Mme la présidente. L'amendement n° 65, présenté par MM. Teston, Ries, Repentin, Raoul, Guillaume et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 21, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 1501 du code général des impôts est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« III. - La valeur locative des lignes de chemin de fer à grande vitesse concédées, qui sera révisée chaque année, est fixée selon le tarif suivant :
« Pour 2009, à 10 000 euros par kilomètre de ligne de chemin de fer à grande vitesse.
« La taxe professionnelle sera due par le concessionnaire des infrastructures ferroviaires dès la mise en service de la ligne de chemin de fer à grande vitesse. »
La parole est à M. Roland Courteau.
M. Roland Courteau. Cet amendement tend à combler le vide juridique que constitue le régime fiscal des concessionnaires de voies ferrées, en établissant pour l’année 2009 la valeur locative des lignes de chemin de fer à grande vitesse concédées à 10 000 euros par kilomètre.
En effet, compte tenu des incidences financières pour les communes traversées par les lignes à grande vitesse et de l’ouverture à la concurrence, il semble normal et justifié que les concessionnaires d’infrastructures ferroviaires soient assujettis au versement d’une taxe au profit des communes traversées, comme la législation l’impose aux concessionnaires d’infrastructures autoroutières.
Cette mesure, demandée par l’ensemble des maires des communes traversées par des lignes à grande vitesse, est donc la seule à même de compenser les pertes de revenus et de recettes fiscales – taxe d’habitation, taxes sur le foncier bâti et non bâti, taxe professionnelle – induites par le déplacement de certaines activités économiques et la baisse du tourisme.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Louis Nègre, rapporteur. Certaines communes, qui sont seulement traversées par des lignes à grande vitesse et qui n’ont pas la chance d’avoir de gares, souhaitent assujettir les concessionnaires d’infrastructures ferroviaires au versement de la taxe professionnelle, au prorata de l’emprise de ces infrastructures sur leur territoire, par une sorte d’analogie avec ce qui se fait déjà pour les autoroutes.
Cette proposition, que nous avons déjà examinée en discutant le projet de loi relatif à l’organisation et à la régulation des transports ferroviaires et guidés et portant diverses dispositions relatives aux transports, soulève quatre difficultés.
Premièrement, il est difficile de mettre sur le même plan la ligne à grande vitesse, ou LGV, et les autoroutes. Le fait de taxer ces lignes brouillerait sans aucun doute le message du Grenelle I, qui donne nettement la priorité à la LGV.
Deuxièmement, le Président de la République a annoncé la disparition prochaine de la taxe professionnelle ; il serait donc incongru de la réformer maintenant.
Troisièmement, seuls les concessionnaires de LGV sont visés, soit, en tout et pour tout, 327 kilomètres de voies ferrées sur les 2 000 kilomètres que compte le réseau français à grande vitesse.
Enfin et surtout, une telle disposition alourdirait les dépenses de l’État et des régions, en renchérissant le coût d’exploitation d’une ligne ferroviaire.
En conséquence, la commission sollicite le retrait de cet amendement. À défaut, elle émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Entre le Grenelle I et le projet de loi relatif à l’organisation et à la régulation des transports ferroviaires et guidés et portant diverses dispositions relatives aux transports, cela doit être la septième fois que le sujet revient en débat. La question posée par M. Courteau n’en demeure pas moins légitime.
Pour l’instant, la taxe professionnelle est due, pour un faible montant, lorsqu’une commune est traversée par des pylônes du gestionnaire du réseau de transport d’électricité ou par une ligne à grande vitesse.
Ainsi que M. le rapporteur l’a rappelé, nous allons construire environ 2 000 kilomètres de voies nouvelles, et 2 500 kilomètres supplémentaires après 2020.
Je prends l’exemple de mon département, qui a versé 27 millions d’euros pour que quatre communes rurales de moins de 500 habitants soient traversées par des lignes à grande vitesse reliant Tours à Bordeaux à 320 kilomètres à l’heure. Nous le faisons par solidarité nationale et avec le souci de l’aménagement du territoire.
M. le rapporteur a parfaitement raison : nous devons réfléchir à cette question dans le cadre de l’éventuelle révision de la taxe professionnelle. Pour l’instant, il n’est pas question de renchérir le coût de ces lignes, dont les chantiers sont, par ailleurs, pour les communes traversées, de grands pourvoyeurs de richesses et de recettes. Ainsi, pour les 300 kilomètres de la ligne reliant Tours à Bordeaux, ce sont quelque 30 000 emplois qui vont être créés, notamment dans les secteurs de la restauration, de l’hôtellerie et du BTP, sans parler des retombées économiques pour les communes situées à proximité.
Je vous remercie donc d’avoir soulevé le problème, monsieur le sénateur. Toutefois, la réponse que vous proposez me semble prématurée, le contexte n’étant pas approprié. C’est la raison pour laquelle je me permets de solliciter le retrait de votre amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Teston, pour explication de vote.
M. Michel Teston. Nous avons en effet examiné cette question à plusieurs reprises et, à chaque fois, qu’il s’agisse du Grenelle I ou du projet de loi relatif à l’organisation et à la régulation des transports ferroviaires et guidés et portant diverses dispositions relatives aux transports, les ministres ont indiqué qu’une étude serait menée dans un délai raisonnable afin de réfléchir à un dispositif permettant de procurer certaines recettes aux collectivités qui subissent des nuisances.
Nous pensons effectivement qu’il faut limiter ce dispositif aux lignes concédées, la logique étant la même que celle qui prévaut pour le réseau autoroutier, n’en déplaise à M. le rapporteur.
Mais, de grâce, ne nous renvoyez pas systématiquement à des études qui ne viennent pas. Je vous demande donc de nous assurer, monsieur le secrétaire d’État, que ces études seront effectivement conduites dans un délai raisonnable, de manière que cette question ne revienne pas systématiquement lors de chaque débat sur les transports.
Mme la présidente. Monsieur Courteau, l'amendement n° 65 est-il maintenu ?
M. Roland Courteau. J’allais vous dire que j’hésitais à le retirer, mais, finalement, je le maintiens, madame la présidente.
J’ai cru comprendre à l’instant que les études maintes fois promises étaient en cours. Est-ce vraiment le cas, monsieur le secrétaire d’État ?
M. Roland Courteau. En effet, les mois et les années passent, mais l’on nous ressert toujours le même plat : les études sont en cours, on étudie la question…
Monsieur le rapporteur, puisque vous semblez contester le bien-fondé de cette disposition, puis-je vous demander comment vous comptez compenser la perte de revenus et de recettes fiscales consécutives à la construction des lignes à grande vitesse ? Les maires des communes concernées aimeraient le savoir.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Louis Nègre, rapporteur. Ce n’est pas la première fois que cette question est soulevée, et M. le secrétaire d'État, qui a parfaitement entendu votre message, vient à l’instant de répondre à votre question !
Comme il vient de l’expliquer, il a engagé une étude destinée à examiner la possibilité de tenir compte, pour ces communes, des conséquences de la construction d’une ligne à grande vitesse.
Outre cet engagement, le Gouvernement en a pris plusieurs autres, cet après-midi, devant la Haute Assemblée, et il faut lui faire confiance. En tout état de cause, je veillerai, comme vous tous, à la bonne marche de l’État !
Mme la présidente. Monsieur Courteau, que décidez-vous, en définitive ?
M. Roland Courteau. Je maintiens l’amendement, madame la présidente.
Mme Fabienne Keller. Taxer le fer n’est pas une bonne idée !
Mme la présidente. L'amendement n° 66, présenté par MM. Collomb, Teston, Ries, Repentin, Raoul, Guillaume et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 21, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le dernier alinéa de l'article L. 153-5 du code de la voirie routière est supprimé.
La parole est à M. Michel Teston.
M. Michel Teston. Aux termes de l'article L. 153-2 du code de la voirie routière, les collectivités peuvent instituer des péages pour l'usage d'un ouvrage d'art, mais à condition qu'un décret soit publié en ce sens. Or, cinq ans après le vote de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales, un tel décret n'a toujours pas été pris, ce qui empêche cette disposition d'être mise en œuvre. Aussi est-il proposé de mettre un terme à cette situation et de modifier le code en ce sens.
En supprimant l’exigence d’un décret, monsieur le secrétaire d'État, vous permettrez aux quelques collectivités qui se trouvent dans l’incapacité de lever le péage prévu pour équilibrer le financement de l’infrastructure de prendre les mesures de rattrapage nécessaires.
Dans la négative, vous exposeriez l’État à des contentieux qui ne manqueraient pas de surgir, puisque ce défaut de ressource est imputable à ses propres carences et qu’il n’est pas question pour les collectivités d’en supporter les coûts éventuels.
Néanmoins, peut-être serez-vous en mesure de nous annoncer la signature imminente du décret.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Louis Nègre, rapporteur. Au préalable, je rappellerai qu’il existe trois types de péages : les péages autoroutiers, les péages urbains et les péages pour les ouvrages d’art, qui nous intéressent ici.
Un décret est nécessaire pour préciser quels sont les ouvrages « exceptionnels » susceptibles d’être soumis à ce péage. Il faut à la fois que cet ouvrage soit majeur et qu’il soit exploité sous le régime de la concession.
À ces deux conditions, on pourrait autoriser l’institution de péages spécifiques sur ces ouvrages. Un décret en Conseil d’État, et non un décret simple, est indispensable, compte tenu des enjeux.
Or le projet de décret en Conseil d’État, longtemps retardé depuis 2006, s’apprête à être soumis à la haute juridiction, selon les informations dont je dispose.
Le décret initial prévoyait que la mise en concession était possible si le coût de réalisation de l’ouvrage était supérieur à 24 millions d’euros aux conditions économiques de janvier 2005 et si la superficie de ses chaussées dépassait 4 000 mètres carrés.
M. le secrétaire d'État pourra sans doute vous indiquer s’il entend toujours publier ce décret en Conseil d’État, au plus tard, par exemple, à l’automne.
Mais, en tout état de cause, si d’aventure votre amendement devait être adopté, mon cher collègue, cela signifierait que n’importe quelle collectivité peut créer un péage sur un petit pont de trois mètres de long, ce qui, vous l’avouerez, n’est guère acceptable.
Pour ces raisons, et sous réserve des explications complémentaires que s’apprête à donner M. le secrétaire d'État, je vous saurais gré de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, la commission émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Je suis en mesure de confirmer à M. Teston et à M. le rapporteur que le Conseil d’État vient d’examiner ce décret et que plus rien ne s’oppose donc à sa publication, laquelle devrait avoir lieu dans un délai d’environ un mois, en tout cas cet automne.
M. Jean-Pierre Fourcade. Parfait !
Mme la présidente. Monsieur Teston, l'amendement n° 66 est-il maintenu ?
M. Michel Teston. Compte tenu de cet engagement précis, comment pourrais-je ne pas retirer mon amendement, madame la présidente ?
Mme la présidente. L'amendement n° 66 est retiré. (M. Michel Bécot applaudit.)
CHAPITRE III
Mesures relatives au développement des modes alternatifs à la route pour le transport de marchandises
Article 22
I. - L'ordonnance n° 2005-898 du 2 août 2005 portant actualisation et adaptation des livres III et IV du code des ports maritimes (partie législative) est ratifiée.
II. - La même ordonnance est ainsi modifiée :
1° Le quatrième alinéa de l'article 4 est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Cette compensation ne donne lieu à aucune perception d'impôts, de droits ou de taxes de quelque nature que ce soit. » ;
2° Le deuxième alinéa de l'article 5 est ainsi rédigé :
« L'incorporation de voies ferrées portuaires dans le réseau ferré national ou le retranchement de telles voies, à la suite de la convention ou de l'arrêté de répartition, sont prononcés par décret. » ;
3° Au premier alinéa de l'article 6, les mots : « ou d'une délégation de service public » sont remplacés par les mots : «, d'une délégation de service public ou d'un contrat de partenariat », et l'année : « 2008 » est remplacée par l'année: « 2010 ».
III. - Le code des ports maritimes est ainsi modifié :
1° Les premier et deuxième alinéas de l'article L. 411-6 sont ainsi rédigés :
« Le certificat de sécurité permettant l'accès à un port vaut également pour l'utilisation des voies ferrées portuaires de ce port.
« Les entreprises non titulaires d'un certificat de sécurité doivent, pour l'utilisation des voies ferrées portuaires, être agréées par le ministre chargé des transports dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État, après avis conforme de l'Établissement public de sécurité ferroviaire. » ;
2° Le dernier alinéa de l'article L. 411-7 est ainsi rédigé :
« Les atteintes aux voies ferrées portuaires et les infractions aux règlements de police qui leur sont applicables sont régies par les dispositions du chapitre Ier du titre III et du chapitre V du titre IV du livre III. »
IV. - Le code du domaine public fluvial et de la navigation intérieure est ainsi modifié :
1° L'intitulé du titre II du livre V est ainsi rédigé : « Voies ferrées portuaires » ;
2° L'article 182 est ainsi rédigé :
« Art. 182. - Le régime des voies ferrées portuaires dans les ports autonomes fluviaux est défini par les dispositions du livre IV du code des ports maritimes.
« Sans préjudice de la compétence générale des officiers et agents de police judiciaire, les agents de la navigation intérieure et les agents des ports autonomes fluviaux, lorsqu'ils ont la qualité de fonctionnaire et sont commissionnés et assermentés à cet effet, ont compétence pour constater par procès-verbal les atteintes aux voies ferrées portuaires et les infractions aux règlements de police qui leur sont applicables. »
V. - Les dispositions transitoires prévues aux articles 4 à 6 de l'ordonnance n° 2005-898 du 2 août 2005 portant actualisation et adaptation des livres III et IV du code des ports maritimes (partie législative), telles que modifiées par la présente loi, sont applicables aux voies ferrées portuaires des ports autonomes fluviaux. Toutefois, l'autorité portuaire, Réseau ferré de France et la Société nationale des chemins de fer disposent, pour conclure la convention de répartition, d'un délai de douze mois à compter de la publication de la présente loi.
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Teston, sur l'article.
M. Michel Teston. Bien que faisant partie du chapitre III relatif aux mesures concernant le développement des modes alternatifs à la route pour le transport de marchandises, l’article 22 se limite à la ratification d’une ordonnance de 2005 portant actualisation et adaptation des livres III et IV du code des ports maritimes et concernant les voies ferrées dans ces ports.
Le fret ferroviaire n’est pas évoqué dans ce texte, alors qu’il est urgent de redresser sa situation. En effet, ce fret ne se porte pas bien en Europe, tout particulièrement en France.
Le Gouvernement vient d’annoncer un nouveau plan visant à relancer le fret ferroviaire pour atteindre les objectifs du Grenelle de l’environnement. Il s’agit du énième plan depuis une vingtaine d’années.
Au-delà des bonnes intentions consensuelles, ce plan, comme tous les autres, manque de moyens et reste très flou sur l’origine des financements. Il s’inscrit dans une logique comptable, qui n’est pas à la mesure des enjeux et qui pourrait avoir des effets pervers.
L’abandon programmé de 70 % de l’activité « wagon isolé », qui permet de collecter le fret au plus près des utilisateurs, au profit exclusif des activités de « trains entiers » et de transport combiné va contribuer à diminuer le périmètre du fret ferroviaire au bénéfice de la desserte routière. Il révèle la stratégie non avouée jusqu’alors de la SNCF d’abandonner la petite maille pour privilégier les axes lourds et rentables.
Mais, sans le maillage, qui permet d’alimenter les gares de triage, peut-il y avoir des grands axes structurants de transport de marchandises ?
Le Gouvernement nous propose de construire des infrastructures pour le fret de transit : les autoroutes ferroviaires permettront de transporter les conteneurs passant par la France, mais qu’en sera-t-il pour les marchandises de moindre volume et de moindre poids ? Comment feront les entreprises qui expédient aujourd’hui leurs produits par le rail le jour où le service n’existera plus ? Ne serait-il pas préférable de chercher à rendre rentable le transport ferroviaire de marchandises, plutôt que de délaisser le réseau, en espérant que les régions feront le boulot ?
Ce que le mode ferroviaire perd sur le mode routier, il ne le retrouve jamais. Ainsi, le bois et l’eau minérale du Massif central sont désormais très largement transportés par la route, à la suite de la dernière vague de fermeture de gares affectées jusqu’alors aux wagons isolés.
Le Gouvernement ne le dit pas, mais probablement pense-t-il que les régions apporteront les financements nécessaires au maintien de dessertes locales pour le fret, dans le cadre de la mise en place des opérateurs de proximité.
N’oublions pas que les régions, qui ont déjà des difficultés à financer le renouvellement du matériel roulant, sont en outre de plus en plus souvent obligées d’intervenir aux côtés de Réseau ferré de France pour la régénération du réseau.
Il convient donc de conduire une autre politique en faveur du développement du mode ferroviaire.
L’action déterminée et efficace des régions pour le TER ainsi que la proposition de réunification du système ferroviaire pour effacer les dettes non seulement de RFF mais aussi de la SNCF représentent les axes d’une véritable politique ferroviaire cohérente, aussi bien pour les voyageurs que pour les marchandises.
Je rappelle que les socialistes ont récemment proposé un grand « plan de transports carbone zéro » qui passe par un financement par l’État à hauteur de 50 % de tous les projets de transport public.
Nous sommes déçus de vos propositions, monsieur le secrétaire d'État, et prenons date pour un bilan dans quelques années. Nous ne voterons donc pas l’article 22.
Mme la présidente. La parole est à M. Didier Guillaume, sur l'article.
M. Didier Guillaume. Je voudrais insister sur un point de l’intervention de notre collègue Michel Teston.
Le ferroutage, dont tout le monde reconnaît l’importance, constitue l’un des engagements majeurs du Grenelle de l’environnement. Or la suppression des wagons isolés, annoncée par la SNCF, remet en cause cet engagement. Ce qui part sur la route ne revient jamais sur le rail ! Or, comme l’a fort justement souligné Michel Teston, la suppression des wagons isolés aura pour conséquence la circulation sur nos routes de plus d’un million de camions supplémentaires.
Par conséquent, monsieur le secrétaire d'État, la décision prise par la SNCF de supprimer les wagons isolés, si elle devait aboutir, serait à la fois antiécologique et antiéconomique. C’est pourquoi nous souhaiterions que le Gouvernement conditionne son aide à la SNCF au maintien des wagons isolés.
La suppression des wagons isolés constituerait un vrai recul pour de nombreuses entreprises. Monsieur le secrétaire d'État, je vous ai écrit en août dernier pour vous signaler la situation de la plateforme multimodale de Portes-lès-Valence, dans la Drôme. Une grande entreprise, en l’occurrence Leroy-Merlin, a passé un contrat portant sur 7 000 wagons isolés. Elle craint que son activité et son développement ne soient mis à mal par la suppression des wagons isolés.
Il est incontestable que la suppression de tels wagons remettra en cause l’existence des gares de triage, notamment celle de Portes-lès-Valence, et, plus largement, l’histoire cheminote de notre pays.
Monsieur le secrétaire d'État, nous souhaiterions que vous vous exprimiez sur ce projet. Vous avez la possibilité d’exercer des pressions sur la SNCF. Si la suppression des wagons isolés est rentable pour celle-ci, le maintien de ces derniers sera bénéfique pour la planète dans la mesure où il permettra de ne pas augmenter les émissions de gaz à effet de serre.
C’est la raison pour laquelle, conformément aux engagements du Grenelle de l’environnement, nous devons maintenir ces wagons isolés.
Mme la présidente. L'amendement n° 451, présenté par Mmes Schurch, Didier et Terrade, MM. Danglot, Le Cam et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :
Supprimer le 3° du II de cet article.
La parole est à Mme Mireille Schurch.
Mme Mireille Schurch. Nous voulons rappeler ici notre opposition au recours aux contrats de partenariat, qui conduisent en général à déléguer au secteur privé la construction, la gestion, l’exploitation, voire l’entretien d’équipements qui relevaient du secteur public, avec, souvent, des conséquences néfastes pour le personnel.
Si ces contrats étaient gagnants pour la collectivité publique et gagnants pour l’investisseur, nous n’y verrions aucun inconvénient. Mais force est de constater que, en général, le recours au partenariat public-privé est rendu possible uniquement dans les cas où l’on est certain que l’investisseur privé fera des bénéfices importants.
Dès lors que la marge bénéficiaire se trouve réduite, on demande alors à la collectivité publique d’assumer les coûts !
C’est pourquoi nous vous invitons à voter cet amendement visant à supprimer la possibilité de recourir aux partenariats public-privé.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Louis Nègre, rapporteur. L’article 6 de l’ordonnance de 2005 permet à l’autorité portuaire de confier l’entretien et la gestion de ses voies ferrées portuaires à un tiers, soit dans le cadre d’un marché public, soit dans le cadre d’une délégation de service public.
L’article 22 du présent projet de loi introduit un troisième cas, celui du contrat de partenariat. Ce faisant, il tend tout simplement à prendre acte du vote de la loi du 28 juillet 2008 relative aux contrats de partenariat. Or les grands ports maritimes sont des établissements publics et, à ce titre, ils peuvent utiliser le contrat de partenariat.
Aussi, la commission vous invite, ma chère collègue, à retirer votre amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
Vous ayant écoutée attentivement, j’ajouterai une réflexion d’ordre personnel : pourquoi les opérateurs privés parviennent-ils à dégager des bénéfices, tandis que les actions des collectivités publiques sont, quant à elles, toujours déficitaires ? En tout cas, c’est ce que vous avez dit !
Mme Mireille Schurch. Non, ce n’est pas ce que j’ai dit !
M. Paul Raoult. C’est de la provocation ! (Sourires.)
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Je réagirai dans un premier temps à l’intervention de M. Teston.
Monsieur le sénateur, conformément aux engagements du Grenelle de l’environnement, nous avons la volonté de promouvoir le transfert modal de la route vers le fer, le fluvial et le maritime. Le plan que Jean-Louis Borloo et moi-même avons annoncé la semaine dernière prévoit 7 milliards d’euros d’investissements pour le fret ferroviaire, en sus du milliard d’euros qu’a prévu d’investir la SNCF.
Le Gouvernement souhaite développer les transports massifiés que sont le combiné et les autoroutes ferroviaires. Mais, dans la mesure où trop peu de marchandises sortent de nos ports par la voie ferroviaire – et c’est une des grandes faiblesses de notre système ferroviaire – il souhaite également développer la desserte de nos ports par ce mode.
M. Paul Raoult. Par le privé !
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Peu m’importe qu’un wagon soit tiré par une locomotive de la Deutsche Bahn, par une locomotive de la SNCF ou autre. L’important est que l’on utilise un wagon et non pas un camion. Pour le reste, la couleur de la locomotive, l’âge et le sexe du conducteur ne m’intéressent pas. (Sourires.)
En Allemagne, et c’est une très grande différence entre nos deux pays, 50 % voire 60 % des marchandises sortent des ports par le fer, contre à peine 20 %, au mieux, à Dunkerque.
À Hambourg, cinquante-quatre opérateurs ferroviaires de proximité vont chercher les wagons sur les quais et les massifient pour la DB ou d’autres opérateurs.
C’est ce que nous voulons faire en France. Les opérateurs ferroviaires de proximité pourront être des entités différentes : la SNCF elle-même, en partenariat avec un port, une chambre de commerce, une autorité intercommunale, un transporteur routier privé, un transporteur ferroviaire non français, et pas obligatoirement privé – en France, Euro Cargo Rail, connu sous le signe ECR, est détenu par les chemins de fer publics allemands. L’important, c’est qu’il y ait des wagons.
En France, deux opérateurs ferroviaires privés de proximité sont prêts, l’un sur le site du Havre, l’autre à La Rochelle, dont le capital est détenu par divers partenaires à hauteur de 60 %, le reste revenant à la SNCF.
Avec ces opérateurs de proximité, le taux de report vers le fer devrait doubler dans les années qui viennent.
Il faut faire preuve de pragmatisme, se départir de toute idéologie. Nous avons besoin des opérateurs ferroviaires de proximité dans les ports afin d’accroître le trafic ferroviaire. C’est la raison pour laquelle, madame Schurch, je suis défavorable à votre amendement. Ce qui m’importe, je le répète, c’est de développer le fer par tous les moyens, à condition que cela reste sous le contrôle de l’autorité publique.
M. Jean-Pierre Fourcade. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à Mme Évelyne Didier, pour explication de vote.
Mme Évelyne Didier. Nous sommes tous d’accord pour développer le fer, en tout cas nous le disons tous ! Nous faisons tous de grandes déclarations en faveur du transport ferroviaire.
Nous sommes également tous d’accord pour massifier les ports maritimes et fluviaux, les grandes plateformes.
L’important, c’est qu’il y ait des wagons, dites-vous. C’est très bien. Mais les wagons ont besoin de gares et de rails.
Or, que faisons-nous aujourd’hui ? Nous déferrons !
Mme Évelyne Didier. Nous avons plusieurs exemples. De nombreuses gares sont abandonnées ou voient leur activité réduite.
En tout cas, monsieur le secrétaire d’État, pouvez-vous m’expliquer comment va se construire ce réseau ? Que va-t-on sauver ? Le transport sur les grands axes nord-sud n’est pas suffisant. Il faut aussi développer le transport transversal. C’est le principe du squelette : il faut un axe central et des ramifications secondaires. Expliquez-nous quel schéma vous entendez conserver. Nous ne demandons qu’à être convaincus. Mais concevez que, pour l’instant, nous ayons des doutes.