M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Je me suis déjà exprimée à propos des sanctions, sur lesquelles je ne reviens pas. Je suis donc défavorable à ces propositions.
S’agissant des amendements nos73 et 662, je suis opposée au fait de doter la conférence médicale des établissements de santé privés de la personnalité morale, même si, bien entendu, je partage tout à fait la volonté de chacun ici de renforcer le rôle de la conférence médicale d’établissement et de lui donner les moyens d’assurer sa mission de représentation auprès des instances dirigeantes de la communauté médicale.
Nous avons d’ailleurs conforté ses pouvoirs et accru ses attributions, en harmonisant en somme le dispositif avec celui qui prévaut dans les établissements publics pour les commissions médicales d’établissement, notamment, comme nous venons de le voir, en ce qui concerne la politique d’amélioration continue de la qualité et de la sécurité des soins.
Cependant, il me semble que cette transformation ne favoriserait vraiment pas, pour employer un vocabulaire très édulcoré, la cohésion entre les équipes dirigeantes et la communauté médicale. Or cette cohésion est absolument indispensable à la mise en œuvre d’une stratégie partagée dans le cadre d’une gouvernance unie.
Avec l’amendement n° 5, M. Dériot propose d’étendre le champ de compétence de la conférence médicale d’établissement aux conditions d’accueil et de prise en charge des usagers.
Je suis favorable à cette proposition, sous réserve que les mots : « surtout pour les urgences » soient supprimés. Pourquoi cibler les urgences ? Si la conférence médicale doit en effet contribuer non seulement à l’élaboration de la politique d’amélioration continue de la qualité et de la sécurité des soins mais aussi à la politique relative aux conditions d’accueil et de prise en charge des usagers, cela doit être le cas dans tous les domaines d’activité de l’établissement.
M. le président. Monsieur Dériot, acceptez-vous de rectifier votre amendement dans ce sens ?
M. Gérard Dériot. Tout à fait, monsieur le président !
M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 5 rectifié, présenté par M. Dériot, qui est ainsi libellé :
Au deuxième alinéa du 2° du IV de cet article, après les mots :
de la qualité et de la sécurité des soins
insérer les mots :
ainsi que des conditions d'accueil et de prise en charge des usagers
Je mets aux voix l'amendement n° 73.
M. André Lardeux. Je le retire, monsieur le président, et je me rallie à la position de la commission concernant l’amendement de M. Houpert.
M. le président. L’amendement n° 73 est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 5 rectifié.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Monsieur Houpert, acceptez-vous de rectifier l’amendement n° 662 conformément au souhait de la commission ?
M. Alain Houpert. Oui, monsieur le président.
M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 662 rectifié, présenté par M. Houpert et ainsi libellé :
Compléter le 2° du IV de cet article par deux alinéas ainsi rédigés :
« La conférence médicale d'établissement participe à l'élaboration de tous les contrats qui ont une incidence sur la pratique médicale de l'établissement.
« Lorsque la consultation préalable est prévue par des dispositions légales ou réglementaires, l'avis de la conférence médicale d'établissement doit être joint à toute demande d'autorisation ou d'agrément formées par un établissement de santé privé et annexé à toutes conventions conclues par ce dernier. »
Je le mets aux voix.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures cinquante-cinq, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Roland du Luart.)
PRÉSIDENCE DE M. Roland du Luart
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
3
Questions d'actualité au Gouvernement
M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions d’actualité au Gouvernement.
Je rappelle que l’auteur de la question de même que la ou le ministre pour sa réponse disposent chacun de deux minutes trente.
réforme des aides facultatives locales
M. le président. La parole est à Mme Brigitte Bout.
Mme Brigitte Bout. Ma question s'adresse à M. le haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, haut-commissaire à la jeunesse.
Monsieur le haut-commissaire, la loi généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d’insertion entrera en vigueur le 1er juin prochain, dans quinze jours très précisément. Six mois de préparation ont été nécessaires pour mettre en œuvre l’ensemble des dispositions permettant une bonne application de ce texte, dont pourront bénéficier plus de 3 millions de ménages.
Parmi les nouveautés prévues par la loi, la disparition de certains minima sociaux et dispositifs d’intéressement devrait contribuer à limiter les effets de seuils, sources de « trappes à pauvreté ».
Lors de l’examen par le Sénat du projet de loi, a été adopté un amendement tendant à réformer les aides facultatives locales de manière à ne plus les lier au statut de bénéficiaire du revenu minimum d’insertion ou de l’allocation de parent isolé, et à faire en sorte que, à situation économique identique, les règles d’attribution des aides et avantages que gèrent les collectivités territoriales et leurs groupements soient prioritairement fondées sur les notions de ressources et de charges et n’entraînent aucune discrimination liée à un quelconque statut du demandeur.
Pour faciliter la mise en œuvre de ces dispositions nouvelles, le Premier ministre a confié à ma collègue Sylvie Desmarescaux le soin d’établir des propositions de nature à faire évoluer les prestations attachées aux droits auxquels se substitue le revenu de solidarité active.
Monsieur le haut-commissaire, ce rapport vous a été remis par notre collègue aujourd’hui même. Pouvez-vous nous indiquer quelles en sont les principales orientations et quels outils sont mis à la disposition des responsables locaux pour permettre à ces derniers de disposer des aides locales facultatives qui répondent à cet impératif d’égalité des personnes devant les aides sans que cela menace pour autant les budgets des collectivités territoriales ?
M. le président. La parole est à M. le haut-commissaire.
M. Martin Hirsch, haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, haut-commissaire à la jeunesse. Madame la sénatrice, nous ne nous penchons pas sur cette question depuis seulement six mois. Non ! Cela fait bien trois ans que la Haute Assemblée s’intéresse à la question des droits dits « connexes » et des aides sous statut, depuis que Mme Valérie Létard a rédigé un rapport d’information qui avait à l’époque connu un fort retentissement.
M. Jean Arthuis. Très bien !
M. Martin Hirsch, haut-commissaire. C’est donc tout naturellement que, lors de l’examen par la Haute Assemblée du projet de loi généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d’insertion, Éric Doligé, Michel Mercier et un certain nombre de sénateurs ont déposé un amendement visant à modifier le système alors en vigueur, afin qu’un bénéficiaire de minima sociaux reprenant une activité ne se trouve pas dans une situation moins favorable qu’auparavant et ne perde, par exemple, cinquante euros d’aides parce qu’il aura gagné un euro de plus !
C'est parce qu’il s’agit d’une question politique, d’un travail d’élu, de technicien, que le Premier ministre a chargé votre collègue Sylvie Desmarescaux d’étudier cette question. Pendant six mois, elle a conduit cette mission en collaboration avec l’Association des maires de France, l’Union nationale des centres communaux et intercommunaux d’action sociale, l’Association des régions de France, l’Assemblée des départements de France, la Caisse nationale d’allocations familiales, Pôle emploi,...
M. Guy Fischer. C’est trop beau !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Oh ! là là ! C’est magnifique !
M. Martin Hirsch, haut-commissaire. … afin de dégager des accords sur des principes clairs. En effet, il est impossible de conserver un système de statuts, alors que nous passerons de 1,2 million de bénéficiaires du RMI à un nombre beaucoup plus important d’allocataires du RSA.
M. Guy Fischer. La France compte 4 millions de pauvres !
M. Martin Hirsch, haut-commissaire. Le rapport que Sylvie Desmarescaux a remis ce matin est remarquable et directement opérationnel. Il se traduit par un engagement négocié en amont avec les différents acteurs, à qui il a été demandé de modifier leurs critères d’attribution et de tenir compte des ressources et non du statut. L’Assemblée des maires de France, l’Union nationale des centres communaux et intercommunaux d’action sociale, qui sont les deux plus importants pourvoyeurs d’aides, ont déjà donné leur accord.
Ce rapport comprend également un guide pratique qui permet d’aider l’ensemble des élus, quels que soient leurs responsabilités et leur positionnement, à choisir les modalités de mise en œuvre du dispositif : à budget constant, avec des tarifs progressifs ou dégressifs, etc.
Dans certaines régions, c’est déjà le cas. Ainsi, en Île-de-France, le système que j’avais moi-même dénoncé et présenté comme exemple de ce qu’il ne fallait pas faire a été corrigé et tiendra désormais compte des ressources des demandeurs.
Sur la base des recommandations émises par Sylvie Desmarescaux dans son rapport, il est possible de faire de même sur l’ensemble du territoire. (Applaudissements sur les travées de l’UMP. –M. Jean Arthuis applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Yvon Collin.
M. Yvon Collin. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.
Monsieur le Premier ministre, le 19 avril dernier est paru au Journal officiel un décret qui rend applicable l’accord signé le 18 décembre 2008 par votre gouvernement avec l’État du Vatican. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
M. Didier Boulaud. Scandaleux !
M. Yvon Collin. Or cet accord ne va pas sans poser de sérieux problèmes, puisqu’il remet en cause ni plus ni moins l’un des fondements de la laïcité de l’enseignement dans notre pays.
M. Guy Fischer. Il a raison !
M. Didier Boulaud. C’est le discours de Latran qui revient !
M. Yvon Collin. Dès lors, monsieur le Premier ministre, vous comprendrez que le groupe du RDSE dans son ensemble, et tout particulièrement les sénateurs radicaux de gauche,…
M. Didier Boulaud. Et nous, avec !
M. Yvon Collin. … ne peuvent faire autrement que, d’une part, dénoncer cet accord,…
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Bravo !
M. Didier Boulaud. Nous sommes d’accord !
M. Yvon Collin. … d’autre part, demander l’annulation du décret en question au Conseil d’État. (Bravo ! sur les travées du groupe du RDSE, du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. Guy Fischer. Eh oui ! C’est du jamais vu !
M. Yvon Collin. De quoi s’agit-il exactement ?
Cet accord prévoit la possibilité pour le Saint-Siège…
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ah, le Saint-Siège !...
M. Yvon Collin. … de viser des diplômes de l’enseignement supérieur français, en l’occurrence ceux des instituts catholiques,...
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Scandaleux !
M. Yvon Collin. … alors que, jusqu’ici, c’était l’État, et lui seul, qui avait, depuis une loi de 1880 et par l’intermédiaire de l’université publique, le monopole de la reconnaissance des diplômes.
Désormais, avec un tel accord, votre gouvernement permet la reconnaissance automatique par la France des diplômes visés par le Vatican, et ce sans passer, comme c’était le cas jusqu’à aujourd’hui, par la labellisation et l’aval de l’université publique.
M. Didier Boulaud. C’est scandaleux !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Chouette, un diplôme du Vatican !
M. Didier Boulaud. Tous en cornette !
M. Yvon Collin. Cet accord revient à entamer le monopole de l’État dans la délivrance des diplômes universitaires et, par voie de conséquence, à remettre en cause la neutralité de l’État et le principe de laïcité, si cher à ma famille politique.
Monsieur le Premier ministre, comment ne pas interpréter de telles décisions comme le prolongement du discours de Latran, si controversé et si regrettable, du Président de la République, au mois de décembre 2007 ?
M. Didier Boulaud. Bien sûr !
M. Yvon Collin. Comment ne pas y voir la volonté de s’attaquer une nouvelle fois à la laïcité comme socle fondateur de notre République ?
M. Didier Boulaud. Absolument !
M. Yvon Collin. Le groupe du RDSE et tout particulièrement les sénateurs radicaux de gauche doivent-ils vous rappeler qu’il s’agit d’un principe fondamental reconnu par les lois de la République ?
M. Didier Boulaud. Eh oui !
M. Yvon Collin. L’entrée en vigueur de ce décret au 1er mars prochain méconnaît totalement l’article 53 de la Constitution,...
M. Didier Boulaud. Ils s’en moquent ! Cela n’a aucune importance pour le pouvoir en place !
M. Yvon Collin. … qui dispose que les traités ou accords internationaux « qui modifient des dispositions de nature législative [...] ne peuvent être ratifiés et appliqués qu’en vertu d’une loi ».
M. Didier Boulaud. Ils prétendent défendre la Constitution, mais ils s’assoient dessus !
M. Yvon Collin. Dans ces conditions, monsieur le Premier ministre, pouvez-vous nous indiquer à quelle date cet accord avec le Vatican sera soumis au Parlement et, dans cette attente, quelles instructions vous donnerez pour que son application soit purement et simplement suspendue ? (Bravo ! et vifs applaudissements sur les travées du RDSE, du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Rama Yade, secrétaire d'État chargée des affaires étrangères et des droits de l'homme. Monsieur le sénateur, la publication au Journal officiel de l’accord sur la reconnaissance des grades et diplômes dans l’enseignement supérieur entre la France et le Saint-Siège a pu susciter des questions. Je souhaite dissiper toutes les craintes que vous exprimez à ce sujet en rappelant le contexte dans lequel cet accord a été signé.
Lancé voilà près de dix ans, le processus de Barcelone a fait de la création d’un espace européen de l’enseignement supérieur sa priorité.
À Louvain, voilà deux semaines, les quarante-six pays qui participent à ce processus, dont le Saint-Siège, ont réaffirmé leur volonté de coopérer, notamment en favorisant la mobilité des étudiants au sein de cet espace.
Faciliter la poursuite des études entre établissements des différents pays, tel est précisément l’objectif des accords de reconnaissance des diplômes.
M. Yannick Bodin. Le Vatican, ce n’est pas l’Union européenne !
Mme Rama Yade, secrétaire d'État. Ces accords faciliteront la vie et le parcours des étudiants en levant les barrières bureaucratiques nationales. (Vives exclamations sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. Didier Boulaud. C’est scandaleux !
M. Yannick Bodin. Cela n’a rien à voir !
M. Didier Boulaud. Ce n’est pas la question !
M. Didier Boulaud. Ce n’est pas l’objet de la question !
Mme Rama Yade, secrétaire d'État. … se situe dans le droit fil de ceux que nous avons signés avec d’autres pays,...
M. Yannick Bodin. Il n’y a pas de diplômes du Saint-Siège !
M. Didier Boulaud. C’est lamentable !
Mme Rama Yade, secrétaire d'État. … comme dernièrement l’Espagne, le Portugal ou encore la Pologne et, bientôt, la République tchèque et la Roumanie.
Cet accord a simplement pour objet, en indiquant les niveaux d’études, de faciliter l’examen par les établissements d’enseignement supérieur de l’une des parties des candidatures à la poursuite d’études présentées par les étudiants de l’autre partie.
M. Simon Sutour. C’est laborieux !
Mme Rama Yade, secrétaire d'État. Il n’a pas pour objet, je le précise, d’imposer une reconnaissance automatique de droit des diplômes concernés.
M. Didier Boulaud. Bien sûr que si !
M. Yannick Bodin. Cela finira comme ça !
Mme Rama Yade, secrétaire d'État. Il tend uniquement à offrir une grille de lecture plus claire des niveaux de diplômes. (Vives exclamations sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. Yannick Bodin. Quel est le rapport entre le droit international et la religion ?
Mme Rama Yade, secrétaire d'État. L’accord signé rappelle bien que l’autorité compétente (Nouvelles exclamations prolongées sur les mêmes travées, couvrant la voix de l’oratrice.)…
M. le président. Mes chers collègues, laissez parler Mme la secrétaire d'État ! Un peu de respect !
M. Yannick Bodin. C’est la règle du jeu !
M. Charles Revet. C’est de l’intolérance !
Mme Rama Yade, secrétaire d'État. Je souhaite aller au bout de mon explication, si vous me le permettez.
L’accord signé rappelle bien, disais-je, que l’autorité compétente pour prononcer ou non une reconnaissance pour poursuite d’études est l’établissement d’enseignement supérieur au sein duquel l’étudiant sollicite son inscription. (Exclamations sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. Didier Boulaud. C’est scandaleux !
Mme Rama Yade, secrétaire d'État. L’État a donc le monopole de la collation des grades et des titres universitaires et le gardera.
M. Adrien Gouteyron. Très bien !
Mme Rama Yade, secrétaire d'État. Soyez donc pleinement rassuré, monsieur le sénateur (Vives exclamations sur les mêmes travées.), …
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat et M. Didier Boulaud. Nous ne sommes pas rassurés du tout !
M. Guy Fischer. Nous sommes très inquiets !
Mme Rama Yade, secrétaire d'État. … cet accord international ne changera en rien cette situation et n’aura surtout aucune conséquence sur ce monument inviolable qu’est la laïcité. (Vifs applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste. – Vives protestations sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. François Fortassin. Ah, c’est éclairant !
M. le président. Mes chers collègues, un peu de tolérance, je vous prie ! (Vives exclamations sur les travées du groupe socialiste. – M. Yannick Bodin tape sur son pupitre. –Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. Didier Boulaud. Il y a un institut musulman dans mon département : on verra jusqu’où ira votre tolérance, et ce que vous ferez de leurs diplômes !
mise en place du rsa
M. le président. La parole est à M. Jean Arthuis.
M. Jean Arthuis. Ma question s'adresse à M. le haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, haut-commissaire à la jeunesse. Prolongeant la question de Mme Brigitte Bout, elle concerne la mise en œuvre du RSA sur l’ensemble du territoire national au 1er juin prochain.
Monsieur le haut-commissaire, je salue votre opiniâtreté et votre persévérance pour porter ce projet emblématique, que le groupe de l’Union centriste a soutenu dès la première heure.
En tant que président du conseil général de la Mayenne, département expérimentateur du RSA depuis un an, je peux témoigner du fait que le revenu de solidarité active, ça marche ! (Ah ! sur les travées de l’UMP.)
Cela étant, la crise et la dégradation du marché du travail compliquent singulièrement notre tâche. C'est la raison pour laquelle, monsieur le haut-commissaire, je souhaite m’assurer que, à la veille de la généralisation du dispositif, les partenaires impliqués et mobilisés disposent bien des moyens nécessaires à la réussite de cette démarche.
Ainsi, j’aimerais savoir si les emplois que les caisses d’allocations familiales étaient autorisées à créer ont bien été pourvus, si les agents ont été formés (M. Guy Fischer s’exclame.), afin d’éviter les engorgements qui retardaient la liquidation des sommes dues aux bénéficiaires du RSA.
M. Guy Fischer. Exact !
M. Jean Arthuis. Je voudrais également être sûr que les systèmes informatiques ont bien fait l’objet d’une refonte et que cette dernière est achevée, de telle sorte que les paiements soient assurés dans les délais requis.
Je voudrais aussi être certain que l’information soit mise à la disposition des conseils généraux pour qu’ils puissent exercer leurs responsabilités, éviter le paiement d’indus, et pour que les contrôles a posteriori nécessaires puissent être diligentés.
M. Guy Fischer. On va faire la chasse aux pauvres !
M. Jean Arthuis. Je voudrais enfin être sûr que le partenaire Pôle emploi est en mesure de proposer aux conseils généraux des prestations d’accompagnement individualisées des hommes et des femmes confrontés à des difficultés de retour à l’emploi,…
M. Guy Fischer. Vous rêvez !
M. Jean Arthuis. … et qu’il est prêt à conclure des conventions à des conditions financières durablement supportables par les conseils généraux. (Applaudissements sur les travées de l’Union centriste et de l’UMP. – MM. Aymeri de Montesquiou et François Patriat applaudissent également.
M. Paul Raoult. C’est une excellente question !
M. le président. La parole est à M. le haut-commissaire.
M. Martin Hirsch, haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, haut-commissaire à la jeunesse. Monsieur Arthuis, votre question en témoigne, vous connaissez particulièrement bien le sujet. Vous avez d’ailleurs contribué à entraîner vos collègues ainsi que les différents acteurs dans une réforme qui devait changer la situation. Il n’était en effet plus pensable que les bénéficiaires du RMI perdent de l’argent quand ils retrouvaient du travail, ou qu’ils n’aient qu’une faible probabilité d’inscription au service public de l’emploi. Ils ne pouvaient plus relever d’un système qui les marginalisait, alors qu’ils souhaitaient reprendre un travail.
De simples mesures technocratiques étaient insuffisantes. Il fallait changer les textes, les esprits et élaborer une loi qui donne de la souplesse aux acteurs locaux, tout en les obligeant à un partenariat.
M. Paul Raoult. Des mots !
M. Martin Hirsch, haut-commissaire. Ce sont non pas des mots, mais des faits ! Tous ceux qui ont voté le texte, qui se sont impliqués, qui ont retroussé leurs manches le savent !
M. Paul Raoult. Nous ne vous avons pas attendu !
M. Martin Hirsch, haut-commissaire. En voici la preuve : soixante-quatre des quatre-vingt-quinze départements ont signé une convention avec Pôle emploi et avec les caisses d’allocations familiales pour pouvoir orienter les personnes. Je le répète : ce sont non pas des mots, mais des faits !
M. Alain Gournac. Eh oui !
M. Martin Hirsch, haut-commissaire. M. Arthuis évoquait la crise. Bien sûr, en raison de ce contexte, les offres d’emploi ont diminué sur l’ensemble du territoire. Mais dans les zones expérimentant le RSA, au cours des six derniers mois, le taux de retour à l’emploi a été bien meilleur qu’ailleurs.
M. Paul Raoult. Cela explose !
M. Martin Hirsch, haut-commissaire. C’est grâce au système et à la mobilisation des différents acteurs.
Hier, j’ai fait le point et j’ai constaté que les caisses d’allocations familiales avaient bien recruté et formé 1 250 agents.
Pour ce qui concerne le système informatique, centralisé à Caen, il a été testé à 90 %. Il sera bientôt opérationnel.
M. Paul Raoult. Ça cafouille !
M. Martin Hirsch, haut-commissaire. Des garanties ont été apportées : le versement du revenu de solidarité active ne connaîtra pas de retard. Le premier versement aura bien lieu le 6 juillet prochain.
Pour sa part, Pôle emploi a formalisé son offre pour assurer gratuitement aux départements qu’ils prendront en charge les allocataires du RSA dans les conditions de droit commun.
Cette question étant complémentaire de celle qui était relative aux droits connexes, je vous indique, mesdames, messieurs les sénateurs, que, auparavant, il y avait, d’un côté, des droits connexes réservés au RMI – dorénavant, il n’existe plus d’effet de seuil – et, de l’autre, des prestations fermées aux RMIstes qui sont maintenant ouvertes à tout le monde.
Oui, la mise en place du RSA sera difficile, de surcroît en cette période de crise. Mais qui pourrait prétendre baisser les bras en matière sociale et se croiser les doigts vis-à-vis des RMIstes en une telle période ?
M. Charles Revet. Au contraire !