu’à la dynamique d’emploi et de cohésion sociale et territoriale.
Le droit à la communication pour tous est un droit fondamental qu’assure le service public de La Poste, et aucun autre service privé ne pourrait de ce point de vue l’assurer aussi bien que lui.
Cessons de biaiser le débat et de diaboliser le statut actuel de la Poste, qui lui permet de mener à bien toutes ses missions, comme 2,5 millions de Français, que vous refusez d’écouter, se sont empressés de le dire !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 79, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 11
Remplacer l’année :
2010
par l’année :
2009
La parole est à M. Bernard Vera.
M. Bernard Vera. La loi du 2 juillet 1990 prévoyait le dépôt au Parlement, avant le 31 décembre 1996, d’un rapport du Gouvernement sur la mission d’aménagement du territoire de La Poste.
Dans l’alinéa 11 de cet article 12, vous reportez désormais la date de dépôt de ce rapport au 31 décembre 2010. Nous considérons que les délais accordés pour la remise de ce document étaient déjà suffisamment longs et nous demandons que ce rapport soit rendu le 31 décembre 2009.
En effet, selon nous, la mission d’aménagement du territoire de La Poste n’est pas secondaire, et à l’heure où votre projet de loi de privatisation du service public postal risque de porter un nouveau coup à cette mission de La Poste, nous serions particulièrement intéressés de pouvoir lire au plus vite un tel rapport.
Si ce document ne peut être remis avant le 31 décembre 2010, c’est peut-être parce que vous ne souhaitez pas qu’il mette en lumière le fait que les obligations de La Poste en matière d’aménagement du territoire ont été allégées par vos lois successives et par ce dernier projet de loi.
Qui serait assez naïf pour croire que, si la Poste se transforme en société anonyme, elle pourra continuer à assumer efficacement des missions de service public ? Comment pourra-t-elle maintenir ouvertes des agences dites « non rentables », en particulier en milieu rural, si elle doit répondre aux exigences de rentabilité des entreprises privées commerciales ?
Tout porte à croire qu’elle continuera à fermer des agences et à réduire ses effectifs. Les communes devront donc, si elles souhaitent conserver ce service, ouvrir des agences postales communales dont elles assumeront en quasi-totalité la charge financière et qui proposeront des services limités.
Ainsi, une nouvelle fois, la mission d’aménagement du territoire est transférée aux collectivités locales, sans réel financement en contrepartie, et le service public postal proposé aux usagers se dégrade. Pourtant, la présence d’un véritable bureau de poste dans une commune, ouvert à temps plein, avec la présence d’agents au guichet, est primordiale pour continuer d’assurer un lien social nécessaire à la cohésion nationale.
À l’heure où les moyens de communication se développent et sont de plus en plus essentiels pour chacun, vous allez, une nouvelle fois, accentuer une fracture en France entre les citadins et les habitants des zones dites « non rentables », déjà inégalement desservis par les réseaux du téléphone mobile et d’internet.
Avec ce nouveau projet de loi, vous accentuez la désertification des zones rurales françaises et la dégradation de la mission de service public d’aménagement du territoire de La Poste.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 81, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 12
Supprimer le chiffre :
7
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Au sein de l’article 12, alinéa 12, de ce projet de loi, vous demandez la suppression de l’article 7 de la loi du 2 juillet 1990 relative à l’organisation du service public de la poste et à France Télécom.
Nous sommes opposés à la suppression de cet article qui reconnaissait La Poste comme exploitant public.
Vous prétendez sauver La Poste en changeant son statut pour qu’elle puisse accéder à des sources de financement élargi, tout en réaffirmant ses missions de service public. Pourtant, dans le même temps, vous restez très flous sur le financement de ces mêmes missions et souhaitez, selon les conclusions de la commission Ailleret, que les surcoûts liés aux missions de service public diminuent pour arriver à l’équilibre.
Mais comment certaines missions de service public qui, par essence, sont non rentables, comme le maintien de bureaux de poste dans des petits villages, peuvent-elles s’intégrer dans un budget équilibré, surtout si l’État se désengage de leur financement ?
Le fonctionnement d’une entreprise de service public repose sur le fait que les activités rentables financent celles qui sont déficitaires, afin de pouvoir assurer les missions de service public tout en garantissant un prix égal et raisonnable pour tous les usagers.
Depuis la loi relative à la régulation des activités postales de mai 2005 et avec ce nouveau projet de loi, vous contribuez à rompre cet équilibre et nous assistons à une dégradation sans précédent du service public postal.
Un bureau de poste au sein d’un village n’est pas forcément rentable, mais il est utile et indispensable. Il constitue un élément essentiel de la vie communautaire et participe au maintien du lien social. Aujourd’hui, des bureaux de postes disparaissent non pas seulement dans nos campagnes, mais aussi dans nos banlieues, où l’on peut désormais déposer son courrier au bar-tabac-PMU, qui vend alcool, tabac et jeux d’argents ; ce lieu est parfois bien loin de remplir une mission de service public.
Priver certains habitants d’un service public postal de proximité porte atteinte à l’égalité entre les citoyens et contribue à dissoudre la cohésion nationale.
La Poste n’est pas une entreprise comme les autres, elle ne doit pas être soumise à un statut de société anonyme comme les autres, car cette entreprise de service public joue un rôle social essentiel.
Nous souhaitons donc que La Poste reste un exploitant public dont le but est non pas de faire du profit, mais d’assurer un accès égal au réseau postal et bancaire, et que, sur l’ensemble du territoire, tous les citoyens aient, sans distinction, le droit à la communication, à une adresse et à un compte.
Tel est le sens de l’amendement que nous soumettons à votre vote.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 82, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 12
Supprimer le chiffre :
14
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Mme Éliane Assassi. Nous sommes opposés à la suppression de l’article 14 de la loi du 2 juillet 1990 qui reconnaissait La Poste comme exploitant public.
Vous prétendez qu’avec cette loi La Poste serait « imprivatisable » et nous devrions simplement vous faire confiance. Pourtant, France Télécom l’était tout autant et, en 2004, on nous expliquait qu’il était clair, simple et net que le groupe EDF-GDF ne serait pas privatisé. Aujourd’hui, ces sociétés sont toutes privées !
Il est donc clair que ce projet de loi visant à transformer La Poste en société anonyme constitue une privatisation rampante. D’après vous, il libérerait la gestion de l’entreprise des lourdeurs administratives liées au secteur public et permettrait d’envisager une participation au bénéfice pour les salariés. Mais ne nous leurrons pas ! La majorité des salaires de La Poste sont bas et nous doutons qu’il soit très avantageux, pour des salariés déjà en situation précaire, d’avoir une partie de leur revenu qui soit variable.
À l’examen de la situation de nos voisins européens qui ont déjà engagé une privatisation des services postaux, l’avenir de La Poste française, si elle emprunte cette voie, n’a rien de florissant. En Suède, les tarifs ont explosé. En Angleterre et en Italie, les opérateurs historiques étaient au bord de la banqueroute à la suite de la privatisation. Surtout, dans les pays précités, mais également en Allemagne, au Pays Bas, en Pologne, on a pu constater la fermeture de milliers de bureaux de poste et la suppression de milliers d’emplois.
Ainsi, la privatisation de La Poste n’aboutira qu’à une dégradation du service rendu aux usagers, avec moins de bureaux de poste de proximité, et touchera aussi gravement les salariés : en plus de devoir subir un changement de technique managériale, ceux-ci verront le développement des contrats précaires, des temps partiels et devront s’attendre à faire face à des vagues de licenciements massifs, afin de répondre aux objectifs de rentabilité imposés par la libéralisation des marchés et par la concurrence.
Nous nous joignons donc aux usagers et aux salariés pour refuser le changement de statut de la Poste.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 83, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 12
Supprimer le chiffre :
15
La parole est à Mme Évelyne Didier.
Mme Évelyne Didier. L’article 15 de la loi du 2 juillet 1990 reconnaissait La Poste comme un exploitant public dont la comptabilité était soumise au contrôle de commissaires aux comptes désignés par le ministre.
Nous nous opposons à l’abrogation de cet article inscrite dans l’alinéa 12 de l’article 12 de votre projet de loi. En effet, nous souhaitons que La Poste, qui fournit un service public, demeure une entreprise publique, dont les comptes sont strictement contrôlés par des commissaires aux comptes.
Vous prétendez devoir modifier le statut juridique de La Poste pour répondre à une directive européenne qui prévoit la libéralisation du courrier en 2011. Toutefois, nous tenons à vous rappeler que la France fait partie de l’Union européenne et que, si nous étions opposés à cette directive, nous aurions pu montrer notre désaccord.
De plus, cette directive ne fixe aucune obligation quant au statut juridique des entreprises intervenant dans le secteur postal. La transformation de La Poste en société anonyme est donc un choix du gouvernement français.
Enfin, cette directive ne doit être mise en application dans les États membres que le 1er janvier 2011. Vous vous êtes donc empressés de faire passer une loi de privatisation de l’exploitant public La Poste, alors que nous aurions pu prendre le temps de réfléchir ensemble à des solutions alternatives, plus efficaces et plus acceptables par tous.
C’est pourquoi nous vous proposons d’adopter cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 84, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 12
Supprimer le chiffre :
25
La parole est à M. Bernard Vera.
M. Bernard Vera. Il s’agit d’un amendement de cohérence.
Nous ne souhaitons pas que l’article 25 de la loi du 2 juillet 1990 relative à l’organisation du service public de La Poste et à France Telecom soit abrogé. Cet article dispose en effet que les litiges entre La Poste et les usagers, les fournisseurs et les tiers sont portés devant les juridictions judiciaires, à l’exception de ceux qui relèvent, par leur nature, des juridictions administratives. Cette disposition de la loi Quilès deviendrait, si le texte que nous examinons était adopté, nulle et non avenue puisque La Poste étant une société anonyme, les litiges ne pourraient à aucun moment relever des juridictions administratives.
Pourtant, si le projet de loi reconnaît que La Poste remplit des missions de service public, il semble assez logique que soient appliquées à celle-ci les règles du droit public qui réglementent le domaine d’intervention de la responsabilité de l’État, parce qu’elles correspondent à un intérêt général pour la cité.
Les règles concernant les services publics se sont construites progressivement, depuis maintenant plus d’un siècle. La jurisprudence, au fil des années, a précisé la définition des grands principes auxquels sont soumis les services publics : l’égalité d’accès, l’égalité de traitement, la continuité, y compris territoriale, du service et son adaptabilité.
Ce travail accompli par les juges a marqué une évolution de notre société, reconnu l’utilité sociale de ces services et leur spécificité, qui demande l’application de règles particulières. Dès lors, il apparaît nécessaire que la juridiction qui arbitre les litiges entre l’opérateur national et les usagers, ainsi que les fournisseurs du secteur postal reconnu d’utilité publique, soit la juridiction administrative, et non la juridiction judiciaire.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 564, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 12
Supprimer la référence :
26
.La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Cet amendement a déjà été défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 565, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 12
Supprimer la référence :
28
La parole est à Mme Évelyne Didier
Mme Évelyne Didier. Cet amendement a déjà été défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 85, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 12
Supprimer le chiffre :
36
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Même si cet article 12 tend à procéder au balayage intégral des dispositions de la loi du 2 juillet 1990 devenues sans objet du fait de l’adoption du présent texte, cet amendement vise à ne pas autoriser la suppression de la Commission supérieure du personnel et des affaires sociales.
D’aucuns pourraient nous dire qu’il existe au moins deux bonnes raisons de supprimer cette instance. La première, c’est que celle-ci se préoccupait à la fois des agents de droit public de La Poste et de France Télécom. À présent, ces établissements font route séparée et il serait logique de faire disparaître cette commission. La seconde raison, évidemment, c’est la transformation de l’EPIC en société anonyme, avec l’hypothétique introduction dans le dialogue social de La Poste de nouvelles instances de concertation.
En effet, avant d’être une sorte de comité Théodule, la commission supérieure du personnel et des affaires sociales était, d’abord et avant tout, une instance de concertation.
Certes, elle n’avait pas le même profil qu’une commission administrative paritaire, une CAP, ou qu’un comité technique paritaire, un CTP, mais elle était utile. Ainsi, elle examinait les questions sociales relatives à la situation des agents originaires d’outre-mer ; elle travaillait en amont des CAP et des CTP sur les questions d’égalité professionnelle. Ces exemples démontrent toute l’utilité, malgré tout, d’une instance dont la suppression pure et simple participe en fait de la création du vide sidéral dans lequel La Poste va bientôt se trouver plongée en matière de dialogue social.
C’est donc au bénéfice de ces observations que nous vous invitons, mes chers collègues, à adopter cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 563, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 12
Supprimer la référence :
39
La parole est à Mme Mireille Schurch
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 86, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 12
Supprimer le chiffre :
40
La parole est à Mme Mireille Schurch.
Mme Mireille Schurch. L’article 40 de la loi du 2 juillet 1990 dispose : « Les sociétés anonymes dans lesquelles plus de la moitié du capital social est détenue par La Poste, et dont le nombre des salariés employés en moyenne au cours des vingt-quatre derniers mois est au moins égal à 200, sont régies par les dispositions de la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public, applicables aux sociétés visées au 4 de l’article 1er de cette même loi. »
Cela signifie que, au motif de procéder à la coordination des dispositions du présent projet de loi avec la loi précédente, on décide de priver les salariés des filiales de La Poste du droit d’avoir des représentants élus des personnels au sein du conseil d’administration de leur entreprise.
Une telle orientation montre le mépris dans lequel on tient le dialogue social dans ce texte, d’autant que l’on néglige très largement de définir dans la loi la moindre avancée pour la situation des personnels.
Monsieur le rapporteur, monsieur le ministre, la distribution de quelques actions offrant un généreux dividende de cinquante centimes d’euro ou d’un euro par titre ne remplacera jamais l’existence d’un véritable droit du travail, fixant les droits et obligations des agents de droit public et donnant aux autres de véritables garanties collectives.
En outre, le fait de sortir les filiales de La Poste du champ d’application de la loi du 26 juillet 1983 est la manifestation la plus évidente du choix profond qui sous-tend ce projet de loi, celui d’une « sociétisation », première étape avant l’ouverture du capital, puis la cession de parts et l’entrée en bourse.
Nous ne voulons pas de ce schéma et nous le combattons également avec cet amendement, que je vous invite, mes chers collègues, à adopter.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 87, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 13
Supprimer cet alinéa
La parole est à M. Bernard Vera.
M. Bernard Vera. Nous considérons que l’évolution prévue par ce projet de loi n’est pas de bon augure pour les missions de service public assumées par La Poste. En effet, nous ne pouvons accepter que vous transformiez La Poste pour en faire une entreprise comme les autres, alors que son utilité sociale est inestimable et que les citoyens y sont particulièrement attachés. D’ailleurs, ils se sont déplacés très nombreux, le 3 octobre dernier, pour exprimer leur refus du passage au statut de société anonyme. Ils estiment, à juste titre, que cette transformation ouvre la porte à la privatisation et qu’elle comporte des risques importants quant aux missions de service public assumées par La Poste.
Nous souhaitons, par nos amendements, porter ce message sorti des urnes et faire entendre la voix de nos concitoyens.
Cet amendement n° 87 vise à supprimer l’alinéa 13 de l’article 12 du projet de loi qui modifie l’article 27 de la loi du 2 juillet 1990 relative à l’organisation du service public de La Poste et à France Télécom, afin de tenir compte de la transformation de La Poste en société anonyme.
L’article 27 prévoyait initialement que « les procédures de conclusion et de contrôle des marchés de l’exploitant public sont fixées par son conseil d’administration, dans le cadre des dispositions réglementaires précisant ses droits et obligations et dans des conditions conformes aux principes édictés à l’article 25 ». L’article 25 auquel il est fait référence renvoyait à la juridiction administrative certains des contentieux liés à l’établissement public.
Or La Poste étant transformée en société anonyme, aucun des contentieux liés à son activité ne pourra désormais être porté devant la jurisprudence administrative. De plus, les contentieux liés aux marchés passés par l’entreprise seront désormais couverts par le droit commun des sociétés.
La jurisprudence administrative a pourtant permis de bâtir, depuis un siècle, des règles spécifiques, liées à la puissance publique, dans le cadre des missions d’intérêt général. Il en est ainsi des normes liées au service public et aux marchés publics qui permettent de garantir un équilibre entre les impératifs de la puissance publique et les autres intérêts en cause.
Le changement de son statut en société anonyme prive La Poste de cette reconnaissance des missions particulières d’intérêt général qui lui sont confiées.
Pour cette raison, nous demandons la suppression de l’alinéa 13 de l’article 12 du présent projet de loi.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 88, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéas 18, 19, 20, 21
Supprimer ces alinéas
La parole est à Mme Évelyne Didier.
Mme Évelyne Didier. Les alinéas 18 à 20 de l’article 12 du projet de loi modifient l’article 33 de la loi du 2 juillet 1990 relatif aux groupements d’intérêt public que La Poste et France Télécom peuvent constituer entre elles.
Le texte de la commission supprime le contrôle par la Cour des comptes de la comptabilité du groupement d’intérêt public. Le rapport nous indique, de manière très lacunaire, que ces mesures sont redondantes avec des dispositions précitées du code des juridictions financières.
Les dispositions des articles L. 133-1 et L. 133-2 du code des juridictions financières seraient désormais applicables à La Poste. Mais il est ici question des comptes du groupement d’intérêt public et non de ceux de l’entreprise publique. Il faut le rappeler, l’article 33 n’est pas abrogé.
Le projet de loi supprime la référence aux « activités associatives communes ». Dans le même ordre d’idée, la mesure relative au conseil de gestion de chaque groupement concernant des activités sociales disparaît purement et simplement.
Ainsi, sans doter la société anonyme nouvellement créée d’un comité d’entreprise, le projet de loi fait disparaître les dispositions relatives aux sports et aux vacances. C’est fort dommage lorsqu’on connaît le nombre de médaillés issus des ASPTT, les associations sportives de La Poste. Si M. le rapporteur ou M. le ministre daignaient répondre à nos interrogations à un moment donné, peut-être pourraient-ils nous apporter des précisions sur cette question ?
En tout cas, cette disposition du projet de loi qui prend acte de la privatisation de la gestion de l’entreprise sans lui reconnaître les droits qui y sont attachés ne nous paraît ni nécessaire ni opportune.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 89, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 22
Supprimer cet alinéa
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Il s’agit d’un amendement de cohérence avec notre position de fond sur le changement de statut de La Poste.
Comme nous avons eu l’occasion de le dire lors de la discussion de l’article 4, le contrat d’entreprise, tel qu’il est prévu à l’article 140 de la loi relative aux nouvelles régulations économiques, dite « loi NRE », n’a pas un caractère aussi contraignant qu’un contrat de plan. Il oublie singulièrement les missions de service public dévolues jusqu’à aujourd’hui à l’EPIC La Poste et dont le périmètre, malgré les affirmations péremptoires de M. le ministre et de M. le rapporteur, reprises en chœur par quelques parlementaires de la majorité, est singulièrement réduit par le projet de loi.
Entre un service public « timbre-poste » et des missions de service public limitées au strict minimum, le compte n’y est pas !
L’accessibilité bancaire représentera, au mieux, un encours d’épargne qui peut être estimé entre 500 millions et 750 millions d’euros. Ce chiffre doit être comparé avec l’encours des dépôts gérés par La Banque postale, tous types de support confondus – compte courant, livret A, fonds communs de placement et autres SICAV –, qui représentait, à la fin du premier semestre de 2009, 275 milliards d’euros. L’accessibilité bancaire ne représente donc que 0,2 % à 0,3 % de l’encours géré !
Nous vous invitons donc, mes chers collègues, à rejeter la banalisation des activités de la Poste.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 90, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 23
Supprimer cet alinéa
La parole est à Mme Mireille Schurch.
Mme Mireille Schurch. Dans la continuité de nos amendements précédents, nous demandons la suppression de l’alinéa 23 de l’article 12 qui, une nouvelle fois, fait disparaître dans la loi de 1990 la référence à l’exploitant public La Poste.
Si nous sommes à ce point déterminés, c’est parce que nous avons derrière nous de très nombreux citoyens. Ils ont été plus de deux millions à signifier leur refus du changement de statut de La Poste, auquel le Gouvernement veut procéder en urgence cette semaine.
Nul n’ignore en effet que le projet gouvernemental, même amendé par la commission, est le prélude à une privatisation, à l’avènement de déserts postaux et à la disparition de la mission de service public. Après GDF et France Télécom, avec les ravages sociaux que l’on connaît, le scénario est bien rodé !
L’ampleur de la participation à la votation citoyenne, la mobilisation d’un collectif de plus de soixante organisations syndicales, politiques ou associatives, que je me permets de saluer très solennellement, témoignent de la place que tient La Poste dans le cœur des Français : elle est l’un des fondements du contrat social, un pilier du système à la française.
Ce qui appartient à la collectivité ne peut être aliéné. Pour cette raison, dans l’attente d’un référendum, nous souhaitons que la Poste reste un exploitant public.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 12.
(L'article 12 est adopté.)
Article 12 bis (nouveau)
Au premier alinéa de l’article L. 323-2 du code du travail, les mots : « l’exploitant public La Poste, » sont supprimés.
M. le président. L'amendement n° 91, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Bernard Vera.
M. Bernard Vera. L’article 12 bis a été introduit par la commission afin de tirer les conséquences du changement de statut de La Poste pour la transformer en société anonyme. Cet article soumet donc les obligations d’emploi des travailleurs handicapés, mutilés de guerre et assimilés aux dispositions du code du travail applicables aux sociétés anonymes.
Nous sommes opposés à cet article, car ce transfert s’accompagnera de l’application de règles moins contraignantes.
En vertu de l’article L. 323-2 du code du travail applicable à l’exploitant public La Poste, l’application de telles obligations fait l’objet, chaque année, d’un rapport présenté aux comités techniques paritaires ou aux instances en tenant lieu, ainsi qu’aux conseils supérieurs de la fonction publique de l’État, de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière. Dans le droit applicable aux sociétés anonymes, une telle obligation n’existe pas.
Plusieurs catégories de personnels – privés et publics – coexisteront à La Poste, même lorsqu’elle sera devenue une société anonyme. Dans ces conditions, on peut s’interroger sur la pertinence du changement de règlementation.
Enfin, à l’article 12 bis est évoquée très rapidement la question des personnels handicapés. Rien ne permet d’assurer que les points de contact, déjà inégalement répartis sur l’ensemble du territoire, seront aménagés afin d’assurer l’accessibilité du plus grand nombre d’usagers.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement de suppression, qui empêcherait l’application du droit commun aux travailleurs handicapés : en tant que société anonyme, La Poste doit se conformer à l’ensemble des dispositions du code du travail.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 12 bis.
(L'article 12 bis est adopté.)
Article additionnel après l’article 12 bis
M. le président. L'amendement n° 188, présenté par M. Nègre et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Après l'article 12 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le 4 de l'article 261 du code général des impôts est complété par un 11° ainsi rédigé :
« 11° Les prestations de services et les livraisons de biens accessoires à ces prestations, à l'exception des transports de personnes et télécommunications, qui relèvent du service universel postal tel que défini par l'article L. 1 du code des postes et communications électroniques, effectuées par le prestataire en France du service universel postal tel que désigné à l'article L. 2 du même code. »
La parole est à M. Christian Cambon.
M. Christian Cambon. Cet amendement vise à garantir une certaine continuité, en prévoyant que le régime de TVA dont bénéficiait La Poste lorsqu'elle était un EPIC continuera de s'appliquer lorsqu’elle aura été transformée en société anonyme.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Estrosi, ministre. Cet amendement vise à tirer les conséquences en matière de TVA du changement de statut de La Poste. Il précise que le régime actuel de TVA dont bénéficie La Poste en tant qu’EPIC continuera de s’appliquer lorsqu’elle sera une société anonyme. Je remercie M. Louis Nègre, qui a été l’initiateur de cet amendement, de sa vigilance.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 12 bis.
Titre II
DISPOSITIONS PORTANT TRANSPOSITION DE LA DIRECTIVE 2008/6/CE DU 20 FÉVRIER 2008 ET MODIFIANT CERTAINES DISPOSITIONS DU CODE DES POSTES ET DES COMMUNICATIONS ÉLECTRONIQUES
M. le président. L'amendement n° 321, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Supprimer cette division et son intitulé.
La parole est à Mme Mireille Schurch.
Mme Mireille Schurch. À la suite du processus communautaire d’ouverture du secteur postal à la concurrence, la directive européenne du 20 février 2008 met en place un cadre juridique et économique dans ce secteur. Pour notre part, nous refusons de reconnaître le bien-fondé de l’ouverture à la concurrence, qui procède par étapes, avant l’échéance d’ouverture totale en 2011. Mes chers collègues, vous comprendrez donc que, logiques avec nous-mêmes, nous souhaitions supprimer le titre II, qui vise à transposer cette directive dans notre droit national.
Soyons clairs : nous n’avons pas la phobie de la concurrence, qui peut être source de dynamisme ou d’innovation et avoir des effets bénéfiques sur les consommateurs. Mais le problème se pose en des termes différents lorsqu’il s’agit de certaines activités ou services qui ne peuvent être considérés comme des marchandises comme les autres. C’est bien le cas des entreprises ou des services publics opérant dans des secteurs quasi indispensables au bien-être de tous, sans distinction de condition ou de revenu, comme l’énergie, les transports, les télécommunications et, bien sûr, les services postaux.
C’est d’ailleurs pour cette raison que, dans notre pays, après les ravages causés par la Seconde Guerre mondiale, certaines activités essentielles à la population ont été soustraites aux entreprises privées qui, animées du seul souci de la rentabilité, ne pouvaient plus les assurer de façon équitable et les rendre accessibles à tous.
Aujourd’hui, malgré la réussite exemplaire des entreprises qui fournissent ces services à la satisfaction générale – je pense à EDF, à la SNCF, et bien entendu à La Poste –, l’idéologie libérale qui prévaut en Europe veut nous faire revenir en arrière, et ce pour deux raisons. La première n’a rien à voir avec la liberté, au sens plein du terme, mais tout à voir avec la seule liberté d’entreprendre. La seconde est plus prosaïque : ces activités qui fonctionnent au service du plus grand nombre permettent, tout simplement, de gagner beaucoup d’argent.
La subtilité consiste ainsi à s’accaparer progressivement les marchés rentables de ces activités en les livrant peu à peu à la concurrence, tout en laissant au secteur public – nommé « secteur universel » dans le jargon communautaire – la charge des activités structurellement déficitaires.
Nous vous proposons donc de voter cet amendement de suppression du titre II du projet de loi, qui organise l’ouverture à la concurrence et, donc, la destruction inéluctable de notre service public postal.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Cet amendement est contraire à la position de la commission, qui est favorable à l’adoption de ce titre II, indispensable pour transposer la troisième directive postale. Nous ne pouvons bien évidemment pas nous engager dans une modification des dispositions transposant dans notre droit national cette directive européenne.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 321.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Articles additionnels avant l'article 13
M. le président. L'amendement n° 92, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Avant l'article 13, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La loi n° 2005-516 du 20 mai 2005 relative à la régulation des activités postales est abrogée.
La parole est à M. Bernard Vera.
M. Bernard Vera. La loi du 20 mai 2005 relative à la régulation des activités postales a transposé dans notre droit national deux directives européennes, l’une du 15 décembre 1997 et l’autre du 10 juin 2002, qui fondent le démantèlement progressif du service public postal. La première portait sur la création d’un régulateur indépendant des pouvoirs publics, la seconde établissait un calendrier pour achever l’ouverture à la concurrence des services postaux de courrier.
Avec ces deux directives, deux dogmes de l’économie libérale allaient former le cadre juridique dans lequel devrait s’exercer dorénavant les activités postales dans notre pays.
La loi du 20 mai 2005 a ainsi confié la régulation de ces activités à une autorité administrative indépendante, l’ARCEP, en lui donnant pour mission de favoriser l’arrivée de nouveaux entrants sur le marché. L’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes doit aussi veiller au financement et à la préservation quasiment impossible de cet ersatz de service public qu’est la notion de service universel.
Ajoutons à cela la refonte du cadre juridique des services financiers de La Poste, en les mettant hors du champ de la régulation postale, et nous avons là tous les ingrédients de la disparition programmée de notre service public postal.
L’expérience a malheureusement apporté la preuve des effets négatifs de cette loi.
L’organisation du glissement progressif des activités réservées à l’opérateur historique vers le privé se traduit, comme ne cessent de le dénoncer toutes les organisations syndicales de La Poste, par une dégradation des conditions de travail, par une précarisation des statuts, par un pouvoir d’achat des salariés de l’entreprise en constante diminution.
Tout cela se solde, ainsi que le perçoivent les usagers de La Poste, par une dégradation de la qualité des services rendus et par une diminution du maillage territorial, en particulier en milieu rural.
Nous proposons donc d’abroger la loi n° 2005-516 du 20 mai 2005, qui, contrairement à son intitulé, porte en elle tous les germes de la dérégulation et du démantèlement du service public de La Poste.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. La commission est défavorable à l’abrogation de la loi du 20 mai 2005.
M. Bernard Vera. C’est dommage !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Estrosi, ministre. Monsieur le sénateur, le Gouvernement ne peut être que défavorable à l’abrogation d’une loi qui a créé La Banque postale, fixé la mission d’aménagement du territoire de La Poste et défini les pouvoirs de l’ARCEP.
M. le président. L'amendement n° 100, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Avant l'article 13, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'intitulé du chapitre Ier du titre Ier du Livre Ier du code des postes et des communications électroniques est ainsi rédigé :
« Les obligations du service public postal ».
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Avant même de faire référence au service universel postal, comme le fait l’article L. 1 du code des postes et des communications électroniques, il serait nécessaire de préciser directement les obligations du service public postal dans l’intitulé du chapitre Ier du titre Ier du livre Ier dudit code.
Avec ces définitions sémantiques, il y va de la préservation même de notre service public postal – le plus apprécié des Françaises et des Français –, qui a jusqu’ici fait la preuve de son efficacité. Même s’il est parfois critiqué, reconnaissons que l’une de ses vertus premières est d’être un élément important du lien social.
D’une manière générale, la notion de service universel, qui s’est aujourd’hui imposée partout en Europe, annonce de véritables reculs sur le plan social et en matière d’égalité d’accès à un certain nombre de services. C’est aussi d’un point de vue conceptuel un recul par rapport à l’acception française de la notion de service public.
Le service universel européen est directement issu de la notion d’intérêt économique général. Celle-ci est très restrictive par rapport à la notion d’intérêt général, l’un des fondements de notre service public.
La référence à la notion de service universel soulève des questions qui, en leur temps, n’ont pas été résolues par la loi du 20 mai 2005 relative à la régulation des activités postales.
Nous voyons bien qu’il n’est pas possible de prétendre vouloir adapter le service postal à l’ouverture totale à la concurrence sans avoir eu auparavant une réflexion approfondie sur certaines exigences de ce type d’activité. Je pense, en particulier, à l’aménagement du territoire, à la présence postale, à la péréquation tarifaire, ou encore à la production de lien social dans les zones rurales et dans les quartiers défavorisés.
C’est la raison pour laquelle nous voulons que soient précisées, dès le début du livre Ier du code des postes et des communications électroniques, les missions d’intérêt général du service public postal, qui, je le rappelle, concernent les envois postaux, le transport et la distribution de la presse, l’accessibilité bancaire et l’aménagement du territoire.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 354 rectifié, présenté par MM. Teston, Botrel, Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Avant l'article 13, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Un moratoire est instauré sur l'entrée en vigueur de la directive 2008/6/CE du 20 février 2008.
La parole est à M. Michel Teston.
M. Michel Teston. J’ai déjà eu l’occasion de présenter cet amendement lors de l’examen du titre Ier. Il m’avait alors été demandé de le rectifier et de le déplacer au titre II, avant l’article 13. De quoi s’agit-il ?
Avec l’arrêt Corbeau, la Cour de justice des communautés européennes a reconnu expressément que les États membres peuvent « conférer à des entreprises, qu’ils chargent de la gestion des services d’intérêt économique général, des droits exclusifs qui peuvent faire obstacle à l’application des règles du traité sur la concurrence, dans la mesure où des restrictions à la concurrence, voire une exclusion de toute concurrence, de la part d’autres opérateurs économiques, sont nécessaires pour assurer l’accomplissement de la mission particulière qui a été impartie aux entreprises titulaires des droits exclusifs ».
Cette décision a été confirmée récemment par deux autres arrêts : Arrêt Commune d’Almelo et arrêt International Mail Spain. On peut donc considérer qu’il s’agit d’une jurisprudence constante.
L’arrêt Corbeau n’est pas passé inaperçu. En 2000, dans une proposition de résolution sur la deuxième directive postale, le député Alain Barrau a rappelé l’importance de cette jurisprudence pour assurer l’équilibre économique du service public assumé par le titulaire du droit exclusif. Le rapport d’information de M. Hubert Haenel Les services d’intérêt général en Europe, déposé le 16 novembre 2000, y fait également référence.
En 2006, lors de l’examen, au titre du respect du principe de proportionnalité, de la proposition concernant la troisième directive postale, la Commission européenne, qui était interrogée sur ce sujet, n’a donné aucune réponse probante.
En avril 2009, dans le cadre de l’examen de la proposition de résolution européenne déposée par Mme Catherine Tasca, j’ai moi-même évoqué cette jurisprudence, afin d’illustrer l’intérêt de mettre en place une législation-cadre européenne pour les services d’intérêt général.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous demandons à l’État français de se rapprocher d’autres États européens et d’obtenir un moratoire sur l’entrée en vigueur de la directive 2008/6/CE du 20 février 2008. Il nous semble en effet que, dans le contexte économique actuel, qui est extrêmement dégradé, de nombreux États européens seraient prêts à « engager le fer » avec la Commission européenne pour faire en sorte que l’on renonce à supprimer le secteur réservé.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Nous avons déjà eu l’occasion d’évoquer cette question.
Nous transposons la directive européenne en droit interne. Un vote négatif nous mettrait dans une situation d’illégalité par rapport au droit européen. Néanmoins, monsieur le ministre, peut-être nous apporterez-vous des précisions sur ce point, qui est le plus important de la transposition.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Estrosi, ministre. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
Monsieur Teston, vous faites un lien entre l’arrêt Corbeau et l’ouverture à la concurrence au 1er janvier 2011. Aux termes de cette jurisprudence, le monopole postal est compatible avec les règles de concurrence. Mais cet arrêt a été rendu en 1993. Depuis, trois directives européennes, en 1997, en 2002 et en 2008, ont ouvert le secteur postal à la concurrence. L’arrêt Corbeau n’est donc plus d’actualité. Les États membres n’ont plus à se demander si le monopole est compatible avec les règles de la concurrence : celui-ci doit tout simplement être supprimé !
M. le président. La parole est à M. Michel Teston, pour explication de vote.
M. Michel Teston. Je crois que M. le ministre ne m’a pas bien écouté.
L’arrêt International Mail Spain date, de mémoire, de 2007 ou de 2008. La Cour de justice des communautés européennes n’a donc nullement modifié sa jurisprudence. Cet arrêt a été rendu après l’adoption des directives qui nous conduisent aujourd’hui à transposer en droit interne la suppression du secteur réservé à partir du 1er janvier 2011.
Dans le contexte de crise économique, financière et sociale extrêmement grave que connaît l’Europe, supprimer le secteur réservé, qui contribue largement au financement du service universel postal, est une erreur majeure contre laquelle il faut absolument s’élever. C’est pourquoi j’incite le Gouvernement à se rapprocher des États européens qui manifestent leur inquiétude par rapport à la suppression du secteur réservé.
M. Roland Courteau. Très bien !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 354 rectifié.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 47 :
Nombre de votants | 337 |
Nombre de suffrages exprimés | 335 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 168 |
Pour l’adoption | 150 |
Contre | 185 |
Le Sénat n'a pas adopté.
L'amendement n° 355, présenté par MM. Teston, Botrel, Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Avant l'article 13, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La France demande la renégociation de la directive 2008/6/CE du 20 février 2008.
La parole est à M. Jean-Pierre Caffet.
M. Jean-Pierre Caffet. Par cet amendement, nous demandons la renégociation par la France de la directive postale du 20 février 2008.
Il nous a été expliqué, tout au long de l’examen du titre Ier, que le changement de statut que le Gouvernement préconise au travers de ce texte ne remettait absolument pas en cause les missions du service universel postal.
Si ce n’est au titre Ier, c’est au titre II qui vous y procédez, de manière minutieuse, au nom de la transposition de cette directive. Vous nous proposez aujourd’hui de transposer des dispositions qui, dans les faits, pourraient condamner à terme le service universel postal français. C’est la principale raison pour laquelle nous demandons à la France de renégocier cette directive postale.
M. Roland Courteau. Très bien !
M. Jean-Pierre Caffet. Un certain nombre d’arguments auraient pu être invoqués, au moment de la négociation de la troisième directive, qui auraient permis de préserver le secteur réservé et les spécificités du service universel français. Parmi ceux-ci, je voudrais tout particulièrement insister sur les droits découlant du respect des objectifs d’intérêt public.
D’ailleurs, même la Commission européenne aborde cette question dans sa communication sur les services d’intérêt général du 20 novembre 2007 et pose la question de la compatibilité des règles du marché intérieur et de la concurrence avec l’exercice des missions d’intérêt général.
Ainsi, la Commission considère que lorsque l’application des règles de l’article 86, paragraphe 2, du traité de Rome « fait échec à l’accomplissement, en droit ou en fait, des missions d’intérêt général particulières qui leur ont été imparties, ces services peuvent bénéficier d’une dérogation aux dispositions du traité, pour autant que certaines conditions soient satisfaites, notamment en ce qui concerne la proportionnalité de la compensation octroyée aux entreprises chargées de la gestion de ces services ».
M. Roland Courteau. C’est clair !
M. Jean-Pierre Caffet. Or il apparaît que, dans ce projet de loi, la compensation n’est plus réalisée.
M. Jean-Paul Emorine, président de la commission de l'économie. Mais si !
M. Jean-Pierre Caffet. C’est une raison suffisante pour demander la renégociation de cette directive.
M. Jean Desessard. Excellent !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote sur l’amendement n° 355.
M. Jean Desessard. Monsieur le rapporteur, n’avez-vous aucun argument à opposer à M. Caffet ? Il vient pourtant de démontrer que l’application de cette directive n’était pas inexorable, puisqu’il y avait des failles. On peut donc revenir en arrière ! J’aurais écouté avec plaisir votre réponse sur ce point.
Par ailleurs, quels groupes politiques ont refusé cette directive ? Le groupe communiste, le groupe socialiste et les Verts ; je ne connais pas la position des radicaux de gauche, qui ne sont pas nombreux au niveau européen – je n’insiste pas, c’est une situation que je connais bien par ailleurs. (Sourires.)
Quels groupes politiques ont voté cette directive ? Le groupe centriste et le groupe UMP ! Il faut que cela soit dit !
Ce qui apparaît comme inexorable depuis le début de ce débat ne l’était pas ! On a prétendu que nous étions obligés de nous adapter à la concurrence, que des champions européens allaient détruire La Poste, qui aurait bien du mal à se battre, et qu’il importait de transformer son statut en société anonyme, afin qu’elle puisse faire face à cette concurrence effrénée, cruelle, dramatique !
Il n’est donc pas inutile de rappeler que seuls les groupes politiques de droite ont voté cette directive permettant la concurrence à l’échelle européenne.
M. Roland Courteau. Il a raison : ils l’ont adoptée sans broncher !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 355.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 48 :
Nombre de votants | 337 |
Nombre de suffrages exprimés | 336 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 169 |
Pour l’adoption | 151 |
Contre | 185 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt-deux heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures cinquante-cinq, est reprise à vingt-deux heures, sous la présidence de M. Gérard Larcher.)
PRÉSIDENCE DE M. Gérard Larcher
M. le président. La séance est reprise.
Nous reprenons la discussion du projet de loi relatif à l’entreprise publique La Poste et aux activités postales.
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l’amendement n° 360, tendant à insérer un article additionnel avant l’article 13.
Articles additionnels avant l'article 13 (suite)
M. le président. L'amendement n° 360, présenté par MM. Teston, Botrel, Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Avant l'article 13, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement présente au Parlement un rapport spécifique sur la situation des réseaux postaux ruraux, notamment dans les zones de montagne et les régions insulaires au plus tard le 30 juin 2010 puis tous les trois ans.
La parole est à M. Roland Courteau.
M. Roland Courteau. Cet amendement a pour objet de demander au Gouvernement de présenter régulièrement un rapport qui fasse état de la situation des réseaux postaux ruraux.
L’importance des réseaux postaux en zones rurales et de montagne a été reconnue par la troisième directive postale, dont le considérant n° 19 précise que « les réseaux postaux ruraux, notamment dans les zones de montagne et les régions insulaires, jouent un rôle important pour intégrer les entreprises dans l’économie nationale ou mondiale et pour préserver la cohésion dans le domaine social et de l’emploi », et que, en outre, « les bureaux de poste ruraux peuvent, dans les régions éloignées, constituer un réseau d’infrastructures nécessaire pour accéder aux nouveaux services de communications électroniques ».
On est loin, ici, de l’équation « réseau rural égale réseau archaïque non rentable », puisque la directive considère même que les réseaux postaux ruraux peuvent être à la pointe de la modernité et présenter beaucoup d’intérêt pour la vie et la relance économiques.
Or, si le statut de La Poste change, cet objectif risque de ne plus représenter une priorité, puisque, comme le souligne M. Hérisson dans son rapport, c’est vers l’action internationale que La Poste devra se tourner.
Le Parlement a donc réellement besoin de pouvoir évaluer la situation des réseaux postaux ruraux, pour mesurer quelles sont les réelles possibilités d’avoir une politique de réseau adaptée aux évolutions technologiques, mais aussi respectueuse des besoins des usagers et des entreprises qui font vivre les zones moins peuplées.
Dans son rôle de contrôle, le Parlement devrait pouvoir conduire des débats sur l’aménagement du territoire en France comme sur l’état des réseaux du service public, afin de vérifier que le Gouvernement, dans son contrat avec La Poste, fait bien respecter les obligations de service public pour faire vivre ces zones et les tourner vers la modernité.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Cet amendement vise à ce que le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur les réseaux postaux ruraux, au plus tard en juin 2010, puis tous les trois ans.
Un tel rapport, dont la date de remise est beaucoup trop proche de celle à laquelle la loi entrera en vigueur, ferait double emploi avec celui qui est prévu à l’article 14.
Aussi la commission émet-elle un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 360.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Titre II
DISPOSITIONS PORTANT TRANSPOSITION DE LA DIRECTIVE 2008/6/CE DU 20 FÉVRIER 2008 ET MODIFIANT CERTAINES DISPOSITIONS DU CODE DES POSTES ET DES COMMUNICATIONS ÉLECTRONIQUES
Article 13
L’article L. 1 du code des postes et des communications électroniques est ainsi modifié :
1° À la première phrase du deuxième alinéa, après le mot : « conditionnement », sont insérés les mots : «, y compris sous forme de coordonnées géographiques codées » ;
2° Le quatrième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Les prix sont orientés sur les coûts et incitent à une prestation efficace, tout en tenant compte des caractéristiques des marchés sur lesquels ils s'appliquent. » ;
3° Au début du cinquième alinéa, le mot : « Il » est remplacé par les mots : « Le service universel postal » ;
4° Après le cinquième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les services d’envois postaux à l’unité fournis par le prestataire du service universel postal sont proposés au même tarif sur l’ensemble du territoire métropolitain. Le tarif appliqué aux envois de correspondance en provenance et à destination des départements d’outre-mer, de Mayotte, de Saint-Pierre-et-Miquelon, de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin, des îles Wallis et Futuna et des Terres australes et antarctiques françaises est celui en vigueur sur le territoire métropolitain lorsque ces envois relèvent de la première tranche de poids. Il en va de même des envois de correspondance relevant de la première tranche de poids en provenance du territoire métropolitain ou des collectivités précédemment mentionnées et à destination de la Polynésie française et de la Nouvelle-Calédonie. » ;
5° Le dernier alinéa est supprimé.
M. le président. La parole est à M. Gérard Le Cam, sur l'article.
M. Gérard Le Cam. Le titre II du texte vise à libéraliser totalement les activités postales à compter du 1er janvier 2011, comme le prévoit la troisième directive postale, en date du 27 février 2008.
L’adoption de cette directive a suscité, notamment au sein de notre groupe, de grandes inquiétudes s’agissant du financement du service universel.
En effet, supprimer le secteur réservé revient de fait à priver La Poste d’une partie des ressources lui permettant de financer le service universel.
Vous semblez penser que cette évolution constitue un progrès pour l’établissement d’un grand marché unique, et même un grand progrès pour les usagers. Pourtant, comment ne pas voir qu’elle s’accompagne d’une politique d’entreprise qui vise à la rationalisation des coûts ?
Cette rationalisation s’obtient de deux manières : d’un côté, on supprime du personnel ; de l’autre, on diminue des prestations, certes de service public, comme la distribution de la presse, mais qui, décidément, coûtent bien trop cher dans l’optique de la libéralisation totale…
Cette libéralisation ne vise qu’à mettre en difficulté les opérateurs historiques, pourtant chargés de missions spécifiques. Partout en Europe, cette politique s’est traduite par une diminution des prestations proposées aux usagers. En Suède, c’est la règle des tiers qui s’est appliquée : un tiers de bureaux et un tiers du personnel en moins. En revanche, les tarifs ont augmenté…
Pour ces raisons, depuis maintenant de nombreuses années, nous demandons que soit dressé un bilan des politiques européennes de libéralisation, notamment dans le secteur des activités postales.
Ouvrir le marché sans que les conséquences des premières directives aient été analysées nous apparaît comme une fuite en avant contestable. Ce modèle concurrentiel n’est pas performant quand il s’agit de garantir des droits fondamentaux par des services publics.
À cette mise en concurrence, nous opposons les coopérations entre les services publics nationaux. Quel est le bénéfice, pour les usagers, si La Poste s’aventure dans le grand jeu des fusions-acquisitions, comme l’a fait, en son temps, France Télécom ? Je vous rappelle qu’à l’époque, en 2000, cela s’était soldé par une dette record, atteignant 70 milliards d’euros.
Soyons donc sérieux, et décrétons qu’il est urgent d’attendre. Les conditions ne sont pas réunies, aujourd’hui, pour aller plus avant dans la voie de la libéralisation, alors que nos concitoyens subissent les conséquences dramatiques de la crise économique que nous traversons.
Cette crise, qui est liée notamment à la folie de la spéculation et à l’appât du gain, montre que l’intervention publique ne peut être fondée sur le laisser-faire. Elle met également en évidence la nécessité de faire de La Poste le symbole de l’accessibilité bancaire, par le biais de la Banque postale.
Le choix que vous avez fait de vous désinvestir de ces questions nous pose problème. Non, la concurrence libre et non faussée n’est pas la réponse, parce que la concurrence n’est jamais libre et est toujours faussée.
Substituer des oligopoles privés aux anciens monopoles publics, permettre à de nouveaux entrants de partager le gâteau, alors même que ceux-ci ne sont soumis à aucune obligation de service public, nous semble absurde.
Une réorientation de la construction européenne est nécessaire. Elle doit s’articuler autour des services publics, et non être uniquement axée sur l’achèvement du marché intérieur.
Pour toutes ces raisons, nous nous opposons à cet article, qui entérine la suppression du secteur réservé tout en incitant La Poste à orienter ses prix sur les coûts.
Certes, la commission a souhaité apporter la précision, d’ailleurs fort vague, que cette orientation des prix tiendrait compte des caractéristiques des marchés auxquels ceux-ci s’appliquent. En effet, M. Hérisson nous explique, dans son rapport, « qu’il s’agit, de cette manière, d’éviter que toute la tarification de La Poste soit construite par rapport aux coûts de chaque produit ».
Nous considérons, pour notre part, qu’il s’agit là d’un aveu du changement de direction de la politique de l’entreprise, avec les encouragements du Gouvernement. Orienter les prix sur les coûts permet, de manière très subtile, de briser toute notion de péréquation tarifaire nationale.
Par ailleurs, est-il bien utile de préciser que le prix du timbre pour les envois à l’unité restera unique si celui-ci doit augmenter de manière considérable durant les prochaines années ?
Les usagers vont être, encore une fois, les grands perdants de cette ouverture à la concurrence, pour le bonheur de quelques sociétés qui vont exploiter des filons rentables.
Monsieur le rapporteur, nous étions d’accord avec l’exigence que vous aviez posée en 2006 dans l’une de vos propositions de résolution européenne, quand vous demandiez que le service public ne soit pas sacrifié sur l’autel du marché intérieur. J’ai le regret de vous confirmer, malgré toutes les assurances formelles prises dans ce projet de loi, que le service public postal est gravement remis en cause par ce texte, qui prépare la privatisation de La Poste et entérine le fait que le marché postal fonctionnera comme les autres, au gré de l’offre et de la demande.
M. le président. La parole est à Mme Dominique Voynet, sur l'article.
Mme Dominique Voynet. Les articles 13 et suivants visent à transposer la troisième directive postale. Je voudrais donc m’exprimer sur la situation du service postal au plan européen.
La libéralisation du service postal est déjà mise en œuvre depuis plusieurs années chez certains de nos voisins. Cela nous permet d’observer les conséquences de ce processus et d’évaluer le rôle que La Poste pourra jouer dans cet environnement concurrentiel.
De manière générale, le rapport de la commission évoque une « croissance agressive » des opérateurs privés que La Poste doit « affronter ».
De nombreux exemples sont abordés. Prenons le cas des Pays-Bas : le rapport ne tarit pas d’éloges sur la rentabilité de TNT, un des opérateurs néerlandais, dont les résultats seraient bien meilleurs que ceux de La Poste.
Je suis surprise que l’on puisse prendre le marché des Pays-Bas en exemple, car la rentabilité masque la situation précaire des postiers et la médiocrité des services rendus. Cela semble valable pour tous les opérateurs. En effet, les effectifs de l’opérateur alternatif Sandd sont principalement composés de facteurs autoemployés, dont la plupart ne sont pas couverts par une assurance. Pourquoi ? Tout simplement parce que le salaire horaire avec assurance est de 5 euros, alors que, sans assurance, il s’élève à 7,5 euros. Ces facteurs à temps partiel sont le plus souvent des étudiants, des personnes âgées ou des femmes vivant dans la précarité, à la recherche d’un complément de revenu pour soutenir leur foyer.
La situation n’est guère plus reluisante en Allemagne. Certes, douze ans après le début de la privatisation, les bénéfices de la Deutsche Post se comptent en milliards d’euros, mais les bureaux de poste ont quasiment disparu, supplantés par les supermarchés discount Aldi ou les petits commerçants. Aujourd’hui, la poste allemande réalise 60 % de son chiffre d’affaires à l’étranger, notamment aux Pays-Bas, où elle n’a aucun scrupule à pratiquer des salaires inférieurs de 66 % à ceux des opérateurs locaux. Pour autant, l’arrivée de la concurrence n’a évidemment pas fait baisser le prix du service pour le client.
Je pourrais également vous parler de la Belgique, où la dernière idée du président de l’équivalent de La Poste est l’invention du « facteur low cost » : trois heures de travail par jour, pour un salaire brut de 25 euros.
Je précise que, chez nous, La Poste est en pourparlers avec le néerlandais Sandd depuis plusieurs années et que des bruits courent sur le rachat de la poste belge…
On n’arrête pas le progrès ! Le rapport de la commission précise bien que les « nouveaux opérateurs devraient développer un réseau fondé sur une offre low cost » et parle des « vertus d’une telle ouverture à la concurrence ». Ce sont vos mots, monsieur le rapporteur !
Ce que je constate, c’est que l’affrontement concurrentiel, sauf exception, ne conduit pas à améliorer la qualité des services, ni à étendre leur champ, ni à les rendre accessibles à tous et en tous lieux. La compétition pousse à se débarrasser des secteurs les moins rentables. Les suppressions de bureaux de poste et d’emplois vont bon train, quel que soit l’avis que l’on porte par ailleurs sur leur utilité sociale.
Je m’inscris en faux contre ce système. Plutôt qu’une concurrence agressive, néfaste pour les salariés et les usagers, mieux vaut un service public postal fondé sur une politique de concertation et de coopération internationales, sans comportements prédateurs. La Poste pourrait s’appuyer sur un renforcement et une amélioration des fonctions de l’Union postale universelle, l’institution de l’ONU dont le but est de favoriser la coopération des systèmes postaux.
Dans ce domaine comme dans d’autres, la mise en concurrence de tous contre tous n’est pas la solution optimale.
M. le président. La parole est à M. Michel Teston, sur l'article.
M. Michel Teston. Avec l’article 13, nous entamons la discussion des dispositions visant à transposer la directive 2008/6/CE, qui achève la libéralisation du marché intérieur des services postaux.
Cet article comprend plusieurs volets : l’adaptation de la définition de l’envoi postal aux évolutions technologiques permettant la reconnaissance des adresses sous forme de codes-barres ; l’affirmation du principe selon lequel les prix doivent être orientés sur les coûts ; le rappel du tarif unique du timbre ; la suppression de la disposition sur la tarification des services constituant le secteur réservé, c'est-à-dire le monopole résiduel des postes nationales pour la levée, le tri et la distribution des plis de moins de 50 grammes.
Si la question de l’adaptation aux évolutions technologiques ne pose pas de problème, il n’en va pas de même pour les autres aspects de cet article.
L’article L. l du code des postes et des communications électroniques dispose actuellement que les services sont offerts à des prix abordables pour tous les utilisateurs. Or l’ajout du principe selon lequel les prix sont orientés sur les coûts semble aller à l’encontre de l’obligation d’offrir les services à un « prix abordable ».
En effet, désormais, l’important ne sera plus tant de fournir un service à un prix dont chacun puisse s’acquitter que de veiller à adapter le prix au coût de revient.
Dès lors, que se passera-t-il pour les territoires d’accès difficile ? Ne doit-on pas craindre une hausse importante du prix du timbre ? Le rapporteur souligne d’ailleurs ce danger et cherche à le minimiser en précisant que le calcul des prix doit tenir compte des marchés auxquels ils s’appliquent.
Nous proposerons donc au Sénat d’adopter des amendements qui visent notamment à assurer le respect du principe de péréquation, lequel garantit l’accès au service, ou la fourniture de ce service à un prix abordable pour tous.
Même si, pour le moment, le principe du tarif unique du timbre semble maintenu, l’esprit de la directive n’incite pas à l’optimisme. À terme, il ne nous paraît pas impossible que la logique de rentabilité et d’adaptation du prix au coût prenne le pas sur la logique de service et que l’on voie disparaître le principe du prix unique du timbre, pourtant essentiel pour la péréquation.
En conclusion, je rappelle que nous sommes opposés à la fin du secteur réservé, qui est un moyen adapté de financement du service universel.
On nous objectera sans doute que la directive ici transposée impose la fin de ce secteur réservé. Toutefois, et j’ai déjà évoqué cette hypothèse, la mise en place préalable d’une législation-cadre sur les services d’intérêt général, que les socialistes appellent de leurs vœux depuis longtemps, aurait pu permettre la sauvegarde du secteur réservé et, partant, celle du financement actuel du service universel. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. L'amendement n° 93, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud. L’article 13 tend à récrire certaines dispositions de l’article L. 1 du code des postes et des communications électroniques, qui traite essentiellement des principes et des missions du service universel postal et présente un intérêt fondamental en ce qu’il fait référence à la notion de service universel postal, service dont l’opérateur, en France, est La Poste.
Or, la notion de service universel découle d’une sorte de « bricolage » idéologique, traduit depuis une vingtaine d’années dans différentes directives européennes relatives aux secteurs de l’énergie, des transports, des télécommunications et de la poste. C’est en effet bien de cela qu’il s’agit lorsque l’on veut à toute force légitimer la primauté du dogme de la concurrence sur la régulation des marchés au service de l’intérêt général.
Le service universel, sous couvert de garantir certaines missions d’intérêt général, préfigure toujours l’ouverture totale à la concurrence, qui est le triomphe des intérêts particuliers.
Nous aurons l’occasion, lors de la présentation d’amendements ultérieurs, de justifier notre rejet de la notion de service universel postal, que nous considérons très en deçà de celle de service public telle que nous l’entendons dans notre pays. C’est particulièrement flagrant dans cet article, qui prévoit d’imposer à l’opérateur historique d’orienter ses prix sur les coûts. Cette exigence est en totale contradiction avec notre conception française du service public, dans laquelle c’est non pas la prise en compte des coûts réels d’une activité qui prime, mais la volonté de rendre cette activité accessible au plus grand nombre.
Pour toutes ces raisons, nous souhaitons la suppression de l’article 13.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. L’article 13 du projet de loi apporte un certain nombre de clarifications et d’adaptations à la notion de service universel et reconduit notamment le principe de la péréquation tarifaire.
Il n’y a pas lieu de le supprimer, car il est indispensable à la bonne transposition de la directive. La commission est donc défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Estrosi, ministre. Je suis également défavorable à cet amendement.
L’article 13 maintient et préserve le prix unique du timbre ; vouloir le supprimer, c’est donc vouloir supprimer le prix unique du timbre. Que chacun prenne ses responsabilités ! (M. David Assouline proteste.)
M. Gérard Le Cam. C’est faux !
M. le président. Je suis saisi de trente-deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 99 rectifié, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Le dernier alinéa de l'article L. 1 du code des postes et des communications électroniques est ainsi rédigé :
« Hormis les envois de correspondance en nombre, les services postaux sont proposés au même tarif de base sur l'ensemble du territoire. »
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Par cet amendement, nous proposons une articulation autre que celle qui figure dans le projet de loi pour assurer le maintien du prix unique du timbre pour les envois à l’unité, quelle que soit leur destination.
L’article 13, dans sa rédaction actuelle, a un double objet.
En premier lieu, il vise à supprimer l’actuel alinéa du code des postes et des communications électroniques prévoyant le maintien d’un tarif de base unique sur l’ensemble du territoire national pour le seul secteur réservé. Il est bien naturel que le Gouvernement souhaite supprimer cet alinéa, puisque le présent projet de loi tend à supprimer le secteur réservé.
En second lieu, l’article 13 prévoit que les services d’envois postaux à l’unité soient proposés au même tarif sur l’ensemble du territoire métropolitain. La référence au territoire métropolitain, et non plus au territoire national, entérine une diminution des obligations de péréquation, l’ensemble des départements d’outre-mer étant ainsi laissés sur la touche.
Nous avons rectifié cet amendement, que M. Estrosi avait vilipendé comme sacrifiant le tarif unique et la péréquation territoriale. En réponse à ces attaques injustifiables, j’indiquerai que si quelqu’un s’en prend aujourd'hui à la péréquation, ce sont bien les promoteurs de ce projet de loi, qui ne permettra pas d’assurer le financement pérenne du Fonds postal national de péréquation territoriale. Prévoir de financer celui-ci par une exonération de la taxe professionnelle alors que la suppression de cet impôt est annoncée, cela s’appelle une supercherie.
Par ailleurs, l’article 13 prévoit une hausse progressive des tarifs pour les usagers. Il est en effet indiqué, à son quatrième alinéa, que les prix doivent être orientés sur les coûts. Cette simple formule sonne le glas des missions de présence territoriale et de l’égalité de tous devant le service public. Force est de constater que les coûts ne sont pas équivalents sur l’ensemble du territoire. Si les prix sont orientés sur les coûts, il sera alors difficile de maintenir leur unicité.
M. le ministre fait un mauvais procès au groupe CRC-SPG, qui se pose résolument en défenseur des missions de service public remplies par La Poste et de la péréquation territoriale.
Nous souhaitons donc récrire le dernier alinéa de l’article L. 1 du code des postes et des communications électroniques afin de garantir que tous les services postaux, et pas uniquement ceux qui sont fournis à l’unité, soient proposés au même tarif de base sur l’ensemble du territoire. La majorité semblant attachée à l’unicité du prix du timbre, nous espérons qu’elle votera cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 122, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article
L'article L.3 du même code est abrogé.
La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud. En conséquence de l’acceptation de l’ouverture progressive à une concurrence totale du marché postal, la loi du 20 mai 2005 avait mis en place une autorité de régulation, qui est devenue l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, l’ARCEP. Celle-ci a pour mission de veiller à ce que l’ouverture du marché se déroule sans entraves et de garantir un financement équitable pour un service universel postal qui souffre de handicaps de plus en plus lourds.
Le rôle du régulateur est de préserver un équilibre difficile entre deux secteurs animés par des logiques différentes. Pendant la période d’ouverture à la concurrence, il est censé avoir une position d’arbitre impartial et être doté de pouvoirs assez larges pour concilier les intérêts contradictoires de l’opérateur historique, des opérateurs entrants ou potentiels et des usagers.
C’est une mission quasiment impossible, car l’opérateur historique, qui ne peut plus s’appuyer sur sa position dominante pour résister à l’entrée ou à la concurrence accrue de nouveaux opérateurs, doit par ailleurs continuer de trouver les moyens d’assurer la mission de service universel qui lui est dévolue par la loi.
Considérant que l’une des missions premières de cette autorité administrative et indépendante est de favoriser l’arrivée de nouveaux entrants sur ce marché, nous estimons qu’il faut lui retirer la compétence de délivrer les autorisations d’exercer une activité postale, pour la confier à l’État.
M. le président. L'amendement n° 94, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 2
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
1°bis Dans la deuxième phrase du quatrième alinéa, après le mot : « économique » est inséré le mot : «, environnementale »
La parole est à Mme Mireille Schurch.
Mme Mireille Schurch. À l’article 13, l’objet et les modalités du service postal universel sont définis au travers d’une réécriture de l’article L. 1 du code des postes et des communications électroniques.
Bien que cette notion européenne soit moins précise et moins rigoureuse que celle de service public postal, à laquelle elle s’est substituée, l’article L. 1 du code des postes et des communications électroniques reprend pourtant l’essentiel des missions de service public que La Poste doit assurer et des principes qu’elle doit respecter.
Selon les termes mêmes de cet article, outre le respect des principes d’égalité, de continuité et d’adaptabilité, qui sont l’essence même des services publics français, les activités postales de l’opérateur historique national doivent être menées avec le souci d’atteindre la meilleure efficacité économique et sociale.
On peut considérer que, du point de vue de l’efficacité économique stricto sensu, ce principe a été respecté, malgré l’introduction très contestable de critères de gestion orientés vers la seule rentabilité financière – ou grâce à elle, c’est selon !
En revanche, du point de vue social, les organisations syndicales s’accordent à dire que ce principe est peu respecté.
En outre, à une époque où le développement durable est devenu une préoccupation largement partagée, le souci d’une efficacité respectueuse de l’environnement est singulièrement absent des principes qui doivent régir l’activité postale.
Nous proposons donc, avec cet amendement, d’intégrer cette dimension parmi les principes énumérés à l’article L. 1 du code des postes et des communications électroniques.
M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 95 est présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.
L'amendement n° 520 est présenté par MM. Teston, Botrel, Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéas 3 et 4
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Gérard Le Cam, pour présenter l’amendement n° 95.
M. Gérard Le Cam. Le quatrième alinéa de l’article L. 1 du code des postes et des communications électroniques est modifié par l’article 13, qui pose le principe de l’orientation des prix sur les coûts supportés par l’opérateur public, afin d’inciter celui-ci à l’efficacité.
Plus simplement, il s’agit de fixer les tarifs des prestations à un niveau qui s’approche de celui des coûts nets qu’elles engendrent pour l’opérateur.
La formulation présentée dans le texte de la commission est moins contraignante pour le prestataire chargé du service postal que l’actuelle rédaction du code des postes et des communications électroniques.
Elle est aussi moins respectueuse des principes du service public en ce qui concerne l’égalité de traitement des usagers. En effet, alors que le code des postes et des communications électroniques fait référence à des « services offerts à des prix abordables pour tous les utilisateurs », la question n’est plus envisagée que sous l’angle des coûts supportés par l’opérateur dans le texte qui nous est proposé.
Or, on s’en souvient, lors des travaux préparatoires sur les directives qui inspirent ce texte, la Commission européenne avait beaucoup insisté sur la nécessité d’inciter les opérateurs historiques à une plus grande efficacité par la réduction de leurs coûts.
Nous savons tous que la mise en œuvre de cette conception implique des effets négatifs en matière de salaires, de conditions de travail et de services rendus aux clients – cette dénomination, qui a remplacé celle d’ « usagers », étant d’ailleurs tout à fait révélatrice des nouvelles orientations de l’opérateur public.
Nous pensons donc que cette rédaction traduit la réorientation des missions du service postal vers une offre uniquement déterminée par le marché. Ce type de dispositions, qui se veut de stricte orthodoxie économique, ne vise en fait qu’à légitimer de futures hausses de tarifs.
M. le président. La parole est à M. Michel Teston, pour présenter l'amendement n° 520.
M. Michel Teston. Cet amendement, qui a pour objet de préserver la péréquation tarifaire et d’éviter une augmentation du prix du timbre, nous paraît nécessaire. Il reprend le considérant suivant de la directive visée :
« Dans un environnement pleinement concurrentiel, il importe, pour assurer l’équilibre financier du service universel et limiter les distorsions du marché, de veiller à ce qu’il ne puisse être dérogé au principe selon lequel les prix reflètent les conditions et coûts normaux du marché qu’aux fins de protéger des intérêts publics. Pour ce faire, il convient de continuer à autoriser les États membres à maintenir des tarifs uniformes pour les courriers au tarif unitaire, qui reste le service le plus fréquemment utilisé par les consommateurs, y compris les petites et moyennes entreprises. Les États membres peuvent aussi continuer à appliquer des tarifs uniformes à d’autres types d’envois, par exemple les journaux et les livres, pour des raisons liées à la protection de l’intérêt public général, comme l’accès à la culture, la garantie de la participation à une société démocratique – référence expresse à la liberté de la presse – ou la cohésion sociale et régionale. »
À la lumière de cette lecture, force est de constater que le projet de loi ne reprend qu’un des aspects de ce considérant, laissant ainsi transparaître une vision libérale de la transposition de la directive. Quant au complément apporté par le texte de la commission, qui consiste à préciser que « les prix sont orientés sur les coûts et incitent à une prestation efficace, tout en tenant compte des caractéristiques des marchés sur lesquels ils s’appliquent », il ne nous paraît pas suffisant. Le risque est bien réel de voir augmenter les prix dans certaines parties du territoire, ce qui pourrait remettre en cause l’égalité d’accès au service public postal.
M. le président. L'amendement n° 314, présenté par MM. Desessard et Muller et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Dominique Voynet.
Mme Dominique Voynet. Le code des postes et des communications électroniques fait état d’un impératif d’« efficacité économique et sociale ». Cette formulation, juste, prend en compte à la fois la nécessité de ne pas dilapider l’argent du contribuable et la mission sociale du service public.
La formulation proposée à l’alinéa 4 de l’article 13, selon laquelle « les prix sont orientés sur les coûts », est inacceptable en l’état. En effet, cette disposition est contradictoire avec le maintien du tarif unique sur l’ensemble du territoire.
Les prix ont vocation à être justes socialement. Depuis 1849, le prix du timbre-poste dépend du poids de la lettre, et non de la distance parcourue par le courrier sur le territoire national. Cet élément est essentiel. Il permet au facteur de conserver son rôle de trait d’union entre chaque foyer et le reste du monde, y compris dans les zones rurales les plus reculées et les zones urbaines les plus sensibles. La péréquation tarifaire ne peut être remise en cause. Si les prix sont orientés sur les coûts, rien ne garantira plus que le prix d’un timbre pour un courrier effectuant un trajet de Paris à Paris sera demain le même que pour une lettre envoyée de Lille à Ajaccio.
Cet amendement vise donc à garantir que le principe de la péréquation tarifaire ne soit pas remis en question.
M. le président. L'amendement n° 521, présenté par MM. Teston, Botrel, Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Après le mot :
efficace
supprimer la fin de cet alinéa.
La parole est à M. Jean-Pierre Caffet.
M. Jean-Pierre Caffet. Par cet amendement, il s’agit de préserver la péréquation tarifaire et d’éviter une augmentation du prix du timbre dans certaines zones ou pour certaines catégories de produits.
En effet, le projet de loi reprend le troisième paragraphe de l’article 12 de la directive postale, qui dispose que « les prix sont orientés sur les coûts et fournissent des incitations à une prestation efficace du service universel ».
Cela signifie que plus les zones seront écartées, plus les coûts seront élevés. Nous trouvons particulièrement dommage que le Gouvernement décide de transposer une disposition qui remettrait en cause la péréquation tarifaire si des garde-fous n’étaient pas posés.
M. Roland Courteau. Exactement !
M. Jean-Pierre Caffet. De plus, la formulation de la commission est ambiguë, à double tranchant même, puisque si elle prévoit de tenir compte des caractéristiques des marchés sur lesquels les prix s’appliquent, elle ne protège nullement contre une hausse de ces derniers, qui risquent donc d’augmenter, quels que soient les produits, malgré l’objectif initialement visé et réaffirmé.
Nous estimons que le maintien d’un prix uniforme pour les zones rurales, de montagne, insulaires, à handicaps naturel ou peu denses relève de l’intérêt public.
Nos amendements suivants tendent donc à prévoir un dispositif réellement protecteur pour tous ces territoires,…
M. le président. Mon cher collègue, veuillez conclure !
M. Jean-Pierre Caffet. … en défendant l’égalité d’accès au service postal pour les particuliers, mais aussi pour les petites et moyennes entreprises, afin de préserver l’attractivité du territoire. La péréquation tarifaire pourrait ainsi être maintenue, et l’objectif d’aménagement du territoire tenu.
M. le président. L'amendement n° 326, présenté par MM. Teston, Botrel, Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Dans les zones de montagne, les prix sont fixés en respectant le principe de péréquation tarifaire garantissant l'égalité d'accès au service postal.
La parole est à M. Marc Daunis.
M. Marc Daunis. Cet amendement s’inscrit dans la droite ligne de ceux que viennent d’exposer mes collègues.
Nous souhaitons que des garanties extrêmement précises soient apportées afin de préserver l’égal accès sur l’ensemble des territoires, à un prix abordable et péréqué, du service public postal, y compris dans les zones de montagne.
Comme nombre d’entre vous, mes chers collègues, j’ai procédé à une consultation des maires de ma circonscription, dans les Alpes-Maritimes, particulièrement ceux des communes rurales. Leurs réponses confirment un constat que nous pouvons tous faire.
Dans les zones de montagne, les élus locaux et les habitants subissent tous les jours des dysfonctionnements du service postal, qui peuvent parfois se révéler pénalisants : la distribution du courrier devient aléatoire dans certaines communes de montagne, où il arrive qu’il ne soit pas délivré pendant plusieurs jours consécutifs, et les horaires d’ouverture des bureaux se réduisent fortement. Hélas, ce constat vaut également pour d’autres communes.
Qui nous dit que, dans quelques années, les prix n’augmenteront pas, du fait des spécificités même de ces zones de notre territoire ?
M. Roland Courteau. Et voilà !
M. Marc Daunis. Les élus de montagne sont inquiets, et ils ont exprimé leurs craintes lors de leur vingt-cinquième congrès, qui s’est tenu le 23 octobre dernier à L’Argentière-la-Bessée, en adoptant une motion par laquelle ils exigent le maintien d’un service public de qualité. Ils ont notamment insisté sur le fait que la présence postale en montagne est un facteur essentiel d’attractivité et d’ancrage de la population sur le territoire. De ce point de vue aussi, les tarifs sont fondamentaux pour attirer des entreprises, consolider et développer les activités existantes, telles que le commerce ou l’artisanat.
Il nous paraît donc essentiel de réaffirmer que, pour les zones de montagne, le principe de péréquation tarifaire, menacé si l’on considère que les prix doivent être orientés sur les coûts, doit continuer à s’appliquer.
M. le président. L'amendement n° 327, présenté par MM. Teston, Botrel, Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Dans les zones à handicaps naturels, les prix sont fixés en respectant le principe de péréquation tarifaire garantissant l'égalité d'accès au service postal.
La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. Cet amendement vise à inscrire clairement le principe de péréquation tarifaire dans le projet de loi.
La péréquation tarifaire est en effet le moyen indispensable pour assurer de manière effective l’égalité des citoyens devant le service public postal.
Or on sait bien, par exemple, que certaines zones du territoire sont difficilement accessibles et que, pour cette raison, leurs habitants risquent de se voir pénalisés et d’avoir à payer plus cher un service public auquel ils ont droit par principe, en tant que citoyens.
C’est dans cette perspective que cet amendement vise à réaffirmer, dès l’alinéa 4 de l’article 13, le principe de péréquation. En effet, la formulation de cet alinéa entretient une certaine ambiguïté : elle renverse le problème en évoquant les coûts avant de préciser les caractéristiques des « marchés concernés », de telle sorte que le risque d’une augmentation des tarifs dans les zones les plus difficilement accessibles ne peut être écarté.
Cet amendement tend donc à inscrire noir sur blanc, dès cet alinéa, le principe de péréquation dans le texte, justement pour lever toute ambiguïté.
Pour justifier cette inscription, nous prenons bien soin, par ailleurs, de préciser que la péréquation s’applique dans les zones à handicaps naturels, qui correspondent en effet à une notion communément admise sur le plan communautaire. Elle concerne des zones de montagne, des régions côtières et maritimes, des îles et des archipels, c’est-à-dire des zones géographiques qui subissent, de par leur situation, des désavantages spécifiques liés à l’altitude, à la topographie, au climat ou bien encore à l’éloignement géographique.
L’Union européenne estime que, du fait de ces handicaps naturels, qui sont permanents, ces zones sont confrontées à des difficultés de développement économique liées aux surcoûts de transport ou à une densité de population très faible.
M. le président. Mon cher collègue, votre temps de parole est presque écoulé !
M. David Assouline. Pour une fois que le Gouvernement peut s’appuyer sur des directives communautaires pour nous donner raison, qu’il le fasse !
M. le président. L'amendement n° 328, présenté par MM. Teston, Botrel, Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Dans les zones rurales, les prix sont fixés en respectant le principe de péréquation tarifaire garantissant l'égalité d'accès au service postal.
La parole est à M. Roland Courteau.
M. Roland Courteau. Cet amendement a, lui aussi, pour objet de graver dans le marbre de la loi le principe de péréquation tarifaire.
Même si nous savons bien que ce qu’une loi a fait, une future loi le défera, il nous semble préférable de prendre les devants et de garantir, dès à présent, la péréquation tarifaire. Dans cette perspective, cet amendement a aussi pour objet de reconnaître la spécificité des zones rurales.
En effet, le principe de péréquation tarifaire est un moyen indispensable pour assurer de manière effective l’égalité des citoyens devant le service public postal. Or nous avons beaucoup insisté, tout au long de cette longue semaine, sur le rôle crucial que joue La Poste en termes de maintien des services publics et de préservation du lien social. C’est pour cette raison que nous nous sommes souvent focalisés sur la présence postale dans les zones rurales, parce que c’est là que l’articulation entre logique concurrentielle et exercice des missions de service public est la plus difficile à trouver.
Si l’on penche du côté de la concurrence et de la libéralisation, on aura donc tendance à penser que le service postal en zones rurales représente un anachronisme, un surcoût que les ruraux doivent supporter.
En revanche, si l’on considère La Poste comme porteuse d’une mission de service public, exercée au service de tous les Français, on se battra alors pour le maintien des bureaux de poste, la préservation d’horaires d’ouverture décents et l’affirmation ferme, sans ambiguïté et définitive de la péréquation tarifaire.
Il ne nous semble pas admissible de faire payer aux citoyens le prix de leur ancrage dans nos campagnes. Nous ne considérons pas que cela soit seulement un surcoût ou une surcharge pour une activité postale qui se doit désormais d’être uniquement rentable ; nous considérons que c’est au contraire une chance pour nos communes que de pouvoir compter sur des citoyens qui, par leur attachement à leur territoire, les font vivre.
C’est donc un devoir pour l’État que de leur permettre de continuer à y demeurer, et puisque nous savons que La Poste, désormais, est bien souvent le dernier rempart contre la désertification institutionnelle, il convient, pour cette raison, de préserver et de protéger l’activité postale dans ces zones.
Aussi cet amendement a-t-il pour objet de garantir la péréquation tarifaire, au nom de l’égalité entre les citoyens et au nom des devoirs de l’État envers des territoires qui ne méritent pas d’être abandonnés au seul motif qu’ils ne procurent pas assez de profit.
M. le président. L'amendement n° 329, présenté par MM. Teston, Botrel, Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Dans les zones de revitalisation rurale, les prix sont fixés en respectant le principe de péréquation tarifaire garantissant l'égalité d'accès au service postal.
La parole est à Mme Dominique Voynet.
Mme Dominique Voynet. Cet amendement vise à ce que, dans les zones de revitalisation rurale, les ZRR, les prix soient fixés dans le respect du principe de péréquation tarifaire, garantissant l'égalité d'accès au service postal.
Les zones de revitalisation rurale ont été créées par la loi du 4 février 1995 d’orientation pour l’aménagement et le développement du territoire. Dans la loi relative au développement des territoires ruraux ont été définies, en 2005, de nouvelles mesures applicables aux ZRR. Celles-ci regroupent des territoires ruraux qui rencontrent des difficultés particulières du fait de leur faible densité démographique ou de handicaps structurels sur le plan socioéconomique.
Le classement en zone de revitalisation rurale apporte un outil aux acteurs locaux. Il permet aux entreprises de secteurs aussi variés que l’artisanat, le commerce, l’industrie, les activités de recherche, d’études ou d’ingénierie de bénéficier d’avantages fiscaux, notamment lors de leur création.
L’effort de l’État en faveur de ces territoires est très important. Les avantages fiscaux qu’il consent peuvent être élevés. Dès lors, parce qu’un haut niveau d’accessibilité des services postaux à un prix abordable et identique sur l’ensemble du territoire participe d’une politique de cohésion territoriale, il nous semble important, tout particulièrement pour ces zones, d’en réaffirmer le principe à la fin du quatrième alinéa, afin de lever toute ambiguïté.
M. le président. L'amendement n° 330, présenté par MM. Teston, Botrel, Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Dans les zones de faible densité de population, les prix sont fixés en respectant le principe de péréquation tarifaire garantissant l'égalité d'accès au service postal.
La parole est à M. Jean-Pierre Caffet.
M. Jean-Pierre Caffet. Ainsi que nous l’avons déjà souligné, le quatrième alinéa de l’article 13 comporte des dispositions qui nous paraissent inquiétantes du point de vue des tarifs des services.
Instaurant l’orientation des prix sur les coûts, cet article semble faire primer la logique de rentabilité sur celle de service.
Nous souhaitons insister plus particulièrement ici sur les répercussions éventuelles de l’application des dispositions de cet article dans les zones de faible densité de population, qui bien souvent sont mal desservies.
Si la logique de l’orientation des prix sur les coûts est strictement suivie, on peut en effet craindre que certaines zones, plus difficiles d’accès que d’autres, ne subissent une forte augmentation des prix des services. Cette tendance risque, à terme, d’avoir des conséquences sur l’accessibilité pour tous du service public de La Poste. Il est donc important d’éviter la désertification de ces territoires et d’essayer de les rendre plus attractifs pour les ménages, ainsi que pour les entreprises. Or, devant un risque d’augmentation importante des tarifs, comment ne pas redouter que ces territoires déjà fragiles ne soient encore plus délaissés par ces acteurs économiques ?
C’est dans cette perspective que nous vous proposons, mes chers collègues, d’adopter un amendement prévoyant que les prix respecteront les principes de la péréquation, laquelle est nécessaire en vue d’assurer l’égalité d’accès pour tous au service public dans les zones rurales.
Bien souvent, ces territoires sont déjà handicapés par des conditions géographiques et économiques difficiles. Il est donc nécessaire que nous les prenions convenablement en compte, afin que leurs habitants et leurs entreprises n’aient pas l’impression d’être décidément abandonnés, y compris par le plus emblématique des services publics, La Poste.
M. Roland Courteau. Très bien !
M. Jean-Pierre Caffet. Nous sommes tous ici conscients des enjeux liés au maintien de la présence postale dans ces zones peu denses.
M. le président. L'amendement n° 331, présenté par MM. Teston, Botrel, Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Dans les zones à handicaps naturels et structurels, un tarif uniforme et respectant la péréquation tarifaire est appliqué aux petites et moyennes entreprises.
La parole est à M. Marc Daunis.
M. Marc Daunis. Mon collègue David Assouline a insisté sur la portée d’une référence aux zones à handicaps naturels et structurels, au regard de la directive européenne. En effet, la présence du service public postal sur l’ensemble des territoires a un caractère fortement structurant. Le service public postal est vecteur non seulement de lien social, mais aussi de développement économique local. La présence postale constitue l’un des facteurs de maintien de l’activité économique, notamment par les services financiers qu’elle apporte. Dans certaines zones, elle est l’une des conditions de la préservation du tissu des petites et moyennes entreprises ou, plus simplement, du commerce et de l’artisanat. Ces dernières années, elle a bien souvent été un élément de choix d’installation en secteur rural pour des populations nouvelles.
Or le maintien d’un tel maillage suppose la maîtrise nationale de notre réseau postal. C’est pourquoi il est indispensable de conserver un faible coût d'accès au réseau postal pour les PME et les TPE dans ces zones défavorisées. Leur dynamisme en dépend, et parfois même leur survie économique.
Nous connaissons le caractère crucial de l’attractivité de nos territoires. Les entreprises, pour déterminer leur localisation, examinent attentivement l’environnement, en tout premier lieu la qualité des services publics. Ce fait a été rappelé très récemment dans le rapport du Conseil des prélèvements obligatoires : « Un pays à fiscalité élevée ne serait pas nécessairement délaissé par les entreprises si cette fiscalité était compensée par des infrastructures et un service public de qualité. »
Nous sommes là au cœur du sujet ! Nous ne devons pas, au travers des choix que nous effectuons, pénaliser les PME qui fournissent du travail et jouent un rôle central sur nos territoires.
En conclusion, je soulignerai que ce même rapport du Conseil des prélèvements obligatoires indiquait que les entreprises du CAC 40 affichent un taux implicite d’imposition moins élevé que les PME !
M. le président. L'amendement n° 333, présenté par MM. Teston, Botrel, Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Dans les zones rurales ou de montagne, un tarif uniforme et respectant la péréquation tarifaire est appliqué aux petites et moyennes entreprises.
La parole est à M. Michel Teston.
M. Michel Teston. Cet amendement a pour objet de garantir la péréquation tarifaire au profit des zones rurales ou de montagne, en particulier pour les petites et moyennes entreprises.
En effet, le maintien d’un faible coût d’accès au réseau postal pour les PME et les TPE est absolument essentiel à leur survie et à leur développement.
La troisième directive postale insiste notamment sur l’importance d’un service postal de qualité pour ces zones spécifiques, considérant qu’il joue un rôle essentiel dans l’intégration des entreprises qui les animent, et sur le fait que la présence de ce service est un préalable important à la réalisation de l’objectif de cohésion sociale et territoriale.
Il s’agit donc de garantir un prix faible et uniforme du service postal, grâce au principe de péréquation territoriale, qui risque pourtant d’être mis à mal.
Le maintien de la péréquation tarifaire apparaît indispensable lorsque l’on observe que l’accessibilité du service postal, dans les zones rurales ou de montagne, est déjà réduite, qu’il s’agisse du nombre de guichets, de la fréquence des levées et de la distribution, ou encore de la gamme des services fournis.
Comment, dans ces conditions, pouvez-vous soutenir qu’il faut développer économiquement les territoires et réduire dans le même temps leur attractivité ? Comment pouvez-vous affirmer vouloir garantir la péréquation tarifaire, alors que vous supprimez le secteur réservé et refusez d’abonder suffisamment le fonds de compensation ? Tout cela est contradictoire, et il est à craindre que, en fin de compte, il n’en résulte une dégradation du service universel, au détriment des usagers et des entreprises.
M. le président. L'amendement n° 421, présenté par MM. Antoinette, Patient, Gillot, S. Larcher, Lise, Tuheiava et les membres du groupe Socialiste et rattaché, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Dans les zones où le marché est structurellement déficitaire du fait de l'isolement, des difficultés d'accès ou de la faiblesse démographique, les prix ne sont pas orientés sur les coûts mais sont établis en tenant compte du principe d'équité et d'accès au service postal ; ils font l'objet d'une péréquation à l'échelle d'une zone plus large permettant d'obtenir un équilibre en termes de recettes.
La parole est à Mme Bariza Khiari.
Mme Bariza Khiari. Cet amendement a été élaboré par nos collègues ultramarins, qui estiment que l’application des règles du marché au service universel va à l’encontre du principe d’égalité qui fonde tout service public.
Outre-mer, jusqu’à présent, au-delà de la première tranche de poids, un principe de péréquation plus ou moins satisfaisant s’applique, le prix des envois étant majoré d’une somme donnée pour chaque tranche de 10 grammes supplémentaires. Cela n’empêche pas que certains envois postaux au départ ou à destination des départements et collectivités d’outre-mer ne soient particulièrement onéreux.
Aussi, dès lors que le service public devient une quasi-prestation privée, une régulation des prix est-elle nécessaire pour les territoires ultramarins, au-delà de la première tranche de poids, afin d’éviter une trop grande disparité des tarifs selon les territoires et de maintenir une certaine équité dans la fixation des tarifs des envois postaux, qu’il s’agisse de courrier ou de colis.
Les difficultés liées à la formation des prix outre-mer sont longuement exposées dans le rapport de la mission commune d'information outre-mer et dans les conclusions des états généraux : exiguïté des marchés, isolement, voire enclavement, de certaines zones, surcoûts de transport, situations de monopole de fait… Le Président de la République lui-même a reconnu ce problème et a proclamé qu’aux situations exceptionnelles, il faut apporter des réponses exceptionnelles.
Il y a donc lieu de reconnaître que, s’agissant de l’outre-mer, la directive européenne qui régit les conditions d’ouverture du service postal à la concurrence n’est pas adaptée et qu’un principe de péréquation tarifaire doit régler la fixation des tarifs au-delà de la première tranche de poids, au nom de l’unité du territoire français, de la continuité territoriale et de l’égalité républicaine.
M. le président. L'amendement n° 334, présenté par MM. Teston, Botrel, Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Pour les envois de journaux et de livres, des tarifs uniformes et abordables continuent d'être appliqués.
La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. Cet amendement vise à exclure explicitement de la logique de libéralisation et de concurrence les envois de journaux et de livres, en précisant que leurs tarifs doivent être abordables et uniformes.
La distribution de la presse a un coût inégal suivant les territoires. Dans des zones rurales reculées, plus particulièrement en montagne, elle coûte plus cher. Mais c’est la distribution de la presse qui, souvent, permet le maintien d’une activité postale. Il doit donc être clairement affirmé qu’elle échappe au champ de la concurrence et est assurée dans les mêmes conditions sur tout le territoire. Cela est aussi nécessaire pour que tous les habitants aient un égal accès à la presse.
Je rappelle à cet égard que la formation de l’opinion publique par l’accès à une presse pluraliste est un pilier de la démocratie, et que le pluralisme de la presse est un principe à valeur constitutionnelle depuis que, sur proposition socialiste, il a été inscrit dans la loi fondamentale. L’accès à ce pluralisme suppose que les conditions de distribution de la presse soient identiques en n’importe quel point du territoire et pour tous les journaux. Nous proposons que les envois de livres bénéficient aussi de l’application de ce principe, afin que soit préservé celui du prix unique du livre.
La distribution de la presse constitue souvent le seul contact direct avec le service postal pour certains de nos concitoyens qui vivent dans l’isolement. Le passage du facteur qui l’assure, en prenant parfois le temps de s’attarder, permet aux personnes âgées de rompre leur solitude, de conserver un lien social. Cette fonction est irremplaçable, et si l’on devait en évaluer la rentabilité, je pense que l’on constaterait que ce service presque gratuit de La Poste rapporte beaucoup à la collectivité.
Par ailleurs, la presse écrite connaît une grave crise. Elle lance des appels à l’aide, et le fait que des lecteurs puissent décider de résilier leur abonnement parce qu’ils ne reçoivent plus leur journal à temps ne peut bien sûr que lui nuire.
Je reviendrai plus longuement sur cette question lors des explications de vote. (M. Jean-Pierre Sueur applaudit.)
M. Jacques Blanc. Pas trop longuement !
M. le président. L'amendement n° 335, présenté par MM. Teston, Botrel, Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Pour les petites et moyennes entreprises, des tarifs uniformes et respectant la péréquation tarifaire continuent d'être appliqués.
La parole est à Mme Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. Cet amendement est motivé, sur le fond, par l’intérêt que nous portons tous, sur toutes les travées de cet hémicycle, aux PME et aux TPE, qui constituent le maillage industriel et économique de nos territoires et sont les grandes pourvoyeuses d’emplois en ces temps difficiles de crise.
Non seulement la directive européenne nous permet de les protéger, mais elle nous y incite. En effet, elle dispose qu’ « il convient de continuer à autoriser les États membres à maintenir des tarifs uniformes pour les courriers au tarif unitaire, qui restent le service le plus fréquemment utilisé par les consommateurs, y compris les petites et moyennes entreprises ».
C’est pourquoi nous voulons réaffirmer ici le principe de la péréquation tarifaire, car toute augmentation des prix serait dangereuse pour les petites entreprises, qui n’ont pas l’assise financière des grands groupes.
À cet égard, cet amendement s’inscrit dans la continuité de ceux concernant les zones rurales, les zones de revitalisation rurale et les zones de montagne.
M. le président. L'amendement n° 337, présenté par MM. Teston, Botrel, Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
L'orientation des prix sur les coûts ne peut se traduire par la mise en œuvre d'un système tarifaire contraire au principe d'égalité et de péréquation tarifaire.
La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. Le dernier alinéa de l’article 13 rappelle une exigence qui s’impose au service public : assurer l’égalité de traitement pour l’ensemble de nos concitoyens au regard du prix du timbre. Il s’agit d’une mission essentielle du service public postal : où que l’on demeure, dans une zone densément ou au contraire peu peuplée, bien desservie ou enclavée, le prix du timbre doit être identique pour un même envoi. C’est un des axes de la politique d’aménagement du territoire.
Toutefois, le quatrième alinéa précise que les tarifs sont orientés en fonction du coût, ce qui semble en partie contredire le dernier alinéa.
À tout le moins, on peut penser que si le prix du timbre reste le même sur l’ensemble du territoire, il y a de grands risques pour qu’il augmente fortement, La Poste cherchant à faire compenser par l’ensemble des usagers les tarifs très concurrentiels qu’elle proposera aux entreprises, ainsi que les dépenses croissantes liées à l’exécution des missions de service public.
Ainsi, les dépenses de service public seront in fine mises en partie à la charge des citoyens. M. le rapporteur faisait état d’un écart de 100 millions d’euros entre le coût réel du service public et les sommes recueillies actuellement. Cette différence devra bien être comblée tôt ou tard, et si l’État se refuse à le faire, on a tout lieu de croire qu’elle sera assumée par les usagers.
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Vous n’avez pas écouté, monsieur Assouline !
M. David Assouline. Le prix du timbre sera donc la variable d’ajustement, ajustement qui se fera par le haut, comme toujours !
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Mais non !
M. David Assouline. Par conséquent, le prix du timbre augmentera très fortement à court terme si l’on suit cette logique.
Par ailleurs, le système actuel repose en grande partie sur le fait que les gros clients paient pour les petits. Dans un système concurrentiel, cette situation sera inversée : les petits paieront davantage pour compenser les offres attractives faites aux grandes entreprises. Aux entreprises des prix attractifs, plein pot pour les usagers ! C’est la logique concurrentielle.
Nous souhaitons donc que la loi dispose que l’orientation des prix sur les coûts ne peut se faire au détriment du respect du principe d’égalité et de péréquation tarifaire. Plus les garde-fous seront nombreux, plus grandes seront les chances que la France évite de suivre l’exemple de la Suède, où l’ouverture à la concurrence s’est traduite par une hausse de 40 % du tarif du timbre pour les usagers et par une baisse de 30 % pour les entreprises.
M. le président. L'amendement n° 365, présenté par MM. Teston, Botrel, Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
La recherche de l'efficacité du service public postal ne peut entraîner la mise en œuvre d'un système de tarification contraire au principe d'égalité.
La parole est à M. Roland Courteau.
M. Roland Courteau. Cet amendement a pour objet de préserver la péréquation tarifaire, afin d’éviter une augmentation du prix du timbre.
La péréquation tarifaire est une invention de la République de 1848. On doit à Étienne Arago cette disposition ingénieuse, selon laquelle « l’affranchissement des lettres à destination du territoire métropolitain et de l’Algérie est fixé uniformément à 20 centimes pour la lettre simple ».
La péréquation tarifaire permet d’instaurer une égalité de prix entre les usagers en calculant le montant moyen du coût résultant de la desserte de zones reculées, peu peuplées et difficiles d’accès et de celle de zones densément peuplées. À ce titre, la péréquation tarifaire postale est un instrument politique majeur de l’égalité républicaine.
La fin du secteur réservé, si elle ne met pas en cause, dans l’immédiat, la péréquation tarifaire, implique néanmoins, par la diminution des économies d’échelle, une hausse inévitable du prix du timbre. À quoi vont servir les centres de tri ultramodernes de La Poste dans un secteur postal écrémé par les nouveaux entrants ? À quoi sert la concurrence si elle aboutit, comme dans de nombreux pays européens, à l’augmentation des tarifs postaux ?
Nous proposons de compléter le quatrième alinéa, en précisant que la recherche de l'efficacité du service public postal ne peut entraîner la mise en œuvre d'un système de tarification contraire au principe d'égalité.
M. le président. L'amendement n° 422, présenté par MM. Antoinette, Patient, Gillot, S. Larcher, Lise, Tuheiava et les membres du groupe Socialiste et rattaché, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Au-delà de la première tranche de poids, les tarifs proposés ne sont pas orientés sur les coûts mais font l'objet d'une péréquation permettant de garantir l'équité et la continuité territoriale au sein de l'ensemble du territoire français.
La parole est à Mme Bariza Khiari.
Mme Bariza Khiari. Cet amendement a été fortement inspiré par nos collègues ultramarins. L’argumentaire que j’ai exposé à propos de l’amendement n° 421 vaut pour celui-ci.
M. Jean-Paul Emorine, président de la commission de l'économie. Très bien !
M. le président. L'amendement n° 522, présenté par MM. Teston, Botrel, Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Compléter cet alinéa par trois phrases ainsi rédigées :
Le tarif de base est le tarif applicable à un envoi de correspondance du premier échelon de poids de la catégorie normalisée la plus rapide. Il est unique et identique sur l'ensemble du territoire. Son augmentation ne peut être supérieure au rythme annuel de l'inflation.
La parole est à M. Michel Teston.
M. Michel Teston. Cet amendement a pour objet de maintenir le prix unique du timbre et de contenir son évolution.
En effet, le prix du timbre n’a cessé d’augmenter ces dernières années, dans une limite raisonnable toutefois pour un envoi de correspondance du premier échelon de poids de la catégorie normalisée la plus rapide. Ce tarif est unique et identique pour l’ensemble du territoire métropolitain.
Or ce projet de loi prévoit que les prix soient orientés sur les coûts, ce qui fait naître des craintes justifiées. Les coûts de distribution du courrier ne sont en effet pas identiques sur tout le territoire, et les zones montagneuses ou rurales, par exemple, pourraient en pâtir.
Étant donné que l’article 13 réaffirme le principe d’unicité du tarif sur l’ensemble du territoire métropolitain, il y a un fort risque que la mise en concurrence et le changement de statut de La Poste ne conduisent celle-ci à augmenter de manière importante ses tarifs pour l’envoi de correspondance.
Cet amendement vise donc à éviter une telle évolution, en prévoyant que l’augmentation ne puisse être supérieure au rythme annuel de l’inflation.
Les exemples étrangers – je pense en particulier à l’Allemagne – montrent que la modification du statut de l’opérateur postal historique a conduit à de fortes réductions d’effectifs et à l’abandon des activités peu rentables. La privatisation de la Deutsche Post s’est traduite par une augmentation déraisonnable des tarifs, et il a fallu que l’autorité de régulation compétente intervienne pour que le prix du timbre soit ramené à un niveau supportable. Il nous faut absolument parer à ce risque, d’où cet amendement qui vise à garantir un prix du timbre permettant que le service universel postal reste accessible à tous.
M. le président. L'amendement n° 516, présenté par MM. Teston, Botrel, Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Compléter cet alinéa par deux phrases ainsi rédigées :
Le tarif de base est le même sur l'ensemble du territoire national. L'autorité de régulation des communications électroniques et des postes transmet toute proposition d'augmentation du tarif de base au ministre chargé des Postes et communications électroniques.
La parole est à M. Richard Yung.
M. Richard Yung. Mon intervention vaudra également pour l’amendement n° 518, qui a le même objet.
Lorsque la commission de l’économie avait examiné, en février 2007, au titre de l’article 88-4 de la Constitution, la proposition de troisième directive postale, notre excellent collègue Michel Teston avait clairement défendu, au nom du groupe socialiste, le maintien du tarif unique pour un même service sur tout le territoire, considérant que la notion de « prix abordable » employée dans la proposition de directive ne donnait aucune garantie d’accès à un service universel postal de qualité ni de maintien du tarif unique. Cela s’est confirmé par la suite, puisque la notion de tarif uniforme s’est subrepticement substituée, à l’article 12 de la directive, à celle de tarif unique.
L’évolution des tarifs doit donc être véritablement sécurisée. Nous considérons, dans cette perspective, qu’il faut laisser à l’échelon politique la décision finale concernant toute évolution du tarif de base. Rien, dans la troisième directive postale, que le projet de loi vise à transposer, n’empêche que cette fonction soit dévolue à une instance autre que l’ARCEP. Nous considérons que la détermination du tarif de base est un sujet suffisamment politique pour qu’elle relève d’une décision gouvernementale.
M. le président. L'amendement n° 517, présenté par MM. Teston, Botrel, Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Le tarif de base est le même sur l'ensemble du territoire national.
La parole est à M. Richard Yung.
M. Richard Yung. Cet amendement vise à faire en sorte que le tarif de base soit le même sur l’ensemble du territoire national, principe fragilisé par la logique du présent texte.
En effet, l’article 13 du projet de loi reproduit la même ambiguïté que l’article 12 de la directive 2008/6/CE. Si l’existence d’un tarif uniforme survit au septième alinéa, le quatrième indique pourtant, comme la directive, que les prix sont orientés sur les coûts. Nous avons déjà dit que l’amendement de la commission portant sur le quatrième alinéa n’était nullement protecteur et n’assurait en rien le maintien de la péréquation tarifaire.
Nous refusons cette logique de rentabilité allant à l’encontre des principes fondamentaux du service public, qui doit notamment être accessible à tous dans les mêmes conditions sur l’ensemble du territoire. Nous considérons donc qu’il est indispensable d’insérer une disposition de nature à sécuriser la péréquation tarifaire.
M. le président. L’amendement n° 518, présenté par MM. Teston, Botrel, Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, et ainsi libellé :
Alinéa 4
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
L'autorité de régulation des communications électroniques et des postes transmet toute proposition d'augmentation du tarif de base au ministre chargé des Postes et communications électroniques.
Cet amendement a déjà été défendu.
L'amendement n° 519, présenté par MM. Teston, Botrel, Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
L'autorité de régulation des communications électroniques et des postes transmet, pour avis, toute proposition d'augmentation du tarif de base à la commission supérieure du service public des postes.
La parole est à M. Jean-Pierre Caffet.
M. Jean-Pierre Caffet. La directive du 20 février 2008 consacre quelques paragraphes aux tarifs postaux, ainsi qu’aux autorités de régulation qui sont créées pour veiller à son application, notamment à la mise en place du service universel.
Il est précisé dans la directive que cette mission peut être remplie par une ou plusieurs autorités. Dès lors, rien ne s’oppose à ce que l’ARCEP ne soit pas l’unique institution chargée de la gestion des activités postales et que certains domaines sensibles fassent l’objet d’une concertation avec d’autres organismes. En l’occurrence, la tarification est une question particulièrement importante, et il serait problématique de laisser l’ARCEP la déterminer seule.
L’ARCEP est une instance purement administrative et technique, pour ne pas dire technicienne, sans que cet adjectif emporte aucun caractère péjoratif dans mon esprit. Les usagers n’y sont même pas représentés au sein du directoire, qu’il s’agisse des collectivités territoriales, des entreprises ou des personnes privées. Il ne faudrait pas abandonner à un tel organisme technique la détermination de l’évolution du tarif de base, alors que tous les citoyens sont concernés et que ce sujet est évidemment éminemment politique.
La Commission supérieure du service public des postes et communications électroniques, quant à elle, est un organe qui comprend des élus. M. le rapporteur, qui en est le président, sait bien la qualité de ses travaux ! Nous avons la conviction que cette commission peut formuler un avis intéressant sur ces questions, en prenant notamment en compte les dimensions sociale et politique des évolutions tarifaires, pour aboutir, par exemple, à un échelonnement de toute augmentation.
M. Roland Courteau. Très bien !
M. le président. L'amendement n° 96, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 7
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Le septième alinéa de l’article 13 tend à supprimer une disposition du code des postes et des communications électroniques relative à la tarification des services postaux constituant le secteur dit « réservé ».
La suppression du secteur réservé, du fait de l’ouverture totale du marché postal à la concurrence au 1er janvier 2011, découle de l’application dogmatique de la directive du 20 février 2008, dont notre groupe a déjà eu l’occasion de dire tout le mal qu’il en pensait.
Pour notre part, nous ne nous résignons pas à la disparition pure et simple du secteur réservé. Nous sommes persuadés que le mécanisme de compensation qu’il est prévu de substituer au financement actuel du service universel ne pourra, en aucun cas, permettre à La Poste de lutter à armes égales avec ses concurrents.
En effet, à quoi servira ce fonds de compensation ? Comme son nom l’indique – de façon fallacieuse ! –, il a vocation à compenser, pour l’opérateur public, les pertes résultant de la captation des segments d’activité rentables du secteur par les nouveaux opérateurs privés. Cela signifie très concrètement qu’il faudra dédommager l’opérateur historique pour l’écrémage auquel ne manqueront pas de se livrer les nouveaux entrants en se positionnant sur les créneaux les plus rentables.
Lorsque le secteur réservé aura totalement disparu, rien ne contraindra pourtant un opérateur privé à assumer, par exemple, la desserte de l’ensemble du territoire. La Poste continuera à le faire seule, sans avoir vraiment la garantie que les compensations seront à la hauteur des contraintes qu’elle supportera.
Logiques avec nous-mêmes, nous refusons d’entériner la disparition programmée du secteur réservé de La Poste, qui aura des conséquences désastreuses pour les salariés et les usagers de l’entreprise. Nous n’acceptons pas de la livrer ainsi à la loi du marché sans lui donner les moyens de lutter à armes égales avec ses concurrents.
M. le président. L'amendement n° 397, présenté par MM. Teston, Bourquin, Botrel, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 7, après la première phrase
Insérer une phrase ainsi rédigée :
Deux tarifs sont proposés : un tarif rapide et un tarif lent.
La parole est à M. Roland Courteau.
M. Roland Courteau. Nous souhaitons inscrire dans la loi la possibilité de conserver, pour le service universel postal, deux tarifs : un tarif lent et un tarif rapide ou, si l’on préfère, un tarif prioritaire et un tarif non prioritaire.
M. le président. L'amendement n° 193, présenté par MM. Detcheverry, Ibrahim Ramadani, Magras, Fleming, Laufoaulu et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Alinéa 7, deuxième et troisième phrases
Après les mots :
envois de correspondance
insérer les mots :
à l'unité
La parole est à Mme Lucienne Malovry.
Mme Lucienne Malovry. Il s'agit de préciser que la péréquation tarifaire à l'unité, c’est-à-dire le prix unique du timbre, concernera non seulement les envois en provenance et à destination de métropole, mais aussi les envois en provenance et à destination des départements d'outre-mer, de Mayotte, de Saint-Pierre-et-Miquelon, de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin, des îles Wallis et Futuna, des Terres australes et antarctiques françaises, de la Polynésie française et de la Nouvelle-Calédonie.
M. le président. L'amendement n° 97, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 7
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
...° Le sixième alinéa est complété par les mots : « dont les caractéristiques sont définies pas décret en Conseil d'État. »
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Actuellement, l’article L. 1 du code des postes et communications électroniques dispose que les services de levée et de distribution de notre service postal doivent être assurés tous les jours ouvrables, c’est-à-dire, en règle générale, du lundi au samedi.
Il faut reconnaître que, sur ce point, notre pays a légitimement utilisé la possibilité qui était laissée aux États membres d’aller au-delà des obligations minimales fixées par la directive de 1997 relative au service universel postal, qui prévoyaient que ces services devaient être assurés au minimum cinq jours par semaine.
Le même article dudit code précise cependant, par précaution, que le service peut ne pas être assuré en raison de circonstances exceptionnelles.
Cette formulation nous semble trop générale et trop imprécise. Elle pourrait, par exemple, justifier l’impossibilité, pour l’opérateur public, d’assurer ses missions du fait de la politique libérale qu’il mène.
Ainsi, la fermeture de nombreux bureaux de poste remet en cause l’existence même d’un réseau de proximité. La Poste procède, depuis plusieurs années déjà, à des fermetures partielles de bureaux, ainsi qu’à la réduction des horaires d’ouverture. La mise en œuvre des normes d’accessibilité qui ont été définies au cours des années précédentes au sein des bassins d’activité a également eu pour conséquence la disparition de plusieurs milliers de bureaux de poste de plein exercice.
La fermeture d’un bureau de poste, faute de rentabilité au sens où l’entend la direction de l’entreprise ou en raison du manque de personnel, pourrait parfaitement être qualifiée de circonstance exceptionnelle.
Nous comprenons bien qu’il soit impossible de préciser dans le détail, dans la loi, toutes les circonstances exceptionnelles pouvant être invoquées. Mais, pour éviter toute interprétation abusive due à une formulation trop générale, nous proposons, par cet amendement, d’encadrer, par un décret en Conseil d’État, les motifs exceptionnels qui pourraient justifier la levée des obligations du service universel postal. Toutefois, cela ne signifie pas du tout que nous voulions réduire à cinq jours par semaine le service public postal, comme l’a laissé entendre M. le ministre !
M. le président. L'amendement n° 98, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 7
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
...° Après le mot : « morale », la fin du septième alinéa est supprimée.
La parole est à Mme Mireille Schurch.
Mme Mireille Schurch. Il nous semble nécessaire de modifier la partie de l’article L. 1 du code des postes et des communications électroniques relative à l’objet et aux modalités du service universel postal.
En effet, il y est précisé que les envois postaux doivent être adressés au domicile de tout destinataire, qu’il soit une personne physique ou une personne morale. Toutefois, une possibilité de dérogation est prévue, la définition des exceptions éventuelles à la règle étant renvoyée à un décret. Or nous savons bien que les décrets, dont les délais d’élaboration sont longs et la publication tardive, échappent souvent au contrôle parlementaire et s’émancipent de l’esprit de la loi qu’ils sont censés rendre applicable.
Nous craignons ainsi que la possibilité de renvoyer les exceptions au décret ne soit un moyen de déroger progressivement à l’obligation de délivrer un envoi postal à domicile.
D’ailleurs, l’actualité est là pour montrer que nos craintes sont fondées : n’a-t-on pas récemment mis en place une expérimentation de délivrance des envois recommandés par une entreprise n’ayant qu’un très lointain rapport avec l’activité de distribution de courrier postal, conduite par des agents relevant d’un autre service public, dont on ne peut pas vraiment dire que ce soit le cœur de métier ? L’expérience consistant à délivrer des envois recommandés dans une station de métro parisienne préfigure ce que pourraient être les dérogations définies par décret. Je pourrais également prendre pour exemples les multiples tâches effectuées par des personnels non qualifiés dans les fameux points de contact qui se substituent aux bureaux de poste de plein exercice. Par cet amendement, nous refusons un tel engrenage.
M. le président. L'amendement n° 398, présenté par MM. Teston, Bourquin, Botrel, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
Toute augmentation de tarif supérieure de plus de 5 % à l'indice des prix donne lieu à un avis de la Commission supérieure du service public des postes et des communications électroniques.
La parole est à M. Roland Courteau.
M. Roland Courteau. Par cet amendement, nous proposons que la Commission supérieure du service public des postes et des communications électroniques, garante d’un juste équilibre entre exercice du service public et compétitivité, porte son regard très avisé sur les prix, notamment sur tout projet d’augmentation démesurée.
Cette commission a certes la possibilité de s’autosaisir d’un certain nombre de décisions importantes prises par les opérateurs, mais nous estimons que de tels projets d’augmentation menacent sérieusement l’équilibre délicat entre service public et compétitivité et relèvent directement de ses missions.
Nous proposons qu’une procédure d’alerte soit systématiquement déclenchée lorsque cette augmentation dépasse de plus de 5 % l’indice des prix. Nous sommes persuadés que la Commission supérieure du service public des postes et des communications électroniques aura à cœur de statuer sur ces cas. Cela n’exclut évidemment en rien qu’elle puisse décider d’intervenir en cas d’augmentation plus mesurée.
Nous espérons évidemment que l’intervention de cette commission sera tout à fait exceptionnelle.
M. le président. L'amendement n° 399, présenté par MM. Teston, Bourquin, Botrel, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
Le prestataire de service universel veille à informer les usagers, de manière visible et compréhensible par tous, des tarifs en vigueur et de leur éventuel changement.
La parole est à M. Roland Courteau.
M. Roland Courteau. Cet amendement vise à une adaptation des mesures préconisées dans la directive 2008/6/CE en faveur des consommateurs, en particulier des usagers malvoyants.
L’alinéa 42 du préambule de la directive indique que « les intérêts des consommateurs devraient également se trouver renforcés par la plus grande interopérabilité des opérateurs résultant de leur accès à certains éléments de l’infrastructure postale et certains services, ainsi que par l’exigence de coopération entre les autorités réglementaires nationales et les organismes spécialisés de défense des consommateurs ».
L’alinéa 37 dispose, dans le même temps, qu’« étant donné l’importance que revêtent les services postaux pour les aveugles et les malvoyants, il y a lieu de réaffirmer que le processus d’ouverture des marchés ne devrait pas empêcher la poursuite de la fourniture, par les prestataires du service universel, de certains services gratuits destinés à ces personnes, qui ont été introduits par les États membres conformément aux obligations que leur impose le droit international ».
Par cet amendement, nous souhaitons réaffirmer que les services gratuits destinés aux personnes malvoyantes devraient prioritairement comprendre une information sur les tarifs, ainsi que sur les dédommagements possibles.
Nous demandons expressément que cette information en braille ne soit pas diffusée seulement sur internet, mais puisse être disponible dans les différents points de contact, les personnes malvoyantes n’ayant pas vocation à rester chez elles.
Par ailleurs, l’allongement de l’espérance de vie des populations européennes nécessite que l’on prenne en compte certains aspects du vieillissement, dont le vieillissement oculaire.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. La commission est défavorable à l’amendement n° 99 rectifié. L’article L. 1 du code des postes et des communications électroniques pose un certain nombre de définitions et de principes relatifs au service universel postal. Le supprimer serait non seulement contraire à la position de la commission, mais irait à l’encontre du souhait des auteurs de l’amendement de pérenniser le service public de La Poste.
La commission est défavorable à l’amendement n° 122. L’article L. 3 du code des postes et des communications électroniques soumet à autorisation délivrée par l’ARCEP l’exercice de services postaux non réservés. Cela constitue une garantie forte pour une concurrence loyale sur ce marché, qu’il convient de conserver.
La commission est défavorable à l’amendement n° 94, qui lui semble satisfait. Le code des postes et des communications électroniques prévoit, en l’état, des contraintes environnementales pour l’ensemble des opérateurs autorisés. L’opérateur chargé du service universel entrant dans cette catégorie, il se trouve soumis aux mêmes exigences.
La commission est défavorable aux amendements nos 95, 520 et 314 : le principe de l’orientation des prix du service universel sur les coûts permet de garantir l’accessibilité économique de ce dernier.
La commission est défavorable à l’amendement n° 521. L’application stricte du principe de l’orientation sur les coûts par le régulateur conduirait à construire toute la tarification de La Poste par simple référence aux coûts de chaque produit. La conséquence en serait une forte hausse du prix du timbre, d’au moins dix centimes d’euro, et des services de réexpédition, hausses qui pourraient avoir un effet désastreux sur les volumes. Il convient donc de conserver la référence aux caractéristiques des marchés dans la procédure de fixation des tarifs du service universel.
La commission est défavorable à l’amendement n° 326. Le septième alinéa de l’article 13 prévoit que les services d’envois postaux à l’unité fournis par le prestataire du service postal universel sont proposés au même tarif sur l’ensemble du territoire. Ce principe de péréquation tarifaire, qui permet d’avoir un prix du timbre unique, valant sur l’ensemble du territoire, il n’y a pas lieu de le rappeler spécifiquement pour les régions de montagne.
Pour les mêmes raisons, la commission est défavorable à l’amendement n° 327, qui concerne les zones à handicaps naturels, à l’amendement n° 328, relatif aux zones rurales, à l’amendement n° 329, qui vise les zones de revitalisation rurale, et à l’amendement n° 330, qui porte sur les zones de faible densité de population.
La commission est défavorable aux amendements nos 331 et 335. Comme pour les amendements précédents, je rappelle que le principe de péréquation tarifaire vaut non seulement quelle que soit la partie du territoire prise en compte, mais aussi quel que soit l’usager considéré, particulier ou entreprise.
Pour les mêmes raisons, la commission est défavorable à l’amendement n° 333, qui concerne les zones rurales ou de montagne, ainsi qu’à l’amendement n° 421, relatif aux zones où le marché postal est structurellement déficitaire.
La commission est défavorable à l’amendement n° 334. Les projets de tarifs de La Poste pour la presse sont validés chaque année par le ministre chargé des postes. Ces éléments nous semblent de nature à garantir le caractère abordable des tarifs d’acheminement de la presse sur l’ensemble du territoire.
La commission est défavorable à l’amendement n° 337, qui est satisfait par la législation existante.
La commission est défavorable à l’amendement n° 365, qui est purement déclaratoire, ainsi qu’à l’amendement n° 422.
La commission est défavorable à l’amendement n° 552, car son objet est en grande partie satisfait par la conjonction des principes d’accessibilité du service universel postal et de péréquation tarifaire, ainsi que par l’application du price cap fixé à La Poste par l’ARCEP.
La commission est défavorable à l’amendement n° 516, ainsi qu’à l’amendement n° 517, qui est inutile. En effet, l’uniformité du tarif de base est garantie par la formulation de l’alinéa 7 de l’article 13 du projet de loi.
Enfin, la commission est également défavorable aux amendements nos 518, 519, 96, 397, 97, 98, 398 et 399, ce dernier lui paraissant satisfait.
En revanche, elle est favorable à l’amendement n° 193, car la précision apportée est utile.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Estrosi, ministre. Ces trente-deux amendements en discussion commune ont sans doute été, pour la plupart d’entre eux, défendus avec de vraies convictions et une lecture pleine de certitudes de l’article 13…
Mme Nicole Bricq. Qu’est-ce que ça veut dire ?
M. Christian Estrosi, ministre. Le Gouvernement est défavorable aux amendements nos 99 rectifié, 122, 94, 95, 520, 314, 521, 326, 421, 334, 337, 365, 422, 522, 516, 517, 518, 519, 397, 97, 98, 398 et 399, pour lesquels je renvoie aux explications fournies par M. le rapporteur.
Je suis également défavorable à l’amendement n° 96. Supprimer le septième alinéa de l’article 13, qui rappelle le principe de la péréquation tarifaire, revient en effet à supprimer purement et simplement le prix unique du timbre.
M. Jacques Blanc. C’est absurde !
M. Christian Estrosi, ministre. J’avoue que la lecture de cet amendement me laisse rêveur… Le Gouvernement ne peut pas, vous le comprendrez, accepter que l’on essaie de supprimer le prix unique du timbre !
M. Gérard Le Cam. Il ne s’agit pas de cela !
M. Christian Estrosi, ministre. Je tiens à évoquer la position exprimée par le groupe socialiste au travers des amendements nos 326, 327, 328, 329, 330, 331, 333 et 335, car elle me surprend beaucoup.
Ces amendements visent à rappeler que le prix unique du timbre doit s’appliquer dans les zones de montagne, les zones rurales, les zones de revitalisation rurale,…
Mme Dominique Voynet. Surtout dans ces zones !
M. Christian Estrosi, ministre. … les zones de faible densité de population, les zones à handicaps naturels et structurels, ainsi qu’en faveur des PME et des TPE…
Or, à l’alinéa 7, le Gouvernement propose, tout simplement, le maintien du prix unique du timbre, sur l’ensemble du territoire et pour tous les usagers ! Je trouve tout à fait paradoxal, dans ces conditions, que le groupe socialiste s’attache à distinguer plusieurs catégories d’usagers et de territoires ! Pour nous, l’esprit de justice et d’équité veut qu’un prix unique du timbre s’applique sur tout le territoire et pour tous. (Applaudissements sur les travées de l’UMP. – M. Adrien Giraud applaudit également.)
M. Dominique Braye. Très bien !
M. Christian Estrosi, ministre. Dans sa rédaction actuelle, l’article L. 1 du code des postes et des communications électroniques dispose que, « hormis les envois de correspondance en nombre, les services postaux constituant le secteur réservé sont proposés au même tarif de base sur l'ensemble du territoire national ». Telle est la disposition qui, jusqu’à présent, garantissait le prix unique du timbre pour tous et en tout point du territoire national.
Or la transposition de la directive européenne nous oblige à supprimer le secteur réservé. Dès lors, afin de préserver le prix unique du timbre sur tout le territoire et pour tous, nous avons dû inscrire dans le projet de loi, pour cet article, une nouvelle rédaction plus forte, plus complète et plus détaillée que ne l’était la précédente, notamment dans la mesure où elle mentionne explicitement les départements et collectivités d’outre-mer :
« Les services d’envois postaux à l’unité fournis par le prestataire du service universel postal sont proposés au même tarif sur l’ensemble du territoire métropolitain. Le tarif appliqué aux envois de correspondance en provenance et à destination des départements d’outre-mer, de Mayotte, de Saint-Pierre-et-Miquelon, de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin, des îles Wallis et Futuna et des terres Australes et Antarctiques françaises est celui en vigueur sur le territoire métropolitain lorsque ces envois relèvent de la première tranche de poids. Il en va de même des envois de correspondance relevant de la première tranche de poids en provenance du territoire métropolitain ou des collectivités précédemment mentionnées et à destination de la Polynésie française et de la Nouvelle-Calédonie. »
Ces nouvelles précisions offrent de meilleures garanties que précédemment quant à l’application d’un prix unique du timbre pour tous les usagers et sur tout le territoire national. Or, avec les amendements que j’ai énumérés, le groupe socialiste entend distinguer entre plusieurs catégories d’usagers, comme si les citoyens français ne devaient pas être traités de la même manière, où qu’ils vivent en métropole ou au-delà des mers !
M. Roland Courteau. On va vous expliquer !
M. Dominique Braye. Très bien !
M. Christian Estrosi, ministre. Cela conduit bien évidemment le Gouvernement à être favorable à l’amendement n° 193, qui précise que la péréquation tarifaire s’applique outre-mer comme en métropole pour les envois à l’unité. Cela apporte une clarification à tous nos compatriotes ultramarins. Je vous remercie d’avoir présenté cet amendement, madame Malovry. Mes remerciements vont également à M. Adrien Giraud, sénateur de Mayotte, qui a contribué à sa rédaction.
Justice est ainsi rendue à tous les citoyens de France, sur quelque territoire qu’ils résident. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 95 et 520.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. La parole est à M. Marc Daunis, pour explication de vote sur l'amendement n° 326.
M. Marc Daunis. Dans sa réponse, M. le ministre a cru bon de manier l’ironie. Sans doute nos explications n’ont-elles pas été suffisamment pédagogiques.
M. Dominique Braye. Si, si ! On a compris !
M. Marc Daunis. Il nous semblait pourtant qu’elles avaient été suffisamment étayées pour pouvoir être comprises.
Quoi qu’il en soit, je reviendrai sur un élément central, à savoir l’existence, à l’article 13, d’une contradiction que vous ne pouvez éluder et que nos amendements visaient à mettre en lumière.
Certes, cet article prévoit que les services d’envois postaux à l’unité seront proposés au même tarif sur l’ensemble du territoire. Nous vous en donnons acte, mais son alinéa 4 apporte la précision suivante : « Les prix sont orientés sur les coûts et incitent à une prestation efficace, tout en tenant compte des caractéristiques des marchés sur lesquels ils s’appliquent. »
M. Roland Courteau. Et voilà !
M. Marc Daunis. Comment pourrez-vous concilier le maintien du tarif unique, au plus près du tarif actuel, sur l’ensemble du territoire – nous y sommes tous favorables – et les objectifs d’aménagement du territoire, s’agissant en particulier des zones visées par nos amendements et dont la spécificité a été reconnue par l’Union européenne, avec des prix « orientés sur les coûts » ?
En effet, les coûts sont nécessairement différents d’un territoire à l’autre. Assurer un service public de qualité coûte plus cher, notamment, dans les zones rurales ou de montagne, dont la desserte est difficile.
Par cette série d’amendements d’appel, il ne s’agissait donc pas pour nous d’allonger inutilement les débats…
M. Dominique Braye. Mais non ! (Sourires sur les travées de l’UMP.)
M. Marc Daunis. … ou d’établir des distinctions entre les territoires : notre seul objectif était que la loi prenne bien en compte à la fois le principe du prix unique et les exigences de l’aménagement du territoire.
Monsieur le ministre, je regrette que vous nous ayez mal compris. Votre ironie était, pardonnez-moi de vous le dire, quelque peu déplacée. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Jacques Blanc, pour explication de vote.
M. Jacques Blanc. Je me réjouis de la réponse de M. le ministre. Il est en effet tellement facile de répandre l’idée qu’on abandonnerait nos montagnes !
M. Jean-Jacques Hyest. Ou nos plaines ! (Sourires.)
M. Jacques Blanc. Il est bon d’affirmer que le principe du prix unique sur l’ensemble du territoire est maintenu : ce n’est pas défendre la montagne que de propager des soupçons infondés.
Les propos de M. le ministre sur ce sujet sont de nature à rassurer totalement les élus des zones de montagne. Cela va nous permettre de nous concentrer sur d’autres questions, telles que le réseau des points de contact ou la nature des services offerts, dont certaines ont d’ailleurs déjà reçu des réponses dans ce texte.
Dans ces conditions, mes chers collègues, je pense que nous gagnerions beaucoup en transparence et en sérénité si vous acceptiez de retirer vos amendements. Mais qu’il soit bien clair que si vous les maintenez, ce n’est pas parce que nous serons amenés à voter contre que nous sommes contre la montagne, bien au contraire !
Mme Dominique Voynet. Double langage !
M. Jacques Blanc. Nous voulons un prix unique sur tout le territoire, comme le prévoit le texte. C’est ainsi que la montagne sera défendue ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. Dominique Braye. C’est un élu de la montagne qui vous le dit !
M. le président. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.
M. Jean-Paul Emorine, président de la commission de l'économie. Un élu de la montagne ! De Montmartre…
M. David Assouline. Si nous n’avions vocation qu’à parler des territoires dont nous sommes les élus, mes chers collègues, nous ne serions pas des parlementaires nationaux, appelés à aborder tous les sujets qui intéressent notre pays.
M. Roland Courteau. Très bien !
M. David Assouline. Après l’explication pédagogique de M. Daunis à destination de M. le ministre, une explication pédagogique à destination de M. Blanc me paraît encore nécessaire.
Nous ne sommes pas en campagne électorale, mon cher collègue. Il ne s’agit pas de se borner à proclamer : « j’aime le service public »,…
M. Jacques Blanc. Oui !
M. David Assouline. … « j’aime la montagne »,…
M. Jacques Blanc. Oui !
M. David Assouline. … « j’aime le prix unique du timbre » !
M. Jacques Blanc. Oui !
M. David Assouline. Nous devons, ici au Sénat, aller au-delà de ces pétitions de principe, en leur donnant une traduction concrète dans la loi !
M. Dominique Braye. C’est ce qu’a fait le ministre, avec le prix unique du timbre !
M. David Assouline. Or, vous avez beau proclamer votre attachement au service public, en transformant La Poste en société anonyme, vous ouvrez une brèche et mettez en péril son avenir. Il suffit, pour s’en convaincre, d’observer ce qui se passe dans tous les pays européens, y compris en France, avec France Télécom ! On sait bien quelle est la direction de la pente !
Bien sûr, personne ici n’est contre la montagne ou le prix unique du timbre ! Mais si l’on ne précise pas concrètement les choses, comme nous avons tenté de le faire avec nos amendements, que se passera-t-il ? Je ne veux pas vous donner rendez-vous, car j’espère encore que cette loi ne passera pas,…
M. Dominique Braye. L’espoir fait vivre !
M. David Assouline. … mais si elle passe, desservir les zones rurales ou de montagne coûtera beaucoup plus cher à l’opérateur : le P-DG de La Poste ne manquera pas, alors, de nous expliquer que, pour préserver le peu de service public qui restera, il faut renoncer au prix unique du timbre afin que son entreprise soit compétitive et évite la faillite. Ses concurrents, en effet, ne s’embarrasseront pas d’activités non rentables !
Ces amendements ne sont donc pas, encore une fois, un prétexte pour faire durer les débats. Nous souhaitons simplement faire œuvre utile, en prenant toutes les garanties possibles pour que le principe du prix unique du timbre soit maintenu et que le service public soit assuré partout, dans les mêmes conditions, pour tous nos concitoyens ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
4
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au lundi 9 novembre 2009, à neuf heures trente, à quatorze heures trente et le soir :
– Suite du projet de loi relatif à l’entreprise publique La Poste et aux activités postales (Procédure accélérée) (n° 599 rectifié, 2008-2009).
Rapport de M. Pierre Hérisson, fait au nom de la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire (n° 50, 2009-2010).
Texte de la commission (n° 51, 2009-2010).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée à vingt-trois heures cinquante-cinq.)
La Directrice
du service du compte rendu intégral,
MONIQUE MUYARD