M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Virapoullé.
M. Jean-Paul Virapoullé. Ma question s’adresse à M. le secrétaire d'État chargé de l'outre-mer.
Je vais essayer brièvement de plaider une cause juste.
M. René-Pierre Signé. Pourquoi être à l’UMP dans ce cas ?
M. Jean-Paul Virapoullé. Les populations d’outre-mer subissent une atteinte à leur pouvoir d’achat en raison d’ententes illicites entre quatre compagnies pétrolières. Monsieur le secrétaire d’État, je suis sûr que vous êtes au courant de ce qui se passe.
M. René-Pierre Signé. Il est au courant de tout !
M. Jean-Paul Virapoullé. Alors que le prix du baril de pétrole est passé de 150 dollars à 47,50 dollars, le prix à la pompe n’a pas diminué à la Réunion. Ma revendication est fondée sur deux réflexions.
En tant que membre de l’observatoire des prix de la Réunion, j’ai eu connaissance de certains faits. Mieux que cela, mes chers collègues, le 4 décembre 2008, à la suite d’une requête déposée par la compagnie Air France – ce qui n’est pas rien –, le Conseil de la concurrence a, aux termes d’une décision dont j’ai ici une copie (L’orateur brandit le document), infligé aux quatre compagnies pétrolières une amende de 41 millions d’euros pour entente illicite !
Comment ces quatre compagnies pétrolières s’y prennent-elles pour voler les consommateurs réunionnais ? Elles achètent les hydrocarbures à partir d’un index international – Arab Gulf, par exemple –, mais les facturent à leurs clients des départements d’outre-mer, qu’il s’agisse des compagnies aériennes, comme Air France, ou des détaillants, par référence à un indice « surévalué et artificiel », écrit le Conseil de la concurrence, indice qui est inexistant sur le marché international. De la sorte, en l’absence de toute concurrence, ces compagnies pétrolières réalisent en amont, sans aucune justification, des marges tout à fait illicites.
Interrogées sur la raison pour laquelle leurs prix FOB Singapour étaient supérieurs de 30 % aux prix fixés sur le marché de Rotterdam, ces compagnies ont été dans l’incapacité d’apporter une réponse. L’explication nous est fournie aujourd’hui par la décision du Conseil de la concurrence !
En outre, alors que les taxes pesant sur les carburants sont moins élevées qu’en métropole, le consommateur paie un prix à la pompe supérieur, pour la simple raison que, en l’absence de toute concurrence, les compagnies pétrolières réalisent en aval des marges plus importantes.
Monsieur le secrétaire d'État, ce scandale n’a que trop duré ! Quelles mesures le Gouvernement compte-t-il prendre pour que non seulement le marché des hydrocarbures, mais encore, à l’avenir, celui des autres produits de première nécessité, tel le ciment, ne s’apparentent plus à une caverne d’Ali Baba et pour mettre fin à ces pratiques, qui dérogent totalement aux règles de la libre concurrence posées par Bruxelles et par les lois de la République ? (Bravo ! et applaudissements sur l’ensemble des travées.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Yves Jégo, secrétaire d'État chargé de l'outre-mer. Monsieur le sénateur, vous m’interrogez sur la question difficile du prix des carburants outre-mer.
M. Robert Hue. Difficile pour les consommateurs !
M. Yves Jégo, secrétaire d'État. Ce problème est d’autant plus délicat que le marché des carburants est un marché libre et que les sociétés que vous évoquez ne sont pas régulées par l’État. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. Charles Revet. Bien sûr !
M. Yves Jégo, secrétaire d'État. De plus, en outre-mer, aucune taxe d’État ne pèse sur les carburants ; les seules taxes auxquelles ils sont soumis sont celles qui sont votées librement par les conseils régionaux et prélevées par les autorités locales.
De fait, il a été constaté un certain nombre de dysfonctionnements. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement, soucieux que les observatoires des prix, créés voilà un an, puissent disposer en toute transparence des informations nécessaires à leur mission, a diligenté voilà quelques semaines une inspection, qui a débuté son travail à la Guyane, où, comme vous le savez, monsieur le sénateur, la fixation du prix de l’essence a suscité récemment de grandes difficultés.
Cette inspection, qui se trouve actuellement en Martinique et en Guadeloupe, arrivera dans quelques jours à la Réunion. Elle a pour mission de remettre à plat l’ensemble du système, d’étudier la manière dont se forment les prix, quelles sont les marges des uns et des autres, et, surtout, de proposer au Gouvernement et aux acteurs locaux une évolution du dispositif, soit par sa libéralisation totale, soit par un renforcement de son administration, qui pourrait être confiée, par exemple, aux régions.
Nous n’avons pas encore arrêté notre choix. En tout état de cause, avant la fin du premier trimestre de cette année, nous aurons remis à plat ce système, éventuellement introduit des actions en justice si cela est justifié, et trouvé une solution pour que cette question lancinante de la formation des prix du carburant outre-mer trouve une issue favorable à l’intérêt des consommateurs. (Applaudissements sur les travées de l’UMP. – Mme Muguette Dini applaudit également.)
aides à l’embauche pour les très petites entreprises
M. le président. La parole est à Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Ma question s'adresse à M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État chargé de l'emploi.
Monsieur le secrétaire d'État, la crise économique internationale qui frappe notre pays affecte durement de nombreuses entreprises, en particulier dans mon département de la Gironde.
Sur le terrain, cette crise se traduit par des projets de restructuration qui suscitent légitimement l’inquiétude de nos concitoyens dont l’emploi est menacé.
Face à la remontée du chômage, que nous constatons depuis quelques mois, le Gouvernement a d’ores et déjà pris des mesures ambitieuses pour amortir le choc de la crise et protéger nos concitoyens : une meilleure indemnisation de l’activité partielle ; 100 000 contrats aidés supplémentaires pour que ceux qui sont le plus éloignés de l’emploi puissent remettre le pied à l’étrier ; l’extension à dix-huit nouveaux bassins d’emploi du contrat de transition professionnelle ; enfin, la mise en œuvre accélérée de Pôle emploi, afin de proposer aux demandeurs d’emploi une offre de services rénovée et un accompagnement plus individualisé.
De mon point de vue, monsieur le secrétaire d'État, il faudrait également aider nos entreprises à faire face à cette crise et à passer ce cap difficile. Je pense en particulier aux plus petites d’entre elles, celles qui ne comptent que quelques salariés, car elles sont les plus fragilisées par la crise.
Dans le cadre du plan de relance mis en place par le Gouvernement, et qui est actuellement examiné par le Sénat, une aide à l’embauche pour les entreprises de moins de 10 salariés est prévue.
Pourriez-vous, monsieur le secrétaire d'État, nous détailler le contenu de cette mesure, préciser les entreprises auxquelles elle s’adresse, les démarches à entreprendre pour en bénéficier ainsi que son impact sur le coût du travail ? (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État chargé de l'emploi. Madame la sénatrice, je suis très heureux de répondre à votre question, d’autant que j’ai beaucoup travaillé à votre côté sur ces sujets. (Ah ! sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. Paul Raoult. Renvoi d’ascenseur !
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Bien que la situation dans les petites entreprises, notamment les entreprises de moins de 10 salariés, ne soit pas médiatisée, elle aura néanmoins une incidence majeure sur l’évolution de l’emploi dans l’année qui vient.
Les grands plans de restructuration, souvent sous le feu des médias, occultent quelque peu ce qui fait l’emploi au quotidien et la réalité locale de nos territoires. Aujourd’hui, dans notre pays, les entreprises de moins de 10 salariés représentent chaque année 3 millions d’embauches. Or, compte tenu de la crise actuelle, elles risquent de connaître des difficultés de trésorerie plus importantes que les grands groupes.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ah bon ?
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. En outre, soumises aux aléas de la conjoncture et à la raréfaction de leurs clients, elles pourraient être confrontées à de forts retournements du marché.
Cette conjonction d’événements pourrait contraindre ces entreprises à différer leurs embauches, ce qui ne manquerait pas d’avoir, cette année, un effet silencieux mais redoutable sur l’emploi.
Pour cette raison, le Président de la République et le Premier ministre ont voulu mettre en place, à destination de ces entreprises, un dispositif de soutien à l’embauche clair, simple et lisible. Les entreprises de moins de 10 salariés qui embaucheront cette année un salarié en contrat à durée déterminée, en contrat à durée indéterminée, à temps plein ou à temps partiel sur l’année bénéficieront d’une aide, mobilisable sur simple déclaration auprès de Pôle emploi.
Cette aide, d’un montant de 185 euros, fera l’objet d’un chèque qui sera versé tous les trois mois, en contrepartie de cette embauche. Ciblé sur les salariés modestes, ceux qui gagnent entre 1 SMIC et 1,6 SMIC, ce dispositif est d’une utilisation extrêmement simple.
J’ajoute que, pour qu’il soit pleinement efficace, nous avons besoin de vous, mesdames, messieurs les parlementaires. Votre aide est fondamentale. Vous devez vous en emparer sur le terrain et le faire connaître auprès des 1,4 million de petites entreprises auxquelles il est destiné.
Enfin, je n’esquiverai pas un débat qui anime en ce moment la commission des finances du Sénat, dont l’un des membres, M. Serge Dassault, s’est interrogé sur la pertinence de cette mesure. Connaissant son souci permanent que l’utilité des crédits consacrés à la politique de l’emploi soit régulièrement évaluée, je prends l’engagement de dresser un bilan de cette mesure devant la représentation nationale.
Il n’en demeure pas moins qu’il me paraît très important que le plan de relance comporte un volet destiné aux entreprises de moins de 10 salariés, ciblé de manière très claire sur les salariés qui en ont besoin. Ne passons pas à côté de cette occasion. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et sur plusieurs travées de l’Union centriste.)
la diversité
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Le Texier.
Mme Raymonde Le Texier. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.
M. Jean-Pierre Sueur. Il est parti !
Mme Raymonde Le Texier. Voici peu, le Président de la République s’est longuement exprimé sur la question de la diversité, annonçant la nomination de Yazid Sabeg et s’engageant sur un certain nombre de propositions.
Malheureusement, de l’incantation à l’action, il y a un fossé que le Gouvernement ne semble pas toujours désireux de combler. (Exclamations sur plusieurs travées de l’UMP.)
En effet, nombre des mesures citées dans ce discours par M. Sarkozy font déjà fait l’objet d’une loi.
En 2006, la loi sur l’égalité des chances rendait déjà obligatoire le curriculum vitae anonyme dans les entreprises de plus de cinquante salariés.
Cette loi prévoyait également que des classes préparatoires aux grandes écoles, ouvertes aux élèves de zone d’éduction prioritaire, ou ZEP, seraient créées dans chaque région.
Enfin, la même loi faisait obligation aux chaînes de télévision de refléter la diversité dans leur programmation.
Malheureusement, tout cela est resté lettre morte puisque, depuis trois ans, aucun décret d’application n’a été pris.
Dans ces conditions, comment croire à une véritable mobilisation du Gouvernement sur les problèmes de discrimination qui minent notre société ? Comment croire à vos bonnes intentions quand les actes ne suivent jamais non seulement la parole donnée, mais encore la loi votée ?
Monsieur le Premier ministre, dans mes permanences, je reçois régulièrement – beaucoup trop régulièrement – des jeunes, ingénieurs, titulaires d’un diplôme de troisième cycle. Certains sont à la recherche d’un emploi, d’autres d’un apprentissage ou d’un stage. Tous ont envoyé des dizaines de CV mais n’ont reçu aucune réponse – même pas les plus diplômés d’entre eux – parce qu’ils n’ont pas le bon nom, la bonne couleur, la bonne adresse.
Vous comprendrez bien que je ne puisse, que nous ne puissions, éternellement leur répondre qu’il y a quand même la politique de la ville, le plan banlieue, l’Agence nationale pour la rénovation urbaine, ou ANRU, les zones urbaines sensibles et même la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité, la HALDE, autant de dispositifs et d’organismes utiles par ailleurs, mais qui ne règlent pas leur situation et n’apaisent en rien leur désespoir.
Je ne peux pas non plus leur dire, comme le fait Nicolas Sarkozy, que c’est en réduisant toutes les fractures sociales que l’on résoudra toutes les fractures ethniques, car ils sont les premiers à savoir que les fractures sociales s’accentuent.
La crise actuelle aggrave une situation déjà délétère. Or nous le savons tous ici, la haine se nourrit du désespoir et un avenir sans issue conduit au repli communautaire. C’est le constat sévère que fait Yazid Sabeg en déclarant que la France est sur la voie de l’apartheid.
En vous interpellant aujourd’hui sur les discriminations que subissent quotidiennement des milliers de jeunes, nous vous demandons, monsieur le Premier ministre, quelle réponse nous pourrons leur apporter demain. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire (Applaudissements sur les travées de l’UMP et huées sur les travées du groupe socialiste), pour qui nous formulons des vœux pour l’exercice de sa mission.
M. Adrien Gouteyron. Très bien !
M. Éric Besson, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire. Je vous remercie, monsieur le président.
Madame la sénatrice, vous avez raison : nous devons utiliser et valoriser la richesse de la France et de ses citoyens, toute sa diversité et lutter contre les discriminations. Cela a été rappelé avec force par le Président de la République, voilà quelques jours, dans un discours prononcé à l’École polytechnique. (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s’exclame.)
Je vais travailler sur ces questions avec Fadela Amara et Yazid Sabeg, qui a été nommé récemment haut-commissaire à la diversité et à l’égalité des chances et qui doit présenter un plan et des propositions avant le 31 mars. (Marques d’ironie sur les travées du groupe socialiste.)
Le Président de la République a fixé le cadre. Il veut que nous respections scrupuleusement les critères républicains qui sont le fondement de notre « vivre ensemble ».
M. René-Pierre Signé. Vous n’avez pas honte !
M. Éric Besson, ministre. Il ne veut pas de distinctions fondées sur des critères ethniques ou religieux. Il veut que ce soient les critères sociaux qui prédominent. Concrètement, cela veut dire aider plus ceux qui ont moins (M. Jean-Luc Mélenchon s’exclame), ceux qui sont nés avec le moins de chances au départ.
Tout le monde doit faire des efforts. C’est vrai d’abord de l’éducation nationale et de l’université. Dès septembre prochain, 25 % des classes préparatoires – ce n’est pas rien – réserveront des places aux meilleurs lycéens boursiers. Ils passeront les mêmes concours, mais bénéficieront de plus d’aides concrètes pour leur préparation.
M. Jean-Luc Mélenchon. Tu parles !
M. Éric Besson, ministre. Dans les entreprises, nous nous efforçons de lutter contre la discrimination et de promouvoir la diversité. À ce titre, une centaine d’entreprises expérimenteront ce que l’on appelle le « CV anonyme » (Exclamations sur les travées du groupe socialiste),…
Mme Raymonde Le Texier. Cela fait trois ans que cette mesure a été votée !
M. Éric Besson, ministre. …qui a ses partisans et ses détracteurs. Les risques sont connus. Il faut donc tester le CV anonyme, évaluer les résultats de l’expérimentation afin de savoir s’il apporte un « plus ».
Sur le plan politique, le Haut conseil à l’intégration a remis, voilà quelques jours, un rapport d’étude comparée sur la diversité dans les conseils municipaux de 2001 et dans ceux qui ont été élus en 2008. Cette étude montre que nous progressons un peu.
M. René-Pierre Signé. La gauche progresse !
M. Éric Besson, ministre. Un peu, cela veut dire insuffisamment, mais cela veut aussi dire qu’il y a une dynamique. Il faut aller beaucoup plus loin.
Dans la fonction publique, le Président de la République et le Premier ministre veillent à ce que toute la haute fonction publique soit concernée par la promotion de la diversité. Ils ont d’ailleurs nommé des préfets, des diplomates, un certain nombre de hauts fonctionnaires issus de la diversité.
M. Didier Boulaud. Qu’est-ce que vous racontez comme histoire ? Il y en avait avant : Mahdi Hacène, Mohamed Bengaouer qui fut préfet de la Nièvre voilà vingt-cinq ans !
M. Éric Besson, ministre. Certes, il y en avait avant, mais le rythme s’accélère : réjouissez-vous-en ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
M. Michel Houel. Laissez-le parler !
M. Éric Besson, ministre. Le Gouvernement est conscient de la nécessité d’aller plus vite. Cela dépend de nous tous. Nous devons retrousser nos manches afin que notre République soit une République d’égalité réelle et de fraternité concrète. J’ai compris que, sur toutes les travées de cette assemblée, égalité et fraternité étaient nos préoccupations communes. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et huées sur les travées du groupe socialiste.)
M. Jean-Luc Mélenchon. Baratin !
M. le président. Nous en avons fini avec les questions d’actualité au Gouvernement.
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures vingt, sous la présidence de M. Jean-Léonce Dupont.)
PRÉSIDENCE DE M. Jean-Léonce Dupont
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
4
Loi de finances rectificative pour 2009
Suite de la discussion d’un projet de loi
M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2009, adopté par l’Assemblée nationale.
Article 1er (suite)
M. le président. Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus, au sein de l’article 1er, au vote sur l’amendement n° 32.
La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote.
M. Philippe Dallier. Après la discussion de ce matin, nous y voyons un peu plus clair.
Les arguments avancés par les uns et par les autres tournent autour de trois points : la complexité du système – des conventions –, la lisibilité du dispositif pour les collectivités locales au regard des différents régimes de récupération de la TVA qui pourraient être mis en place au travers des diverses solutions proposées et l’équité du système que nous allons mettre en place.
D’abord, il s’agit d’un système complexe, qui risque même de devenir une usine à gaz. Les collectivités locales et les services préfectoraux devront en effet se réunir et discuter pour résoudre les cas qui seront nécessairement soulevés lorsqu’on s’apercevra que, pour telle ou telle raison, une collectivité n’a pas atteint l’objectif fixé dans la convention.
À cet égard, je n’ai pas vraiment été convaincu par les arguments avancés. Ce dispositif sera effectivement une usine à gaz et le rendez-vous de la fin de l’année 2009 s’annonce difficile.
Ensuite, concernant la lisibilité des propositions pour les collectivités, trois solutions sont possibles.
La première consiste à voter le texte actuel et conduit à trois régimes de récupération de la TVA : les collectivités qui n’auront pas pu ou pas voulu signer la convention continueront à être remboursées l’année n + 2 ; les collectivités qui auront signé la convention et respecté les objectifs passeront à un remboursement l’année n + 1 à partir de l’an prochain ; celles qui auront signé mais n’auront pas respecté les objectifs seront également remboursées l’année n + 2 et une partie des sommes qui leur auront été versées sera récupérée. Les intercommunalités seront, quant à elles, toujours remboursées à l’instant t, puisqu’elles relèvent d’un régime particulier.
Voilà donc ce qui résultera du vote du texte en l’état.
La seconde solution consiste à voter l’amendement que je vous propose. Nous supprimons la convention et donc la complexité liée à la vérification de ce qui aura été fait. Nous aboutissons à un double régime : les intercommunalités continueront à être remboursées l’année n et toutes les autres collectivités passeront, à partir de l’année prochaine, à un régime n – 1, ce qui est déjà un avantage.
Cette solution présente un autre intérêt : le coût pour l’État est moindre par rapport à la troisième solution consistant à voter l’amendement de M. Arthuis.
En effet, l’amendement qu’il présente aboutirait à terme à un seul régime de récupération de la TVA, mais le coût pour le budget de l’État pourrait être beaucoup plus important que dans la solution que je vous soumets.
Enfin, j’en viens à l’équité du système. Il y a là un gros problème. Les collectivités locales qui disposent de ressources, celles qui sont les plus riches, n’auront aucune difficulté à présenter une convention pour arriver au « 1 euro supplémentaire ». Je ne m’inquiète absolument pas pour elles. Certaines collectivités en difficultés pourront réaliser cet effort grâce au double FCTVA en 2009. Mais il restera un tiers des collectivités, les collectivités locales les plus pauvres et peut-être les plus petites, qui elles, de toutes les manières, ne le pourront pas et resteront donc à la traîne.
Ce sera donc un système complexe, illisible en termes de régime de récupération de la TVA et inéquitable.
Nous pouvons voter mon amendement ou celui de Jean Arthuis – le mien me semble cependant moins coûteux –, ou encore les deux, puisque j’ai sous-amendé l’amendement de Jean Arthuis.
Quoi qu’il en soit, je maintiens mon amendement en demandant à la commission de reconsidérer son point de vue. En effet, cet amendement propose, me semble-t-il, la solution la plus lisible, la plus équitable et la moins coûteuse pour le budget de l’État.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.
Mme Nicole Bricq. Ce matin, nous avons achevé nos travaux par le vote de l’amendement n° 18, que nous avons présenté avant celui de M. Dallier.
Cet amendement visait à simplifier le mécanisme du FCTVA, à permettre l’attribution des fonds pour les dépenses effectuées au titre de l’année en cours et à l’appliquer à l’ensemble des collectivités de manière juste, pérenne et sans condition.
Cet amendement a été refusé.
Mais, bien sûr, nous sommes là pour être constructifs et pour parvenir au dispositif le plus lisible, le plus prévisible, le plus équitable et le plus efficace au regard de l’objectif visé, à savoir permettre aux collectivités locales de participer, comme les années précédentes, à l’investissement civil public.
Dès lors, l’amendement proposé par notre collègue Dallier se rapprochant du nôtre, le groupe socialiste, en toute logique, le votera.
Ce matin, le président Arthuis a dit ce que nous répétons depuis des semaines : le FCTVA est destiné à faire en sorte que l’État paie ses dettes !
Vous voulez actionner la trésorerie. Il faut faire les calculs, d’ailleurs le rapporteur général les a faits.
Le comble serait de constater à la fin de l’année 2009, compte tenu des difficultés de ce système, qu’il existe une enveloppe de trésorerie ! En effet, il s’agit – je le répète pour que cela entre dans la tête du Gouvernement – d’une dette de l’État envers les collectivités locales.
Si les collectivités locales n’utilisaient que 500 millions d’euros, tout aurait été loupé dans cette affaire !
On ne peut donc pas attendre de voir les comptes. On ne peut attendre, comme vous nous le suggérez, monsieur le rapporteur général, la loi de finances pour 2010, ce qui est d’ailleurs contradictoire avec votre volonté de voir la mesure avoir un impact en 2009.
Arrêtons donc la défiance vis-à-vis des collectivités locales ; faisons leur confiance !
L’amendement de notre collègue Dallier est fondé, me semble-t-il, sur ce principe de confiance.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Je rappelle fermement la demande de retrait de la commission en ce qui concerne l’amendement de notre collègue Philippe Dallier.
La question de la conditionnalité, qui est au cœur de la problématique du plan de relance, a été tranchée par un scrutin public en fin de matinée.
Si l’on veut avancer dans ce débat, il faut accepter les choix qui sont assumés publiquement par le Sénat.
M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier.
M. Philippe Dallier. Le Sénat s’est prononcé ce matin sur un amendement qui n’était pas le mien.
L’amendement no 32 a pour objet de retirer le seul principe de la convention, qui est à mes yeux une usine à gaz et marque que la bonne foi des élus locaux est mise en doute.
Encore une fois, je ne peux pas croire que les élus locaux qui siègent ici, sur quelque travée que ce soit, ne soient pas conscients de l’intérêt d’utiliser les sommes qui seront débloquées pour faire travailler le tissu de PME locales, par exemple sur le bail de voirie, sur l’entretien des bâtiments publics… C’est de cela qu’il s’agit !
Aussi, monsieur le rapporteur général, vous m’en excuserez, mais je n’obtempérerai pas.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique. Je souhaite m’exprimer à mon tour, car nous sommes là au cœur du débat.
Monsieur le sénateur, on peut dire ce qu’on veut, mais ce n’est certainement pas un problème de confiance !
Mme Nicole Bricq. Si !
M. Éric Woerth, ministre. Une usine à gaz, les conventions ? Savez-vous bien de quoi il est question ? Il s’agit d’une convention entre un préfet et une série de collectivités ! Franchement, non : ce n’est pas un problème d’usine à gaz, et je connais des usines à gaz bien pires ! C’est un problème de clarté de la convention liant d’un côté un État et de l’autre une collectivité locale. Ce n’est vraiment pas un problème de complexité !
Quant à l’égalité ! Nous sommes en train d’élaborer un plan de relance. C’est bien de l’égalité devant ce plan qu’il s’agit, compte tenu que les collectivités ne sont pas seules : il y a un État, il y a la France ! La France doit se relancer, et elle doit le faire au travers de l’investissement ! La seule condition impérative, c’est l’investissement, et nous ne disons rien de plus.
Pour toutes ces raisons, et parce nous vous avons donné, le plus clairement possible, toutes les explications que vous souhaitiez, il me paraîtrait également préférable, monsieur le sénateur, que vous retiriez votre amendement.