M. Philippe Dallier, rapporteur pour avis. Nous n’en avons jamais l’occasion ! C’est cela, la difficulté !
M. Dominique Braye, rapporteur. Je dois dire en toute amitié à nos collègues socialistes et communistes qu’ils ne nous y aident pas ! (Exclamations sur les travées du groupe CRC.)
M. Daniel Raoul. Cela n’apporte rien au débat !
M. le président. Mes chers collègues, une heure a été consacrée à la présentation des arguments de chacun, durant laquelle vous avez tous fait montre d’une grande compétence et d’un grand talent. La discussion des amendements doit maintenant gagner en brièveté.
La parole est à Mme Odette Terrade, pour présenter l’amendement no 199.
Mme Odette Terrade. Au cours de la discussion du projet de loi portant engagement national pour le logement, les députés de la majorité avaient déjà tenté de porter un coup à l’article 55 de la loi SRU, relayés au Sénat par M. le rapporteur.
Vous indiquiez alors, cher collègue rapporteur, que l’intégration des logements en accession sociale à la propriété dans le quota des 20 % ne vous semblait pas illégitime. Heureusement, nous constatons aujourd’hui que vous avez été sensible à nos arguments et que vous avez su revoir votre jugement.
Comme celui qui nous est proposé aujourd’hui, le dispositif prévu à l’époque consistait à mélanger de manière abusive deux choses bien différentes : l’accession sociale à la propriété et le logement social, en opposant honteusement les deux !
Il est tout à fait légitime et nécessaire de disposer d’un outil d’accession sociale à la propriété. Cependant, celle-ci ne doit pas se réaliser au détriment du logement social.
Comme aujourd’hui l’article 17 du texte que nous examinons, l’article 5 bis B du projet de loi ENL, qui résultait d’un amendement du président de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire de l’Assemblée nationale, M. Patrick Ollier, avait pour seul et unique objet de permettre aux maires de ne pas satisfaire à leurs obligations de construction de logements sociaux. La démarche semblait assez limpide au regard de la situation de M. Ollier, élu d’une ville, Rueil-Malmaison, qui comptait un parc de logements de 20 029 résidences principales, dont 5 829, c’est-à-dire 18,18 %, seraient assimilables à des logements sociaux. Bien sûr, d’autres communes des Hauts-de-Seine ou d’ailleurs étaient encore plus éloignées du seuil de 20 %, ainsi que le rappelait tout à l’heure ma collègue Évelyne Didier, parlant au nom de Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
La ficelle était donc un peu grosse ; même, elle indiquait clairement les intentions réelles de l’auteur de l’amendement. Cette fois, c’est le Gouvernement qui a décidé d’intégrer directement dans son projet de loi les dispositions attentatoires à l’article 55 de la loi SRU.
La situation n’a pas changé puisque près de la moitié des communes concernées par la loi n’ont pas respecté les obligations fixées à l’article 55. Cependant, en adoptant entre-temps la loi DALO, vous vous êtes engagés, mes chers collègues, à garantir à nos concitoyens le droit au logement, c’est-à-dire, concrètement, à leur fournir un logement décent et adapté. Comment comptez-vous faire si vous allégez les règles destinées à favoriser la construction de logements sociaux ?
Dans son rapport de septembre, le comité de suivi de la mise en œuvre du droit au logement opposable indique que le taux élevé de non-respect de la loi, sept ans après son adoption, entrave le développement de la production de logements locatifs sociaux, pourtant indispensable à la mise en œuvre du droit au logement opposable ; de ce fait, celui-ci se trouve remis en cause !
Le comité de suivi annonce que les recours sont déjà suffisamment nombreux pour que l’on puisse affirmer que ces relogements vont conduire, dans les départements « tendus », à demander au parc des organismes de logement social d’accroître la proportion de ménages en difficulté qu’il accueille.
Avec l’article 17, le Gouvernement accentuera le phénomène de concentration de logements sociaux sur certains territoires et portera un coup d’arrêt à la mixité sociale en donnant aux maires récalcitrants les moyens de ne pas accueillir sur leurs communes les populations les plus en difficulté.
Pour toutes ces raisons, et parce que l’article 17 représente une véritable opération de démantèlement de la notion de logement social, nous vous demandons, mes chers collègues, de voter sa suppression.
M. le président. La parole est à M. Michel Mercier, pour présenter l’amendement n° 549.
M. Michel Mercier. J’ai déjà présenté cet amendement en intervenant sur l’article et vous connaissez mon analyse, qui n’a rien de dogmatique.
Aujourd’hui, location et accession sont bien distinctes. Si Mme la ministre veut fixer un objectif en matière d’accession, nous voterons l’amendement qu’elle ne manquera pas de déposer à cet effet. Pour l’instant, nous ne voulons pas limiter la location.
M. le président. La parole est à M. Pierre Jarlier, pour présenter l’amendement no 595 rectifié bis.
M. Pierre Jarlier. Il me semble prématuré de comptabiliser dans le quota de 20 % requis les logements en accession sociale à la propriété tant que toutes les communes concernées par l’article 55 de la loi SRU n’auront pas rempli leurs obligations.
Nous avons déjà pris ici même une position claire sur le sujet, et ce à deux reprises : lors du débat sur la loi portant engagement national pour le logement, en nous opposant à une disposition qui avait été votée à l’Assemblée nationale, puis, plus récemment, lors du débat sur la loi DALO, en étendant même le champ d’application de cet article 55 à de nouvelles communes.
Par ailleurs, s’il est vrai que le public accédant social à la propriété peut être dans certains cas considéré comme le même que celui qui est éligible au logement social locatif, il faut bien reconnaître que la situation de ces familles au regard de l’emploi est très souvent différente.
Aussi, comme je l’ai indiqué dans la discussion générale, offrir un logement locatif aux personnes qui ne peuvent envisager d’accéder à la propriété doit rester la priorité. Ces personnes, en raison de leur situation et de la nature de leur emploi, quelquefois précaire, intérimaire ou sous contrat à durée déterminée, peinent à trouver un logement adapté à leurs besoins. Elles sont nombreuses, cela a été rappelé à plusieurs reprises : la France compte plus de trois millions de mal logés.
C’est pourquoi, à l’instar du rapporteur de la commission des affaires économiques, je pense qu’il convient, en la matière, de ne pas modifier les textes en vigueur.
M. le président. L’amendement no 151, présenté par M. Alduy, est ainsi libellé :
Supprimer les deuxième à sixième alinéas de cet article.
Cet amendement n’est pas soutenu.
L'amendement n° 459 rectifié bis, présenté par M. Revet, Mme Rozier, M. Bizet, Mme Henneron, M. Bailly, Mme Procaccia et M. Juilhard, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit les deuxième à dernier alinéas de cet article :
« À compter de l'année 2009, sont assimilés aux logements sociaux visés au présent article les logements neufs destinés à être affectés à l'habitation principale des personnes physiques :
« - si elles bénéficient d'une aide pour l'accession sociale à la propriété attribuée par une ou plusieurs collectivités territoriales ou groupement de collectivités territoriales du lieu d'implantation du logement.
« - si le revenu ne dépasse pas les plafonds de ressources prévus pour les titulaires des contrats de location-accession mentionnés au dixième alinéa du c) du 1 de l'article 257 du code général des impôts ou dès lors que les accédants à la propriété ne dépassent pas un plafond de ressources fixé par décret. »
La parole est à Mme Catherine Procaccia.
Mme Catherine Procaccia. Mes collègues et moi-même, dans l’espoir que le dispositif ne serait pas supprimé, avons tenté de l’améliorer en proposant que l’on tienne compte des plafonds de revenus et que soient visés les logements sociaux neufs qui seront affectés à l’habitation principale des personnes physiques.
Je profite de la présentation de cet amendement pour vous féliciter, madame la ministre. Bravo ! Vous avez réussi au cours de ce débat, me semble-t-il, à faire adopter l’idée de l’accession populaire à la propriété, ce qui n’était pas forcément évident auparavant. (Protestations sur les travées du groupe socialiste.) Je pense que vous n’aviez pas l’intention de toucher au sacro-saint article 55 et que vous vouliez simplement favoriser l’accession à la propriété de personnes dont les ressources sont limitées, mais qui ne sont peut-être pas parmi les plus démunies.
J’estime, pour ma part, qu’il faut revoir l’ensemble de l’article 55, et considérer non plus l’origine des fonds mais bien la situation des personnes.
Madame la ministre, j’espère que vous irez au-delà : c’est la première fois, en quatre ans de mandat sénatorial, que je vois un ministre oser aller aussi loin. (Applaudissements sur certaines travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. le président. L'amendement n° 462 rectifié bis, présenté par M. Revet, Mme Rozier, M. Bizet, Mme Henneron et M. Juilhard, est ainsi libellé :
Dans le deuxième alinéa de cet article, remplacer les mots :
pendant cinq ans
par les mots :
pendant la durée de remboursement du prêt contracté pour l'acquisition du logement
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 152, présenté par M. Alduy, est ainsi libellé :
Dans le dernier alinéa de cet article, remplacer les mots :
à compter de la signature du contrat de location - accession et jusqu'à la fin de la cinquième année civile qui suit la levée d'option
par les mots :
à compter de la signature du contrat de location - accession et jusqu'à la levée d'option
Cet amendement n'est pas soutenu.
Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Christine Boutin, ministre. Je confirme que le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat sur l’amendement de la commission.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 1, 89, 199, 549 et 595 rectifié bis.
Je suis saisi de deux demandes de scrutin public émanant, l'une, du groupe socialiste et, l'autre, du groupe CRC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 13 :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 335 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 168 |
Pour l’adoption | 314 |
Contre | 21 |
Le Sénat a adopté.
En conséquence, l’article 17 est supprimé (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.), et l’amendement n° 459 rectifié bis n’a plus d’objet.
Articles additionnels après l'article 17
M. le président. L'amendement n° 200, présenté par Mme Terrade, M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Schurch et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen et rattaché, est ainsi libellé :
Après l'article 17, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 302-9 du code de la construction et de l'habitation est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les maires dont les communes ne respecteraient pas l'objectif de réalisation d'au moins 20 % de logements locatifs sociaux fixés à l'article L. 302-8 seront déclarés inéligibles au terme du mandat municipal en cours. »
La parole est à Mme Odette Terrade.
Mme Odette Terrade. Dans son deuxième rapport, le comité de suivi de mise en œuvre du droit au logement opposable écrit que « l’État doit être sans faiblesse sur le principe de mixité sociale et sur son application ». Nous partageons bien évidemment cette préconisation, mais force est de constater que le Gouvernement a failli en la matière.
À notre avis, il est urgent de prendre des mesures afin d’avancer, comme l’indique si bien ce rapport, sur « un objectif sans cesse proclamé, mais sans cesse mis en cause ». Or l’une des difficultés pointées dans le rapport tient notamment « aux comportements individuels, lesquels trouvent parfois un relais dans les politiques locales protectionnistes ». Ainsi, certaines communes affichent un taux de réalisation de l’objectif de construction de logements sociaux particulièrement bas. Pour la période 2005-2007, un grand nombre de communes sont déclarées en état de carence. Certaines d’entre elles sont bien connues ici : les villes de Biarritz, Béziers, La Valette-du-Var, Cagnes-sur-Mer. D’autres sont autrement célèbres : Chamalières, Le Raincy, Vincennes, Antibes, Saint-Maur-des-Fossés.
Comme le note toujours le rapport précité, sept ans après l’adoption de la loi SRU, il n’est pas fait mystère du nombre important de communes qui ne respectent pas son article 55 : « la loi est bafouée de façon souvent clairement affichée et assumée par des représentants de l’autorité publique. »
Or ces élus de la République détournent l’esprit de cet article 55 en payant des amendes et s’achètent ainsi le droit de ne pas répondre aux besoins de la nation et de ses populations.
Afin de lutter contre cette défaillance républicaine, nous proposons de rendre inéligibles les maires qui ne remplissent pas leurs obligations en matière de logement social.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Dominique Braye, rapporteur. Comme je l’ai indiqué au cours de la discussion générale puis lors de la discussion des articles, toutes les propositions relatives à l’article 55, dans un sens ou dans l’autre, recueilleront un avis défavorable de la part de la commission.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier, rapporteur pour avis.
M. Philippe Dallier, rapporteur pour avis. Je veux simplement remercier notre collègue Odette Terrade d’avoir parfaitement illustré mon propos.
Par cet amendement, vous proposez, ma chère collègue, de rendre inéligibles les maires qui, au terme d’un mandat de six ans, n’auront pas respecté l’objectif de réalisation de 20 % de logements sociaux. Je ne qualifierai pas votre proposition, mais je vous remercie vraiment de votre démonstration !
Mme Odette Terrade. On examinera les raisons pour lesquelles ils n’y sont pas parvenus !
M. Philippe Dallier, rapporteur pour avis. Le rattrapage se fait sur vingt ans ! Vous proposez que les maires qui n’auront pas respecté l’objectif de réalisation d’au moins 20 % de logements sociaux au terme de leur mandat de six ans soient rendus inéligibles. Relisez votre amendement, ma chère collègue ! Merci en tout cas de démontrer ce que je dis !
Mme Odette Terrade. Je parle de ceux qui ne se seront pas engagés !
M. Philippe Dallier, rapporteur pour avis. Ce n’est pas écrit dans votre amendement !
M. Dominique Braye, rapporteur. Elle n’a pas proposé de les guillotiner…
M. le président. L'amendement n° 288, présenté par Mme Terrade, M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Schurch et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen et rattaché, est ainsi libellé :
Après l'article 17, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le I de l'article 1407 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« ...° Pour les immeubles vacants depuis plus de trois ans. »
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Mme Éliane Assassi. Monsieur le rapporteur, monsieur le rapporteur pour avis, ne jetons l’anathème sur personne !
Dans le cadre de la législation fiscale en vigueur, les propriétaires bénéficient d’une exonération d’imposition, qui porte sur l’imposition des logements vacants depuis moins de cinq ans, dans le cadre de la taxe d’habitation, et depuis moins de dix ans, dans le cadre du foncier bâti.
Concrètement, cela revient à offrir un avantage fiscal non négligeable aux propriétaires remettant un logement sur le marché locatif, en leur permettant de se délivrer de toute contribution locale, contribution qu’ils auraient normalement payée si le logement n’était pas vacant.
Mes chers collègues, cette incitation est-elle susceptible d’aider à remettre en location des logements vacants ou, est-ce une fois encore une mesure de nature à accorder un avantage fiscal non négligeable à quelques propriétaires ?
Très logiquement, il nous semble nécessaire de revenir sur cette disposition tout à fait discutable pour en restreindre sensiblement le champ d’application. La vacance de logements, notamment dans un contexte de hausse continue du montant des loyers du secteur privé, constitue en elle-même un formidable outil de spéculation immobilière, les nouveaux locataires se trouvant bien souvent confrontés à la stricte application des dispositions relatives à la fixation des loyers par référence aux prix du voisinage. L’avantage fiscal induit est donc parfaitement disproportionné, et nous ne pouvons que vous proposer, mes chers collègues, d’adopter cet amendement, afin de ramener l’avantage octroyé à des proportions plus raisonnables.
Enfin, observons que les pertes de recettes pour les collectivités locales subies du fait de l’application du cadre légal actuel ne sont pas gagées, ni compensées. En revanche, les demandeurs de logement social qui ne peuvent se loger dans ces logements vides constituent bien souvent une charge pour elles. Ne serait-ce que pour cette raison, il conviendrait de se poser la question d’une modification du traitement fiscal de la vacance locative.
Sous le bénéfice de ces observations, nous vous invitons, mes chers collègues, à adopter cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Dominique Braye, rapporteur. Il existe déjà une taxe sur les logements vacants. Depuis la loi ENL, nous avons adopté une disposition permettant d’assujettir à la taxe d’habitation tous les logements vacants depuis plus de cinq ans. Nous estimons que cet équilibre est satisfaisant et ne souhaitons pas aller au-delà.
En conséquence, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Christine Boutin, ministre. Pour les mêmes raisons, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 288.
(L'amendement n'est pas adopté.)
CHAPITRE IV
Dispositions relatives à la mobilité dans le parc de logements
Article 18
Avant le premier alinéa de l'article 22-1 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986, les deux alinéas suivants sont insérés :
« Le cautionnement ne peut être demandé que pour un logement loué par un bailleur personne physique ou par une société civile immobilière constituée exclusivement entre parents et alliés jusqu'au quatrième degré inclus.
« Dans tous les cas, dès lors que le bailleur a souscrit une assurance garantissant les obligations locatives du locataire, il ne peut exiger un cautionnement. »
M. le président. La parole est à Mme Odette Terrade, sur l'article.
Mme Odette Terrade. Nous abordons, avec l’article 18, un chapitre relatif aux questions de gestion locative.
Lorsque nous avons défendu, la semaine dernière, une motion tendant à opposer l’exception d’irrecevabilité sur le présent texte, nous avons oublié de parler plus précisément d’une question essentielle lors de l’élaboration de la loi : celle de la séparation du champ de l’article 34 et de l’article 37 de la Constitution.
En effet, pour nombre d’aspects, les dispositions prévues aux articles 18 à 21 sont bien plus proches du champ réglementaire – et encore ! – que du champ législatif. Franchement, que viennent faire dans la loi des dispositions relatives à la gestion locative pure, et quasiment – je pense notamment aux échanges de logements – au règlement intérieur et aux relations contractuelles entre bailleurs et locataires ?
Cette partie du texte est manifestement mal conçue et participe surtout d’un déséquilibre de plus en plus marqué dans les relations entre bailleurs et locataires.
Nous pensions, sans doute à tort, être parvenus, au fil du temps et des lois, depuis la loi Quilliot de 1982 jusqu’à la loi SRU de 2000, voire la loi instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale, à un modus vivendi équilibré, qui faisait place aux droits des uns et des autres. Mais nous sommes là en présence d’un texte en recul par rapport non seulement à la législation de 1982, mais aussi à la loi de 1948 sur les baux et loyers, dite loi Grimaud.
Avec ces articles, nous revenons plus de soixante ans en arrière !
L’article 18 ne prévoit pas de solution adaptée au problème du cautionnement. À défaut de le supprimer, il faut à tout le moins améliorer sa rédaction, et réexaminer la question à l'Assemblée nationale. En effet, pour ce qui concerne la protection éventuelle des bailleurs contre les impayés, aucune solution pertinente n’est proposée.
Telles sont les remarques que nous souhaitions formuler sur ce sujet.
M. le président. La parole est à Mme Odette Herviaux, sur l'article.
Mme Odette Herviaux. L’article 18 limite aux seules personnes physiques la possibilité d’exiger une caution et interdit tout cautionnement dès lors que le bailleur a souscrit une assurance garantissant les obligations du locataire. Ces dispositions sont à notre avis insuffisantes et même, sur certains points, regrettables
Par exemple, l’une de ces mesures aurait pour effet d’interdire aux bailleurs sociaux le recours au Loca-pass. Nous nous en sommes déjà émus lors de la discussion de l’article 3.
Mais il y a pis. À l’occasion d’une enquête réalisée en février 2007 par la Confédération syndicale du cadre de vie sur les documents et garanties exigées par les bailleurs de leurs candidats locataires, un certain nombre d’abus ont été mis en lumière.
Ainsi, à plusieurs reprises, cette association a remarqué qu’un propriétaire exigeait parfois plusieurs cautions solidaires, chaque personne se portant caution devant avoir un salaire très supérieur au montant du loyer. Par exemple, pour un loyer s’élevant à 500 euros, le candidat locataire doit trouver une ou plusieurs personnes ayant des revenus de 2 000 à 2 500 euros au moins. Sachant que le salaire médian, en France, est de 1 500 euros, on peut dire que ce type d’exigences constitue indéniablement un obstacle à la location ! C’est une discrimination flagrante, difficile à dénoncer par les candidats locataires, car ils sont en situation d’urgence, voire de concurrence dans les grandes villes.
La demande, légitime pour le bailleur, d’une caution ne doit entraîner aucune discrimination quant à l’accès à un logement. C’est pourquoi le nombre de cautions qu’un propriétaire peut demander ne doit à notre avis pas être fonction des revenus de celui qui se porte garant du cautionnement.
Nous vous proposerons des solutions plus efficaces, à savoir une garantie des risques locatifs réellement universelle et, surtout, l’affirmation dans la loi de l’interdiction de pratiques clairement discriminantes.
(M. Gérard Larcher remplace M. Roger Romani au fauteuil de la présidence.)