M. le président. L'amendement n° 96, présenté par MM. Teston et Daudigny, Mme Bonnefoy, MM. Boutant, Bourquin, Ries et Mirassou, Mme Bourzai, MM. Patriat, Percheron, Courteau, Godefroy et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Avant l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Avant la fin de l'année 2009, l'État proposera aux parlementaires un rapport présentant les solutions envisageables pour que soit rendu possible le remboursement progressif de la dette de Réseau Ferré de France.

La parole est à M. Michel Teston.

M. Michel Teston. En 2004, un rapport parlementaire réalisé par la mission d’évaluation et de contrôle sur le financement du système ferroviaire français a été remis au Gouvernement.

Les auteurs de ce texte, aux conclusions alarmantes, stigmatisaient le « poids colossal » de la dette des transports ferroviaires, critiquaient les « circuits financiers incroyablement complexes » mis en place pour la financer, s’inquiétaient des « raisonnements économiques la plupart du temps incertains » élaborés pour justifier une fuite en avant et préconisaient l’application de trente-cinq mesures pour « tenter de désamorcer cette menace pour les finances publiques ».

Ce rapport, vous vous en doutez, mes chers collègues, trouvait sa raison d’être, notamment, dans la dette colossale affichée par RFF à la fin de 2003, à savoir 25 milliards d’euros.

Aujourd’hui, cette dette continue de se creuser et elle dépasse désormais 27 milliards d’euros, alors que le traitement de cette question, pourtant soulevée maintes fois depuis la création de RFF, se trouve toujours éludé.

Or il faut se souvenir que la dette de RFF constitue le principal frein à l’investissement dans le système ferroviaire français.

C'est pourquoi nous préconisons d’inciter le Gouvernement à s’attaquer à cette question en l’obligeant à élaborer un rapport clair, dans lequel il exposera les solutions qu’il entend mettre en œuvre pour résoudre cet épineux problème.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Francis Grignon, rapporteur. Tout d'abord, je veux rassurer M. Billout : je ne renie pas le rapport que nous avons réalisé ensemble, comme le montreront d'ailleurs les propositions tout à fait positives que je formulerai dans un instant s'agissant de l’amendement n° 96.

En ce qui concerne l’amendement n° 45 rectifié, il faut distinguer plusieurs éléments.

La reprise par l’État des 28 milliards d'euros de la dette de RFF ne paraît pas justifiée, d’autant qu’une partie – au moins la moitié – de ces sommes constitue une « bonne dette », c'est-à-dire une dette économique amortissable, tout à fait légitime pour une entreprise publique.

En ce qui concerne l’autre partie de la dette de RFF, c'est-à-dire la dette dite « hors article 4 non amortissable », il convient effectivement de réfléchir à des solutions, comme le souhaite d'ailleurs Michel Teston.

Je souligne en passant que les auteurs de l’amendement n° 45 rectifié ne manquent ni d’humour ni d’imagination puisqu’ils proposent de financer les 28 milliards d'euros de la dette de RFF par une augmentation des droits sur les tabacs et alcools ! (Sourires.)

La commission est donc défavorable à cet amendement.

En ce qui concerne l’amendement n° 96, M. Teston souhaite que le Gouvernement dépose au Parlement un rapport « présentant des solutions envisageables pour que soit rendu possible le remboursement progressif de la dette de RFF ».

Nous savons bien que cette dette constitue l’une des principales causes des difficultés du système ferroviaire. Nous sommes donc tout à fait d'accord pour approfondir la réflexion sur cette question, surtout s’il existe, comme le laisse entrevoir le rapport remis en 2008 par Hubert Haenel au Premier ministre, des solutions permettant d’externaliser cette dette sans qu’elle soit pour autant reprise par l’État.

C’est pourquoi la commission a émis un avis favorable sur cet amendement, sous réserve d’une modification rédactionnelle.

En effet, vous écrivez, monsieur Teston, « l’État proposera aux parlementaires ». Nous suggérons d’écrire plutôt  « le Gouvernement déposera au Parlement ». L’État étant à la fois une personne morale, le Gouvernement et les parlementaires, il s’agit d’une simple question de forme.

M. le président. Monsieur Teston, acceptez-vous de modifier votre amendement dans le sens souhaité par la commission ?

M. Michel Teston. Oui, monsieur le président. Je suis tout à fait d’accord avec la modification que vient de proposer M. le rapporteur.

M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 96 rectifié, présenté par MM. Teston et Daudigny, Mme Bonnefoy, MM. Boutant, Bourquin, Ries et Mirassou, Mme Bourzai, MM. Patriat, Percheron, Courteau, Godefroy et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, et ainsi libellé :

Avant l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Avant la fin de l'année 2009, le Gouvernement déposera au Parlement un rapport présentant les solutions envisageables pour que soit rendu possible le remboursement progressif de la dette de Réseau ferré de France.

Quel est l’avis du Gouvernement sur les amendements nos 45 rectifié et 96 rectifié ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Je suis défavorable à l’amendement n° 45 rectifié, pour les raisons exprimées par le rapporteur.

Sur l’amendement n° 96 rectifié, je m’en remets à la sagesse de la Haute Assemblée. J’attire néanmoins votre attention sur le fait que les priorités budgétaires de l’État peuvent être de nature différente actuellement, compte tenu de la situation économique que traverse notre pays.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 45 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 96 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je constate que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents.

Un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l'article 3.

Articles additionnels avant l’article 3
Dossier législatif : projet de loi relatif à l'organisation et à la régulation des transports ferroviaires et guidés et portant diverses dispositions relatives aux transports
Article additionnel après l'article 3

Article 3

I. - La dernière phrase du dernier alinéa de l'article 5 de la loi n°83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public s'applique à compter de la publication d'un décret fixant les conditions d'application du présent alinéa et, notamment, la liste des entreprises et établissements publics concernés et les critères de désignation des représentants des consommateurs et des usagers.

II. - Sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée et des instances en cours avant le 10 septembre 2008, les délibérations prises depuis le 7 janvier 2006 par le conseil d'administration de l'établissement public « Réseau ferré de France » sont validées en tant que leur régularité serait contestée au regard des dispositions figurant à l'article 5 de la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public relatives à la représentation des consommateurs ou des usagers. 

III. - Sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée et des instances en cours avant le 10 septembre 2008, les délibérations prises depuis le 16 mai 2001 par les conseils d'administration et de surveillance des autres entreprises publiques et établissements publics auxquels est applicable le dernier alinéa de l'article 5 de la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public sont validées en tant que leur régularité serait contestée au regard des dispositions de cet article relatives à la représentation des consommateurs et des usagers.

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 60 est présenté par Mme Schurch, M. Billout, Mme Didier, MM. Danglot et Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Supprimer le I de cet article.

La parole est à Mme Mireille Schurch.

Mme Mireille Schurch. Nous sommes particulièrement stupéfaits de la teneur de cet article, qui, sous prétexte de sécuriser juridiquement les actes émis par le conseil d’administration de RFF, risque d’écarter la participation des représentants des usagers au sein de ce conseil.

En effet, alors que l’article 5 de la loi relative à la démocratisation du secteur public, issu de la révision de 2001, prévoit la présence dans le conseil d’administration ou le conseil de surveillance des entités chargées d’une mission de service public et d’une personnalité qualifiée choisie parmi les représentants des consommateurs, cette disposition n’a pas encore été mise en œuvre.

Pourtant, le conseil d’administration de RFF a été renouvelé deux fois dans ce laps de temps : en 2002 et en 2007.

Dans l’exposé des motifs du présent projet de loi, vous évoquez les difficultés d’interprétation pour justifier la non-participation des représentants des usagers au conseil d’administration. Pour résoudre ce problème, vous proposez donc deux types de mesures.

Premièrement, vous voulez garantir la sécurité juridique des actes pris par le conseil d’administration de RFF, qui sont régulièrement contestés à ce titre par la Fédération nationale des associations d’usagers des transports, la FNAUT, grâce à une validation législative exceptionnelle a posteriori de ces décisions.

Deuxièmement, vous proposez qu’un décret fixe les conditions d’application de l’article 5 de la loi de modernisation, la liste des entreprises et établissements publics concernés ainsi que les critères de désignation des représentants des consommateurs et des usagers.

Sur le premier plan, nous en sommes conscients, il faut garantir la sécurité juridique des délibérations de RFF. Cependant, cette faille législative a permis utilement à la FNAUT d’attaquer des décisions de fermetures et de déclassements de lignes, décisions qui ont, par la suite, fait l’objet d’un examen par les conseils régionaux en vue d’une éventuelle réouverture.

Nous considérons, pour notre part, que cette validation législative doit rester exceptionnelle et qu’elle ne doit pas servir à maintenir durablement les pratiques irrégulières de certaines autorités administratives.

C’est sur ce point précis que nous vous demandons la suppression d’une partie de l’article 3. En effet, loin de renouer le dialogue, le I de cet article indique qu’un décret précisera les conditions d’application de l’article 5 de la loi de modernisation du secteur public, en fixant la liste des établissements qui sont soumis à cette obligation.

Nous craignons, à juste titre, que ce décret ne permette d’exclure la participation des représentants des usagers au sein du conseil d’administration de RFF.

Notre groupe ne souhaite pas qu’une telle possibilité soit ouverte. En effet, nous considérons que les usagers des services publics sont les mieux à même d’évaluer la qualité de l’offre de transport et de définir les besoins. Nous sommes donc particulièrement attachés à la participation de leurs représentants au conseil d’administration des entreprises publiques, et notamment de RFF.

Pour toutes ces raisons, nous vous demandons d’adopter notre amendement de suppression du I de cet article 3.

M. le président. L'amendement n° 8, présenté par M. Grignon, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Au début du I de cet article, remplacer les mots :

La dernière phrase du

par le mot :

Le

La parole est à M. le rapporteur.

M. Francis Grignon, rapporteur. Il s’agit d’une simple précision rédactionnelle.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 60 ?

M. Francis Grignon, rapporteur. L’article 3 prévoit une validation législative de décisions de RFF dans des conditions tout à fait respectueuses des règles posées par le Conseil constitutionnel. Les ambiguïtés sur la composition du conseil d’administration de RFF ont été levées.

L’amendement qui nous est proposé créerait une très forte insécurité juridique quant à la valeur des décisions propres prises par l’établissement public.

En conséquence, la commission a émis un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Le Gouvernement est favorable à l’amendement proposé par M. le rapporteur.

Sur l’amendement présenté par Mme Schurch, le Gouvernement partage la position du rapporteur. Il est bien sûr indispensable que les représentants des usagers siègent au sein du conseil d’administration.

Sous la présidence de M. Martinand, j’ai moi-même été membre du conseil d’administration de Réseau ferré de France, de 1997 jusqu’à mon entrée au Gouvernement en 2002, au titre des personnalités qualifiées mais représentant les élus. Nous étions plusieurs parlementaires : votre ancien collègue François Gerbaud représentait le Sénat et moi l’Assemblée nationale.

Une des grandes faiblesses de notre système de transports en France est l’absence de consumérisme. Je connais bien la FNAUT, que vous avez citée ; j’ai d’ailleurs assisté à son congrès au Mans. Cette organisation joue un rôle très utile.

Notre pays a besoin d’associations de consommateurs qui s’occupent davantage du transport et qui soient les interlocuteurs des entreprises.

Soyez sans inquiétude, madame Schurch, les usagers seront représentés au sein du conseil d’administration de Réseau ferré de France.

M. le président. Et nous allons y veiller ! Pardonnez-moi d’être sorti un instant du rôle qui est le mien au fauteuil de la présidence.

Je mets aux voix l'amendement n° 60.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 8.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je constate que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents.

Je mets aux voix l'article 3, modifié.

(L'article 3 est adopté.)

Article 3
Dossier législatif : projet de loi relatif à l'organisation et à la régulation des transports ferroviaires et guidés et portant diverses dispositions relatives aux transports
Intitulé du titre III

Article additionnel après l'article 3

M. le président. L'amendement n° 78 rectifié ter, présenté par MM. J. Blanc, Hérisson, J. Gautier et Revet, est ainsi libellé :

I. - Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le neuvième alinéa de l'article 29 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs est ainsi rédigé :

« En cas d'absence de concurrence, il peut être fait appel dans les zones de revitalisation rurale à des particuliers ou des associations inscrits au registre des transports dans les conditions dérogatoires aux dispositions de l'article 7 prévues par décret, pour exécuter, au moyen de véhicules de moins de dix places, conducteurs compris, des prestations de transport scolaire visées à l'article L. 213-11 du code de l'éducation ou des prestations de services à la demande. »

II. - En conséquence, faire précéder cet article d'une division additionnelle ainsi rédigée :

Titre ...

Dispositions relatives aux transports routiers non urbains de personnes

Cet amendement n'est pas soutenu.

M. le président. L'amendement n° 110 rectifié, présenté par MM. Revet, Detcheverry, Pierre, Beaumont, Détraigne, Bailly, Bizet et Bécot, est ainsi libellé :

Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les opérations liées à l'organisation, la coordination et la régulation du trafic sur le réseau ferré national sont dans leur globalité du seul ressort et de la seule responsabilité de Réseau ferré de France.

La parole est à M. Denis Detcheverry.

M. Denis Detcheverry. L'ouverture à la concurrence du trafic ferroviaire sur le réseau ferré national implique que la structure qui en a la charge dans le domaine de l'organisation, de la coordination et de la régulation soit la seule à assumer les décisions.

Réseau ferré de France étant propriétaire du réseau, il paraît normal qu’il appartienne à cette structure de remplir cette mission, soit elle-même, soit par le biais d’une convention mais sous sa responsabilité. L'enjeu en termes de sécurité en apporte une justification supplémentaire.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Francis Grignon, rapporteur. Cet amendement va dans le même sens que l’amendement n° 86, qui distingue RFF des autres gestionnaires d’infrastructures ferroviaires.

Le Sénat ayant adopté l’amendement n° 86, l’objectif défini par ce nouvel amendement est très largement atteint. Aussi, je demande à ses auteurs de le retirer ; à défaut, la commission émettrait un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Même avis.

M. le président. Monsieur Detcheverry, l'amendement n° 110 rectifié est-il maintenu ?

M. Denis Detcheverry. Cet amendement étant largement satisfait, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 110 rectifié est retiré.

TITRE III

De la régulation des activités ferroviaires

Article additionnel après l'article 3
Dossier législatif : projet de loi relatif à l'organisation et à la régulation des transports ferroviaires et guidés et portant diverses dispositions relatives aux transports
Article 4

M. le président. L'amendement n° 53, présenté par Mme Schurch, M. Billout, Mme Didier, MM. Danglot et Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Supprimer cette division et son intitulé.

La parole est à M. Michel Billout.

M. Michel Billout. Cet amendement de suppression est symbolique.

En effet, les sénateurs de notre groupe considèrent la création de cette autorité comme la conséquence directe de la libéralisation du transport ferroviaire. L’arrivée de nouveaux opérateurs oblige, en effet, au contrôle des conditions effectives de la concurrence libre et non faussée. Ce contrôle doit être opéré, dans le cadre où l’État membre est actionnaire d’opérateurs du secteur, par un organisme indépendant.

La CRAF aura donc pour mission principale de veiller à ce que les opérateurs disposent d’un accès non discriminatoire au réseau et aux infrastructures.

Notre collègue Grignon indique dans son rapport que l’ambition du Gouvernement est de faire de la CRAF « le véritable régulateur du système ferroviaire en lieu et place du ministre des transports ».

Nous allons donc plus loin que les directives européennes.

La création de cette autorité administrative indépendante ne peut servir de prétexte pour déresponsabiliser les pouvoirs publics en ce qui concerne la question du transport ferroviaire.

Comment promouvoir une meilleure prise en compte des objectifs environnementaux promus dans le Grenelle de l’environnement, notamment concernant les questions de rééquilibrage modal, sans organiser parallèlement une plus grande maîtrise publique dans ce secteur ?

Comment admettre que la politique des transports se résume dans cette fonction de régulation du marché pour favoriser l’arrivée des nouveaux entrants ? Comment la notion d’intérêt général peut-elle être garantie dans ces conditions ?

En créant cette autorité, le Gouvernement nous éloigne des réponses aux défis climatiques et à la garantie d’un droit à la mobilité.

Ainsi, cette nouvelle autorité de régulation, à l’image de l’ARCEP, l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, et de la CRE, la Commission de régulation de l’énergie, est chargée de missions contradictoires : d’un côté, assurer la mise en œuvre du service public et, de l’autre, assurer les conditions d’une véritable concurrence dans le secteur ferroviaire.

Or, nous savons par expérience que l’ouverture à la concurrence entraîne mécaniquement une détérioration du service public que l’opérateur public n’est plus en mesure d’assurer convenablement.

Il existe donc une antinomie essentielle entre concurrence et service public.

Les missions confiées à cette nouvelle autorité sont immenses, comme en témoigne l’article 8. Ce texte donne également à la CRAF un droit de regard sur les dispositions économiques, techniques et juridiques qui pourraient conduire à des discriminations entre les opérateurs. Il s’agit notamment de placer ainsi l’établissement public de sécurité ferroviaire sous la tutelle de la CRAF.

Or, les questions de sécurité demeurent des questions régaliennes qui doivent relever de l’unique responsabilité des pouvoirs publics. Donner le pouvoir réglementaire, le pouvoir de décision et de sanction à un comité très réduit contrevient à la notion de séparation des pouvoirs. À ce titre, on peut qualifier les pouvoirs confiés à la CRAF d’exorbitants.

Les amendements proposés par la commission vont même dans le sens d’une accentuation de ses pouvoirs, notamment concernant le pouvoir réglementaire.

Conscients de la confusion qui pouvait naître du mélange des pouvoirs, il nous a semblé important pour d’autres autorités de régulation, je pense à la CRE, de distinguer les différentes fonctions. La CRE dispose ainsi d’un collège spécifique pour l’édiction de sanctions.

Nous sommes donc surpris que vous n’ayez pas retenu cette hypothèse concernant la CRAF.

Vous souhaitez également donner l’autonomie financière à la CRAF pour renforcer son indépendance. Cette autonomie serait notamment garantie par une ponction sur les péages payés à RFF.

Sur ce point, nous formulons une double objection. Premièrement, cette autonomie rend la CRAF, à nos yeux, encore plus illégitime. Deuxièmement, il s’agit, de cette manière, de priver encore un peu plus RFF de ressources pour ses missions relatives au réseau ferroviaire.

Cette proposition est donc contre-performante.

Des pouvoirs nouveaux – par rapport aux pouvoirs traditionnels confiés aux autorités de régulation – apparaissent dans ce texte. Ainsi, les juridictions peuvent désormais solliciter la CRAF sur des affaires dont le domaine est celui du ferroviaire, y compris sur les affaires dont la CRAF a déjà eu connaissance. Cela pose, à notre avis, des problèmes de partialité.

La notion même d’homologation est elle aussi modifiée : elle serait acquise au bout de deux mois, en l’absence de contestation du ministre.

On voit donc bien la volonté d’aller toujours plus loin dans les attributions confiées à ce type de structure.

Pour toutes ces raisons, nous avons souhaité, par cet amendement, nous opposer à la mise en place d’une telle autorité dans le secteur des transports.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Francis Grignon, rapporteur. Au cours de la discussion générale comme lors de la présentation de la motion tendant à opposer la question préalable, présentée par Mme Odette Terrade, au nom du groupe CRC-SPG, nous avions déjà entendu votre opposition à la création de cette autorité de régulation.

Nous saluons votre logique mais nous espérons que vous respecterez, de votre côté, la cohérence de la commission, qui a, sans surprise, émis un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Même avis défavorable, bien entendu !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 53.

(L'amendement n'est pas adopté.)