M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle, rapporteur.

M. Alain Vasselle, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les équilibres financiers généraux et l’assurance maladie. Monsieur le président, madame, monsieur le ministre, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, permettez-moi tout d’abord de vous faire remarquer que, contrairement à la manière dont est organisé l’examen du projet de loi de finances, nous entendons successivement cinq ministres dans la discussion générale du projet de loi de financement de la sécurité sociale, avant d’examiner chacune des branches.

Je me demande, monsieur le président, monsieur le président de la commission des affaires sociales, si nous ne devrions pas appeler la commission des finances à s’inspirer de la manière dont travaille la commission des affaires sociales : cela nous permettrait de gagner du temps !

M. Michel Mercier. Nous voilà bien partis ! (Sourires.)

M. le président. Monsieur le rapporteur, permettez-moi de vous interrompre pour vous dire que c’est l’un des thèmes du groupe de travail « révision constitutionnelle et réforme du règlement » retenus ce matin, sur l’insistance du président de la commission des affaires sociales, M. Nicolas About.

M. Alain Vasselle, rapporteur. Je ne peux que m’en réjouir, car, chacun le sait – je me plais d’ailleurs souvent à le rappeler –, le budget de la sécurité sociale dépasse quand même 400 milliards d'euros, alors que le budget de l’État s’élève à quelque 275 milliards d'euros.

M. Michel Mercier. Rajoutez-en une couche ! (Nouveaux sourires.)

M. Alain Vasselle, rapporteur. Il est bon que certains membres de la commission des finances l’entendent ! Lorsque d’aucuns évoquent le déficit abyssal de la sécurité sociale et les dettes incommensurables de cette dernière, j’aime à rappeler que, si la dette de la sécurité sociale qui est transférée à la Caisse d’amortissement de la dette sociale, la CADES, s’élève à plus de 100 milliards d'euros, …

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Une paille !

M. Alain Vasselle, rapporteur. … celle de l’État, elle, atteint environ 1 200 milliards d'euros ; il faut bien relativiser tout cela, mes chers collègues !

M. Michel Mercier. Et une troisième couche ! (Sourires.)

M. Alain Vasselle, rapporteur. Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 s’inscrit – les ministres se sont plu à le rappeler – dans un contexte extrêmement particulier.

La crise financière et économique mondiale vient sensiblement remettre en cause les prévisions que le Gouvernement avait arrêtées avant la fin de l’été. Nous devons reconnaître ici la volonté de transparence et de lisibilité dont le Gouvernement a souhaité faire preuve, en révisant l’ensemble des éléments qui ont conduit à l’établissement du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Cela amènera bien entendu chacun d’entre nous à admettre que, si les effets de la crise se trouvent confirmés, le point d’équilibre a peu de probabilités d’être atteint en 2012 et que le déficit attendu pour la fin de l’année 2009 sera légèrement accentué par rapport à nos prévisions ; je donnerai quelques chiffres à ce sujet tout à l’heure.

Une première analyse à chaud me permet de vous dire que ce retour de déficits « à deux chiffres » n’est pourtant pas inéluctable. Il doit, à mon sens, nous inciter plus que jamais à réformer en profondeur et de façon pérenne notre système de protection sociale, auquel nos concitoyens comme nous-mêmes sommes très attachés et qu’il est impératif de préserver.

Avant de vous faire part des observations de la commission des affaires sociales sur la situation générale des comptes, je voudrais dire quelques mots sur le contenu du projet de loi, et d’abord sur les équilibres.

J’aborderai ensuite plus en détail le volet « assurance maladie » du texte.

M. le président. Monsieur le rapporteur, pardonnez-moi de vous interrompre, mais il me faut proclamer les résultats du scrutin pour l’élection de deux vice-présidents du Sénat.

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale de financement de la sécurité sociale pour 2009
Discussion générale (interruption de la discussion)

6

Élection de deux vice-présidents du Sénat

M. le président. Mes chers collègues, voici le résultat du scrutin pour l’élection de deux vice-présidents du Sénat :

Nombre de votants 320
Bulletins blancs ou nuls .38
Nombre de suffrages exprimés 282
Majorité absolue des suffrages exprimés 142

Ont obtenu :

- M. Jean-Léonce Dupont : 222 voix ;

- M. Guy Fischer : 187 voix.

MM. Jean-Léonce Dupont et Guy Fischer ayant obtenu la majorité absolue des suffrages exprimés dès le premier tour, je les proclame vice-présidents du Sénat. (Applaudissements.)

Maintenant que nous connaissons le résultat du scrutin pour l’élection des deux vice-présidents, j’invite les présidents des groupes et le délégué des non-inscrits à venir me rejoindre au Cabinet de départ pour prendre acte des candidatures des groupes pour les quatre sièges de secrétaires à pourvoir.

(M. Roger Romani remplace M. Gérard Larcher au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. Roger Romani

vice-président

7

Financement de la sécurité sociale pour 2009

Suite de la discussion d'un projet de loi

M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009, adopté par l’Assemblée nationale.

La parole est à M. Alain Vasselle, rapporteur, pour la suite de la présentation de son rapport sur les équilibres financiers généraux et l’assurance maladie.

M. Alain Vasselle, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les équilibres financiers généraux et l’assurance maladie. Je tiens tout d’abord à adresser mes félicitations aux heureux élus.

J’indiquais tout à l’heure que je dirai quelques mots sur les équilibres, puis que j’aborderai plus en détail le volet « assurance maladie » du projet de loi.

L’année 2007, pour laquelle nous allons voter des tableaux d’équilibre définitifs, a été une année de dérapage des comptes, en dépit de la bonne tenue des recettes. Les dépenses de la branche vieillesse ont progressé de plus de 6 %, et l’objectif national des dépenses d’assurance maladie, l’ONDAM, a été dépassé de plus de 3 milliards d’euros. Au total, le déficit s’établit à 9,5 milliards d’euros.

En 2008, le déficit devait être stabilisé à 8,9 milliards d’euros, grâce une nouvelle fois à la bonne tenue des recettes. Il n’en sera pas tout à fait ainsi pour les raisons que j’ai expliquées tout à l’heure. En effet, le déficit de la branche vieillesse s’est dégradé de plus de 600 millions d’euros par rapport aux prévisions initiales pour atteindre cette année 5,7 milliards d’euros, c'est-à-dire beaucoup plus que celui de la branche maladie. La progression de l’ONDAM a, en revanche, été contenue –  Mme Bachelot-Narquin l’a rappelé tout à l’heure – à 3,3 %, grâce aux effets conjugués du plan d’économies et de la mise en place des franchises.

L’exercice 2009, quant à lui, poursuit l’effort de redressement : si aucune mesure n’était prise, mes chers collègues, le déficit serait non pas de 8,6 milliards d’euros mais bien de 15 milliards d’euros.

Pour ce faire, le Gouvernement, avec nous qui le soutenons, agira sur trois leviers : l’assainissement des comptes, dont je vous reparlerai dans un instant, la maîtrise des dépenses, sur laquelle a insisté plus particulièrement M. Woerth, et la sécurisation des recettes.

En ce qui concerne la maîtrise des dépenses, environ 3 milliards d’euros d’économies sont prévus, dont une économie d’1 milliard d’euros réalisée mécaniquement au titre d’une économie de frais financiers, du fait du transfert à la CADES de la dette accumulée, et une économie de 2 milliards d’euros sur les dépenses qui devra être obtenue par une meilleure maîtrise des dépenses.

L’ONDAM est fixé à 157,6 milliards d’euros pour 2009, soit un taux de progression de 3,3 %, identique à celui qui a été constaté sur l’exercice 2008. C’est un objectif qui nous paraît raisonnable et atteignable dès lors que les efforts de mobilisation des marges d’efficience qui existent dans le domaine des soins de ville, comme à l’hôpital ou dans la gestion des risques, sont réellement mis en œuvre.

En matière de recettes, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 comporte, outre une prévision de croissance de plus en plus incertaine mais naturellement déterminante pour la sécurisation des recettes, deux volets.

Le premier volet est le redéploiement de recettes au sein de la sphère sociale, pour 1,7 milliard d’euros, essentiellement au profit de la branche vieillesse, avec le transfert d’ici à 2011 de la branche famille vers la branche vieillesse de l’intégralité des majorations de pension pour enfants – André Lardeux en parlera certainement tout à l’heure – et une hausse de la cotisation vieillesse gagée – du moins, nous l’espérons – sur une baisse de la cotisation d’assurance chômage.

Je ne sais si le Gouvernement, sur ce point, maintient le même niveau de basculement que ce qui avait été envisagé dans le cadre de la réforme Fillon sur les retraites, mais il y a fort à parier, mes chers collègues, que, compte tenu de la dégradation économique, nous ne puissions pas atteindre dès 2009 le basculement au niveau espéré.

Le second volet est constitué par les recettes nouvelles pour 1,4 milliard d’euros, dont, d’une part, 1 milliard d’euros qui sera sollicité auprès des organismes complémentaires et, d’autre part, 400 millions d’euros au titre du forfait social de 2 % sur un certain nombre d’assiettes exemptées de cotisations sociales, notamment l’intéressement, la participation, l’épargne salariale et les retraites supplémentaires.

Ce cadre général étant posé, je voudrais faire deux séries d’observations, en revenant sur ce que nous avions dit, au mois de juillet dernier, lors du débat d’orientation des finances sociales. Nous avions alors identifié, d’une part, trois questions à résoudre de manière urgente, et, d’autre part, la nécessité d’engager rapidement un certain nombre de réformes à caractère plus structurel.

Le Gouvernement a en partie réglé les trois problèmes que nous estimions urgents avant l’été, et sur lesquels, je vous le rappelle, nous avons émis de nombreuses critiques au cours des dernières années.

Le premier problème qui a été réglé – et je vous remercie, monsieur Woerth, d’avoir tenu les engagements que vous aviez pris dès votre entrée en fonctions comme ministre des comptes publics – est celui du transfert à la CADES de 27 milliards d’euros, au titre des branches maladie et vieillesse et du fonds de solidarité vieillesse, le FSV.

Je vous rappelle, mes chers collègues, que, conformément à l’obligation organique, un transfert simultané de ressources doit être effectué à la CADES pour ne pas allonger la durée de vie de la dette et ne pas la faire supporter aux générations futures.

Pour ce faire, le Gouvernement a choisi la solution qui, si elle n’est peut-être pas la meilleure, est en tout cas celle qui lui est apparue la moins mauvaise : elle consiste à opérer un prélèvement de 0,2 point de CSG sur les recettes du FSV et à l’affecter à la CADES. Cela aura pour effet collatéral de rendre le fonds de solidarité vieillesse de nouveau déficitaire, à moins que la conjoncture économique ne devienne excellente, auquel cas nous pourrions au moins retrouver l’équilibre, à défaut de réaliser des excédents.

À titre personnel, comme je l’ai indiqué lors des réunions de la commission à la fois devant les ministres – notamment Éric Woerth – et mes collègues, je regrette ce montage, même s’il assure à la CADES une ressource dynamique.

Il m’aurait paru plus simple, cohérent et lisible de choisir la solution qui avait été proposée par M. Yves Bur à l'Assemblée nationale, c'est-à-dire majorer la CRDS, recette exclusive de la CADES, de 0,2 point, quitte à diminuer le taux de la CSG si l’on voulait éviter d’accroître les prélèvements globaux. Je regrette que le Gouvernement n’ait pas souhaité retenir cette solution.

Mais, dans le cadre de l’inévitable toilettage auquel il faudra procéder entre le FSV, les différentes branches et la CADES, peut-être aurons-nous l’occasion de revoir l’ensemble de la tuyauterie de cette usine à gaz que nous n’avons cessé de dénoncer depuis la création du fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale, le FOREC, aujourd’hui supprimé.

Le deuxième problème traité, du moins en partie, concerne le fonds de financement des prestations sociales des non-salariés agricoles, ou FFIPSA, que connaît parfaitement notre collègue Jean-Marc Juilhard.

La suppression de ce fonds, qui assure le financement du régime des exploitants agricoles, devrait intervenir le 1er janvier 2009. Sa dette accumulée, qui s’élève à 7,5 milliards d’euros, sera reprise par l’État, ce qui va augmenter d’autant son déficit budgétaire. La branche maladie sera intégrée financièrement à la Caisse nationale de l’assurance maladie, la CNAM, à laquelle sera transférée, au titre de la compensation de cette dépense nouvelle qui sera de l’ordre d’environ 1,3 milliard d’euros, la taxe sur les véhicules de société.

Monsieur le ministre, j’ai cru comprendre que vous aviez accepté, lors de la discussion du PLFSS à l'Assemblée nationale, de compenser les 100 millions d’euros manquants pour parvenir à 1,3 milliard d’euros en transférant à la CNAM une partie des droits de consommation sur les tabacs.

La branche vieillesse restera, quant à elle, gérée par la CCMSA, la caisse centrale de la mutualité sociale agricole, et le traitement de son déficit, qui représente un flux de 1,5 milliard d’euros par an, devrait intervenir en 2010. Pouvez-vous nous en dire plus que les propos que vous avez tenus tout à l’heure, par lesquels vous vous contentiez d’indiquer que le problème sera revu en 2010 ? Peut-être avez-vous déjà quelques idées sur la manière dont ce problème pourrait être traité ?

La troisième question a trait à la clarification des relations entre l’État et la sécurité sociale.

Monsieur le ministre du budget, il faut reconnaître que les efforts que vous avez menés ont abouti à des résultats significatifs, notamment par une meilleure budgétisation des besoins. Pour l’année 2008 – et ce sera encore mieux fait en 2009 –, ont été budgétisés les besoins pour les prestations versées pour le compte de l’État – l’allocation aux adultes handicapés, l’aide médicale de l’État, l’allocation de parent isolé – et la compensation des exonérations ciblées.

Mais ces efforts n’ont pas totalement empêché la reconstitution d’une dette de l’État à l’égard de la sécurité sociale, qui est évaluée pour les exercices 2007 et 2008 à 3,5 milliards d’euros pour le régime général et à 1 milliard d’euros pour les autres régimes.

Monsieur le ministre, vous avez indiqué tout à l’heure que, dans le cadre d’un prochain collectif, vous honoreriez, à hauteur d’1 milliard d’euros, au moins une partie de ces dettes, notamment celles qui concernent les autres régimes. Il restera donc à faire un effort de 3,5 milliards d’euros à l’occasion d’un prochain collectif ou l’année prochaine, lorsque vous disposerez de meilleures marges de manœuvre sur le plan budgétaire.

En revanche, les allégements de charges sociales sont correctement compensés par le panier fiscal prévu en loi de finances, au titre tant des allégements dits Fillon, soit 23,4 milliards d’euros, que de ceux qui sont liés au dispositif d’exonération des heures supplémentaires adopté dans le cadre de la loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat, soit 3,14 milliards d’euros.

Monsieur le ministre, je vous adresse un satisfecit – décidément vous en recevez beaucoup ! –, car nous ne pouvons que nous réjouir du respect de la parole donnée devant la Haute Assemblée. Je ne doute pas que les engagements que vous avez pris tout à l’heure et au moment du débat sur les prélèvements obligatoires et les finances publiques donneront lieu à des propositions concrètes à l’occasion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2010.

J’en viens à ma seconde série d’observations sur les réformes à caractère plus structurel.

Premièrement, pour l’assurance maladie, il faudra engager une véritable réforme de l’hôpital : je prêche des convaincus ; en tout cas, j’en suis certain, Mme la ministre en fait partie !

Mes chers collègues, comme vous avez pu le constater en examinant le PLFSS pour 2009, peu de dispositions concernent l’hôpital. Mme la ministre a mentionné tout à l’heure les efforts conduits en ce qui concerne la mise sous entente préalable des hôpitaux qui ne développent pas l’ambulatoire.

Je remercie le Gouvernement d’avoir suivi et amplifié le mouvement que nous avions nous-mêmes lancé au Sénat par la voie d’amendements tendant à développer l’ambulatoire à l’hôpital plutôt que l’intra-hospitalier.

Madame la ministre, il me semble que le Gouvernement réserve les réformes pour le projet de loi « Hôpital, patients, santé, territoires », que certains auraient souhaité voir examiner en amont du PLFSS. Même si nous l’examinerons en aval, il n’est jamais trop tard pour bien faire ! Demain, nous aurons un débat thématique sur « l’hôpital en question », et chacun pourra s’exprimer sur le sujet. Il y a certes des marges de progrès indéniables à réaliser. Il faudra également mener une réflexion approfondie sur la prise en charge des affections de longue durée, les ALD.

Deuxièmement, en ce qui concerne la branche vieillesse, je ne développerai pas mon propos, laissant le soin à Dominique Leclerc de vous en parler. Comme je l’ai déjà indiqué, en termes de déficit, la branche vieillesse a dépassé la branche maladie, qui était la première branche déficitaire. C’est la démonstration que la branche maladie a su mener les efforts que nous attendions d’elle et que nous maîtrisons mieux les déficits, dont la progression est en très net ralentissement. En revanche, ce déficit a été très rapidement rattrapé par celui de la branche vieillesse.

Le rendez-vous de 2008 doit se traduire par des mesures concrètes ; nous en débattrons certainement tout à l’heure avec les fameuses dates couperet pour l’âge de départ à la retraite et le plan imaginé pour le maintien au travail des seniors. Une autre série de mesures sera également nécessaire pour tendre, à terme, vers l’équilibre.

Troisièmement, il convient d’assurer un financement durable de la protection sociale.

Pour faire face à des dépenses croissantes, notamment en matière de santé et de vieillesse – cette tendance ne pourra d’ailleurs pas être inversée et sera au mieux infléchie –, il manque à la sécurité sociale une source de financement dynamique.

Il est donc impératif non seulement de préserver les ressources actuelles, mais aussi de réfléchir à la mobilisation de nouvelles ressources. Sur ce dernier point, je constate que, une nouvelle fois, les propositions faites par la commission des affaires sociales au cours des derniers mois sont reprises par le Gouvernement dans ce PLFSS.

Mes chers collègues, je vous rappelle en effet que, en 2006, nous avions proposé une taxation des stock-options. À l’époque – certes, monsieur le ministre, vous n’étiez pas aux commandes du ministère des comptes publics ! –, on nous avait opposé toutes sortes d’arguments ; or ce principe a été voté l’année dernière.

De même, voilà un an, nous avons proposé l’instauration d’une flat tax – monsieur le ministre, vous étiez alors en fonctions ! –, c’est-à-dire d’une contribution forfaitaire d’un faible montant sur l’ensemble des niches sociales : là encore, on nous a fait valoir que la question était prématurée. Or le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 prévoit cette mesure, avec la création du forfait social au taux de 2 %, exactement celui que nous avions proposé. (Sourires.) Cependant, son champ est limité ; c'est la raison pour laquelle je proposerai par voie d’amendement d’en élargir l’assiette. Nous aurons donc l’occasion d’en débattre demain.

Pour continuer dans cette voie de la sécurisation des recettes et ouvrir des perspectives, la commission des affaires sociales vous présentera un certain nombre d’amendements. Ces derniers auront notamment pour objet d’étendre le forfait social à l’ensemble de l’assiette aujourd’hui exemptée de cotisations et charges sociales, de mieux cibler le bénéfice des allégements généraux de charges sociales, de prévoir une hausse des droits de consommation sur les tabacs, à l’instar de ce qui est prévu pour les droits sur les alcools. Nous aurons l’occasion de reparler de ce point, que j’ai déjà développé lors du débat sur les comptes publics.

Par ailleurs, conformément à notre souci permanent de renforcer l’autonomie financière de la sécurité sociale, je vous proposerai de supprimer l’article 22 du projet de loi. Monsieur le ministre, vous avez indiqué comprendre et partager notre souci, tout en avançant de bonnes raisons pour nous inciter à retirer cet amendement. (Mme Annie David s’esclaffe.)

Je voudrais simplement faire remarquer au Gouvernement, et à vous en particulier, monsieur Woerth, qu’il faudrait essayer de mettre un frein à l’inflation de ces non-compensations. En effet, trois mesures n’étaient pas compensées voilà deux ans ; au nombre de cinq l’année dernière, elles sont sept, cette année. Si l’on continue ainsi, il y en aura peut-être dix l’année prochaine, et onze, voire douze l’année suivante ! Il serait donc intéressant de pouvoir chiffrer précisément l’absence de compensation de l’ensemble de ces mesures, ce que personne n’est capable de faire : certains avancent un montant de plusieurs centaines de millions d’euros, d’autres estiment que c’est moins.

Je voudrais maintenant évoquer le volet assurance maladie de ce texte.

La première mesure concerne la place réservée aux organismes d’assurance maladie complémentaire dans le système de santé. Un consensus s’est dégagé depuis 1999, et la création de la couverture maladie universelle complémentaire, la CMU-c, sur la nécessité de favoriser l’intervention de ces organismes pour améliorer le remboursement des dépenses de santé engagées par les assurés. La loi de 2004 a prévu plusieurs mesures à cet effet. Mais, si la création des contrats responsables est une réussite, je ne crois pas que l’on puisse en dire autant des dispositions associant les assureurs complémentaires à la politique de gestion du risque et à la vie conventionnelle.

Le PLFSS pour 2009 propose de faire évoluer cette situation et d’associer les organismes complémentaires, par l’intermédiaire de l’UNOCAM, qui les représente, aux négociations tarifaires avec les professionnels de santé.

Quelle appréciation peut-on porter sur cette mesure ?

Je note que le Gouvernement a fait preuve de pragmatisme en prenant cette initiative.

Les organismes complémentaires seront donc partie prenante à la négociation tarifaire entre les professions de santé et l’assurance maladie ; ils ne seront plus des « payeurs aveugles » et pourront déterminer, dans ce cadre, le montant de leur participation à la prise en charge des honoraires et les actions d’optimisation des dépenses qui leur semblent nécessaires. Je le rappelle, aucun transfert de compétence de la sécurité sociale vers les organismes complémentaires n’est prévu.

La prise en charge des dépenses de soins dentaires et d’optique, concernés en priorité, devrait donc être améliorée.

Madame la ministre, permettez-moi toutefois, d’observer que nous ne savons pas encore si les conventions signées par l’UNOCAM s’imposeront à toutes les sociétés d’assurance, mutuelles et instituts de prévoyance représentés par l’UNOCAM. Il serait donc intéressant que vous puissiez nous éclairer sur ce point.

Les mesures relatives à la maîtrise médicalisée des dépenses de santé constituent un autre volet particulièrement important de ce PLFSS. L’année dernière, nous avions élargi les missions de la Haute Autorité de santé, en autorisant cette dernière à émettre des avis et recommandations médico-économiques sur les stratégies de soins, de prescriptions ou de prises en charge les plus efficientes.

À la demande du Gouvernement, des référentiels pour la prise en charge des hypertenseurs ont été publiés ; d’autres sont attendus prochainement.

Le PLFSS pour 2009 accentue cette démarche avec l’encadrement de la prise en charge des actes réalisés en série et la définition de modalités de régulation de certaines catégories de médicaments prescrits à l’hôpital. Nous ne faisons ainsi que nous inspirer de méthodes utilisées chez nos voisins, qui ont porté leurs fruits, ainsi que nous avons pu nous en rendre compte, notamment lors d’un déplacement à Berlin pour le compte de la mission d’évaluation et de contrôle de la sécurité sociale.

Cette recherche de l’efficience des dépenses de santé permettra de poursuivre et d’amplifier la maîtrise médicalisée des dépenses, mais sans rationner les soins, contrairement à ce que j’ai pu entendre ici ou là.

La définition d’une stratégie dans le domaine des systèmes d’information est la troisième mesure de ce PLFSS qui me semble particulièrement importante.

La création d’un opérateur unique, l’agence des systèmes d’information de santé partagés, devrait renforcer la cohérence de l’action publique en ce domaine. Cette agence aura pour mission non seulement de relancer la mise en œuvre du dossier médical personnel, ou DMP, en panne depuis un certain temps – mon collègue Jean-Jacques Jégou connaît parfaitement le sujet puisqu’il a rédigé un rapport à cet égard –, mais surtout de faciliter la communication et le partage d’informations entre les professionnels.

Il s’agit d’un projet ambitieux, qui transformera les pratiques médicales dans les années à venir. Les difficultés rencontrées avec le DMP doivent nous rendre prudents, mais la création de cette nouvelle agence devrait permettre de développer de nouveaux outils informatiques à la disposition des professionnels et des établissements de santé. Madame la ministre, je ne peux que vous féliciter très chaleureusement de votre initiative, qui constitue une avancée très importante dans un domaine où une action coordonnée des autorités de tutelle est indispensable.

Mes chers collègues, je terminerai mon intervention par quelques mots sur les questions hospitalières.

Je le répète, le PLFSS pour 2009 est moins riche que les précédents sur ce thème. Les nouvelles modalités d’intervention auprès des établissements dont la situation financière se dégrade et celles qui prévoient la certification des comptes permettront aux autorités de tutelle d’agir plus vite qu’elles ne le peuvent aujourd’hui. Cela constitue une évolution très positive. Je présenterai d’ailleurs des amendements visant à compléter ces mesures. Je note que l’établissement d’Ajaccio a déjà été placé sous administration. D’autres suivront peut-être. En attendant, c’est un avertissement lancé à ceux qui n’accompliraient pas les efforts que nous attendons d’eux.

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Très bien !

M. Alain Vasselle, rapporteur. Les nouveaux retards constatés dans la mise en œuvre de la tarification à l’activité, ou T2A, en matière de transmission directe des factures et d’identification des médecins hospitaliers jettent, en revanche, de mon point de vue, un doute sur la capacité des établissements de santé à s’approprier de nouveaux outils de gestion ; mais c’est un sujet que nous aurons tout le temps d’explorer demain. Là également, l’inertie a joué à plein. Je suis en effet étonné que nous n’ayons pas découvert plus tôt les problèmes techniques liés à ce dispositif.

Mes chers collègues, tels sont les éléments que je voulais vous apporter sur le sujet extrêmement important que sont les équilibres financiers généraux et l’assurance maladie. (Applaudissements sur les travées de lUMP et de lUnion centriste.)

Discussion générale (interruption de la discussion)
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