M. Nicolas About, rapporteur. Ce n'est pas exact !
M. Guy Fischer. On en reparlera, monsieur le président-rapporteur !
Les banques bénéficieraient de cette manne pour compenser avec l'épargne populaire les moins-values constatées ailleurs ! La source de financement du logement social serait en quelque sorte détournée pour permettre à la Société générale ou au Crédit agricole de « purger » les actifs « pourris » qu'ils ont acquis sur les titres de subprimes aux États-Unis. Ainsi, le tour serait joué !
A contrario de ces choix, qui sont d'ailleurs largement combattus par toutes - je dis bien toutes ! - les associations d'élus locaux, les associations de consommateurs, de multiples organisations syndicales du secteur financier et associations de promotion du droit au logement, nous proposons une réévaluation du plafond du livret A.
Cette réévaluation permettrait de mobiliser des ressources nouvelles pour le financement du logement social, et donc une ressource plus abondante susceptible d'être mise à moindre coût à disposition des bailleurs et organismes de logement social.
Les épargnants étant assez souvent - faut-il le souligner ? - des locataires ou des accédants modestes à la propriété, il y aurait tout intérêt, pour leur pouvoir d'achat, après avoir relevé - mais insuffisamment ! - le taux d'intérêt du livret A, de procéder au relèvement du plafond des placements.
Sous le bénéfice de ces observations, nous vous invitons, mes chers collègues, à adopter cet amendement. Monsieur le président, je vous remercie de votre mansuétude, car il est vrai que je l'ai exposé un peu longuement ...
M. le président. Personne ne saurait refuser au président Fischer la permission d'exposer jusqu'au bout, avec le talent que nous lui connaissons, un tel amendement ! (Sourires.)
Quel est l'avis de la commission sur cet amendement ?
M. Nicolas About, rapporteur. Comme vous, j'ai écouté et admiré le talent du président Fischer. Il avait envie de nous parler du livret A et il a su très habilement rattacher son propos au texte. Mais sans doute n'était-ce pas suffisant, car je n'ai pas véritablement le sentiment que la mesure qu'il nous propose contribuera à une augmentation immédiate du pouvoir d'achat.
J'ai bien compris qu'en relevant le plafond les intérêts augmenteraient, ce qui permettrait de relancer le logement qui, dès lors, serait moins cher.
M. Guy Fischer. De justes intérêts !
M. Nicolas About, rapporteur. Il s'agit certainement d'une bonne mesure sur le long terme ; il conviendra peut-être d'y penser à l'occasion de l'examen du projet de loi de finances. Mais une telle disposition n'a rien à voir avec un texte qui a pour objet de produire immédiatement une augmentation du pouvoir d'achat. Par conséquent, la commission est défavorable à cet amendement.
M. Alain Gournac. Un vrai cavalier !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Christine Boutin, ministre. Monsieur le président Fischer, j'ai bien entendu vos propos sur le livret A qui sont d'une certaine actualité. Il est vrai qu'il convient d'y réfléchir.
Vous proposez d'augmenter le plafond des livrets de type livret A. Permettez-moi, à ce sujet, de vous donner deux informations.
Les sommes collectées servent au financement du logement social. Mais, actuellement, les montants centralisés à la Caisse des dépôts et consignations excèdent en volume les besoins de financement existants. Par conséquent, il n'est ni impérieux ni urgent de relever le plafond du livret A.
En outre, le rapport de M. Camdessus, qui a été remis au Premier ministre voilà quelques jours, aura sans doute des conséquences, dont vous aurez à débattre avec d'autres ministres et peut-être même aussi avec moi.
En conclusion, monsieur le président Fischer, votre propos est intéressant, mais quelque peu décalé, car aucun besoin supplémentaire de financement ne se fait actuellement sentir et parce que l'ensemble du système du livret A est à l'étude et en cours d'arbitrage.
Par conséquent, j'émets un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Thierry Repentin, pour explication de vote.
M. Thierry Repentin. Il est vrai que le président Fischer nous a fait part avec talent de ses convictions s'agissant de ce que représente le livret A pour nos concitoyens.
M. Alain Gournac. Un immense talent !
Mme Isabelle Debré. J'allais dire « grand talent » ; il est « immense » ! (Sourires.)
M. Thierry Repentin. C'est vrai, je le reconnais comme vous !
Effectivement, 46 millions de nos concitoyens sont détenteurs de ce produit d'épargne, que l'on qualifie de « populaire ».
Sur 46 millions de livrets, seulement 6 % atteignent ce fameux plafond des 15 300 euros. Franchement, combien cela coûterait-il à l'État de permettre à nos concitoyens de placer un petit peu plus d'argent sur le livret A qu'ils ont ouvert à La Poste ou à la Caisse d'épargne ? S'agit-il d'un « refuge » pour ceux qui possèdent beaucoup d'argent ? Franchement non ! C'est le livret que l'on ouvre dans la perspective de voir un jour ses enfants devenir propriétaires, de faire un achat important, de compléter un crédit auprès d'une banque.
Madame la ministre, il n'y a pas urgence, dites-vous, car, à la Caisse des dépôts et consignations, les 46 millions de livrets produisent 118 milliards d'euros, alors que le logement ne nécessite que 80 milliards d'euros. C'est comme si vous nous disiez qu'il y a finalement 38 milliards d'euros en trop ! Mais c'est justement parce que ces 38 milliards d'euros supplémentaires sont placés sur le marché financier international que la Caisse des dépôts et consignations peut, grâce aux intérêts produits, proposer à des taux très bas 80 milliards de prêts aux communes et aux organismes de logements sociaux ! Ceux de nos concitoyens qui ont placé de l'argent sur leur livret A ignorent que, grâce à eux, on peut faire du logement social à un coût très bas dans notre pays.
Derrière la proposition du président Fischer, l'enjeu essentiel est de sauvegarder le montant de l'encours. Il faut même l'augmenter. En effet, on vient de décider l'augmentation à 3,5 % de la rémunération du livret A. Ce n'est pas un cadeau fantastique pour nos concitoyens car, déduction faite de l'inflation, le bénéfice net sera de 1 % !
Mme la ministre laisse entendre que, comme l'on rémunère un peu plus l'argent de nos concitoyens et que le coût de la ressource va être un peu plus élevé, le coût des crédits accordés aux organismes d'HLM va croître. Si le niveau d'encours augmente et que l'on passe de 15 300 euros à 20 000 euros, la Caisse des dépôts et consignations disposera elle-même de plus de fonds placés sur le marché international et donc de plus de ressources. Elle pourrait, grâce à l'augmentation de l'encours, continuer à proposer des taux très bas.
Par conséquent, la proposition du président Fischer comporte plusieurs objectifs que personne ne peut contester. La ressource est préservée et augmentée. Cela permet de financer le logement social en France et de donner à un certain nombre de nos concitoyens - les détenteurs des 6 % de livrets sur les 46 millions existants - une petite rémunération supplémentaire sur l'argent placé à La Poste ou à la Caisse d'épargne.
Porter le plafond de 15 300 euros à 20 000 euros, franchement, c'est une augmentation ridicule, madame la ministre, et je n'ose parler du livret d'épargne Orange qui aujourd'hui fait florès et dont le plafond est non pas 15 300 euros ou 20 000 euros, mais 3 millions d'euros !
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Christine Boutin, ministre. Comme cela a été dit par tous les observateurs, le taux, qui aurait dû être de 4 %, a été fixé à 3,5 % dans un souci d'équilibre et pour faire en sorte que la rémunération soit juste.
Voilà ce que je tenais à vous préciser, monsieur Repentin, à la suite de votre intervention.
M. le président. L'amendement n° 93, présenté par M. Fischer, Mme David, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Un rapport est remis par le Gouvernement sur le bureau du Sénat avant le 1er juillet 2008 portant sur les crédits à taux variable.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Compte tenu de la situation économique, sommes-nous à l'abri d'une crise du marché immobilier proche de celle que traversent d'ores et déjà les États-Unis avec l'affaire des subprimes, la Grande Bretagne ou l'Espagne ?
Cette question est au coeur du débat que nous ouvrons avec cet amendement et qui a été au demeurant largement ouvert lors de l'examen du projet de loi en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat, dit TEPA.
La société de propriétaires qu'appelait de ses voeux le candidat Nicolas Sarkozy, devenu Président de la République, est encore loin d'être une réalité. Il ne faudrait pas croire que la crise du logement puisse être jugulée uniquement par des aides à l'accession à la propriété, même si d'aucuns mettent en avant l'exemple de l'Espagne, qui compte 83 % de propriétaires, contre 53 % en France, en se dispensant évidemment de souligner la situation du logement dans ce pays, où la spéculation immobilière interdit aujourd'hui de se loger. De grandes manifestations ont eu lieu dans toute l'Espagne, afin d'exiger des logements locatifs à des prix accessibles, car 11 % des habitations seulement sont destinées à la location.
En France, l'État consacre 458 millions d'euros à la construction d'HLM et 770 millions d'euros au prêt à taux zéro, qui aide les personnes modestes à accéder à la propriété. Le dispositif du crédit d'impôt représente un budget colossal de 3,7 milliards d'euros, destinés en principe aux ménages, mais en réalité aux établissements de crédit, qui imposent des taux d'intérêt élevés, notamment des taux variables.
En fait, tout le monde l'a compris, vous venez à la rescousse des agences immobilières, qui dénoncent depuis plusieurs mois un marché très « mou ». Vous le savez, les taux d'intérêt sont en train de grimper, ce qui pèse sur les foyers modestes.
Ainsi, la presse spécialisée a indiqué que, en octobre 2005, un ménage qui empruntait 150 000 euros à 3,25 % sur vingt ans devait rembourser 851 euros par mois. À la fin de l'année 2007, on se retrouve avec un taux d'intérêt qui atteindra probablement les 4,7 %, et les mensualités 965 euros. Vous voyez la différence, mes chers collègues !
Les prêts à taux variable, qui constituent l'essentiel de l'encours des prêts accordés aux ménages accédants, ont donc très nettement augmenté. Or, selon les comptes financiers de la nation, la dette des ménages a augmenté de 11,3 % en 2006 et représente désormais 68,4 % de leurs revenus.
La conséquence de cet endettement record des Français est une hausse du nombre de dossiers de surendettement déposés auprès des guichets des commissions de surendettement de la Banque de France. Au cours du premier trimestre 2007, 51 093 dossiers ont été déposés ! Un tiers des nouveaux dossiers ont déjà fait l'objet d'une mesure de traitement de surendettement.
Du fait de ce durcissement des conditions d'accession à la propriété et parce que les conditions existantes réduisent de plus en plus de familles au surendettement, nous ne pouvons que vous inviter, mes chers collègues, à adopter cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Nicolas About, rapporteur. La commission s'en est remise à la sagesse du Sénat sur cet amendement, qui prévoit la remise d'un rapport par le Gouvernement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Christine Boutin, ministre. La récente remontée des taux d'intérêt a mis en difficulté certains de nos concitoyens qui avaient contracté un emprunt immobilier à taux variable non plafonné.
L'amendement n° 93 prévoit que le Gouvernement remettra au Sénat, avant le 1er juillet 2008, un rapport sur ce sujet. Il est vrai que cette question est au coeur des préoccupations du Gouvernement, qui a déjà pris un certain nombre d'initiatives.
Vous savez en effet, mesdames, messieurs les sénateurs, que les banques se sont engagées, le 29 octobre dernier, à la demande du Président de la République, à examiner individuellement la situation de chaque emprunteur ayant souscrit un crédit immobilier à taux variable non plafonné et rencontrant des difficultés de paiement à la suite de la remontée des taux.
Mme Lagarde remettra, dans le courant du mois de février, un rapport au Président de la République sur la mise en oeuvre de cet engagement par les banques. Un établissement de crédit, le Crédit Foncier, vient d'ailleurs de prendre des mesures favorables aux emprunteurs concernés. Ce rapport sera public et, naturellement, remis au Parlement.
Je rappelle par ailleurs que le député Frédéric Lefebvre a été chargé d'une mission parlementaire qui doit également rendre un rapport sur ce sujet.
En conséquence, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement, madame le sénateur ; à défaut, j'émettrai un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote.
M. Guy Fischer. Ce que l'on pourrait appeler le scandale de la Société générale nous renvoie, au-delà des fraudes commises par un certain nombre de personnes, à une interrogation plus générale : combien les grands établissements bancaires ont-ils perdu dans la crise des subprimes ?
M. Nicolas About, rapporteur. Cela n'a rien à voir !
M. Guy Fischer. Nous pensons aujourd'hui que le Gouvernement masque la vérité. Or nous souhaitons une véritable transparence sur cette crise car, de toute évidence - j'ai essayé d'en faire la démonstration tout à l'heure -, ce seront les Français les plus modestes qui paieront les engagements et les erreurs de gestion des banques. D'ores et déjà, de nombreux Français, notamment ceux qui bénéficiaient de prêts à taux variable, ont vu leurs mensualités augmenter de plusieurs centaines d'euros.
La vraie question est la suivante : combien de centaines de milliards d'euros ont-ils été perdus, à l'image de ce qui s'est passé en Amérique du Nord, en Grande-Bretagne, en Allemagne et en Espagne ?
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 93.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Articles additionnels après l'article 4 (précédemment réservés)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 45 rectifié, présenté par M. Repentin, Mmes Le Texier, Schillinger et Bricq, MM. Domeizel, Collombat, Godefroy et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 18 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Dans un délai de trois mois à compter de la promulgation de la loi n° du pour le pouvoir d'achat, un décret en Conseil d'État, pris après avis de la Commission nationale de concertation, fixe le montant maximum d'évolution des loyers des logements vacants définis au b de l'article 17 et des contrats renouvelés définis au c du même article. Ce décret précise sa durée de validité qui ne peut excéder trois ans et peut prévoir des adaptations particulières, notamment en cas de travaux réalisés par les bailleurs ou de loyers manifestement sous-évalués. »
La parole est à M. Thierry Repentin.
M. Thierry Repentin. Cet amendement vise à étendre la possibilité offerte au Gouvernement de limiter par décret la hausse des loyers à la relocation, c'est-à-dire à la signature d'un nouveau bail. En conséquence, nous proposons de modifier l'article 18 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989.
Aujourd'hui, le Gouvernement peut, par décret en Conseil d'État, fixer le montant maximum d'évolution des loyers et des renouvellements de loyers « dans une zone géographique où le niveau et l'évolution des loyers comparés à ceux constatés sur l'ensemble du territoire révèlent une situation anormale du marché locatif ». Il doit, pour ce faire, prendre avis auprès de la Commission nationale de concertation.
De fait, le 29 août dernier, le Gouvernement a pris la décision de limiter les loyers pour la ville de Paris, l'ensemble des communes des départements des Hauts-de-Seine, de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne et une partie des communes de Seine-et-Marne. Cette mesure s'appliquera pendant un an, soit jusqu'au 29 août prochain.
Mais il semble que les tensions sur le marché locatif soient importantes partout, et notamment dans d'autres grandes métropoles régionales. Pour des raisons conjoncturelles parfois, les loyers de certaines villes qu'on croirait épargnées ont subi en 2007 des augmentations de plus de 5 % : à Montpellier, la hausse a atteint 5,04 % ; à Grenoble, 5,51 % ; à Limoges, 7,81 % ! Les augmentations constatées dans les départements voisins de Paris et concernés par la décision du Gouvernement n'atteignent pas toujours ces niveaux en 2007. Pourtant, madame la ministre, vous avez considéré, en août dernier, qu'elles justifiaient d'être encadrées.
J'en conviens volontiers avec vous, la situation de la ville de Paris est particulière, compte tenu de son attractivité. Mais admettez alors avec moi que les augmentations que je viens de citer ne sont pas réservées à la région parisienne et que les zones littorales et certains territoires de montagne, notamment, sont aussi durement touchés. Partout, ces hausses pèsent sur les budgets des ménages.
Cet amendement vise à faire en sorte que l'État, au plus haut niveau, se penche sur ce problème et qu'un décret en Conseil d'État soit pris afin de tenir compte de la situation de l'ensemble des territoires.
Selon moi, il prévoit une mesure tout à fait complémentaire à celles que vous nous avez proposées et destinée à limiter les hausses des loyers pour les locataires en cours de bail. Pour ma part, je ne comprends pas que les locataires de Paris et de la région d'Île-de-France soient plus sécurisés que les locataires de province !
M. le président. L'amendement n° 125 rectifié, présenté par Mme Terrade, M. Fischer, Mme David, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 18 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs est ainsi rédigé :
« Art. 18 - Dans la zone géographique où le niveau et l'évolution des loyers comparés à ceux constatés sur l'ensemble du territoire révèlent une situation anormale du marché locatif, un décret en Conseil d'État, pris après avis de la Commission nationale de concertation, peut fixer le montant maximum d'évolution des loyers des logements vacants définis au b de l'article 17 et des contrats renouvelés définis au c du même article.
« Ce décret précise sa durée de validité qui ne peut excéder deux ans et peut prévoir des adaptations particulières, notamment en cas de travaux réalisés par les bailleurs ou de loyers manifestement sous-évalués. »
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Cet amendement a le même objet que l'amendement précédent, puisqu'il vise à réduire la tension sur le marché du logement, qui se traduit malheureusement par la flambée des loyers.
Nous l'avons dit et le redirons tant que cela s'avérera nécessaire, le poste « logement » constitue sans la moindre équivoque, depuis plusieurs années, l'un des principaux éléments de dépense des ménages.
Les charges liées au logement constituent même, pour bien des familles modestes, un volume important de leurs dépenses mensuelles, pouvant mobiliser jusqu'à 50 % du revenu du ménage.
Modérer l'envolée des charges liées au logement, qui sont parfaitement incompressibles, est donc l'un des éléments déterminants de défense du pouvoir d'achat des particuliers. Cet amendement s'inscrit donc bien au coeur de notre débat.
Il nous permet en effet de poser la question de l'évolution des loyers du secteur privé. En mettant en place l'indice de référence des loyers, M. Borloo a voulu, comme nous l'avons souligné, résoudre la quadrature du cercle que représente la situation du logement et les rapports locatifs en général.
Nous tenons cependant à souligner que d'autres possibilités, notamment réglementaires, existent pour contrer le processus de hausse des loyers. Thierry Repentin vient de le rappeler, l'article 18 de la loi Mermaz-Malandain tendant à améliorer les rapports locatifs prévoit que, « dans la zone géographique où le niveau et l'évolution des loyers comparés à ceux constatés sur l'ensemble du territoire révèlent une situation anormale du marché locatif, un décret en Conseil d'État, pris après avis de la Commission nationale de concertation, peut fixer le montant maximum d'évolution des loyers [...] ». Cela signifie que nous pouvons, par exemple, décider d'un blocage des loyers dans une région où cela apparaît nécessaire.
Cet amendement vise donc à émettre un signal fort en direction des locataires, en leur indiquant clairement qu'il est question de mettre un terme, par la décision publique, à l'aggravation d'une situation qui pèse aujourd'hui lourdement sur la mise en oeuvre du droit au logement.
Nous sommes engagés, collectivement, dans la mise en oeuvre de la loi instituant le droit opposable au logement, mais nous ne disposons pas des moyens pour la concrétiser, ne serait-ce que parce que le niveau des loyers, dans les principales agglomérations du pays, à commencer par Paris et sa banlieue, est sans commune mesure avec la capacité financière réelle des ménages demandeurs.
Le blocage temporaire des loyers que nous proposons, qui tient compte de l'extrême tension sur le marché locatif, vise à ramener ce marché dans des limites plus acceptables.
Il importe pour nous qu'au travers de cette mesure une offre locative diversifiée puisse être constituée en direction des très nombreux demandeurs de logement que compte notre pays.
Sous le bénéfice de ces observations, nous vous invitons, mes chers collègues, à adopter cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Nicolas About, rapporteur. La commission est défavorable aux amendements nos 45 rectifié et 125 rectifié, qui ont le même objet.
Elle estime en effet que la révision annuelle permet une plus grande souplesse et une plus grande réactivité. Elle n'est donc pas favorable à des amendements dont l'adoption aurait pour conséquence de rigidifier l'évolution des loyers pour plusieurs années, en portant la validité du décret de un an à deux ans, voire à trois ans.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Christine Boutin, ministre. Mon argumentation ne sera pas longue car, depuis ce matin, nous avons pu constater une importante différence d'appréciation entre nous concernant le blocage des loyers.
Selon moi, un tel blocage pourrait avoir des conséquences très graves sur la fluidité du marché, qui exige de remettre régulièrement des logements sur le marché. Il faut donc véritablement trouver un équilibre entre les signaux donnés aux locataires et ceux qui sont donnés aux propriétaires. Or vous proposez, monsieur Repentin, madame David, d'envoyer un signal négatif en direction des propriétaires.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur ces deux amendements. Je vous le répète, mesdames, messieurs les sénateurs, le texte que nous examinons aujourd'hui contient bien des mesures - que je soutiens avec passion - qui sont plutôt favorables aux locataires.
M. le président. La parole est à M. Thierry Repentin, pour explication de vote sur l'amendement n° 45 rectifié.
M. Thierry Repentin. Je ne peux accepter les termes utilisés tant par M. le rapporteur que par Mme la ministre.
Vous affirmez, monsieur le rapporteur, que ces amendements risquent de « rigidifier » le marché, ce qui aurait des conséquences graves sur les loyers.
Si tel était vraiment le cas, pourquoi utiliser à Paris et dans la région d'Île-de-France un mécanisme destiné à protéger les locataires des tensions insoutenables du marché et laisser les locataires en province confrontés à la seule loi du marché ?
Si vous jugez dangereux ce mécanisme, ne l'utilisez pas dans la région d'Île-de-France, mais, s'il vous paraît pertinent, appliquez-le sur l'ensemble du territoire ! En tant que représentants des territoires de France, nous avons le droit, me semble-t-il, d'estimer que la loi ne doit pas privilégier une région par rapport aux autres.
Pour ma part, je regrette d'ailleurs que les cabinets ministériels et les directions d'administration centrale ne comptent pas plus de provinciaux !
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Christine Boutin, ministre. Monsieur Repentin, j'ai à la fois le regret et la joie de vous contredire, car je vous informe qu'un grand nombre de membres de mon cabinet sont provinciaux ; ainsi, le conseiller qui est à côté de moi sur ce banc vient de Saint-Etienne ! (Sourires.)
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.
Mme Annie David. Je regrette les avis défavorables émis par la commission et par le Gouvernement.
En effet, la mesure que nous proposons aurait véritablement un impact direct sur le pouvoir d'achat de l'ensemble des locataires : c'est chaque mois qu'ils pourraient voir celui-ci augmenter puisqu'ils n'auraient pas à subir des hausses de loyer.
En revanche, même si vous nous affirmez, madame la ministre, que le dispositif que vous proposez est favorable aux locataires, il ne le sera qu'une seule fois, car c'est au moment de la conclusion du bail que vous leur permettez de réduire de deux mois à un mois le montant maximum du dépôt de garantie, et l'on ne conclut pas de baux tous les mois, ni même tous les ans !
Il est réellement dommage que vous ne permettiez pas à chacun des locataires de notre pays de bénéficier de l'augmentation de leur pouvoir d'achat que nous proposons.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Nicolas About, rapporteur. J'ai le sentiment, monsieur Repentin, que vous faites semblant de ne pas comprendre ce que nous voulons dire.
Je m'explique : l'amendement n° 45 rectifié et l'amendement n° 125 rectifié visent tous deux à allonger la durée de validité du décret, le premier à trois ans, le second, à deux ans. Ce faisant, ils rigidifient les règles existantes, puisque la loi en vigueur prévoit que le décret peut bloquer les loyers pendant un an. En triplant cette durée, vous durcissez le texte.
M. le président. L'amendement n° 70, présenté par M. Fischer, Mme David, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Il est créé une Commission nationale pour l'autonomie des jeunes, placée auprès du Premier ministre. Cette commission, dont la composition est arrêtée par voie réglementaire, comprend des parlementaires, des élus locaux, des représentants de l'État, des organisations représentatives des employeurs et des salariés, d'associations de chômeurs, des mutuelles, de la Caisse nationale des allocations familiales, du Conseil national de la jeunesse, des organisations représentatives des étudiants et des lycéens, des fédérations de parents d'élèves, et des personnalités qualifiées.
Cette commission a pour mission :
- de faire le bilan des dispositifs assurant des ressources propres aux jeunes de seize à vingt-cinq ans ;
- d'étudier la création d'une allocation d'autonomie pour les jeunes de seize à vingt-cinq ans, ainsi que les critères de son attribution sur la base notamment d'un projet personnel de formation et d'accès à l'emploi ;
- de proposer la mise en place d'un dispositif expérimental dans plusieurs départements, après consultation des conseils départementaux de la jeunesse, et dont l'évaluation servira de base à ses travaux et à la généralisation de ce principe.
Elle consulte le Conseil national de la jeunesse précité.
Elle remettra son rapport au Premier ministre avant le 31 juin 2008. Ce rapport est transmis au Parlement.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Longtemps regardée comme une sorte d'âge d'or, la jeunesse est aujourd'hui considérée par beaucoup de jeunes adultes comme une période difficile.
En effet, la situation des jeunes est moins confortable que par le passé : ils trouvent plus tardivement et plus difficilement les moyens de conquérir ce qu'ils considèrent comme les attributs de la vie d'adulte, à savoir l'accès à l'emploi, au logement, aux loisirs.
En conséquence, et presque naturellement, ils se tournent vers leurs aînés et les pouvoirs publics pour que leur longue marche vers l'autonomie soit facilitée.
À l'heure actuelle, il est délicat de peindre un tableau uniforme de la situation des jeunes adultes. Néanmoins, un constat peut être fait pour tous : l'insertion dans la vie active, source de l'autonomie financière, est moins précoce que par le passé. Conséquence de l'effort réalisé par la nation pour que les jeunes soient mieux formés, pour qu'un plus grand nombre d'entre eux aient accès à une formation supérieure, la massification de l'enseignement a une portée incontestable : en moyenne, on entre à l'école à trois ans et on en sort à vingt-deux ans.
Or la période des études, qui ne donne pas lieu à une rémunération, est allongée, alors même que les besoins de ces jeunes sont, pour beaucoup, des besoins d'adultes : avoir un logement, réaliser leur vie affective, accéder à des loisirs, à la culture.
L'allongement de la durée des études n'est pas seul en cause pour expliquer leur longue route dans la quête de leur autonomie financière.
À la sortie de leurs études, courtes ou longues, nombreux sont ceux qui éprouvent de réelles difficultés pour s'insérer sur le marché du travail. La précarisation du travail des jeunes est un phénomène constaté et déploré par tous. Les chiffres sont sans appel : en 1998, 11,9 % de la population active était au chômage, le taux atteignant 20,9 % parmi les moins de vingt-cinq ans.
Pour ces jeunes, mais en outre pour ceux qui sont titulaires d'un contrat à durée indéterminée, le niveau de rémunération est faible, inférieur à celui qui était perçu par leurs parents au même âge.
Nous vous proposons, mes chers collègues, d'adopter le principe de la création d'une commission qui serait chargée de proposer au Premier ministre un rapport sur la réalisation d'un projet d'allocation d'autonomie jeunesse, indiquant à la fois les coûts de cette mesure et son financement, mais également - et c'est très important - son intérêt pour les jeunes et les bénéfices qui en résulteraient pour notre économie.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Nicolas About, rapporteur. Cette proposition intéressante mérite mieux que d'apparaître comme un cavalier dans le présent projet de loi. Elle devrait faire l'objet d'une discussion dans un texte spécifique ou relatif à la famille.
Estimant qu'il n'est pas souhaitable de la retenir dans le texte dont nous débattons actuellement, la commission émet un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Serge Dassault, rapporteur pour avis de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Cette opération serait source de dépenses nouvelles, ce qui nécessiterait un budget supplémentaire que nous sommes loin de pouvoir obtenir.
Je suis donc contre cette disposition quel que soit l'intérêt qu'elle présente, parce qu'elle va coûter de l'argent et que l'on n'a plus d'argent, vous le savez très bien ! (Rires.)
M. Thierry Repentin. Vous parlez à titre personnel ?
M. Nicolas About, rapporteur. À titre personnel, M. Dassault peut faire un effort, mais tout de même ! (Nouveaux rires.)
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Christine Boutin, ministre. Cet amendement présente un intérêt certain. Toutefois, il s'agit encore de créer une nouvelle commission, alors que nous sommes engagés dans un effort général de simplification.
En réalité, vous proposez un dispositif très proche d'un « RMI-jeune », mais non financé. À cet égard, dans des propos très directs, M. le rapporteur pour avis vous a décrit la situation budgétaire actuelle.
Par ailleurs, je le répète, la philosophie qui sous-tend l'action du Gouvernement est d'aider les jeunes à accéder à l'autonomie et à la responsabilité en les soutenant et en stimulant leur goût d'entreprendre. C'est tout le sens, au-delà de l'augmentation du nombre et du montant des bourses accordées aux étudiants, de la mise en place d'aides remboursables, garanties par l'État, destinées aux jeunes souhaitant financer leur formation.
Pour l'ensemble de ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable.
M. le président. L'amendement n° 121, présenté par M. Fischer, Mme David, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le deuxième alinéa de l'article L. 822-1 du code de l'éducation, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Afin d'accomplir sa mission sociale, le réseau des oeuvres universitaires ne peut exiger des étudiants locataire le versement d'une caution ».
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin