M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis. Permettez à un centriste de dire que le trou de la sécurité sociale n’est ni de gauche ni de droite !
M. François Autain. Je ne suis pas d’accord !
M. Guy Fischer. Le trou est centriste, alors ?
M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis. Les Français consomment des prestations et, n’ayant pas la possibilité de financer leurs dépenses, ils accumulent des dettes. Vous le savez pertinemment, mes chers collègues !
M. François Autain. Actuellement, le trou est de droite !
M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis. Si l’équilibre des comptes a pu être atteint sous le gouvernement Jospin, c’est parce qu’entre 1997 et 2002 la croissance avait permis de créer un million d’emplois. Telle est la réalité ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
Madame la ministre, quelquefois, en voulant bien faire, on s’expose à un effet boomerang. Ne pas dire la vérité aux Français, c’est se placer dans cette situation.
En définitive, j’aurais donc souhaité que l’on puisse dire la vérité à nos compatriotes, ou alors qu’on leur explique comment financer leur surcroît de dépenses !
M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis. En revanche, priver le FSV de 0,2 point de CSG revient à le mettre en danger. Le FSV est en danger dans la mesure où on lui a retiré des recettes et où il sera davantage sollicité en période de difficultés économiques.
Madame la ministre, j’ai réévalué les comptes, comme vous : en 2012, nous aurons de nouveau 27 milliards d’euros de dettes, auxquels viendront s’ajouter 2,8 milliards d’euros de dettes du FSV.
M. François Autain. Eh oui !
M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis. Nous aurons donc près de 30 milliards d’euros de dettes à rembourser.
M. François Autain. Et comment fera-t-on ?
M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis. Nous devons arrêter de recourir à des expédients pour rembourser une dette dont notre génération n’est pas très fière. Je vous signale que nous remboursons aujourd'hui des feuilles de maladie émises en 1994, l’échéance étant fixée à 2021. Croyez-vous que ce système est viable ? (M. François Autain proteste.)
Si un jour vous êtes dans la majorité, vous ne vous débrouillerez pas mieux dans cette situation, mes chers collègues !
M. François Autain. Qu’en savez-vous ?
M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis. Madame la ministre, il faut dire aujourd'hui la vérité aux Français.
Cela éviterait d’utiliser – pardonnez-moi ce mot, car je ne veux surtout pas être désagréable avec vous – des expédients. Procéder à de tels prélèvements de recettes sur le FSV, je l’ai dit en commission des finances, c’est le triomphe du jeu de bonneteau : on va chercher un peu d’argent là où des excédents sont momentanément enregistrés, et on fera replonger de 800 millions d’euros, dès 2009, un fonds dont les comptes ont été redressés très difficilement !
Je le répète, j’aurais préféré que l’on dise la vérité aux Français, et mon avis est partagé par la majorité de la commission des finances. À partir du moment où il y a une dette à combler, c’est à la CRDS qu’il faut recourir.
Voilà en substance ce que je souhaitais dire en tant que rapporteur pour avis de la commission des finances. Bien évidemment, je suis opposé aux amendements de nos collègues des groupes CRC et socialiste.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Le Gouvernement est défavorable aux amendements nos 96 et 254.
Je ne peux laisser dire que la reprise des déficits par la CADES est une dissimulation de la dette sociale. C’est tout le contraire.
Le Gouvernement prend clairement acte de la situation du régime général, notamment des déficits de la CNAMTS, de la CNAVTS et du FSV, et propose en toute transparence et clarté la seule mesure possible pour y remédier.
Je demande aux auteurs des amendements d’être cohérents : on ne peut pas en même temps refuser que la dette sociale soit reprise par la CADES et souhaiter qu’elle soit financée par des ressources de trésorerie non permanentes.
Or, c’est exactement ce que prévoit l’amendement que le groupe communiste républicain et citoyen a déposé à l’article 30 du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Comment, dans ces conditions, entendez-vous financer la dette sociale ?
Quant au FSV, il faut replacer les choses dans leur contexte. Au 31 décembre 2008, son déficit cumulé atteindra 3,8 milliards d’euros, ce qui pèse sur la trésorerie de l’assurance vieillesse. La CADES reprenant l’intégralité de cette dette, le déficit du FSV sera ramené à 1 milliard d’euros au 31 décembre 2009.
M. François Autain. Autant dire pas grand-chose !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. En 2012, en retenant des hypothèses prudentes sur l’évolution du taux de chômage, la situation du FSV devrait être proche de l’équilibre.
C'est la raison pour laquelle, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous propose de repousser ces deux amendements.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à M. François Autain, pour explication de vote sur les amendements identiques nos 96 et 254.
M. François Autain. Je ne suis pas tout à fait d’accord avec M. le rapporteur pour avis quand il refuse de « latéraliser » le trou de la sécurité sociale.
En effet, si le trou de la sécurité sociale n’est certes ni de gauche ni de droite, les solutions que l’on retient pour le combler sont bien, elles, de droite ou de gauche. Je dirais même que l’absence de solution est toujours de droite !
Depuis que vous êtes au pouvoir, vous ne nous avez jamais apporté de réponse véritablement pérenne pour combler ce trou !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Qu’a fait la gauche au pouvoir pendant des années ?
M. François Autain. Attendez que la gauche revienne au pouvoir et vous verrez !
M. Alain Gournac. On a vu et on a payé !
M. François Autain. D’ailleurs, cela ne saurait tarder si vous continuez comme ça !
Ce qui est certain, c’est que vous creusez le trou, malgré le remboursement du déficit par l’intermédiaire de la CADES jusqu’à la fin de 2007. Vous faites l’impasse sur le déficit de 2008 et sur celui de 2009, et vous êtes incapables de nous dire comment ces dettes seront comblées.
M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis. Les 27 milliards d’euros seront remboursés en 2008 !
M. François Autain. Je ne crois pas que le déficit pour 2008 ait été pris en compte !
M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis. Si, l’exercice 2008 est inclus !
M. François Autain. En tout cas, ce n’est pas le cas pour 2009 !
M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis. Il n’y a pas encore de trou pour 2009, attendez qu’il se crée !
M. François Autain. Certes, le trou de 2009 n’est que potentiel, mais on a trop tendance à faire supporter à la trésorerie des dettes qui devraient être couvertes par l’emprunt. Ce n’est pas admissible !
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 96 et 254.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures vingt-cinq, est reprise à vingt et une heures trente.)
Mme la présidente. La séance est reprise.
8
Décès d’un ancien sénateur
Mme la présidente. Mes chers collègues, j’ai le regret de vous faire part du décès de notre ancien collègue Henri d’Attilio, qui fut sénateur des Bouches-du-Rhône de 1998 à 2004.
9
Financement de la sécurité sociale pour 2009
Suite de la discussion d’un projet de loi
Mme la présidente. Nous reprenons la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009, adopté par l’Assemblée nationale.
Dans la discussion des articles de la troisième partie, nous en sommes parvenus à l’amendement n° 97 tendant à insérer un article additionnel après l’article 10.
Article additionnel après l’article 10
Mme la présidente. L’amendement n° 97, présenté par M. Fischer, Mme David, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 10, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La loi n° 2007-1223 du 21 août 2007 en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat est abrogée.
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. En 2007, Nicolas Sarkozy faisait adopter la mesure phare censée caractériser tout son quinquennat, la loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat, dite loi TEPA : 13 milliards d’euros accordés aux plus riches de notre pays, pour leur permettre de contribuer moins que les autres à l’impôt, notamment grâce au « bouclier fiscal ».
Ainsi, pour l’année 2007, près de 23 000 contribuables ont reçu de la part du Trésor public un chèque d’un montant moyen de 16 000 euros. Quelque temps après, avant que la crise ne surgisse et que l’on soit capable de trouver en une nuit plus de 330 milliards d’euros, on nous présentait les caisses de l’État comme vides ! On sait aujourd’hui que vides, elles le sont quand il s’agit de mener une politique d’emplois, de lancer des grands travaux, notamment environnementaux ; elles sont vides quand il s'agit de protéger les plus faibles contre la crise, vides quand il s'agit d’augmenter les salaires, les pensions, les minima sociaux. Bref, les caisses sont vides quand il s'agit de politiques sociales en direction du plus grand nombre de nos concitoyennes et concitoyens !
C’est la raison pour laquelle nous entendons, par cet amendement, supprimer le dispositif TEPA, qui coûte tout de même 4 milliards d’euros d’exonérations de cotisations sociales, somme non négligeable qui manque cruellement au régime général de la sécurité sociale et correspond à peu de chose près à la moitié de son déficit. Et vous voudriez que l’on se refuse à s’en saisir ?
Monsieur Jégou, vous nous demandiez tout à l’heure quelles recettes nous pouvions produire pour notre sécurité sociale : en voilà une, en tout cas !
Aussi, à l’encontre du discours tenu par le Gouvernement, de l’argent, il y en a ! Seulement, loi après loi, mesure après mesure, vous vous refusez à le partager équitablement, préférant qu’il serve à la spéculation ou aux mécanismes d’exonération d’imposition en général !
Mais, pire encore, cette loi qui devait être favorable à l’emploi – donc aux comptes sociaux – a précipité la crise.
Dans les secteurs principalement marchands, au deuxième trimestre 2008, la France a détruit beaucoup plus d’emplois qu’elle n’en a créés : 12 200 emplois nets ont été détruits. Et, au premier trimestre, elle avait créé 57 400 emplois nets seulement, contre 62 400 au trimestre précédent, soit une décrue de plus de 8 %.
Autrement dit, la loi TEPA, loin d’encourager la création d’emplois, a participé à la relance du chômage : le deuxième trimestre 2008 s’est terminé sur une hausse du chômage de 0,2 % en juin, malgré la flambée des radiations de l’ANPE !
Les exonérations de cotisations sociales de la loi TEPA ont donc contribué à accroître le déficit de la protection sociale : directement, par la baisse des cotisations versées, plus ou moins compensées par l’État – d’ailleurs plutôt moins que plus – et indirectement, mais massivement, par les baisses d’emploi et la pression exercée sur la masse salariale nationale.
Vous prétendez que les exonérations de cotisations sociales jouent en faveur de l’emploi mais, ce faisant, vous accréditez le discours selon lequel ce sont les règles de protection sociale et de solidarité qui coûtent et pèsent sur le prix du travail, faisant ainsi plaisir, évidemment, à M. Dassault. D’ailleurs, lorsque nous parlons de cotisations, vous parlez de charges, oubliant au passage que, si les employeurs contribuent, les salariés le font aussi et à un degré toujours accru, alors que la proportion de la part patronale diminue. Vous oubliez aussi que ces dépenses sociales représentent un atout pour notre pays et notre économie.
Face à la crise spéculative, financière et sociale qui s’annonce, nous avons besoin de la solidarité de tous. C’est pourquoi je vous invite à voter notre amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les équilibres financiers généraux et l’assurance maladie. L’avis de la commission est défavorable : nous n’allons pas remettre en cause ce que nous avons adopté à l’été 2007 avec la loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat.
Nos collègues comprendront que nous ne puissions pas les suivre dans leur démarche.
M. Guy Fischer. On ne comprend pas, même si cela ne nous surprend pas !
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Le Gouvernement est défavorable pour les mêmes raisons. J’ajoute, madame David, que les exonérations de cotisations sociales que vous dénoncez sont intégralement compensées.
M. Guy Fischer. C’est ce qu’on dit !
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 97.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Section 2
Dispositions relatives aux recettes des régimes obligatoires de base et des organismes concourant à leur financement
Articles additionnels avant l’article 11
Mme la présidente. L’amendement n° 255, présenté par M. Cazeau, Mmes Le Texier, Jarraud-Vergnolle, Demontès, Schillinger et Campion, MM. Teulade, Godefroy et Desessard, Mmes Printz et Chevé, MM. Le Menn, Daudigny et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Avant l’article 11, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Lorsqu’une entreprise n’est pas couverte par un accord salarial d’entreprise de moins de deux ans en application de l’article L. 2242-8 du code du travail ou par un accord salarial de branche de moins de deux ans en application de l’article L. 2241-8 même code, le montant de la réduction des cotisations sociales visées à l’article L. 241-13 du code de la sécurité sociale est diminué de 10 % au titre des rémunérations versées cette même année et jusqu’à ce que l’entreprise soit couverte par un nouvel accord.
La parole est à M. Bernard Cazeau.
M. Bernard Cazeau. Nous voulons inciter les entreprises à ouvrir et conclure des accords sur les salaires, comme le prévoit le code du travail. Cet amendement vise à subordonner l’octroi d’exonérations de cotisations sociales à l’existence d’un accord salarial. En cas d’absence d’accord de moins de deux ans, il est proposé une réduction de 10 % des exonérations de cotisations.
Telles sont d’ailleurs les conclusions de la mission d’information commune constituée par l’Assemblée nationale. Nos collègues députés proposent en effet dans leur rapport une première étape, en conditionnant les allégements à l’ouverture de négociations salariales et en les calculant sur la base des rémunérations minimales de branche.
Avec cet amendement, il s’agit bien sûr de lutter contre les entreprises qui ne veulent pas s’engager dans les négociations salariales et de mettre en application les conclusions de ce rapport.
Certaines entreprises font des efforts, d’autres non. Il nous semble important que l’État donne un signal fort et fasse pression pour que des négociations s’engagent et aboutissent à des accords salariaux. La modulation des exonérations de cotisations sociales en fonction du comportement salarial des entreprises serait favorable, à la fois, à la sécurité sociale et à la revalorisation des salaires, qui doit être une priorité dans cette période.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur. M. Cazeau nous a présenté un amendement que son groupe avait déjà déposé lors de la discussion du projet de loi en faveur des revenus du travail, dont notre collègue Isabelle Debré était rapporteur.
Le Sénat s’était déjà prononcé contre cette disposition tendant essentiellement à remplacer le mot « négociation » par le mot « accord » ; il n’a pas évolué dans ses positions depuis l’examen de ce projet de loi.
La commission m’a donc chargé d’émettre un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Le Gouvernement est défavorable à ce mécanisme conditionnel.
Mme la présidente. L’amendement n° 256, présenté par M. Cazeau, Mmes Le Texier, Jarraud-Vergnolle, Demontès, Schillinger et Campion, MM. Teulade, Godefroy et Desessard, Mmes Printz et Chevé, MM. Le Menn, Daudigny et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Avant l’article 11, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Un bilan d’évaluation annuel des dispositifs ciblés d’exonération des cotisations de sécurité sociale est transmis au Parlement avant l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale.
La parole est à M. Bernard Cazeau.
M. Bernard Cazeau. Cette fois-ci, notre collègue rapporteur devrait apprécier la teneur de cet amendement !
Il doit être procédé à l’évaluation régulière des dispositifs d’exonérations ciblés, dont M. Vasselle nous parle souvent, afin d’apprécier leur pertinence au regard des conditions d’emploi et de mesurer les effets d’aubaine pour les entreprises.
Les allégements de cotisations et les dispositifs d’exonérations sociales sont devenus un enjeu majeur de l’équilibre de nos comptes publics. Avec 28,7 milliards d’euros consacrés en 2007 aux allégements généraux et exonérations ciblées et plus de 41 milliards d’euros d’exonérations d’assiette, les politiques d’exonérations sociales représentent un total annuel de près de 70 milliards d’euros, hors allégements ciblés.
Tous les travaux menés ces derniers temps, tant à l’Assemblée nationale qu’au Sénat, ont conclu à la nécessité d’une évaluation et d’un remodelage de certains dispositifs insuffisamment efficaces au regard de leur coût ou suscitant des effets d’aubaine.
La mise en place d’exonérations ciblées doit être précédée d’une étude d’impact. La multiplication des propositions de création d’allégements ou de niches sociales dans différents textes doit être freinée, ce que permettrait sans doute une récapitulation des dispositifs nouveaux dans le cadre des lois de financement de la sécurité sociale. Tel était d’ailleurs l’objectif de nos collègues Alain Vasselle et Nicolas About dans une proposition de loi organique dont nous n’entendons plus parler !
Notre amendement va dans le sens de tous les discours tenus sur ce sujet. Il serait d’actualité et pertinent de l’adopter.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur. Je partage les préoccupations de notre collègue Bernard Cazeau, d’autant plus que je les ai exprimées à plusieurs reprises devant la Haute Assemblée, comme il a bien voulu le rappeler.
Le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012 que nous avons examiné la semaine dernière, contient, dans son article 11, une disposition qui va dans le sens souhaité par M. Cazeau : son amendement est donc satisfait. S’il en était d’accord, je lui proposerais de le retirer.
Si nous étions amenés à constater, l’année prochaine, au moment de l’examen du rapport sur les finances publiques, que le Gouvernement ne respectait ni l’esprit ni la lettre de l’article 11, nous pourrions déposer ensemble un amendement allant dans le sens que vous souhaitez, mon cher collègue.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Monsieur Cazeau, l’amendement n° 256 est-il maintenu ?
M. Bernard Cazeau. Non, je le retire, madame la présidente. Je fais confiance à M. le rapporteur et, si la situation devait évoluer dans un sens que nous réprouvons l’un et l’autre, nous réexaminerions la question l’an prochain.
Mme la présidente. L’amendement n° 256 est retiré.
L'amendement n° 98, présenté par M. Fischer, Mme David, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 11, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au début de la sous-section 2 de la section 1 du chapitre 2 du titre 4 du livre 2 du code de la sécurité sociale, il est inséré un paragraphe 1 ainsi rédigé :
« Paragraphe 1 : Assurance maladie, maternité, invalidité et décès.
« Art. L. 242-4-4. - Le taux de la cotisation est modulé pour chaque entreprise selon la variation de sa masse salariale dans la valeur ajoutée globale. Le ratio ainsi obtenu est affecté de coefficients fixés chaque année par décret. Ces coefficients sont fixés de telle manière que les comptes prévisionnels des organismes de sécurité sociale et de l'UNEDIC soient en équilibre.
« Un autre décret détermine les modalités selon lesquelles le rapport salaire/valeur ajoutée est pris en compte. Le comité d'entreprise ou, à défaut, les délégués du personnel, sont associés au contrôle de ce ratio. »
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Pour les sénatrices et sénateurs communistes, il est important de revoir l’assiette des cotisations et les règles qui existent aujourd’hui, car, comme le souligne la Cour des comptes dans son dernier rapport, les cotisations participent davantage d’une logique assurantielle que d’une logique redistributive.
Cette logique est précisément la conséquence des exonérations de cotisations sociales et il faudra bien le reconnaître. Voilà comment, d’exonération en exonération, vous préparez nos concitoyennes et concitoyens à un régime totalement privatisé !
Voila également comment, petit à petit, vous avez retiré toute responsabilité sociale aux entreprises, et votre proposition de généralisation de la taxe finançant le Fonds de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante, le FCAATA, en est une nouvelle preuve. Mais nous aborderons ce sujet ultérieurement.
D’ailleurs, cela se caractérise avant tout par la tentation qu’ont les gouvernements de droite de transférer des pans toujours plus grands du financement de la protection sociale des entreprises vers les assurés, particulièrement au travers de la CSG. Cela participe de la baisse du prix du travail. Mais, curieusement, les salariés concernés ne voient pas leurs salaires augmenter.
C’est pour cela qu’il nous apparaît important d’imaginer un mécanisme visant à moduler le taux de cotisations sociales des entreprises en fonction de la part que représentent les salaires dans celles-ci. Nous proposons de permettre aux entreprises qui créent des emplois de cotiser proportionnellement moins que celles qui détruisent l’emploi, ou maintiennent les salariés dans la précarité.
Il s’agit de partir d’un postulat simple : soit les exonérations totales ou partielles de cotisations ont pour objet de faciliter l’emploi des salariés les moins formés en échange d’une juste rémunération, soit il s’agit de permettre aux entreprises les moins scrupuleuses de bénéficier d’une main-d’œuvre à moindre coût.
Pour ce qui nous concerne, nous avons fait notre choix ; aussi, je vous invite à voter cet amendement qui privilégie les entreprises vertueuses.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur. Madame David, votre amendement présente un lien de parenté étroit avec celui qu’avait défendu notre collègue Serge Dassault sur le coefficient d’activité. (Mme Annie David s’exclame.)
M. Alain Vasselle, rapporteur. Je me demande si vous ne vous êtes pas concertés. (Protestations sur les travées du groupe CRC.) Serge Dassault n’ayant pas pu avoir satisfaction immédiatement, vous avez en somme pris le relais.
Mme Annie David. Vous savez très bien que ce n’est pas vrai ; c’est un coup bas que vous portez là !
M. Alain Vasselle, rapporteur. Non, je ne me le permettrais pas !
Cela étant, madame David, je vous demande de retirer votre amendement, comme l’a fait M. Dassault, sur la base des informations que nous vous avons transmises et des engagements que nous avons pris.
Reconnaissez qu’il existe un lien étroit entre votre amendement et celui de M. Dassault. J’ai dit que ce sujet nécessitait une expertise et M. Dassault a accepté de retirer son amendement. Je vous invite à faire de même.
Si nous créons un groupe de travail entre la commission des finances et la commission des affaires sociales pour réfléchir sur ce sujet, vous y serez, bien entendu, associée et, sur le fondement des études qui auront été réalisées, nous verrons bien s’il y a lieu d’étudier plus avant votre proposition.
Donc, sous le bénéfice de ces observations, je réitère, madame David, ma demande de retrait.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Moduler le taux de cotisation en fonction de la masse salariale des entreprises correspond tout à fait à la philosophie de l’amendement défendu hier par Serge Dassault.
Après lui avoir objecté que les études préalables n’allaient pas dans le sens qu’il envisageait et qu’une telle disposition entraînerait des effets pervers pour de nombreux secteurs de l’économie, en particulier pour l’industrie automobile, je me suis néanmoins déclarée ouverte à la poursuite de la réflexion sur cette question. Je le confirme aujourd'hui, madame David.
Mme la présidente. Madame David, l'amendement n° 98 est-il maintenu ?
Mme Annie David. Je ne vais pas retirer cet amendement. Je participerai, si j’y suis invitée, à ce groupe de travail afin de réfléchir à une proposition qui pourrait être acceptable. Si cependant je constate que l’orientation qui est prise ne correspond pas à ce que j’essaie d’exprimer dans cet amendement, je quitterai le groupe de travail.
Vous savez très bien que notre amendement n’est pas le même que celui de M. Dassault, même si, comme vous l’avez dit, madame la ministre, ils participent du même esprit, puisque nous demandons effectivement une modulation des cotisations des entreprises en fonction de leur politique salariale et de l’emploi dans l’entreprise. Le résultat est tout de même quelque peu différent de celui que nous proposait M. Dassault.
Je maintiens donc cet amendement, et, si vous me conviez à participer au groupe de travail, peut-être pourrons-nous creuser la question.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Ce n’est pas à nous de vous inviter : il appartiendra à votre groupe de désigner ses propres représentants !
Mme Annie David. S’il est invité…